M. Gérard Longuet. … en particulier la famille gaulliste que je salue ! (Vives exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

C’est avec Lucien Neuwirth, un vrai résistant, que nous avons permis aux femmes françaises d’accéder, dans des conditions dignes et responsables, à la contraception,…

M. René-Pierre Signé. Avec les voix de gauche !

M. Gérard Longuet. … c’est-à-dire à la procréation maîtrisée, qui représente, reconnaissez-le, un changement considérable dans la condition féminine ! Enfin, étant député, j’ai soutenu Mme Veil, lorsqu’il a fallu reconduire la loi expérimentale de 1975, qui était l’œuvre de Valéry Giscard d’Estaing ! (Applaudissements sur les travées de lUMP et de l’Union centriste. – Huées sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme Nicole Bricq. Vous n’étiez pas là !

M. Yannick Bodin. La droite a voté contre la loi Veil !

M. Gérard Longuet. Je ne voudrais pas dépasser mon temps de parole, mais laissez-moi vous dire, mes chers collègues, que nous avons écouté avec patience vos dix-neuf interventions (Les huées se poursuivent sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) et que, s’agissant de la défense de la femme, nous n’avons aucun complexe ! (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste. – M. Gilbert Barbier applaudit également.)

M. Yannick Bodin. Ne parlez pas de la loi Veil : vous n’avez pas été nombreux à la voter ! C’est nous qui l’avons votée !

M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.

M. Martial Bourquin. Chers collègues de la majorité, je me demande parfois si nous vivons dans le même monde !

Plusieurs sénateurs de l’UMP. Nous aussi !

M. Martial Bourquin. Je connais beaucoup d’entreprises, notamment parmi les plus grandes. Chaque fois que les femmes travaillent à temps partiel – même si, bien sûr certaines l’ont choisi –, des statistiques bien connues prouvent que ce mode de travail est souvent imposé. Les femmes subissent en premier la précarité, les salaires les plus bas…

M. Alain Fouché. On est d’accord !

M. Martial Bourquin. Si nous sommes d’accord sur ce constat, faisons en sorte que l’on en tienne compte dans ce projet de loi et dans le calcul de la retraite, non pas uniquement en créant des pénalités, mais aussi pendant la durée de cotisation.

Chers collègues, vous savez que le niveau de civilisation d’une société se mesure souvent à la place qu’elle accorde aux femmes.

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Martial Bourquin. Lorsque notre collègue donne le classement de la France dans ce domaine et que nous constatons qu’il est si bas, nous devrions, surtout au Sénat, nous poser des questions et faire en sorte de corriger ces anomalies ! Ce projet de loi doit tenir compte de cette situation, pour donner aux femmes, avec des points de cotisation, une place qu’elles n’ont pas aujourd’hui !

Ensuite, monsieur le ministre, vous avez répondu à notre collègue François Fortassin que vous défendiez le régime par répartition. Mais qui, sur ces travées, a remis en cause le régime par répartition ? Personne ! (Exclamations sur les travées de lUMP.)

Plusieurs sénateurs de l’UMP. Si ! Vous !

M. Gérard Longuet. Vous le menez à la faillite !

M. Martial Bourquin. La différence qui nous sépare du Gouvernement et de sa majorité, c’est que nous ne voulons pas faire porter le poids de cette réforme aux seuls salariés ! Nous avons d’autres propositions.

Vous, vous proposez de faire porter l’effort à 80 % par les salariés et vous augmentez le temps de cotisation. Nous voulons aussi sauver le régime par répartition, mais nous voulons faire en sorte que les banques et les stock-options soient beaucoup plus taxées, que le capital soit beaucoup plus mis à contribution que le travail, à l’inverse de ce que vous proposez.

Dernier point, monsieur le ministre : vous ne disposez pas d’un mandat démocratique pour effectuer cette réforme. (Exclamations sur les travées de lUMP.) Je vais très simplement vous expliquer pourquoi, mes chers collègues, si vous faites l’effort de m’écouter un moment.

