M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication. Madame la sénatrice, M. Benoît Hamon, qui participe à la grande conférence sociale, vous prie de bien vouloir excuser son absence.

Le déploiement du numérique et l’apprentissage de l’informatique à l’école représentent un véritable enjeu pour la réussite des élèves et la lutte contre les discriminations entre les territoires.

L’école doit être actrice de telles évolutions pour accompagner tous les élèves dans leurs apprentissages avec le numérique, par le numérique et au numérique. Il s’agit donc de se saisir du numérique pour refonder l’école.

Actuellement, tous les programmes de l’école et du collège intègrent une composante relative à l’informatique, que ce soit dans les usages ou dans les activités de modélisation.

Dans toutes les séries technologiques au lycée, les élèves sont conduits à une utilisation plus experte des technologies de l’information et de la communication.

Dans la voie professionnelle, l’usage du numérique est pleinement intégré dans l’apprentissage du métier. C’est même une condition nécessaire à l’acquisition des compétences professionnelles indispensables à l’insertion.

Depuis la rentrée scolaire 2012-2013, et dans le cadre de la réforme du lycée, l’informatique fait l’objet d’un enseignement à part entière en classe de terminale de la série scientifique, avec l’option « Informatique et sciences du numérique », ou ISN, qui propose aux élèves une introduction à la science informatique : information numérique, algorithmes, langages, architectures. C’est aussi un enseignement d’ouverture et de découverte qui valorise la créativité, prépare les élèves au monde de demain et permet à ces derniers de mieux s’orienter. Cela s’inscrit dans la lignée de la découverte de l’algorithmique, présente dans les programmes de mathématiques des classes de seconde et de première scientifique.

Depuis la rentrée scolaire 2013-2014, l’académie de Montpellier expérimente l’extension de cette option ISN aux séries économique et sociale, ou ES, et littéraire, ou L, sur la base d’un enseignement adapté aux objectifs de formation de chacune. M. le ministre de l’éducation nationale a demandé une évaluation de l’expérimentation avant d’envisager son éventuelle généralisation.

Au-delà de l’enseignement de l’ISN, le Conseil supérieur des programmes s’est saisi du sujet au moment de l’élaboration du nouveau socle commun de connaissances, de compétences et de culture.

Ce socle, vous le savez, offre un cadre renouvelé pour penser la place de l’informatique au sein de la scolarité obligatoire des élèves. Le numérique, l’informatique et leurs usages occupent une bonne place, puisqu’il est précisé que, en fin de cursus scolaire obligatoire, « l’élève sait que les équipements informatiques utilisent une information codée et il est initié au fonctionnement, au processus et aux règles des langages informatiques ; il est capable de réaliser de petites applications utilisant des algorithmes simples ». Il nous appartient aujourd’hui, par la refonte des programmes à venir, de répondre à cette exigence. Nous examinons les modalités de cette réponse.

Le Gouvernement salue la chance que nous avons de disposer de personnels tout à fait motivés et formés au sein des écoles supérieures du professorat et de l’éducation, les ESPE, pour accompagner la montée en puissance du numérique à l’école. Le ministre de l’éducation nationale veut également mentionner le rôle essentiel de l’École supérieure de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, l’ESENESR, qui a fait le choix d’investir l’ensemble des outils institutionnels de formation à distance pour les enseignants, afin de permettre aux cadres administratifs d’appréhender les dispositifs à destination des personnels.

L’école doit non seulement former les élèves à maîtriser les outils qu’ils utilisent chaque jour dans leurs études et leur vie quotidienne, mais aussi, et surtout, préparer les futurs citoyens à vivre et à travailler dans une société dont l’environnement technologique est amené à évoluer de plus en plus rapidement.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.

Mme Catherine Procaccia. Je vous remercie, madame la ministre, de m’avoir lu les éléments d’information qui vous ont été transmis par le ministère de l’éducation nationale. Cependant, cette réponse ne me satisfait pas pleinement. En effet, elle se borne à évoquer de nouveau les quelques expériences existantes et une refondation des programmes qui, en réalité, a lieu tous les ans.

Un rapport d’information de l’Assemblée nationale sur le développement de l’économie numérique française, récemment remis par Mmes Erhel et de La Raudière, préconise un éveil à l’informatique dès l’école primaire. Or, dans la réponse que vous venez de me transmettre, madame la ministre, il est simplement question des classes de terminale scientifique et d’une expérimentation de l’extension de l’option ISN aux classes de terminale des séries ES et L.

