M. le président. La parole est à M. Christian Cambon.

M. Christian Cambon. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout d’abord, je veux remercier mon groupe, qui a eu l’amabilité de m’attribuer quelques minutes pour permettre au président de la commission que je suis d’évoquer son propre budget.

Malgré la modestie de leur montant, il n’y a rien de plus essentiel que les crédits du Quai d’Orsay. Compte tenu de notre rôle dans le monde, ce sont des crédits qui visent à aider à sa pacification, alors qu’il est en proie à une forme de chaos géopolitique.

À la conférence des ambassadeurs, monsieur le ministre, vous nous disiez de « regarder avec lucidité le monde tel qu’il est, pour entrevoir le monde qui se prépare ».

Votre constat était très clair : « Les grandes puissances sont résolues à faire de l’Europe leur terrain de jeu. […] Le système multilatéral est la cible d’attaques sans précédent. […] La grande compétition mondiale […] se joue sur des terrains nouveaux. » Notre commission partage votre analyse. Quand on regarde le monde avec lucidité, comme vous nous invitez à le faire, il y a de quoi être saisi de vertige.

D’un côté, on constate une aggravation accélérée des menaces : menaces de la force, comme on le voit dans le nord-est Syrien, mais aussi en mer de Chine, et jusqu’en Méditerranée, dans les eaux territoriales d’un État membre de l’Union européenne ; menaces de la faiblesse, celle des États faillis, terreau du terrorisme djihadiste, comme notre pays ne le sait que trop au Sahel.

Je rends à cet instant un nouvel hommage à l’action résolue et courageuse de nos armées et je salue la mémoire de nos treize militaires morts au combat, morts pour la France, au Mali. J’alerte le ministre – même s’il en est bien conscient – sur la situation préoccupante du Burkina Faso, peu à peu gangréné par le terrorisme. (M. le ministre opine.)

Les menaces peuvent, enfin, être hybrides, créant des situations « troubles », dans la zone grise entre guerre et paix, par l’utilisation de milices ou de la désinformation massive.

De même apparaissent de nouveaux espaces de conflictualité : après le cyberespace, l’espace extra-atmosphérique, pour lequel la France et l’Europe doivent rester des acteurs de premier plan. Je me félicite à cet égard de l’ambition portée par le conseil ministériel de l’Agence spatiale européenne de Séville, qui a prévu un engagement financier très fort, lequel fera de l’Europe un acteur de tout premier plan.

Face à ces crises, les outils de régulation issus de la Seconde Guerre mondiale sont malheureusement contestés : le Conseil de sécurité de l’ONU est bloqué sur la Syrie, sur le Yémen, sur le conflit israélo-palestinien. Quand on songe au fameux P3 – États-Unis, Grande-Bretagne, France –, jadis le « moteur » du camp occidental, vous voilà contraint de travailler avec Donald Trump et Boris Johnson, qui, aussi respectables soient-ils, sont quand même des partenaires assez remuants et compliqués. (M. le ministre sourit.)

Le droit international est bafoué, la liberté de circulation des mers est contestée, les traités de maîtrise de la prolifération chimique et nucléaire sont fragilisés. Après la dénonciation du traité sur l’armement nucléaire intermédiaire, le traité FNI, c’est désormais le traité New Start de réduction des armes nucléaires stratégiques qui est en danger. En vérité, c’est tout le système de maîtrise de la prolifération nucléaire en Europe qui est menacé ! Sur notre sol ! Qui aurait cru cela possible il y a seulement quelques années ?

On pourrait ajouter le retrait américain de l’accord nucléaire iranien, la stratégie dite de la « pression maximale », qui achève de mettre le Moyen-Orient à feu et à sang sans régler aucune des trois principales menaces iraniennes : nucléaire, missiles balistiques, instabilité régionale.

