compte rendu intégral

Présidence de Mme Hélène Conway-Mouret

vice-présidente

Secrétaires :

M. Joël Guerriau,

M. Dominique de Legge.

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 10 octobre 2019 a été publié sur le site internet du Sénat.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté.

2

Questions orales

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

situation des boulangers et pâtissiers

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Janssens, auteur de la question n° 474, transmise à M. le ministre de l’économie et des finances.

M. Jean-Marie Janssens. Ma question s’adresse à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

L’accès aux soins et aux services de santé est la préoccupation majeure des Français. La désertification médicale touche une grande partie de la France des campagnes et des petites villes. Elle menace de virer à la crise sanitaire si des solutions innovantes, simples et efficaces ne sont pas mises en place rapidement.

Supprimer le numerus clausus est une décision salutaire, mais partielle. En 2025, la France atteindra le pic bas du nombre de médecins en exercice. Dans cette perspective, il faut agir sans tarder !

Ainsi, parmi les solutions à disposition, je veux mettre en lumière le dispositif PAIS, plateforme alternative d’innovation en santé. Imaginé et développé dans mon canton du département de Loir-et-Cher par un médecin hospitalier et un directeur d’hôpital, il propose aux médecins généralistes une forme d’organisation alternative, plus souple et plus adaptée aux nouvelles attentes et pratiques des médecins généralistes de proximité.

Ce dispositif revitalise l’offre de médecine de proximité en favorisant les synergies entre médecins, au sein d’un même bassin de vie.

Cela passe, par exemple, par la mutualisation du secrétariat, afin de filtrer les appels et alléger les tâches administratives, et par l’organisation à tour de rôle de la prise en charge des soins sans rendez-vous.

En Loir-et-Cher, les résultats sont là : amélioration des conditions de travail des médecins, meilleur accès aux soins de proximité et réduction du recours aux urgences hospitalières et aux sapeurs-pompiers.

Avec le dispositif PAIS, une nouvelle médecine de proximité est possible. C’est une réponse innovante et pertinente à la question de la démographie médicale et à l’équilibre géographique de l’offre de soins.

Le Gouvernement est-il disposé, avec l’appui des médecins qui le souhaitent, à généraliser ce dispositif à l’échelle nationale et, si oui, à quelle échéance ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État, pour répondre à une question différente de celle qu’il attendait. (Sourires.)

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat auprès du ministre de laction et des comptes publics. Monsieur le sénateur Jean-Marie Janssens, la question qui a été transmise au ministère de l’économie et des finances et à laquelle je devais vous apporter une réponse ce matin concernait la labellisation du secteur de la pâtisserie, ce qui, vous en conviendrez, est un peu éloigné du sujet que vous avez abordé… Je comprends mieux maintenant l’aparté que nous avons eu avant l’ouverture de la séance publique sur la question des déserts médicaux. (Nouveaux sourires.)

Par cette question adressée à Mme Agnès Buzyn, vous exprimez la volonté que le projet PAIS, qui est développé dans votre territoire, puisse être généralisé à l’ensemble du pays. Bien évidemment, je lui transmettrai cet élément d’information et vous savez l’intérêt qu’elle porte au développement de solutions alternatives, différentes et innovantes pour préserver la présence médicale dans les territoires.

Agnès Buzyn et moi présenterons ce soir, devant la commission des affaires sociales du Sénat, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, ce qui vous donnera l’occasion de constater que l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, fixé à hauteur de 2,3 %, prévoit le financement de mesures nouvelles en matière de soutien à la médecine de ville, donc à des présences alternatives sur les territoires.

Il s’agit, par ce biais, de désengorger les services d’urgences des hôpitaux – et vous avez souligné combien le dispositif mis en place dans votre département permettait d’atteindre cet objectif –, tout en préservant un accueil médical de qualité sur tout le territoire, quelles que soient les formules retenues.

Se posera ensuite la question de la présence de médecins formés.

C’est la raison pour laquelle nous avons supprimé le numerus clausus. Cette seule mesure suffira-t-elle ? Seul le temps le dira, puisqu’il y a un délai de formation, mais nous savons que le fait d’ouvrir les possibilités d’accès aux études de médecine permettra d’avoir des médecins après plusieurs années de formation. Nous avons donc encore quelques années difficiles devant nous en matière de démographie médicale.

