M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE – Mme Jocelyne Guidez applaudit également.)

Mme Véronique Guillotin. Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, après une première lecture dont la fin a été précipitée par l’attente des annonces gouvernementales, nous voici réunis pour examiner le projet de loi en nouvelle lecture.

Ce PLFSS comporte de bonnes mesures. Certains risques seront mieux couverts grâce à la création d’un congé pour les proches aidants, d’un nouveau fonds d’indemnisation pour les victimes de maladies liées aux pesticides ou encore d’un service public de versement des pensions alimentaires.

Par ailleurs, 500 millions d’euros seront dégagés pour le grand âge et l’autonomie. De nouveaux financements combinés interviendront pour les hôpitaux. Un forfait de soin post-chirurgie du cancer, dispositif abondé à hauteur de 10 millions d’euros, est instauré. On pourrait aussi évoquer les efforts faits pour la psychiatrie et les soins de suite et de réadaptation, les SSR.

Nous nous félicitons, enfin, de la reprise par les députés de certains amendements sénatoriaux, dont celui que j’ai défendu sur la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat dans les établissements et services d’aide par le travail (ÉSAT).

Au titre des mesures du plan Hôpital, vous avez annoncé 1,5 milliard d’euros supplémentaires sur trois ans, la reprise du tiers de la dette de l’hôpital, à hauteur de 10 milliards d’euros, et une série de primes nouvelles pour certains soignants. S’agissant de la reprise de la dette, qui a été bien reçue par les établissements, des interrogations persistent, en particulier concernant les hôpitaux qui vont en bénéficier. Cette reprise partielle ne risque-t-elle pas de remplacer certaines subventions aux opérations d’investissement ? Un éclaircissement sur ce point, madame la ministre, serait le bienvenu.

Ce plan, complété par la pluriannualité des financements, tant attendue par les professionnels, est salué par les établissements hospitaliers publics, qui retrouvent des marges de manœuvre permettant d’améliorer le quotidien des soignants et des patients. On doit le saluer !

Toutefois, une incompréhension a émergé au sein des établissements privés à but non lucratif, qui assument pour la plupart des missions de service public. Sur certains territoires éloignés des CHU, ils peuvent même être les seuls établissements à proposer une offre de soins et à la structurer. Comme leurs homologues du secteur public, ils font face à des baisses considérables de tarifs depuis de trop nombreuses années, tout en supportant des charges plus élevées : par exemple, une prime de 100 euros au personnel coûte 146 euros à l’hôpital public, contre 201 euros à un établissement de santé privé d’intérêt collectif, un Espic. Madame la ministre, ces nouvelles mesures n’auraient-elles pas pu profiter à toutes les filières de soins qui concourent à une mission d’intérêt général ?

Concernant la prime de 800 euros, si elle est la bienvenue pour les personnels qui la percevront, il apparaît inéquitable d’en limiter le bénéfice aux seuls soignants des hôpitaux de Paris et de la petite couronne. D’autres régions font face à de fortes pénuries de personnel et à un coût de la vie élevé. Je prendrai l’exemple, que je connais bien, des zones frontalières, qui pâtissent d’un différentiel important de salaires par rapport aux pays limitrophes, notamment en ce qui concerne les professions paramédicales. Quand le salaire d’une infirmière est en France de 1 700 euros, il est de 3 200 euros au Luxembourg, à ancienneté et à compétence égales. Ainsi, les professionnels que nous formons en France sont aspirés par les pays voisins. Certains établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) du nord de la Lorraine fonctionnent aujourd’hui avec zéro CDI d’infirmier et uniquement grâce à des intérimaires…

L’intérim, justement, est un problème qu’il faut absolument résoudre, et je vous sais combative sur le sujet, madame la ministre. Sa facture est évaluée à 500 millions d’euros par an, soit l’équivalent d’une centaine de milliers de postes d’infirmier.

