Articles additionnels après l’article 24 vicies
Dossier législatif : projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure
Article additionnel avant l'article 25

Articles additionnels après l'article 10 (précédemment réservés)

Mme la présidente. Nous en revenons à l’examen des amendements portant articles additionnels après l’article 10, précédemment réservés.

L'amendement n° 26 rectifié bis, présenté par M. Demuynck, Mme Henneron, M. Bécot, Mmes Debré et B. Dupont, MM. Pierre et Milon, Mme Mélot, MM. Dallier, Houel, Etienne, Martin, Doligé, Nègre et Cambon, Mme Longère et MM. Saugey et Beaumont, est ainsi libellé :

Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé : 

À l'article 131-36-10 du code pénal, le mot : « sept » est remplacé par le mot : « deux ».

La parole est à M. Christian Demuynck.

M. Christian Demuynck. Je regrette vraiment que ces amendements aient été réservés, car nous avons évoqué hier tout au long de la soirée le problème du bracelet électronique, des peines planchers, et beaucoup de choses ont déjà été dites.

Cela étant, si vous le permettez, madame la présidente, je défendrai globalement tous les amendements que j’ai déposés, ce qui nous fera gagner du temps.

Mme la présidente. J’appelle donc en discussion les amendements nos 27 rectifié ter, 25 rectifié bis, 18 rectifié bis, 17 rectifié bis, 19 rectifié bis, 20 rectifié bis, 23 rectifié ter, 24 rectifié bis, 21 rectifié bis et 22 rectifié bis.

L'amendement n° 27 rectifié ter, présenté par M. Demuynck, Mme Henneron, M. Bécot, Mmes Debré et B. Dupont, MM. Bailly, Pierre et Milon, Mme Mélot, MM. B. Fournier, Etienne, Houel, Trucy, Dallier, Martin, Doligé et Cambon, Mme Longère et MM. Saugey, Beaumont et J. Blanc, est ainsi libellé :

Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 131-36-10 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Il peut également être ordonné à l'encontre d'une personne majeure condamnée pour une infraction punie d'au moins cinq ans d'emprisonnement, lorsque cette personne a déjà fait l'objet d'au moins trois condamnations définitives pour un crime ou un délit et que cette mesure apparaît indispensable pour prévenir la récidive à compter du jour où la privation de liberté prend fin. »

L'amendement n° 25 rectifié bis, présenté par M. Demuynck, Mme Henneron, M. Bécot, Mmes Debré et B. Dupont, MM. Pierre et Milon, Mme Mélot, MM. Houel, Trucy, Etienne, Dallier, Martin, Doligé, Cointat, Nègre et Cambon, Mme Longère, MM. Saugey et Beaumont et Mme Sittler, est ainsi libellé :

Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 131-36-11 du code pénal est abrogé.

L'amendement n° 18 rectifié bis, présenté par M. Demuynck, Mme Henneron, MM. Pierre et Milon, Mme Mélot, MM. Braye et Houel, Mme Debré, MM. Dallier, Trucy, Etienne, Martin, Lorrain, Doligé, Nègre et Cambon, Mme Longère et MM. Saugey et Beaumont, est ainsi libellé :

Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article 132-19-1 du code pénal est ainsi rédigé :

« Pour les personnes condamnées en état de récidive légale ou ayant fait l'objet d'au moins trois condamnations définitives pour un crime ou un délit, la peine d'emprisonnement ne peut être inférieure aux seuils suivants : ».

L'amendement n° 17 rectifié bis, présenté par M. Demuynck, Mme Henneron, MM. Pierre et Milon, Mme Mélot, MM. Houel et Bécot, Mme Debré, MM. Dallier, Trucy, Etienne, Martin, Fouché, Lorrain, Doligé, Nègre et Cambon, Mme Longère et M. Saugey, est ainsi libellé :

Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Aux premier, sixième, septième et douzième alinéas de l'article 132-19-1 du code pénal, après le mot : « emprisonnement » sont insérés les mots : « sans sursis ».

L'amendement n° 19 rectifié bis, présenté par M. Demuynck, Mme Henneron, MM. Bécot, Pierre et Milon, Mme Mélot, MM. Braye, Houel, Trucy, Etienne, Dallier, Martin, Doligé, Nègre et Cambon, Mme Longère et MM. Saugey et Beaumont, est ainsi libellé :

Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le septième alinéa de l'article 132-19-1 du code pénal est ainsi rédigé :

« La juridiction ne peut prononcer une peine autre que l'emprisonnement lorsque est commis une nouvelle fois, en état de récidive légale ou par des personnes ayant déjà fait l'objet d'au moins sept condamnations définitives pour un crime ou un délit, un des délits suivants : ».

