M. le président. La parole est à M. Daniel Reiner.

M. Daniel Reiner. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie d’avoir indiqué que le Gouvernement est très attaché à la réalisation rapide de ce projet. C’est déjà un motif de satisfaction.

Le projet d’autoroute A32 envisagé en 1999 a été abandonné parce qu’il s’agissait de construire une seconde autoroute, parallèle à la première, dans la même vallée, ce qui n’avait guère de sens.

S’il est plus sommaire et plus « rustique », ce projet d’aménagement de l’autoroute A31 reste fort coûteux : entre 1 milliard et 1,5 milliard d’euros. C’est la raison pour laquelle il serait bon d’engager une réflexion sur la mise en œuvre d’une écotaxe en Lorraine, comme cela avait été envisagé pour l’Alsace lors du Grenelle 1.

décrets d'application de la taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, auteur de la question n° 1084, transmise à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

M. Pierre-Yves Collombat. À l’occasion de l’examen du projet de loi « MAPTAM » de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, achevé au mois de janvier 2014, ont été votées des dispositions importantes en matière de prévention des inondations, notamment la création d’une taxe, assise sur le foncier, permettant de financer cette politique.

Pour mémoire, je rappelle que, depuis cette date, ce ne sont pas les inondations qui ont manqué en France. Il n’est qu’à songer à celles qui se sont produites dans le Var et le sud de la France, aux mois de février et de novembre 2014, ou, en 2015, en Savoie et dans le Loir-et-Cher, notamment.

L’évidente urgence de la mise en place effective – c’est-à-dire financée – d’une politique active de prévention de l’inondation n’étant plus à démontrer, on peut s’étonner que les décrets d’application prévus par la loi MAPTAM, en particulier ceux qui sont nécessaires à l’instauration de la taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations prévue à l’article 56, soient toujours en gestation. Ce retard serait dû à une mésentente entre le ministère de l’intérieur et celui des finances : si cela était vrai, ce serait plus que fâcheux.

Monsieur le secrétaire d’État, qu’en est-il des raisons de ces retards et quels sont les délais probables de publication de ces décrets d’application ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur, le Parlement a souhaité mettre en œuvre une nouvelle compétence couvrant les actions et travaux portant sur la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations, notamment afin d’assurer une meilleure protection de la population contre les effets dommageables des inondations.

La loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles confie cette compétence aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre.

Cette compétence, qui peut être exercée directement ou par l’intermédiaire de syndicats mixtes en fonction de la structure et des caractéristiques des bassins versants concernés, nécessite des moyens pérennes et des compétences techniques particulières. Afin d’en permettre le financement, la loi MAPTAM a prévu la possibilité de mettre en place une taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations. Celle-ci est facultative, plafonnée et affectée. Les dispositions de l’article 56 de la loi décrivent de façon détaillée les modalités de mise en place, de recouvrement et d’utilisation de cette recette par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre. Ces dispositions ont été introduites dans l’article 1530 bis du code général des impôts.

Si la loi a effectivement prévu que les conditions d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État, il apparaît, à l’examen de l’article 1530 bis du code général des impôts, que le texte législatif est suffisant pour permettre une mise en place de cette taxe, sans que des précisions supplémentaires soient nécessaires.

Il a ainsi été possible d’indiquer, par une note d’information relative aux délibérations fiscales à prendre par les collectivités territoriales en cours d’année pour une application l’année suivante datée du 11 septembre 2014, que les communes et leurs EPCI à fiscalité propre qui ont déjà pris cette compétence pouvaient mettre en place dès 2015 cette taxe pour le financement de leurs actions entrant dans le champ de la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations. De ce fait, il paraît possible de faire l’économie d’un nouveau décret.

