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Mise au point au sujet de votes

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour une mise au point au sujet de votes.

Mme Nathalie Goulet. Madame la présidente, lors du scrutin n° 48, du 5 février 2019, j’ai été considérée comme ayant voté contre, alors que je souhaitais m’abstenir.

En outre, lors du scrutin n° 54, du 12 février 2019, j’ai été comptabilisée comme ayant voté pour, alors que je souhaitais également m’abstenir.

Mme la présidente. Acte vous est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique des scrutins.

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Création de l’Office français de la biodiversité

Discussion en procédure accélérée d’un projet de loi et d’un projet de loi organique dans les textes de la commission

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant création de l’Office français de la biodiversité, modifiant les missions des fédérations des chasseurs et renforçant la police de l’environnement (projet n° 274, texte de la commission n° 425, rapport n° 424, avis n° 411) et du projet de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, modifiant la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution (projet n° 275, texte de la commission n° 426, rapport n° 424).

Il a été décidé que ces deux textes feraient l’objet d’une discussion générale commune.

Dans la discussion générale commune, la parole est à Mme la secrétaire d’État.

 
 
 

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la présidente, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, madame la rapporteure pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai le grand plaisir de vous présenter cet après-midi le projet de loi portant création de l’Office français de la biodiversité, l’OFB, modifiant les missions des fédérations des chasseurs et renforçant la police de l’environnement.

La création de ce grand établissement par rapprochement des expertises complémentaires de l’Agence française pour la biodiversité, l’AFB, et de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, l’ONCFS, est attendue depuis longtemps – près de dix ans – par beaucoup, et elle faisait partie des priorités fixées par le Gouvernement dans le cadre de la stratégie pour la biodiversité qui a été lancée en juillet 2018.

En effet, la France est riche de sa biodiversité, puisqu’elle recèle 10 % des espèces connues au niveau mondial, essentiellement grâce à nos outre-mer et à notre espace maritime. Mais cette biodiversité est en danger. Près de 30 % des espèces sont menacées ou quasi menacées sur notre territoire du fait d’activités humaines – pollutions, artificialisation des sols, fragmentation des habitats, surexploitation des espèces – et du développement d’espèces exotiques envahissantes.

Pourtant, nous le savons, la biodiversité nous rend des services inestimables : les milieux humides nous fournissent l’eau potable, les insectes pollinisent nos cultures, les dunes et les mangroves nous protègent des tempêtes, les océans régulent le climat… Le Gouvernement a donc lancé une action déterminée dans le domaine de la biodiversité.

Cette reconquête passe par la création d’un opérateur de premier plan permettant d’appréhender tous les aspects de la biodiversité sur tous les types de milieux – terrestres, aquatiques, marins, y compris ultramarins – et sur tous les territoires. Tel est l’objet du présent texte, en tout cas dans sa première partie.

Ce texte a déjà été largement enrichi lors de son examen à l’Assemblée nationale. Je voudrais saluer les travaux qui ont d’ores et déjà été menés par la commission au Sénat.

Je voudrais néanmoins revenir sur quelques points.

Je commencerai par le nom de l’établissement. Le Gouvernement avait proposé – son amendement en ce sens avait été adopté en première lecture à l’Assemblée nationale – de l’appeler « Office français de la biodiversité ». La commission a souhaité y ajouter le mot « chasse ». Néanmoins, il ne me semble pas judicieux d’opposer la biodiversité et la chasse.

La biodiversité inclut la chasse, comme le prévoient les missions de l’opérateur. Par ailleurs, lorsque nous avons choisi ce nom, nous avons sollicité l’avis des agents des deux établissements fusionnés, lesquels avaient choisi le nom « Office français de la biodiversité ».

Pour ce qui concerne la taille du conseil d’administration, nous souhaitons tous, le Gouvernement et les assemblées, que le format retenu permette un fonctionnement efficace de cet établissement. Lors des discussions à l’Assemblée nationale, j’ai été amenée à donner un ordre de grandeur sur la taille de ce conseil, qui comprendra entre 30 et 40 membres.

Les travaux préalables ont permis de préciser la représentation des parties prenantes, avec un conseil d’administration équilibré. Un comité d’orientation adossé à ce conseil d’administration aura vocation à être plus largement ouvert.

