MISSION COMMUNE D'INFORMATION  "LA FRANCE ET LES FRANÇAIS FACE A LA CANICULE


Table des matières




Mercredi 5 novembre 2003

- Présidence de M. Jacques Pelletier, président. -

Audition de M. Edouard Couty, directeur de l'hospitalisation et de l'organisation des soins

La mission d'information a tout d'abord procédé à l'audition de M. Edouard Couty, directeur de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS).

M. Jacques Pelletier, président, a demandé si la DHOS avait lancé des « signaux de détresse » au moment de la canicule de l'été dernier et, dans l'affirmative, comment ceux-ci avaient été reçus. Il s'est également enquis des mesures envisagées par la direction pour améliorer l'efficacité de ses réactions, au cas où une telle situation se reproduirait.

M. Edouard Couty a rappelé que sa direction, ancienne direction des hôpitaux, avait été créée en 2000 : son champ de compétences, plus large, couvre désormais l'ensemble de l'offre de soins. Elle exerce également une compétence partielle sur les établissements médico-sociaux, s'agissant de leur financement et de leur organisation.

Il a ensuite retracé la chronologie des événements, du début de la crise le 7 août jusqu'à son terme le 22 août. Il a précisé que le suivi de cette crise avait été, dans un premier temps, assuré par son adjointe, Mme Danielle Toupillier, conseiller technique, lui-même étant absent du 4 au 13 août, mais informé de la situation à partir du 11 août :

- le 7 août au soir, la direction reçoit un premier signal venant du responsable du service des urgences de l'hôpital Saint-Antoine, le docteur Patrick Pelloux, avec lequel les contacts sont fréquents. Celui-ci participe en effet à des groupes de travail créés depuis dix-huit mois au sein de la DHOS, et notamment à celui visant à améliorer la prise en charge des malades par les services d'urgence. Mme Danielle Toupillier contacte alors la Direction générale de l'Assistance publique des hôpitaux de Paris (AP-HP), ainsi que l'agence régionale de santé d'Ile-de-France, pour vérifier que cette information est corroborée par d'autres signaux. Elle a confirmation que ces difficultés sont partagées par plusieurs hôpitaux dépendant de l'AP-HP, ainsi que par d'autres hôpitaux parisiens. Le soir même, est créée au sein de la direction une cellule de veille, afin d'enquêter systématiquement auprès des correspondants ;

- le 8 août au matin, le secrétaire général de l'AP-HP met en place une cellule de crise ;

- le week-end des 9 et 10 août, aucune difficulté particulière n'est enregistrée hors de Paris. Un communiqué de presse formule toutefois certaines recommandations relatives à la canicule ;

- le dimanche 10 août au soir, le docteur Patrick Pelloux fait une première déclaration très médiatisée ;

- le lundi 11 août au matin, la DHOS crée une cellule de crise plus développée qu'une cellule de veille, à l'image des cellules déjà créées lors de précédentes crises (explosion de l'usine AZF à Toulouse, inondations du Gard, tempête de 1999, par exemple). La direction prépare alors un questionnaire destiné aux directions des agences régionales d'hospitalisation, afin de disposer, deux fois par jour, de remontées systématiques d'informations. Il en ressort, le 11 août, un constat très contrasté, la situation étant très diverse selon les régions, seules certaines d'entre elles faisant état de difficultés : la région Ile-de-France (Paris en particulier), dans une moindre mesure, la Bourgogne (Dijon et Auxerre), la Champagne-Ardenne (Reims) et la Franche-Comté (Besançon) ;

- le lundi 11 août au soir, la situation est identifiée et fait apparaître des difficultés localisées et non un phénomène d'ampleur nationale. Dès cette date, des contacts sont établis avec la Direction générale de la santé (DGS) et le cabinet du ministre, ainsi qu'avec l'Agence régionale de la santé (ARS) d'Ile-de-France. L'ARS invite Mme Danielle Toupillier à une réunion interne, à laquelle elle participe après accord du cabinet. L'AP-HP met en place une formule de « plan blanc », appelé « plan action chaleur extrême » (PACE).

Mme Danielle Toupillier a souligné la solidarité dont ont fait preuve les établissements hospitaliers, certains apportant leur concours aux autres, dans des conditions difficiles du fait de l'afflux de personnes âgées venant de maisons de retraite, et qui a été probablement à l'origine de l'engorgement des services d'urgence. La DHOS joue, dans ce contexte, un rôle de « facilitateur », consistant à lever les obstacles financiers, juridiques et administratifs afin de permettre l'adaptation du système. Des instructions sont très rapidement données en ce sens ; la direction apporte également son soutien aux établissements et aux commissariats de police concernés ; elle accorde notamment des dérogations afin d'autoriser les morgues hospitalières à accueillir les personnes décédées à l'extérieur des hôpitaux ;

- le 12 août, les premiers signaux inquiétants sont enregistrés : saturation des hôpitaux en région parisienne, signalement de très grandes difficultés dans les services des urgences de Dijon et Auxerre. La DHOS propose alors la mise en oeuvre du « plan blanc ». Ce dernier est destiné à faire face à l'afflux massif de personnes dont l'état nécessite une hospitalisation. Il prévoit la suppression ou le report d'activités hospitalières programmées, le rappel de personnels en congés ou en repos, la libération de lits dans les services ;

- le 14 août, à l'occasion d'une réunion interministérielle, présidée par le Premier ministre, il est décidé de généraliser le « plan blanc », les préfets recevant instruction de le mettre en place en cas de nécessité. En réalité, nombre de médecins hospitaliers ayant déjà spontanément organisé leurs services en conséquence, la mise en place du « plan blanc » s'est révélée le plus souvent inutile.

