Mme Dominique Voynet. Après avoir vainement tenté de supprimer l’article 1er, nous proposons, par cet amendement, de le réécrire.

Nous souhaitons redéfinir les objectifs de ce texte en insistant sur la nécessaire amélioration de la qualité de vie des habitants, la réduction des inégalités sociales et territoriales ainsi que l’amélioration des équipements et des services publics, autant d’objectifs que nous jugeons déterminants pour l’attractivité économique des territoires.

Il est en effet possible de faire de notre région un territoire d’excellence en matière de services publics, de développement du logement social et de transports publics accessibles permettant le désenclavement de certains quartiers. Les inégalités socio-économiques doivent être le principal angle d’attaque d’un projet d’aménagement comme celui-ci, ce qui n’est absolument pas le cas dans ce texte.

Vous allez sans doute m’opposer, monsieur le secrétaire d’État, votre rôle de développeur, ou d’aménageur, et me dire que j’attire votre attention sur des considérations sociales qui sont hors sujet dans ce débat. Pourtant, vous savez bien que le développement économique, même s’il permet de créer de nouveaux emplois et de réduire les inégalités dans nos quartiers, ne portera ses fruits qu’à moyen terme, et que les considérations sociales, notamment le degré de tranquillité publique, de qualité de vie et de performance des services, pèsent de tout leur poids lors du choix par les entreprises de leur lieu d’implantation.

De plus, il est indispensable de rappeler que les aménagements que nous appelons de nos vœux doivent se faire en tenant compte de la préservation de l’environnement. Le respect des espaces naturels et des terres agricoles doit rester au cœur du débat.

Prenons l’exemple de Londres, dont on ne peut que constater l’attractivité économique. La capitale britannique a depuis longtemps déjà compris l’importance d’allier confort de vie et respect de l’environnement, et ses nouveaux quartiers, notamment celui de BedZED, ou Beddington Zero Energy Development, en sont la preuve irréfutable. Achevé en 2002, le plus grand éco-quartier du Royaume-Uni comprend des habitations, des bureaux, des espaces verts et des services, tout cela à quelques minutes en transports du centre de Londres. Vous me direz que la mixité sociale pourrait encore être améliorée au sein de ce quartier. J’en conviens volontiers, et je pense que nous devons imaginer des projets qui, tout en retenant le meilleur des quartiers écologiquement exemplaires – je pense également à l’expérience du quartier Vauban, à Fribourg-en-Brisgau –, garantiraient la mixité sociale et la diversité des activités.

J’ajoute qu’un système de vente directe avec les agriculteurs locaux a été mis en place au sein du quartier de BedZED, afin de ne pas sacrifier les terres agricoles qui, demain, seront précieuses, y compris à proximité immédiate de nos villes.

Temps de transport réduit grâce à un aménagement où les zones de travail et les zones d’habitat se confondent, maintien d’une agriculture locale, volonté de réduire notre empreinte carbone : votre projet est très loin de ce modèle, monsieur le secrétaire d’État, en dépit des engagements du Grenelle de l’environnement.

Enfin, il est indispensable que des représentants élus des populations, des collectivités territoriales et de l’ensemble des institutions compétentes et légitimes – la région, les départements, les communes, les agglomérations, le STIF – soient consultés et associés au processus décisionnel.

La première richesse de la région d’Île-de-France est sa population. C’est pourquoi il est indispensable que l’aménagement du territoire soit pensé en fonction des besoins et des attentes des Franciliens. C’est ce que nous défendons au travers de cet amendement, que nous vous invitons à soutenir, mes chers collègues.

M. le président. L'amendement n° 239, présenté par Mme Voynet, M. Desessard, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery et M. Muller, est ainsi libellé :

Alinéas 1 et 2

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

Le projet du Grand Paris consiste en la création d'un réseau de transports dont le financement est assuré par l'État, reliant des pôles économiques et des aéroports. Les collectivités territoriales et les citoyens sont associés à l'élaboration et à la réalisation de ce projet.

La parole est à Mme Dominique Voynet.