C’est aussi la raison pour laquelle, au-delà des présences médicales sur le territoire que vous avez évoquées, s’exprime la volonté d’organiser différemment les soins, par exemple en permettant à des infirmiers de pratiquer un certain nombre d’actes de manière à rendre plus efficace l’accueil des patients.

Vous me l’avez confié tout à l’heure, monsieur le sénateur, le dispositif que vous présentez a intéressé Agnès Buzyn, qui vous a dit son souhait d’en savoir plus : je lui transmettrai votre question et je ne doute pas qu’elle reviendra vers vous pour en prendre connaissance de manière plus précise, voire, si vous lui en faites l’invitation, pour le découvrir sur place.

impact de la révision des valeurs locatives sur l’hôtellerie de plein air du var

Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Lanfranchi Dorgal, auteure de la question n° 901, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.

Mme Christine Lanfranchi Dorgal. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie et des finances et porte sur l’impact de la révision des valeurs locatives sur l’hôtellerie de plein air du Var.

Avant 2017, les valeurs locatives étaient établies en référence à des données datant de 1961 pour les propriétés non bâties et de 1970 pour le foncier bâti. Cette méthode ne reflétant plus la réalité du marché, des travaux de révision des valeurs locatives étaient nécessaires. Ils ont débuté à l’échelon départemental en 2010 pour s’achever en 2017.

Ainsi, depuis le 1er janvier 2017, tous les locaux professionnels entrant dans le champ de la révision disposent d’une nouvelle valeur locative révisée, égale au produit de la surface pondérée par un tarif au mètre carré, éventuellement ajusté d’un coefficient de localisation. Le secteur de l’hôtellerie de plein air est visé par cette révision : les valeurs locatives des locaux professionnels sont dorénavant assises sur des valeurs calculées à partir des loyers réels constatés.

Le degré d’augmentation de cette taxe n’était pas connu et il apparaît que ces nouvelles classifications ont entraîné de grandes disparités entre les départements et relevé certaines valeurs locatives à des taux excessivement élevés, notamment dans mon département du Var. L’hôtellerie de plein air a un poids économique important au sein de ce département, qui se classe parmi les premières destinations touristiques françaises.

Le Syndicat de l’hôtellerie de plein air du Var, qui regroupe 180 campings adhérents, compte 1 574 équivalents temps plein salariés, soit 64 millions d’euros de salaires versés annuellement.

Mon département est très touché par les conséquences disproportionnées de cette révision. Une nouvelle révision plus appropriée est réclamée par le Syndicat de l’hôtellerie de plein air, car, avant la réforme, l’évaluation et les critères pris en compte aboutissaient à un prix du mètre carré compris entre 0,30 euro et 1,26 euro, soit une moyenne de 0,80 euro par mètre carré.

Après la réforme, sur la base de vingt campings représentatifs dans le Var, la nouvelle base d’imposition serait à multiplier, par rapport à la base actuelle concernant les locaux commerciaux seuls, dans les proportions suivantes : plus de dix fois dans 42 % des cas, entre cinq et dix fois dans 32 % des cas.

Dans ces conditions, je demande à M. le ministre une réévaluation des valeurs locatives pour prendre en compte la situation spécifique du secteur de l’hôtellerie de plein air et appliquer in fine un niveau de taxation adapté et, surtout, conforme aux dispositions prises dans les départements voisins.

Je souhaite également que soit organisée une table ronde avec l’ensemble des acteurs institutionnels, afin de trouver des solutions durables et de travailler en parfaite transparence avec les services fiscaux du Var.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat auprès du ministre de laction et des comptes publics. Madame la sénatrice, vous avez appelé l’attention du ministère de l’économie et des finances sur l’impact de la révision des valeurs locatives sur l’hôtellerie de plein air du Var. La révision des valeurs locatives des locaux professionnels est appliquée depuis le 1er janvier 2017 et a permis la mise en place de nouvelles modalités de calcul de la valeur locative. Ces modalités sont nées après presque quatre années de travaux préparatoires, ce qui était nécessaire au regard de l’ampleur d’une telle réforme.