Même nos alliances les plus solides, comme la relation transatlantique, vacillent certains jours. L’opération turque dans le nord-est syrien a offert une victoire finale au régime de Damas et le retrait américain a livré aux Russes le Moyen-Orient. La menace djihadiste qui pèse sur l’Europe s’est hélas ! renforcée.

Surtout, cela a montré que nos alliés américains pouvaient abandonner des alliés loyaux et efficaces – les Kurdes, et nous, la France, deuxièmes partenaires de la coalition –, et ce du jour au lendemain. Il n’est pas besoin d’avoir lu Clausewitz pour comprendre les conséquences désastreuses de l’offensive turque et de la complicité américaine sur les relations entre la Turquie, membre de l’OTAN, et les pays européens.

Le Président de la République, en parlant de « mort cérébrale » de l’OTAN – peut-être la formule était-elle brutale – a dressé un constat que nous partageons en très grande partie.

Monsieur le ministre, il vous faut maintenant travailler sereinement au réveil stratégique de l’Europe, qui doit apprendre à se défendre seule. Pour les Français, c’est une évidence, mais, manifestement, cela ne l’est pas pour tous nos partenaires.

Comme l’a dit crûment un de vos prédécesseurs, le sentiment prévaut que, l’Europe, c’est aujourd’hui « un Bisounours en plein Jurassic Park », qui risque de « sortir de l’histoire » si elle ne se réveille pas.

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, que j’ai l’honneur de présider, travaille à ce réveil stratégique européen en tissant inlassablement des relations étroites, tant en matière d’affaires extérieures que de défense, avec ses homologues des vingt-sept parlements de l’Union, Britanniques inclus.

Le rapport sur la défense européenne de nos excellents collègues Ronan Le Gleut et Hélène Conway-Mouret, que je salue, a fait considérablement avancer la compréhension mutuelle. Nous n’hésitons pas à aller parler avec nos partenaires réputés les plus difficiles, en particulier nos collègues russes, avec lesquels nous allons entreprendre la rédaction d’un deuxième tome de ce rapport qui, à l’époque, avait marqué les esprits, ou les pays du groupe de Visegrad.

Finalement, nous sommes surpris de l’écho rencontré, car ils ne sont, évidemment, ni aveugles ni sourds à l’évolution du monde !

Monsieur le ministre, la semaine prochaine, à Londres, seront fêtés les 70 ans de l’Alliance atlantique. Le secrétaire général de l’OTAN était hier à Paris. Il faut utiliser le moment de crise que nous vivons pour aller vers une Europe plus forte dans une OTAN plus forte.

Tel est l’objectif. Nous ne doutons pas de votre volonté d’aller dans cette direction, et nous vous soutenons.

Dans ce contexte, chacun comprendra bien que les crédits du Quai d’Orsay, que les rapporteurs ont commentés – c’est la raison pour laquelle je ne le fais pas moi-même – sont très importants. La France est cette « puissance diplomatique d’équilibre », décrite par le Président de la République, c’est la nation qui parle à tous, de manière indépendante et crédible, car nous sommes dotés d’une armée disposant d’une autonomie stratégique fondée sur une capacité d’appréciation propre. La France n’a pas d’agenda caché ; elle ne vise qu’à produire de la sécurité et de la paix dans un monde devenu fou.

Les rapporteurs de la commission, dans leurs rapports très fouillés, ont tous finalement posé la même question : celle du grand écart entre l’ambition et les moyens.

Qu’il s’agisse des moyens des réseaux diplomatique et consulaire, optimisés jusqu’à l’extrême – pour le dire poliment –, ou du défi – le mot est faible – posé par l’objectif de doubler le nombre d’élèves apprenant le français d’ici à 2030, ce qui frappe c’est, bien sûr, le grand écart entre l’horizon des ambitions et, parfois, la petitesse des moyens mis à disposition pour l’atteindre.