M. Edouard Couty a noté la quasi-simultanéité entre la prise de conscience de la situation, qui a entraîné le déclenchement officiel du « plan blanc », et le désengorgement des services d'urgences à partir des 14 et 15 août. Il a rappelé que le ministre avait demandé une analyse scientifique approfondie auprès de deux chercheurs de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) sur les aspects démographiques et médicaux de cette crise. Cette enquête confirme les disparités caractérisées par une surmortalité de l'ordre de 190 % dans les départements périphériques de Paris, de 120 à 130 % dans la capitale et faible ou nulle dans les autres régions. Le ministre a, par ailleurs, demandé aux spécialistes américains d'Atlanta, ayant travaillé sur la canicule constatée à Chicago en 1995, de lui faire part de leurs conclusions : ceux-ci ont relevé que des dispositifs de type « plan blanc » étaient efficaces et que l'alerte était essentielle. En effet, et la canicule de l'été dernier l'a confirmé, il existe un décalage d'environ 72 heures entre le moment où un tel phénomène est avéré et celui où l'on constate un afflux significatif, voire un engorgement, dans les services d'urgence. De fait, alors que des pics de décès étaient enregistrés autour des 8 et 9 août, l'alerte n'avait pas encore été donnée.

M. Edouard Couty a souligné le caractère trop tardif des alertes hospitalières, M. Jean-François Mattei ayant indiqué qu'il était prioritaire de disposer d'une alerte la plus précoce possible. La DHOS s'y emploie, avec l'Institut national de veille sanitaire (INVS), la DGS, les médecins de ville et les services sociaux municipaux.

Il a par ailleurs constaté que, dans les régions les plus touchées, la permanence des soins ambulatoires laissait à désirer, alors qu'elle devrait être assurée tous les jours de l'année.

M. Jacques Pelletier, président, a fait observer que l'obligation faite à Mme Danielle Toupillier de demander l'autorisation du cabinet de son ministère pour assister à la réunion évoquée, était révélatrice d'un cloisonnement administratif excessif.

M. Edouard Couty a toutefois souligné que sa direction et l'AP-HP entretenaient des relations régulières.

Mme Valérie Létard, rapporteur, s'est enquise des préconisations de la DHOS en vue de dépasser ces cloisonnements administratifs et de la répartition des compétences entre les différentes administrations sanitaires.

M. Edouard Couty a indiqué que les relations traditionnelles entre sa direction et la direction générale de la santé avaient encore été renforcées et institutionnalisées par le biais de rencontres hebdomadaires.

Il a rappelé en outre que la direction générale de l'action sociale (qui exerce la tutelle sur les établissements médico-sociaux, les maisons de retraite et les services de soins infirmiers à domicile) était rattachée au ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité, la DHOS jouant, quant à elle, un rôle de comptable et de payeur de ces organismes. La DGAS exerce également la tutelle des agences sanitaires, de l'Institut national de veille sanitaire et, conjointement avec le ministère de l'écologie et du développement durable, de l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale. Les deux directions travaillent donc de concert. Il existe d'autres relations au niveau interministériel, avec par exemple la direction de la sécurité civile du ministère de l'intérieur.

Répondant ensuite à Mme Valérie Létard, rapporteur, qui l'interrogeait sur l'organisation et la gestion de la capacité hospitalière, il a indiqué que, depuis trois ans, il était demandé aux responsables des hôpitaux de les informer dès les mois de mai ou juin de la programmation des fermetures de lits prévues pour l'été suivant, afin de les inscrire dans une approche régionale. Regrettant toutefois un certain nombre de distorsions entre les déclarations et la réalité, révélées par les contrôles, il a jugé qu'une plus grande vigilance était nécessaire, une réflexion étant actuellement menée sur un renforcement des contrôles et la mise en place d'éventuelles sanctions financières.

Mme Valérie Létard, rapporteur, lui a demandé de préciser la répartition des compétences entre les autorités chargées de la planification (l'ARH) et de la gestion des crises.

M. Edouard Couty lui a confirmé que le préfet restait responsable de la gestion des situations de crise. Il a, par ailleurs, rappelé que l'Assemblée nationale avait adopté un amendement au projet de loi sur la santé publique, tendant à légaliser le « plan blanc » et à étendre les pouvoirs de réquisition du préfet aux médecins libéraux.

Mme Valérie Létard, rapporteur, a enfin insisté sur la nécessité de disposer d'une connaissance en amont, et de proximité, des populations fragiles et isolées, afin qu'en cas d'alerte, il soit possible d'agir sur le terrain aussi rapidement que possible.

