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OFFICE PARLEMENTAIRE D'ÉVALUATION DES CHOIX SCIENTIFIQUES ET TECHNOLOGIQUES (OPECST)

Mercredi 14 novembre 2001

- Présidence de M. Jean-Yves Le Déaut, député, président.

Energie - Etat actuel et les perspectives techniques et économiques des énergies renouvelables - Examen du rapport

L'Office a procédé à l'examen du rapport sur les énergies renouvelables de M. Jean-Yves Le Déaut et de M. Claude Birraux, députés.

M. Jean-Yves Le Déaut, président, rapporteur, a indiqué que l'évolution du paysage énergétique français, européen mais aussi mondial est soumise à différentes contraintes.

La première, qui est d'ordre international, est celle de la lutte contre le changement climatique et la mise en application de la stratégie européenne de développement durable. Deux autres contraintes fondamentales sont la sécurité d'approvisionnement et la prise en compte des besoins d'accession à l'énergie, et en particulier à l'électricité, de 2 milliards de personnes dans le monde, qui en sont actuellement privées.

Le développement des énergies renouvelables devrait permettre de répondre partiellement à ces problèmes, sans toutefois les résoudre totalement.

Les mesures récemment prises sur l'éolien devraient satisfaire en grande partie à l'incitation européenne correspondant à la directive 2001/77/CE du 27 septembre 2001, même s'il sera nécessaire de trouver des compléments. Mais cette approche ne permettra pas de répondre aux autres contraintes, et en particulier pour la France, à la réduction des émissions de gaz carbonique et à l'amélioration de l'indépendance énergétique.

Les domaines les plus concernés en France sont en effet le transport routier et la production de chaleur dans le résidentiel tertiaire. Dans ces deux domaines, une réponse possible viendra d'un développement significatif de l'utilisation de la biomasse et de l'énergie solaire thermique. La rentabilité d'un programme ambitieux sur les biocarburants et sur l'énergie solaire thermique serait considérablement plus élevée que celle que l'on peut escompter du développement de l'éolien.

M. Claude BIRRAUX, député, rapporteur, a indiqué que l'éolien n'était pas en France, ni dans aucun pays développé, la solution miracle pour couvrir l'augmentation des besoins en électricité. Les tarifs de rachat du courant produit par les éoliennes décidé en juin 2001, qui n'appellent pas de remarque particulière dans la mesure où il existe un plafond de capacité de 1500 MW, obéissent à l'impératif de diversification énergétique en favorisant un développement raisonné de l'éolien dans notre pays. Toutefois, la politique actuelle nécessite d'être complétée d'urgence dans deux directions. En premier lieu, il conviendrait de chiffrer avec précision les coûts de développement du réseau et de mettre au point des schémas départementaux d'implantation, en coopération avec les collectivités locales. En second lieu, il convient d'engager une action qui aurait dû être menée à bien avant l'octroi d'aides aux exploitants d'éoliennes, à savoir la structuration de l'industrie française de l'éolien de manière qu'elle puisse fournir un marché français en expansion et prendre place sur les marchés d'exportation.

M. Jean-Yves Le Déaut, président, rapporteur, après avoir souhaité l'accroissement de la coopération scientifique dans le domaine de l'énergie solaire thermodynamique, qui est une technique d'avenir pour la production d'électricité dans les pays à fort ensoleillement, a indiqué que pour participer à la préparation d'une rupture technologique dans le solaire photovoltaïque, rupture qui viendra vraisemblablement des couches minces ou des cellules photovoltaïques plastiques polymères, utilisées comme panneaux solaires ou comme additifs aux matériaux de construction, la France doit renforcer sa recherche.

Mais l'un des gisements les plus importants d'énergie renouvelable est sans aucun doute le solaire thermique. Il permet en effet des économies considérables dans le domaine de l'eau chaude sanitaire et trouve des applications intéressantes avec les planchers solaires directs. En outre, de nouvelles applications de grand avenir sont la climatisation solaire, la réfrigération solaire thermique, ainsi que les technologies de transport direct de froid et de chaleur.

