compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Claude Gaudin

vice-président

Secrétaires :

M. Jean-Pierre Leleux,

Mme Catherine Tasca.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

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Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Organisme extraparlementaire

M. le président. M. le Premier ministre a demandé à M. le président du Sénat de lui faire connaître le nom d’un sénateur pour siéger comme membre suppléant au sein du Conseil national de la mer et des littoraux.

Conformément à l’article 9 du règlement du Sénat, la commission des lois a été saisie. La nomination au sein de cet organisme extraparlementaire aura lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par ce même article.

3

Questions orales

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

incertitudes liées au projet de loi sur l'adaptation de la société au vieillissement

M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, auteur de la question n° 1047, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Mme Corinne Imbert. Madame la secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur les incertitudes et les conséquences liées au projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement en ce qui concerne les personnes handicapées vieillissantes, notamment dans le département de la Charente-Maritime, considérant que la notion de limite d’âge, à savoir soixante ans, dans les structures pour adultes handicapés est assez floue.

En effet, d’une part, la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées tend à confirmer leurs droits et leur statut, quel que soit leur âge, en favorisant leur maintien dans les établissements pour personnes handicapées.

Il existe de fortes pressions de la part des familles, inquiètes de leur avenir, pressions qui s’exercent essentiellement sur les gestionnaires souhaitant aussi conserver un effet de filière associative.

Par ailleurs, ce même texte ou les décrets afférents, codifiés au sein du code de l’action sociale et des familles, semblent limiter le rôle de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées à l’âge de soixante ans, puisque les textes concernant les personnes handicapées de plus de soixante ans en établissements font référence non plus à la notion d’orientation, mais au fait de statuer sur leur accompagnement.

Dès lors, on peut se demander s’il faut voir là une limite d’âge de fait dans le rôle des établissements pour adultes, qui ne devraient plus alors accueillir de personnes handicapées à partir de soixante ans. Madame la secrétaire d’État, quelle interprétation faut-il faire de cette contradiction ?

En Charente-Maritime, le schéma départemental en faveur des personnes adultes handicapées pour la période 2013-2017 traite de cette problématique, et ce dans un contexte financier très contraint. Le département a, malgré tout, souhaité structurer la fluidité des parcours de vie, autrement dit organiser l’accueil des personnes handicapées vieillissantes dans des structures pour personnes âgées, avec un projet adapté, sous des formes multiples, afin de permettre l’accueil des plus jeunes, notamment ceux qui sont maintenus en établissements pour enfants et adolescents handicapés au titre de l’amendement « Creton », en profitant des places libérées dans les établissements pour adultes.

Aussi y a-t-il lieu, madame la secrétaire d’État, de s’interroger sur la manière dont le projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement traite de la situation des personnes handicapées vieillissantes, ainsi que sur la façon dont ce texte organise le décloisonnement entre deux secteurs de prise en charge, à savoir celui des personnes âgées et celui des personnes handicapées.

On peut également se demander si le projet de loi prévoit ou non de fixer une limite d’âge aux structures du handicap pour préserver le projet initial de ces structures, qui est aussi d’accompagner les jeunes adultes.

Enfin, comment ne pas aborder la question de l’équité quand des personnes handicapées vieillissantes, qui n’ont pas pu travailler au cours de leur vie, sont hébergées en foyer occupationnel, en foyer d’accueil médicalisé, alors que cette limite d’âge et de prise en charge est clairement fixée pour des travailleurs handicapés qui ont atteint l’âge de la retraite et qui ne sont alors plus accueillis en établissements ou services d’aide par le travail, ni même en foyer d’hébergement ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie. Madame la sénatrice, vous faites référence au projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement. À ce sujet, je voudrais d’abord redire que ce texte ambitieux et très attendu par nos concitoyens sera définitivement voté avant la fin de l’année, pour une pleine et entière entrée en vigueur au 1er janvier 2016.

Je profite également de l’occasion qui m’est donnée d’être ici, au Sénat, pour me féliciter encore de la qualité des débats parlementaires et du vote de la Haute Assemblée sur ce projet de loi, le 19 mars dernier, sans qu’aucune voix s’y oppose.