En ce qui concerne les autres textes d’application intéressant directement la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, je précise que le projet de décret « digues » a reçu un avis favorable du Conseil d’État le 24 mars dernier et qu’il sera prochainement publié. Le décret relatif aux missions d’appui auprès des préfets coordonnateurs de bassin a été publié le 30 juillet 2014. Le projet de décret relatif aux établissements publics d’aménagement et de gestion des eaux et aux établissements publics territoriaux de bassin sera prochainement soumis au Conseil national d’évaluation des normes applicables aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics, avant transmission au Conseil d’État.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Rarement une réponse du Gouvernement m’a procuré autant de satisfaction… Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de m’avoir apporté cette bonne nouvelle. On a la fâcheuse habitude de prévoir des décrets d’application en Conseil d’État. Je suis heureux que le texte voté par le Parlement soit d’application immédiate.

restriction de l'écobuage en zone rurale

M. le président. La parole est à M. Mathieu Darnaud, auteur de la question n° 1065, transmise à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

M. Mathieu Darnaud. Traditionnellement, la fin de la saison hivernale est marquée par la reprise d’activités d’entretien des espaces naturels et des jardins. Parmi celles-ci, bon nombre génèrent chaque année des déchets verts, le plus souvent éliminés par brûlage. Or la période de tolérance qui s’étendait jusqu’au 1er janvier 2015 est désormais terminée.

Les collectivités rurales ont à leur charge d’importants travaux de débroussaillement, de défrichement et de tonte. Je tiens notamment à rappeler que, en Ardèche, l’espace forestier couvre plus de 45 % de la surface du territoire.

Le transport des déchets verts par les ouvriers communaux, la mise à disposition de véhicules adaptés aux reliefs de montagne et les frais de carburant liés représentent des charges importantes, d’autant plus difficiles à assumer que l’État a engagé un mouvement de baisse drastique des dotations publiques.

Or, monsieur le secrétaire d’État, ces charges pourraient être considérablement allégées et le travail des agents communaux facilité si, à l’instar des agriculteurs, forestiers et particuliers soumis à l’obligation légale de débroussaillement, les services techniques communaux de ces petites communes étaient autorisés à brûler les déchets verts sur place. Je souhaite donc savoir si, en matière de brûlage des déchets végétaux, le Gouvernement entend demander aux préfets d’assouplir le décret, afin de faciliter la vie aux collectivités rurales.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur, les brûlages à l’air libre de végétaux sont interdits pour deux raisons essentielles : d’une part, ils sont à l’origine de risques d’incendie ; d’autre part, ils provoquent des nuisances pour le voisinage et sont dangereux pour la santé. En effet, cette combustion très incomplète émet des polluants, tels que les particules fines et les dioxines, qui se concentrent dans les végétaux, les produits laitiers et les œufs.

Le règlement sanitaire départemental permet au préfet de déroger à cette règle dans certains cas, par exemple pour éviter la propagation à des plantes saines de maladies qui touchent des végétaux de la même espèce.

En zone rurale, la solution la plus adaptée pour se débarrasser des déchets verts est le compostage, en particulier le compostage de proximité. Celui-ci permet d’éviter de transporter des déchets verts vers la déchetterie et supprime donc aussi la consommation d’énergie, les pollutions, l’encombrement et les coûts correspondants.

Le compostage au jardin ou en plateforme de compostage, à une plus grande échelle, permet d’économiser l’énergie qui serait gaspillée en brûlant ces déchets verts très humides. Au lieu d’être détruite, cette matière naturelle retourne au sol sous forme d’un compost utile au jardinier.

Pour accompagner ce mouvement, la loi de transition énergétique pour la croissance verte a prévu un développement important du tri à la source des biodéchets, notamment du compostage. Elle contribuera ainsi à généraliser ces pratiques et à développer des possibilités de compostage à coût moindre, tout en augmentant le nombre d’emplois associés à ces pratiques vertueuses écologiquement et non délocalisables. Cela s’inscrit pleinement dans le cadre de la transition vers l’économie circulaire.

Enfin, la feuille de route de la table ronde « santé environnement » de la Conférence environnementale prévoit que, dans le cadre des plans régionaux santé-environnement, un guide à destination des collectivités pourra être rédigé dans les régions volontaires. Les ministères de l’écologie, de la santé et de l’agriculture soutiendront ces démarches volontaires.

M. le président. La parole est à M. Mathieu Darnaud.

M. Mathieu Darnaud. Votre réponse, monsieur le secrétaire d’État, ne me satisfait guère.

Je vous invite à venir constater sur le terrain la complexité de la mise en œuvre des plateformes de compostage. Par ailleurs, il arrive que le volume de déchets verts produits soit tel que le recours au compostage ne soit pas envisageable. Il faut alors déposer ces déchets dans des déchetteries dédiées, ce qui impose parfois, à l’heure où il est beaucoup question de développement durable et de bilan carbone, d’effectuer un trajet de trente ou quarante minutes.