La question qui se pose est la suivante : la programmation informatique doit-elle être enseignée uniquement en terminale ? Les enfants ont accès très tôt au numérique. La programmation informatique et l’algorithmique pourraient être abordées par le biais du jeu, et ce dès le plus jeune âge. Avec l’approche retenue par le ministère, je crains que nous ne finissions par prendre autant de retard dans l’apprentissage des bases de l’informatique que dans celui des langues, alors que la maîtrise du langage informatique sera un facteur essentiel de l’employabilité à l’avenir. Au XXIsiècle, l’informatique n’est plus une nouvelle technologie, contrairement à ce que semble penser le ministère de l’éducation nationale. Il importe d’y former nos enfants dès le plus jeune âge. J’espère que les divers rapports et conseils permettront d’inciter le ministère à faire preuve d’un plus grand dynamisme dans ce domaine.

fermeture d'une école maternelle à cahors

M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, en remplacement de Mme Éliane Assassi, auteur de la question n° 811, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Éric Bocquet. Mme Assassi, retenue, m’a demandé de la suppléer et vous prie de l’excuser, madame la ministre.

Consulté dans le cadre de l’élaboration de la carte scolaire pour 2014, M. le maire de Cahors, dans le Lot, a proposé, sans concertation avec les parents, la suppression d’un poste d’enseignant à l’école maternelle Henri-Thamier, dans le quartier populaire de Sainte-Valérie, conduisant à la fermeture de cette école. Les parents d’élèves, mobilisés, n’ont eu de cesse de s’élever contre cette décision.

La loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, que le groupe CRC a votée, comporte de nombreuses dispositions qui plaident en faveur du maintien de cette école maternelle située dans un quartier défavorisé.

Le rapport de l’Assemblée nationale publié le 28 février 2013 à l’occasion de l’examen de ce texte indique que la scolarisation précoce contribue fortement à l’amélioration des trajectoires des élèves issus des milieux défavorisés et préconise de la développer en priorité dans les écoles dont l’environnement social est difficile. Ce rapport a conduit à la modification de l’article L. 113-1 du code de l’éducation, qui précise désormais que « tout enfant doit pouvoir être accueilli, à l’âge de trois ans, dans une école maternelle ou une classe enfantine le plus près possible de son domicile. […] L’accueil des enfants de deux ans est étendu en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé. »

Le quartier où est implantée l’école maternelle Henri-Thamier se trouve précisément dans cette situation. Cela justifie que celle-ci relève d’un contrat urbain de cohésion sociale articulé selon trois objectifs, dont la réussite scolaire.

En supprimant un service public, on met aussi en cause la mixité sociale et culturelle existante – 75 % des familles occupent un logement locatif HLM et 25 % vivent dans des zones pavillonnaires –, au risque de faire de Sainte-Valérie un quartier de relégation.

Rappelons que plus de 50 % des habitants du quartier n’ont pas de moyen de locomotion et qu’il leur sera difficile de rejoindre une école située à plus d’un kilomètre. Cet obstacle constitue un premier pas vers une forme de fracture sociale et, dans certains cas, la déscolarisation.

Quelles actions le Gouvernement compte-t-il engager afin que la loi du 8 juillet 2013 soit appliquée en portant une attention particulière à la scolarisation précoce des enfants dans le quartier de Sainte-Valérie à Cahors ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser M. le ministre de l’éducation nationale, retenu par la grande conférence sociale.

Je vous remercie de souligner les efforts déployés par le Gouvernement pour rétablir l’égalité des chances à l’école et lutter contre l’échec scolaire.

À cet égard, la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République accorde la priorité au premier degré, car la réussite des élèves passe par la maîtrise des premiers apprentissages, notamment celui de la langue.

C’est pourquoi, comme vous le soulignez très justement, il est aujourd’hui primordial de revaloriser le rôle de l’école maternelle et de favoriser la réussite des plus jeunes, notamment dans les secteurs les plus fragiles socialement et économiquement.

C’est tout le sens de la réforme de l’éducation prioritaire que mène Benoît Hamon, avec Najat Vallaud-Belkacem, dans le cadre de la réforme de la politique de la ville. L’objectif est de concentrer les moyens sur les quartiers prioritaires et d’optimiser l’emploi des outils de l’action publique pour restaurer l’égalité républicaine entre les territoires.