M. Alain Gournac a partagé ce point de vue et a fait part de l'expérience de sa ville en la matière.

Mme Sylvie Desmarescaux, après avoir souligné le rôle joué dans le département du Nord par les concertations gérontologiques, s'est interrogée sur leurs développements futurs.

Soulignant la difficulté d'appréhender les populations à risque, M. Edouard Couty a indiqué que le plan « solidarité vieillesse », qui devrait prochainement être présenté par le Gouvernement, mettra l'accent sur cette question de la coordination, qui a été étudiée avec le problème de l'alerte, par l'un des six groupes de travail constitués.

Il a ensuite déclaré ne pas être en mesure de répondre à la question de M. Hilaire Flandre, rapporteur, qui s'interrogeait sur le nombre de décès qui auraient pu être évités si le phénomène de la canicule avait pu être anticipé.

Après s'être étonné que l'alerte ne soit venue que d'un médecin urgentiste, M. Bernard Cazeau s'est enquis des améliorations susceptibles d'être apportées au dispositif d'alerte, la DHOS étant, comme son nom l'indique, chargée de l'organisation des soins.

M. Edouard Couty a rappelé que les hôpitaux, établissements publics autonomes, bénéficiaient d'une liberté de gestion sous la responsabilité de leur conseil d'administration et de leur directeur. Il a ensuite évoqué la pratique hospitalière qui explique que les professionnels s'efforcent d'abord de répondre à la demande de soins, et ne donnent l'alerte que lorsqu'ils se trouvent en grande difficulté. Le médecin urgentiste concerné, qui exerce par ailleurs des responsabilités syndicales, alerte très régulièrement la DHOS de ces difficultés et celle-ci tente à chaque fois de vérifier ses informations.

M. Alain Gournac s'est étonné que les médecins libéraux ne soient pas intégrés dans le « plan blanc » et a stigmatisé la dérive du système des urgences qui est encombré par trop de fausses urgences.

Mme Monique Papon a également souligné le détournement des services d'urgences.

M. Edouard Couty a confirmé que 80 % des urgences étaient en réalité de simples demandes de consultation, 15 % relevant de la « bobologie » et seules 5 % étant d'ordre vital. Depuis sept ou huit ans, le nombre de passages dans les services d'urgences des hôpitaux publics a augmenté de 4 à 5 % par an, pour atteindre aujourd'hui 13 millions chaque année. Il a insisté sur le fait que ces services ne pouvaient être conçus isolément, et que les autres services de l'hôpital devaient répondre aux diverses demandes de prise en charge, ce qui n'est malheureusement pas toujours le cas.

Selon le plan « urgences », ce service devrait être organisé selon une approche territoriale afin de fonctionner en réseau avec l'ensemble des établissements hospitaliers concernés, en étroite relation avec la médecine libérale ; cette organisation devrait tenir compte des services hospitaliers en aval, dont l'activité programmée est privilégiée par les centres hospitaliers universitaires.

Evoquant les perspectives annoncées par le ministre de recruter un grand nombre de professionnels supplémentaires, Mme Monique Papon a demandé si le récent élargissement du numerus clausus des professions concernées suffirait à répondre aux besoins, en particulier s'agissant des infirmières.

Après avoir rappelé que le manque d'infirmières résultait des quotas fixés antérieurement à 1999 et des nombreux départs à la retraite, M. Edouard Couty a précisé que les promotions qui étaient de 18.000 en 1997 et de 26.000 en 1999 (pour des diplômes délivrés fin 2003) étaient passées à 30.000 depuis 2001 pour des sorties à partir de 2005.

Audition de M. Jean-Paul Proust, préfet de police de Paris

La mission a ensuite procédé à l'audition de M. Jean-Paul Proust, préfet de police de Paris.

Après avoir rappelé le caractère sans précédent de la canicule du mois d'août 2003, M. Jean-Paul Proust a considéré que ce drame nous interpellait tous au-delà de nos responsabilités et au-delà de nos fonctions. Il a estimé que cette crise constituait avant tout un véritable drame de société, auquel les personnels de la Préfecture de police avaient fait face avec courage et abnégation.

Il a précisé qu'il voulait tout d'abord exposer à la mission d'information ce qu'avaient été le rôle et la mission de la préfecture de police et des services rattachés durant cette période. Il a ajouté qu'il se proposait de présenter ensuite les dispositions qu'il a décidé de mettre en oeuvre pour que ses services soient mieux préparés, à l'avenir, à faire face à de telles situations de crise.

M. Jean-Paul Proust a rappelé, au préalable, que la préfecture de police, les services de police et la brigade de sapeurs-pompiers de Paris, n'étaient pas en charge de la veille sanitaire, de la régulation hospitalière ou du recensement du nombre de décès dans la capitale.

Il a indiqué que la mission de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris consistait tout d'abord à porter aide et assistance, par un secours immédiat, aux personnes se trouvant sur la voie publique ou à leur domicile. Il a précisé que cette unité avait ensuite pour rôle, après avoir pris les premières mesures d'urgence, de transporter, si nécessaire, ces victimes dans les services d'urgence hospitaliers. Il a noté que les sapeurs-pompiers ignoraient, le plus souvent, ce que devenaient alors les victimes transportées.

