M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. Il est bien entendu défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Woerth, ministre. Je trouve, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, que vous en faites beaucoup sur l’épargne retraite et que vos propos ne correspondent pas du tout à la réalité vécue aujourd’hui en France.

La retraite par répartition représente actuellement environ 98 % des prestations versées.

Quand vous indiquez, madame David, que les 100 milliards d’euros présents dans les comptes des assureurs représentent un tiers des 300 milliards d’euros de retraite versée, vous confondez le stock et le flux. Les 100 milliards d’euros constituent un stock de provisions dans les comptes des assureurs,…

Mme Annie David. Ils sont joués en bourse !

M. Éric Woerth, ministre. … alors que les 300 milliards d’euros représentent un flux.

Ces deux notions ne sont évidemment pas comparables.

Mme Annie David. L’argent n’est pas dans un coffre !

M. Éric Woerth, ministre. Nous restons bien dans le cadre d’un système français : la répartition représente 98 % des retraites versées. Remettons les choses à leur place !

J’observe d’ailleurs que certains ont su dépasser le débat idéologique sur l’épargne retraite. M. Laurent Fabius, par exemple, a créé le plan partenarial d’épargne salariale volontaire – le PPESV –, qui est l’ancêtre du PERCO. Au fond, ce dispositif a très bien fonctionné et vous y étiez, à l’époque, favorables.

Mme Annie David. Personne n’en veut, de votre PERCO !

M. Éric Woerth, ministre. D’ailleurs, les salariés sont également favorables à ce type de solutions.

Il semblait évidemment important, comme l’a souhaité l’Assemblée nationale, qu’un texte sur la retraite comprenne une partie, au demeurant modeste, sur l’épargne retraite.

Nous ne remettons pas en cause le système de l’épargne retraite ; nous ne faisons qu’intervenir sur quelques points pour améliorer ou ajuster les choses.

Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, vous faites de l’idéologie à outrance, alors que la répartition représente quasiment la totalité des retraites en France.

M. Dominique Braye. Ils ne savent plus où ils sont !

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Monsieur le ministre, vous nous accusez d’en faire trop, mais je voudrais vous rappeler les déclarations de M. le rapporteur et de certains de nos collègues sur le système par répartition au début de l’examen du texte – il est vrai que cela commence à faire loin !

M. Leclerc nous a indiqué que, comme rapporteur, il défendait bien évidemment le projet de loi, mais qu’il regrettait que l’on n’ait pas été plus loin dans une étude systémique. Notre collègue n’a pas caché qu’il était intéressé par d’autres systèmes, comme les comptes notionnels ou le système par points, que nous aurions dû examiner.

M. Éric Woerth, ministre. Le système par points, c’est un système par répartition !

M. Jean Desessard. À plusieurs reprises, le groupe de l’Union centriste a manifesté sa préférence pour le système par points, et ce n’est pas insulter nos collègues que de le rappeler.

Monsieur le ministre, je rappelle les termes du premier alinéa du texte proposé par l’article 1er A pour l’article L.161-17A du code de la sécurité sociale : « La Nation réaffirme solennellement le choix de la retraite par répartition au cœur du pacte social qui unit les générations. » Plus loin, le texte proposé pour le quatrième alinéa énumère les objectifs de ce système de retraite : « Le système de retraite par répartition poursuit les objectifs de maintien d’un niveau de vie satisfaisant des retraités, de lisibilité, de transparence, d’équité intergénérationnelle, de solidarité intragénérationnelle et de pérennité financière ».

Si tous ces objectifs sont garantis par la répartition, pourquoi vouloir, à la fin du texte, comme « au cas où », introduire la capitalisation ?

M. Charles Revet. Mais l’un n’empêche pas l’autre !

M. Jean Desessard. Ce n’est pas logique !

Nous vous l’avons dit, cette réforme injuste va échouer, car elle n’est pas financée et parce qu’elle va à contresens. Nous voulons un autre système, qui ne soit pas celui la capitalisation.

Vous n’avez pas arrêté de nous répéter que vous alliez sauver le système, qui est satisfaisant, et vous nous en donnez des garanties à l’article 1er A. Et tout cela pour terminer sur une incitation à la capitalisation pour assurer des revenus complémentaires !

