M. Philippe Pemezec. Tout à fait !

M. Franck Montaugé. Les politiques du logement et de la ville doivent donc être liées par la problématique du peuplement.

Pour ces raisons, nous pensons que le plan gouvernemental Logement d’abord doit aussi être mis en œuvre dans le cadre d’une stratégie de peuplement globale et cohérente avec celle des quartiers. Une part des crédits de l’action n° 03, Stratégie, ressources et évaluation, doit donc être consacrée à la définition et à la mise en œuvre, toujours propre à chaque territoire, de stratégies de peuplement marquées du sceau des valeurs de la République.

Pour conclure, compte tenu des incertitudes relatives aux capacités contributives effectives des partenaires financeurs et à la pertinence des stratégies de peuplement, nous émettrons un avis de sagesse sur les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. La parole est à M. Marc-Philippe Daubresse. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Marc-Philippe Daubresse. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en mai 2017, juste avant d’être élu Président de la République, Emmanuel Macron déclarait : « Je suis maoïste (Rires sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.), un bon programme, c’est un programme qui marche ». Moi, je ne suis pas maoïste (Nouveaux sourires.),…

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Ça nous aurait étonnés !

M. Marc-Philippe Daubresse. … mais j’ai bien peur que, si le Gouvernement n’accepte pas l’ensemble des propositions qui sont faites par notre majorité et les compromis que nous ont expliqués M. Dallier et Mmes Estrosi Sassone et Létard, nous ne fassions un grand bond en arrière sur la politique du logement.

En septembre, le Gouvernement a annoncé un choc de l’offre de logements. Nous sommes évidemment prêts à soutenir cet objectif. Mais les mesures que vous nous présentez, si elles ne sont pas amendées dans la loi de finances, vont provoquer un contre-choc sur l’offre de logements. Oui, nous avons besoin de construire 450 000 logements environ par an pour répondre aux problématiques de la natalité, de la décohabitation des couples et de l’allongement de l’espérance de vie.

Contrairement à ce que j’ai entendu dans votre bouche et dans celle du Président de la République quand il est venu à Lille, nous avons déjà élaboré des projets qui marchent, comme dirait Mao Tsé-Toung, notamment du temps de Jean-Louis Borloo, en 2005. D’ailleurs, cette Haute Assemblée n’avait pas émis un seul vote défavorable sur le programme en question : tous les groupes politiques ont déposé des amendements qui ont été retenus.

Nous avons essayé de construire un programme avec les parlementaires et les représentants des collectivités locales. Cela a marché, avec le quadruplement de l’accession sociale à la propriété, le doublement du financement social du logement, l’augmentation de 50 % de l’offre de construction, avec, au final, 5 milliards d’euros de recettes fiscales supplémentaires par rapport aux dépenses, y compris les APL, et avec une martingale gagnante : la confiance, dans les acteurs du logement et dans les collectivités locales sans lesquelles on ne peut rien, la confiance pour bâtir ensemble et atteindre ces 450 000 logements par an dont nous avons besoin.

C’est la faille de votre programme, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, au-delà des réductions purement comptables sur lesquelles je ne reviens pas : vous ne faites pas confiance aux acteurs du logement, en particulier aux bailleurs sociaux.

À ce titre, j’évoquerai trois points.

Le premier point est la réforme et le recentrage du dispositif Pinel et du prêt à taux zéro, le PTZ.

Je l’ai déjà dit dans cet hémicycle : même si ces dispositifs sont prorogés dans les zones tendues, même si l’on ne fait qu’abaisser la quotité du PTZ, les choix opérés à cet égard aboutiront mécaniquement à la destruction de plusieurs milliers de logements dans les zones rurales et dans les villes moyennes.

Or ces territoires représentent quand même 12 millions d’habitants. J’ajoute que, pour accéder à la propriété ou pour se loger, les jeunes couples qui y vivent bénéficient uniquement de ces dispositifs fiscaux, que nous avons inventés au fil du temps et qui permettent la sécurisation de leur parcours d’accès au logement. Pour ces jeunes couples, de tels projets n’ont rien d’évident.

Selon moi, plus de 15 000 primo-accessions dans le logement neuf vont être perdues en 2018 au sein de ces territoires. Très certainement, plus de 20 000 emplois y seront détruits à l’horizon de 2019 et ce chiffre sera doublé à l’horizon de 2020.

