M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Harlem Désir, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, je ne pense pas qu’il existe un lien direct entre le sujet des navires de pêche, au demeurant très important, et le plan Juncker. Je tiens à le préciser d’emblée : qu’il s'agisse d’apporter des aides aux pêcheurs pour qu’ils puissent renouveler leur flotte et l’adapter aux nouvelles réglementations ou de maintenir des activités et des savoir-faire, aussi bien dans la pêche que dans la construction navale– c’est effectivement un enjeu majeur –, ces sujets relèvent de la politique de la pêche.

Il y a en France, mais aussi ailleurs en Europe, des chantiers navals d’excellence, dont la production ne se limite pas à la flottille de pêche. S'il n’existe pas a priori d’obstacles à une mobilisation du plan Juncker pour ce type de projets, le principe de ce plan est plutôt d’apporter un financement ou une garantie publique dans des domaines où les investisseurs privés font défaut.

Dans le domaine de la construction navale, il importe d'abord, selon moi, que nous gardions les savoir-faire, que l’on veille aux conditions de la concurrence – notamment avec les chantiers d’autres zones du monde qui peuvent bénéficier d’aides d’État ou de subventions – et que cette industrie, qui a incontestablement de l’avenir, puisse continuer à se développer sur le territoire européen, en particulier en France.

M. le président. La parole est à M. Mathieu Darnaud.

M. Mathieu Darnaud. Monsieur le secrétaire d’État, selon des sources journalistiques, il apparaît que les armes des frères Kouachi auraient pu avoir été achetées à Bruxelles par Amedy Coulibaly, lui-même ayant acquis son fusil-mitrailleur dans cette ville.

Se pose donc la question de la circulation frauduleuse des armes à l’intérieur de l’Union européenne. Au demeurant, l’usage de ces armes ne se borne pas aux seuls faits de terrorisme, comme le montre la recrudescence des règlements de comptes menés avec des d’armes de guerre.

Que des individus relativement isolés, n’étant pas en tout cas intégré dans une structure criminelle organisée, puissent se munir aussi facilement de fusils d’assaut et d’armes de poing doit nous faire réagir.

Ces armes, comme l’a indiqué l’étude du pôle interministériel contre la criminalité organisée en Europe du sud-est, proviennent le plus souvent des pays balkaniques.

Lors de la réunion des ministres européens de l’intérieur, autour de Bernard Cazeneuve, le 11 janvier dernier, il a été question de réfléchir à la manière de mieux appréhender les déplacements des individus dangereux.

Toutefois, la question de la circulation des armes à l’intérieur de l’Union est également essentielle et mérite d’être mise au centre des travaux du Conseil européen.

Pouvez-vous nous dire, monsieur le secrétaire d’État, où en est l’harmonisation législative en la matière et quelles seront les propositions faites par la France, pour briser le plus en amont possible les filières de trafic d’armes ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Harlem Désir, secrétaire d'État. Nous souhaitons effectivement, cela a été mentionné notamment dans la déclaration des ministres de l’intérieur, que les États membres renforcent le système d’identification et de traçabilité des armes, depuis le lieu de production, et qu’ils harmonisent leur législation en la matière. Vous le savez, nous avons renforcé la nôtre et nous sommes évidemment en lutte permanente contre le marché illégal d’armes qui se développe dans nombre de pays de l’Union européenne. Ce trafic a parfois, vous l’avez dit, un lien avec des zones marquées par des conflits.

Il s’agit évidemment d’une dimension très importante de la lutte contre le terrorisme et les risques d’attentats, même si certaines attaques ont pu être commises avec des moyens très rudimentaires, on l’a encore vu hier. Nous sommes évidemment tout à fait convaincus de la nécessité d’une coopération beaucoup plus intense à l’échelle européenne pour lutter contre le trafic illégal d’armes. Ce point figure à l’ordre du jour de la réunion des chefs d’État et de gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Philippe Bonnecarrère.