Enfin, au vu de l’expérience de l’actuelle AFB, il semble important que ce conseil d’administration puisse, dans certains cas, donner des délégations à ces commissions. Nous défendrons donc le rétablissement de cette disposition.

S’agissant d’un établissement public de l’État auquel sont confiées des missions régaliennes de police, le Gouvernement est attaché à conserver la majorité au conseil d’administration dans le premier collège, celui qui regroupe les représentants de l’État et les personnalités qualifiées.

Afin de concilier une taille raisonnable du conseil d’administration, la diversité des parties prenantes et la nécessaire majorité accordée à l’État, le Gouvernement portera un amendement, que nous espérons de compromis, en vue de confier plusieurs voix aux administrateurs représentant l’État, donc de maîtriser la taille de cet organe.

La présence des outre-mer dans les instances de gouvernance de cet établissement représente un enjeu fort. La commission a d’ailleurs précisé, et je l’en remercie, que les parlementaires ultramarins seraient représentés à l’intérieur du collège des parlementaires, ce qui est un signal très important.

De nombreuses questions ont d’ores et déjà été posées pour ce qui concerne les moyens de l’office.

Cet établissement porte une ambition forte au service de la biodiversité dans toutes ses composantes, qui se traduit par l’établissement d’une police de l’environnement et de la ruralité, et par l’accompagnement et la transformation de la chasse et de la chasse durable, sera financé.

La question du financement de l’établissement, posée dans la réforme, sera traitée lors de l’examen du projet de loi de finances, dans l’équilibre global des comptes publics, à la fois, pour la partie fonctionnement stricto sensu de l’établissement – nous devons trouver 30 millions d’euros pour sécuriser le budget de fonctionnement de l’établissement fusionné – et pour la contribution annoncée qui abondera la contribution des chasseurs aux actions concourant directement à la biodiversité. En effet, chaque chasseur financera à hauteur de 5 euros par permis de chasse une contribution qui sera abondée par la puissance publique à hauteur de 10 euros, laquelle, je le répète, sera également financée.

Le calendrier de mise en œuvre de ce nouvel établissement est ambitieux, mais réaliste. L’établissement lui-même sera juridiquement créé au 1er janvier 2020.

En marge des travaux menés pour préparer le projet de loi, la préfiguration du nouvel établissement et bien engagée. Je dirige personnellement son comité de pilotage, qui associe le « préfigurateur », les deux directeurs généraux de l’AFB et de l’ONCFS, les deux ministères qui concourent à la tutelle, les services déconcentrés du ministère de l’écologie et les agences de l’eau.

Le dialogue social est également engagé avec les organisations syndicales, qui portent une demande légitime de requalification des inspecteurs de l’environnement de la catégorie C en catégorie B, et de reconnaissance plus grande des chefs de services départementaux. Après analyse approfondie, il apparaît que ces mesures ne relèvent pas du niveau législatif, mais qu’elles sont pertinentes. Nous y travaillons.

Le deuxième volet de ce texte traduit l’ambition d’une chasse plus durable.

Le Gouvernement considère, comme la Fédération nationale des chasseurs, la FNC, la sécurité à la chasse comme une priorité. On ne peut que se réjouir du bilan provisoire pour 2018 et 2019, qui montre un niveau historiquement bas d’accidents mortels, mais une hausse des accidents avec blessés – 130, contre 113 lors de la saison précédente – et des incidents avec des dégâts matériels.

Le projet de loi prévoit que l’accompagnateur d’un jeune chasseur devra suivre une formation spécifique. Nous souhaitons, en liaison avec le monde de la chasse, aller un peu plus loin. Le Gouvernement proposera donc deux amendements, qui tendent à prévoir, l’un des obligations minimales de sécurité pour homogénéiser les règles de sécurité à la chasse, l’autre, un dispositif de rétention-suspension du permis en cas d’accident ou d’incident matériel, sur le modèle du permis de conduire.

Une autre question importante, dont nous aurons largement l’occasion de débattre, concerne les dégâts de gibier.