Le 2 mai 2007, le candidat à la présidence de la République, M. Nicolas Sarkozy, répond au journaliste l’interrogeant sur la position de Laurence Parisot, qui demandait alors une augmentation de l’âge de la retraite, au minimum, à 62 ans : « Elle a le droit de dire ça. Je le dis, je ne le ferai pas, pour un certain nombre de raisons, et la première est que je n’en ai pas parlé pendant la campagne présidentielle. Ce n’est pas un engagement que j’ai pris devant les Français. Je n’ai donc pas de mandat pour faire cela. » Il ajoute : « Et comme je n’ai pas de mandat, cela compte beaucoup pour moi. »

M. Roland Courteau. C’est clair !

M. Martial Bourquin. Eh bien, mes chers collègues, le Président de la République n’a pas de mandat pour effectuer cette réforme qui engage durablement les différentes générations ! Par conséquent, monsieur le ministre, vous n’en avez pas non plus ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste.)

Enfin, quand l’autisme va-t-il cesser dans notre assemblée ? Les Français manifestent par millions. (Non ! sur plusieurs travées de lUMP.)

Un sénateur de l’UMP. Menteur !

M. Martial Bourquin. Ne vous en déplaise, mes chers collègues de la majorité, les manifestants sont des millions et votre électorat, lui-même, condamne la fermeté – la fermeture – du Gouvernement. (Exclamations sur les mêmes travées.)

M. Roland Courteau. C’est vrai !

M. Christian Cointat. Je demande à voir !

M. le président. Votre temps de parole est écoulé, monsieur Bourquin.

M. Martial Bourquin. Permettez-moi juste de finir mon intervention, monsieur le président. Avec leurs interruptions, ils ont pris au moins trente secondes sur mon temps de parole ! (Nouvelles exclamations sur les travées de l’UMP.)

M. Jean-Claude Gaudin. Asseyez-vous, monsieur Bourquin !

M. Martial Bourquin. Mes chers collègues de la majorité, je vous demande une nouvelle fois de revenir à la raison, d’écouter le peuple, y compris celui qui vous a élus, et de faire en sorte que nous revenions à la table des négociations et que ce projet de loi sur les retraites soit revu de fond en comble ! C’est une nécessité ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Mme Marie-France Beaufils et M. Gérard Le Cam applaudissent également.)

M. Jean-Claude Gaudin. C’était mauvais !

M. le président. La parole est à M. Charles Revet, pour explication de vote.

M. Charles Revet. Pendant tout l’après-midi et toute la nuit dernière, nous avons entendu des orateurs – M. Claude Domeizel encore à l’instant – laisser entendre que le temps partiel était subi par tous ceux qu’il concernait, particulièrement par les femmes.

M. Roland Courteau. C’est vrai !

M. Charles Revet. Permettez-moi donc, mes chers collègues, de vous raconter une anecdote qui remonte à quarante-huit heures.

Je préside un syndicat interdépartemental de l’eau et de l’assainissement, qui emploie neuf collaboratrices et collaborateurs. J’ai participé à son assemblée générale samedi matin, ce qui ne m’a pas empêché d’être présent ici samedi après-midi, et la nuit, pour travailler sur ce texte. (M. Jean-Patrick Courtois applaudit. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Mme Nicole Bricq et M. Guy Fischer. Bravo !

M. Charles Revet. Puis-je m’exprimer un tout petit peu ?...

Il y a quinze jours, les collaboratrices de ce syndicat m’avaient demandé s’il était possible de faire voter une délibération les autorisant à travailler à temps partiel. (Exclamations sur les mêmes travées.)

Samedi matin, j’ai donc fait adopter par l’ensemble de mes collègues de toutes tendances politiques, à l’unanimité, une délibération autorisant le temps partiel.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et M. Jacques Mahéas. C’est la loi !

M. Charles Revet. Pour deux femmes, au moins, ce sera un temps choisi ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme Nicole Bricq. On ne fait pas la loi à partir de cas particuliers !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Éric Woerth, ministre. Le débat s’échauffant, je souhaiterais intervenir brièvement et, en particulier, inviter M. Martial Bourquin à faire un peu attention. Je crois, en effet, que nous avons un problème de vocabulaire.

