PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

M. le président. La séance est reprise.

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Questions d'actualité au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que l’auteur de la question de même que la ou le ministre pour sa réponse disposent chacun de deux minutes trente, délai qu’ils veilleront, j’en suis sûr, à respecter.

protection des jeunes bosniaques à paris

M. le président. La parole est à Mme Muguette Dini.

Mme Muguette Dini. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s’adresse à Mme la ministre des solidarités et de la cohésion sociale et porte sur la protection de l’enfance, sur la protection de ces très jeunes filles bosniaques, âgées de dix à seize ans, qui sont arrêtées pour des vols à la tire, en particulier dans le métro parisien et sur les sites touristiques.

Madame la ministre, nous connaissons peu de chose de la vie de ces très jeunes filles, pour certaines des fillettes, sinon que, pour la plupart, elles ont été achetées ou arrachées à leur famille par un réseau mafieux.

On leur a appris à voler en bande et inculqué quelques mots de français leur permettant de répondre ce qu’il faut à la police, en cas d’interpellation. En garde à vue, face aux policiers de la brigade des mineurs, leur discours est en effet bien rodé. Elles déclinent la même fausse identité et refusent tout relevé d’empreintes digitales, prélèvement d’ADN ou examen osseux, ce qui ne permet aucune identification concernant leur âge, leur identité, leur adresse.

Ensuite, elles sont généralement placées dans un foyer, d’où elles s’enfuient dans les heures qui suivent. Elles retrouvent aussitôt la rue et leurs activités délinquantes, parce qu’elles ont un contrat d’objectifs à respecter : on sait que chaque jeune fille doit rapporter 300 euros par jour à ses « employeurs ». À défaut, elle sera frappée à main nue, à l’arme blanche, elle subira des actes de torture, des viols.

Madame la ministre, comment peut-on, en toute connaissance de cause, tolérer que, sur notre sol, des mineures soient exploitées et maltraitées tant psychiquement que physiquement ? Comment le Gouvernement entend-il faire respecter le droit de l’enfant à être protégé, comme le prévoit notre loi ? (Applaudissements sur les travées de lUnion centriste et de lUMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Madame Dini, vous appelez l’attention du Gouvernement sur un sujet particulièrement grave concernant la protection de l’enfance.

En effet, depuis le début des années quatre-vingt-dix arrivent sur notre sol des mineurs, non seulement bosniaques mais aussi d’autres nationalités, pour se livrer, en bande ou isolément, à des actes de délinquance, avec parfois la complicité de leurs parents.

Le Gouvernement – et tout particulièrement le ministère dont j’ai la responsabilité – soutient un certain nombre de dispositifs, en particulier le dispositif Versini, qui a pour objet, dans les grandes villes, de repérer et de mettre à l’abri ces mineurs.

Évidemment, la justice ne reste pas inactive : outre les actions du parquet des mineurs, les juges sont amenés à ordonner le placement provisoire de ces mineurs délinquants dans un établissement pour enfants ou dans une famille d’accueil. Cependant, comme vous l’avez fait remarquer, les fugues sont fréquentes, ce qui constitue un obstacle à leur remise à un parent de confiance ou à l’aide sociale à l’enfance, et même à leur retour au pays.

C’est pourquoi le démantèlement de ces réseaux mafieux est très important pour assurer une réelle protection de ces enfants. Croyez bien que le ministère de l’intérieur s’y emploie.

Il n’en demeure pas moins que nous voulons aller plus loin. C’est ainsi que, sur la proposition de votre collègue Isabelle Debré, nous sommes en train d’expertiser un dispositif interministériel placé sous la responsabilité de la protection judiciaire de la jeunesse.

En matière de coopération internationale, en particulier avec les autorités bosniaques, la France déploie ses efforts au sein du Conseil de l’Europe. Dans cette optique, en 2008, notre pays a ratifié la convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains, à laquelle la Bosnie a également adhéré.

J’ajoute que c’est un officier de gendarmerie français, Nicolas Le Coz, qui vient d’être porté à la tête du GRETA, le groupe d’experts sur la traite des êtres humains, lequel s’est réuni à Strasbourg voilà quelques jours.

Voilà, madame la sénatrice, l’ensemble des actions que mène la France en faveur de la protection des mineurs étrangers, qu’il s’agisse de dispositifs expérimentaux ou d’initiatives au niveau international. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

fonctionnement des institutions

M. le président. La parole est à Mme Catherine Tasca.

Mme Catherine Tasca. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Dans quelle République vivons-nous ?