Même si les préoccupations de santé publique doivent bien sûr être prises en compte, je pense qu’il conviendrait d’assouplir la réglementation en vigueur afin d’élargir les possibilités de recours à l’écobuage.

révision des valeurs locatives et concertation

M. le président. La parole est à M. Christian Favier, auteur de la question n° 1041, adressée à M. le secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget.

M. Christian Favier. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite vous faire part de mon inquiétude quant aux conditions de mise en œuvre de l’expérimentation lancée au mois de janvier dans plusieurs départements en vue d’une révision des valeurs locatives cadastrales des locaux d’habitation.

Le département du Val-de-Marne faisant partie des territoires d’expérimentation, sans doute en raison de sa grande diversité urbaine et sociale, je suis particulièrement sensible à cette question. Je m’étonne d’ailleurs que le conseil départemental n’ait à aucun moment été saisi de ce projet. L’État ne saurait conduire seul ce travail, au risque de n’avoir qu’une vision parcellaire des bases d’imposition des territoires.

Ainsi, les conséquences de la révision des valeurs locatives pour les contribuables et les collectivités locales ne doivent pas être évaluées sous le seul angle comptable. Cette évaluation doit nécessairement intégrer les paramètres socio-économiques, urbains et humains propres à chaque territoire, afin d’adapter les modalités retenues aux différentes échelles.

Par ailleurs, cette révision aura des effets sur les potentiels financiers et fiscaux des collectivités territoriales, et donc sur la répartition des dotations de l’État et les instruments de péréquation.

Une large concertation avec les collectivités territoriales sur les modalités de cette expérimentation est par conséquent nécessaire. L’expérience de la réforme des bases d’imposition des locaux professionnels, que le Gouvernement a dû geler, est sans doute la meilleure illustration de ce qu’il ne faut pas faire.

Compte tenu de l’importance des conséquences de la réforme des valeurs locatives, en particulier pour les populations, mais aussi pour les budgets communaux, déjà mis à mal, je vous prie, monsieur le secrétaire d’État, de bien vouloir m’indiquer quels dispositifs d’information et de concertation seront mis en place avec les élus locaux des communes et des départements concernés par cette expérimentation.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget. Monsieur le sénateur, comme j’ai eu l’occasion de vous le faire savoir dans un courrier en date du 18 février dernier, le Gouvernement s’est engagé, dans le cadre du pacte de confiance et de responsabilité entre l’État et les collectivités locales conclu le 16 juillet 2013, à travailler sur les principes et les modalités de mise en œuvre de la révision des valeurs locatives pour les locaux d’habitation.

L’article 74 de la loi de finances rectificative du 29 décembre 2013 prévoit ainsi qu’une expérimentation de cette révision sera menée en 2015 dans cinq départements choisis afin de refléter la diversité des réalités départementales, dont Paris et le Val-de-Marne.

À l’occasion du vote de cette disposition, une concertation s’est tenue, associant les commissions des finances des deux assemblées et les associations d’élus, afin de définir les principes de l’expérimentation.

Il s’agit d’un travail de bénédictin, qui n’en est qu’à ses débuts. La Direction générale des finances publiques, la DGFiP, établira un rapport. Le Gouvernement transmettra ensuite au Parlement, en amont de l’examen du projet de loi de finances pour 2016, un bilan des simulations auxquelles la DGFiP aura procédé.

Sur le fondement de ce bilan et au vu des enseignements tirés de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels, notamment en ce qui concerne les commissions locales et l’association des élus locaux, de nouvelles discussions pourront s’engager afin de déterminer selon quelles modalités une révision des valeurs locatives des locaux d’habitation pourrait effectivement être mise en œuvre.

On a pu mesurer les difficultés ou les limites de ce long travail expérimental à l’occasion de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels. Cela m’a conduit à m’engager à vous proposer de différer d’un an la mise en œuvre concrète du processus de révision des valeurs locatives des locaux d’habitation, afin de prendre en compte les difficultés recensées et d’adapter, le cas échéant, les modalités de calcul de ces valeurs locatives.