Vous parlez d’autisme, monsieur Bourquin. L’autisme, je vous le rappelle, est une maladie et des gens en souffrent ! Je souhaiterais donc que ce vocabulaire ne soit pas employé systématiquement. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de l’Union centriste.)

Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, vous êtes très attentifs au vocabulaire que nous employons. Je voudrais que vous soyez aussi attentifs à celui que vous utilisez. Il ne s’agit pas d’un procès d’intention et je n’irai pas plus loin. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Par ailleurs, le Président de la République a un mandat, celui, justement, de Président de la République.

M. Éric Woerth, ministre. Ce mandat comprend l’obligation d’affronter les situations telles qu’elles apparaissent.

Il n’était pas prévu, toujours dans le cadre de ce même mandat, que nous aurions à affronter une des plus graves crises que l’économie mondiale a traversée depuis cinquante à soixante-dix ans, en tout cas depuis très longtemps. Cette crise a eu des conséquences qui impacteront durablement nos systèmes sociaux.

Il est naturel, face à cette situation, que le Président de la République ne se soit pas dit : « je ne fais rien, je laisse faire les choses et on verra bien plus tard… ». Il affronte la situation de crise, telle qu’elle est,…

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il faut l’affronter autrement !

M. Éric Woerth, ministre. … et en tire les conséquences s’agissant de nos systèmes sociaux, notamment notre système de retraite. Aujourd’hui, c’est cela être Président de la République ! (Applaudissements sur les travées de lUMP et sur quelques travées de l’Union centriste. – M. Gilbert Barbier applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontès, pour explication de vote.

Mme Christiane Demontès. Je voudrais donner mon point de vue sur les propos tenus par le président du groupe UMP.

Mme Nicole Bricq. Il est sorti !

Mme Christiane Demontès. Monsieur Longuet, la société change, les modes de vie changent, la sociologie de notre pays change.

M. Alain Fouché. On avait compris !

Mme Christiane Demontès. Sur toutes ces questions, mes chers collègues, on peut avoir des opinions – cela appartient à chacun d’entre nous… Il n’en demeure pas moins que la société change !

M. André Lardeux. Mais pas les socialistes !

Mme Christiane Demontès. Les femmes se retrouvent de plus en plus souvent seules à élever leurs enfants, pour des raisons que vous connaissez comme moi, que vous rencontrez dans vos familles et autour de vous, et qui appartiennent à la société d’aujourd’hui. (Mme Nicole Bricq acquiesce.)

Que les femmes choisissent, quand elles le peuvent, un temps partiel, c’est leur liberté la plus totale.

Mme Christiane Demontès. Il n’est pas question de remettre cela en cause !

Mme Christiane Demontès. Tout comme nous tenons à la retraite choisie, nous tenons à l’emploi choisi ! Ce point ne pose aucune difficulté.

Le problème, monsieur Longuet, c’est que certaines femmes, dans notre pays, cherchent du travail et n’en trouvent pas.

M. Paul Blanc. Et des hommes aussi !

M. Alain Fouché. Et les hommes ?

Mme Christiane Demontès. Ces femmes sont condamnées à travailler à temps partiel, parce qu’elles n’arrivent pas à faire garder leurs enfants, parce que le père de leurs enfants est absent, parce que l’entreprise qui les emploie leur impose de travailler à temps partiel.

Je le disais tout à l’heure, mais vous n’étiez pas là, monsieur Longuet.

Un sénateur du groupe socialiste. Il n’est toujours pas là !

Mme Christiane Demontès. Décidément ! Il faudra donc que je reprenne la parole plus tard.

Je répète donc ce que j’ai expliqué précédemment : dans les entreprises de la grande distribution, des personnels, hommes ou femmes – essentiellement des femmes –, travaillent actuellement à temps partiel,…

M. Alain Fouché. On est d’accord !

Mme Christiane Demontès. … vingt-huit heures par semaine, uniquement le vendredi soir, le samedi, et parfois le dimanche matin du fait de la fameuse loi sur le travail dominical.

Ce sont ces femmes-là auxquelles nous pensons dans le cadre de l’examen de cet article 31.