Dans ce cadre, la scolarisation des enfants de moins de 3 ans est une priorité que nous nous sommes fixée. Il s’agit de lutter contre les discriminations sociales, culturelles et linguistiques, en faisant de l’école un lieu d’accompagnement de tous les élèves, et d’abord de ceux qui sont le plus en difficulté, vers la réussite.

Cet effort est déjà bien engagé dans le département du Lot, où le taux de scolarisation des enfants de moins de 3 ans est nettement supérieur à la moyenne nationale.

En ce qui concerne le cas précis de la fermeture de l’école maternelle Henri-Thamier, qui fait l’objet de votre question, M. le ministre de l’éducation nationale peut vous apporter les précisions suivantes.

Pour l’année scolaire 2014-2015, la baisse des effectifs prévue dans le département du Lot a conduit à la suppression de quatre postes, dont un dans la ville de Cahors. Dans le souci d’optimiser le redéploiement du réseau scolaire, l’équipe municipale a décidé de procéder à la fermeture de l’école maternelle à classe unique Henri-Thamier.

Cette décision a été le fruit d’une longue concertation, à laquelle la communauté éducative et les parents d’élèves ont été pleinement associés. Les services académiques ont pris les mesures nécessaires pour garantir la continuité des apprentissages. En effet, les vingt-six élèves concernés par cette fermeture de classe seront accueillis au sein de l’école maternelle Jean-Calvet ou de l’école Bellevue, établissements qui se situent tous deux à moins de 750 mètres de l’école Henri-Thamier. Un service de transport scolaire par navettes municipales sera mis en place à la rentrée 2014 pour faciliter les déplacements des plus petits.

Cette décision présente l’avantage d’assurer l’accueil des élèves de moins de 3 ans dans une structure de plus grande importance, où ils seront en contact avec d’autres enfants, tout en prenant en compte la spécificité de leurs besoins, conformément aux recommandations de la circulaire du 18 décembre 2012.

Ainsi, les conditions d’apprentissage des élèves de l’école Henri-Thamier sont préservées, ainsi que l’accueil des enfants de moins de 3 ans. Les enfants du quartier Sainte-Valérie pourront bénéficier de meilleures chances de réussite.

L’objectif qui anime l’action du ministre de l’éducation nationale est de guider l’ensemble de la communauté éducative pour combattre dès le plus jeune âge les inégalités sociales et territoriales, afin de favoriser la réussite de chaque jeune. Ensemble, nous devons faire évoluer l’école vers la réussite de tous. Vous pouvez compter sur le Gouvernement pour défendre cette priorité essentielle de la République.

M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet.

M. Éric Bocquet. Je vous remercie, madame la ministre, de m’avoir apporté ces éléments de réponse.

Cette question offre l’occasion de remettre au cœur de notre réflexion l’importance particulière de l’école maternelle. L’acquisition de la maîtrise du langage est une condition déterminante de la réussite future de l’enfant. En effet, selon que le bagage de celui-ci est de 500 mots ou de 2 000 mots à son arrivée à l’école, ses chances en matière d’apprentissage de la lecture et de l’écriture ne sont pas les mêmes ! Il est donc essentiel de maintenir la priorité accordée à la scolarisation précoce.

Notre école maternelle est reconnue en Europe pour son efficacité en matière non seulement de socialisation et de préscolarisation, mais aussi d’acquisition langagière. Pour l’heure, l’école n’est toujours pas parvenue à résorber l’ensemble des inégalités, qui ont même tendance à s’aggraver dans la période difficile que nous traversons. La priorité absolue doit être donnée à l’école maternelle dans la durée.

vote électronique des français de l'étranger

M. le président. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, auteur de la question n° 816, adressée à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

Mme Hélène Conway-Mouret. Le 25 mai 2014, 442 conseillers consulaires et près d’une centaine de délégués consulaires ont été élus au suffrage universel direct pour un mandat de six ans. Ces élus de proximité feront vivre la démocratie participative sur les cinq continents au sein de la communauté française qu’ils représentent.

Les électeurs avaient la possibilité de voter dans les consulats, qui s’étaient transformés pour l’occasion en bureaux de vote, par procuration ou par voie électronique. En 2012, ils avaient très largement choisi, pour les élections législatives, la voie électronique, beaucoup d’entre eux vivant à plusieurs milliers de kilomètres d’un consulat. Toutefois, ils avaient été déroutés par certains dysfonctionnements du logiciel de vote Java, dont il fallait installer une version obsolète pour qu’il fonctionne !

