Mme la présidente. Mes chers collègues, dans l’attente de l’arrivée de Mme la ministre de la culture, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures vingt-cinq, est reprise à onze heures trente-cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

devenir du dispositif malraux et rénovation urbaine

Mme la présidente. La parole est à M. François Commeinhes, auteur de la question n° 1103, adressée à Mme la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité.

M. François Commeinhes. Ma question porte sur la limitation dans le temps du dispositif fiscal dit « Malraux », codifiée à l’article 199 ter du code général des impôts, applicable au programme national de requalification des quartiers anciens dégradés, le PNRQAD. Ce dispositif fiscal serait en effet remis en cause dès la fin de l’année en cours, selon l’interprétation des services de l’État reçue par plusieurs collectivités concernées, alors qu’il doit absolument être calé sur la durée réelle et opérationnelle de ce programme.

Le PNRQAD, proposé par le Gouvernement, vise à aider les villes à développer dans leurs quartiers anciens une politique sociale, économique et urbaine permettant tout à la fois de lutter contre l’habitat indigne, de réhabiliter le parc privé existant dans une logique de développement durable et de revaloriser fortement un patrimoine remarquable. Il concerne plus de vingt villes porteuses d’un secteur protégé sur la période 2010-2017, notamment Montauban, Nice, Calais ou Sète.

L’absence de clarification rend contraignante la poursuite, pour les collectivités pilotes, du programme national de requalification des quartiers anciens dégradés, malgré l’engagement de l’État sur la période 2010-2017.

L’État et ses opérateurs, l’Agence nationale de l’habitat et l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, mobilisent dans ce cadre jusqu’à 380 millions d’euros d’ici à 2017, entraînant un effet de levier estimé à 1,5 milliard d’euros sur la période, sans parler des emplois induits pour le secteur du bâtiment et des travaux publics. Dans ce dispositif, l’aide fiscale « Malraux », qui permet une réduction d’impôt pouvant atteindre 40 % du coût des travaux de réhabilitation, tient une place essentielle pour mobiliser les investissements privés. Il serait donc très hasardeux de remettre en cause la sécurité juridique et fiscale des investisseurs désireux de bénéficier de cette réduction d’impôt.

Pour ma seule ville de Sète, il existe actuellement quatre immeubles entiers, acquis et vacants, pour lesquels, le permis de construire ayant été accordé et la déclaration d’utilité publique prononcée, nous recherchons des opérateurs « Malraux », tandis que deux logements sont en voie d’acquisition et deux autres ont été repérés. Limiter le régime fiscal favorable au 31 décembre de cette année aurait non seulement pour effet d’annuler toutes les ventes actuellement envisageables, mais aussi de produire une baisse considérable des objectifs de restauration au niveau national, sauf à solliciter d’avantage des finances communales déjà extrêmement mises à mal.

La question qui se pose est donc de savoir si les immeubles vendus jusqu’au 31 décembre 2015 pourront bénéficier du régime fiscal favorable durant les trois prochaines années ou si l’avantage sera stoppé net dès la fin de cette année. Est-il possible de proroger le dispositif Malraux du PNRQAD en cohérence avec les calendriers opérationnels contractualisés dans le cadre des conventions pluriannuelles, prorogation indispensable à la mise en œuvre des projets voulus par l’État et les collectivités ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication. La loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, dite « Grenelle 2 », a institué une date couperet pour la transformation des zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, les ZPPAUP, en aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine, ou AVAP. Les ZPPAUP doivent être transformées en AVAP, au plus tard, dans un délai de cinq ans. La loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové a prolongé ce délai d’un an, soit au 14 juillet 2016.

Seules 60 ZPPAUP ont été transformées en AVAP à ce jour sur les 685 qui ont été créées depuis plus de trente ans. À ce rythme, il faudrait plus d’un demi-siècle pour transformer toutes les ZPPAUP. Plus de 600 d’entre elles risquent donc de disparaître au 14 juillet 2016.