Nous savons – et je veux, ici, vous en rendre hommage et en porter témoignage – le combat que vous menez personnellement face à certains autres collègues ministres, situés sur la rive droite de la Seine, non loin du Val-de-Marne (Sourires.), pour tenter de maintenir et même d’accroître ces crédits.

Je ne parle pas du modèle de financement des dépenses immobilières du Quai, notre bête noire depuis plusieurs années, car Ladislas Poniatowski l’a fait dans son rapport avec talent. Vous-même nous avez dit en commission : « La méthode consistant à vendre les bijoux de famille n’est plus acceptable, et je me suis opposé à certaines ventes. Il faudra trouver d’autres solutions. » Vous nous direz lesquelles. Nous attendons cela avec impatience.

Malgré nos doutes, monsieur le ministre, nous soutenons votre action et celle de nos diplomates, auxquels je veux rendre hommage, engagés à vos côtés.

La commission des affaires étrangères a donné un avis favorable à l’adoption de ces crédits, et j’espère que les réponses que vous nous apporterez nous conforteront dans nos choix. (Applaudissements sur lensemble des travées, à lexception de celles du groupe CRCE.)

M. le président. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.

Mme Hélène Conway-Mouret. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous allons présenter des amendements afin d’améliorer le fonctionnement de ce beau et grand ministère dont nous sommes fiers. Malheureusement, il continue à pâtir d’une image désuète, alors que les réformes qu’on lui impose depuis longtemps en font un ministère incroyablement moderne, dont le personnel montre une grande adaptabilité et une grande flexibilité.

Vous allez vous opposer à nos amendements pour ne pas mettre en péril le subtil équilibre budgétaire validé par Matignon. Mais, franchement, ce ministère mérite mieux que les nouvelles économies qui lui sont imposées chaque année.

Grâce à lui, la France a une place et une influence unique à l’étranger parce que nous figurons encore dans les trois premiers réseaux diplomatiques au monde. Mais, comme ses résultats sont plus qualitatifs que quantitatifs, et donc difficilement mesurables, il demeure la cible des coupes demandées par Bercy.

Il est vrai que nos trois millions de compatriotes résidant à l’étranger n’ont aucun moyen de pression en dehors de la voix de leurs élus locaux ou au Parlement.

Le constat de notre perte d’influence est partagé par tous. Alors, votre annonce d’un budget stabilisé ne changera rien à la triste réalité, tandis que notre présence à l’étranger décline parce que nous réduisons partout nos effectifs ou parce que nous disparaissons parfois en fermant nos missions, comme c’est le cas avec les consulats de Moncton ou de Séville.

Monsieur le ministre, vous avez rappelé, lors de la conférence des ambassadeurs, l’objectif du Quai d’Orsay : « Faire preuve d’agilité, d’imagination, et, comme dirait le Président de la République, d’audace. »

Mais à quelles fins ? Pour trouver comment continuer à faire la même chose avec des moyens financiers et humains toujours plus réduits ? Je puis vous assurer que nos diplomates font déjà preuve d’une incroyable créativité pour sauver la face et préserver l’image de notre pays, à commencer par l’organisation du 14-juillet.

En fait, ce budget pour 2020 est un budget en trompe-l’œil, même s’il paraît plus sincère que le précédent, puisque vous prenez en compte les effets de l’inflation mondiale sur les salaires et le risque d’une perte liée aux taux de change.

Vous annoncez une dotation de 2,87 milliards d’euros, stabilisée, pour la mission « Action extérieure de l’État », avec même une légère augmentation de 2 millions d’euros. Mais, au sein de cette enveloppe globale, de nombreux programmes sont en baisse. Par exemple, les crédits de l’action Réseau diplomatique baissent de 24 millions d’euros, ceux qui sont dédiés à la sécurité à l’étranger diminuent de 25 millions d’euros par rapport au PLF précédent. Les crédits du programme 105, « Action de la France en Europe et dans le monde » sont quasi stables, après, quand même, une baisse de 118 millions d’euros en 2018. Le plaisir suscité par la hausse de 3 % des crédits du programme 185 n’est qu’éphémère lorsque l’on constate, en même temps, la fermeture de quatre instituts français, dont celui d’Oslo, qui demeure pour moi incompréhensible.