L'amendement n° 20 rectifié bis, présenté par M. Demuynck, Mme Henneron, MM. Bécot, Magras, Pierre et Milon, Mme Mélot, MM. Braye, Houel, Trucy, Etienne, Dallier, Martin, Doligé, Nègre et Cambon, Mme Longère et MM. Saugey et Beaumont, est ainsi libellé :

Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa de l'article 132-41 du code pénal est ainsi rédigé :

« La juridiction pénale ne peut prononcer le sursis avec mise à l'épreuve à l'encontre d'une personne ayant déjà fait l'objet d'une condamnation assortie du sursis avec mise à l'épreuve. Toutefois, ces dispositions ne sont pas applicables lorsque le sursis avec mise à l'épreuve ne porte que sur une partie de la peine d'emprisonnement prononcée en application des dispositions du dernier alinéa de l'article 132-42. »

L'amendement n° 23 rectifié ter, présenté par M. Demuynck, Mme Henneron, MM. Pierre et Milon, Mme Mélot et MM. Houel, Trucy, Leclerc, Dallier, Martin, Doligé, Cointat, Lefèvre, Cambon, Saugey, Beaumont et Nègre, est ainsi libellé :

Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La dernière phrase du premier alinéa des articles 474, 723-1 et 723-7 du code de procédure pénale est ainsi rédigée :

Les durées de deux ans prévues par le présent alinéa sont réduites à un an si la personne a été condamnée soit pour un délit commis en état de récidive légale, soit pour un crime, soit pour des faits de violences punis d'une peine d'emprisonnement au moins égale à sept ans ou pour un délit commis avec la circonstance aggravante de violences punis d'une peine d'emprisonnement au moins égale à sept ans.

L'amendement n° 24 rectifié bis, présenté par M. Demuynck, Mme Henneron, M. Bécot, Mmes Debré et B. Dupont, MM. Bailly, Pierre, Milon, Houel et Braye, Mme Mélot, MM. Trucy, Etienne, Leclerc, Dallier, Martin, Doligé, Lefèvre, Nègre, Cambon et Saugey et Mme Sittler, est ainsi libellé :

Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase de l'avant-dernier alinéa de l'article 707 du code de procédure pénale, le mot : « sont » est remplacé par les mots : « peuvent être ».

L'amendement n° 21 rectifié bis, présenté par M. Demuynck, Mme Henneron, MM. Pierre et Milon, Mmes Mélot et Debré et MM. Braye, Béteille, Houel, B. Fournier, Trucy, Etienne, Dallier, Martin, Lorrain, Doligé, Lefèvre, Nègre, Cambon, Saugey et Beaumont, est ainsi libellé :

Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 769 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa est supprimé ;

2° Au quatrième alinéa, le mot : « également » est supprimé ;

3° Au cinquième alinéa, les mots : « par la réhabilitation ou » et les mots : « ou après le prononcé d'un jugement emportant réhabilitation » sont supprimés ;

4° Les septième et treizième alinéas sont supprimés.

L'amendement n° 22 rectifié bis, présenté par M. Demuynck, Mme Henneron, MM. Pierre et Milon, Mme Mélot et MM. Braye, Béteille, B. Fournier, Houel, Trucy, Etienne, Dallier, Martin, Lorrain, Doligé, Lefèvre, Nègre, Cambon, Saugey et Beaumont, est ainsi libellé :

Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 16° de l'article 775 du code de procédure pénale, sont insérés sept alinéas ainsi rédigés :

« 17° Les jugements prononçant la faillite personnelle ou l'interdiction prévue par l'article L. 653-8 du code de commerce lorsque ces mesures sont effacées par un jugement de clôture pour extinction du passif, ou à l'expiration du délai de cinq ans à compter du jour où ces condamnations sont devenues définitives ainsi que le jugement prononçant la liquidation judiciaire à l'égard d'une personne physique, à l'expiration d'un délai de cinq ans à compter du jour où ce jugement est devenu définitif ;

« Toutefois, si la durée de la faillite personnelle ou de l'interdiction est supérieure à cinq ans, la condamnation relative à ces mesures demeure mentionnée sur les fiches du casier judiciaire pendant la même durée ;