Il a observé que ni les sapeurs-pompiers, ni les services de police n'avaient connaissance des décès intervenus dans les maisons de retraite ou à l'hôpital, comme d'ailleurs de la majorité des décès à domicile qui sont constatés par un médecin de ville.

Il a constaté que tous les rapports quotidiens adressés par la brigade des sapeurs-pompiers de Paris à son cabinet n'avaient mentionné que le bilan des interventions de secours à victimes sur la voie publique, sans ajouter de commentaire particulier.

M. Jean-Paul Proust a déclaré que, pour cette raison, contrairement à ce qui avait pu être indiqué, la brigade des sapeurs-pompiers de Paris n'avait pas eu, avant le 12 août, tout comme d'ailleurs les services de police, les moyens d'appréhender le phénomène de surmortalité.

Il a observé qu'en ne transportant que 15 % environ des personnes se présentant aux urgences et en ne disposant d'aucune information particulière sur l'activité des hôpitaux ou des maisons de retraite, la brigade des sapeurs-pompiers n'avait eu qu'une vision très partielle des événements. Il a souligné l'impossibilité pour elle, dans ces conditions, de disposer d'informations fiables quant au nombre de morts et sur le lien pathologique entre les décès et la canicule.

Il a insisté tout particulièrement sur le fait qu'aucun service ne disposait alors d'un outil statistique permettant de suivre en temps réel et de façon précise l'évolution de la mortalité. Il en a conclu qu'avant le 12 août, ni les sapeurs-pompiers ni les services de police n'avaient eu les moyens de prévenir l'ampleur du phénomène qui se préparait.

M. Jean-Paul Proust a précisé que la préfecture de police avait mis en place trois séries de mesures, qui ont correspondu aux trois phases chronologiques du déroulement de la crise.

Il a distingué, en premier lieu, la période du 5 au 12 août au cours de laquelle personne n'avait pu mesurer l'ampleur et la gravité de la crise qui allait survenir à compter du 12 août.

Il a rappelé que dès le début de la première phase, c'est-à-dire le 5 août, un dispositif de suivi de l'activité opérationnelle quotidienne de la brigade des sapeurs-pompiers avait été mis en place à l'initiative de la préfecture de police. Il a indiqué que l'origine de cette initiative résultait de l'évolution du nombre des interventions pour secours à victimes, dont faisaient état les rapports quotidiens adressés chaque matin par la brigade des sapeurs-pompiers de Paris au cabinet du préfet de police.

Le préfet de police de Paris a déclaré que la brigade des sapeurs-pompiers disposait alors, en mobilisant pleinement ses effectifs, des capacités pour répondre à ces demandes. Il a indiqué que, face à l'intensification des secours à victimes, une série de mesures complémentaires avait été arrêtée.

Il a mis en avant, à ce titre, la mobilisation, dès le 8 août, des moyens des associations de secouristes, notamment de la Croix Rouge et de la Fédération nationale de protection civile, destinée à renforcer les centres de secours ou à soutenir l'activité de l'AP-HP, dans l'hypothèse d'une demande de celle-ci.

Il a précisé que, dans le même temps, la brigade des sapeurs-pompiers faisait appel à ses réservistes. Il a déclaré qu'ainsi renforcée, cette unité avait eu les moyens de répondre à tous les appels de secours et accomplir sa mission.

Il a indiqué que la préfecture de police avait en outre demandé à la brigade des sapeurs-pompiers d'engager, notamment lors du week-end des 9 et 10 août, une action de communication destinée au grand public consacrée aux risques liés à la persistance de la canicule et aux mesures pratiques de prévention qu'il convenait de mettre en oeuvre.

M. Jean-Paul Proust a considéré que la seconde phase de la canicule avait débuté le 12 août, c'est-à-dire le jour où l'Institut médico-légal (IML) avait constaté un afflux considérable de défunts et avait alerté son cabinet.

Il a jugé que cette information émanant de l'IML, confirmée à partir de cette date par les services de police, s'était avérée être le facteur décisif de la prise de conscience de l'ampleur de la crise.

Il a indiqué que, dès le 13 août, le cabinet de la préfecture de police et le secrétariat général de la zone de défense avaient organisé une série de contacts et de réunions entre les services de la préfecture de police, les représentants de la ville de Paris et les autres partenaires.

M. Jean-Paul Proust a précisé que trois séries de mesures ont été immédiatement prises dans les domaines des capacités d'intervention de secours, de la prise en charge des personnes isolées et de l'accueil des défunts.

S'agissant de la prévention des risques d'hyperthermie, il a noté que des postes de secours avec des équipes de secouristes ont été implantés sur cinq sites à forte fréquentation de la capitale. Il a ajouté que ces mêmes équipes de secouristes avaient également renforcé les centres de secours les plus sollicités.

Il a observé que la préfecture de police, bien que n'ayant pas la responsabilité de l'action de proximité en direction des personnes âgées, avait cependant mis ses services à la disposition de la ville de Paris. Il a précisé que cette dernière, qui ne disposait pas alors de moyens humains suffisants au niveau des CCAS, avait communiqué une liste de plusieurs milliers de noms de personnes âgées supposées isolées.