Comme à son habitude, le ministre de l’intérieur a commenté, pour la contester, une décision de justice. Ses propos, destinés à jeter le discrédit sur le jugement du tribunal de Bobigny, qui a condamné en premier ressort sept policiers, ont rallumé la guerre récurrente entre police et justice.

Le préfet de la République, quant à lui, a cru bon d’apporter séance tenante son soutien aux policiers condamnés.

Le garde des sceaux a finalement rappelé l’indépendance de la justice, mais on peut s’interroger sur cette version nouvelle de la solidarité gouvernementale.

Ce tumulte, sur fond de manifestations policières contestant une décision de justice, ne doit pas occulter le vrai problème : des policiers ont, de façon concertée et préméditée, monté un dossier contre un citoyen, l’accusant d’une agression à l’égard des forces de l’ordre, alors qu’ils étaient eux-mêmes auteurs des faits. Ce faisant, ils savaient qu’ils pouvaient faire lourdement condamner cet homme.

Tous les élus connaissent les difficultés des métiers de policier et de magistrat. Leurs missions sont rendues encore plus difficiles par la réduction des moyens et des effectifs que vous leur imposez. (Mme Patricia Schillinger applaudit.)

M. Roland Courteau. C’est vrai !

Mme Catherine Tasca. Mais les contraintes du maintien de l’ordre dans certains quartiers ne sauraient justifier de tels comportements.

Le soutien du ministre de l’intérieur à ces policiers condamnés est incompréhensible pour la grande majorité de leurs collègues qui remplissent leur tâche avec rigueur. Il vous revient de donner fermement un coup d’arrêt à des actes qui, ici ou là, déshonorent la police et qui ne doivent pas la gangrener.

Une police républicaine, armée d’une vraie déontologie, est un pilier fondamental de notre démocratie.

En laissant prospérer la loi du silence – dont une jeune policière, Sihem Souid, semble aujourd’hui faire les frais –, en défendant la culture de l’excuse pour ceux qui piétinent les lois en escomptant l’indulgence de leur hiérarchie et l’impunité, alors qu’ils ont pour mission de les faire appliquer, vous contribuez à dégrader la confiance des citoyens dans nos forces de l’ordre.

Mme Catherine Tasca. Ainsi, vous affaiblissez l’État de droit et la République.

Monsieur le Premier ministre, que comptez-vous faire pour que ces agissements d’une gravité exceptionnelle, mais qui restent, heureusement, minoritaires, ne puissent se reproduire ni être couverts ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement.

M. Jean-Pierre Sueur. Le ministre de l’intérieur s’est défilé ! Où est-il ?

M. Guy Fischer. C’est se moquer de nous !

M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement. Madame le sénateur, sur cette affaire, le Premier ministre, le ministre de l’intérieur et le garde des sceaux se sont déjà exprimés.

Je me permettrai simplement de vous rappeler que c’est l’autorité policière elle-même qui a signalé ces actes que la justice a condamnés.

Je vous rappellerai également que c’est le ministre de l’intérieur lui-même, Brice Hortefeux, qui a saisi l’inspection générale des services, ce qui a permis, d’une part, que la vérité se manifeste,…

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et M. Guy Fischer. C’est la moindre des choses !

M. David Assouline. Faut-il dire merci ?

M. François Baroin, ministre. … d’autre part, que le tribunal puisse prononcer un jugement.

Dans quelle République vivons-nous, demandez-vous ? Alors, je vous invite à revenir quelques années en arrière. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. David Assouline. Vous allez finir par percuter le mur à toujours regarder dans le rétroviseur !

M. François Baroin, ministre. Nous sommes en janvier 1999. Je ne me souviens plus si vous étiez alors membre du Gouvernement, madame Tasca. En revanche, je me souviens que le ministre de l’intérieur s’appelait Jean-Pierre Chevènement. Celui-ci souhaitait remettre en cause l’ordonnance de 1945 sur l’enfance délinquante : tollé général du côté de la justice, encouragé et accompagné par sa collègue garde des sceaux, qui n’en a pas moins cru bon, de manière très audacieuse, d’interroger le Gouvernement, mardi dernier, à l’Assemblée nationale.

Dans quelle République vivions-nous donc en 1999 ?

Mme Raymonde Le Texier. Et si vous répondiez à la question !

M. François Baroin, ministre. Pendant un mois, un débat ubuesque a opposé le ministre de l’intérieur, M. Chevènement, et la garde des sceaux, Mme Guigou, sans que jamais le Premier ministre, M. Jospin, n’exprime la position officielle du Gouvernement. (Vives exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – Applaudissements sur les travées de lUMP.) Dans quelle République vivions-nous ? (Mêmes mouvements sur les travées de lUMP. – Les protestations s’amplifient sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Plusieurs sénateurs du groupe socialiste. Zéro !