Je tiens donc à vous rassurer, monsieur le sénateur : il y aura bien un travail itératif et collaboratif avec les élus concernés, ainsi qu’avec les commissions départementales et communales des impôts, avant toute mise en œuvre de la révision, laquelle devra d’ailleurs respecter un certain nombre de principes de stabilité globale des prélèvements. Nous aurons l’occasion d’en reparler lorsque la DGFiP aura achevé la collecte des informations nécessaires au bon travail de l’ensemble des acteurs.

M. le président. La parole est à M. Christian Favier.

M. Christian Favier. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de vos éléments de réponse.

Je rappelle que nous ne sommes évidemment pas opposés à la mise en œuvre d’une révision des valeurs locatives cadastrales. Au contraire, nous regrettons que du retard ait été pris en la matière.

Cela étant, cette question est extrêmement sensible, car les conséquences d’une telle révision peuvent être très lourdes, s’agissant d’un impôt par nature souvent très injuste, dans la mesure où, sauf pour les ménages les plus modestes, il ne tient pas compte des ressources des familles.

Il faut donc être très prudents. De ce point de vue, la concertation avec les élus locaux est extrêmement importante. Le ministère chargé du budget ne saurait décider seul. La population doit être étroitement associée à la réflexion, par l’intermédiaire de ses élus locaux.

incitation à la méthanisation agricole

M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel, auteur de la question n° 1051, adressée à M. le secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget.

M. Yannick Botrel. La loi prévoit, depuis le 1er janvier 2015, une exonération de sept années de taxe foncière sur les propriétés bâties, ou TFPB, et de contribution foncière des entreprises, ou CFE, pour les équipements agricoles dédiés à des activités de méthanisation.

Par cette disposition, le législateur a souhaité favoriser le déploiement, promu par le ministre de l’agriculture, d’unités de méthanisation agricole dans notre pays. Le vote de ce dispositif par le Parlement n’a d’ailleurs pas suscité de débat particulier, car la représentation nationale partage cet objectif de manière très transversale.

La méthanisation représente une piste intéressante en matière de diversification de nos sources d’énergie. Elle offre des compléments de revenu non négligeables à nos agriculteurs et permet le développement d’une filière industrielle de construction de méthaniseurs en France, dans un secteur de production de matériels jusqu’alors essentiellement occupé par l’Italie et l’Allemagne.

Les deux exonérations précédemment citées concernent les unités de méthanisation agricole achevées après le 1er janvier 2015, l’objectif du Gouvernement étant avant tout d’apporter une incitation.

Cependant, en tant que législateur, nous avons complètement omis le fait que 98 unités étaient déjà en service avant cette date, de sorte que nous nous trouvons, aujourd’hui, dans une situation paradoxale. Si les choses devaient demeurer en l’état, il y aurait, d’une certaine manière, rupture d’égalité entre les producteurs, selon que leur unité ait été achevée avant ou après le 1er janvier 2015.

Cela me semblerait profondément inéquitable, et il convient de réfléchir à un dispositif permettant de surmonter cette difficulté.

La règle de non-rétroactivité de la loi fiscale s’applique. Cela étant, il est possible de faire en sorte que les 98 unités créées avant le 1er janvier 2015 soient éligibles à ces exonérations à partir de cette date, comme toutes les autres. Bien entendu, les exonérations ne valant que pour sept années, le dispositif s’appliquerait pour la seule durée restant à courir jusqu’au septième « anniversaire », si je puis dire, de l’unité concernée.

Voilà quelques semaines, à la suite d’une question orale du député Paul Molac, le Gouvernement a fait connaître la position de Bercy sur un élargissement du champ de ces exonérations. Il apparaît que l’avis du ministère est très réservé, celui-ci estimant qu’une telle mesure engendrerait un « effet d’aubaine ».

Je m’oppose nettement à cette analyse. Techniquement, un effet d’aubaine est constaté lorsqu’un dispositif crée une dépense importante qui ne peut être prévue à l’avance. Or nous parlons ici de la TFPB et de la CFE de 98 unités d’exploitation : la dépense fiscale engendrée n’est donc pas importante et elle peut parfaitement être prévue.