J’en reviens à vos interrogations, madame la sénatrice, quant à la portée du texte sur le champ du handicap, et plus particulièrement sur les personnes handicapées vieillissantes.

Ce public, qui se situe au croisement des dispositifs « handicap » et « personnes âgées », demande en effet une attention particulière. Je m’efforce d’y répondre, en lien étroit avec ma collègue Ségolène Neuville.

Nous avons notamment accéléré la publication, en mars 2015, par l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux, l’ANESM, d’une recommandation relative à l’adaptation de l’intervention auprès des personnes handicapées vieillissantes.

Au cœur du projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement, la recherche de complémentarité et de cohérence entre les deux publics est constante, notamment avec la mise en place, au niveau local, des CDCA, les conseils départementaux de la citoyenneté et de l’autonomie, qui favoriseront l’approche globale des deux groupes de population.

De même, le texte apporte des garanties concernant les maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH, au travers de l’encadrement législatif des maisons départementales de l’autonomie, les MDA.

Sur la délicate question des barrières d’âge que vous soulevez, le Gouvernement a soutenu l’introduction d’un article 30 bis prévoyant la remise d’un rapport au Parlement sur l’incidence des seuils de soixante ans et soixante-quinze ans pour l’attribution des prestations. Ce rapport, qui devra être remis dans les six mois suivant la promulgation de la loi, nous permettra de pallier le manque d’indicateurs budgétaires sur l’effet de telles mesures.

Enfin, sur le plan financier, j’ai souhaité que les mesures d’anticipation de la loi, prises dès cette année à hauteur de 83 millions d’euros sur la CASA, la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie, aient également une incidence positive sur le secteur du handicap. Je citerai notamment l’abondement du fonds de compensation du handicap, la revalorisation des salaires des aides à domicile, le soutien au programme d’adaptation des logements privés à la perte d’autonomie ou encore le plan pluriannuel d’aide à l’investissement pour les établissements pour personnes âgées et personnes handicapées.

M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert.

Mme Corinne Imbert. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de cette réponse. Comme vous l’avez dit, il s’agit d’une question délicate, qui n’est pas simple à régler.

Nous nous heurtons, dans les départements, à cette limite d’âge, car il ne faut pas oublier qu’un réel problème se pose également avec les jeunes adultes handicapés maintenus dans les établissements pour enfants.

Dans le département de la Charente-Maritime, nous avons travaillé, en concertation avec les établissements, pour réorganiser le secteur à moyens constants, en créant de nouvelles places et en en fermant d’autres qui n’étaient pas occupées, pour permettre la fluidité du parcours que nous appelons de nos vœux.

J’espère que nous pourrons avancer sur cette question technique et délicate de l’approche globale, afin que les choses soient clairement définies, ce qui aidera nos services, lesquels travaillent de façon très étroite avec les établissements.

modalités de financement pour les établissements de santé isolés géographiquement

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, auteur de la question n° 1060, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

M. Franck Montaugé. J’ai souhaité attirer l’attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et du droit des femmes sur les modalités dérogatoires de financement des établissements publics de santé isolés géographiquement et situés dans des zones à faible densité de population, introduites par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014.

La circulaire n° DGOS-R1-2014-366 du 29 décembre 2014 relative à la campagne tarifaire 2014 des établissements de santé précisait, en son annexe V, les modalités de financement des activités isolées en indiquant ceci : « La LFSS pour 2014 a introduit une disposition relative au financement des activités isolées. Elle vise à corriger les limites du modèle actuel de financement des établissements de santé reconnus comme étant géographiquement isolés. »

Elle poursuivait : « Un décret d’application précisant les critères d’isolement géographique, la procédure de sélection des établissements éligibles et les modalités de financement est en cours d’examen par le Conseil d’État. Les établissements qui bénéficient de ce financement pour 2014, pour un montant total de 19,3 millions d’euros, répondent aux critères d’éligibilité décrits dans le projet de décret en Conseil d’État. Les directions générales des ARS ont été consultées et se sont prononcées sur les critères, et sur la liste des établissements ».