Monsieur le ministre de la cohésion des territoires, je vous renouvelle ma proposition : plutôt que de conserver un prêt à taux zéro, pourquoi ne concevez-vous pas un prêt à taux réduit ?

Quand Pierre-André Périssol a créé le PTZ, les taux d’intérêt atteignaient 9 %. Quand j’ai instauré le PTZ +, ils s’élevaient à 4,5 %. Aujourd’hui, ils sont à 1,6 %. Si vous accordez un prêt à un taux de 1 %, vous pouvez obtenir 600 millions d’euros d’économies.

Monsieur Patriat, je suis d’accord avec vous, il faut baisser la dépense publique. Mais prenons garde : on risque d’empêcher l’acquisition de logements dans toutes les villes moyennes, dans tous les territoires ruraux de notre pays.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. C’est pour cela qu’il faut différer !

M. Marc-Philippe Daubresse. D’ailleurs, demandez aux ministres de Bercy ce qu’ils en pensent : les taux d’intérêt pourraient bien remonter. Dès lors, le prêt à taux réduit, grâce auquel on n’aurait pas coupé l’accès au logement, serait peut-être une bonne mesure… (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Marc-Philippe Daubresse. Le deuxième point est la situation des bailleurs sociaux. Je n’y reviens pas : les précédents orateurs l’ont remarquablement exposée. Si l’on agit brutalement, comme le Gouvernement veut le faire, en procédant à la baisse des loyers, on privera les 255 offices publics d’HLM, qui gèrent 2,5 millions de logements, d’un total de 800 millions d’euros. Dès lors, on provoquera des faillites en série. De petits offices d’HLM vont dégringoler. Des collectivités territoriales seront appelées en garantie.

M. Marc-Philippe Daubresse. En définitive, tout le circuit du logement sera démantibulé. Évidemment, tout le circuit du bâtiment, qui se raccroche à celui du logement, se trouvera touché. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Marc-Philippe Daubresse. Les petits artisans seront eux aussi frappés.

M. Marc-Philippe Daubresse. Il faut donc bien y réfléchir : il ne s’agit pas d’une simple mesure comptable. C’est tout un système que l’on s’apprête à détruire. De grâce, monsieur le ministre, retenez le compromis que nous vous proposons !

Mme la présidente. Il faut vraiment conclure, mon cher collègue.

M. Marc-Philippe Daubresse. Enfin, ne touchez pas à l’APL d’accession sociale : dans les zones ANRU, la politique que M. Macron a exposée d’une voix vibrante et engagée en vue d’un grand bond en avant ne tiendra jamais la route si vous démantibulez l’APL-accession ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, après ce concert de louanges, j’ai toujours autant de plaisir à m’exprimer devant le Sénat de la République ! (Sourires et exclamations.)

Mme Françoise Gatel. C’est remarquable !

M. Jacques Mézard, ministre. Je vous le dis avec conviction : vous savez combien je suis attaché à la Haute Assemblée…

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Pas assez encore ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Jacques Mézard, ministre. Si d’aucuns, il y a quelques années, l’avaient été davantage, peut-être que le Sénat s’en serait trouvé mieux… (Murmures.)

Mesdames, messieurs les sénateurs, je porte la politique de cohésion des territoires : si cet intitulé a un sens, si un ministère l’a pris pour titre, c’est parce que notre pays connaît des déséquilibres territoriaux. Et, si cette situation existe, nous en sommes tous responsables : sur toutes les travées de cet hémicycle, je dis bien : « Sur toutes les travées ». Tous les groupes politiques, depuis 1997, ont participé aux gouvernements successifs de la République, y compris le groupe que j’ai représenté. Voilà la réalité.

Nous avons donc, les uns et les autres, depuis vingt ans, assumé des politiques qui ont aggravé les déséquilibres territoriaux. Voilà le constat.

Je ne dis pas que, par un coup de baguette magique, nous allons révolutionner les choses et que le bonheur va aussitôt inonder nos territoires. Je dis simplement que cette situation ne remonte pas au mois de mai 2017. Aujourd’hui, ce qui est nécessaire, c’est que la politique mise en œuvre ait des résultats concrets pour nos concitoyens.