Pour être en contact avec nos élus de proximité, les conseillers consulaires, les personnels diplomatiques, éducatifs, culturels et économiques, je puis vous confirmer que plus aucune ambassade n’est épargnée par le manque d’investissement et de moyens humains. Il faut se déplacer sur le terrain pour voir des bâtiments trop souvent mal entretenus ou que nous sommes forcés de vendre, car nous sommes dans l’incapacité de les rénover ou parce que le produit de leur vente est attendu dans la contribution du ministère. Je crains fort que la rallonge de 8 millions d’euros que vous avez obtenue, monsieur le ministre, ne soit insuffisante pour l’entretien de notre parc immobilier.

Autre élément majeur qui ternit notre image : les suppressions de postes. Certains de nos personnels cumulent plusieurs fonctions, alors que les compétences requises pour exercer celles-ci ne sont pas les mêmes – je pense ainsi aux fonctions de consul, de directeur de l’Institut français ou de régisseur.

Les nouveaux secrétaires généraux d’ambassade (SGA) en sont un autre exemple, ces postes regroupant plusieurs fonctions sur une même personne.

Ne poussons-nous pas la rationalisation à l’extrême, en fusionnant des métiers différents ? Le service public en pâtit, et nos compatriotes s’en plaignent régulièrement auprès des élus des Français de l’étranger ou à travers les sondages que nous faisons. L’image de la France s’en trouve également dégradée auprès des étrangers, pour lesquels le consulat est le premier contact avec notre pays.

Monsieur le ministre, nous ne savons plus comment exprimer notre désarroi devant une situation que nous voyons se dégrader. Si nous étions à l’os il y a dix ans, où en sommes-nous aujourd’hui ? Allons-nous nous arrêter ? Eh bien, non !

Malgré l’artifice d’un budget stabilisé cette année, de nouvelles économies sont attendues sur la masse salariale, notamment avec la suppression de 81 équivalents temps plein. L’objectif est la diminution de 10 % de la masse salariale sur toutes les missions de notre réseau d’ici à 2022, soit la plus grande économie jamais imposée au Quai d’Orsay. Dans ces conditions, il est difficile d’envisager comment les services sur lesquels comptent les Français de l’étranger pourraient être améliorés.

Ces économies se sont traduites par la suppression de 241 postes depuis deux ans. Derrière la froideur de ces chiffres, il y a des femmes et des hommes qui ont donné beaucoup au ministère, parfois pendant plusieurs décennies, en travaillant sous contrat local, et qui sont aujourd’hui licenciés.

L’effet se fait sentir de Kyoto, au Japon, à Moncton, au Canada, où la communauté française se mobilise, une pétition ayant déjà été signée par 2 600 personnes qui réclament l’annulation de la fermeture du consulat général de France. Si l’on demandait aux Brestois d’aller renouveler leurs passeports à Nice, monsieur le ministre, je me demande comment ils réagiraient…

La rationalisation des services dans le cadre de la réforme « Action publique 2022 » donne mission aux ambassadeurs de faire des propositions concernant notamment la mutualisation du personnel. C’est une excellente initiative, même s’il faut comprendre par mutualisation l’obligation de faire des propositions de suppressions de postes sur l’ensemble des services, et le ministère y a plutôt perdu, selon un rapport de l’Assemblée nationale.

La dématérialisation est un outil utile et nécessaire, mais elle ne peut compenser les suppressions de postes. Nous devons être vigilants sur ce point.