Alors, de deux choses l’une : ou bien vous anticipez une baisse générale des pensions, mais ce n’est pas ce que vous avez dit depuis le début du débat ; ou bien vous considérez, une fois de plus, que les entreprises doivent aider les dirigeants, les cadres et les salariés les plus riches.

Alors, monsieur le ministre, oui, nous voyons loin, mais nous n’en faisons pas trop ! Nous voyons surtout où vous voulez aller : vous êtes tout aussi conscients que nous que votre réforme n’est pas au point et vous préparez pour demain un système par capitalisation ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Dominique Leclerc, rapporteur. N’importe quoi !

M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

M. David Assouline. M. Woerth nous dit que nous voyons loin, mais là est tout l’enjeu de la discussion ! Au début du débat sur les retraites, vous avez expliqué qu’il était important d’aller vite et que nous devions pouvoir regarder nos enfants dans les yeux en leur assurant un système de retraite pérenne. Cette entrée en matière vous permet de tout justifier.

Or, vous le savez, votre réforme ne pérennise le système de retraite que jusqu’en 2012, 2014, voire, comme vous le prétendez, 2018 ! Ce n’est donc pas du tout la réforme systémique que vous annonciez, d’autant qu’il y a déjà une clause de rendez-vous en 2014.

Vous « insécurisez » le système avec une réforme purement conjoncturelle, qui ne vise qu’à colmater une brèche. Lorsque l’on interroge les jeunes générations, on se rend compte qu’elles n’ont aucune garantie quant à l’avenir du système de retraite par répartition, ce qui les encourage à se doter d’une retraite propre. D’ailleurs, je ne sais pas si la retraite par répartition existera encore pour ceux qui entrent aujourd’hui dans la vie active, la réforme n’allant pas plus loin que 2012.

Avec l’allongement de la durée de cotisation et le faible taux d’emploi des seniors, le niveau des pensions, qui a déjà diminué de 25 % depuis 2002, continuera automatiquement de baisser. Les pensions qu’ils touchent actuellement ne permettent déjà pas aux retraités de vivre décemment, mais la situation va se dégrader brutalement. La grande pauvreté est devant nous, et de plus en plus de retraités vivront avec le minimum vital, voire sous le seuil de pauvreté défini par la Communauté économique européenne, c’est-à-dire 880 euros.

Telles sont les deux perspectives. Donc, ne nous dites pas que nous voyons loin ! Nous sommes bien obligés de regarder ce qui se passera après, car votre réforme repose sur une logique politique d’insécurisation qui va naturellement conduire les Français à rechercher les moyens de s’assurer une retraite décente. Aussi, lorsque nous voyons apparaître à la fin du projet de loi cet article, nous y regardons à deux fois et nous ne pouvons que constater qu’il ouvre une porte. C’est parfois dans le détail…

M. Martial Bourquin. … que se cache le diable !

M. David Assouline. Je n’irai pas jusque-là, pour ne pas risquer de diaboliser le Gouvernement, énerver le ministre et provoquer un brouhaha général sur les travées de la majorité. Je garde donc dans un langage qui permette à chacun de garder son calme. (Sourires.) Non, je préfère parler de projet caché, qui serait ainsi révélé.

Enfin, j’ai interrogé le Gouvernement, mais je n’ai obtenu, jusqu’à présent, qu’une explication confuse – peut-être M. Tron me répondra-t-il ? –, sur les 15 milliards d’euros qui manquent au financement de votre réforme après 2012, une fois que le Fonds de réserve pour les retraites aura été vidé.

Non seulement votre réforme est injuste, mais elle est inefficace. Ces 15 milliards d’euros, ce sont des contributions de l’État, donc du déficit. Alors, vous voulez faire la réforme vite, n’importe comment, sans négocier, parce que le système coule, et vous ne faites en réalité que transférer du déficit. Mais votre réforme n’est qu’un habillage pour faire payer toujours les mêmes, les salariés.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Georges Tron, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. Monsieur Assouline, je vous réponds très volontiers en quelques mots, mais nous pourrons, si vous le souhaitez, poursuivre cette conversation en privé pour ne pas allonger les débats.