Que les gens aient le choix, encore une fois, cela ne nous pose aucun problème. Nous sommes vigilants sur un point : comment faire en sorte que ces femmes, dont le déroulement de carrière est compliqué, haché, qui ne font pas ce qu’elles veulent, puissent tout de même bénéficier d’une retraite décente ?

Monsieur le ministre, vous avez déplacé la question de la retraite des femmes et du passage de 65 à 67 ans, en prétendant que le problème résidait non pas dans l’inégalité des retraites, mais dans l’inégalité des salaires.

Il faut vingt ans, avec un peu de chance, monsieur le ministre, pour régler le problème de l’inégalité salariale. Celui qui concerne la retraite des femmes, le passage de 65 ans à 67 ans, c’est aujourd’hui qu’il se pose… et demain si ce projet de loi est adopté.

Par conséquent, nous nous opposons à ces mesures et, j’insiste, c’est une question d’obligation, et non de choix, pour les femmes qui n’ont pas d’autres solutions. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Éric Woerth, ministre. Madame Demontès, les personnes que vous citez, essentiellement des femmes – des caissières, j’imagine – travaillant dans la grande distribution, occupent souvent un poste à temps partiel subi, mais pas toujours.

Mme Christiane Demontès. On est d’accord sur ce point !

M. Éric Woerth, ministre. Je sais qu’il y a des points sur lesquels – heureusement – nous sommes d’accord !

Certaines enseignes de la grande distribution proposent aussi à leurs salariés de compléter les heures de travail à la caisse par des heures effectuées à d’autres postes. Cela existe et on ne peut que se réjouir du fait que certains employeurs essaient de faire correctement leur métier. Néanmoins, je le reconnais, le temps partiel subi est important.

Mais ce ne sont pas ces femmes qui partent à la retraite à 65 ans ou qui partiront, demain, à 67 ans. Ce n’est pas ce type de population qui est concerné,…

Mme Christiane Demontès. Si ! Et c’est là où vous vous trompez !

M. Éric Woerth, ministre. … comme je me suis efforcé de l’expliquer au moment où nous avons examiné certains articles du projet de loi, notamment l’article 6.

Quand une personne travaille vingt-huit heures par semaine – c’est le chiffre que vous avez évoqué –, elle cotise à temps plein et valide donc une année complète.

Mme Raymonde Le Texier. Sur quel salaire ?

M. Éric Woerth, ministre. Notre système de retraite est conçu ainsi et c’est tant mieux ! Protéger notre système de retraite revient donc aussi à protéger ce type de dispositifs de solidarité. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

L’assuré cotise comme s’il travaillait à taux plein, voilà la réalité !

Mme Nicole Bricq. Sur quelle base ? Sur quelle assiette ?

M. Éric Woerth, ministre. D’ailleurs, parfois, la pension de retraite perçue est supérieure au dernier salaire du fait de ce mécanisme de cotisation.

Je souhaitais tout de même le dire, car vous ne pouvez pas décrire la situation telle qu’elle n’est pas, vous devez la décrire telle qu’elle est. Il y a certes des difficultés – personne ne les nie – et nous sommes là pour essayer de les régler. (Applaudissements sur les travées de lUMP. – M. Pierre Fauchon applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.

Un sénateur de l’UMP. Encore ?

Mme Marie-France Beaufils. … nous a fait une lecture assez particulière de l’étude de l’INED. (Marques d’impatience sur les travées de lUMP.) Veuillez m’excuser, mes chers collègues de la majorité, mais nous sommes aussi présents, ici, pour réagir à des propos que nous avons entendus.

MM. Alain Fouché et Jean-Claude Gaudin. On l’a vu !

Mme Marie-France Beaufils. Sinon, il ne s’agit plus d’un débat parlementaire !

Quand on nous dit que les femmes ont indiqué, dans l’étude, avoir fait le choix du temps partiel, c’est d’un choix par défaut qu’il est question. Telle est la formulation exacte.

Mme Marie-France Beaufils. Quelle est la raison pour laquelle je souhaite revenir sur ce sujet ?