D’ailleurs, je ne comprends pas la position du Gouvernement, dans la mesure où, en définitive, il ne s’agit que de rétablir l’équité entre agriculteurs-méthaniseurs. Elle est d’autant plus surprenante que le Premier ministre lui-même a indiqué, voilà quelques semaines, que « certains [agriculteurs] ont pris le parti de développer la méthanisation agricole. Nous devons soutenir les agriculteurs qui savent innover. »

J’aurais donc souhaité connaître la position de M. Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, qui est concerné au premier chef par le sujet. Quels dispositifs envisage-t-il de proposer, sachant que la situation actuelle est discriminante, une inégalité ayant été instaurée entre agriculteurs-méthaniseurs ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget. Bien évidemment, le Gouvernement encourage la valorisation des effluents d’élevage et déchets agricoles par la méthanisation. À cet effet, a été présenté en mars 2013 un plan Énergie Méthanisation Autonomie Azote, avec pour objectifs une meilleure gestion de l’azote et le développement de la méthanisation agricole.

Dans cette perspective, il convient de mettre en place une fiscalité incitative. En effet, cette activité nécessite la construction de nombreux immeubles – locaux techniques, digesteurs, cuves, locaux de stockage, etc. –, constituant autant d’investissements lourds qui, dès son démarrage, représentent une charge importante au regard de sa rentabilité.

Une première exonération de taxe foncière sur délibération des collectivités a donc été décidée en loi de finances rectificative pour 2013.

Surtout, par l’article 60 de la loi de finances pour 2015, le Gouvernement a souhaité renforcer l’incitation en faveur de la méthanisation, en créant un dispositif de plein droit pour toutes les installations nouvelles, celles dont l’achèvement est postérieur au 1er janvier 2015. Pour les autres, l’exonération optionnelle de taxe foncière sur les propriétés bâties demeure applicable.

Les unités pionnières de méthanisation agricole participent, il est vrai, à la dynamique positive de développement de la méthanisation agricole. En effet, elles jouent un rôle de référence pour les financeurs et les porteurs de nouveaux projets. En outre, les pionniers sont souvent engagés dans l’accompagnement de ces derniers. Toutefois, s’agissant d’un dispositif incitatif, il est apparu logique et juridiquement adéquat qu’il s’applique à des investissements non encore réalisés, et non à un stock.

Pour autant, la question de l’égalité de traitement des différents opérateurs est importante. D’ailleurs, elle ne se résume pas à sa dimension fiscale, mais porte aussi sur le tarif de rachat pratiqué par EDF et la contribution au service public de l’électricité, la CSPE, l’instauration de cette dernière étant principalement motivée par la volonté de financer les énergies renouvelables.

Par conséquent, le Gouvernement entend bien s’inscrire dans le dialogue. Je suis prêt à recevoir les représentants des syndicats professionnels, que j’ai rencontrés à l’occasion du salon de l’agriculture. Ma porte est ouverte pour étudier cette question de l’existence d’une différence de traitement entre producteurs de méthane agricole.

M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel.

M. Yannick Botrel. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d’État. Les agriculteurs concernés avaient cherché à ouvrir le débat avant le 1er janvier 2015, en prenant un certain nombre d’initiatives et de contacts, y compris, d’ailleurs, au niveau du ministère des finances. Une réunion avait été organisée, à laquelle le ministère de l’agriculture et celui de l’environnement avaient également participé.

J’estime, avec d’autres, que la situation actuelle crée une discrimination au détriment des agriculteurs s’étant lancés les premiers dans cette voie de la méthanisation, techniquement compliquée et coûteuse.

J’ai bien entendu votre conclusion, monsieur le secrétaire d’État, qui me semble nuancer les propos tenus jusqu’à présent par le Gouvernement. Vous donnez en effet à entendre que le débat pourrait ne pas être complètement clos.

Il ne s’agit pas, bien entendu, de prendre une mesure rétroactive, mais il convient au moins de faire en sorte que, pour la période restant à courir, l’ensemble des unités de méthanisation soient traitées de manière identique.