« 18° Les dispenses de peines, à l'expiration d'un délai de trois ans à compter du jour où la condamnation est devenue définitive ;

« 19° Les condamnations pour contravention, à l'expiration d'un délai de trois ans à compter du jour où ces condamnations sont devenues définitives ; ce délai est porté à quatre ans lorsqu'il s'agit d'une contravention dont la récidive constitue un délit ; 

« 20° Les mentions relatives à la composition pénale, à l'expiration d'un délai de trois ans à compter du jour où l'exécution de la mesure a été constatée, si la personne n'a pas, pendant ce délai, soit subi de condamnation à une peine criminelle ou correctionnelle, soit exécuté une nouvelle composition pénale ;

« 21° Les fiches relatives aux mesures prononcées en application des articles 8, 15, 15-1, 16, 16 bis et 28 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 précitée à l'expiration d'un délai de trois ans à compter du jour où la mesure a été prononcée si la personne n'a pas, pendant ce délai, soit subi de condamnation à une peine criminelle ou correctionnelle, soit exécuté une composition pénale, soit fait l'objet d'une nouvelle mesure prononcée en application des dispositions précitées de ladite ordonnance ;

« 22° Les fiches relatives aux jugements ou arrêts de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, lorsque l'hospitalisation d'office ordonnée en application de l'article 706-135 a pris fin ou lorsque les mesures de sûreté prévues par l'article 706-136 ont cessé leurs effets. »

Veuillez poursuivre, mon cher collègue.

M. Christian Demuynck. Je voudrais avant tout expliquer pourquoi j’ai déposé ces amendements, que j’aurais très bien pu décider de ne pas présenter, puisque la commission des lois les a retoqués en bloc, sans discussion.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Pas en bloc : un par un !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et avec discussion !

M. Christian Demuynck. J’ai donc souhaité les présenter pour deux raisons.

La première est qu’ils comptent beaucoup de cosignataires. Les problèmes de justice que je soulève sont en effet partagés par un grand nombre de nos collègues.

La seconde raison est que mon département de la Seine-Saint-Denis, qui est remarquable – il compte des jeunes exceptionnels, des familles qui s’intègrent et qui veulent s’en sortir –, connaît des difficultés considérables par la faute de délinquants multirécidivistes connus des services de police, de la justice, des assistants sociaux et des élus.

Ces délinquants, qui sont passés à plusieurs reprises devant les juges et qui ont écopé de multiples sursis, posent des problèmes à tout le monde depuis des années. On ne peut pas continuer à les laisser faire. Contrairement à ce que l’on entend, il n’y a pas de zones de non-droit dans ces quartiers. Ce sont eux qui font la loi ! Ceux qui n’acceptent pas leurs deals, qui ne cèdent pas à leurs menaces ou à leurs rackets sont victimes de représailles.

C’est intolérable ! Il faut impérativement que la justice prenne ses responsabilités et fasse en sorte que ces jeunes délinquants ne soient plus sur place.

Ceux qui cèdent, ceux qui plient, ce sont les braves gens. Ils n’ont pas 36 000 solutions : soit ils pactisent avec les délinquants – c’est malheureusement ce que font les plus jeunes –, soit ils essaient de ne pas les rencontrer – ils se débrouillent pour sortir le matin lorsque les délinquants ne sont pas encore levés –, soit ils partent. Je le répète : c’est intolérable !

Alors, on peut tenir des discours philosophiques au sein du Sénat, en réunion de commission des lois, mais il faut aussi prendre en compte la réalité sur le terrain. Et cette réalité, elle est totalement insupportable !

Permettez-moi de vous donner un exemple – j’aurais pu vous en citer des dizaines –, celui d’un jeune dans ma ville.

Il a commencé à sévir en 2007. Il a d’abord commis des infractions au code de la route sur des motos non homologuées. Il a alors été présenté au délégué du procureur de la République. On lui a tiré l’oreille, on lui a dit : « attention, mon garçon, il ne faut surtout pas faire ça ! », puis on l’a laissé partir.

Ensuite, il a participé à des regroupements dans des halls d’immeubles. Ces groupes ont tout cassé. Le pire est qu’ils obligeaient les locataires qui voulaient rentrer chez eux à leur demander l’autorisation de le faire ! Évidemment, une plainte a été déposée et on lui a une nouvelle fois tiré l’oreille.