Vous avez pris une mesure de plafonnement de la rémunération. Toutefois, aujourd’hui, faute d’application uniforme du décret, les établissements ayant tenté de s’y conformer s’en sont trouvés pénalisés. Au CHRU de Nancy, par exemple, dans la semaine suivant le début de l’application du décret, plus aucun intérimaire n’a accepté de revenir travailler. Certaines opérations ont dû être reportées, avec les risques que cela fait peser sur la santé des patients. Certes, le problème est complexe et je ne jette la pierre à personne, mais tout cet argent dépensé pour l’intérim ne pourrait-il pas être utilisé de meilleure manière, notamment pour revaloriser les salaires ? Quelles autres propositions pouvez-vous faire pour améliorer cette situation si difficile ?

Tant que nous n’aurons pas agi structurellement sur le niveau des salaires, il sera difficile de redonner de l’attractivité aux professions de santé, qui demandent rigueur et exigence et dont nous avons tant besoin. La revalorisation par prime est la bienvenue, mais elle ne devrait être qu’une étape vers la revalorisation des salaires. La France se classe au vingt-sixième rang des vingt-neuf pays membres de l’OCDE pour les salaires des infirmiers. On pourrait également parler des salaires des praticiens hospitaliers ou des tarifs des consultations des médecins.

Cela étant, cette situation ne date pas d’hier. Qui pourrait affirmer pouvoir remédier, au travers d’un seul budget, à des décennies d’errements, de manque d’anticipation, à des années de tarification à l’activité, de baisse des tarifs et de non-revalorisation des salaires ?

Rappelons que l’Ondam, désormais fixé à 2,4 % pour 2020, s’établissait à 1,7 % en 2016. Nous sommes arrivés au bout de ce système qui demande toujours plus d’économies au secteur de la santé, et il est salutaire que le Gouvernement en ait pris conscience. La transformation du système de santé engagée doit contribuer, à moyen et long termes, à améliorer la situation.

Si le PLFSS, enrichi des mesures du plan Hôpital, ne résoudra pas d’un coup de baguette magique la crise que nous traversons, il constitue une première réponse, que nous saluons. La suite des débats déterminera notre vote final. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme Colette Mélot et M. Martin Lévrier applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier.

M. Martin Lévrier. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, cette nouvelle lecture du PLFSS pour 2020 se déroule dans un contexte un peu particulier. Alors que le Président de la République s’exprimait à Épernay sur la problématique de l’hôpital, notre chambre a brutalement décidé d’abréger, jeudi 14 novembre, la discussion du texte, protestant contre ce qu’une partie de ses membres considérait être une marque de « mépris » de l’exécutif envers le Parlement. (Protestations sur les travées du groupe SOCR.)

Mme Corinne Féret. C’était du mépris !

M. Martin Lévrier. Mes chers collègues, que fallait-il faire ? La situation actuelle est un bien triste héritage. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Depuis plus de quinze ans, plusieurs réformes ont profondément affecté le personnel en charge des patients : droits des malades, réforme de simplification, grands plans pour les hôpitaux, loi de modernisation de 2016… Et je ne parle pas de l’application des 35 heures sans contrepartie ! (M. Bernard Jomier ironise.) Un malaise s’est installé chez l’ensemble des personnels hospitaliers : leur ras-le-bol s’est exprimé cette année.

Mes chers collègues, que fallait-il faire ? Ignorer la pression budgétaire à laquelle l’hôpital public doit faire face depuis des années ? Ignorer le malaise qui couvait à l’hôpital public et qui a pris ces derniers mois une ampleur nouvelle ? Masquer le déficit d’investissement qui oblige à une vision court-termiste ? Négliger le personnel ? Nous lui devons tellement….

Nous avons eu l’occasion de dire les difficultés que connaît l’hôpital public, et nous admettons tous leur réalité. Pour y répondre, les nécessaires mesures structurantes ont été prises avec la stratégie Ma santé 2022. Cependant, les dernières mobilisations ont montré l’épuisement, voire la colère, de ceux qui travaillent quotidiennement à l’hôpital. Répondre à l’important ne suffisait pas ; il fallait répondre à l’urgent immédiatement.