À la suite des incidents survenus, le ministère des affaires étrangères, qui a la charge de l’organisation de ces élections, avait fait le bilan des difficultés rencontrées. Il a cependant été décidé de conserver le même système pour les élections des conseillers consulaires. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, l’utilisation de ce logiciel a malheureusement privé quelques milliers d’électeurs de la possibilité d’exercer leur droit de vote.

Vendredi dernier, le directeur des Français de l’étranger et de l’administration consulaire a réuni les parlementaires et ses services pour faire le bilan de ces élections consulaires. Un grand nombre de problèmes ont été identifiés.

Madame la secrétaire d’État, le ministère des affaires étrangères – je tiens à saluer l’engagement de son administration, à la fois dans les postes et à Paris, pour l’organisation de ce scrutin – envisage-t-il, pour les prochains scrutins, de s’inspirer des leçons tirées des problèmes rencontrés par les électeurs afin de simplifier le processus et de permettre ainsi à tous ceux qui souhaitent voter par voie électronique de pouvoir le faire ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Fleur Pellerin, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question, qui me permet de saluer la réforme de la représentation politique des Français de l’étranger que vous avez menée.

Cette réforme s’est traduite notamment par la mise en place de conseils consulaires, permettant d’installer la démocratie de proximité pour nos concitoyens établis à l’étranger.

Ce scrutin était inédit pour le ministère des affaires étrangères et du développement international, qui organisait pour la première fois une élection dans 129 circonscriptions électorales. Près de 3 000 Françaises et Français se sont présentés, ce qui témoigne de la vitalité démocratique de notre communauté expatriée.

Ce scrutin est original, puisque nos compatriotes ont eu la possibilité de voter par internet. Instaurer cette possibilité était, nous le savons, une nécessité : si nous avons ouvert 482 bureaux de vote dans le monde, nombre de nos compatriotes résident encore loin des urnes.

Ainsi, 80 000 de nos concitoyens ont voté par internet pour ces élections consulaires, ce qui représente 43 % des votants et 7 % des inscrits sur les listes électorales.

Quelques milliers d’électeurs n’auraient pu cependant finaliser leur opération de vote électronique, malgré l’assistance téléphonique mise en place. Ils conservaient néanmoins la possibilité de voter à l’urne.

Le directeur des Français de l’étranger et de l’administration consulaire a réuni voilà quelques jours l’ensemble des parlementaires représentant les Français de l’étranger pour tirer le bilan de ces élections.

Les difficultés liées à la mise à jour du logiciel Java sur l’ordinateur de l’électeur ont été évoquées. Ce logiciel est un prérequis de sécurité du système de vote actuel. Je peux vous annoncer qu’une nouvelle solution de vote électronique sera développée, qui permettra de se passer du logiciel en question.

Les Français de l’étranger sont pionniers en ce domaine. Notre objectif est de simplifier le vote par internet afin de favoriser leur expression démocratique, tout en garantissant la sincérité et le secret de cette modalité de vote.

M. le président. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.

Mme Hélène Conway-Mouret. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse.

Dans la perspective des scrutins à venir, notamment ceux de 2017 pour l’élection des députés des Français de l’étranger et de 2020 pour le renouvellement des conseils consulaires, on peut imaginer qu’un plus grand nombre de familles seront équipées d’ordinateurs et que le vote électronique ne peut que se développer. On a constaté une baisse de la participation en raison des problèmes techniques rencontrés lors des élections consulaires. Je me félicite que vous ayez pu me donner l’assurance que ces problèmes seront pris en compte, que des solutions seront mises en place et que les scrutins à venir se dérouleront convenablement.

temps partiel

M. le président. La parole est à M. Henri Tandonnet, auteur de la question n° 805, adressée à M. le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social.

M. Henri Tandonnet. Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les dispositions relatives au temps partiel prévues à l’article 12 de la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, s’agissant plus particulièrement des entreprises de moins de dix salariés de la branche du commerce de détail en fruits et légumes, épicerie et crémerie.

Ces entreprises, notamment les vendeurs de primeurs exerçant principalement sur les marchés et ayant un statut non sédentaire, n’ont pas les ressources matérielles et humaines suffisantes pour faire bénéficier leurs salariés à temps partiel d’une durée de travail de vingt-quatre heures au minimum par semaine.