L’enjeu est de mieux réguler le grand gibier, dont les populations s’accroissent fortement, afin d’enrayer l’augmentation des dégâts sur les cultures et les boisements. La perspective est avant tout de prévenir et de développer une approche globale, ce à quoi invite le rapport de la mission parlementaire du député Alain Perea et de votre collègue Jean-Noël Cardoux, deux grands spécialistes du sujet. Je les remercie de ce travail, qui s’est d’ores et déjà traduit par l’adoption de plusieurs amendements par la commission. Je pense, par exemple, à la limitation de l’agrainage ou aux lâchers de sangliers.

En outre, afin de renforcer la lutte contre ces dégâts, sont prévues la responsabilisation financière des fédérations départementales dans l’indemnisation des dégâts, qui est souhaitée par la FNC et qui fait partie de l’équilibre de la réforme, la suppression de la péréquation financière directe au niveau national et la généralisation d’un mécanisme d’incitation financière de chaque chasseur. La Fédération nationale s’est d’ores et déjà engagée à continuer à soutenir, via une contribution particulière, les fédérations départementales qui en auraient besoin.

Enfin, le projet de loi prévoit le transfert aux fédérations départementales de la gestion des associations communales de chasse agréées, les ACCA, et des plans de chasse, en leur donnant davantage de leviers pour agir. L’État interviendra en cas de défaillance grave des fédérations, et restera compétent pour fixer les objectifs de prélèvements d’espèces au niveau départemental.

Ces transferts de mission seront compensés financièrement dans le cadre du financement global de la réforme.

Cette réforme prévoit également la mise en place de la gestion adaptative des espèces.

Une chasse plus durable permet de mieux adapter le niveau de prélèvement d’une espèce à son état de conservation. Un comité d’experts scientifiques a été créé au début du mois de mars pour faire des propositions en la matière.

Le projet de loi précise la définition de cette gestion adaptative et renvoie à un décret le soin de préciser la liste des espèces concernées. Il met en place une obligation de déclaration des prélèvements et la fixation de quotas de prélèvement pour les espèces concernées.

Enfin, le projet de loi prévoit une contribution de 5 euros par permis de chasse et par an pour financer des actions concrètes en faveur de la biodiversité. Le Gouvernement s’est engagé à soutenir ces actions à hauteur de 10 euros par an et par chasseur.

La déclinaison des modalités de mobilisation de cette contrepartie fait l’objet d’un travail conjoint de l’AFB, l’ONCFS et la FNC, qui avance bien et qui devrait être formalisé sous la forme d’une convention-cadre nationale, à laquelle seront associées, en tant que de besoin, les agences de l’eau, afin que ces actions concourent directement à la biodiversité et financent des projets dans les territoires.

Le Gouvernement présentera enfin un amendement visant à préciser l’organisation du Fichier national du permis de chasser, qui sera composé d’une base des permis délivrés alimentée par l’ONCFS, et bientôt par l’OFB, et d’une base des validations de permis gérée par la FNC et alimentée par les fédérations départementales. Ces deux bases sont, depuis très récemment, opérationnelles et interconnectées grâce à un travail conjoint, que je salue, mené par les fédérations de chasseurs, l’ONCFS et l’AFB.

Le troisième volet de ce texte renforce la police de l’environnement, sous ses deux aspects de police judiciaire et de police administrative.

Pour la police judiciaire, le projet de loi procède à une extension significative des prérogatives des inspecteurs de l’environnement pour leur permettre de mener des enquêtes ordinaires en totalité, de la constatation de l’infraction jusqu’à l’orientation de poursuites une fois l’enquête achevée, sans qu’il y ait lieu de se dessaisir au profit d’un officier de police judiciaire, un OPJ.

Par ailleurs, de nouvelles procédures entrent en vigueur dans le cadre de la loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, notamment la cosaisine par le procureur des inspecteurs de l’environnement et de la gendarmerie lorsqu’une enquête nécessite les compétences et les moyens de ces deux corps.

Une mission sur la justice environnementale a par ailleurs été engagée conjointement par la chancellerie et par le ministère de la transition écologique et solidaire. Elle a identifié quelques évolutions utiles, qui conduisent le Gouvernement à proposer des amendements.

Cette mission ne recommande pas à ce stade d’affecter aux inspecteurs de l’environnement des pouvoirs de coercition, du type garde à vue, seule prérogative qui distinguera encore les inspecteurs de l’environnement des OPJ au regard des nouveaux pouvoirs qui leur seront conférés.