Pour continuer, ces groupes se sont attaqués à des commerçants. Le jeune en question a été placé sous contrôle judiciaire et condamné à une interdiction de territoire. Inutile de vous dire que, malgré cela, il était toute la journée sur le terrain ! Inutile de vous dire également que la commerçante qui avait porté plainte a subi des représailles. Inutile de vous dire enfin que ces groupes n’ont pas mis fin à leurs agissements et que plus aucun commerçant n’a porté plainte. Et cela continue !

Par la suite, ils ont volé des scooters et se sont attaqués à leurs propriétaires. Le premier d’entre eux a porté plainte, mais ni le deuxième, ni le troisième parce que les représailles sur le terrain sont telles que personne n’ose bouger ! Je peux vous dire que lorsque j’organise des réunions publiques, c’est l’omerta : tout va bien dans cette résidence ! On sait pourtant que c’est faux, que des voitures brûlent et qu’il y a des règlements de comptes.

Je poursuis au sujet du même loustic.

En 2007, il est condamné pour outrage et menaces de mort envers un policier. Il se voit infliger une peine de 250 euros d’amende, qu’il ne paiera évidemment jamais parce qu’il est insolvable.

En 2008, il est de nouveau condamné pour violences envers un policier. Cette fois-ci, le montant de l’amende est plus élevé – 1 500 euros –, mais il ne la paiera pas non plus car il n’est toujours pas solvable.

Pour la troisième fois, il vient de commettre des violences avec récidive, pour lesquelles il n’a pas encore été jugé. Il a juste passé une heure au poste de police, avant d’être présenté au procureur de la République, puis rendu à la liberté. Il est alors immédiatement allé au poste de police pour menacer de mort les policiers !

Pensez-vous que la République soit respectée ? Selon vous, que pense la population ? Que disent les pauvres gens ? Ils disent que la police ne peut rien faire et que la justice a les mains liées.

Qui est le patron dans ce secteur ? Ce n’est ni le maire, ni la police, ni la justice, mais les lascars. Il est donc impératif de serrer la vis au niveau des procédures judiciaires. Certains juges sont très bien, mais d’autres font preuve de laxisme et considèrent que ces jeunes sont de pauvres enfants n’ayant pas eu d’éducation. C’est sûrement vrai, mais il n’en demeure pas moins qu’il faut faire quelque chose, car on ne peut pas continuer de la sorte.

Je tiens à faire savoir que les gens dans ces quartiers ne disent rien. Ils sont pris en otage. Leurs voitures brûlent, mais ils ne portent pas plainte. Ils ne peuvent pas rentrer chez eux le soir parce que des bandes le leur interdisent – dans certains endroits, ils trouvent même des verrous sur les portes ! –, mais personne ne dit rien. La voilà, la réalité. Nous sommes loin du Sénat et des huis clos en commission. C’est la réalité sur le terrain.

Telles sont les raisons pour lesquelles j’ai déposé ces amendements : je souhaitais vous livrer ce témoignage. Je savais bien qu’ils ne seraient pas acceptés, à part un ou deux d’entre eux peut-être.

Les premiers amendements portent sur le bracelet électronique mobile. Je vous avoue que je n’arrive pas à comprendre pourquoi on en fait un usage si restrictif alors que, comparé à l’emprisonnement, il ne coûte pas cher, qu’il permet de suivre le délinquant et déclenche une alarme lorsque celui-ci se trouve dans une zone qui lui est interdite.

Il est très utile notamment pour protéger les femmes battues. Il est donc dommage de ne pas l’utiliser. On sait comment les choses se passent pour ces femmes : le bourreau, qui est jugé et condamné à un ou deux mois d’emprisonnement, s’empresse à sa sortie de prison d’aller retrouver sa femme, mais certainement pas pour l’embrasser sur les deux joues ! Nous sommes aujourd'hui incapables de protéger ces femmes et d’interdire à leurs conjoints de les approcher. Le bracelet électronique le permettrait. Que font donc ces pauvres femmes ? Elles déménagement ! C’est finalement la victime qui est condamnée. Nous sommes dans une société de folie !

Je le répète : je sais que mes amendements vont être refusés. Mais, franchement, il me semble que nous devrions nous interroger sur la réalité et sur ce qui se passe vraiment sur le terrain.

L’amendement n° 26 rectifié bis a pour objet d’étendre le placement sous surveillance électronique mobile aux personnes condamnées à une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure ou égale à deux ans.

L’amendement n° 27 rectifié ter, qui concerne la réitération, vise à permettre d’ordonner un tel placement à l’encontre d’une personne condamnée pour une infraction punie d’au moins cinq ans d’emprisonnement et ayant déjà été condamnée trois fois par la justice.