Dans le cadre de ce décret d’application et des critères régissant l’éligibilité des établissements de santé à ce régime dérogatoire de financement, je vous demande de bien vouloir nous indiquer dans quelle mesure certains établissements, notamment le centre hospitalier public d’Auch, en Gascogne, à la lumière de leur caractère singulier, pourraient bénéficier de financements complémentaires ?

En effet, malgré un écart entre le niveau d’activité, parfois insuffisant, d’un site et les seuils économiques théoriques des référentiels, le maintien de financements doit permettre de garantir un accès équitable aux soins à l’ensemble de la population en rendant possible la conservation, dans les territoires faiblement dotés, d’une offre de soins, dont la qualité ne doit pas dépendre uniquement du volume d’activité.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie. Monsieur le sénateur, vous l’avez dit, la disposition de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 relative au financement des activités isolées vise à corriger l’inadaptation du modèle actuel de financement des établissements de santé reconnus comme étant géographiquement isolés.

Ces établissements ont bien souvent un volume d’activité insuffisant pour garantir un niveau de financement permettant d’équilibrer leur budget de fonctionnement. Pourtant, leur maintien est indispensable pour répondre aux besoins de santé de la population locale.

L’adaptation consiste donc à mettre en place un financement complémentaire à la tarification à l’activité pour les activités concernées par cette situation d’isolement géographique.

Les critères d’éligibilité, en particulier l’isolement géographique, ont été précisés par décret en date du 17 février 2015.

L’établissement d’Auch, s’il présente une singularité dans l’offre de soins, ne répond cependant pas à l’ensemble des critères permettant de bénéficier d’une aide nationale.

Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes a cependant demandé à l’agence régionale de santé de suivre avec une attention particulière la situation de cet établissement, en particulier s’agissant du renforcement de ses activités et de leur articulation dans l’offre de soins du territoire.

Tout comme vous, Mme la ministre est particulièrement vigilante sur le rôle que jouent les établissements comme celui d’Auch pour garantir une offre de soins accessible à tous et de proximité.

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé.

M. Franck Montaugé. Je remercie Mme la secrétaire d’État de sa réponse. Je saisis cette occasion pour réaffirmer la nécessité de prendre en compte les équipements sanitaires publics des territoires ruraux, en particulier quand ces territoires se situent dans l’orbite de métropoles largement pourvues en équipements sanitaires, comme il se doit. Il faut cependant veiller à ce que tous les moyens sanitaires ne soient pas concentrés dans ces métropoles. Or les intentions du Gouvernement et les dispositions qui ont été annoncées vont en ce sens, ce que je tenais à saluer.

prise en charge du traitement des malades touchés par le syndrome d’arnold-chiari

M. le président. La parole est à Mme Françoise Cartron, auteur de la question n° 1055, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Mme Françoise Cartron. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la malformation de Chiari est une maladie rare, orpheline, qui consiste en un déplacement vers le bas de la portion caudale du cervelet. La syringomyélie est également une maladie rare et orpheline qui creuse des cavités dans la moelle épinière ; elle est très douloureuse et extrêmement handicapante. Ces deux maladies sont souvent associées. Dans leurs types les plus graves, les symptômes sont particulièrement handicapants : une mauvaise circulation du liquide céphalo-rachidien provoque une hypertension intracrânienne, des retards psychomoteurs ou même la paralysie complète, et, parfois, une mort subite.

Actuellement, les patients souffrant de ces pathologies se voient proposer, en France, des traitements médicamenteux palliatifs de la douleur, ainsi que la craniectomie, opération lourde et risquée dite de « décompression ». Il s’avère que ces deux réponses, si elles peuvent soulager temporairement le patient, ne permettent pas de bloquer l’évolution de la maladie.

Dans le même temps, l’Espagne autorise depuis de nombreuses années un acte chirurgical qui consiste à sectionner le filum terminale extradural. Un institut spécialisé dans cette pathologie existe à Barcelone. Je ne suis pas spécialiste, mais l’opération se révèle à la fois moins onéreuse, moins invasive et plus efficace, si l’on en croit les témoignages des malades. Cette technique semble permettre un soulagement définitif et arrêter l’évolution de la maladie. L’intervention permet, dans la plupart des cas, de recouvrer une activité normale quelques semaines, voire quelques mois, après l’opération.