Le Président de la République, reprenant vos propos, madame la ministre, a rappelé que nous devions entendre les besoins exprimés par les personnels hospitaliers, afin d’accompagner leurs efforts et de poursuivre la transformation. À Épernay, il vous a demandé formellement d’en accélérer la mise en œuvre, sous l’autorité du Premier ministre.

Présentées la semaine passée, les conclusions de ces travaux comportent une série de mesures visant à investir dans l’hôpital et à soutenir la transformation engagée par le plan Ma santé 2022. Ces mesures s’articulent selon trois axes principaux.

Premièrement, il faut « restaurer l’attractivité des métiers des soignants ». Cela passe par un meilleur accompagnement du personnel en début de carrière, pour restaurer la capacité des hôpitaux à recruter, par une meilleure revalorisation – les aides-soignants, par exemple, auront des possibilités d’accéder à la catégorie B de la fonction publique en fin de carrière – ou par le versement de trois sortes de primes : une prime territoriale de 800 euros, attribuée aux personnels hospitaliers de la région parisienne, où recruter est un souci majeur ; une prime sectorielle pour le personnel hospitalier qui exerce dans les services de gériatrie ; une prime managériale de 300 euros en moyenne par personne et par an, réservée à des personnels qui s’investiront dans des actes spécifiques.

Deuxièmement, il faut « remettre tous les soignants, médecins, infirmiers, aides-soignants au cœur de la gouvernance des hôpitaux ». Pour accélérer la transformation entreprise avec le plan Ma santé 2022, vous avez proposé, madame la ministre, de renforcer et de valoriser le management de proximité. Par exemple, les médecins pourront devenir directeurs d’hôpital. Vous proposez également de simplifier le fonctionnement, par exemple pour les formalités de recrutement ou les protocoles de coopération décentralisés.

Troisièmement, il faut « réinvestir l’hôpital public en lui donnant des moyens nouveaux et de la visibilité dans le temps ». Je retiens, sur ce point, trois mesures.

Tout d’abord, la hausse des tarifs hospitaliers d’au moins 0,2 % par an jusqu’à la fin du quinquennat : pour rappel, mes chers collègues, l’inversion de la courbe s’est faite en 2019, mettant fin à dix années de baisses successives.

En matière d’investissement courant ensuite, les hôpitaux pourront acheter le matériel indispensable pour le travail des soignants au quotidien.

Enfin, s’agissant de l’investissement à long terme, la reprise d’un tiers de la dette des hôpitaux, soit 10 milliards d’euros, sera une bouffée d’oxygène énorme, permettant d’investir, de monter des projets, mais aussi d’apurer la situation financière. Cependant, cette reprise ne devra pas être une prime aux mauvais gestionnaires ; nous devrons nous en assurer.

L’Assemblée nationale a intégré ces propositions au PLFSS pour 2020. Elles ont eu pour effet d’augmenter l’Ondam de 300 millions d’euros, soit de 2,45 % par rapport à 2019, dont une hausse de 2,4 % pour l’Ondam hospitalier. Cet effort supplémentaire atteindra 1,5 milliard d’euros à la fin du quinquennat. Elles ont également eu pour effet de flécher 150 millions vers l’investissement courant en 2020, afin de répondre aux besoins actuels les plus forts. Cet effort sera reconduit en 2021 et en 2022. Elles ont enfin entraîné une révision des tableaux récapitulatifs pour 2020 et une adaptation de la trajectoire quadriennale de la sécurité sociale.

Ces ajouts viennent conforter le texte présenté à notre chambre il y a trois semaines et dont je me dois de rappeler les mesures phares, qui répondent à un double objectif de réduction des impôts et de justice sociale.