Le projet de loi relatif à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine a notamment pour objectif de préserver les bénéfices de cette politique en assurant une meilleure protection et une mise en valeur plus grande du patrimoine urbain et paysager. Cet objectif sera rempli par l’institution des cités historiques. Ainsi, les ZPPAUP et AVAP existantes intégreront automatiquement les cités historiques et leurs règlements continueront de s’appliquer jusqu’à leur intégration dans un plan de sauvegarde et de mise en valeur ou dans un plan local d’urbanisme dit « patrimonial ». Les AVAP en cours d’instruction à l’entrée en vigueur de la loi pourront également poursuivre leur procédure de création jusqu’à leur terme selon les dispositions antérieures, dans un délai de trois ans. Une fois instituées, ces AVAP seront ensuite transformées automatiquement en cités historiques.

Soyez assuré, monsieur le sénateur, que je veillerai à ce que les dispositions prévues par le projet de loi relatif à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine soient adoptées avant la date butoir du 14 juillet 2016.

S’agissant du programme national de requalification des quartiers anciens dégradés, il concerne les quartiers présentant soit une concentration élevée d’habitat indigne et une situation économique et sociale des habitants particulièrement difficile, soit une part élevée d’habitat dégradé vacant et un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements. Ce programme ambitieux de reconquête des centres-villes en déclin permet de lutter contre le desserrement urbain et de réhabiliter le « vivre en ville » par la création de logements plus adaptés aux demandes actuelles et la restauration de l’attractivité urbaine de ces quartiers. À ce jour, 40 projets ont été retenus et environ 50 000 logements bénéficient chaque année d’une subvention de l’État. Ces quartiers ont également la possibilité, jusqu’au 31 décembre 2015, de bénéficier du dispositif fiscal « Malraux » dès lors que la restauration a été déclarée d’utilité publique. Le taux de réduction d’impôt en quartier ancien dégradé s’élève à 30 % des travaux de restauration dans la limite annuelle de 100 000 euros comme pour les secteurs sauvegardés.

Mme la présidente. La parole est à M. François Commeinhes.

M. François Commeinhes. Si j’ai bien compris, madame la ministre, les PNRQAD dont la mise en œuvre a déjà été engagée pourront bénéficier de la défiscalisation dite « Malraux » jusqu’à la fin de la réalisation des travaux. Si tel est le cas, ma demande est entièrement satisfaite. Sinon, je déposerai un amendement lors de l’examen du prochain projet de loi de finances rectificative en vue de permettre la prorogation de ces financements après le 31 décembre 2015.

réponses du gouvernement à la crise du logement social étudiant

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Abate, auteur de la question n° 1110, adressée à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Patrick Abate. Le nombre d’étudiants ne cesse de croître – 2,3 millions aujourd’hui, dont 12 % d’étudiants étrangers –, tandis que la construction et la rénovation des logements sociaux dédiés ne suivent pas cette dynamique. Le constat est alarmant : seuls 7 % des étudiants, au niveau national, ont accès à un logement social géré par un CROUS, un centre régional des œuvres universitaires et scolaires, ou un organisme conventionné. Le dernier rapport de la Cour des comptes faisait ainsi état de 162 457 chambres dans le pays, bien trop peu pour répondre aux besoins. À ce chiffre, il faut ajouter l’inégalité territoriale, particulièrement flagrante dans les grandes villes universitaires.

Le plan « Anciaux » et le plan « 40 000 », lancés respectivement en 2004 et 2012, n’ont pas amélioré de façon significative la situation. Le premier n’a rempli que 53 % de son objectif : 26 400 logements sur les 50 000 initialement prévus. Le second, démarré certes il y a peu, suscite déjà un certain nombre d’inquiétudes. En effet, l’engagement de 8 000 nouvelles places annuelles n’est pour l’heure pas tenu. Dans le même temps, et c’est tout aussi inquiétant, la loi de finances pour 2015 a amputé les crédits des contrats de plan État-région de 14 millions d’euros, soit un tiers de ce qui était prévu à l’origine.