Il semble que cette intervention ne soit pas automatiquement remboursée par les caisses d’assurance maladie françaises et reste, par conséquent, à la charge des patients et de leur famille. Si, dans certains départements, des familles ont bénéficié d’un remboursement, tel n’est pas le cas sur tout le territoire. Est-il possible, madame la secrétaire d’État, d’envisager une prise en charge complète de cette intervention par la sécurité sociale, quelle que soit la région de rattachement du patient ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie. Madame la sénatrice, comme vous l’avez indiqué, la maladie d’Arnold-Chiari est une malformation congénitale du cervelet. Cette maladie rare peut provoquer une hypertension intracrânienne ou certains troubles neurologiques.

Une proportion importante de cas de malformation de Chiari de type 1, l’une des formes de cette maladie, conduit le malade à développer des lésions de la moelle épinière et, par conséquent, des symptômes tels que des troubles de la motricité ou de la sensibilité des membres supérieurs et inférieurs, pouvant aller jusqu’à la paralysie complète.

L’opération la plus courante est aujourd’hui la craniectomie, ou craniotomie. Quelques équipes neurochirurgicales proposent la section du filum terminale extradural. Cette opération, pratiquée en particulier en Espagne, est très controversée.

La prise en charge par l’assurance maladie des interventions chirurgicales programmées dans les pays de l’Union européenne est subordonnée, par la loi, à une autorisation préalable du service médical de l’assurance maladie. Cette autorisation peut être refusée, selon les termes mêmes de la loi, si « les soins envisagés ne figurent pas parmi les soins dont la prise en charge est prévue par la réglementation française », ce qui est le cas de l’intervention chirurgicale pratiquée par certains chirurgiens étrangers pour traiter la syringomyélie.

En effet, la littérature médicale scientifique ne permet pas aujourd’hui de se prononcer sur l’efficacité de ce traitement. Cependant, la France dispose, parmi ses centres de référence pour les maladies rares, d’un centre de référence des syringomyélies, l’hôpital de Bicêtre, qui relève de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris. Ce centre a mis en place un protocole de recherche sur l’utilité de l’intervention chirurgicale pour le traitement des syringomyélies à l’exclusion des indications habituelles, afin d’établir d’une façon rigoureuse et scientifique la pertinence de cette intervention chirurgicale.

À l’issue de cet essai, si les résultats sont probants, une saisine de la Haute Autorité de santé pourra être effectuée par la société savante de neurochirurgie, afin d’inscrire cet acte à la classification commune des actes médicaux en vue de sa prise en charge par l’assurance maladie. Il est donc nécessaire de poursuivre l’évaluation en cours de l’efficacité de ce traitement avant de lancer les travaux avec la Haute Autorité de santé pour permettre, à terme, une prise en charge par l’assurance maladie.

M. le président. La parole est à Mme Françoise Cartron.

Mme Françoise Cartron. Je suis ravie que les spécialistes se penchent aujourd’hui sur cette question douloureuse. Reste le problème de l’inégalité face au remboursement : lorsque des patients intentent des recours, ils obtiennent le remboursement dans certains départements seulement. J’espère que les conclusions des études en cours permettront, dans un bref délai, d’accorder un remboursement à tous les patients atteints de cette maladie.

délivrance d’un duplicata du permis de conduire aux français de l’étranger

M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam, auteur de la question n° 1057, adressée à M. le ministre de l’intérieur.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question s’adressait effectivement à M. le ministre de l’intérieur, mais je ne doute pas que Mme la secrétaire d’État saura me répondre. Cette question porte sur les difficultés rencontrées par les Français de l’étranger égarant ou se faisant voler un permis de conduire et qui, faute de résidence en France, sont trop souvent contraints de repasser l’examen.