Le PLFSS est axé sur la récompense du travail, avec la poursuite de l’exonération de cotisations sociales sur les heures supplémentaires, la protection des plus fragiles, avec la pérennisation de la revalorisation de la prime d’activité à hauteur de plus de 90 euros en janvier 2019 et la revalorisation de l’AAH et du minimum vieillesse, la lutte contre la perte d’autonomie, au travers de l’article 45, qui met en place un congé indemnisé de proche aidant, la lutte contre les inégalités de destin, au travers par exemple de l’article 40, qui prévoit le remboursement d’un forfait pour l’accompagnement des patients après un cancer, l’amélioration des prises en charge et de l’accès aux soins dans tous les territoires. Je pense notamment, à cet égard, à l’article 37, qui vise à mettre en œuvre un forfait transport-hébergement pour les femmes enceintes résidant à plus de quarante-cinq minutes d’une maternité.

Voilà, mes chers collègues, quelques-unes des grandes avancées de ce PLFSS pour 2020. C’est un texte qui trace des perspectives d’avenir, qui montre la voie du progrès social, qui rétablit la justice sociale, qui investit dans le système de santé au bénéfice des patients et du personnel soignant, qui répond à l’urgence sans remettre en cause l’important. (Exclamations ironiques sur des travées des groupes Les Républicains, SOCR et CRCE. – Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)

M. Bernard Jomier. Et qui guérit les écrouelles ! (Sourires sur les travées du groupe SOCR.)

M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez. (Mme Élisabeth Doineau applaudit.)

Mme Jocelyne Guidez. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’examen du PLFSS pour 2020 marquera les esprits durablement, non parce que ce texte contiendrait des mesures particulièrement importantes ou structurantes, malheureusement, mais plutôt en raison des conditions de son examen.

Sur la forme, d’abord, le mouvement de grèves des urgences a débuté le 18 mars dernier. Il trouve désormais un retentissement dans l’ensemble de notre système hospitalier. Plusieurs agressions contre des personnels de l’hôpital Saint-Antoine sont à l’origine de ce mouvement. Ces tensions se faisaient ressentir au second trimestre de cette année, c’est-à-dire au moment où le Gouvernement commençait à penser les grands équilibres du PLFSS. Or force est de constater que, malgré cette crise, le Gouvernement construisait un sous-Ondam hospitalier inférieur au sous-Ondam de ville.

Dès lors, ce PLFSS ne pouvait ni apaiser les professionnels hospitaliers ni rassurer les parlementaires, singulièrement les sénateurs, qui alertaient depuis plusieurs semaines, voire plusieurs mois.

Reconnaissons qu’entre-temps le Gouvernement n’est pas resté sans agir : il a proposé, en juin, 70 millions d’euros pour les urgences, puis, en septembre, 750 millions d’euros pour tout l’hôpital. Malheureusement, cela s’est avéré insuffisant pour remédier à la situation.

S’il faut saluer la réponse du Président de la République aux manifestations, il est regrettable que l’entière mesure de la situation n’ait pas été prise préalablement. En effet, cela a obligé le Gouvernement à réévaluer l’Ondam pendant l’examen au Sénat du PLFSS, tout en nous demandant d’adopter un texte manifestement insincère. C’est la raison pour laquelle nous étions dans notre bon droit en rejetant ce texte il y a deux semaines.

Aujourd’hui, nous sommes absolument dans notre rôle, et nous ne pouvions pas nous soustraire à l’examen du budget de la sécurité sociale, qui représente 522,1 milliards d’euros, en adoptant une motion tendant à opposer la question préalable.

Évidemment, les règles constitutionnelles, en particulier celle de l’entonnoir, limitent à ce stade de la procédure notre pouvoir d’amendement. Mais je ne doute pas, mes chers collègues, que le texte que nous adopterons portera la marque du Sénat et comportera quelques mesures symboliques sur lesquelles nous nous accordons.