Mme Dominique Voynet. Cet amendement vise à modifier les alinéas 1 et 2 de l’article 1er, afin de les mettre en conformité avec le contenu réel du projet de loi.

En dépit de votre bonne volonté affichée, monsieur le secrétaire d’État, nous sommes bien loin d’un « projet urbain, social et économique d’intérêt national ». Rien dans ce texte ne pourra malheureusement « réduire les déséquilibres sociaux, territoriaux et fiscaux au bénéfice de l’ensemble du territoire national ». Quant à la place réservée aux « collectivités territoriales » et aux « citoyens », elle est bien faible, comme nous l’avons déjà démontré. J’espère d’ailleurs que nos amendements ultérieurs, qui vont dans le sens d’un processus décisionnel plus participatif, retiendront votre attention, mes chers collègues.

À la lecture de ce projet de loi, force est de constater que la majeure partie du texte se focalise sur un nouveau système de transports, le métro automatique dit « Grand huit ».

Soyons honnêtes avec nos concitoyens, le Grand Paris ne se fera pas au bénéfice de l’ensemble du territoire national. La mise en place de ce nouveau métro et l’aménagement du plateau de Saclay n’auront aucune incidence sur le logement des Franciliens, la réduction de la fracture territoriale ou le chômage.

Aussi, je vous propose de coller à la réalité de ce projet de loi en écrivant noir sur blanc que le projet de Grand Paris se résume à la création d’un réseau de transports reliant des pôles économiques et des aéroports.

M. le président. L'amendement n° 3, présenté par Mme Dumas et MM. P. Dominati et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :

Alinéa 1, première phrase

Remplacer les mots :

la ville de Paris et les grands territoires stratégiques de la région d'Île-de-France

par les mots :

les grands territoires stratégiques de la région d'Île-de-France, au premier rang desquels Paris et le cœur de l'agglomération parisienne,

La parole est à Mme Catherine Dumas.

Mme Catherine Dumas. À travers cet amendement, nous souhaitons rappeler le poids de la zone centrale, à savoir le cœur d’agglomération, dans le projet du Grand Paris, et faire en sorte que le rôle déterminant de Paris soit clairement réaffirmé dans le texte de loi.

Je rappelle en effet que 5 % du territoire francilien regroupe plus de 50 % de la population et 70 % des emplois de la région, et qu’il enregistre 90 % des déplacements.

M. le président. L'amendement n° 106 rectifié, présenté par MM. P. Dominati et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Le projet de Grand Paris se concrétisera par une réforme concernant la gouvernance, le périmètre et le budget affecté à cette entité. Le Parlement sera saisi au plus tard avant l'application de la réforme des collectivités territoriales en 2014.

La parole est à M. Philippe Dominati.

M. Philippe Dominati. Par cet amendement, je souhaite que le Gouvernement réponde à la question de la gouvernance, du périmètre et du budget alloué à ce projet, qui a déjà été posée à plusieurs reprises.

La résolution avec laquelle le Gouvernement s’est engagé dans la réforme territoriale, qui concerne l’ensemble du territoire, et que nous sommes plusieurs à avoir soutenue dans cet hémicycle, semble démontrer l’importance de ces éléments dans la France contemporaine. Il serait paradoxal d’être à la traîne pour l’Île-de-France, alors que notre ambition est plus forte encore. Combien de temps nous faudra-t-il encore attendre ?

J’ai évoqué hier la réussite des transports régionaux : elle est réelle dans toutes les régions, sauf dans celles où l’État veut garder la prépondérance.

Je voudrais donc savoir si le calendrier législatif prévoit une place pour la région d’Île-de-France.

Il y a une différence entre une loi à caractère politique et une loi purement technique, le but de cet amendement étant que nous nous engagions sur la première voie.

M. le président. L'amendement n° 242, présenté par Mme Voynet, M. Desessard, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery et M. Muller, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

Les contrats de développement territorial sont définis et mis en œuvre conjointement par l'État, les communes et leurs groupements dans un but de dynamique territoriale et de développement durable. Ces contrats participent à l'objectif de construire chaque année 70 000 logements, conformément aux objectifs du schéma directeur de la région d'Île-de-France. Afin de répondre aux besoins de la population francilienne, ils devront prévoir la production d'au moins 30 % de logements sociaux sur chaque territoire concerné.