Lors des récents débats au Sénat sur le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, le ministre Emmanuel Macron a indiqué que le décret d’application allait enfin paraître cet été, répondant ainsi indirectement à ma question écrite de février 2014 portant sur ce sujet et restée sans réponse à ce jour. Il a mentionné le fait que certaines conclusions juridiques nécessaires à la rédaction définitive du décret étaient attendues pour le mois d’avril. Pourriez-vous nous informer de leur teneur, madame la secrétaire d’État ?

Par ailleurs, le Sénat a voté un amendement des sénateurs représentant les Français de l’étranger visant à donner aux consulats des compétences proches de celles des préfectures en matière de délivrance de duplicatas du permis, permettant ainsi d’inscrire ce principe dans la loi. Nous espérons donc que l’Assemblée nationale conservera cette mesure. Quel que soit le sort de cet amendement, il me semble essentiel de veiller à ce que les décrets d’application couvrent bien l’intégralité des questions posées dans la résolution de l’Assemblée des Français de l’étranger de mars 2015, dont le champ est nettement plus large que l’amendement voté au Sénat.

Cette résolution demandait au Gouvernement de permettre aux postes consulaires de délivrer des duplicatas de permis de conduire en cas de vol ou de perte et des permis de conduire internationaux ; d’habiliter les consulats à délivrer le relevé d’information restreint ; de simplifier la procédure de « rétablissement des droits à conduire » pour les Français qui ont été titulaires d’un permis de conduire français et qui reviennent en France ; de tenir l’assemblée des Français de l’étranger informée des négociations bilatérales menées par la France en matière d'échanges et de reconnaissance des permis de conduire ; de veiller à la bonne information des expatriés par la publication d’un fascicule d’information et la mise à jour du site internet du ministère des affaires étrangères sur ces questions ; enfin, de négocier avec nos partenaires européens pour que la réussite à l’examen du code de la route soit reconnue en Europe.

Madame la secrétaire d’État, pourriez-vous prendre, au nom du Gouvernement, l’engagement que le ou les décrets d’application couvriront bien l’ensemble de ces points ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie. Madame la sénatrice Joëlle Garriaud-Maylam, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence du M. le ministre de l’intérieur.

La situation des Français établis à l’étranger, qui ont perdu ou se sont fait voler leur permis de conduire français, est examinée avec attention par le Gouvernement. Cette question a, comme vous l’avez rappelé, fait l’objet d’un amendement parlementaire adopté à l’unanimité par le Sénat le 10 avril dernier, lors de l’examen du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.

Cet amendement ouvre la possibilité pour les Français résidant à l’étranger de se voir délivrer un permis de conduire par les consulats, qu’ils aient ou non conservé un lien résidentiel avec la France. La conformité de cet amendement avec la directive européenne du 20 décembre 2006 relative au permis de conduire n’est cependant pas totalement certaine.

Ainsi, cette directive subordonne, dans ses articles 7 et 12, la possibilité pour un conducteur de solliciter un permis de conduire auprès d’un État à la condition qu’il ait fixé sa résidence normale sur le territoire de cet État, autrement dit qu’il y réside habituellement plus de 185 jours par an. Aussi, la demande d’un permis de conduire français ne semble pouvoir être ouverte qu’aux ressortissants français ayant conservé leur résidence normale en France.

Bien sûr, le Gouvernement est pleinement conscient du facteur d’intégration important que constitue la possibilité de conduire un véhicule à l’étranger. C’est la raison pour laquelle il présentera au Conseil d’État, dans les prochaines semaines, devançant ainsi l’adoption de la loi précitée et de ses décrets d’application, un projet de décret modifiant l’article R. 225-2 du code de la route afin de permettre notamment aux conducteurs titulaires d’un permis français qui y sont autorisés par la réglementation européenne de demander le renouvellement de leur titre perdu, volé ou détérioré auprès du poste consulaire dont ils dépendent. Après avoir vérifié leur identité, ce poste transmettra, par la valise diplomatique, la demande à la préfecture chargée de l’instruction. Le Gouvernement proposera en conséquence un amendement au projet de loi précité pour fiabiliser ce dispositif juridique.