Au titre de la police administrative, le Gouvernement a souhaité également renforcer l’efficacité des mesures existantes. Il proposera des amendements de nature à compléter le dispositif actuel, tendant notamment à garantir l’exécution des décisions de suspension prises à titre conservatoire par l’autorité administrative compétente, dès lors qu’il y a un caractère d’urgence avéré.

Vous le voyez, ce texte est riche et équilibré. Je souhaite que les travaux se poursuivent au Sénat avec le même esprit constructif que celui qui avait présidé aux travaux de l’Assemblée nationale, ainsi qu’à ceux de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable et de la commission des affaires économiques de votre assemblée. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Claude Luche, rapporteur de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, près de trois ans après l’adoption de la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, nous examinons aujourd’hui le projet de loi portant création de l’Office français de la biodiversité, ainsi qu’un projet de loi organique complémentaire, portant sur l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution.

Permettez-moi de rappeler que la loi biodiversité de 2016 a permis la création de l’Agence française pour la biodiversité, l’AFB, à partir du regroupement de quatre organismes publics : l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques, l’Onema, Parcs nationaux de France, l’Agence des aires marines protégées et l’Atelier technique des espaces naturels, l’ATEN.

L’objectif était alors de rassembler les opérateurs de l’État actifs en matière de biodiversité dans une seule et même entité, afin de simplifier et de renforcer les actions menées par l’État dans ce domaine. Lors de l’examen du projet de loi « biodiversité » en 2016, il était peut-être prématuré d’y intégrer l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, ONCFS.

Ce délai supplémentaire a permis de poursuivre les échanges avec les parties prenantes, pour envisager aujourd’hui un rapprochement apaisé entre l’AFB et l’ONCFS.

De ce projet de réforme, nous partageons les principales orientations et dispositions, à savoir la mise en place d’un nouvel établissement public, le renforcement de la police de l’environnement et une responsabilisation accrue des acteurs du monde de la chasse en faveur de la biodiversité.

Il faut le rappeler, les chasseurs sont les premiers observateurs au quotidien de la biodiversité. Ils arpentent de long en large nos différents territoires. Ils sont les premiers à constater les changements de la nature ou les dépôts sauvages, par exemple. Dans certains territoires, la nature est rude, voire hostile. Elle a besoin d’être entretenue pour offrir les paysages époustouflants qu’admirent les nombreux touristes l’été. Les chasseurs contribuent bénévolement à la mise en valeur de cette biodiversité, à laquelle ils sont très attachés.

Néanmoins, le texte transmis par l’Assemblée nationale présentait certaines lacunes, qui appelaient des clarifications et un rééquilibrage général, en vue de répondre à des inquiétudes persistantes sur ce projet de fusion. Grâce à un débat de qualité, notre commission a adopté près de 80 amendements, ce qui a permis d’aboutir à un texte dont l’ambition et la cohérence sont sorties renforcées.

Je salue à cet égard Anne Chain-Larché, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques, avec laquelle nous avons travaillé en bonne intelligence, ainsi que Jean-Noël Cardoux, président du groupe d’études Chasse et pêche, avec lequel nous nous sommes constamment concertés pour élaborer un texte riche et ambitieux concernant la chasse. Notre commission a donc apporté des modifications substantielles au projet de loi, en visant quatre objectifs principaux.

Nous avons tout d’abord souhaité améliorer la gouvernance du futur établissement public, afin de garantir une représentation plus équilibrée des différentes parties prenantes.

Sensible à la place particulière qu’occupe le monde cynégétique dans les politiques en faveur de la biodiversité, la commission a renommé l’Office français de la biodiversité : « Office français de la biodiversité et de la chasse ».

Elle a également modifié en profondeur son mode de gouvernance, dans le souci de lui assurer une représentativité et une efficacité renforcées. Ainsi, elle a supprimé la règle de la majorité acquise aux représentants de l’État, lui préférant un conseil d’administration moins pléthorique, mais rassembleur de toutes les parties concernées, dont certaines avaient été jusqu’alors oubliées.