M. Didier Boulaud. C’est lamentable !

M. Yannick Bodin. Réponse nulle, monsieur Baroin !

M. Roland Courteau. Il était à bout d’arguments !

M. Didier Boulaud. Monsieur le président, défendez le Sénat !

M. Jacques Mahéas. Ils ont tout raté !

conséquences des réductions de personnel dans la fonction publique

M. le président. La parole est à M. Bernard Vera.

M. Bernard Vera. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Trois mille personnes hébergées dans des centres d’urgence en Île-de-France, plus de sept mille à Vélizy, 350 kilomètres de bouchons aux abords de Paris, 2 500 poids lourds bloqués,…

M. Bruno Sido. Mais que fait le Gouvernement ?... (Sourires sur les travées de lUMP.)

M. Éric Doligé. Allez en Sibérie ! (Mêmes mouvements.)

M. Bernard Vera. … une suspension du trafic aérien avec des milliers de passagers en attente à Roissy et à Orly, des perturbations sur l’ensemble du réseau transilien, et j’en passe.

Un sénateur de l’UMP. Météo trahison, Gouvernement complice ! (Mêmes mouvements.)

M. Bernard Vera. Ces chiffres de la préfecture de police de Paris témoignent de l’immense pagaille provoquée par la vague neigeuse de jeudi dernier.

Vous avez tenté de reporter la responsabilité sur Météo France,…

M. Guy Fischer. C’est scandaleux !

M. Bernard Vera. … qui, selon vous, « n’avait pas prévu l’intensité de cet épisode neigeux ».

M. Alain Gournac. Les communistes non plus ! (Mêmes mouvements.)

M. Bernard Vera. En réalité, ce grave dysfonctionnement illustre l’impasse que constitue votre politique de rigueur, symbolisée par la révision générale des politiques publiques.

M. Alain Gournac. Ça, c’est vraiment un raisonnement minable !

M. Bernard Vera. Fonctionnement à flux tendu, suppression d’un fonctionnaire sur deux, rabotage de l’ensemble des politiques publiques : tout cela a fini par altérer la capacité de l’État à faire face aux aléas climatiques.

M. Guy Fischer. Voilà la vérité !

M. Bernard Vera. Les réorganisations brutales des services de l’État, notamment dans le secteur de l’équipement, ont dégradé leur organisation sur les territoires et leur capacité à prévenir et à gérer les situations de crise.

Ainsi, depuis trois ans, selon des sources syndicales, il manque 10 000 agents pour assurer un bon fonctionnement du service public.

M. Bruno Sido. Ils n’ont qu’à travailler un peu plus !

M. Bernard Vera. Pourtant, vous prévoyez une nouvelle saignée des emplois publics pour la période 2011-2013.

Quant aux crédits consacrés à l’entretien des routes, ils vont encore baisser de plus de 20 millions d’euros d’ici à l’an prochain.

Comme toujours, ce sont les collectivités de proximité qui ont géré la pénurie, notamment en offrant un hébergement aux personnes bloquées sur les routes. Alors que leurs services publics locaux assurent une part importante de la solidarité nationale, vous voulez leur appliquer de force votre politique d’austérité en les privant de ressources et en gelant leur dotation pendant trois ans.

M. Roland Courteau. Quelle République !

M. Bernard Vera. Avec cette politique de rigueur, les collectivités locales n’auront pas le choix : ce sera soit la hausse des impôts locaux, soit la réduction des services publics, au détriment de la réponse aux besoins des populations locales, notamment des plus fragiles d’entre elles.

Voilà donc votre conception de la solidarité nationale, de la cohésion sociale et de l’intérêt général !

Monsieur le Premier ministre, ma question est simple. Quand donc allez-vous cesser de faire payer au peuple les conséquences de la crise alors que vous épargnez les banques et les financiers, qui en portent pourtant l’unique responsabilité ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la fonction publique.

M. Didier Boulaud. Il va nous parler de l’hiver 1956 ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) C’est qu’il a fait froid, cette année-là !