Certes, nous avons également engagé un processus de maîtrise des dépenses budgétaires : c’est une réalité, et je l’assume, comme mes collègues du Gouvernement. Je peux entendre ceux pour qui tel ou tel chapitre n’a pas suffisamment de crédits. Mais je n’aurai pas le mauvais goût de revenir aux programmes présidentiels des uns et des autres : je n’en connais pas beaucoup qui aient proposé l’accumulation de nouvelles dépenses…

M. Jacques Mézard, ministre. Au titre de ce budget, que j’assume avec les difficultés qui en découlent, nous avons pris un certain nombre de mesures qui permettront d’avancer de manière positive dans les années qui viennent.

Cette mission représente 16,5 milliards d’euros de crédits budgétaires et 18 milliards d’euros de dépenses fiscales, qu’il ne faudrait pas oublier. Elle regroupe pour la première fois les soutiens financiers de l’État à la politique d’aménagement du territoire, à la politique de la ville et au logement.

C’est vrai, à la demande du Président de la République, nous avons engagé une réforme profonde de la politique du logement dans notre pays.

Oui, certaines décisions sont d’ordre budgétaire : je les assume. Et, par mes précédents propos, je n’entends pas faire le procès de celles et ceux qui, en la matière, ont été chargés des ministères successifs. Il est normal que le ministre Daubresse défende la politique qu’il a menée au Gouvernement. D’autres, dans cet hémicycle, ont d’ailleurs été responsables de ces questions : je pense notamment à Marie-Noëlle Lienemann.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Mais je suis critique de ma propre action !

M. Jacques Mézard, ministre. Je le répète, je ne suis pas là pour faire le procès de ce qui a été fait avant moi : je suis là, simplement, pour dire que nous avons encore des difficultés – si tel n’était pas le cas, cela se saurait !

Si nous avons engagé cette réforme profonde de la politique du logement, c’est non seulement pour faire face aux contraintes budgétaires, mais aussi parce que, dans le système actuel, malgré 40 milliards d’euros de dépenses assumées chaque année par l’État, plus de 4 millions de personnes restent mal logées en France.

Voilà pourquoi il est nécessaire d’opérer une réforme structurelle ; dans l’ensemble, ce constat fait d’ailleurs l’objet d’un large consensus.

Un certain nombre d’entre vous dénoncent la brutalité de la méthode employée. Toutefois, Julien Denormandie et moi-même avons toujours privilégié le dialogue, que ce soit avec les professionnels, avec les bailleurs sociaux ou avec les acteurs du monde de la construction. J’entends parfois qu’il n’y aurait eu aucun dialogue : or nous avons consacré plusieurs centaines d’heures à la concertation, ce qui est tout à fait légitime. Je peux vous dire que nous avons tenu compte des avis des uns et des autres.

À ce titre, je tiens à remercier très clairement le Sénat de la contribution qu’il a apportée et qu’il continue d’apporter sur ce dossier du logement. Le Sénat et le Gouvernement pourront ainsi, dans quelques jours, engager conjointement une conférence de consensus sur le logement. À mon sens, c’est une excellente chose. Au demeurant, de tels exemples démontrent la volonté du Gouvernement d’être à l’écoute du Sénat de la République.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je me réjouis également que cette conférence de consensus puisse être coanimée avec le président du Sénat, avec vous toutes et vous tous.

J’insiste : quand on consacre plus de 40 milliards d’euros à une politique, il n’est pas raisonnable de se contenter de résultats considérés, globalement, comme négatifs – et je nous mets tous dans le même sac ! La nécessité de changer les choses est aussi une affirmation courageuse.

Nous avons effectivement proposé de réduire le montant des loyers de solidarité dans le parc social, pour les locataires les plus fragiles. Parallèlement, nous proposons de baisser les APL pour les mêmes locataires : ainsi, l’ensemble de cette politique restera neutre pour leur pouvoir d’achat.

Cela étant, j’ai siégé longtemps parmi vous et j’ai très souvent entendu parler des « dodus dormants ». Je n’en déduis pas que tout va bien, que tous les organismes de logement disposent de trésoreries considérables ! Mais ces cas de figure existent, et nous le savons : je l’ai entendu de la bouche de nombre d’entre vous.

Si nous allons vers une réforme structurelle, c’est parce que notre pays en a besoin. Certains secteurs ont déjà engagé ce travail : en la matière, il est grand temps de le faire, et nous le ferons dans le dialogue. Encore aujourd’hui, je ne désespère pas que nous arrivions à la solution la plus consensuelle possible. Y compris dans ce secteur, nombre d’intervenants considèrent qu’il est nécessaire d’évoluer.