La parole est à Mme Dominique Voynet.

Mme Dominique Voynet. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez expliqué hier que les contrats de développement territorial n’avaient pas pour objet de vider de leur sens et de leurs moyens financiers les contrats de projets, élaborés conjointement par l’État et la région. M. le rapporteur l’a également confirmé, de façon très passionnée.

Alors que d’aucuns ont dénoncé un certain saupoudrage dans le contenu des contrats de projets, je tiens à préciser que l’État pèse de tout son poids afin que des éléments, qui n’étaient pas prioritaires pour la région, et dont le financement lui incombait exclusivement, soient inscrits dans ces contrats et bénéficient du soutien financier de la région ainsi que, le cas échéant, d’autres collectivités. C’est évidemment le cas des TGV dans la plupart des régions, mais aussi de la vie étudiante dans la nôtre, ainsi que d’autres politiques essentielles à notre pays, que les régions financent de bonne grâce, étant donné leur caractère essentiel.

Vous nous expliquez donc que ces contrats de développement territorial ne concurrencent pas la région, mais qu’ils seront cependant mis en œuvre conjointement par l’État et les communes, sans la participation de la collectivité régionale.

Je souhaite, par cet amendement, vous prendre au mot, en réécrivant, dans un sens peut-être plus conforme à l’usage français, l’alinéa en question.

Il me semble absolument indispensable de faire en sorte que l’objectif de construction de 70 000 logements chaque année en Île-de-France soit conforme au schéma directeur de la région.

Les Franciliens considèrent la politique du logement comme une priorité absolue. Ils ont redit, pendant la récente campagne pour les élections régionales, leurs attentes et leurs inquiétudes. Il ne faut pas laisser planer l’idée que l’État pourrait décider seul des implantations de logements, car c’est bien sur le travail élaboré en commun par les acteurs locaux dans le cadre du SDRIF que nous pourrons nous appuyer.

Par ailleurs, je vous propose d’ajouter une garantie de construction de logements sociaux. En 2009, 28 % des candidats à un logement social ont rempli une demande en Île-de-France. La région est évidemment en flux tendu en matière de logements. Nous souhaitons donc préciser que les contrats de développement territorial devront prévoir la production d’au moins 30 % de logements sociaux sur chaque territoire concerné.

M. le président. L'amendement n° 2 rectifié, présenté par Mme Dumas et MM. P. Dominati et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Ce projet intègre un objectif de croissance économique, afin de soutenir la concurrence des autres métropoles mondiales.

La parole est à Mme Catherine Dumas.

Mme Catherine Dumas. Cet amendement concerne la croissance économique de l’Île-de-France.

Nous souhaitons en effet intégrer dans l’article 1er du texte de loi un objectif de croissance, qui serait en moyenne comparable à celui que l’on observe dans les grandes capitales européennes.

M. le président. L'amendement n° 244, présenté par Mme Voynet, M. Desessard, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery et M. Muller, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

Le réseau de transports du Grand Paris est étroitement articulé avec le réseau préexistant en Île-de-France. Il s'inscrit dans le maillage du réseau ferroviaire et routier national afin de réduire les déséquilibres territoriaux.

La parole est à Mme Dominique Voynet.

Mme Dominique Voynet. Mme Bricq et moi-même évoquions à l’instant en aparté quelques hauts faits du passé de M. le rapporteur concernant des contrats passés entre l’État et la région à propos de réseaux de transport public, mais Mme Bricq y reviendra le moment venu.

À propos de l’amendement n° 244, je souligne que plusieurs architectes consultés dans le cadre du projet du Grand Paris ont rappelé l’importance du maillage du réseau de transports en Île-de-France.

En effet, pour développer un système efficace, il est important de privilégier les correspondances entre les différents moyens de transports afin de faciliter la vie des Franciliens et, en outre, de rendre plus accessibles des zones économiques parfois engorgées, comme le quartier de La Défense – au passage, vous voyez que nous nous préoccupons non pas seulement du logement, mais aussi des difficultés de desserte de certains quartiers, dont la vitalité économique est reconnue.