Les cas de dérogation prévus par la loi ne suffisent pas. Les formalités liées à la dérogation sur demande du salarié ou au refus de l’employeur d’augmenter la durée du travail pour les contrats déjà en cours au 1er janvier 2014 ajoutent encore aux lourdeurs administratives qui entravent le fonctionnement de ces entreprises. Ces dernières n’ont, en majorité, que leur comptable pour faire office de service des ressources humaines, et ces dispositions engendrent une insécurité juridique.

Les commerçants se trouvent donc contraints de ne pas embaucher, de supprimer des emplois ou d’augmenter la charge de travail de leurs salariés ou même la leur, déjà très importante. Ils subissent, en parallèle, la concurrence toujours plus forte des supermarchés. Ils demandent notamment un cadre législatif et réglementaire adapté à leurs spécificités de commerçants, y compris non sédentaires.

Je souhaiterais donc savoir, madame la secrétaire d’État, si le Gouvernement compte revenir sur la durée minimale obligatoire de vingt-quatre heures de travail par semaine et adapter la législation relative au temps partiel au cas spécifique des commerçants de la branche, notamment des vendeurs de primeurs sur les marchés, lesquels ne peuvent pas, du fait du nombre et des horaires des marchés, offrir un emploi pour vingt-quatre heures par semaine.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Fleur Pellerin, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Monsieur Tandonnet, François Rebsamen vous prie de bien vouloir excuser son absence. Il est, comme vous le savez, retenu ce jour par la grande conférence sociale pour l’emploi.

Vous attirez l’attention du Gouvernement sur les difficultés d’application, dans la branche du commerce de détail en fruits et légumes, épicerie et crèmerie, de la règle des vingt-quatre heures de travail hebdomadaires instituée par la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi.

Cette règle, vous le savez, a été instaurée par la volonté des partenaires sociaux qui ont signé l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013. Il s’agit là d’un progrès social important, en particulier pour les femmes, qui subissent plus que toute autre catégorie de salariés le temps partiel. Celui-ci ne doit plus être une variable d’ajustement.

La loi a prévu, pour prendre en compte certaines situations spécifiques, deux voies de dérogation possibles, assorties à chaque fois de contreparties : une dérogation individuelle, à la demande du salarié qui souhaite travailler moins de vingt-quatre heures par semaine ; des dérogations collectives si un accord de branche prévoit d’abaisser le seuil minimal.

Plusieurs branches ont réussi à négocier et sont parvenues à un accord : ainsi, au 1er juillet 2014, vingt-deux accords ont été signés, certains dans des branches d’une importance significative ; je pense, par exemple, à la restauration rapide. Près d’un tiers de l’ensemble des salariés à temps partiel – hors particuliers employeurs, qui ne sont pas soumis à la règle des vingt-quatre heures –, soit près d’un million de personnes, sont ainsi couverts par un accord de branche, le taux atteignant 63 % pour les salariés des branches les plus concernées, qui étaient tenues d’ouvrir des négociations.

Les négociations se poursuivent dans un très grand nombre de branches, et j’ai bon espoir qu’elles aboutissent. L’équilibre visé au travers de la loi relative à la sécurisation de l’emploi sera ainsi atteint.

Vous faites état, pour une branche spécifique, de difficultés particulières. Le Gouvernement ne s’engagera pas dans la voie de dérogations sectorielles, car cela serait contraire à l’objectif de créer une règle générale de vingt-quatre heures applicable dans tous les secteurs, à l’accord national interprofessionnel, à la position du Gouvernement, qui a écarté tous les amendements allant en ce sens pendant les débats parlementaires sur la loi relative à la sécurisation de l’emploi, et ce serait ouvrir une boîte de Pandore.

Pour autant, les solutions existent pour prendre en compte les spécificités de telle ou telle branche : la dérogation individuelle, bien sûr, ou des idées constructives qui ont été trouvées dans certaines branches pour parvenir à un accord collectif. Bon nombre de branches sont parvenues à un accord alors même que de fortes spécificités les empêchent d’appliquer la règle des vingt-quatre heures.

En revanche, il est vrai que le cas des salariés embauchés avant le 1er janvier 2014 pour moins de vingt-quatre heures de travail hebdomadaires et qui souhaiteraient passer à vingt-quatre heures pose une difficulté. Le Gouvernement, qui en est conscient, fera très prochainement une proposition pour sécuriser cette situation particulière. Il faut en effet, pour ces salariés, prévoir une priorité d’accès à un emploi de vingt-quatre heures hebdomadaires, mais sans automaticité, et simplifier la procédure, pour l’heure trop lourde, comme vous le soulignez à juste titre.