Le budget alloué aux aides au logement traduit cet objectif : l’État y consacrera 13,6 milliards d’euros, auxquels s’ajouteront une participation des employeurs et les concours des collectivités territoriales en faveur de l’accès et du maintien des ménages dans leur logement. Au total, la dépense publique d’aide au logement s’établira à 16,4 milliards d’euros.

Il est nécessaire de réformer le secteur, d’opérer des mutualisations, de regrouper des organismes. Ainsi, ces derniers atteindront une taille suffisante pour disposer des moyens de construire mieux. Des économies d’échelles seront dégagées et l’organisation du secteur sera simplifiée.

Toutefois, je vous ai entendus et, à cet égard, j’ai le même avis que vous : je veillerai à ce que cette réforme n’entre pas en opposition avec la nécessaire préservation de la proximité. Je pense en particulier aux territoires ruraux : il ne serait pas bon d’aboutir à des organismes éloignés du terrain. Sachez que je serai particulièrement attentif à cette question.

Cette réforme sera déployée au cours des trois prochaines années. Bien sûr, elle doit être mise en cohérence avec la réforme financière des aides au logement que nous avons engagée.

Nous sommes venus devant vous avec un texte voté par l’Assemblée nationale ; je considère que cette rédaction peut encore évoluer, et je ne m’en suis jamais caché. Vous avez commencé à apporter diverses modifications. À cet égard, je remercie tout particulièrement Philippe Dallier et Dominique Estrosi Sassone du travail considérable qu’ils ont accompli pour faire évoluer l’article 52.

Nous ne sommes pas au bout du processus. Vraisemblablement, ce dernier ne sera pas totalement achevé ce soir. Le travail accompli au Sénat n’en était pas moins indispensable, et il va dans le bon sens.

J’indique en particulier que, à titre personnel, le choix de recourir à la TVA pour financer les actions de l’article 52 m’a toujours paru une bonne chose : je suis heureux qu’il soit revenu au Sénat de mettre cette idée dans le circuit !

Bien sûr, nous discuterons plus longuement de l’article 52 en débattant des amendements que vous avez soumis à la Haute Assemblée.

Pour l’heure, je n’ajouterai qu’une précision. Tout le monde a essayé de réformer ce pays. D’ailleurs, tous les gouvernements l’ont fait au cours des dernières années. Or j’ai rarement vu des réformes mises en œuvre sans provoquer un certain nombre de réactions. C’est légitime, c’est la vie démocratique. Mais ce n’est pas une raison pour multiplier les marques d’inquiétude, en déclarant que le monde des bailleurs sociaux va s’écrouler, que des organismes vont finir en cessation de paiement : nous l’avons dit, nous ferons le nécessaire.

En particulier, nous sommes en train de travailler à la question de la péréquation. Parallèlement au projet mis sur la table, nous avons prévu un certain nombre de concours en faveur des bailleurs sociaux. J’y reviendrai éventuellement dans la suite de la discussion : je songe notamment au concours de la Caisse des dépôts et aux prêts de haut de bilan, qui, joints à la péréquation, préviendront la casse que d’aucuns nous annoncent. Au demeurant, une telle issue ne serait dans l’intérêt ni du pays ni de la République.

Ne serait-ce qu’à cet égard, plus de 6 milliards d’euros de prêts bonifiés seront proposés au secteur : ce n’est quand même pas neutre. Et je ne parle pas de la stabilisation du taux du livret A.

Pour ce qui concerne le budget de la cohésion des territoires, je l’ai dit, nous aurons à débattre dans quelques semaines du projet de loi relatif au logement. J’espère que la concertation menée à ce titre, avec le Sénat, sera la plus positive et la plus constructive possible.

Certains d’entre vous ont parlé du PTZ et du dispositif Pinel. J’entends les propositions qu’ils formulent. Mais quelle est la situation que nous avons trouvée ? En vertu du projet de loi de finances pour 2017, ces aides disparaissaient totalement au 31 décembre 2017. Voilà quelle était la réalité !

Nous avons pris la décision de prolonger ces dispositifs pour quatre années, sauf exception, c’est-à-dire pour presque tout le quinquennat. Ce choix assure aux professionnels de l’immobilier une lisibilité et une visibilité.

Le dispositif Pinel sera concentré sur les zones tendues ; mais, si mes souvenirs sont bons, il n’a compris les zones non tendues que pour l’année 2017, et, dans les faits, seules quelques dizaines de logements ont été concernés à ce titre. Voilà aussi quelle est la réalité.