La valeur locative est déterminée à partir de données individuelles du local professionnel, comme la surface principale et secondaire ou encore la catégorie d’imposition, et de paramètres départementaux, comme le secteur locatif, le tarif au mètre carré ou encore le coefficient de localisation. Tous ces paramètres ont été validés au plus près du terrain par des commissions départementales réunissant des représentants des entreprises et des collectivités territoriales.

Afin de limiter les fortes variations à la hausse comme à la baisse par rapport à l’ancien système d’évaluation, la mise en œuvre de la révision au 1er janvier 2017 s’est accompagnée de dispositifs atténuateurs sur la valeur locative et la cotisation de taxe foncière pour rendre soutenable la réforme, avec un dispositif de planchonnement et de plafonnement, de telle manière que les convergences, s’il y a lieu, puissent prendre le temps nécessaire.

Cela étant, pour tenir compte des fortes augmentations de taxe foncière de certains établissements de plein air, situation que vous avez soulignée, les services de la direction générale des finances publiques mènent actuellement un travail d’analyse afin de s’assurer de la correcte évaluation des établissements concernés. En effet, comme vous, nous avons pu constater un certain nombre de variations extrêmement importantes. Cette démarche est en cours : elle est partagée avec la Fédération nationale de l’hôtellerie de plein air et elle nous semble de nature à répondre aux préoccupations que vous avez exprimées.

Ce travail de clarification, qui est assez technique, prend du temps et nécessite aussi une clarification doctrinale en matière d’établissements en plein air, sera poursuivi dès l’année prochaine par les travaux de mise à jour des secteurs locatifs et des tarifs prévus à l’article 1518 ter du code général des impôts.

Je pense que les travaux menés à la fois sur un plan doctrinal, sur un plan d’évaluation et pour modifier l’article 1518 ter du code général des impôts permettront d’apporter une réponse satisfaisante à la question que vous avez posée et aux préoccupations que vous avez relayées.

assujettissement à la taxe foncière sur les propriétés bâties des associations propriétaires de musées

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, auteur de la question n° 912, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.

M. Daniel Gremillet. J’appelle l’attention du Gouvernement sur le cas spécifique des associations à but non lucratif propriétaires de musées assujettis à la taxe foncière sur les propriétés bâties.

Ne pouvant entrer dans le champ d’application de l’article 1382 du code général des impôts, les musées détenus par des associations sont pleinement soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties. Cette imposition constitue une indéniable charge pour les associations propriétaires et met en péril leur avenir.

Cette situation interpelle particulièrement, puisqu’elle vient pénaliser des activités à but non lucratif, qui reposent sur le bénévolat et dont la portée est d’intérêt général. Les associations propriétaires de musées ne font pas de bénéfices ou en font très peu – d’ailleurs, les éventuels bénéfices sont immédiatement réinvestis.

Je prendrai pour exemple l’association Musée de Châtillon-sur-Saône, dans les Vosges, qui a acheté en 1990 deux maisons en ruines dans ce village de 140 habitants. Elle les a restaurées, puis aménagées en un écomusée, qui met aujourd’hui en valeur l’histoire, les traditions et le patrimoine de l’ancienne cité fortifiée de Châtillon-sur-Saône.

Reposant sur le seul dévouement des bénévoles, ce musée ne dispose pas des moyens suffisants pour équiper les locaux de toilettes ou d’évacuation d’eau. Les recettes des entrées ne couvrent pas davantage les frais d’entretien et de gardiennage. Seules les fêtes et les animations de rue organisées tout au long de l’année par les bénévoles permettent de pallier en partie ces besoins.

Malheureusement, cet équilibre précaire se trouve directement remis en cause par l’assujettissement de l’association à la taxe foncière, dont le taux est croissant et devrait atteindre un montant de 1 000 euros, somme considérable pour une aussi petite structure.

J’aurais également pu citer le cas de l’association Fonderie et clochers du pays de Robécourt, dont l’avenir est, de la même manière, remis en cause.

Aussi, monsieur le secrétaire d’État, au regard du rôle majeur que ces associations jouent en faveur de la préservation du patrimoine et de l’accès du plus grand nombre à la culture, je souhaiterais savoir si un aménagement fiscal était envisageable pour répondre à ces difficultés.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat auprès du ministre de laction et des comptes publics. Monsieur le sénateur, vous avez appelé l’attention du ministère de l’économie et des finances sur l’assujettissement à la taxe foncière sur les propriétés bâties des associations à but non lucratif propriétaires de musée. Plus spécifiquement, puisque vous avez conclu par cette question, vous souhaitez savoir si le Gouvernement envisage de leur accorder un abattement ou une exonération applicable aux propriétés publiques.