Dans un second temps, notre commission s’est montrée soucieuse d’étoffer les pouvoirs de police judiciaire dont sont attributaires les inspecteurs de l’environnement, et plus généralement les fonctionnaires et agents publics chargés d’une mission de police de l’environnement. Elle a, pour ce faire, retenu une approche équilibrée : favorable à un renforcement de leurs pouvoirs de coercition, sur lesquels le texte initial était presque muet, elle s’est toutefois refusée à leur conférer des pouvoirs calqués sur ceux des officiers de police judiciaire.

Sans nier les difficultés auxquelles sont exposés les agents de police spéciale de l’environnement, il ne nous a pas semblé approprié de les doter de toutes les prérogatives d’officiers de police judiciaire, sans qu’ils aient préalablement reçu la formation nécessaire ou sans qu’ils disposent des locaux adéquats. La commission s’est donc attachée à étendre le périmètre de leurs pouvoirs de contrainte, tout en considérant que l’activité répressive devrait rester le dernier recours de cette police spécifique.

Le troisième objectif visé par notre commission a été d’enrichir les dispositions du texte relatives à la chasse.

Toutes les chasses doivent être prises en compte dans leur diversité. Dans nombre de territoires, la chasse reste une activité populaire, accessible à un large public, aussi bien à des jeunes ouvriers ou artisans qu’à des retraités aux revenus modestes.

Ainsi, compte tenu de leur rôle incontournable dans nos territoires, nous avons notamment conforté les missions des fédérations départementales en matière de gestion du patrimoine naturel et d’organisation des activités de chasse. Ces fédérations sont les piliers d’une bonne gestion patrimoniale des espaces naturels.

Notre commission a par ailleurs inscrit dans le projet de loi, Mme la secrétaire d’État l’a rappelé, l’obligation pour l’État d’apporter 10 euros par permis validé aux fédérations des chasseurs, en complément de l’obligation incombant à chacune d’entre elles de dépenser au moins 5 euros par permis en faveur de la protection de la biodiversité.

Chaque fédération départementale recevra directement cette contribution à due concurrence du nombre de ses adhérents, tandis que la Fédération nationale des chasseurs sera chargée de gérer un fonds permettant d’assurer une péréquation complémentaire entre fédérations locales. Il s’agit d’un dispositif particulièrement équilibré, que nous avons élaboré conjointement avec la commission des affaires économiques.

Notre commission a également renforcé la lutte contre les dégâts de grand gibier, qui constituent un véritable fléau dans certains territoires, en particulier pour les agriculteurs et les forestiers.

À cette fin, nous avons accru les pouvoirs du préfet en matière de plans de chasse en cas d’augmentation des dégâts dans un département. Notre commission a par ailleurs décidé de mesurer avec certains critères le nourrissage des sangliers, ainsi que la vente et le transport de ces animaux, pour mieux maîtriser les populations et les risques sanitaires, lesquels sont d’actualité.

En matière de gestion adaptative, la commission a tenu à ce que le nouveau dispositif ne se traduise pas par des contraintes excessives pour les chasseurs, notamment en atténuant les sanctions encourues en cas de manquement à l’obligation de transmettre les données de prélèvement.

Par ailleurs, nous avons complété le projet de loi par plusieurs dispositions visant à améliorer la protection du patrimoine naturel. Outre l’introduction dans le code de l’environnement d’une définition de la géodiversité, nous avons élargi le périmètre des aires marines protégées et clarifié les critères de reconnaissance des zones humides.

Enfin, la sécurité liée à la pratique de la chasse doit être améliorée, notamment dans la visibilité des chasseurs. Renforcer les mesures de sécurité sera bénéfique à tous, et en premier lieu aux chasseurs eux -mêmes.

Au total, le texte adopté par notre commission présente un projet de réforme plus équilibré, qui permet de donner toute sa place aux différentes parties prenantes.

À ce titre, nous nous réjouissons que ce projet de fusion se présente dans une atmosphère constructive et apaisée. Chacun a compris qu’il était indispensable de sortir d’une opposition stérile et caricaturale entre de supposés défenseurs et de supposés opposants de la biodiversité. Il est nécessaire d’agir en privilégiant des solutions partagées, concrètes et pragmatiques, élaborées au plus près du terrain. C’est ainsi que nous assurerons une meilleure protection de la biodiversité.