Quant au PTZ, n’inversons pas les faits : sur la base des mesures annoncées par le Président de la République, nous avons fait évoluer le projet de loi de finances initial. Le PTZ sera maintenu pour quatre ans pour les logements neufs dans les zones tendues ; dans toutes les zones non tendues, il sera également maintenu pour deux ans, certes à un taux un peu réduit pour les logements neufs, mais pour quatre ans, et au taux habituel, pour l’ancien. À mon sens, ce choix est davantage une avancée qu’un recul au regard de la situation que nous avons trouvée.

En outre, d’aucuns l’ont rappelé, et je les en remercie : nous avons renforcé les crédits de l’Agence nationale de l’habitat, l’ANAH. Nous en avons bien besoin pour lutter contre les passoires thermiques. Chacun, dans cet hémicycle, s’accorde à reconnaître qu’il s’agit là d’un enjeu prioritaire. L’effort accompli témoigne de la volonté du Gouvernement d’avancer sur ce front.

D’autres chapitres qui relèvent non de mon ministère, mais du ministère de la transition écologique et solidaire, mettent en œuvre des crédits importants dans ce domaine, qui concerne aussi le logement.

Cela étant, pour ce qui est de l’ANAH, le programme « Habiter mieux », qui sera doté de 1,2 milliard d’euros à l’échelle du quinquennat, est une initiative très positive. Cette action va dans le bon sens.

Bien sûr, au titre du projet de loi relatif au logement, nous veillerons aussi à faciliter l’offre. Un dispositif exceptionnel sera déployé pour réduire l’imposition des plus-values immobilières pendant trois ans et favoriser la cession du foncier.

J’en viens à une question que plusieurs d’entre vous ont également abordée : l’hébergement d’urgence et, plus spécifiquement, le plan quinquennal pour le Logement d’abord.

Tous les gouvernements successifs ont dû faire face au problème de l’hébergement d’urgence. J’étais aux côtés du Président de la République, à Toulouse, en septembre dernier, lorsqu’il a fait cette annonce : la politique du Logement d’abord sera préservée, quoi qu’il arrive, dans le cadre de ce budget.

Cet effort prendra des mois, et même des années. Mais le Logement d’abord est le seul moyen d’éviter que la question des sans-abri ne devienne chaque année plus préoccupante.

Depuis des années, quels que soient les gouvernements, les budgets consacrés à l’hébergement d’urgence ont été insincères : c’est une réalité. D’ailleurs, la situation dans laquelle nous nous trouvons démontre la difficulté que représente la question du logement en France.

Notre pays compte plus de 120 000 sans-abri : cela ne remonte pas au mois de mai dernier, c’est une responsabilité collective. Cette situation est encore aggravée par de nouveaux flux migratoires, qui posent les problèmes que l’on connaît et face auxquels on ne peut rester les yeux fermés. Voilà quelle est la vérité !

En la matière, nous avons besoin d’augmenter les crédits : c’est ce qu’assure le budget que nous vous proposons. Cet effort ne résoudra pas tout. Je sais que des difficultés persisteront. Je sais que, malheureusement, cet hiver, des hommes et des femmes sont déjà décédés dans la rue. Ce gouvernement fait ce qu’il peut, compte tenu des contraintes budgétaires actuelles. Je le dis comme je le pense : peut-être devrions-nous faire plus. C’est là un aspect fondamental du respect que nous devons à nos concitoyens, quelles que soient les sensibilités que nous représentons ici.

Cette stratégie du Logement d’abord, nous y tenons, le Président de la République y tient, et toutes les associations du secteur l’ont saluée : c’est bien la preuve que nous avons retenu la bonne formule, même s’il ne s’agit pas d’un enjeu facile.