Le maillage des transports serait le meilleur moyen d’améliorer la mobilité francilienne. Comme l’affirmait, en 2007, Réseau Ferré de France, cela permettrait des déplacements plus rapides et plus simples de banlieue à banlieue, des trains moins chargés en zones denses et une diminution de la congestion et de la pollution routière.

Adaptons donc notre réseau de transports et développons un schéma en « toile d’araignée », dans toute la région, et non pas seulement vers les zones de développement économique.

Nous l’avons déjà dit : le projet de Grand huit favorise les déplacements travail-travail, alors même qu’ils représentent une très faible proportion du total des déplacements. De surcroît, même s’il améliorait les déplacements des habitants de l’Ouest parisien, il resterait très inégalitaire pour les habitants de l’Est parisien, comme Jacques Mahéas l’a bien montré.

Pour cette raison, nous vous proposons, par cet amendement, de réaffirmer l’importance de l’articulation entre les transports existants et les transports à venir, afin de réduire les déséquilibres territoriaux, dans le cadre du SDRIF, bien évidemment.

M. le président. Le sous-amendement n° 303, présenté par M. Revet, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 3, deuxième phrase de l'amendement n° 244

Après le mot :

ferroviaire

insérer le mot :

, fluvial

II. - Alinéa 3 de l'amendement n° 244

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Il doit permettre des liaisons plus rapides et plus fiables entre chacune des régions de l'hexagone et éviter les engorgements que constituent les transits par la région d'Île-de-France.

La parole est à M. Charles Revet.

M. Charles Revet. L’essentiel des actions prévues dans le projet du Grand Paris concerne bien évidemment la région francilienne.

Mais, lorsque ce projet a été annoncé, le Président de la République a également manifesté clairement sa volonté d’ouvrir Paris et sa région sur le grand large, notamment en développant les grands ports de l’axe Seine que sont Paris, Rouen ou Le Havre. Ce développement nécessite des moyens de transports, d’où le projet de créer une ligne à grande vitesse, qui doit desservir tant la Basse-Normandie que la Haute-Normandie – une région à laquelle je sais que vous êtes également très attaché, monsieur le président, comme nos collègues Patrice Gélard et Catherine Morin-Desailly.

Afin que ces transports fonctionnent, qu’il s’agisse d’acheminer des voyageurs ou des marchandises, une bonne coordination s’avère nécessaire, afin que les trains puissent circuler le plus vite possible, sur tout le territoire national et dans le reste de l’Europe.

J’ai donc déposé un premier amendement, qui a été adopté par la commission. Mme Voynet propose pour sa part une nouvelle version de l’alinéa 5 de l’article 1er du projet de loi. Je ne suis pas opposé aux dispositions de l’amendement qu’elle vient de présenter. Néanmoins, si sa rédaction met en évidence la nécessaire coordination des moyens de transports dans la région parisienne, elle me semble négliger quelque peu les interconnexions routières, fluviales et ferroviaires avec l’ensemble des autres régions.

C’est pourquoi j’ai déposé ce sous-amendement, qui tend à ajouter le terme « fluvial » aux termes « ferroviaire » et « routier », mais aussi à préciser que ces interconnexions doivent permettre d’assurer des liaisons plus rapides entre les régions, sans devoir obligatoirement passer par Paris.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. L’amendement n° 10 vise à rédiger de façon différente l’article 1er, en évoquant notamment le conditionnement de l’aide publique aux entreprises à la réalisation d’objectifs d’amélioration qualitative de l’offre d’emploi et de l’offre de formation, sujets tout à fait extérieurs au texte dont nous discutons. Par conséquent, l’avis de la commission est défavorable.

Il en est de même sur l’amendement n° 238, qui ne correspond pas au texte adopté par la commission.

La commission émet également un avis défavorable sur l’amendement n° 239, qui vise à réduire le Grand Paris à un simple projet de transport, alors qu’il dépasse largement cet objectif.