Comme vous le savez, la taxe foncière sur les propriétés bâties est un impôt réel dû à raison de la détention d’un bien, quels que soient l’utilisation qui en est faite ou les revenus du propriétaire. Les exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties doivent rester une exception – c’est la doctrine constante que nous observons.

Par ailleurs, je souligne que, si les immeubles qui appartiennent à l’État, aux collectivités territoriales, à leurs groupements ou à des établissements publics d’assistance scientifique ou d’enseignement sont exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties, c’est à la double condition d’être affectés à une mission de service public et d’être improductifs de revenus pour le propriétaire des bâtiments. Ce sont ces sujétions qui justifient la différence de traitement entre établissements publics et privés, quand bien même, vous l’avez souligné, les revenus tirés de ces bâtiments restent modestes, ne suffisant pas forcément à faire face à un certain nombre de charges.

En outre, si nous accédions à cette demande, des mesures similaires pourraient être sollicitées par d’autres structures associatives d’utilité générale, certainement tout aussi dignes d’intérêt, sans que nous puissions en maîtriser les impacts budgétaires.

Enfin, un tel allégement fiscal induirait une perte de ressources pour les collectivités territoriales, ce qui n’est évidemment pas souhaitable. C’est la question que nous devons nous poser chaque fois qu’une exonération de fiscalité locale est accordée.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement n’est pas favorable à l’aménagement que vous appelez de vos vœux. Je précise cependant que, si les valeurs locatives d’un bien paraissent surestimées par rapport à son état ou à sa situation, des possibilités de faire valoir une demande de réévaluation auprès du service des finances publiques existent, de telle manière que le niveau de l’imposition soit plus conforme à la valeur du bien détenu.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour la réplique.

M. Daniel Gremillet. Monsieur le secrétaire d’État, dans cette collectivité de 140 habitants, les maisons étaient en ruines et ont été reconstruites, jour après jour, par des bonnes volontés. Il n’y a pas de bénéfices : tout tient par le bénévolat, c’est-à-dire par des femmes et des hommes qui consacrent leur temps à l’animation et à la mise en valeur du patrimoine.

Faites quelque chose ! Il s’agit non pas d’enrichissement, mais de mise en valeur du patrimoine de notre territoire.

tarification et comptabilité des ehpad

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Buis, auteur de la question n° 922, adressée à M. le ministre de l’action et des comptes publics.

M. Bernard Buis. Monsieur le secrétaire d’État, vous savez combien la question des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) est prégnante à plusieurs titres : besoin de places compte tenu d’une population vieillissante, coût que représentent ces établissements pour les résidents et leur famille, mais aussi coût pour les collectivités qui les financent. C’est pourquoi je souhaite vous interpeller sur un sujet peut-être technique, mais pourtant très important : la tarification et la comptabilité des Ehpad.

En effet, les conseils départementaux sont chargés d’établir chaque année la tarification des établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS) habilités à l’aide sociale. Or, dans ce cadre, des investissements importants, sur un projet de réhabilitation, peuvent avoir un impact important sur le prix de journée – de l’ordre de 15 à 20 euros quelquefois –, ce qui est difficilement supportable par les familles.

Afin d’anticiper et de lisser une telle augmentation, il serait pertinent de pouvoir provisionner l’impact de ces évolutions tarifaires. Cela est possible pour les établissements soumis à la nomenclature comptable M22, mais pas pour les Ehpad, soumis à la nomenclature comptable M21. En Drôme, six établissements seraient concernés, mais cette problématique est générale.

Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous indiquer les possibilités de faire évoluer le dispositif et le cadre juridique et comptable applicables aux Ehpad, en autorisant, comme pour la M22, la constitution de provisions dédiées au projet immobilier de l’établissement ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat auprès du ministre de laction et des comptes publics. Monsieur le sénateur Bernard Buis, vous avez appelé notre attention sur la tarification et la comptabilité des établissements d’hébergement pour les personnes âgées dépendantes. Il s’agit d’établissements sociaux et médico-sociaux qui relèvent du 6° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles. Voici les précisions que je puis apporter à votre question.