L’amendement n° 25 rectifié bis tend à supprimer l’obligation pour le tribunal correctionnel de motiver sa décision d’ordonner un placement sous surveillance électronique mobile. Je ne comprends pas en effet que l’on oblige le tribunal à motiver sa décision alors que l’on ne cesse de nous dire que les tribunaux sont engorgés, ce qui est vrai, et que le traitement des dossiers a pris du retard. Je pense que cet amendement, qui n’a rien de révolutionnaire, pourrait être adopté sans que cela nuise en quoi que ce soit à l’image libérale du Sénat.

L’amendement n° 18 rectifié bis a pour but d’étendre les peines planchers aux délinquants en situation de réitération et ayant été condamnés à trois reprises. Comme je l’ai dit tout à l’heure, de nombreux jeunes délinquants sont condamnés à des peines avec sursis. Résultat : ils sont toujours dans le quartier. Les peines planchers doivent s’appliquer dès lors qu’une personne a été condamnée trois fois. Cela permettra de sortir ces délinquants de la cité, ce qui serait une très bonne chose, car je peux vous dire que lorsqu’ils y sont, cela fait mal !

L’amendement n° 17 rectifié bis a pour objet de restreindre les peines planchers à des peines d’emprisonnement sans sursis. Je ne suis pas un spécialiste de la justice – je ne suis qu’un pauvre maire de banlieue –, mais je trouve extraordinaire que les peines planchers incluent des peines de sursis, comme si le sursis était une peine. Sur ce sujet aussi, il faut se poser des questions !

L’amendement n° 19 rectifié bis vise à étendre les peines planchers aux condamnés pour crimes et délits à sept reprises. Il s’agit de faire en sorte qu’une peine de prison soit automatiquement prononcée. Même si je considère que la prison n’est pas la panacée, il faut bien trouver une solution. On ne peut pas garder ces personnes, alors où les met-on ? Cela pose une véritable difficulté, je vous l’accorde.

Le sursis a perdu toute signification, car il est possible d’être condamné à dix peines avec sursis. Cela conduit à fabriquer des caïds : lorsqu’un délinquant condamné à une peine de sursis revient dans sa cité, il en est le patron ! On ne peut rien y faire. En outre, il deale. La police l’a arrêté dix ou vingt fois, elle a fait son travail, mais il revient, parce qu’il n’a pris que du sursis. C’est absolument surréaliste !

Comme je l’ai déjà dit, je ne suis pas un spécialiste de la justice, mais je me suis penché sur cette question. Je me suis rendu compte que l’on avait inventé quelque chose de génial : le double jugement ! Je vous avoue que je ne comprends pas bien comment c’est possible. Le juge du tribunal correctionnel rend son jugement, le condamné peut évidemment faire appel, mais, s’il sort libre, c’est le juge de l’application des peines qui, plusieurs mois plus tard, aménage la peine. Plus personne n’y comprend rien ! La victime quitte le tribunal correctionnel sachant que le coupable a été condamné à une certaine peine, puis quelques mois plus tard, tout a changé : elle le retrouve devant chez elle, en semi-liberté ! Il faut essayer de faire des choses claires.

Je sais bien que je ne parviendrai pas à remettre en cause le système du double jugement. Je propose donc, et c’est l’objet de l’amendement n° 23 rectifié ter, de revenir aux dispositions que nous avions votées il y a quelque temps en prévoyant que les aménagements de peine concernent seulement les peines d’un an d’emprisonnement. En ce moment, on veut faire des économies budgétaires, en voilà une !

Je me mets aussi à la place du juge du tribunal correctionnel : il rend un jugement dont il sait à l’avance qu’il ne sera pas appliqué. Il faut s’interroger également sur ce sujet ! Mes propositions n’ont rien d’extrémistes.

Concernant l’amendement n° 24 rectifié bis, l’article 707 du code de procédure pénale prévoit que « les peines sont aménagées ». Cela revient, selon moi, à désavouer le juge qui a décidé de la peine. En outre, ce juge pourrait lui-même aménager ladite peine.

J’en viens à l’amendement n° 21 rectifié bis, qui porte sur le bulletin n° 1 du casier judiciaire. Cet amendement pourrait lui aussi être adopté, me semble-t-il, car il n’a rien de révolutionnaire.