Vous m’avez posé plusieurs fois cette même question et je vous y ai déjà répondu. Soit je ne suis pas clair du tout, ce qui est possible ; soit, si j’ose dire, vous avez un problème de compréhension.

En deux mots, le COR a établi que, le montant total des pensions versées étant à base 100 en 2000, il est à base 115 en 2010.

Premièrement, ces 15 milliards d’euros de différence sont identifiés comme étant l’évolution du montant total des pensions.

Deuxièmement, ils serviront à abonder le montant total du versement des retraites. Ils sont donc sanctuarisés, identifiés en dépenses dans le cadre du budget de l’État et en recettes dans le cadre du compte d’affectation spéciale.

Loin d’être virtuels, ces 15 milliards d’euros sont parfaitement identifiés !

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.

M. Guy Fischer. Pour ma part, je voudrais élargir le débat en vous faisant part d’une dépêche d’une agence qui est très sérieuse, mais que vous ne manquerez pas de contester, chers collègues de la majorité.

M. Josselin de Rohan. L’agence Tass ?

M. Guy Fischer. Non, l’agence Mediapart ! (Exclamations sur les travées de lUMP.)

M. Josselin de Rohan. C’est pareil !

M. Jean Desessard. C’est une excellente agence !

M. Guy Fischer. Cela me permettra de répondre à Mme Debré : avec les amendements qu’elle a déposés sur le PERCO, il s’agit en fait de capter l’épargne populaire.

Selon Mediapart, la réforme « va conduire à l’asphyxie financière des grands régimes par répartition » et sera donc « propice à l’éclosion de ces grands fonds de pension qui n’étaient pas encore parvenus à s’acclimater en France, à quelques rares exceptions près ». Parmi les opérateurs privés qui sont d’ores et déjà sur les rangs, figure le groupe Malakoff Médéric, présidé par Guillaume Sarkozy. (Ah ! sur les travées de lUMP.)

Celui-ci bénéficie d’alliés puissants. « Il ne s’agit pas que d’une coïncidence. Mais bien plutôt d’une stratégie concertée en famille », écrit Mediapart.

M. Josselin de Rohan. Un vrai complot !

M. Guy Fischer. « L’un assèche les régimes par répartition tandis que l’autre pose les fondements du système par capitalisation ». On ajoute : « Guillaume Sarkozy a engagé son entreprise dans une politique visant à en faire un acteur majeur de la retraite complémentaire privée. Et il a trouvé des alliés autrement plus puissants que lui, en l’occurrence la Caisse des dépôts et consignations, la CDC, le bras armé financier de l’État, et sa filiale, la Caisse nationale de prévoyance, la CNP. Ensemble, tous ces partenaires vont créer, le 1er janvier prochain, une société commune qui rêve de rafler une bonne part du marché qui se profile. » Cette société s’appellera Sevriena.

« Cette société n’aurait jamais vu le jour sans l’appui de l’Élysée », écrit Mediapart. En effet, la Caisse des dépôts et consignations est une institution publique présidée par un parlementaire. Pour sa part, la CNP est une filiale de la CDC, de La Banque postale et du groupe Caisses d’Épargne, lui-même présidé par… François Pérol, ancien secrétaire général adjoint de l’Élysée !

En outre, la Caisse des dépôts et consignations gère le Fonds de réserve pour les retraites, qui a été « siphonné » pour payer les dettes de la CADES !

« Pourquoi la CDC se lance-t-elle dans pareille aventure pour faire le jeu du système adverse, celui par capitalisation ? », demande Mediapart. « Et pourquoi, de surcroît, le faire avec une entreprise dont le patron est le frère du chef de l’État ? »

L’enjeu n’est pas mince. Le marché pourrait représenter « 40 à 100 milliards d’euros » en fonction de l’aspect final de la réforme dont nous discutons. Les Français connaîtront une baisse, plus ou moins considérable, du taux de remplacement, c’est-à-dire du montant de la pension rapporté au salaire. Ils se précipiteront donc sur les systèmes de retraite complémentaire. D’ailleurs, les publicités pour les sociétés spécialisées dans la retraite par capitalisation fleurissent déjà à la télévision ! Mediapart publie notamment un business plan confidentiel, qui fixe pour objectif une part de marche de « 17 % » d’ici dix ans.