Sur l’amendement n° 3, la commission émet un avis favorable pour remettre au premier rang Paris et le cœur de l’agglomération parisienne.

L’amendement n° 106 rectifié est un amendement d’appel et un amendement injonctif à l’égard du Gouvernement. Il n’est pas conforme à la Constitution. Par conséquent, je demande à M. Dominati de le retirer, une fois qu’il aura entendu les explications de M. le secrétaire d’Etat.

Sur l’amendement n° 242, la commission émet un avis défavorable car il conditionne la création de logements aux objectifs du SDRIF, conclu en 1994 et qui commence à être un peu obsolète.

Mme Dominique Voynet. Non, pas le nouveau schéma !

M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Sur l’amendement n° 2 rectifié, l’avis de la commission est favorable.

Sur l’amendement n° 244, la commission émet un avis favorable car il montre bien l’articulation avec le réseau préexistant.

Enfin, s’agissant du sous-amendement n° 303, qui vise à compléter l’amendement n° 244 en insérant le mot « fluvial » et qui reprend la fin du texte de la commission, j’émets également un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Sur les amendements nos 10 et 238, le Gouvernement partage l’avis défavorable de la commission.

Il est également défavorable à l’amendement n° 239, qui réduit l’ambition du projet à la réalisation d’un métro.

Sur l’amendement n° 3, le Gouvernement, rejoignant la position de la commission, émet un avis favorable. En effet, nous avons intégré, dès le départ, la préoccupation exprimée par Mme Dumas. C’est d’ailleurs ce qui a justifié la forme de la double boucle : il nous est apparu indispensable, dès le début de nos réflexions, de penser à un réseau qui n’évite pas la ville de Paris et qui crée autour d’elle non pas un nouveau périphérique mais un réseau permettant de relier le cœur de Paris et les autres territoires stratégiques de la région ainsi que les territoires stratégiques entre eux.

Sur l’amendement n° 106 rectifié, monsieur Dominati, j’ai eu l’occasion de vous dire hier que la question de la gouvernance soulevée par cet amendement est, à l’évidence, essentielle. L’horizon 2014 paraît raisonnable en ce qu’il donne le temps pour que des projets concrets émergent sur tous les territoires de la région capitale et que les questions de la gouvernance puissent se poser sur des bases sûres et collectivement acceptées par tous.

Toutefois, à ce stade, je ne puis être favorable à ce que l’on inscrive une telle disposition dans la loi ; c’est pourquoi je vous demande de retirer votre amendement.

Sur l’amendement n° 242, je rejoins la commission et j’émets un avis défavorable.

Sur l’amendement n° 2 rectifié, j’émets un avis favorable.

S’agissant de l’amendement n° 244, je n’ai pas réellement d’avis sur ce qui est la meilleure rédaction de l’alinéa 5 de l’article 1er, madame Voynet, mais, au-delà, le texte de la commission spéciale et votre amendement mettent en avant une question essentielle.

Le réseau du Grand Paris, dont nous discuterons plus avant à l’article 2, dépasse de très loin en termes d’enjeux la question des transports régionaux. Je le rappelle, une des ambitions du réseau du Grand Paris est, en effet, de relier entre elles les grandes gares ferroviaires pour faciliter les liaisons région capitale-province ou province-province.

M. Charles Revet. Très bien !

M. Christian Blanc, secrétaire d'État. N’oublions pas que nombre d’habitants de la région capitale conservent des liens forts, familiaux, affectifs ou encore professionnels avec les autres régions françaises. Au-delà même de ces liens, il s’agit de promouvoir – c’est très important sur le plan économique – les synergies entre les grandes régions françaises.

Cet alinéa 5 met également en avant le nécessaire maillage avec le réseau routier. Madame Voynet, je ne peux que me réjouir que vous portiez un tel amendement. Je suis moi-même convaincu qu’un tel maillage avec le réseau routier peut permettre à la fois de favoriser l’intermodalité et de contribuer au décongestionnement des grands axes routiers. Sur ce point, nous avons lancé des études pour vérifier la faisabilité du placement de telle ou telle gare sur les grands axes autoroutiers et de l’adjonction d’importants parkings relais, dimensionnés et adéquats.