Le bulletin n° 1 du casier judiciaire est exclusivement destiné aux autorités judiciaires. Il permet au juge de savoir à qui il a vraiment affaire et de connaître toutes les condamnations d’une personne. Or, certaines peines peuvent en être effacées. L’amendement n° 21 rectifié bis vise donc à restaurer l’exhaustivité du bulletin n° 1.

Enfin, l’amendement n° 22 rectifié bis, qui est un amendement de coordination avec l’amendement précédent, porte sur le bulletin n° 2 du casier judiciaire et concerne les effacements.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. J’ai bien écouté le long exposé de notre collègue et la liste des délits commis par le délinquant dont il a évoqué le cas. Nous sommes bien obligés de reconnaître que de tels agissements sont réels et qu’ils posent effectivement problème.

À cet égard, il serait intéressant de disposer de statistiques sur les peines prononcées afin d’évaluer s’il y a un décalage entre les lois que nous avons votées et leur application. Cela permettrait de répondre en partie à votre question, cher collègue, et de savoir s’il faut ou non durcir la législation.

La commission des lois a examiné l’ensemble de ces amendements sous un angle juridique, notamment sous l’aspect constitutionnel. Lorsque le législateur vote une loi, celle-ci doit être conforme aux autres lois de la République, notamment à la Constitution.

Je commencerai par l’amendement n° 26 rectifié bis.

Depuis l’adoption de la loi n° 2005-1549 du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales, une personne condamnée à une peine de suivi socio-judiciaire peut être placée sous bracelet électronique mobile après sa libération, à titre de mesure de sûreté, si elle a par ailleurs été condamnée à une peine privative de liberté de sept ans ou plus et qu’une expertise médicale a constaté sa dangerosité. Le but de cette mesure de sûreté est de permettre le suivi, après l’exécution de la peine de prison, d’individus particulièrement dangereux présentant un risque élevé de récidive.

L’amendement n° 26 rectifié bis prévoit d’abaisser de sept à deux ans d’emprisonnement effectif le seuil à partir duquel une personne pourrait être placée sous bracelet électronique à l’issue de l’exécution de sa peine.

Cet amendement présente un risque élevé d’inconstitutionnalité.

En effet, dans sa décision n° 2005-527 du 8 décembre 2005, le Conseil constitutionnel a rappelé que le placement sous surveillance électronique mobile ordonné à titre de mesure de sûreté devait « respecter le principe, résultant des articles 4 et 9 de la Déclaration des droits de l’homme de 1789, selon lequel la liberté de la personne ne saurait être entravée par une rigueur qui ne soit nécessaire » et a considéré qu’il n’avait vocation à s’appliquer qu’à des personnes condamnées pour des infractions particulièrement graves.

En outre, il convient de rappeler que la loi du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants a autorisé par exception le placement sous bracelet électronique, dans le cadre d’un suivi socio-judiciaire, d’une personne condamnée à cinq ans, et non à sept ans, de prison pour des faits de violence conjugale.

Il paraît donc préférable d’en rester sur ce point au droit en vigueur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

L’amendement n° 27 rectifié ter a pour objet de permettre le placement sous bracelet dans le cadre d’un suivi socio-judiciaire d’une personne encourant cinq ans de prison, et non ayant effectivement été condamnée à une telle peine, dès lors que cette dernière a déjà été condamnée trois fois pour un crime ou un délit.

Un tel amendement soulève lui aussi des difficultés, car il n’opère pas de distinction selon la nature ou la gravité des infractions qui auraient été précédemment commises. En outre, il ne paraît pas conforme à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui réserve le placement sous bracelet après l’exécution de la peine à des personnes condamnées pour des infractions particulièrement graves.

Il convient toutefois de rappeler que le suivi socio-judiciaire n’est pas l’unique cadre juridique permettant un placement sous bracelet, ce dernier étant en effet possible dans le cadre d’une libération conditionnelle, d’un aménagement de peine, d’une surveillance judiciaire, d’une mesure de surveillance de sûreté et, depuis la loi pénitentiaire, d’une assignation à résidence.

Compte tenu des résultats encourageants que nous avons obtenus grâce aux expérimentations menées, il semble souhaitable de favoriser le recours au bracelet électronique dans le cadre des nombreuses possibilités déjà offertes par le droit positif.