Il a salué l'action de la cellule d'appels, composée de bénévoles de la préfecture de police et de secouristes, qui a été alors mise en place. Il a constaté que cette structure avait passé, entre le vendredi 15 août et le lundi 18 août, 3.500 appels téléphoniques et contacté 1.882 personnes âgées pour s'enquérir de leur état de santé et de leurs besoins.

Il a noté que, parallèlement, avaient été mises en place, sous l'égide de la Police urbaine de proximité, des patrouilles avec des secouristes afin de prendre contact sur le terrain ou à domicile avec les personnes âgées.

Il a mis en avant que ce dispositif, rassemblant 1.400 policiers et secouristes, avait permis de contacter des personnes isolées en détresse, mais aussi de visiter 391 maisons de retraite, foyers ou associations. Il a ajouté que 2.231 personnes âgées avaient, par ailleurs, été directement contactées sur la voie publique.

M. Jean-Paul Proust a annoncé que, grâce à ces deux actions, plusieurs dizaines de personnes âgées avaient été secourues.

Rappelant qu'il avait fallu veiller à ce que les structures d'accueil des défunts puissent faire face à cet afflux, il a observé que les capacités d'accueil de l'IML avaient été doublées par l'ouverture d'un site à Villejuif et qu'un autre site avait été mis en place à Rungis en collaboration avec les Pompes funèbres générales.

Il a considéré que la troisième phase de la gestion de la crise de la canicule s'était déroulée entre le 19 août et le 3 septembre, et avait consisté à mettre en place un processus spécifique d'inhumation des défunts.

Le Préfet de police a rappelé qu'il lui appartenait, en vertu des dispositions législatives particulières à Paris, de veiller à la prévention de tout risque épidémiologique et qu'il avait pris, à ce titre, deux mesures.

Il a indiqué, qu'après avoir consulté l'ensemble des acteurs et les autorités judiciaires, il avait ainsi été amené à porter le délai d'inhumation de six à dix jours pour permettre aux familles d'organiser des funérailles dignes aux victimes.

Il a précisé, d'autre part, que la fin du délai d'inhumation des corps déposés à l'IML et aux pompes funèbres de la ville avait été fixée au 1er septembre, puis repoussée finalement au 3 septembre.

Après ce rappel des faits, M. Jean-Paul Proust a exposé les mesures qu'il a décidé de prendre afin d'améliorer, à l'avenir, le dispositif de gestion de crise.

Il a annoncé qu'il avait tout d'abord décidé d'élaborer un plan d'intervention « chaleur extrême », dont le champ d'intervention avait été élargi pour prendre en compte les périodes de grand froid.

Il a déclaré que ce plan, visant désormais les « températures extrêmes » était d'ores et déjà opérationnel pour la partie « grand froid », et que le volet « chaleur extrême » serait mis en oeuvre au cours des prochains mois.

D'une manière plus générale, M. Jean-Paul Proust a observé que les crises et catastrophes que connaît notre société prennent des formes multiples et peuvent survenir à tout moment.

Il a considéré que le drame de cet été soulignait la nécessité d'une coordination active de tous les services en charge d'une mission de service public, dans le respect des compétences de chacun. Il a jugé qu'une coordination efficace ne s'improvisait pas le jour de l'apparition de la catastrophe, mais qu'elle se préparait en amont, par des contacts permanents et réguliers et par l'habitude de travailler en commun.

Il a indiqué qu'il avait décidé, en sa qualité de préfet de la zone de défense de Paris, et conformément aux récents textes donnant des compétences élargies au préfet de zone en la matière, de renforcer le dispositif de gestion de crise de la Préfecture de police de Paris. Il a ajouté que la décision de créer un état-major de sécurité civile doté d'un organisme de veille opérationnelle permanente, le « centre opérationnel zonal », avait même déjà été prise avant la crise de la canicule.

Il a précisé que ce centre, dont le rôle consistera à recueillir au niveau régional, 24 heures sur 24, toutes les informations provenant à la fois des sapeurs-pompiers, des policiers, des gendarmes, des autorités sanitaires, des différents services déconcentrés de l'Etat, des entreprises publiques de transports, d'EDF et de Gaz de France, de la météo, des opérateurs de télécommunications et des collectivités territoriales.

Il a indiqué qu'un état-major de sécurité civile, ayant une dimension interministérielle au niveau régional, sera constitué avec pour mission d'analyser les informations, d'en faire la synthèse et de les croiser ou de les compléter éventuellement par des consultations d'experts. Il a mis en avant la possibilité ainsi créée par cette nouvelle structure de mobiliser un réseau d'experts dans des domaines très variés, comme les risques technologique, sanitaire, alimentaire ou routier.

M. Jean-Paul Proust a considéré que cet état-major devrait permettre d'anticiper les crises et d'intervenir comme structure d'aide à la décision. Il a relevé que ce réseau d'experts s'appuiera sur les services de la préfecture de police, mais aussi sur les directions départementales et régionales des services déconcentrés de l'Etat relevant du préfet de la région d'Ile-de-France. Il s'est félicité à ce propos que le préfet de région lui ait apporté son entier soutien dans cette démarche nouvelle. Il a également indiqué que les collectivités territoriales, qui ont un rôle majeur à jouer dans la gestion de crise, seront associées à la constitution de ce réseau d'experts et bénéficieront en retour des informations nécessaires pour mobiliser toutes les compétences de leurs services.