Pour ma part, je crois ce que dit cette dépêche.

M. Dominique Leclerc, rapporteur. Bien sûr !

Mme Isabelle Debré. Le contraire serait étonnant !

M. Guy Fischer. Voilà quelle est la ligne tracée pour l’avenir : elle permettra d’asseoir de futurs systèmes de retraite par capitalisation. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.) Et je vous remercie infiniment de m’avoir écouté, chers collègues.

M. Dominique Leclerc, rapporteur. Une vision pareille !

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Debré.

Mme Isabelle Debré. J’ai été interpellée, aussi vais-je répondre.

Monsieur Desessard, vous confondez, me semble-t-il, comptes notionnels, système à points et régimes par capitalisation.

Je rappelle que l’idée même d’une réforme systémique est proposée par Mme Aubry elle-même.

Mme Christiane Demontès. Oui, et alors ?

Mme Isabelle Debré. Je voulais juste vous le rappeler ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Vous confondez aussi l’épargne retraite avec les régimes par capitalisation et les fonds de pension.

M. le ministre l’a dit tout à l’heure, en France, sur 100 euros de retraite, seuls deux euros vont sur les dispositifs d’épargne retraite.

M. Guy Fischer. Cela va changer !

Mme Isabelle Debré. Pourquoi dites-vous cela ?

Nous nous donnons énormément de mal aujourd’hui pour sauver le régime de retraite par répartition, mais l’un n’empêche pas l’autre. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) C’est ahurissant, c’est vraiment totalement idéologique !

Vous nous dites que les dispositifs d’épargne retraite, notamment les PERCO, sont réservés aux cadres. C’est totalement faux : au contraire, ce sont des dispositifs collectifs et c’est dans la définition même de leur régime juridique.

M. Josselin de Rohan. Ils disent n’importe quoi !

Mme Isabelle Debré. En effet, c’est absolument n’importe quoi ! De telles approximations montrent que votre approche est terriblement idéologique. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Éric Woerth, ministre. Je veux juste ajouter que, par exemple, la PREFON est un régime par capitalisation géré par les partenaires sociaux.

M. Éric Woerth, ministre. De même, la retraite additionnelle de la fonction publique, la RAFP, est un régime par capitalisation géré par les partenaires sociaux.

Quant au Fonds de réserve pour les retraites, c’est encore de la capitalisation, ce n’est pas autre chose : c’est la mise en réserve d’un capital.

Ne soyez donc pas crispés sur une idéologie !

Mme Isabelle Debré. Et FONPEL, monsieur le ministre ?

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 278 et 1107 tendant à supprimer l’article 32 bis C.

J’ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable de même que l’avis du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 68 :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 335
Majorité absolue des suffrages exprimés 168
Pour l’adoption 153
Contre 182

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n° 469, présenté par Mme Demontès, MM. Bel, Teulade, Le Menn, Godefroy, Daudigny et Desessard, Mmes Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Schillinger et Printz, MM. Cazeau, Jeannerot et Kerdraon, Mmes Ghali, Alquier, Campion et San Vicente-Baudrin, MM. Gillot, S. Larcher, Domeizel, Assouline et Bérit-Débat, Mmes M. André, Blondin, Bourzai et Khiari, MM. Bourquin, Botrel, Courteau, Daunis, Guérini, Guillaume, Haut, Mahéas, Mirassou, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Supprimer les mots :

ou obligatoire

La parole est à Mme Jacqueline Alquier.

Mme Jacqueline Alquier. L’article 32 bis C permet d’avoir enfin une définition de l’épargne retraite, ce qui n’est pas inutile.

On y rappelle que l’épargne retraite vise à compléter les pensions – je dis bien « compléter » – dues au titre des régimes de retraite par répartition qui sont légalement obligatoires.