M. le président. La parole est à M. Henri Tandonnet.

M. Henri Tandonnet. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de cette réponse.

Sur 4 millions de travailleurs à temps partiel, 2 millions travaillent moins de vingt-quatre heures par semaine.

La règle des vingt-quatre heures est tout de même très contraignante. Si sa mise en œuvre peut se concevoir au sein des grandes entreprises, elle crée des difficultés pour de nombreuses petites entreprises de secteurs très variés, par exemple pour les vendeurs de primeurs sur les marchés.

J’ai récemment été interpellé, sur le terrain, par une association de services aux personnes qui ne peut embaucher un travailleur à temps partiel, faute de pouvoir, à l’heure actuelle, lui assurer cette durée minimale de vingt-quatre heures de travail hebdomadaires. Or le travail à temps partiel permet souvent une première embauche.

Je pense donc qu’il faudrait apporter des aménagements à cette règle, qui est trop contraignante et ne correspond pas à la réalité du monde du travail. Sa portée est trop générale, à l’heure où le chômage s’aggrave.

aquaculture

M. le président. La parole est à M. Charles Revet, auteur de la question n° 795, adressée à M. le secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Charles Revet. Madame la secrétaire d’État, ma question a trait à la place de l’aquaculture sur le littoral et, plus largement, sur le territoire national.

L’aquaculture française stagne depuis 1995. La France a été en pointe dans les années soixante-dix, mais ses productions n’évoluent pas ; pis, elles régressent. La conchyliculture produit 163 000 tonnes de coquillages, la pisciculture seulement 6 000 tonnes de poisson, mais 200 millions d’œufs embryonnaires ou de larves, dont 66 % sont exportés, ce qui est positif pour notre commerce extérieur, dont vous avez la charge. Au total, 3 000 entreprises emploient 18 000 salariés, pour un chiffre d’affaires de 550 millions d’euros.

La France, qui possède la deuxième plus grande zone économique maritime au monde, juste derrière les États-Unis d’Amérique, ne couvre, selon les statistiques, ses besoins en poissons et crustacés qu’à hauteur de 15 %. Cette situation est inacceptable, mais, a contrario, pourrait offrir des possibilités de développement pour peu que des contraintes souvent spécifiques à la France n’aboutissent pas à bloquer les projets et à dissuader les pêcheurs et aquaculteurs de s’engager.

Une disposition de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche a visé à l’établissement de schémas tout au long du littoral français, faisant ressortir les espaces à protéger, les espaces où pourraient s’établir des productions aquacoles ou autres activités économiques et, éventuellement, des espaces à classement ultérieur, afin de ne pas hypothéquer l’avenir des terrains concernés. Cela s’est traduit par une modification du code de l’environnement ; je souhaiterais que vous me précisiez quelle application a été faite des dispositifs des articles L. 219-6-1 et L. 923-1-1 du code rural et de la pêche maritime.

L’algoculture, dont les débouchés, tels les cosmétiques ou la biomasse, sont nombreux, est un gisement à développer.

L’aquaculture contribue fortement à la sécurité alimentaire. En 2030, selon un rapport de la Banque mondiale, plus de 60 % du poisson consommé proviendra de l’aquaculture. La Chine en produira 38 % et en consommera 37 %.

Il importe, pour éviter les concentrations au Vietnam, en Chine et au Chili, dommageables pour l’environnement, de diversifier les lieux de production, mais également d’augmenter la sécurité alimentaire en termes de production de qualité et de couverture des besoins.

La France assure 10 % des captures de poissons. Elle dispose du second domaine maritime au monde en termes de zone économique. La pêche française représente 1 milliard d’euros de chiffre d’affaires et 93 000 emplois. La richesse halieutique s’épuisant, il est nécessaire de stimuler une économie de substitution.

Je souhaiterais donc connaître les actions conduites en faveur d’un développement significatif de l’aquaculture, afin de faire de notre façade maritime un vivier halieutique de substitution, générateur d’activité économique et contribuant à l’équilibre alimentaire des populations.

La consultation citoyenne relative au « mieux consommer » vient de s’achever. Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous m’indiquer quels en sont les enseignements et quelles sont les perspectives pour l’aquaculture, l’algoculture, la conchyliculture, la pisciculture ?