Résultat : les étudiants voient leur choix d’université bloqué, faute d’une possibilité de mobilité ; en outre, la précarité financière s’accroît, ainsi que le salariat étudiant, avec tous les risques que cela comporte en matière de réussite. En effet, parler du logement étudiant, c’est parler du premier poste de dépenses de ces jeunes. Combien d’étudiants n’ont pas réellement pu choisir leur lieu d’études, voire leur orientation ? Ce sont là autant de vocations et de motivations gâchées. Combien d’étudiants ont dû prendre un emploi pour financer leurs études ? Aujourd’hui, près de la moitié des étudiants se salarient toute l’année, et même près des trois quarts si l’on tient compte des étudiants en vacation.

Cet état de fait a des conséquences en matière de réussite. L’INSEE souligne que les étudiants salariés réussissent globalement moins bien que les autres : leur taux d’échec est de 66 %, contre 49,3 % pour ceux qui ont la chance de ne pas travailler parallèlement à leurs études.

Certes, ces difficultés ne datent pas d’hier, de même que celles auxquelles se heurtent les CROUS et leurs salariés. Ces services doivent recourir à des vacataires. Certains d’entre eux sont si surchargés de demandes qu’ils en sont réduits à limiter la possibilité même de déposer un dossier, en instituant une politique de seuils. En tout état de cause, une relance de la construction du logement étudiant ne pourra pas faire l’impasse de moyens de travail et donc d’effectifs supplémentaires, à destination des CROUS.

Comment le Gouvernement entend-il améliorer, de manière significative, la situation du logement social étudiant ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, vous le savez, le Président de la République a fait de la jeunesse l’une des priorités de son quinquennat. Cet engagement se traduit notamment par l’attention portée aux étudiants de notre pays. À cet égard, nous sommes, comme vous, conscients que la qualité des conditions de vie joue un rôle déterminant pour la réussite des étudiants. Nous sommes donc déterminés à offrir à notre jeunesse le cadre idoine lui permettant d’étudier sereinement. En particulier, je tiens à vous rappeler l’action volontariste que mène le Gouvernement en matière de logement.

En premier lieu, j’insiste sur la construction de logements. Le plan « 40 000 », annoncé par le Président de République en mai 2013, vise à créer 40 000 logements étudiants d’ici à la fin de l’année 2017. À ce jour, plus de 25 % des objectifs ont déjà été atteints, avec, très précisément, la construction de 11 912 logements étudiants, soit 511 de plus que prévu dans la programmation initiale.

Par ailleurs, selon les projections, près de 50 % des objectifs auront été atteints d’ici à la fin de cette année, avec une production totale de 20 722 nouveaux logements étudiants. En tout, 42 445 logements de ce type devraient être construits avant la fin du quinquennat.

Notre volonté de faire réussir le plan « 40 000 » s’est traduite par l’envoi, début 2015, d’une circulaire de mobilisation aux recteurs et aux préfets ainsi que par un travail interministériel destiné à simplifier et à favoriser la construction de logements sociaux étudiants.

En second lieu, le Gouvernement agit par des dispositifs permettant de faciliter l’accès au logement des étudiants. À cet égard, la caution locative étudiante a été généralisée à la rentrée de 2014. Ce dispositif permet aux étudiants dépourvus de garants personnels de bénéficier de cette garantie de l’État pour une année universitaire. Il peut être demandé pour tout type de logement, quels que soient les bailleurs ou le mode d’occupation. Il complète l’effort de construction de logements, en agissant directement sur les conditions d’accès au parc locatif privé.

Vous le constatez, notre action tend à améliorer les conditions de vie étudiante et, ainsi, à favoriser la réussite de tous et à réduire les inégalités sociales dans l’accès aux études supérieures.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Abate.

M. Patrick Abate. Madame la ministre, je vous remercie de ces précisions, qui me semblent utiles, notamment au sujet du plan « 40 000 ». Si les chiffres que vous annoncez sont le véritable bilan d’étape – je ne les remets pas en cause –, il n’y a pas lieu de penser que nous n’atteindrons pas cet objectif à la fin du quinquennat. Bien entendu, si ce résultat se confirme, nous nous en féliciterons. Néanmoins, même si le plan « 40 000 » connaît une issue favorable, de nombreuses autres préoccupations demeureront pour les étudiants.