Je conclurai mon propos par la question du financement du futur établissement public, qui suscite les plus vives inquiétudes de notre commission. En effet, à l’issue de la loi de finances pour 2019 et de plusieurs arbitrages complémentaires, le budget de l’établissement sera confronté à près de 40 millions d’euros de dépenses non couvertes.

Vous avez pris l’engagement devant notre commission, madame la secrétaire d’État, de financer une part importante de ce déficit par des crédits strictement budgétaires. Néanmoins, nous craignons que le reliquat ne soit in fine couvert par une nouvelle augmentation des contributions des agences de l’eau, laquelle se ferait au détriment des moyens de la politique de l’eau, pourtant essentielle aux collectivités territoriales.

M. Charles Revet. C’est à craindre, en effet !

M. Jean-Claude Luche, rapporteur. Les débats que nous aurons, ensemble, permettront, je l’espère, de clarifier ces incertitudes financières. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, du groupe Les Républicains, du groupe La République En Marche et du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Anne Chain-Larché, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, souvent décriés, les chasseurs sont pourtant des acteurs incontournables de la biodiversité. Fins observateurs de la nature, ce sont les premiers à constater les évolutions de notre environnement.

Je ne puis que regretter que leur rôle ne soit pas reconnu à sa juste valeur. Les chasseurs n’ont en effet pas attendu ce projet de loi pour conduire des actions en matière de biodiversité, et les montants engagés dépassent bien souvent les 5 euros par permis de chasser.

Le Gouvernement propose de leur transférer deux compétences : la gestion des plans de chasse et celle des ACCA, ce dont je me félicite.

Le rôle des ACCA n’est plus à démontrer, chacun en conviendra. Il faut cependant veiller au maintien de ces associations qui contribuent à la régulation du gibier et de la biodiversité en favorisant le regroupement de terrains morcelés de petite taille. Elles sont la garantie d’une chasse populaire.

L’OFB est issu de la fusion de l’AFB et de l’ONCFS. Il est vrai que cet établissement a mis du temps à voir le jour. Néanmoins, cette fusion fait aujourd’hui l’unanimité, y compris chez les chasseurs.

Comme vous, madame la secrétaire d’État, nous pensons que la dénomination d’un établissement est importante, qu’elle renvoie à son identité et à ses ambitions. Au regard de leur rôle en matière de biodiversité, nous avons estimé que les chasseurs devaient avoir toute leur place au sein de ce nouvel établissement. C’est pourquoi nous l’avons rebaptisé « Office français de la biodiversité et de la chasse ».

Nous avons également cherché à rééquilibrer son conseil d’administration en faveur des chasseurs, mais aussi de deux autres acteurs importants, dont le cœur de l’activité est lié à la nature. Je veux bien entendu parler des agriculteurs et des forestiers.

Sur un sujet aussi important que la biodiversité, l’État doit savoir convaincre ses partenaires et rechercher le consensus.

L’État n’a la majorité ni dans Parcs nationaux de France ni à l’ONCFS. Ces établissements n’en sont pas moins bien gérés. Il n’y a donc aucune raison que ce soit différent pour l’OFB. C’est pourquoi nous avons proposé que l’État n’ait pas la majorité, mais uniquement un droit de veto.

Tel est le sens des amendements que j’ai portés, et qui ont été adoptés par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.

La question des moyens, tant humains que financiers, du nouvel établissement nous a interpellés. En effet, alors même que nous allons renforcer les pouvoirs des inspecteurs de l’environnement, ceux-ci ne seront pas en nombre suffisant pour exercer une pression de contrôle minimale dans les territoires. Pis, les moyens financiers ne sont pas au rendez-vous : il manque 41 millions d’euros dans le budget du nouvel établissement.

Les agences de l’eau participeront au financement hauteur de 258 millions d’euros. Elles devront en outre financer la promesse de l’État de mettre 10 euros pour 5 euros versés par les chasseurs, soit 11 des 41 millions manquants.

Une présence de l’État dans le financement de l’OFB à hauteur de 30 millions, on aimerait y croire, mais nous connaissons tous Bercy… Je crains que les agences de l’eau ne soient de nouveau mises à contribution, et ce aux dépens des communes et des EPCI.

Ces prélèvements sur les agences de l’eau sont intolérables. Ils sont contraires aux directives européennes relatives à l’eau et au principe selon lequel l’eau doit payer l’eau.