M. Philippe Bonnecarrère. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaiterais que vous nous apportiez quelques précisions concernant la Grèce.

Vous avez énoncé trois principes concernant la position de la France à l’égard de ce pays : solidarité, responsabilité et unité. Ce sont bien sûr des principes tout à fait louables, que nous ne saurions qu’approuver.

Notre pays est, chacun le sait, créancier de la Grèce à hauteur de 47 milliards d’euros. Nous sommes nous-mêmes un pays endetté, dont la situation économique est peu aisée, c’est le moins qu’on puisse dire. Aussi notre pays ne peut-il se permettre de perdre ne serait-ce qu’une partie de ces 47 milliards d’euros.

Je souhaiterais donc avoir la confirmation de la détermination du Gouvernement à faire en sorte que les engagements pris par la Grèce à l’égard des pays de l’Union européenne, dont la France, soient respectés, de manière que nous puissions avoir la garantie que notre pays ne subira pas de pertes à cet égard.

M. Harlem Désir, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, il n’y a évidemment aucun projet d’annulation de la dette contractée, soit directement soit indirectement, par la Grèce auprès de la France.

Cette dette, qui se monte plutôt à 42 milliards d’euros, est constituée, d’une part, d’un prêt bilatéral, d’autre part, des emprunts contractés par la Grèce auprès du Fonds européen de stabilité financière et des aides provenant du FMI. Dans l’ensemble de ces dispositifs, la France apporte évidemment des garanties, même si le FMI fonctionne d’une façon différente. Je vous le rappelle, le FMI n’a jamais annulé aucune dette. S’agissant de l’Union européenne, l’objectif n’est nullement de procéder à une annulation de la dette grecque.

Vous l’avez dit, il s’agit pour nous d’aider la Grèce. Quel qu’eût été le résultat des élections, le nouveau gouvernement aurait demandé à rediscuter des conditions de son partenariat avec l’Union européenne, les plans précédents n’ayant pas été efficaces. Ils sont en effet rejetés non seulement en raison de l’austérité et des conséquences sociales qu’ils entraînent, mais aussi pour leur absence d’efficacité dans le cadre de la réduction de la dette.

Alors que celle-ci devait passer à 120 %, conformément à l’objectif fixé au moment où les programmes ont été convenus avec les précédents gouvernements grecs, elle est passée à 175 %. Une telle évolution est principalement due, je l’ai rappelé, à la baisse de 25 % du PIB. Évidemment, la proportion d’une même masse d’endettement ne peut qu’augmenter si le PIB s’écroule.

Il faut donc à la fois que la Grèce puisse dégager un excédent budgétaire primaire, avant remboursement de sa dette, et qu’elle connaisse une croissance économique. C’est en effet la seule perspective politique qu’on puisse se fixer. Le chômage est aujourd'hui extrêmement élevé, touchant plus de 25 % des actifs et plus de 50 % des jeunes. Les investissements n’ont pas retrouvé leur niveau d’avant la crise. La Grèce doit donc d’abord régler ses problèmes économiques.

Ainsi, même s’il peut y avoir une discussion sur les délais, la maturité des prêts ou les taux d’intérêt, comme cela avait d’ailleurs déjà été le cas sous les gouvernements précédents, l’annulation de la dette grecque n’est pas à l’ordre du jour.

Vous le savez, il s’agit d’une dette contractée auprès des autres États membres et non pas auprès de banques et du système financier. Ce sont donc les contribuables européens qui auraient, en définitive, à subir les conséquences d’une telle décision, ce que nous ne souhaitons pas. Nous allons donc aider la Grèce à sortir de cette situation de crise.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires européennes.

M. Jean Bizet, président de la commission des affaires européennes. Je tiens à vous remercier, monsieur le secrétaire d’État, de votre disponibilité et des réponses que vous avez pu apporter sur un certain nombre de points.