J’espère, madame la ministre, que, en raison de ces conditions d’examen très particulières, l’Assemblée nationale saura redoubler d’attention lorsqu’elle aura à se prononcer en dernier ressort sur les amendements que nous aurons adoptés. Nous comptons sur votre compréhension et sur votre bienveillance.

Sur le fond, l’examen de ce PLFSS marquera les esprits, dans la mesure où le Gouvernement présente le principe de non-compensation comme étant la règle, et non l’exception. En effet, le Gouvernement considère qu’il prévaut sur la loi Veil et la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale. Or cette doctrine s’appuie sur un simple rapport rendu au Gouvernement il y a un an par MM. Charpy et Dubertret. Vous conviendrez, mes chers collègues, qu’il apparaît inopportun, voire déplacé, de soutenir devant le législateur la suprématie d’un rapport sur la loi elle-même !

C’est la raison pour laquelle nous voterons l’amendement de notre rapporteur général visant à supprimer les non-compensations inscrites dans ce PLFSS.

On a déjà beaucoup parlé de l’Ondam, mais je prendrai tout de même quelques instants pour y revenir dans le détail.

Le PLFSS initial comportait un sous-Ondam hospitalier inférieur au sous-Ondam de ville, alors que nos services des urgences et nos hôpitaux sont en grève depuis de longs mois : cela constituait un premier motif d’incompréhension. S’ajoutait le fait que l’Ondam était présenté comme étant à la hausse : cela est vrai, mais les professionnels du secteur, parfois épuisés, relevaient surtout que, même en progression, il restait bien inférieur à l’évolution tendancielle des dépenses. Pour mémoire, entre 2012 et 2019, celle-ci a été de 4,1 % en moyenne, tandis que l’Ondam progressait en moyenne de 2,31 %. Cela représente, depuis 2012, un différentiel d’au moins 25,67 milliards d’euros, et sans doute de beaucoup plus en réalité.

Il est nécessaire de s’interroger : quels leviers financiers aurions-nous pu mobiliser pour que la progression de l’Ondam reste à la hauteur de l’évolution tendancielle des dépenses ? Je crois bien difficile de répondre à cette question en maintenant notre organisation actuelle sans toucher à la répartition des soins !

Rappelons-nous, mes chers collègues, qu’avant la création de l’Ondam notre système n’était plus tenable. Aujourd’hui, on constate durement que la gestion par l’Ondam ne peut, à elle seule, suffire au pilotage de notre système. Nous ne pourrons pas faire abstraction du constat énoncé par collègue Olivier Henno en première lecture : « Reporter les coûts de notre santé et de notre sécurité sociale sur d’autres générations et les financer par l’emprunt apparaîtront comme une aberration. » Sans modification profonde de notre système de santé, limiter la progression l’Ondam implique l’endettement direct des hôpitaux.

Le Premier ministre, à l’occasion de la présentation du plan Hôpital, rappelait que l’investissement hospitalier a été divisé par deux en dix ans, alors que la dette des hôpitaux augmentait de 40 %.

Un ouvrage profond et difficile est sur le métier : il est primordial de revoir la gouvernance de l’hôpital, de favoriser l’ambulatoire et de réorienter notre médecine vers la prévention ; il est fondamental de regarder ce qui se pratique hors de nos frontières, un récent rapport de l’OCDE pointant les grands gagnants parmi les systèmes de santé dans le monde. Il s’agit certainement de sources d’inspiration importantes, qui pourront guider les réflexions demandées par le Gouvernement.

Toutefois, dans l’immédiat, nos équipes soignantes attendent des réponses massives. Si l’on peut reconnaître au Gouvernement le mérite de ne pas retenir l’option du redéploiement de moyens, on peut s’interroger sur les annonces. Pourquoi ne pas injecter immédiatement l’essentiel des 1,5 milliard d’euros annoncés ? Avec 300 millions d’euros seulement pour l’an prochain, l’Ondam hospitalier sera encore inférieur de 0,9 % à son tendanciel. Cela revient, dans le contexte actuel d’épuisement, à demander une fois de plus à l’hôpital de maintenir les efforts, d’où une nouvelle incompréhension !