M. Georges Tron, secrétaire d'État auprès du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’État, chargé de la fonction publique. Je ne vais pas épiloguer sur l’épisode que nous avons vécu la semaine dernière. Élu d’un département qui vous est cher, monsieur le sénateur, je peux porter témoignage que les agents de l’État, comme ceux des départements et des communes, ont fait ce qu’ils pouvaient,…

M. Robert Hue. Ce n’est pas ce qu’a dit le Premier ministre !

M. Georges Tron, secrétaire d'État. … dans des conditions qui n’étaient pas faciles, pour améliorer la situation. (Applaudissements sur les travées de lUMP. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Je ne ferai aucun distinguo entre les uns et les autres. Toutefois, si je le voulais, je pourrais rappeler que le secteur des transports relève plutôt de la compétence départementale... Mais ce n’est pas le sujet ! (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)

Je préfère m’arrêter sur le second aspect de votre intervention, qui vise à établir un lien entre la situation que nous avons connue et la politique qui est conduite depuis plusieurs années.

Première question : le nombre des agents publics en France permet-il de conclure que notre pays est aujourd’hui sous-administré ?

Plusieurs sénateurs des groupes CRC-SPG et socialiste. Oui !

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Eh bien, je vais vous apporter des chiffres précis.

Notre pays compte à ce jour 1,4 million d’agents de plus qu’en 1980, époque à laquelle, vous en conviendrez, la France n’était pourtant pas sous-administrée. Il y en a eu 550 000 de plus entre 2000 et 2008 et, très précisément, 350 000 de plus, hors transferts de compétences, dans les collectivités territoriales.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il y a aussi beaucoup plus d’habitants qu’avant !

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Excusez-moi de vous le dire, mais il n’y a que vous pour nous expliquer qu’aujourd’hui la France manque d’agents publics alors que, dans aucun autre pays de niveau comparable, on ne trouve un ratio d’agents publics par rapport à la population aussi élevé.

Deuxième question : cette situation découle-t-elle d’une vue de l’esprit ? Pas du tout ! Depuis des années, d’audits en stratégies ministérielles de réforme, en passant par la RGPP, un débat est mené, qui a d’ailleurs été aussi alimenté par les organisations syndicales, en vue de procéder à des ajustements.

Troisième question : tous les ministères sont-ils logés à la même enseigne ? Non, bien sûr ! Certains conservent le même nombre d’agents tandis que d’autres voient leurs effectifs évoluer à la hausse ou à la baisse.

Quatrième question : les agents publics sont-ils les victimes de cette politique ? Bien évidemment, non ! Il suffit, pour s’en convaincre, d’observer les effets de la réduction du nombre d’agents en application de la règle dite du « un sur deux ». Monsieur Vera, plus de 70 % des sommes économisées grâce au non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ont été reversées aux agents publics sous la forme de mesures catégorielles.

M. Didier Boulaud. Il n’y a plus de quoi les payer !

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Nous avons donc fait le pari de remotiver les agents publics et de mieux les rémunérer.

M. Didier Boulaud. Vous êtes impécunieux !

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, invoquer la situation que nous avons connue la semaine dernière pour en arriver à votre conclusion me semble donc pour le moins hâtif. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. Jacques Mahéas. Lamentable !

enquête pisa

M. le président. La parole est à M. Laurent Béteille.

M. Laurent Béteille. Ma question concerne l’action du Gouvernement en faveur de la réussite scolaire et de l’accomplissement individuel.

M. Didier Boulaud. Alors, ça va être vite fait ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Laurent Béteille. Conduite par l’OCDE, l’enquête PISA – programme international pour le suivi des acquis des élèves – est une étude internationale qui est menée tous les trois ans. Elle évalue et compare les connaissances des élèves de 15 ans dans trois domaines : la lecture, les mathématiques et la culture scientifique.

Les résultats pour 2009, présentés le 7 décembre dernier, sont venus nous rappeler que la France ne figure pas, hélas ! en tête du classement, il s’en faut.

M. Didier Boulaud. Que faites-vous depuis 2002 ?

M. Jacques Mahéas. Vous avez supprimé 50 000 postes !

M. Laurent Béteille. La France, pour être l’un des pays de l’OCDE qui dépensent le plus d’argent par élève, ne parvient pas à rivaliser avec des pays aux cultures et pratiques aussi différentes que Singapour, la Corée du Sud, la Finlande ou l’Allemagne. Pis, la France recule là où notre voisin parvient, pour un coût moindre, à améliorer sensiblement ses performances.

M. Didier Boulaud. Qui gouverne la France depuis dix ans ? C’est l’incurie !

M. Laurent Béteille. Depuis 2007, les programmes du primaire ont été recentrés sur l’acquisition des savoirs fondamentaux. Un dispositif d’accompagnement éducatif et des stages ont par ailleurs été mis en place afin de réduire la proportion d’élèves en difficulté et d’augmenter le nombre des bons élèves, de même qu’ont été lancés des programmes accordant plus d’autonomie aux établissements scolaires.