Pour faire face à l'explosion prochaine des marchés du solaire thermique et de la climatisation solaire, dans un contexte où les grandes entreprises étrangères dominent, des actions résolues de soutien direct ou indirect à l'industrie française doivent constituer une priorité de l'action des pouvoirs publics.

Compte tenu de l'importance de la consommation d'énergie dans le résidentiel et le tertiaire et du fait que sa croissance est la plus rapide de tous les secteurs, supérieure y compris à celle des transports, l'habitat bioclimatique doit également être développé et en particulier dans les logements sociaux et les bâtiments publics. Les rapporteurs ont proposé le lancement d'un plan mobilisateur intitulé plan « Face-Sud »qui comprend un volet solaire thermique et un autre volet thermique-photovoltaïque

M. Claude Biraux, député, rapporteur, a indiqué que, compte tenu de son sol et de son climat privilégiés, ainsi que de la force de l'agriculture française, la biomasse constitue un atout essentiel de la France pour rationaliser sa consommation d'énergie dans l'habitat et les transports.

Une augmentation des surfaces agricoles consacrées aux cultures énergétiques est possible à hauteur de 3 à 4 millions d'hectares, qui pourraient fournir l'équivalent de 10 millions de tonne à équivalent pétrole (Mtep) soit 20 % de la consommation d'hydrocarbures des transports.

La France devrait, à l'instar de certains pays, imposer dans les plus brefs délais un quota de biocarburants dans l'essence, étendre le bénéfice de l'exonération de taxe intérieure sur les produits pétroliers aux huiles végétales brutes et mettre en place des incitations fiscales pour toute la filière des biocarburants. Il importe, simultanément, d'accélérer le développement des différentes filières de biocarburants, au plan industriel comme au plan de la recherche où les applications s'appuyant sur la gazéification de la biomasse et les procédés enzymatiques de la production d'éthanol à partir de ligno-cellulose doivent être rapidement mises au point.

Le plan mobilisateur « Terres-Energie », dont les rapporteurs ont proposé l'adoption par l'Office, a pour objectif de permettre l'économie de 20 millions de tonnes à équivalent pétrole d'hydrocarbures en 2010.

Mme Michèle Rivasi, députée, après avoir exprimé sa satisfaction de voir l'Office présenter un rapport sur les énergies renouvelables, a insisté sur le fait que les actions en ce domaine devaient s'insérer dans une politique globale de maîtrise de l'énergie et qu'un organisme unique devrait être chargé de coordonner tous les aspects de cette politique.

Elle a regretté que l'accent n'ait pas été mis sur les possibilités de développement de l'énergie éolienne dans les îles. Elle a également critiqué l'insuffisance des incitations en faveur de l'équipement des bâtiments publics en capteurs photovoltaïques qui auraient dû jouer un rôle moteur dans le développement de cette source d'énergie.

Elle a enfin exprimé son accord avec les « plans mobilisateurs » suggérés par les rapporteurs.

M. Christian Bataille, député, a également insisté sur le rôle mobilisateur que devraient jouer les collectivités territoriales à travers l'équipement en énergies renouvelables des bâtiments publics et des habitats collectifs.

Il s'est inquiété des répercussions pour les consommateurs, des hausses de tarifs qui résulteront du prix d'achat obligatoire par EDF des énergies renouvelables.

Il a estimé que ce n'était pas aux consommateurs modestes, souvent déjà en difficultés financières, de supporter les efforts entrepris dans ce domaine, mais à la collectivité nationale toute entière à travers le budget.

M. Claude Gatignol, député, a estimé que les rapporteurs avaient eu raison de dégager clairement des priorités, car le problème du financement des nouvelles sources d'énergie est une question primordiale, qui ne doit pas entraîner de perte de compétitivité pour EDF. Il a également souhaité qu'une distinction très nette soit faite entre les énergies renouvelables raccordables aux réseaux d'électricité celles qui sont à usage purement domestique.

Après les réponses des rapporteurs, le rapport a été adopté à l'unanimité des membres présents.