Concernant les revalorisations à hauteur de 0,3 % plutôt qu’au niveau de l’inflation des pensions de retraite et des prestations sociales, ce procédé semble devenir un levier d’économie classique pour le Gouvernement ; nous le regrettons, et nous soutiendrons l’amendement de notre rapporteur relatif à cette question.

Concernant le dispositif relatif aux assistantes maternelles, nous nous réjouissons que la proposition de notre collègue rapporteur Élisabeth Doineau ait été reprise purement et simplement par l’Assemblée nationale.

Concernant le fractionnement du congé de présence parental, j’avais proposé en première lecture de l’étendre aux trois fonctions publiques. Je me félicite que les députés aient adopté cette mesure. Je présenterai simplement un amendement de précision juridique.

En conclusion, le groupe Union Centriste votera ce PLFSS, tout en déplorant les conditions de son examen. Nous espérons ne plus avoir à en connaître de telles à l’avenir ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret.

Mme Corinne Féret. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les sénateurs du groupe socialiste et républicain ont déploré que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, tel que présenté en première lecture, ne soit ni réaliste ni sincère et qu’il ne permette pas de répondre aux enjeux et aux besoins, en particulier ceux de l’hôpital.

Faute d’être entendus, suspendus à une éventuelle réaction gouvernementale, à une intervention présidentielle, nous avons été contraints de mettre fin à ce qui s’apparentait à une mascarade de débat, et donc de rejeter ce texte. Cette séquence très particulière a permis d’illustrer, une fois de plus, le manque de considération du Gouvernement non pas uniquement pour le Sénat, mais pour le Parlement dans son ensemble.

Aujourd’hui, nous avons tous l’impression désagréable de revivre la même situation que l’an dernier, lorsque l’exécutif avait opéré un revirement de dernière minute et cédé à des demandes que nous faisions nous-mêmes depuis plusieurs mois ; je pense notamment à l’exonération de l’augmentation de la CSG pour les retraités modestes.

Cette année, nous vous avons alertés à plusieurs reprises sur les dangers de la cure d’austérité imposée aux hôpitaux. En vain… Et nous nous retrouvons donc ce week-end pour débattre de mesures présentées par le Gouvernement en urgence, quelques jours après la grande mobilisation du 14 novembre visant à défendre l’hôpital public et notre système de santé et huit mois après le début de la grève des services des urgences !

Madame la ministre, votre nouveau « plan pour l’hôpital public » fait suite à une série d’annonces gouvernementales assorties d’enveloppes budgétaires – 70 millions d’euros, puis 750 millions d’euros, on se perd dans les chiffres ! –, déjà totalement déconnectées et insuffisantes pour sauver l’hôpital.

Nous souhaiterions, au-delà de toutes ces communications successives, parler des vrais sujets : les retards d’investissement, la dégradation des conditions de travail et de prise en charge des patients, les sous-effectifs et les problèmes de sécurité dans les services, le manque de lits, la sous-rémunération des personnels soignants…

Oui, revenons-en au fond de ce plan prétendument « sans précédent », « historique » !

S’agissant du relèvement de l’Ondam, sans lequel rien n’est possible, celui-ci passe en réalité de 2,5 % l’an dernier à 2,45 % cette année. Vous avez beau renoncer à 300 millions d’euros d’économies, la preuve est faite que subsiste toujours une forte compression des dépenses de santé hospitalières.