D’une certaine façon, monsieur le ministre, vous venez de m’inciter à réexpliquer le problème rencontré par ces femmes qui travaillent à temps partiel.

J’aurais pu moi aussi, en tant qu’élue et à l’instar de mon collègue Charles Revet, vous citer des exemples de personnels communaux m’ayant demandé de travailler à temps partiel.

M. Alain Fouché. Nous aussi ! Nous voyons cela tous les jours !

Mme Marie-France Beaufils. Si ces femmes ont formulé une telle demande, c’est parce qu’elles ont besoin d’avoir du temps à disposition pour prendre en charge leurs enfants,…

M. Jean-Claude Gaudin. Nous le savons !

Mme Marie-France Beaufils. … parce qu’elles n’ont pas la possibilité de demander à leur conjoint de s’en occuper ou qu’elles n’ont pas, dans leur commune, des services de garde d’enfants leur permettant de travailler à temps complet. (Mme Annie David acquiesce.)

Il est très exceptionnel que des femmes fassent réellement un choix de temps partiel. Il faut regarder la vérité en face. Monsieur le ministre, c’est tout ce que nous vous demandons de faire dans ce domaine.

En outre, vous nous dites que ces femmes travaillant à temps partiel ne sont pas de celles qui partiront à la retraite à 67 ans.

Malheureusement, je rencontre beaucoup de femmes employées, à temps partiel, dans le secteur de la grande distribution et dont le parcours de vie est chaotique. Je peux vous assurer qu’elles ne sont pas en capacité de pouvoir prendre une retraite à taux plein à 60 ans et qu’elles sont obligées d’attendre 65 ans afin de pouvoir le faire. Et elles partent avec des pensions de retraite dont le montant est absolument catastrophique et qui ne leur permettent pas de vivre correctement.

Voilà la question qui, pour nous, se trouve au cœur de ce débat et à laquelle, je crois, vous ne répondez pas !

Nous réclamons une retraite par répartition à taux plein sans décote à 60 ans, mais financée autrement qu’avec les moyens proposés dans ce projet de loi. Ce sont ces modes de financement alternatifs que vous n’avez pas voulu mettre en discussion en même temps que les modifications prévues aux articles 3, 4, 5 et 6 et dont l’examen a été repoussé jusqu’après l’article 33. En effet, vous n’avez pas voulu que nous débattions simultanément des questions de financement du régime par répartition et du reste !

M. Alain Fouché. Nous le ferons après, naturellement !

Mme Marie-France Beaufils. En outre, j’ai entendu M. Longuet prétendre que l’UMP était le « champion » de la place de la femme dans la société.

M. Roland Courteau. Cela se saurait si c’était vrai !

Mme Marie-France Beaufils. J’ai tout de même un peu de mal avec cette remarque… Deux femmes ont été élues dans ma commune en 1924, parce qu’il s’agissait d’une municipalité à direction communiste et qu’il avait été décidé, à l’échelon national, de marquer la volonté du parti communiste de l’époque d’octroyer le droit de vote aux femmes. Ces deux femmes, élues par la population, ont siégé pendant un an, le préfet ayant mis un an pour les destituer.

Cette volonté affirmée en faveur du droit de vote des femmes, les communistes l’ont portée pendant des années. Ils ont été de ceux qui l’ont défendue au sein du Conseil national de la Résistance, avant que le général de Gaulle la mette en œuvre.

Tout de même, entendons bien qui sont les porteurs de ces choix !

M. Jean-Jacques Hyest. Vous n’avez pas été les seuls !

Mme Marie-France Beaufils. Je n’ai jamais dit cela ! Écoutez correctement ce que je dis, mes chers collègues de la majorité ! (Protestations sur les travées de lUMP.)