Ces établissements sont financés par l’assurance maladie au titre des prestations de soins, par le département au titre des prestations afférentes à la dépendance et par l’usager au titre de l’hébergement ou par le département lorsque ce résident bénéficie de l’aide sociale à l’hébergement. Pour accueillir ces bénéficiaires, les Ehpad sont alors habilités par le département et le tarif afférent à l’hébergement est fixé par le président du conseil départemental ; il est déterminé en fonction des charges prévisionnelles de l’établissement.

Or, lorsqu’un Ehpad réalise d’importants travaux de réhabilitation – vous l’avez évoqué, monsieur le sénateur –, de nouvelles charges sont générées par les immobilisations issues de ces travaux, notamment en matière d’amortissement, et par d’éventuels frais financiers liés à la souscription d’emprunts. Ces charges d’amortissement et financières peuvent conduire à augmenter, à due concurrence, le prix de journée lié à l’hébergement en Ehpad.

Afin de limiter la hausse des tarifs d’hébergement et le reste à charge que les investissements induisent pour les résidents, les arrêtés des 10 novembre 2008 et 16 juin 2014 relatifs aux instructions budgétaires et comptables M22 et M21 prévoient que les autorités de tarification peuvent verser aux Ehpad une allocation anticipée destinée à compenser les charges d’amortissement et les frais, financiers ou non, liés à des opérations de rénovation ; ces crédits font l’objet d’une provision réglementée pour renouvellement des immobilisations.

Ce dispositif vaut pour l’ensemble des Ehpad publics, que ces établissements relèvent du cadre budgétaire et comptable M21, applicable aux ESMS rattachés à un établissement public de santé, ou du cadre budgétaire et comptable M22, applicable aux ESMS autonomes et aux ESMS rattachés à un centre communal d’action sociale, un centre intercommunal d’action sociale ou une collectivité territoriale. À cet effet, les instructions M21 et M22 prévoient un compte de provision réglementée pour renouvellement des immobilisations.

Enfin, les Ehpad ont également la possibilité, dans le respect des dispositions prévues dans le contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens signé avec les autorités de tarification compétentes, d’affecter un résultat d’exploitation excédentaire en réserve de compensation des charges d’amortissement des équipements, agencements et installations de mise aux normes de sécurité, aux termes des articles R. 314-234 du code de l’action sociale et des familles et R. 6145-51 du code de la santé publique. Cette réserve est ensuite reprise pour compenser les charges d’amortissement induites par les nouveaux équipements de mise aux normes de sécurité. De même, cette réserve de compensation peut être constituée par l’ensemble des Ehpad publics, qu’ils relèvent des instructions M21 ou M22.

Aussi les instructions M21 et M22 offrent-elles les mêmes possibilités aux Ehpad en matière de provisionnement et de financement des charges liées à des investissements. Cette analyse du ministère de l’action et des comptes publics est partagée par la direction générale de la cohésion sociale.

restructuration des finances publiques dans les hauts-de-seine

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, auteur de la question n° 938, adressée à M. le ministre de l’action et des comptes publics.

M. Pierre Ouzoulias. Monsieur le secrétaire d’État, le projet du Gouvernement pour les Hauts-de-Seine est de fermer l’intégralité des 19 trésoreries municipales, la moitié des 16 services des impôts pour les particuliers et les trois quarts des services des impôts pour les entreprises. Ce plan de destruction du service public a été décidé sans aucune concertation avec les salariés et encore moins avec les collectivités territoriales.

Dans un geste d’une grande clémence, vous avez décidé d’arrêter le bras du bourreau pour l’année 2020. Est-ce à dire, monsieur le secrétaire d’État, que toutes ces suppressions interviendront en 2021 ? Par ailleurs, votre gouvernement a annoncé que les buralistes et la Française des jeux, bientôt privatisée, seront habilités à recevoir le paiement des impôts. C’est le retour de la ferme générale organisée par Colbert en 1680. Du haut de ce plateau, il doit sourire devant la fulgurante nouveauté de ce retour en arrière prodigieux ! Il ne manque plus que les gabelous… (Sourires.)