Quant aux primes pour les soignants, il n’y en aura de toute évidence pas pour tout le monde. Primes pour les uns, mais pas pour les autres, sous prétexte qu’ils ne sont pas franciliens : vous opposez Paris aux déserts médicaux français ! À cet instant, toutes mes pensées vont aux personnels, et plus particulièrement aux infirmiers et aux aides-soignants, des hôpitaux de Falaise, de Bayeux, de Caen et de Lisieux, dans mon département du Calvados, qui vivent certainement cette situation comme une terrible injustice ! Comme moi, ils feront probablement le constat que vos propositions ne répondent pas aux attentes en matière de reconnaissance du travail, des métiers ou de la pénibilité des tâches, et plus globalement au problème du manque d’attractivité des hôpitaux. Je rappelle que la première revendication de ces personnels est d’être suffisamment nombreux pour pratiquer les soins, pour être en mesure de faire convenablement leur travail, de sauver des vies. Or, au final, trop de questions restent sans réponse : quid des embauches, de l’arrêt des fermetures de lits, de l’organisation territoriale des soins ou encore de la prise en charge spécifique de la perte d’autonomie ?

Rien, il n’y a rien de précis, hormis le terrible constat du démantèlement progressif de notre système de santé, et au premier chef de l’hôpital public. Cela, nous ne l’acceptons pas !

On l’aura compris, cette nouvelle version du texte n’est pas beaucoup plus réaliste que la première et, d’après ce que j’ai pu observer, il n’est pas de nature à faire retomber la mobilisation sociale. Décevant, il risque surtout d’attiser la colère. Il ne serait donc pas responsable d’en rester là.

Écoutez-nous, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, nous qui sommes la représentation nationale, la voix des territoires ! Nous n’acceptons pas davantage qu’il y a quinze jours le subterfuge de la non-compensation par l’État de la perte de recettes liée aux mesures consécutives à la crise des « gilets jaunes », en violation de la loi Veil de 1994. Les cotisations sociales des Français servent notamment à garantir leur retraite et à assurer leur santé, non à pallier votre politique budgétaire défaillante.

Comme il y a quinze jours, nous sommes en désaccord profond avec toutes les mesures tendant à réduire le pouvoir d’achat des Français ; je pense en particulier à la désindexation de certaines retraites et prestations sociales.

Le budget de la sécurité sociale traduit le niveau des droits sociaux que la Nation accorde à ses concitoyens pour faire face aux aléas de l’existence. Le projet de loi de finances pour 2020, s’il est voté en l’état, ne dérogera pas aux deux précédents : il affaiblira notre système de santé et creusera les inégalités. Telle est la réalité, et nous nous battrons, durant les deux jours à venir, pour faire valoir notre vision du pacte social républicain, différente de la vôtre. (Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020
Article 2 et annexe A

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles.

projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020

PREMIÈRE PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2018

Article 1er

Au titre de l’exercice 2018, sont approuvés :

1° Le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

 

(En milliards deuros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

212,3

213,1

-0,8

Accidents du travail et maladies professionnelles

14,1

13,4

0,7

Vieillesse

236,4

236,5

-0,1

Famille

50,4

49,9

0,5

Toutes branches (hors transferts entre branches)

499,7

499,3

0,3

Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse

498,4

499,8

-1,4

;

2° Le tableau d’équilibre, par branche, du régime général de sécurité sociale :

 

(En milliards deuros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

210,8

211,5

-0,7

Accidents du travail et maladies professionnelles

12,7

12,0

0,7

Vieillesse

133,8

133,6

0,2

Famille

50,4

49,9

0,5

Toutes branches (hors transferts entre branches)

394,6

394,1

0,5

Toutes branches (hors transferts entre branches) y compris Fonds de solidarité vieillesse

394,6

395,8

-1,2

;

3° Le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

 

(En milliards deuros)

Recettes

Dépenses

Solde

Fonds de Solidarité Vieillesse

17,2

19,0

-1,8

;

4° Les dépenses constatées relevant du champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, s’élevant à 195,2 milliards d’euros ;

5° Les recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites, lesquelles sont nulles ;

6° Les recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse, lesquelles sont nulles ;

7° Le montant de la dette amortie par la Caisse d’amortissement de la dette sociale, s’élevant à 15,4 milliards d’euros.