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Concernant l’amendement n° 25 rectifié bis, dans le cadre du suivi socio-judiciaire, le placement d’un individu sous bracelet électronique intervient non pas comme une solution de remplacement à la détention provisoire ou comme un aménagement de la peine de prison, mais comme un moyen de prévenir la récidive de personnes qui ont fini d’exécuter leur peine. Il doit donc être réservé aux personnes les plus dangereuses ayant commis les infractions les plus graves.

À l’heure actuelle, la juridiction qui décide de placer une personne sous bracelet électronique dans le cadre d’un suivi socio-judiciaire doit motiver spécialement sa décision.

La commission s’est prononcée contre la suppression de cette exigence de motivation, considérant qu’il s’agissait d’une garantie essentielle. L’avis est donc défavorable.

L’amendement n° 18 rectifié bis a pour objet d’élargir le champ du dispositif des peines planchers issu de la loi du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs, en prévoyant que les mesures s’appliquent non seulement lorsque les faits ont été commis en état de récidive légale, mais également quand la personne a fait l’objet d’au moins trois condamnations définitives pour un crime ou un délit, quelle que soit la nature de ces infractions et sans considération de délai séparant les faits.

La notion de « récidive légale » est une notion définie précisément par le code pénal. Une personne est en état de récidive légale lorsque, après avoir été condamnée définitivement pour une infraction, elle commet la même infraction ou une infraction assimilée dans un certain délai, à l’exception des crimes, pour lesquels la récidive est constituée quel que soit le laps de temps qui sépare deux crimes.

L’infraction commise en état de récidive légale entraîne de plein droit le doublement des peines encourues.

En outre, depuis 2007, l’état de récidive entraîne l’application des peines planchers, à moins que les circonstances de l’infraction et la personnalité de l’auteur ne justifient le prononcé d’une peine inférieure.

Toutefois, la loi du 10 août 2007 a prévu que, lorsque le condamné commet à nouveau une infraction en état de récidive légale, c'est-à-dire pour la troisième fois, la juridiction ne peut prononcer une peine inférieure à la peine plancher que s’il présente des garanties exceptionnelles d’insertion ou de réinsertion.

Le droit positif paraît donc répondre déjà largement aux préoccupations de l’auteur de l’amendement.

En revanche, le dispositif que notre collègue propose soulève des difficultés, puisqu’il ne distingue aucunement selon la nature et la gravité des infractions qui auraient été précédemment commises, ni selon le délai qui séparerait leur commission. Par exemple, une personne ayant fait l’objet de plusieurs condamnations dans sa jeunesse avant de se réinsérer et de ne plus commettre d’infractions pendant de nombreuses années pourrait entrer dans le cadre du dispositif proposé dans l’amendement à l’occasion d’un délit d’importance mineure. Une telle hypothèse pourrait ne pas paraître conforme au principe de proportionnalité et de nécessité des peines.

Pour l’ensemble de ces raisons, la commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.

L’amendement n° 17 rectifié bis, qui vise à préciser que les peines planchers prononcées par les juridictions doivent être des peines d’emprisonnement ferme, n’est pas conforme à la jurisprudence du Conseil constitutionnel. En effet, dans une décision du 9 août 2007, le Conseil a spécifiquement indiqué que le dispositif des peines planchers n’avait « pas modifié le pouvoir de la juridiction d’ordonner […] qu’il soit sursis, au moins partiellement, à l’exécution de la peine, la personne condamnée étant placée sous le régime de la mise à l’épreuve ».

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

L’amendement n° 19 rectifié bis appelle les mêmes commentaires que l’amendement n° 18 rectifié bis. En ne distinguant pas selon la nature ou la gravité des infractions qui auraient été précédemment commises, ni selon le délai dans lequel elles auraient été précédemment commises, le dispositif prévu par l’amendement risque de créer des effets particulièrement inopportuns et pourrait, en outre, être considéré comme contraire au principe de proportionnalité et de nécessité des peines. Avis défavorable.

J’en viens à l’amendement n° 20 rectifié bis. En l’état actuel du droit, depuis la loi du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales, la juridiction pénale ne peut pas prononcer le sursis avec mise à l’épreuve à l’encontre d’une personne ayant déjà fait l’objet de deux condamnations assorties d’un tel sursis pour des délits identiques et se trouvant en état de récidive légale.

En outre, lorsqu’il s’agit d’un crime ou d’un délit de violences, la juridiction ne peut pas prononcer un deuxième sursis avec mise à l’épreuve pour des infractions commises en état de récidive.