C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, je vous demande de préciser votre plan de fermeture pour les Hauts-de-Seine. Par ailleurs, quelle concertation allez-vous engager avec les élus locaux ? Enfin, comment envisagez-vous le déploiement dans les Hauts-de-Seine des maisons France services ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat auprès du ministre de laction et des comptes publics. Monsieur le sénateur, il se trouve que le réseau des finances publiques a connu des centaines de fermetures depuis la fin des années 1990. Nous parlons de 1 200 fermetures depuis 2000, avec un rythme, sur dix ans, d’environ 120 fermetures par an. Ces fermetures ont été décidées dans le cadre de plans annuels de restructurations de services, qui ne tenaient bien souvent pas compte des engagements pris l’année précédente auprès des maires ou des collectivités.

Gérald Darmanin et moi-même avons voulu changer cette méthode et nous souhaitons travailler de manière pluriannuelle, avec quatre objectifs : premièrement, augmenter le nombre d’accueils de proximité en association avec les préfets, en concertation avec les élus et en lien avec l’évolution d’autres points d’accueil du service public, comme les maisons France services ; deuxièmement, répondre de manière plus satisfaisante au besoin de conseil des élus locaux en dédiant 1 200 cadres à cette mission de conseil financier partout sur le territoire, en veillant à ce que chaque maire membre d’une même intercommunalité ait le même conseiller financier ; troisièmement, créer des équipes de travail plus étoffées avec une organisation plus satisfaisante, car, dans bien des départements – ce n’est pas nécessairement le cas des Hauts-de-Seine –, les équipes sont désormais trop petites en taille et trop réduites en nombre pour offrir un cadre satisfaisant aux agents publics ; quatrièmement, opérer un rééquilibrage dans la localisation des services de la direction générale des finances publiques et des transferts des grandes métropoles vers les territoires.

Dans les Hauts-de-Seine, comme dans tous les départements, nous avons demandé aux directeurs départementaux de travailler en concertation. Le projet a été présenté au mois de juin dernier à l’Association des maires des Hauts-de-Seine, puis aux parlementaires du département et à chaque maire concerné. Il prévoit la création de postes de conseillers auprès des décideurs locaux, comme c’est le cas dans tous les projets départementaux. Il prévoit aussi de mieux prendre en compte la montée en puissance et l’affirmation des établissements publics territoriaux en créant un service de gestion comptable pour chacun des quatre territoires du département. Nous précisons aussi qu’un regroupement des services de gestion permettra de disposer de services de plus grande taille, mieux à même de traiter un certain nombre de tâches.

La concertation va se poursuivre autour de ce projet pour faire en sorte qu’il soit le plus partagé et le plus adéquat possible avec les besoins du territoire. Il doit aussi tenir compte de la fréquentation par le public d’un certain nombre de points de contact des finances publiques. En effet, du fait des réformes fiscales qui sont menées et de la dématérialisation, la fréquentation est beaucoup moins importante.

Je terminerai en évoquant deux points, monsieur le sénateur.

Notre objectif est d’aboutir à des formules qui soient partagées dans tous les départements, qui puissent faire consensus, à tout le moins aboutir à une convergence avec les élus locaux et que les engagements pris par les services des finances publiques et par l’État le soient pour une durée de cinq à six ans, de manière à sortir de la vision purement annuelle retenue jusqu’alors. C’est la raison pour laquelle nous ne fermerons aucune perception au 1er janvier 2020 : nous laisserons à la concertation le temps de se dérouler dans de bonnes conditions et sur une base connue.

Enfin, nous allons travailler avec les buralistes. Je trouve vos propos durs : il s’agit d’une profession de qualité, qui, d’ores et déjà, lève un certain nombre d’impôts et de taxes. Il vous est peut-être arrivé, pour une raison pour une autre, d’acquérir un timbre fiscal chez un buraliste et vous avez payé une taxe à travers cet achat. Il vous est peut-être arrivé également de jouer à la loterie.

Notre objectif est d’autoriser les usagers à payer, jusqu’à un certain montant et de manière totalement anonyme et confidentielle, sans que l’origine du paiement puisse être retracée, des sommes qu’ils doivent au Trésor public, aux heures d’ouverture des buralistes, lesquelles sont, vous en conviendrez, souvent plus en adéquation avec les rythmes de travail de nos concitoyens.