Toutes ces raisons montrent que si l’État porte un tel projet, c’est non pas parce que la région n’en est pas capable, mais uniquement parce que ce projet, dont l’intérêt est national, va très au-delà des compétences de cette dernière.

Enfin, sur le sous-amendement n° 303, le Gouvernement émet un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 238.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 239.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote sur l'amendement n° 3.

M. Philippe Dallier. Je voterai bien évidemment cet amendement, puisque notre collègue Catherine Dumas, élue de Paris, désigne sous le nom de « cœur de l’agglomération » Paris, les Hauts-de-Seine, la Seine-Saint-Denis et le Val-de-Marne.

Par un heureux hasard, cela correspond exactement au périmètre que j’avais retenu dans mon rapport d’information sur un projet de gouvernance pour le Grand Paris. Cela démontre, que l’on soit élu de Paris, de la proche banlieue ou de la grande banlieue, qu’il y a une zone urbaine « dense », avec ses spécificités et qu’elle ne peut pas être traitée comme le reste de la région d’Île-de-France car elle n’a pas les mêmes problèmes.

J’y reviendrai ultérieurement, mais je voulais saisir l’occasion de le rappeler et soutenir l’amendement n° 106 rectifié, car je crains qu’il ne soit retiré, amendement qui fixait une date pour une véritable proposition de réforme de la gouvernance.

Monsieur le secrétaire d’État, à propos de la réforme de la gouvernance, dont il est beaucoup question, on me répond toujours que c’est pour bientôt. C’est un peu comme l’horizon : plus on avance, plus il s’éloigne, et je ne vois pas venir le moment où une véritable proposition sera effectivement formulée.

Je comprends que vous préfériez voir les projets émerger avant qu’un projet de réforme de la gouvernance ne soit mis sur la table, mais cela me perturbe parce que – nous le verrons au cours de la discussion – votre projet va s’articuler autour des fameux contrats de développement territorial.

Ces contrats de développement – quarante gares, quarante contrats – vont donc modeler les territoires, avec des objectifs propres en termes de logements et de transport ; mais, au bout du compte, aura-t-on un projet métropolitain et pourra-t-on plaquer sur les projets de développement de ces quarante territoires un projet de gouvernance de la métropole ? J’en doute encore aujourd’hui, voilà pourquoi j’aurais aimé qu’une date soit fixée et que nous nous mettions enfin les uns et les autres autour de la table pour formuler une proposition à échéance de douze ou de vingt-quatre mois.

M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour explication de vote.

M. Yves Pozzo di Borgo. Mon explication de vote concernera également l’amendement n° 106 rectifié, qui sera probablement retiré.

Comme je l’ai déjà dit hier – c’est, me semble-t-il, l’un des points fondamentaux, et M. le secrétaire d’État l’a d'ailleurs également souligné, l’Île-de-France souffre d’un empilage des structures. La multiplicité des acteurs – l’État, la région, les départements, les communes, les intercommunalités – augmente les charges publiques, nuit à la cohérence et à l’efficacité de la décision publique, en particulier en matière de transports et de déplacements – si le Grand Paris est fait par la structure d’État, c’est parce que personne n’a cette vision générale – mais aussi en matière de logements, d’urbanisme, de développement économique et d’équipements structurants.

Le cœur d’agglomération pâtit de l’absence de politiques communes.

Malgré cet empilage des structures, le taux des couvertures intercommunales par région en France est de 89,1 %...

M. Dominique Braye. Ce n’est pas vrai !

M. Yves Pozzo di Borgo. … – ce sont les chiffres de la DGCL – alors que, pour l’Île-de-France, il est seulement de 56 %.

Il n’y a pas de vision collective. Pour affronter la concurrence mondiale avec une masse critique suffisante, la plupart des grandes villes européennes – Londres l’a fait en 1997 – ont regroupé les collectivités locales comprises dans leur aire urbaine pour organiser le développement et leur aménagement.