Vous avez également évoqué la caution locative étudiante. Cette solution permettra effectivement de pallier un certain nombre de difficultés. Même si l’accès au logement ne résout pas tous les problèmes, il constitue un important facteur de réussite pour nos jeunes.

Vous l’avez rappelé, le Président de la République s’est engagé à faire de la jeunesse sa priorité. Une politique très ambitieuse en matière de logement social étudiant serait un bon gage de la volonté du Gouvernement de s’engager en faveur de la jeunesse. La priorité affichée doit aboutir à des concrétisations. Nous resterons donc très attentifs à la manière dont cette politique sera mise en œuvre.

modalités d'élaboration de la carte scolaire pour le premier degré en milieu rural

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, auteur de la question n° 1101, adressée à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Claude Bérit-Débat. Depuis trois ans, le Gouvernement refonde l’école de la République. Il lui redonne progressivement les moyens qui doivent être les siens, qu’il s’agisse des recrutements, de la formation des maîtres, de la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République ou de la réforme en cours des collèges.

Je tiens à saluer ces efforts et à féliciter le Gouvernement, en particulier Mme la ministre de l’éducation nationale : demain, partout sur notre territoire, tous les élèves pourront avoir les mêmes chances et bénéficier d’un même enseignement de qualité. Toutefois, malgré tous ces efforts, les territoires ruraux, notamment dans le département dont je suis l’élu, la Dordogne, ont le sentiment d’être exclus de ce mouvement, du fait même des critères trop stricts d’élaboration des cartes scolaires et des suppressions de postes que leur application engendre chaque année. Aussi, il me semble urgent de repenser ces critères.

Je sais que le Gouvernement lui-même avance sur cette question. Il a annoncé l’application, pour les prochaines années, de nouveaux critères comme le niveau de vie des ménages, le caractère rural des communes, la mise en place de protocoles dans les départements ruraux volontaires ou encore la prise en compte des inscriptions au mois de juin et non plus au mois d’avril. Ces mesures vont incontestablement dans le bon sens. Néanmoins, à mes yeux, certains points méritent encore d’être précisés et affinés. Par exemple, pour les regroupements, surtout pour les regroupements périscolaires, le critère géographique pourrait inclure le temps de trajet des élèves. Le critère du nombre d’enfants par classe pourrait, lui aussi, être assoupli, de sorte que plus aucune classe, en milieu rural, ne soit fermée parce qu’il lui manque un ou deux élèves.

En outre, il me semble important que la concertation avec les élus, en particulier avec les maires, soit renforcée et repensée. Il faut associer davantage ces acteurs à l’élaboration des protocoles départementaux : ils le demandent tous. Surtout, il faut déterminer la carte scolaire sur une base pluriannuelle et, ce faisant, permettre aux élus de disposer d’une meilleure lisibilité quant aux investissements à engager dans le domaine scolaire.

Chacun l’aura compris, si je soutiens l’action du Gouvernement en matière scolaire, j’attends qu’il trouve une solution efficace pour résoudre les difficultés auxquelles sont confrontés, dans ce domaine, les départements ruraux. Aussi ma question est-elle la suivante : sur la base de ces éléments, comment le Gouvernement entend-il avancer, encore davantage, sur la question de la carte scolaire et de ses effets sur les départements ruraux ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication. Le ministère de l’éducation nationale s’est donné pour mission de mieux répartir les moyens alloués aux académies, afin que soient mieux prises en compte les différences entre les territoires. Vous l’avez rappelé, monsieur le sénateur, le nouveau mode de répartition intègre, en plus du critère démographique, un élément social. Au total, c’est donc une pluralité de données territoriales, sociales, pédagogiques et fonctionnelles qui sont désormais prises en compte, comme, par exemple, les déplacements des élèves, la présence d’élèves à besoins éducatifs particuliers ou encore le rattachement à un réseau d’éducation prioritaire.