M. Guy Fischer. Elle a raison !

Mme Marie-France Beaufils. J’ai bien dit que cette demande avait été portée par le Conseil national de la Résistance. Une fois de plus, vous détournez le sens des interventions ! (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)

Enfin, nous sommes un certain nombre de femmes à avoir été élues en 2001, ici, au Sénat, grâce à la représentation proportionnelle et parce que nous nous présentions dans des départements disposant de trois sièges sénatoriaux. Or, au lendemain de l’élection, vous avez supprimé le mode de scrutin proportionnel pour les départements ayant trois représentants. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

Vous savez très bien pour quelle raison : vous cherchiez justement à bloquer la parité dans ces départements ! Nous verrons bien ce que cela donnera lors des prochaines élections. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste. – Exclamations sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

M. David Assouline. Mes chers collègues, M. Longuet veut raccrocher le débat de fond que nous avons à notre histoire, qu’il a en quelque sorte revisitée. Certes, les idées conservatrices et réactionnaires vis-à-vis des femmes ont, durant le XXe siècle, été largement partagées par l’ensemble des couches de la société, y compris par les différentes familles idéologiques. Il faut dire qu’elles remontaient de loin !

Mais, durant le même temps, grâce notamment aux travailleurs, une famille politique s’est toujours battue pour que les femmes puissent avoir les moyens de leur autonomie, tandis qu’une autre a toujours considéré qu’elles devaient avant tout faire des enfants et s’occuper d’eux. (Vives protestations sur les travées de lUMP.) Chers collègues de la majorité, c’est pourtant la réalité !

L’article 31 fait ressortir ce clivage. Vous avez reconnu, monsieur le ministre, qu’il existait une injustice dans votre projet de loi initial, et vous avez souhaité la corriger en faisant une proposition pour les mères de trois enfants.

Mais, si vous estimiez qu’il y avait une injustice générale, vous n’auriez pas fait une proposition si ciblée ! Vous auriez vu que l’injustice qui touche les femmes tient aussi aux carrières fractionnées, à la mutation sociétale évoquée par Christiane Demontès, ou au fait que les familles monoparentales sont majoritairement composées de femmes seules et de leurs enfants à charge. (Protestations sur les travées de lUMP.)

Il est inutile de contester les évidences ! En tout cas, si les Françaises nous regardent, elles savent bien, elles, de quelle façon elles vivent et travaillent et comment elles sont considérées !

Alors je veux juste dire une chose : c’est que toutes ces injustices – difficultés de mener une carrière, périodes d’interruption de travail, différence de salaires, pénibilité – doivent être compensées.

Quand la femme travaille, ce qui est maintenant largement accepté, son salaire doit-il être considéré comme un revenu d’appoint ou comme le moyen de lui permettre d’être libre et autonome ?

La retraite d’une femme doit-elle être une simple retraite d’appoint ? J’ai entendu sur les travées de la majorité qu’il ne fallait pas exagérer la situation de ces femmes, car elles peuvent bénéficier, par ailleurs, d’une pension de réversion. (Mme Bernadette Dupont s’exclame.) Doivent-elles se contenter des malheureux 800 euros dont elles pourront bénéficier à 65 ans et, maintenant, à 67 ans ?

Oui, monsieur le ministre, il y a des injustices, mais votre mesure, en ne ciblant que les mères de trois enfants - tant mieux pour elles ! – ne vise qu’à faire du tintamarre sur votre façon de défendre la famille face à la gauche. (Protestations sur les travées de lUMP.)

M. Christian Cointat. C’est insupportable !

M. Alain Fouché. Incroyable !

M. David Assouline. Tout cela, ce n’est finalement que de l’idéologie. (Brouhaha sur les mêmes travées.) Chers collègues de la majorité, vous savez faire du brouhaha, mais on vous entend peu sur le fond !

Nous continuons de débattre, mais vous voyez bien le décalage. Sept Français sur dix considèrent que votre réforme n’est pas bonne, et il y a encore des millions de manifestants dans la rue.

Dans toutes les autres démocraties – sans même parler des démocraties avancées ! –, après six semaines de mouvements soutenus, des négociations auraient déjà été ouvertes. Vous portez la lourde responsabilité de ne pas proposer un dialogue ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – Exclamations sur les travées de lUMP.)