Je prendrai l’exemple de Lyon. L’agglomération lyonnaise, par une loi datant de 1966, a pu créer une communauté urbaine et bénéficie d’une gestion urbaine placée sous une autorité administrative unique depuis quarante ans. Depuis vingt ans, je le rappelle, Lyon figure parmi les vingt villes européennes, toutes catégories confondues, jugées les plus attractives.

Depuis quarante ans, Paris et Lyon ont ainsi connu une évolution administrative exactement inverse. Alors que la loi de 1966 a permis à l’agglomération lyonnaise de regrouper ses forces et de rationaliser l’utilisation de ses moyens administratifs, techniques et financiers, la disparition du département de la Seine en 1964 a signifié, pour le cœur de l’agglomération parisienne, l’éparpillement et la dilution, que nous continuons à payer.

Cette absence de structure de gouvernance explique les chiffres de la moindre croissance de l’Île-de-France malgré sa puissance économique.

On aurait pu modifier la loi de 1966 – en effet, lors de la création des communautés urbaines, Paris a conservé un statut spécifique – et ajouter, dans le projet de loi relatif à la réforme des collectivités territoriales ou dans celui-ci, un amendement visant à créer une communauté urbaine à Paris. On pourrait aussi, quand le projet de loi sera voté, récupérer le concept de métropole.

Mes chers collègues de la gauche, c’est une vision politique qui a fait éclater le département de la Seine et a débouché sur la création, en 1976, de l’Île-de-France. Or nous rencontrons aujourd'hui le même problème.

Voilà une quinzaine d’années, la droite et le centre dirigeaient, il est vrai, l’Île-de-France : ils avaient Paris et six départements sur huit. Aujourd'hui, c’est l’inverse : la gauche a la région, Paris et six départements sur huit.

Monsieur Caffet, nous siégeons tous les deux au Conseil de Paris. Je me mets à votre place, ce n’est pas facile lorsque M. Delanoë crée, timidement, la structure « Paris-Métropole », car il est très gêné par la présence, à ses côtés, du président de la région ! Il procède donc petit à petit. Résultat : dix ans pour mettre en place Paris-Métropole, qui est une structure d’études ! Lorsqu’on lui parle de communauté urbaine, il nous répond : « Surtout pas, cela créerait un problème au sein du parti socialiste ! » (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

Mais il faudra bien que ce problème soit posé un jour ou l’autre ! Il faudra que l’on ait le courage d’aborder la question de la gouvernance, car c’est nécessaire pour l’évolution de l’Île-de-France, qui doit s’adapter aux développements économiques.

Certes, j’ai quelque peu politisé mon propos, mais le problème pourrait se poser dans les mêmes termes pour la majorité. Il y a des raisons qui font que l’on n’ose pas aborder cette question.

M. Dominique Braye. Il a raison !

M. Yves Pozzo di Borgo. Je le dis ici parce qu’il est essentiel que le Sénat soit au courant.

M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.

M. Jean Louis Masson. Je ne suis pas contrariant : je voterai cet amendement, tout en m’interrogeant sur l’intérêt que présentent nos débats.

Tout le monde se plaint que le Parlement adopte des dispositions qui n’ont aucune application concrète. En l’espèce, quel est l’impact de cet amendement eu égard à la rédaction du premier alinéa de l’article 1er proposée par la commission spéciale ? Je ne comprends pas très bien l’intérêt de cet amendement. Je ne suis qu’un humble sénateur de province, mais je me demande très honnêtement s’il est pertinent d’avoir un article 1er aussi long, énonçant des considérations générales qui n’ont aucun impact en droit positif. Cet amendement ne change strictement rien.

Est-il judicieux que l’ensemble de nos débats s’articulent autour de questions qui ont un intérêt tout de même relativement limité au regard des grands problèmes qui se posent actuellement à la nation ?

Certes, je le répète, je voterai cet amendement, mais j’aimerais que l’un d’entre vous m’explique ce qu’il change concrètement pour la région d’Île-de-France. Cela m’aiderait beaucoup et m’encouragerait plus encore à le voter. Pour ma part, je n’ai pas compris l’intérêt qu’il présente.

Mme Éliane Assassi. En fait, vous avez tout compris, mon cher collègue !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Caffet, pour explication de vote.