Monsieur le ministre, l’influence française au-delà de nos frontières se mesure aussi par la préservation de notre rayonnement culturel, qui n’est pas épargné, puisque le PLF pour 2020 prévoit la baisse des subventions de tous les grands opérateurs, alors que votre gouvernement avait promis une hausse des crédits dédiés à la politique culturelle et d’influence. Or une économie de 1,2 million d’euros est réalisée sur le réseau des alliances françaises, du fait d’une diminution des crédits de sécurisation et d’un effort de rationalisation.

Nous n’avons pas oublié la démission du board de la Fondation Alliance française en janvier 2018, à la suite de votre refus de soutenir cette dernière eu égard aux 1,5 million d’euros qui lui manquaient, et que nous proposions de lui accorder à travers un amendement.

Si l’on peut se féliciter que l’Institut français, lui, retrouve son niveau de 2018, à savoir 28,8 millions d’euros – il n’a toutefois plus aucune marge de manœuvre pour sa modernisation –, la fermeture de quatre centres culturels en Norvège, au Brésil, au Canada et au Costa Rica nous suscite notre interrogation.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Ils ne ferment pas !

Mme Hélène Conway-Mouret. J’attends alors vos explications !

Cela dit, il est prévu que les activités de certains soient reprises par les ambassades, déjà surchargées de travail.

Cet affaiblissement culturel semble bien entériné au sein de ce PLF, puisque France Médias Monde connaît une nouvelle baisse de ses crédits. TV5 Monde, qui avait déjà pâti l’an dernier de la non-répercussion de l’inflation, voit ses crédits simplement reconduits.

Je vais maintenant passer à l’éducation et au budget de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE, qui gère un vaste réseau, unique au monde, car les autres pays présents à l’international voient leur système éducatif soutenu par des établissements privés. Il n’est donc pas juste de comparer l’Agence aux établissements étrangers concurrents.

Nous saluons la sanctuarisation des crédits de financement des aides à la scolarité, tant pour les élèves français du réseau des établissements de l’AEFE que pour les étudiants étrangers suivant leurs études en France. Nous sommes heureux de voir les moyens dévolus à l’Agence augmenter de 24,6 millions d’euros, mais cette hausse ne compense pas la suppression de 33 millions d’euros décidée en 2017. Il manque toujours 7 millions d’euros à la loi de finances pour 2019, et 8 millions d’euros au PLF pour 2020.

D’autre part, cette coupe brutale de 2017 a entraîné la hausse des frais de scolarité liée à la participation forfaitaire accrue des établissements au budget de l’AEFE, qui est passée de 6 % à 9 %.

Se pose alors la question de la prise en charge des demandes de bourses scolaires avec des frais plus élevés, dans une enveloppe financière maintenue à 105 millions d’euros.

Enfin, le Président de la République a proposé de doubler le nombre d’élèves scolarisés d’ici à 2030, objectif téméraire, qui n’est basé sur aucune évaluation de la demande, mais que l’on ne peut qu’épouser, puisqu’il soutient la francophonie.

A été annoncée dans la foulée la création de 1 000 postes d’enseignants titulaires supplémentaires sur dix ans, soit 100 postes par an pour répondre à la demande présidentielle. Mais, dans le même temps, vous lancez ce programme de recrutement par une baisse de 106 ETP en 2020 pour l’AEFE, monsieur le ministre. Rappelons que ce sont 512 postes qui auront été supprimés en trois ans. L’ambition est belle, et nous la soutenons volontiers, mais où sont les moyens ?

Et comme il n’y a pas de petites économies, je vais ajouter à la liste la réduction de la dotation pour l’organisation en mai 2020 des élections consulaires, de l’ordre de 1,3 million d’euros. Vous avez affirmé que le nombre de bureaux de vote serait stabilisé ; certes, mais tel n’est pas le cas de celui des centres de vote, en forte diminution. Le vote électronique ne sera pas accessible à tous. Tout doit être fait pour que ces élections consulaires aient le taux de participation le plus élevé possible. Je puis vous assurer que ces élus sont devenus des relais indispensables de notre réseau diplomatique sous tension.