Il a observé que ces deux structures, l'état major d'une part et le centre opérationnel zonal d'autre part, seront opérationnelles au tout début de l'année 2004.

Il a annoncé que ses services mettraient, dès l'année prochaine, à la disposition de l'ensemble des maires d'Ile-de-France, chaque matin par courrier électronique, un bulletin synthétique d'information ayant pour objet de souligner les risques prévisibles.

Le préfet de police de Paris a déclaré que la crise que nous venons de traverser n'avait fait que conforter son entière détermination à moderniser le dispositif de sécurité civile de Paris, comme de celui de sa zone de défense, et de l'étendre aux risques sanitaires. Il a affirmé qu'il tiendrait le plus grand compte des recommandations ou propositions de la mission d'information.

M. Jacques Pelletier, président, a remercié M. Jean-Paul Proust pour son intervention. Il a noté que, lors de la canicule du mois d'août, aucun service n'avait pu disposer d'une vision globale de la crise. Il s'est également félicité des décisions d'ores et déjà prises pour renforcer les dispositifs de gestion de crise.

M. Hilaire Flandre, rapporteur, s'est demandé si, face à un phénomène climatique d'une telle ampleur, un meilleur fonctionnement de l'ensemble des services aurait réellement pu réduire de façon sensible ce bilan tragique.

Mme Evelyne Didier a considéré, lorsque l'on évoque le sort des personnes isolées victimes de la canicule, qu'il convenait de ne pas culpabiliser les familles. Elle a également souligné que les catastrophes climatiques des dernières années étaient souvent survenues la nuit, en fin de semaine ou lors des périodes de vacances. Elle a salué le rôle des maires qui ont alors fait preuve d'une grande disponibilité et répondu à l'attente spontanée de la population.

M. Alain Gournac s'est félicité du renforcement des moyens d'alerte. Il a toutefois mis en garde contre le risque qui consisterait, une fois l'alerte donnée, à se défausser sur les élus locaux pour agir. Il a exprimé le besoin, pour les maires, de pouvoir compter, dans ce type de circonstances, sur des interlocuteurs disponibles.

M. Serge Lepeltier, rapporteur, s'est demandé si le nouveau dispositif d'alerte mis en oeuvre à l'initiative de M. Jean-Paul Proust ne risquait pas de s'avérer trop centralisé.

Au-delà de la difficulté à accéder à l'information et à la faire remonter à l'intérieur des services publics, M. Claude Domeizel s'est interrogé sur l'utilisation qui avait pu être faite des informations fournies par la presse. Il a considéré, par ailleurs, qu'il convenait de faire preuve d'une grande prudence dans la gestion de l'information. Mettant en avant son expérience d'élu local, il a regretté la multiplication des alertes météo correspondant à des phénomènes météorologiques mineurs. Il a noté que, si les maires étaient bien souvent destinataires de messages d'alerte, ils se retrouvaient fréquemment seuls pour agir.

Mme Valérie Létard, rapporteur, a estimé qu'il convenait que les systèmes d'alerte soient organisés pour identifier au préalable les personnes isolées ou fragiles. Elle a salué l'action des intervenants sociaux sur le terrain et souligné la nécessité d'accroître la densité du maillage du territoire par les réseaux de proximité.

M. Francis Giraud est revenu sur les propos rapportés par M. Edouard Couty, lors de son audition, qui faisaient part d'un exemple de méconnaissance, par un directeur d'hôpital, des événements survenus dans son établissement. Il a considéré, d'une façon générale, que le problème de la responsabilité se trouvait posé dans notre pays.

Répondant à M. Hilaire Flandre, rapporteur, M. Jean-Paul Proust a estimé que la canicule n'était pas une fatalité face à laquelle toute action apparaissait vaine. Il a néanmoins considéré que, dans une situation de ce type, le bilan final n'aurait pas été très différent si la réaction à la crise avait été mieux adaptée.

Répondant à M. Serge Lepeltier, rapporteur, M. Jean-Paul Proust a précisé que les dispositifs qu'il souhaitait mettre en place en Ile-de-France existaient déjà ailleurs. Il a mis en avant, à cet égard, l'exemple de la zone de défense du sud-est où fonctionne un système d'alerte qui a fait ses preuves. Il a également considéré, qu'au lieu de multiplier les différents dispositifs d'alerte, il convenait plutôt de mettre en place une structure unique associant l'ensemble des services concernés.

Répondant à plusieurs intervenants, M Jean-Paul Proust a considéré qu'il fallait veiller à ne pas banaliser le déclenchement des alertes.

Répondant à M. Claude Domeizel, M. Jean-Paul Proust a observé que la presse n'était pas apparue, lors de la crise de la canicule, comme une source d'informations plus fiable que les autres.

M. Hilaire Flandre, rapporteur, s'est interrogé sur l'isolement d'une partie des victimes et sur l'absence de réaction de certaines familles.