M. Nicolas About. C’est faux !

M. le président. La parole est à M. Alain Chatillon, pour explication de vote.

M. Alain Chatillon. Je ne vais pas revenir sur la question du travail des femmes, mais simplement vous donner un exemple. J’ai été chef d’entreprise pendant trente-cinq ans dans le secteur agroalimentaire, qui, je le rappelle, représente 400 000 emplois dans notre pays. Avant, nous pratiquions les trois-huit sur cinq jours, ce qui représentait 40 heures de travail par semaine. Après, pour arriver à 35 heures, il a fallu faire avec les « trois-sept », qui ne couvrent que 21 heures d’une journée…

On nous parle du temps fractionné, du temps partiel… Mais qui a créé le problème ? Et je suis mieux placé que certains pour le dire ici car lorsque Lionel Jospin est venu dans ma ville, à Revel, en février 1998, il en est convenu. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Aussi, il faudra peut-être poser de nouveau la question des 35 heures (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.), car, dans les entreprises qui travaillent en continu, la situation est ingérable. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat, pour explication de vote. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste.)

M. Bernard Frimat. J’ai écouté tous les intervenants avec beaucoup d’attention. Je suis toujours satisfait de voir que nous débattons, ce que nous faisons effectivement cet après-midi après les interventions de Charles Revet, d’Alain Chatillon et du président Longuet.

Mon propos n’est pas de mettre en cause la qualité d’une étude. Pour en avoir commis un certain nombre, j’y suis très attaché. Je ne vois donc a priori aucune raison de critiquer l’INSEE et l’INED, qui ont fait leur travail. Mais ce n’est qu’une étude parmi d’autres.

Je ne mets pas en doute non plus M. Longuet lorsqu’il nous dit que cette étude montre que, dans leur majorité, les femmes qui travaillent à temps partiel l’ont choisi. Mais il me semble qu’il y a un abus de langage. En effet, que signifie ce « choix » ? Ce n’est pas un familier de ces questions, M. Fourcade, qui me contredira si je dis que, dans n’importe quelle économie, tout choix est toujours réalisé sous contraintes. Aucun choix ne peut être parfaitement libre, absolu, détaché.

Une femme ayant des enfants en bas âge peut « choisir » de travailler à temps partiel parce qu’elle n’a accès à aucun système de garde et que cette solution est économiquement préférable pour son foyer. C’est un choix, mais qui est contraint par un environnement.

Monsieur le ministre, vous avez repris un exemple cité par Mme Demontès, celui des caissières qui travaillent vingt-huit heures dans les grandes surfaces. Mais certaines ne travaillent que douze heures, seize heures ou vingt heures et sont souvent dans l’impossibilité de travailler davantage.

Mais on pourrait prendre d’autres exemples de tâches exercées non pas exclusivement, mais principalement par des femmes travaillant à temps partiel. Je pense au nettoyage des bureaux tôt le matin et tard le soir, et le Sénat n’échappe d’ailleurs pas à la règle, avec les bureaux du 36, rue de Vaugirard. À ces horaires de travail subis, s’ajoutent des heures et des coûts de transport.

Lorsqu’elle était otage et que sa photographie était sur tous les murs, Florence Aubenas nous a émus. Lisez son livre, Le quai de Ouistreham, dans lequel elle raconte le quotidien de ces femmes qu’elle a partagé en immersion totale. Quel sort imaginez-vous pour ces femmes, lorsqu’elles seront à la retraite ? Combien d’annuités auront-elles pu atteindre ? Quelle pension percevront-elles ? Mes chers collègues, nous sommes bien là confrontés à une réalité qui n’est pas la nôtre mais qui est celle de nombreuses Françaises.

M. Longuet nous expliquait que l’objet de l’article 31 est de donner un contenu à des obligations théoriques. Mais, monsieur le ministre, nous savons tous que, derrière cet article, il y aura un décret, que le 1 % est un maximum, qu’il sera géré par une autorité administrative, bref, que le dispositif sera éminemment complexe.

Nous savons aussi que la sanction a des effets ô combien limités ! Nous avons l’exemple de la loi sur la parité en politique et de la loi SRU. Lorsqu’on en a les moyens, on peut choisir de payer. Peut-être faudrait-il demander à l’INSEE de faire une étude sur la sanction choisie ? Je vous remercie de m’avoir écouté. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)