En conclusion, nous nous félicitons, monsieur le ministre, de l’augmentation du budget de l’aide publique au développement (APD), qui permet de présenter un budget de votre ministère globalement en hausse. Nous déplorons toutefois que, pour la mission « Action extérieure de l’État », le compte n’y soit pas. Nous ne pouvons pas voter ses crédits, qui ne sont pas à la hauteur de nos ambitions, et nous ne voulons pas donner raison à Bercy, qui demande chaque année de nouvelles économies.

Comprenez notre vote négatif comme un signe de solidarité envers les personnels, à qui l’on demande toujours plus sans leur donner les moyens, et comme une marque de soutien personnelle, monsieur le ministre, vous qui ne ménagez pas vos efforts pour défendre votre budget. (Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)

M. le président. La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me réjouissais de la tonalité positive de notre débat, mais Hélène Conway-Mouret est venue sérieusement doucher mon enthousiasme…

M. Antoine Lefèvre. Elle a dit beaucoup de vérités !

Mme Hélène Conway-Mouret. Les chiffres parlent !

M. Richard Yung. Elle n’a pas trouvé un seul point positif dans ce budget.

Mme Hélène Conway-Mouret. J’en ai relevé une dizaine !

M. Richard Yung. Elle a néanmoins exprimé sa solidarité à votre égard, monsieur le ministre, à défaut d’être solidaire de l’action du Gouvernement.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. C’est un début ! (Sourires.)

M. Richard Yung. Le budget pour 2020 de l’action extérieure de l’État est un bon budget, après tant d’années de décroissance des crédits et des effectifs. C’est un budget au service de la « diplomatie de l’audace » prônée par le Président de la République lors de la réunion des ambassadeurs.

Pour la première fois, le Quai d’Orsay disposera d’un budget légèrement supérieur à 5 milliards d’euros, dont près de 3 milliards d’euros pour l’action extérieure de l’État.

Une partie de ces crédits sera consacrée à la poursuite de la réforme des réseaux de l’État à l’étranger. Tous les services extérieurs français à l’étranger seront désormais placés sous le contrôle des ambassadeurs, et c’est une bonne chose. Nous espérons néanmoins que le transfert de 424 postes des autres ministères vers le Quai d’Orsay sera accompagné des crédits suffisants,…

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. J’y veille !

M. Richard Yung. … et que les moyens alloués aux secrétaires généraux d’ambassade, dont le rôle est de plus en plus important, suivront.

Cette intervention me donne également l’occasion de saluer la mémoire de nos treize soldats tombés cette semaine au Mali.

Pour ce qui concerne la masse salariale, le Gouvernement a pris la sage décision de ramener à 5 % environ la cible de réduction devant être atteinte par le ministère d’ici à 2022, un objectif qui paraît plus raisonnable que le précédent.

Plusieurs orateurs ont souligné la mise en place d’un dispositif pour faire face aux variations de change et à l’inflation. Nous le demandions depuis une dizaine d’années, et nous ne pouvons donc que nous réjouir de cette mesure.

M. Richard Yung. Le patrimoine immobilier est sans doute l’un des points faibles du ministère de l’Europe et des affaires étrangères. Ce projet de loi de finances prévoit certes une modeste rebudgétisation, mais l’hypothèse envisagée d’une vente de notre ambassade de Londres montre bien, en dépit de sa faible commodité, que le ministère en est réduit à céder ses derniers investissements immobiliers. L’urgence est d’autant plus grande qu’à compter de 2021 le Quai d’Orsay devra commencer à rembourser l’avance qui lui a été accordée dans le cadre du plan de sécurisation des emprises à l’étranger. Il s’agit donc d’un problème majeur.

Pour ce qui concerne les personnels du ministère, je me félicite de la revalorisation des cadres salariaux des agents de droit local, une mesure que nous demandons également depuis de nombreuses années. Certains de ces agents auront la possibilité d’accéder aux concours internes. Pour l’instant, il ne s’agit que des concours de catégorie C, mais j’espère que la mesure sera vite étendue aux catégories A et B.

