Mme le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur Vaugrenard, qu’il me soit d’abord permis de rendre hommage aux juges consulaires. Souvent, quand on compare la justice – c’est un jeu que l’on aime dans notre pays –, on compare la justice allemande et la justice française. La justice française compte des juges bénévoles dans les tribunaux de commerce, vous l’avez rappelé, mais aussi dans les juridictions prud’homales.

J’en viens à la question précise que vous me posez. Le renforcement du budget, inédit depuis trente ans, s’est traduit par une hausse de la dotation de fonctionnement des cours d’appel et l’allocation de fonctionnement courant répartie en début de gestion a augmenté de plus de 3 % par rapport à 2020.

Ces moyens supplémentaires seront consolidés dans le cadre du projet de loi de finances pour 2022, qui bénéficieront bien sûr aussi aux tribunaux de commerce.

Je réponds maintenant plus précisément au sénateur de la Loire-Atlantique que vous êtes. Les dépenses de fonctionnement du tribunal de commerce de Nantes, soutenues à la mi-septembre de l’année en cours, représentent 0,33 million d’euros, soit une augmentation de 6 % par rapport à l’année 2020. Le budget 2022 devrait permettre de garantir le niveau de soutien apporté au tribunal de commerce nantais.

Pour être tout à fait complet, monsieur le sénateur, j’ajoute que le Conseil national des tribunaux de commerce travaille actuellement à l’élaboration d’un guide budgétaire, qui permettra aux présidents des tribunaux de mieux connaître la procédure d’octroi de leur budget de fonctionnement.

Mme le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour la réplique.

M. Yannick Vaugrenard. Monsieur le garde des sceaux, monsieur le ministre, je vous remercie de cette réponse.

Votre annonce d’une augmentation de 6 % des dépenses de fonctionnement du tribunal de commerce de Nantes me paraît tout à fait satisfaisante et répondra, je pense, aux préoccupations du président de cette instance, que j’ai eu l’occasion de rencontrer.

suppression de la double tenue du registre d’état civil

Mme le président. La parole est à M. Yves Détraigne, auteur de la question n° 1792, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Yves Détraigne. Monsieur le garde des sceaux, je souhaite vous interroger sur la suppression de la double tenue du registre d’état civil, prévue par la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle. Ce texte offre en effet la possibilité aux communes d’être dispensées de l’élaboration d’un double des registres, à condition toutefois de justifier de conditions de sécurité renforcées nécessaires à la bonne tenue et à la sécurisation des données de l’état civil.

Les conditions de sécurité des données de l’état civil et celles permettant aux mairies d’être dispensées d’établir un registre en double exemplaire ont été fixées par le décret n° 2017-890 du 6 mai 2017 relatif à l’état civil, pris après avis favorable du Conseil national d’évaluation des normes.

Toutefois, dans sa réponse à la question écrite n° 01643 publiée dans le Journal officiel du Sénat du 19 octobre 2017, la Chancellerie précise qu’un « arrêté fixant les conditions techniques de sécurité des traitements automatisés utilisés par les communes [serait] soumis à la Commission nationale de l’informatique et des libertés, ce qui permettra de parfaire le cadre légal assurant une sécurisation des données de l’état civil ». À ce jour, sauf erreur, aucun arrêté ne semble encore avoir été publié.

Par conséquent, monsieur le garde des sceaux, je vous demande de bien vouloir m’indiquer si la suppression de la tenue du second registre papier de l’état civil est bien applicable en l’état ou si, le cas échéant, vous entendez publier le texte réglementaire manquant.

Mme le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur Détraigne, c’est une question importante pour les communes, et il s’agit bien évidemment de leur simplifier la tâche.

Vous avez rappelé la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, qui a ouvert aux communes la faculté d’être dispensées de l’obligation d’établir un second exemplaire des registres d’état civil. Cette possibilité a toutefois été soumise à la condition que les communes en question disposent d’un traitement automatisé de données d’état civil qui satisfont à des conditions et des caractéristiques techniques fixées par décret. Le décret du 6 mai 2017 relatif à l’état civil est depuis venu préciser cette disposition, en renvoyant toutefois à un arrêté pour spécifier les modalités de mise en œuvre précises des conditions techniques supplémentaires exigées.