J’insiste sur le sujet du terrorisme, qui revêt aujourd'hui un caractère d’urgence non seulement dans la société française, on l’a vu avec l’élan républicain du 11 janvier dernier, mais aussi pour l’ensemble des sénateurs et sénatrices, comme en a témoigné cet après-midi la réunion de la commission des affaires européennes.

Nous souhaitons une mise en œuvre rapide des différentes mesures que nous avons listées. La commission des affaires européennes et la commission des lois proposeront, le 25 mars prochain, une résolution regroupant l’ensemble de ces dispositions et qui pourrait être un European security Act. Il s’agit de bien faire comprendre à la population française notre souci d’une réponse et d’une réactivité très forte sur ce sujet.

Je voudrais vous remercier également d’avoir accepté de venir désormais régulièrement nous voir après les réunions des conseils européens. Notre première rencontre aura lieu le 17 février à l’Assemblée nationale. Nous sommes à une période cruciale pour l’Europe et la France. Un certain nombre de sujets ont été évoqués tout à l’heure, notamment le plan Juncker. Le Parlement souhaite avoir le maximum de précisions en la matière, afin d’informer les territoires des différentes possibilités de réinjecter des fonds privés adossés à certaines garanties de fonds publics. Il est indispensable que le Parlement serve de relais en la matière.

Autre sujet très important, qui a fait l’objet cet après-midi même d’un engagement de la commission des affaires européennes et de la commission des affaires économiques : la création d’un groupe de suivi sur le traité transatlantique. Il s’agit d’un traité mixte, qui devra être ratifié par les différents parlements nationaux. Nous devons donc être informés le plus largement possible en vue de cette ratification. C’est un travail qui nous prendra beaucoup de temps. Je souhaite par conséquent que nous ayons des rapports réguliers sur ce sujet, de façon à pouvoir éclairer l’ensemble des sénateurs.

Merci de tout cela, monsieur le secrétaire d’État, et rendez-vous le 17 février. Nous avons besoin de savoir comment se comportera le Gouvernement sur les différents sujets que j’ai abordés tout à l’heure.

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Nous en avons terminé avec le débat préalable à la réunion du Conseil européen des 12 et 13 février prochain.

9

Nominations de membres à deux organismes extraparlementaires

M. le président. Je rappelle que la commission des affaires européennes a présenté des candidatures pour la désignation d’un membre titulaire et d’un membre suppléant au sein de la Commission nationale d’évaluation des politiques de l’État outre-mer.

La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.

En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame Mme Nicole Duranton membre titulaire et Mme Gisèle Jourda membre suppléant de cet organisme extraparlementaire.

Je rappelle que la commission des affaires sociales a proposé des candidatures pour un organisme extraparlementaire.

La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.

En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame Mme Catherine Procaccia membre titulaire de la Commission nationale d’agrément des associations représentant les usagers dans les instances hospitalières ou de santé publique et M. Michel Amiel membre suppléant du même organisme.

10

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 5 février 2015 :

De neuf heures à treize heures :

1. Débat sur la politique du logement ;

2. Débat sur la transparence dans le transport aérien.

De quinze heures à quinze heures quarante-cinq :

3. Questions cribles thématiques sur la situation de l’emploi.

De seize heures à vingt heures :

4. Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale, autorisant l’accord local de répartition des sièges de conseiller communautaire (n° 203, 2014-2015) ;

Rapport de Mme Catherine Troendlé, fait au nom de la commission des lois (n° 252, 2014-2015) ;

Texte de la commission (n° 253, 2014-2015) ;

5. Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant diverses dispositions tendant à la modernisation du secteur de la presse (n° 202, 2014-2015) ;

Rapport de M. Philippe Bonnecarrère, fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (n° 258, 2014-2015) ;

Texte de la commission (n° 259, 2014-2015).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures cinquante-cinq.)

Le Directeur du Compte rendu intégral

FRANÇOISE WIART