M. Jean-François Picheral et Mme Evelyne Didier ont estimé qu'il convenait de ne pas généraliser des exemples isolés et qu'il n' y avait pas eu d'abandon des familles.

M. Jacques Pelletier, président, a jugé que les exemples d'abandon par les familles étaient très minoritaires.

Répondant à l'ensemble des intervenants, M. Jean-Paul Proust a observé que, pour un total de 2.000 décès constatés à Paris, seuls 100 corps n'avaient pas été réclamés, du fait pour l'essentiel de l'absence totale de famille.

Audition de Mme Michèle Papallardo, présidente de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME)

La commission a enfin procédé à l'audition de Mme Michèle Papallardo, présidente de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME).

M. Jacques Pelletier, président
, a invité l'intervenante à exposer les interactions entre le réchauffement climatique et la canicule, ainsi qu'à présenter les actions menées par l'ADEME en la matière.

Mme Michèle Papallardo a expliqué que l'ADEME s'intéressait aux effets sur la santé de la chaleur et de la pollution de l'air, notant que la canicule de cet été avait provoqué les pics de pollution les plus importants depuis que sont effectuées des mesures. Elle a indiqué que l'ADEME étudiait également les problèmes liés à la production d'électricité en période de forte chaleur, rappelant à cet égard que l'été 2003, et plus particulièrement la semaine du 15 août, avait connu un « effet de ciseau » alliant une réduction de l'offre (du fait que certaines centrales nucléaires ne fonctionnaient pas car des opérations de maintenance y étaient menées, mais aussi en raison de l'élévation de la température des cours d'eau rendant problématique le refroidissement des réacteurs nucléaires) à une augmentation de la demande (les besoins en climatisation ayant fortement augmenté). Elle a souligné toutefois que beaucoup de pays avaient connu un tel phénomène (Espagne, Italie, Pays-Bas, Etats-Unis ...) et que la France avait été comparativement plutôt moins affectée.

Elle a ensuite décrit les trois types d'activités menées par l'ADEME concernant la canicule. La première de ces actions, a-t-elle indiqué, consiste à anticiper le phénomène pour chercher à obtenir le meilleur « confort d'été » possible. S'agissant de la climatisation, elle a déclaré que l'action de l'ADEME visait à en limiter l'utilisation (en informant le citoyen des effets négatifs des fluides frigorigènes sur l'effet de serre, et donc sur le changement climatique), à la réguler (en préconisant un étiquetage des climatiseurs indiquant leur puissance ou la fixation de l'écart optimal entre température intérieure et température extérieure) et à en améliorer les performances (en soutenant la recherche et l'innovation pour des climatiseurs fonctionnant à l'énergie solaire). Elle a révélé par ailleurs que l'ADEME remettrait prochainement à son ministère de tutelle un rapport proposant un certain nombre de mesures (informatives ou normatives) en la matière.

S'agissant des activités concernant d'autres domaines que la climatisation, elle a précisé que l'ADEME soutenait notamment les actions menées en matière d'architecture bioclimatique, qu'il s'agisse de la construction, de la réhabilitation ou de l'équipement des bâtiments publics et privés. Elle a estimé par ailleurs que la canicule était liée au changement climatique, tout en reconnaissant qu'aucune relation entre les deux phénomènes n'avait encore été scientifiquement établie.

Elle a ensuite décrit le deuxième domaine d'intervention de l'ADEME, lié à la pollution de l'air. Constatant que les gaz d'échappement provenant des transports étaient majoritairement responsables de ce phénomène, elle a souligné que la prise de mesures lors des pics de pollution estivaux intervenait trop tard, les restrictions de circulation des véhicules ne pouvant notamment avoir d'effets substantiels du fait que la circulation est à cette époque beaucoup moins dense que le reste de l'année. Elle a mis en exergue l'importance d'une politique globale qui serait développée tout au long de l'année et concernerait des sujets tels que le gazole, les transports en commun ou les véhicules propres.

Abordant enfin le troisième domaine d'intervention de l'ADEME, concernant l'alimentation électrique, elle a annoncé une augmentation inévitable de la consommation d'électricité ces prochaines années, liée à des besoins de rafraîchissement accrus et rendant nécessaire la mise en place d'une véritable politique d'efficacité énergétique, indiquant à cet égard que le plan climat contenait des mesures de maîtrise de la demande d'énergie qui figureraient dans le futur projet de loi d'orientation de l'énergie.

Elle s'est félicitée que les conseils d'économie d'énergie préconisés par l'ADEME auprès de la population durant la canicule aient permis d'économiser, selon les estimations du Réseau de transport d'électricité (RTE), 300 mégawatts, soit l'équivalent de la consommation quotidienne d'une ville comme Rennes, auxquels se sont ajoutés 1 000 mégawatts économisés par les entreprises.

Elle a insisté sur la nécessité de développer les énergies renouvelables, et tout particulièrement l'énergie solaire, qu'elle soit géothermique ou photovoltaïque, afin de réduire l'utilisation d'énergie électrique d'origine nucléaire à chacun des pics quotidiens de consommation (soit vers 13h00 et vers 22h00).