M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je remercie Mme la secrétaire d’État de cette réponse. Je souhaite simplement souligner le problème posé par la procédure des questions écrites et des questions orales. Ma question écrite, posée en février 2014, n’avait toujours pas reçu de réponse après quinze mois. En l’espèce, l’amendement que nous avions déposé nous a permis d’obtenir une réponse. Je pense cependant que, si le Gouvernement faisait un effort pour répondre plus rapidement à nos questions écrites, nous y gagnerions tous.

En ce qui concerne ma question, il reste du travail à faire. Un certain nombre de problèmes avaient été évoqués par les Français de l’étranger, car ils sont très importants pour leur manière de vivre, de travailler et de se déplacer en Europe, et la réponse que vous nous avez donnée, madame la secrétaire d’État, n’est pas totalement satisfaisante.

Il faut évidemment examiner la conformité de la solution juridique proposée par le Gouvernement à la directive européenne. Je souhaite toutefois attirer votre attention sur le fait que les Français expatriés, même s’ils n’ont pas une résidence habituelle en France, se rendent régulièrement dans notre pays. Il est donc très important de faire vivre cette double citoyenneté en leur permettant de vivre, de conduire, et d’avoir accès à une représentation administrative non seulement dans leur pays de résidence, mais également en France.

encadrement des droits-télé de football au niveau européen et équité sportive

M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, auteur de la question n° 1081, adressée à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargé des sports.

Mme Sylvie Robert. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, à l’orée de ce millénaire, la France remportait successivement la Coupe du monde et le Championnat d’Europe de football. Les clubs de l’élite se montraient particulièrement compétitifs sur la scène européenne, attirant de nombreux joueurs du gotha international, conséquence partielle de l’arrêt Bosman rendu par la Cour de justice des Communautés européennes en 1995.

Aujourd’hui, la situation des clubs professionnels français est nettement plus contrastée. Pour la plupart, les marges de manœuvre budgétaires se sont considérablement réduites, influant directement sur les résultats sportifs. Pour preuve, en dix ans, la France a perdu deux places à l’indice UEFA, passant de la quatrième à la sixième place.

Si la diminution des ressources financières a pu avoir des externalités positives, favorisant l’émergence de nouvelles politiques de développement axées sur la formation, par exemple, il n’en demeure pas moins vrai que, dans leur ensemble, les clubs professionnels ont perdu en compétitivité à l’échelle européenne.

Ce phénomène s’explique, dans une certaine mesure, par le décrochage croissant observé en matière de droits de retransmission audiovisuelle entre le championnat français et la majorité des principaux championnats européens, en particulier le championnat anglais. De 607 millions d’euros actuellement pour la Ligue 1, ils seront de 748,5 millions d’euros pour la période 2016-2020. Ils atteindront 945 millions d’euros pour la série A en Italie et culmineront à près de 7 milliards d’euros pour la Premier League anglaise de football, pour les saisons de 2016 à 2019. En d’autres termes, à partir de 2016, les droits de retransmission télévisée, qui constituent un peu plus de la moitié du chiffre d’affaires des clubs européens en moyenne, seront dix fois plus importants en Angleterre qu’en France.

Or, l’écart est d’ores et déjà abyssal puisque le dernier de la Premier League perçoit pratiquement deux fois plus que le premier de la Ligue 1. Avec l’entrée en vigueur des nouveaux contrats, le risque est donc que le décrochage entre les clubs européens et anglais ne s’accentue au point de porter éventuellement préjudice à l’intérêt sportif des compétitions européennes.

C’est pourquoi, dans le cadre du « fair-play financier », règle de bonne gestion financière soutenue par la Commission européenne et mise en œuvre à partir de la saison 2011-2012 au titre de l’équité sportive, une réflexion pourrait être conduite avec l’Union des associations européennes de football, l’UEFA, afin d’encadrer et d’harmoniser les règles relatives aux droits de retransmission audiovisuelle du football. S’il ne saurait bien sûr être question de porter atteinte à la libre concurrence sur le plan économique, il s’agit de renforcer la concurrence sur le plan sportif.

Je souhaite par conséquent connaître la position du Gouvernement quant à cette initiative. De plus, quelles mesures sont-elles préconisées pour développer l’attractivité du championnat français et des clubs professionnels, lequel a une incidence mécanique sur les droits de retransmission télévisée ?