Les travaux préparatoires à la rédaction de cet arrêté sont en cours. Je peux d’ores et déjà vous citer quelques conditions qui seront requises, comme la mise à jour des données en moins de vingt-quatre heures ou l’hébergement du traitement sur un site distinct de celui où sont tenus les registres papier.

Si je souscris évidemment à l’objectif de cette réforme, à savoir alléger les exigences formelles qui pèsent sur les communes et leurs maires, il est indispensable que l’État s’assure que les conditions en termes de sécurité de cet allégement soient réunies.

Pour répondre parfaitement et complètement à votre question, monsieur le sénateur, je tiens à vous assurer que cet arrêté devrait être publié dans un délai d’un an, après un travail très important de mes services auprès des mairies et des éditeurs de logiciels d’état civil.

Mme le président. La parole est à M. Yves Détraigne, pour la réplique.

M. Yves Détraigne. Merci, monsieur le garde des sceaux, pour votre réponse, qui va éclairer les communes.

soutien aux radios locales indépendantes

Mme le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, auteur de la question n° 1799, adressée à Mme la ministre de la culture.

M. Philippe Mouiller. Madame la ministre, ma question porte sur les difficultés financières auxquelles doivent faire face les radios locales.

En raison de la pandémie, les radios locales indépendantes et associatives se retrouvent dans une situation financière délicate, bien qu’elles aient bénéficié de deux aides importantes : le fonds d’aide à la diffusion hertzienne et le crédit d’impôt temporaire de 15 % en faveur des diffuseurs.

Ces radios ont tout fait pour poursuivre leur travail afin d’assurer leur mission d’information et de maintenir du lien social au cœur des territoires. C’est pour cette raison qu’elles n’ont pas souhaité mettre leur personnel en chômage partiel.

Leur budget repose en grande partie sur des recettes publicitaires, qui ont fondu durant la crise sanitaire. Parallèlement, leurs charges sont restées les mêmes, voire ont augmenté en raison des nouvelles contraintes techniques liées aux règles sanitaires.

Certaines de ces radios locales sont actuellement dans l’attente du versement du fonds de soutien à l’expression radiophonique locale (FSER), qui accuse un retard important en 2021. En effet, au lieu d’être en partie versé à la fin du printemps, il ne le sera vraisemblablement qu’en décembre prochain, après que la commission compétente se sera réunie en novembre.

De plus, pour soutenir le déploiement en France du DAB+ (Digital Audio Broadcasting, ou radiodiffusion numérique), qui va nécessiter plusieurs millions d’euros d’investissements, les radios locales sollicitent la création d’une nouvelle aide, sans laquelle elles ne pourront pas en supporter le coût.

Pour toutes ces raisons, il est à craindre que ces radios disparaissent, malgré les prestations de qualité qu’elles peuvent offrir.

Je vous remercie de bien vouloir m’indiquer quelles mesures vous entendez prendre afin de continuer à les accompagner dans cette période critique, pour préserver un paysage radiophonique dense et pluraliste

Mme le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture. Vous avez raison, monsieur le sénateur Philippe Mouiller, les médias locaux, à l’image des radios locales, ont joué un rôle de premier plan durant la crise sanitaire, en assurant l’information et l’accès à la culture de tous les citoyens.

Les radios commerciales locales, dont les ressources publicitaires ont fortement baissé au printemps 2020, ont maintenu leur activité. Le ministère de la culture – comme vous l’avez rappelé, ce dont je vous remercie – les a accompagnées à travers deux dispositifs exceptionnels : le fonds de soutien à la diffusion hertzienne, dont Collines FM a bénéficié, et le crédit d’impôt au profit des diffuseurs audiovisuels pour leurs dépenses dans la création.

Les radios associatives n’ont pas été épargnées par la crise, bien que leur économie soit largement indépendante des aléas du marché publicitaire.

Là encore, le ministère de la culture a pris des mesures spécifiques d’adaptation du FSER : pour 2021, les crédits de ce fonds ont été portés à 32 millions d’euros, soit une augmentation de 1,25 million d’euros par rapport à l’année 2020.

Les mesures d’adaptation des modalités de détermination des subventions ont été saluées par les organisations représentatives de ces radios, que j’ai d’ailleurs reçues récemment.