Dans le cas précis du département de la Dordogne, la baisse d’effectifs de plus de 450 élèves sur les deux dernières années s’est traduite par le retrait de sept postes pour la rentrée de 2015. Toutefois, la ruralité du territoire reste pleinement accompagnée avec le ratio d’encadrement le plus élevé de l’académie – celui-ci est de l’ordre de 5,39. Il n’est reste pas moins que la Dordogne compte encore 445 écoles de taille souvent limitée, alors même que la baisse du nombre d’élèves se poursuit depuis sept ans.

La conséquence de ce double constat est la fragilité de certaines écoles. Un travail est en cours pour rationaliser la carte scolaire en Dordogne et l’inscrire, ainsi, dans une construction durable.

Dans ce cadre, deux courriers cosignés par le préfet de la Dordogne et l’inspectrice d’académie ont été adressés aux maires et aux présidents d’EPCI, en juin et en novembre 2014, afin non seulement de rappeler ce contexte, mais aussi de lancer et d’accompagner une réflexion. À cet égard, un premier comité départemental de pilotage sur le tissu scolaire s’est tenu le 21 janvier dernier. En outre, une feuille de route départementale est en cours d’élaboration avec l’Union des maires.

Vous le constatez, la perspective n’est pas un modèle unique d’organisation de l’école, quels que soient les territoires. Il s’agit bel et bien de pouvoir adapter les différents établissements à leur contexte, notamment dans les secteurs ruraux, et, ainsi, de favoriser les conditions de réussite des élèves.

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Bérit-Débat.

M. Claude Bérit-Débat. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse, qui va dans le bon sens. Néanmoins, permettez-moi d’insister sur l’inquiétude qu’éprouvent les maires ruraux de mon département.

Ces élus ne s’opposent pas aux fermetures d’écoles en tant que telles, dans la mesure où elles répondent aux évolutions de la démographie scolaire. Le contexte local peut rendre de telles mesures nécessaires. Cependant, ils souhaitent disposer d’une visibilité à moyen et long terme. À cet égard, la situation la plus dramatique, c’est celle de communes qui, un an après avoir investi dans des bâtiments scolaires, après s’être donné les moyens d’améliorer l’accueil des élèves, se trouvent contraintes de fermer leur école. À mon sens, une véritable concertation doit s’engager avec les élus de terrain, par exemple au niveau des intercommunalités : ces territoires sont, à présent, assez homogènes. Je le répète, tous les élus locaux demandent à être associés.

De surcroît, il faut se garder d’appliquer des critères numériques stricts. En milieu rural, lorsqu’un regroupement est effectué, d’autres facteurs doivent être pris en compte – par exemple, le fait que certains élèves devront faire un trajet de trois quarts d’heure en car scolaire pour rejoindre leur école… Ces éléments sont importants pour décider, dans le cadre d’une concertation, quelle classe sera supprimée.

Je suis parfaitement informé de la démarche engagée dans le département de la Dordogne et des efforts accomplis par M. le préfet et par Mme l’inspectrice d’académie. Toutefois, de leur côté, les élus persistent à demander une concertation bien en amont. Ils veulent disposer d’une véritable lisibilité quant au devenir de leur école et des investissements qu’ils doivent engager. C’est un enjeu pour les finances publiques et vis-à-vis de leurs concitoyens, auxquels ils doivent rendre des comptes.

situation des centres d’information et d’orientation du morbihan

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Le Scouarnec, auteur de la question n° 1088, adressée à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Michel Le Scouarnec. Les centres d’information et d’orientation, les CIO, sont des outils majeurs de la politique d’orientation et de formation. Ils constituent une ressource quotidienne indispensable pour les conseillers et, surtout, offrent un lieu unique d’accueil et de conseil aux élèves et à leurs parents. On en compte actuellement vingt-deux sur le territoire des quatre départements bretons, dont cinq dans le Morbihan. Véritable service public de proximité, ils contribuent efficacement à l’accès à l’information et à l’ambition scolaire. Je rappelle que le Gouvernement a fait de l’école une priorité.

Pourtant, les CIO ont été les grands absents du projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République et ont disparu du projet de loi relatif à la décentralisation. Dans le même temps, les régions ont renoncé à leurs projets d’investissement dans ce domaine, notamment parce que l’État ne s’est pas engagé à financer le transfert des locaux et des charges. Ce retrait ne ménage plus aucun financement pour les CIO, alors que les départements poursuivent leur désengagement et que l’État réduit leur nombre d’année en année.