Pour ce qui concerne l’aménagement du territoire, d’aucuns ont trouvé que nous n’en faisions pas assez. Certes, on ne fait jamais assez en la matière, surtout quand on hérite d’une situation comme celle que nous avons trouvée ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Là aussi, j’assume ma part de responsabilités, ce qui n’est pas le cas de tout le monde, tant s’en faut…

M. Roland Courteau. Quand même !

M. Jacques Mézard, ministre. Monsieur Courteau, il y a une différence entre nous : j’assume le fait d’avoir voté les budgets du dernier quinquennat…

M. Roland Courteau. Nous aussi !

M. Jacques Mézard, ministre. Ce n’est peut-être pas ce que j’ai fait de mieux, mais je l’ai fait ! (Rires et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

M. Antoine Lefèvre. Au moins, c’est honnête !

M. Jacques Mézard, ministre. Toutefois, monsieur Courteau, lorsque la politique de l’ancien gouvernement ne me convenait pas, j’ai aussi eu le courage de vous le dire en face. Voilà pourquoi je prends vos propos, qui n’étaient pas nécessairement des félicitations ou des encouragements, comme un exemple de l’expression démocratique qui honore notre pays. (Très bien ! et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

Toujours en matière d’aménagement du territoire, on me dit : « Vous avez beaucoup parlé des contrats de ruralité. » Mais si quelqu’un est concerné par la ruralité, c’est bien moi ! Un seul exemple illustre la situation du département dont je suis issu : vendredi dernier, mon excellent ami député du Cantal a battu le record de la liaison Paris-Aurillac par avion. Son trajet a duré vingt et une heures trente ! On a donc encore des marges de progression… (Sourires.)

M. Antoine Lefèvre. Comme disait Chirac, c’est beau, mais c’est loin ! (Nouveaux sourires.)

M. Jacques Mézard, ministre. Notre gouvernement aurait pu se contenter de dire : pour les contrats de ruralité en cours, nous honorons la parole de l’État, et nous nous en tenons là. Ce n’est pas la décision que nous avons prise.

Cette mesure n’a pas été suffisamment rappelée à mon goût, mais je peux comprendre pourquoi. Il n’en est pas moins vrai que les diverses dotations, comme la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR, et la dotation de soutien à l’investissement local, la DSIL, ont été maintenues au plus haut niveau,…

M. Bernard Delcros, rapporteur spécial. Oui !

M. Jacques Mézard, ministre. … ce qui n’était pas forcément évident.

Si nous avons pris la décision d’inclure le programme 112 dans le chapitre relatif à la DETR et à la DSIL, c’est parce que nous avons bien la volonté de maintenir la politique de contrats de ruralité : je le dis avec force !

À l’intention de ceux qui, il n’y a pas si longtemps, ont voté l’augmentation du nombre de métropoles, j’ajoute que cette dernière mesure représente un coût de 90 millions d’euros supplémentaires. Si j’ai bien compris, ces fonds n’iront pas forcément vers la ruralité… (Mme Éliane Assassi rit.)

M. Jean-Claude Requier. Tout à fait !

M. Jacques Mézard, ministre. Il ne faudrait pas non plus l’oublier.

Je tiens également à vous dire que nous engagerons, dans les semaines qui viennent, une politique contractuelle dédiée aux villes moyennes. Ne nous dites pas que nous n’avons pas d’ambition à ce titre : vous verrez qu’il s’agit d’un vrai plan. Voilà bien longtemps que nous avons besoin d’une telle initiative. Nombre de villes moyennes ont été délaissées,…

Mme Sophie Primas. C’est vrai !

M. Jacques Mézard, ministre. … à l’instar des territoires ruraux qui les entourent.

En la matière, nous allons coordonner les politiques menées par le Gouvernement, par la Caisse des dépôts et consignations et par Action Logement, avec qui j’ai signé un protocole d’accord il y a quelques jours : ainsi, Action Logement a pris l’engagement de déployer, au cours du quinquennat, 1,5 milliard d’euros en faveur des villes moyennes.

Ce plan ne résoudra pas tout, mais il permettra aux villes moyennes de trouver une nouvelle dynamique. C’est l’un des engagements que je prends au nom du Gouvernement.

Certains d’entre vous l’ont rappelé, nous avons émis un message tout à fait clair et tout à fait favorable quant au financement des maisons de services au public.

J’entends les interrogations qu’inspire la lutte contre la désertification médicale. Dans ce domaine comme dans les précédents, les problèmes ne remontent pas au mois de mai dernier. Certains estiment que le plan annoncé par Mme la ministre des solidarités et de la santé est insuffisant. Nous travaillerons avec elle au cours des mois qui viennent pour améliorer encore l’action entreprise.

Il y a quelques semaines, le Sénat a consacré un débat aux territoires ruraux : je n’ai pas oublié que, sur les vingt et une questions qui m’ont été posées à cette occasion, huit portaient sur la désertification médicale. Ce qui remonte de nos territoires, c’est donc bien qu’il s’agit d’un problème de fond.