L’amendement vise à supprimer toute possibilité d’un deuxième sursis avec mise à l’épreuve pour tout nouveau délit, qu’il soit identique ou non au précédent. Il conserve cependant le principe actuel selon lequel ces limitations du nombre de sursis avec mise à l’épreuve ne s’appliquent pas lorsque le sursis est partiel, c'est-à-dire ne portant que sur une partie de la peine.

La disposition proposée paraît excessive, les mesures introduites en 2005 constituant un point d’équilibre satisfaisant. En outre, il faut rappeler que la mise à l’épreuve comporte des obligations et des mesures de contrôle rigoureuses tout en favorisant la réinsertion du condamné, ce qui doit rester un objectif essentiel de la justice. Enfin, tout manquement aux obligations imposées au condamné est susceptible d’entraîner la révocation du sursis. Avis défavorable.

L’amendement n° 23 rectifié ter visait, dans sa rédaction initiale, à supprimer une partie des attributions du juge de l’application des peines non seulement pour l’aménagement des courtes peines d’emprisonnement, mais également pour les condamnés en fin de peine. Dans sa nouvelle rédaction, il tend à limiter l’aménagement des peines ab initio aux peines d’un an d’emprisonnement, alors que la loi pénitentiaire avait porté ce seuil à deux ans.

Bien que son champ soit limité aux crimes et délits les plus graves, une telle disposition remet en cause les mesures adoptées voilà à peine un an, ce qui ne paraît pas acceptable.

Il faut d’ailleurs rappeler que l’aménagement ab initio demeure une simple faculté et que le juge de l’application des peines, contrairement à la juridiction de jugement, dispose souvent d’éléments complémentaires sur la personnalité de l’intéressé, notamment grâce à l’enquête sociale, qui permettent de mettre en œuvre le principe fondamental de l’individualisation de la peine.

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Le dispositif que l’amendement n° 24 rectifié bis vise à instituer remet en cause une avancée de la loi pénitentiaire, qui a fixé pour principe l’aménagement de peine dès lors que la personnalité et la situation du condamné le justifient. Avis défavorable.

L’amendement n° 21 rectifié bis concerne le bulletin n° 1 du casier judiciaire, celui qui est accessible seulement à l’autorité judiciaire.

Aux termes de l’article 769 du code de procédure pénale, passé un certain délai, certaines mentions sont effacées de ce bulletin. C’est le cas, par exemple, des dispenses de peine, des condamnations pour contravention ou des compositions pénales, qui sont effacées au bout de trois ans.

L’objectif est de ne pas surcharger le casier judiciaire de mentions qui ne paraîtraient plus nécessairement pertinentes, passé un certain temps, pour évaluer la personnalité et le passé pénal d’une personne.

Ces dispositions participent également à la réinsertion des individus, qui ont le droit que des infractions relativement mineures ne leur soient plus reprochées de nombreuses années après les faits. C’est le droit à l’oubli.

Dans sa version initiale, l’amendement visait à supprimer ces dispositions, afin que le bulletin n° 1 du casier judiciaire garde en mémoire l’ensemble des décisions judiciaires relatives à un individu. Les juridictions auraient eu ainsi accès à l’intégralité du passé pénal d’un individu.

Cet amendement a été rectifié après la réunion de commission, afin que les décisions ayant fait l’objet d’une réhabilitation continuent à être retirées du bulletin n° 1.

Néanmoins, le dispositif proposé dans cette version rectifiée de l’amendement ne paraît pas répondre aux objectifs visés par ses auteurs, puisqu’il est proposé précisément de ne conserver au bulletin n° 1 que les décisions ayant fait l’objet d’une réhabilitation et de continuer à effacer notamment les dispenses de peines et les condamnations pour contravention.

En tout état de cause, lors de notre réunion d’hier matin, la commission s’est prononcée contre cet amendement, considérant légitime que certaines mentions relatives à des infractions d’importance mineure continuent à être effacées du bulletin n° 1 passé un certain délai.

En outre, imposer au casier judiciaire de conserver l’intégralité des mesures judiciaires relatives à un individu représenterait probablement une lourde charge, en termes budgétaires et de gestion.

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Enfin, l’amendement n° 22 rectifié bis est le pendant de l’amendement n° 21 rectifié bis, sur lequel je viens de m’exprimer. Les décisions qui sont aujourd’hui effacées du bulletin n° 1 passé un certain délai seraient effacées du bulletin n° 2. Cet amendement n’appelle donc pas de commentaire différent de l’amendement n° 21 rectifié bis. Avis défavorable.