Dans le Morbihan, cette situation s’est traduite par une refonte de la carte des CIO en fonction des bassins de population, c’est-à-dire sur la base d’un découpage à la fois théorique et subjectif. La région ne rassemble en outre que douze de ces bassins, soit dix de moins que le nombre de CIO. Il est aisé d’imaginer les conséquences d’une réflexion appuyée sur un tel fondement. Elle conduirait indubitablement à la disparition d’une moitié des CIO en région Bretagne. Pourtant, plus de 30 000 collégiens et lycéens sont scolarisés dans l’enseignement public pour le seul département du Morbihan.

Ainsi, le rectorat vient de décider de fermer quatre centres, ceux d’Auray, de Quimperlé, de Loudéac et de Landerneau. Cela va poser de très nombreuses difficultés aux familles morbihannaises qui ne disposeront plus d’un service public de proximité pour bénéficier de conseils en matière d’orientation, lesquels sont précieux, en particulier, pour les familles les plus modestes.

Les agents des CIO s’inquiètent légitimement de la continuité de leurs missions et de leurs conditions de travail, alors même qu’ils sont des éléments clés de la réussite scolaire pour tous et partout. Séparer orientation scolaire et orientation professionnelle va à l’encontre d’une approche globale de cette question, pourtant plus que jamais nécessaire dans un monde où les individus sont amenés à s’orienter et à se former tout au long de leur vie.

Que l’on supprime les CIO ou que l’on se contente de les affaiblir, les jeunes et les familles n’y gagneront rien, mais y perdront beaucoup. L’orientation est un sujet important pour notre jeunesse comme pour notre pays, et il faut que tous les partenaires soient associés à la réflexion sur l’avenir de notre offre de formation et d’orientation. C’est pourquoi j’aimerais savoir quelles mesures seront mises en œuvre dans le Morbihan et sur l’ensemble de notre territoire, afin d’offrir aux élèves une information suffisante et de créer les meilleures conditions de réussite pour tous.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication. Le Gouvernement a fait de la lutte contre le décrochage scolaire une priorité. Dans ce cadre, un grand plan de lutte contre le décrochage a été annoncé, dans lequel l’orientation des élèves occupe une place très importante.

Les évolutions législatives récentes, notamment la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République et la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, ainsi que l’arrêt du soutien financier des conseils départementaux appellent à repréciser la place de l’orientation au sein de l’école et tout au long de la vie, en préservant la qualité du service rendu par les CIO. Ainsi, à la demande de la ministre de l’éducation nationale, tous les recteurs ont engagé en 2014 une réflexion visant à restructurer les cartes académiques des CIO.

S’agissant de l’académie de Rennes, la révision a fait l’objet d’une concertation étroite et active entre les services, les membres du personnel et les organisations syndicales, ainsi que d’un dialogue intensifié avec les collectivités territoriales. Les choix d’implantation s’appuient sur la carte actuelle des bassins de formation, qui constituent les territoires pertinents pour penser l’orientation tout au long de la vie. En outre, il est tenu compte des spécificités des territoires en termes de taille, de ruralité et de contexte démographique, économique et social. L’objectif est de tisser un maillage territorial cohérent et qualitatif. Le rectorat a ainsi proposé en décembre 2014 un projet de carte d’implantation fixée à dix-sept CIO, soit cinq de plus qu’actuellement.

L’enjeu, comme vous le savez, monsieur le sénateur, est également financier, et les collectivités territoriales seront éventuellement sollicitées. Plusieurs solutions sont encore à l’étude, notamment celles d’une implantation dans des lycées ou d’une permanence dans un lieu susceptible d’accueillir un conseiller d’orientation psychologue quelques heures par semaine. Ainsi, dans le département du Morbihan, ce choix devrait être conforté en septembre prochain par une permanence de plusieurs demi-journées à Auray, conformément à la demande des élus locaux.

Vous le voyez, c’est avec le souci constant d’offrir aux élèves un service public d’orientation continue et de qualité que nous menons notre action.