Aucune anomalie n’a été relevée s’agissant du calendrier de versement des aides, dont bénéficient notamment la radio D4B, Radio Gâtine et Radio Val d’Or.

Dans un contexte de poursuite du développement du DAB+, j’ai obtenu dans le projet de loi de finances pour 2022 une nouvelle augmentation des crédits du FSER, qui atteindront ainsi un niveau historique à 33,1 millions d’euros, soit une hausse de 1,1 million d’euros, c’est-à-dire de 3,5 %, par rapport à 2021.

Je vous signale par ailleurs que les chiffres publiés par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) au mois de juillet, pour le premier semestre de l’année 2021 révèlent que le marché publicitaire national des radios a retrouvé un niveau similaire à celui observé avant la crise, ce qui profite également aux radios locales, lesquelles tirent en moyenne la moitié de leur chiffre d’affaires publicitaire de ces recettes. Les dernières données relatives au marché publicitaire font également apparaître une dynamique positive pour le second semestre.

Dans ce contexte, il ne me paraît pas justifié de reconduire ces dispositifs exceptionnels, conçus pour répondre à la baisse sans précédent des investissements publicitaires. Le maintien des mesures d’adaptation du FSER sera quant à lui étudié en fin d’année, à l’aune du bilan des mesures prises cette année.

Mme le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour la réplique.

M. Philippe Mouiller. Je vous remercie, madame la ministre, de toutes ces précisions. Nous allons regarder de très près l’organisation du financement dans le cadre du projet de loi de finances pour 2022. Mais il faudrait peut-être se pencher sur les problèmes de trésorerie, notamment en ce qui concerne le versement du FSER, car il s’agit de structures disposant d’une trésorerie très limitée, dans un contexte extrêmement difficile.

marché du livre à l’heure du numérique

Mme le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, auteur de la question n° 1229, adressée à Mme la ministre de la culture.

M. Jean-Marie Mizzon. Madame la ministre, avec l’arrivée du numérique et au lendemain, ou presque – espérons-le ! –, de l’épidémie du coronavirus, le marché du livre est en pleine mutation.

Cette nouvelle technologie et la pandémie ont en effet entraîné d’importants bouleversements dans les habitudes de lecture des Français mais aussi dans le monde de l’édition. Cette activité culturelle, qui génère un chiffre d’affaires assez important, est toujours autant plébiscitée par nos concitoyens.

Or, avec l’arrivée du numérique, le marché du livre est en pleine mutation, avec près de 400 000 titres disponibles à la vente et accessibles via un ordinateur fixe, une liseuse, un smartphone, une tablette ou encore un ordinateur portable.

Surtout, ce marché, en augmentation constante, a connu une hausse particulièrement notable au plus fort de l’épidémie de covid-19. Durant cette période, les chiffres communiqués par les plateformes de vente spécialisées témoignent même d’une hausse spectaculaire des achats de livres numériques, avec un nombre de téléchargements et de ventes multiplié par sept, tandis que le nombre d’e-books commandés a été multiplié par quinze. Quant à la lecture directe sur un ordinateur, elle a triplé en volume, ce qui représente plus de 800 000 livres numériques lus par ce seul moyen. La plupart des plateformes de vente de livres numériques ont enregistré des hausses d’activité allant jusqu’à 200 %.

Tout cela suscite, au vu des pertes enregistrées, l’inquiétude des professionnels du livre, libraires et maisons d’édition confondus. Afin qu’aucun des acteurs de ce marché ne soit lésé, quelle politique votre ministère entend-il mener dans ce secteur d’activité d’importance pour notre pays, sur le plan tant culturel qu’économique ?

Mme le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot, ministre de la culture. Monsieur le sénateur Jean-Marie Mizzon, les contraintes et les obligations imposées par la crise sanitaire ont en effet favorisé une augmentation au moins temporaire des ventes et des prêts de livres numériques.

Le développement du secteur du livre numérique est accompagné depuis plus d’une dizaine d’années par le ministère de la culture. Cela s’est manifesté notamment par l’adoption de la loi sur le prix unique du livre numérique en 2011, le soutien au développement du prêt numérique en bibliothèque ou encore le copilotage d’un plan stratégique pour le développement d’une offre de livres numériques nativement accessibles aux personnes en situation de handicap.