J’en viens à présent à la diplomatie culturelle. Avec la hausse de la subvention allouée à l’AEFE, le plan de développement de l’enseignement français à l’étranger trouve une première traduction budgétaire. La mise en œuvre de ce dernier est cependant subordonnée à l’adoption d’une réforme des modalités d’octroi de la garantie de l’État aux emprunts réalisés par les écoles françaises de l’étranger.

La situation est pour le moins paradoxale. Tout le monde souhaite doubler le nombre d’élèves fréquentant le réseau français à l’étranger, mais, dans le même temps, l’Association nationale des écoles françaises de l’étranger (Anefe), qui garantissait les crédits contractés par les établissements français à l’étranger, se voit rayée de la carte, et le Trésor ne peut plus accorder d’avances à l’AEFE pour financer ses projets immobiliers.

Comment va-t-on faire ?

M. Rachid Temal, rapporteur pour avis. Dites-le-nous !

M. Richard Yung. Je ne doute pas que M. le ministre apportera une réponse satisfaisante. (M. Roger Karoutchi sesclaffe.)

Permettez-moi également, monsieur le ministre, de vous interroger sur les bourses du gouvernement français. Mon collègue André Vallini a mentionné le rapport de la Cour des comptes qui pointe l’écart régulier entre le montant prévu par le programme 185 et la réalité des crédits consommés, ainsi que l’absence de « procédure formalisée et partagée » pour la sélection des candidats par les postes diplomatiques.

Je souhaite aussi connaître votre avis sur la proposition de la Cour des comptes consistant à confier à un seul opérateur le pilotage opérationnel de la mobilité internationale des étudiants, en d’autres termes le rapprochement de Campus France et de l’agence Erasmus +.

Le budget pour 2020 de l’action extérieure de l’État est aussi un budget au service des Français établis hors de France. Je citerai notamment l’expérimentation de la dématérialisation des actes de l’état civil, avec un rôle central des services du ministère établis à Nantes, le vote par internet, l’extension des horaires d’ouverture au public des consulats, ou encore la mise en place d’un centre d’appels téléphoniques ouvert vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept.

Compte tenu de ces éléments, dans l’enthousiasme, le groupe La République En Marche votera ce budget, qui donne à l’État les moyens de mener ses missions. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon. (Applaudissements sur des travées du groupe UC.)

M. Jean-Marie Mizzon. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la coopération culturelle et linguistique est un vecteur important de la politique d’influence de la France, à propos de laquelle vous avez rappelé, monsieur le ministre, qu’elle était « l’un des trois piliers fondamentaux de notre politique étrangère globale ». La promotion de la langue française dans le monde et la valorisation du réseau d’enseignement français à l’étranger constituent à ce titre une composante majeure de notre diplomatie, et la commission de la culture y est bien entendu très attachée.

En 2020, la subvention pour charges de service public de l’AEFE atteindra 408,6 millions d’euros, soit une augmentation de 24,6 millions d’euros ou de 6,4 %.

Nous nous réjouissons de cette mesure, alors que l’annulation brutale de 33 millions d’euros au cours de l’été 2017 avait été très mal vécue par un réseau qui s’est senti fragilisé.

Notre vigilance quant à la mise en œuvre du plan de développement de l’enseignement français à l’étranger, présenté en octobre dernier, sera donc à la hauteur de nos attentes le concernant. Un juste équilibre devra être trouvé entre le développement du réseau et le soutien aux structures existantes.

Un autre grand plan est censé permettre à notre pays de rayonner à l’étranger, le plan Langue française et plurilinguisme. Alors qu’il est en grande partie piloté par l’Institut français de Paris, nous nous inquiétons du mauvais signal envoyé par la non-reconduction, certes annoncée, des moyens supplémentaires accordés en 2019 à l’Institut.