Elle a fait observer que l'ensemble de ces réflexions, qui concernent en l'occurrence les périodes de forte chaleur, pourraient tout aussi bien s'appliquer à celles de grand froid.

M. Serge Lepeltier, rapporteur, s'est alors interrogé sur l'existence d'un lien entre un réchauffement climatique général se traduisant par un accroissement de la température moyenne de 1,5 à 5° au cours du siècle à venir et une augmentation potentielle des pics de chaleur tels que celui de l'été 2003. Il a souhaité savoir à quelle échéance les mesures engagées ou préconisées par l'ADEME produiraient leurs effets, se demandant s'il ne faudrait pas nécessairement trouver un équilibre entre des mesures d'anticipation et des mesures d'adaptation. Il a regretté que la construction des bâtiments publics (mairies, hôpitaux, maternités, maisons de retraite ...) privilégie l'utilisation de surfaces vitrées favorisant l'élévation de la température. Il a envisagé de réserver systématiquement des pièces climatisées pour accueillir des personnes malades ou âgées dans les bâtiments les hébergeant.

Mme Monique Papon s'est inquiétée de l'absence d'une véritable politique de santé environnementale en France, estimant que d'autres pays, à l'instar de la Grèce, avaient beaucoup travaillé en ce domaine.

Constatant que les effets de la canicule avaient été accrus par le peu d'amplitude relevée entre les températures diurnes et les températures nocturnes, empêchant tout rafraîchissement durant la nuit, M. Hilaire Flandre, rapporteur, s'est demandé si ce phénomène risquait de se reproduire et si des mesures pourraient être prises à cet égard.

Mme Evelyne Didier s'est interrogée sur la fatalité d'un tel phénomène, que l'on ne rencontre pas dans les régions désertiques telles que le Sahara, et sur la façon dont d'autres populations parviennent à le supporter régulièrement.

En réponse à ces interventions, Mme Michèle Papallardo a apporté les éléments de précision suivants :

- s'agissant du peu d'écart de température constaté entre la nuit et le jour en période de canicule, elle a reconnu qu'il était impossible de prédire si ce phénomène perdurerait ;

- s'agissant des relations entre élévation de la température moyenne et rémanence des pics de chaleur, elle a observé qu'une année donnée pouvait enregistrer une moyenne des températures normale tout en ayant connu de forts pics de chaleur ou de froid. Elle a considéré qu'il y avait d'importants risques d'accentuation de ces phénomènes paroxystiques, en toute région, estimant qu'ils seraient particulièrement difficiles à supporter ;

- s'agissant des informations fournies à la population, elle est convenue qu'il était délicat d'expliquer que le réchauffement pouvait être à la fois naturel et provoqué par des activités humaines, ainsi que de faire la part entre les deux phénomènes ;

- s'agissant des actions préconisées ou engagées par l'ADEME, elle a reconnu qu'elles n'auraient pas d'effet immédiat, tout en insistant sur l'urgence de prendre des mesures dès à présent afin d'anticiper les conséquences des dérèglements climatiques à venir ;

- s'agissant des bâtiments publics, elle a regretté que leur construction s'inspire trop rarement de considérations bioclimatiques, préconisant certaines mesures allant en ce sens (formation des architectes, fixation de normes et référents dans les cahiers des charges ...). En ce qui concerne le bâti existant, elle a estimé qu'il était possible d'en améliorer l'isolation à peu de frais (par exemple en équipant les bâtiments d'auvents ou de volets). Elle a par ailleurs précisé que l'ADEME travaillait actuellement à intégrer dans la réglementation thermique 2005 des éléments se rapportant à la canicule. Elle a regretté de ne pouvoir chiffrer la proportion des salles qu'il faudrait climatiser dans les bâtiments collectifs accueillant des personnes malades ou âgées. Indiquant toutefois que le taux de climatisation était actuellement quasi nul pour les particuliers et d'environ un tiers dans les entreprises du secteur tertiaire, elle a mis en garde contre un risque de prolifération de systèmes de climatisation dont la qualité ne serait pas toujours satisfaisante ;

- s'agissant de l'absence d'une politique de santé environnementale, elle a regretté que les relations entre les ministères de la santé et de l'environnement soient aussi distendues et a indiqué que l'ADEME travaillait en liaison avec l'Agence française de sécurité sanitaire environnementale (AFSSE) récemment mise en place.

Mme Françoise Henneron s'est inquiétée des conséquences d'un hiver très froid cette année, rappelant qu'un grand nombre de foyers et de maisons de retraite est chauffé à l'électricité et supporterait très difficilement des coupures d'alimentation.

Mme Michèle Papallardo est convenue que des problèmes d'alimentation en électricité risquaient de se poser de la même façon en cas de pic de chaleur comme de froid, un « effet de ciseau » alliant une hausse de la demande à une baisse de la production se produisant dans les deux cas. Elle en a déduit qu'il serait souhaitable de réduire la consommation d'électricité d'origine nucléaire et de développer les sources d'énergie renouvelable, afin de ne pas être entièrement dépendant d'un système d'alimentation électrique très sensible aux fortes augmentations de la demande en énergie. Elle a indiqué qu'EDF préparait actuellement des plans d'action visant à gérer de tels phénomènes.