En outre, le Centre national du livre (CNL) propose plusieurs dispositifs d’aide numérique, qui ont été refondus cette année. Trois aides sont dorénavant proposées afin d’accompagner la filière du livre dans le développement de services numériques structurants et interprofessionnels, de soutenir la publication et la diffusion de livres numériques, et de favoriser le développement du livre audio.

L’imprimé demeure néanmoins le principal format du marché du livre, puisqu’il représente environ 95 % des ventes en volume.

Les périodes de confinement liées à la crise sanitaire ont eu un impact sur les ventes, mais le soutien du Gouvernement a été important. Grâce à l’action du CNL et des directions régionales des affaires culturelles, le cas échéant en liaison avec les organismes de gestion collective et les collectivités territoriales, les différents maillons ont bénéficié d’aides variées.

Ainsi, 677 auteurs ont reçu 2,26 millions d’euros d’aide d’un fonds d’urgence, et 440 aides ont été versées aux petites et moyennes maisons d’édition, pour plus de 4 millions d’euros. Les libraires ont en outre été soutenus à travers un fonds de compensation des pertes d’exploitation lors du premier confinement, pour plus de 15 millions d’euros. Le remboursement de leurs frais d’expédition pour leur permettre de poursuivre leur activité à distance lors du deuxième confinement a coûté plus de 3 millions d’euros. Et un fonds de modernisation de 12 millions d’euros a été créé pour accélérer leurs investissements dans leurs magasins et leurs solutions de vente en ligne, dont 9 millions d’euros ont déjà été engagés.

À cela s’ajoutent les dispositifs transversaux que vous connaissez bien, et dont la chaîne du livre a pleinement bénéficié.

Mme le président. Il faut conclure, madame la ministre.

Mme Roselyne Bachelot, ministre. Combinée avec la fréquentation exceptionnelle des commerces de livres, l’action publique aura ainsi permis au secteur du livre de traverser avec le moins de dégâts possible la crise sanitaire.

Mme le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour la réplique.

M. Jean-Marie Mizzon. Je suis impressionné par le nombre des initiatives que vous avez prises, madame la ministre. Mais le ressenti sur le terrain n’est pas à la hauteur de ces engagements que vous prenez pour défendre le livre. Puisse l’avenir vous donner raison !

travailleurs et vétérans des essais nucléaires

Mme le président. La parole est à Mme Angèle Préville, auteure de la question n° 1583, adressée à Mme la ministre des armées.

Mme Angèle Préville. Madame la ministre, environ 300 000 vétérans, civils et militaires, ont participé aux essais nucléaires français, à la fois dans le Sahara algérien et en Polynésie française.

En janvier dernier, vous preniez un décret créant une nouvelle agrafe « essais nucléaires », destinée à récompenser ces personnels par la médaille de la défense nationale.

S’il s’agit d’une bonne nouvelle, c’est loin d’être suffisant, qu’il s’agisse des vétérans ou de leurs descendants. Les vétérans ne devraient-ils pas pouvoir bénéficier du statut d’ancien combattant ? N’ont-ils pas été exposés aux radiations nocives pour la santé en assurant l’indépendance stratégique de la France ? La demande qu’ils vous ont adressée à ce sujet, sauf erreur, n’a toujours pas obtenu de réponse. Ils sont nombreux à souffrir de lourdes séquelles dues à l’exposition aux rayonnements ionisants et à un environnement contaminé.

Que leurs enfants et petits-enfants soient également touchés était également prévisible. Le lien entre l’exposition des vétérans et les conséquences néfastes sur leurs descendants a été démontré, et il est documenté depuis déjà un certain temps. Depuis Hiroshima et Nagasaki, on sait que l’irradiation des parents entraîne des conséquences irréversibles sur le génome : stérilité, malformations, cancers et autres pathologies apparaissent de génération en génération, ce qu’on observe également dans la lignée des vétérans des essais nucléaires français.

Face à ce lourd tribut que payent les vétérans des essais nucléaires et leurs familles, le Gouvernement ne doit-il pas accorder aux descendants un suivi médical pris en charge par l’État ? N’y a-t-il pas là comme un devoir moral ? N’est-il pas de notre responsabilité d’assumer les conséquences des décisions prises dans le passé ?

Madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer quand les demandes des vétérans seront prises en compte et dans quel délai ? La France n’a-t-elle pas suffisamment attendu pour accorder à ceux qui l’ont servie la reconnaissance de la Nation ?

Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès de la ministre des armées, chargée de la mémoire et des anciens combattants. Madame la sénatrice, vous avez rappelé l’avancée que constitue le décret du 29 janvier 2021 créant une nouvelle agrafe « essais nucléaires », destinée à honorer les vétérans des essais nucléaires par la médaille de la défense nationale. Cette distinction permet de récompenser les militaires d’active et de réserve, les anciens militaires ainsi que les civils qui justifient par tous moyens avoir participé aux missions liées au développement de la force dissuasive nucléaire.

La mise en place de ce dispositif est très satisfaisante. Fin août, 1 145 médailles avec agrafe ont été décernées, et ce chiffre sera porté à 1 415 dans les prochaines semaines. L’État reconnaît ainsi ce qu’il doit à ces femmes et à ces hommes, qui se sont dévoués pour bâtir notre dissuasion nucléaire, pilier majeur de notre défense.

En ce qui concerne le suivi sanitaire, je tiens d’abord à rappeler, en tant que médecin, toutes les précautions dont il faut s’entourer lorsqu’on aborde des données épidémiologiques. Plutôt que de brandir des comparaisons catastrophistes et hasardeuses, ce qui peut être trop engageant et difficile à entendre, il faut se fonder sur des analyses solides.

Justement, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) a rendu publique en 2021 l’expertise collective sur les effets sanitaires des essais nucléaires en Polynésie française. S’agissant des effets transgénérationnels ou héritables, cette expertise conclut que les études actuellement disponibles chez l’homme ne mettent pas en évidence d’effet décelable, c’est-à-dire que des conséquences transgénérationnelles des rayonnements n’ont pu être attestées aujourd’hui chez l’homme, et recommande une veille attentive et rigoureuse de la littérature publiée à ce sujet.

La commission internationale de protection radiologique a programmé une expertise sur les effets héritables des radiations, qui doit rendre ses conclusions en 2025. Celles du comité scientifique des Nations unies pour l’étude des effets des rayonnements ionisants sont attendues pour 2028. Des experts de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire contribuent à ces travaux.

Tout cela a été expliqué au cours des tables rondes que nous avons tenues les 1er et 2 juillet 2021, à la demande du Président de la République, avec nos amis polynésiens. Le président-directeur général de l’Inserm et les experts de cette institution ont ainsi pu apporter toutes les précisions.

Mme le président. Il faut conclure, madame la ministre déléguée.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée. Nous portons beaucoup d’attention à ces questions, et menons de front la surveillance et la reconnaissance.

Mme le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour la réplique.

Mme Angèle Préville. Merci, madame la ministre, pour votre réponse. J’attire toutefois votre attention sur la spécificité de ces essais nucléaires, qui devrait nous inviter à revoir la notion même d’ancien combattant, puisque l’exposition aux rayonnements a été très concrète pour ceux qui étaient présents.

Pour assumer notre responsabilité pleine et entière, il nous faut trouver la juste réponse.

Mme le président. Je vous demande, chers collègues, de bien porter votre masque sur le nez : les micros sont utilisés par d’autres et on ne les nettoie pas forcément juste après vous.

règles de calcul de la part de la dotation forfaitaire attribuée en fonction de la population

Mme le président. La parole est à M. Hervé Maurey, auteur de la question n° 1680, adressée à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

M. Hervé Maurey. Madame la ministre, malgré les demandes répétées des élus ruraux et des parlementaires, malgré différents rapports sur le sujet, les règles de répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF) entre communes demeurent toujours aussi injustes.

Comme vous le savez, la part de la dotation forfaitaire par habitant varie du simple au double entre une commune rurale et une commune urbaine. Cette situation est totalement inacceptable et injustifiable.

En effet, les études menées sur la réalité des charges supportées par les communes en fonction de leur taille montrent que la règle de calcul appliquée sous-estime les charges des communes de petite taille. Ce constat ancien a été confirmé par un rapport gouvernemental en 2020.

Le Sénat a adopté dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021 un amendement qui réduisait cette inégalité. Malgré le caractère progressif et mesuré de cette proposition, la disposition a été supprimée à l’Assemblée nationale à la demande du Gouvernement, ce dernier renvoyant à des réflexions complémentaires et ultérieures.