On ajoute que l’épargne retraite a pour but de disposer de revenus découlant d’une épargne constituée individuellement ou collectivement à partir de versements sur une base volontaire ou obligatoire réalisés à titre privé ou lors de l’activité professionnelle.

Pour nous, il est clair que seules les cotisations au régime par répartition doivent être obligatoires, parce qu’elles sont seules à garantir le versement de pensions viagères. Nous pouvons toujours discuter du montant des pensions issues de la répartition, mais nous avons la garantie qu’elles existeront. Nul ne s’aventure à le contester.

En revanche, la participation de salariés à des contrats collectifs d’entreprise, pour le dire simplement, pose problème dès lors qu’elle est obligatoire.

Nous nous sommes informés sur les systèmes d’épargne retraite décidés dans d’autres pays.

Le plus intéressant est évidemment ce qui a été mis en place dans les pays atteints par un vieillissement de la population. La Suède, la Norvège, le Danemark, le Royaume-Uni, l’Australie et la Nouvelle-Zélande se sont ainsi dotés d’un dispositif d’épargne retraite obligatoire ayant pour but de compléter les régimes par répartition.

Nous avons constaté que ces régimes n’ont souvent d’obligatoire que le nom et qu’ils ne sont, en tout cas, pas généraux. Par exemple, en Australie, en Suède et en Norvège, l’obligation ne pèse que sur l’employeur. En Nouvelle-Zélande et en Australie, la répartition relève de la négociation collective. Au Danemark, l’épargne retraite est demeurée marginale et ne repose que sur les employés.

Le plus intéressant est une disposition spécifique propre au Royaume-Uni. Dans ce pays largement acquis à l’idéologie ultralibérale, il existe une disposition qui respecte – précisément – le libre choix du salarié. L’affiliation de l’employeur n’entraîne pas obligatoirement l’adhésion du salarié, qui a le choix de résilier le contrat le concernant pour son propre compte.

En France, avec le régime de l’article 83, par exemple, l’adhésion de l’employeur emporte celle du salarié, alors que ce régime est à cotisations définies et non – faut-il le préciser – à prestations définies.

C’est une question de fond, sans jeu de mots.

Les évolutions erratiques des cours de bourse, une bourse où est investie une grande partie des sommes apportées par les salariés et abondées par les employeurs, ne doivent-elles pas constituer un signal d’alerte ?

Cet argent ne va pas à la consommation, puisqu’il est malheureusement utilisé à la spéculation financière par les gestionnaires de fonds.

Il ne va pas à la consommation ni donc à la croissance, croissance dont nous avons pourtant un besoin impératif pour créer des emplois et pour augmenter le nombre de cotisants pour la retraite par répartition.

Il ne va pas plus à l’investissement des entreprises ni à la recherche pour le développement de nouveaux produits.

Le système actuel, et celui que vous mettez en place, est d’une parfaite hypocrisie, puisque les salariés, même s’ils ne le veulent pas, même s’ils préféreraient disposer immédiatement de leur argent, sont obligés, par les contrats groupés, de faire un placement en épargne retraite. (C’est fini ! sur les travées de lUMP.)

Il n’existe aucune loi claire sur le sujet, simplement des dispositifs épars, illisibles, dont on voit qu’ils exercent une contrainte sur les salariés, sans que rien n’ait été publiquement débattu. (Mêmes mouvements.)

En conséquence, nous souhaitons que le caractère obligatoire des contrats soit supprimé. L’épargne retraite doit rester du libre choix du salarié. Le consentement individuel, exprès et éclairé du salarié doit demeurer en toutes circonstances requis. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. Il existe des dispositifs individuels et facultatifs d’épargne retraite et des dispositifs collectifs. Mais, si le salarié ne veut pas y adhérer, ce n’est pas obligatoire.

Il n’a jamais été prévu que le salarié soit obligé d’abonder ce plan d’épargne retraite ; ce sont des contrats qui peuvent être abondés par l’employeur.

La commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Woerth, ministre. Je répète ce que j’ai dit en commission : obligatoire, cela veut dire que ces contrats font partie d’un accord d’entreprise. Par conséquent, le salarié y adhère parce qu’il y a un accord d’entreprise valant pour tous.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 469.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote sur l’article.