Laisser la main au terrain, sans cesser d’évaluer les pratiques, telle est la philosophie qui préside à ces réformes.

En 2005 déjà, sous l’impulsion de François Fillon, la majorité s’était employée à replacer la transmission des savoirs fondamentaux au cœur du projet éducatif.

M. Didier Boulaud. Avec quel succès !

M. Laurent Béteille. Par-delà les efforts et la volonté du Gouvernement de répondre à un défi dont dépend pour l’essentiel notre place sur la scène internationale à l’horizon 2030, se pose également en creux la question des valeurs transmises par l’école à l’heure où le respect de l’autre, la discipline et, disons-le clairement, l’autorité sont mis à mal par une permissivité et un relâchement qui sapent les fondements de notre République.

Peut-on, enfin, passer sous silence les ratés du « pédagogisme » qui, pour avoir érigé la lutte contre l’inégalité en dogme, a laissé prospérer une culture qualifiée par certains de « culture du vide et de l’ignorance »,…

M. Didier Boulaud. Embauchez Allègre, il va arranger ça !

M. Laurent Béteille. … laquelle contribue sournoisement au maintien, voire à l’accroissement des inégalités dans l’accès au savoir ?

Aussi n’est-ce pas tant l’ascenseur social qui est aujourd’hui en panne que l’école républicaine qui est hantée par l’inversion systématique des valeurs.

Monsieur le ministre, que peut faire le Gouvernement pour que l’école, sans avoir à se substituer à la responsabilité parentale, puisse former des jeunes aussi brillants que porteurs de valeurs positives, favorisant le « vivre ensemble » ? (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de la vie associative. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, chargée de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur le président, permettez-moi tout d’abord d’excuser l’absence de M. le ministre de l’éducation nationale…

M. Yannick Bodin. Ce n’est pas grave !

Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État. … qui participe en ce moment même, à Dijon, à un débat sur les rythmes scolaires.

Le progrès doit être un principe directeur dans la détermination des politiques éducatives. Pour pouvoir progresser, le système éducatif a besoin d’évaluations régulières, de comparaisons internationales.

Les résultats de l’enquête PISA, publiés le 7 décembre dernier, ont été analysés avec une grande attention afin qu’ils puissent être intégrés dans la politique éducative de notre pays.

M. Yannick Bodin. Il serait temps !

Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État. Plusieurs enseignements ont été tirés de cette quatrième étude PISA.

Il apparaît que la France se maintient dans un peloton où l’on trouve l’ensemble des pays développés, notamment les États-Unis, l’Allemagne, la Suède et le Royaume-Uni. L’étude relève toutefois deux faiblesses de notre pays.

La première est une bipolarisation entre les résultats : une augmentation du nombre des élèves en difficulté et une faible progression du nombre des bons élèves.

La seconde faiblesse tient au lien qui existe entre les résultats scolaires de certains élèves et l’origine sociale de leurs parents.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous avez supprimé la mixité sociale !

Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État. Un autre enseignement fort de cette enquête est que l’efficacité économique ne se mesure pas à l’aune du niveau de la dépense publique.

L’étude montre que certains pays de l’OCDE qui dépensent moins que la France sont mieux classés qu’elle. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. Yannick Bodin. Ce sont les parents qui paient !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous oubliez une dimension essentielle : le collège unique !

Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État. D’autres pays de l’OCDE, qui dépensent parfois plus que la France, sont, eux, moins bien classés qu’elle.

M. Roland Courteau. Arrêtez votre rengaine !

M. Didier Boulaud. On touche le fond !

Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État. En tout état de cause, l’étude PISA nous montre qu’il faut sortir du mythe du « toujours plus » pour aller vers le « toujours mieux ».

L’étude nous montre aussi que les faiblesses et les limites d’un système éducatif ne sont pas une fatalité. Un pays peut toujours améliorer les performances de son système scolaire.

Afin de mener chaque élève vers la réussite, notre action se concentre sur trois points : le recentrage sur les enseignements fondamentaux, la personnalisation de l’enseignement et une marge de manœuvre plus grande laissée aux équipes pédagogiques.

En ce qui concerne le lien entre origine sociale et réussite, nous ne devons pas nous résigner. Nous sommes convaincus que nous parviendrons à le rompre grâce à l’école républicaine. (Applaudissements sur les travées de lUMP. – MM. Hervé Maurey et Bruno Retailleau applaudissent également.)