Tout le monde s’accorde donc à dire qu’il faut revoir la règle, mais la situation demeure en l’état, comme en témoigne, malheureusement, le projet de loi de finances pour 2022, qui nous a été présenté la semaine dernière, puisque ce texte ne prévoit rien en la matière.

Je souhaiterais donc savoir, madame la ministre, si, d’ici à l’adoption du projet de loi de finances pour 2022, le Gouvernement compte travailler enfin et réellement avec les parlementaires engagés sur ce sujet pour modifier la règle.

Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès de la ministre des armées, chargée de la mémoire et des anciens combattants. Monsieur le sénateur, votre question porte sur un sujet auquel je sais le Sénat très attentif, celui des règles de répartition de la dotation forfaitaire entre communes.

C’est une question sur laquelle circulent tout de même beaucoup d’interprétations erronées, et il faut redonner au sujet sa vraie portée, en rappelant que ce coefficient sert uniquement à traduire dans l’attribution des aides de l’État le fait que les communes, en règle générale, supportent d’autant plus de charges qu’elles comptent d’habitants. C’est un constat évident, documenté et, je crois, largement partagé sur le terrain. On ne peut pas dire qu’un urbain vaut deux ruraux : ce n’est pas entendable, et c’est démenti, surtout, par les faits.

En 2021, les communes urbaines, au sens de l’Insee, ont reçu 166 euros de dotation par habitant, contre 160 euros pour les communes rurales. En effet, au-delà de la dotation forfaitaire, dans le calcul de laquelle joue le coefficient logarithmique, les communes rurales reçoivent aussi d’autres aides.

Je pense en particulier à la dotation de solidarité rurale, dont le montant s’élève à 1,8 milliard d’euros. Cette année encore, le Gouvernement propose d’augmenter cette dotation de 95 millions d’euros dans le projet de loi de finances, ce qui portera à 455 millions d’euros sa progression depuis le début du quinquennat.

Je pense aussi à la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), qui s’élèvera toujours à 1,46 milliard d’euros en 2022, ce qui fait 5,2 milliards d’euros sur ce quinquennat contre 3,5 milliards d’euros sous le précédent.

En ce qui concerne les évolutions que vous appelez de vos vœux, M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité, a proposé à l’association des maires ruraux de France de formuler des propositions, mais en coordination avec les autres associations d’élus – villes moyennes, petites villes ou grands centres urbains –, car le Gouvernement ne souhaite pas réformer la DGF contre la volonté des élus et sans esprit de consensus.

Le président du comité des finances locales a d’ores et déjà indiqué que les travaux du groupe, qui se poursuivent depuis deux ans, se prolongeront en 2022. Je crois qu’il faut saisir cette opportunité pour en débattre sereinement et surtout de façon coordonnée, quelle que soit la taille de nos collectivités.

Mme le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour la réplique.

M. Hervé Maurey. Madame la ministre, je suis assez étonné par votre réponse. Vous commencez par expliquer que, finalement, tout cela est très justifié, ce qui est tout de même assez surprenant, parce que, jusqu’alors, on avait plutôt entendu les membres des gouvernements précédents reconnaître qu’il y avait un vrai problème et qu’il fallait se pencher dessus. Là, vous nous dites finalement de circuler, qu’il n’y a rien à voir, et qu’il n’est pas gênant que la dotation forfaitaire varie du simple au double en fonction de la taille de la commune. C’est une nouveauté, j’en prends acte, le Sénat en prend acte et je suis certain que les maires ruraux apprécieront et qu’ils en prendront acte également.

Dans le même temps, vous nous dites tout de même qu’on va continuer à réfléchir, jusqu’en 2022… C’est ce qu’on nous dit chaque année. Pour être très direct avec vous, cela nous donne, une fois de plus, le sentiment d’être menés en bateau, ce qui est extrêmement désagréable pour les nombreux élus concernés.

Le Sénat, une fois de plus, évoquera ce sujet lors de la discussion du prochain projet de loi de finances en espérant – on peut toujours espérer – être enfin entendus par le Gouvernement !

cumul d’une pension d’invalidité avec une indemnité de fonction au titre de l’exercice d’un mandat local