M. Jean Desessard. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, vous aurez compris le sens de mon vote puisque j’ai défendu un amendement tendant à la suppression de cet article.

Mme Debré – je l’en remercie – a tenté de me prouver que je mélangeais tout. Il me faut donc reprendre mes explications.

J’ai voulu dire qu’au début de l’examen du projet de loi, les avis étaient partagés sur le bon système et que, idéologiquement, certains collègues étaient pour le système à points, qui se rapproche tout de même d’un système par capitalisation. (Mme Isabelle Debré s’exclame.)

Certains étaient pour un système de comptes notionnels, qui est non pas directement un compte par capitalisation, mais une capitalisation de génération vers génération, personnalisée. (M. Gérard Longuet s’exclame.)

Mme Isabelle Debré. Oh là là !

M. Jean Desessard. Tout cela faisait débat. Aussi, quand M. le ministre nous dit que nous allions trop loin, je lui réponds que je me fondais simplement sur les différentes appréciations du bon système.

J’ai entendu M. le rapporteur, il y a trois semaines – je sais que cela fait loin, maintenant – dire qu’il fallait, bien sûr, être favorable à ce projet de loi, mais tout en regrettant que l’on n’ait pas étudié d’autres systèmes. (M. le rapporteur fait un signe dubitatif.) Je me rappelle l’avoir entendu, monsieur le rapporteur, ou alors il faudra que nous relisions ensemble le compte rendu !

Donc, c’était le premier point, je voulais dire que nous n’allions pas trop loin lorsque nous prêtions aux promoteurs de ce projet de loi des intentions qui n’étaient pas simplement la défense du système par répartition.

S’agissant du PERCO, madame Debré, je n’ai jamais dit qu’il n’était pas ouvert à tous.

Mme Isabelle Debré. Vous avez dit qu’il était réservé aux cadres !

M. Jean Desessard. Je prétends que ceux qui ont les moyens d’en profiter davantage, ce sont les salariés les plus aisés. Par conséquent, cela veut dire que les plus bas salaires utiliseront moins ce système.

Mme Isabelle Debré. Ce n’est pas ce que vous avez dit, vous avez parlé des cadres !

M. Jean Desessard. C’est étonnant : on dit que les entreprises ne peuvent pas payer de cotisations supplémentaires ou d’impôts supplémentaires, mais, là, les entreprises peuvent payer, comme par hasard, lorsqu’il s’agit d’arranger les dirigeants d’entreprise ! (Eh oui ! sur les travées du groupe socialiste.) Et, comme par hasard encore, lorsqu’il y a des exonérations de charges !

Mme Annie David. Et voilà !

M. Jean Desessard. Mais qui va payer ?

On nous a fait tout un plat, si je puis dire, à propos de ce projet de loi concernant le système de retraite par répartition et, dans les tout derniers articles, on autorise les entreprises à bénéficier d’exonérations en cas de versement de jours de congé sur un PERCO. Autrement dit, c’est l’État qui paiera !

C’est signé, nous sommes sur la voie d’un système par capitalisation.

Ce qu’a dit M. Fischer est important.

M. Robert del Picchia. Ce qu’il dit est toujours important ! (Sourires.)

M. Jean Desessard. Pourquoi la Caisse des dépôts et consignations mettrait-elle ses fonds à la disposition des prédateurs, ceux qui achètent une entreprise et qui, pour obtenir un taux de rentabilité compris entre 10 % à 15 %, la dépècent en la délocalisant et en licenciant, après avoir pris les brevets !

Voilà ce que sont les capitaux prédateurs ! Et ce sont les capitaux prédateurs qui tuent l’économie !

M. Jean Desessard. Il n’appartient pas à la Caisse des dépôts et consignations de jouer ce rôle !

Mme Annie David. Exactement !

M. Jean Desessard. Lorsque les copains et les coquins s’associent, cela ressemble plus à une République bananière ! Prenons-y garde, tant l’opposition que la majorité ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 32 bis C.

(L'article 32 bis C est adopté.)