Situation des éleveurs français

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, auteur de la question n° 1063, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

M. Daniel Chasseing. La situation de notre agriculture ne cesse d’inquiéter celles et ceux qui représentent les territoires ruraux. En particulier, celle des éleveurs est toujours plus fragile, malgré les assurances données par le Président de la République lors du sommet de l’élevage qui s’est tenu voilà deux ans, d’autant que la conjonction actuelle d’un niveau élevé des charges et d’un niveau trop bas des prix agricoles fait chuter leurs revenus.

C’est pourquoi j’ai choisi ce matin d’appeler l’attention du Gouvernement sur un certain nombre de problèmes majeurs, en accord avec les responsables agricoles de mon département. J’attends de sa part des réponses précises, à l’heure où la réforme de la politique agricole commune, la suppression des quotas laitiers – inquiétante notamment pour les exploitations laitières de zones intermédiaires –, la baisse des aides pour la France – à hauteur de 5 % pour le premier pilier et d’un niveau à ce jour indéterminé pour le second – et d’autres évolutions en cours ou projetées amènent à s’interroger sur la survie économique du secteur de l’élevage.

En premier lieu, la bonification des prêts ne pourra désormais plus être prolongée au-delà de la durée du plan d’entreprise, à savoir quatre ans. C’est tout de même très peu ! Cette évolution ne remet-elle pas en cause l’intérêt de la bonification ? Je souligne au passage l’existence d’un regrettable retard en matière d’octroi de prêts bonifiés, retard certes habituel, mais bien supérieur, cette année, à ce que l’on a pu connaître naguère.

En deuxième lieu, comment la revalorisation des droits à paiement de base – les DPB, qui ont remplacé les droits à paiement unique, les DPU – s’opérera-t-elle pour les jeunes agriculteurs ? À ce propos, je tiens à relever un facteur d’alourdissement de la procédure : la nécessité d’obtenir la signature du propriétaire cédant. Cette dernière innovation était-elle bien utile ?

En troisième lieu, quelles seront les modalités d’attribution des aides couplées ? Un nouveau producteur sera-t-il un jeune agriculteur ou un agriculteur qui se diversifie ? Dans ce cas, comment se fera l’accès à la réserve du soutien couplé à la vache allaitante ? Et je ne parle pas de l’arrêt brutal de la prise en compte des génisses, qui engendrera de lourdes conséquences…

En quatrième lieu, le dispositif de l’indemnité compensatoire de handicap naturel, l’ICHN, laquelle serait revalorisée en 2015, intégrant la prime à l’herbe, reste, au dire des éleveurs, d’une grande complexité. Une question importante reste en suspens : la suppression du critère d’âge – la limite était naguère fixée à 65 ans – ne risque-t-elle pas d’inciter les anciens à prendre leur retraite plus tard, et donc à ne pas libérer les terres ? Peut-on revenir sur cette mesure ? Par ailleurs, le siège social pourrait être délocalisé.

En cinquième lieu, j’évoquerai les mesures compensatoires au défrichement. Depuis la modification du code forestier, l’autorisation de défrichement est subordonnée soit au versement de 3 000 euros par hectare – auquel viendra s’ajouter le coût du dessouchage –, soit au respect de conditions de reboisement, ce qui est inadapté pour certains départements montagneux comme la Corrèze, où le taux de boisement dépasse 50 %. N’est-il pas possible d’adapter cette mesure en fonction de la spécificité des territoires, comme le ministre de l’agriculture l’avait évoqué lors d’un déplacement dans le département, ou de revenir à l’ancien système des dérogations accordées par les préfets, qui satisfaisait à la fois les agriculteurs et les forestiers ?

Enfin, les éleveurs déplorent qu’il leur ait fallu remplir les déclarations de surfaces au mois d’avril, sans connaître les critères de la réforme de la PAC et sans avoir encore obtenu de l’Institut national de l’information géographique et forestière, l’IGN, les éléments nécessaires.

Je vous remercie par avance, monsieur le secrétaire d’État, de bien vouloir me transmettre les réponses du ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, qui sont très attendues par les éleveurs. Je pense en particulier aux plus jeunes d’entre eux, qui, débutant dans le métier, trouvent les règles par trop floues et dénoncent l’incertitude ambiante, préjudiciable à leurs intérêts.

L’installation des jeunes relève de la problématique foncière, mais aussi de celle de la revalorisation et de la sécurisation des revenus agricoles, indispensables pour redonner aux jeunes le goût du métier.