Mardi 23 mars 2010

- Présidence de M. Joël Bourdin, président -

Pacte social - Audition de M. Bertrand Collomb, président d'honneur du Groupe Lafarge, membre de l'Institut

La délégation a procédé à l'audition de M. Bertrand Collomb, président d'honneur du Groupe Lafarge, membre de l'Institut.

A titre liminaire, M. Joël Bourdin, président, rapporteur, a remercié M. Bertrand Collomb pour sa présence devant la délégation à la prospective, dans le cadre des auditions sur le thème du pacte social qui fait l'objet d'une saisine par le Président du Sénat.

Répondant à un questionnaire que M. Joël Bourdin et Mme Patricia Schillinger, rapporteurs, lui avaient préalablement adressé, M. Bertrand Collomb a introduit son propos en constatant que les études sociologiques concluaient à une attitude des Français différente face au travail, symptomatique d'une perte de valeur du travail, en comparaison d'autres pays. De son point de vue toutefois, ce constat général contraste avec la réalité de l'engagement des collaborateurs sur le terrain. Même si les plus jeunes souhaitent améliorer l'équilibre entre leur vie professionnelle et leur vie privée, ils n'en demeurent pas moins prêts à s'engager lorsque la situation l'exige.

S'agissant du dialogue social, il existe là aussi un écart entre les constats généraux qui peuvent être faits sur le dialogue social national, et la réalité qui tend plutôt à démontrer que, lorsque le dialogue porte sur un problème concret, il se déroule généralement de façon satisfaisante. Le dialogue social ne peut en effet être efficace que s'il porte sur l'amélioration de situations précises. En revanche, la mondialisation rend les entreprises tributaires de problèmes de concurrence qui leur sont spécifiques, ce qui constitue un obstacle au dialogue social au niveau des branches, surtout pour les grandes entreprises.

Concernant le fonctionnement du marché du travail, bloqué par une peur du changement qui a de lourdes conséquences, il diffère fondamentalement du fonctionnement du marché du travail américain. Cette peur du changement résulte de l'expérience historique des chocs pétroliers, suivis par une forte hausse du chômage qui s'est poursuivie pendant deux décennies. La crispation sur la protection des emplois existants est très préjudiciable car elle contraste avec la mobilité des conditions économiques et tendrait à freiner les investissements étrangers en France. L'incertitude sur les conditions du changement est plus grave encore que le coût du changement lui-même : le risque de guérilla syndicalo-judiciaire, pendant un temps indéterminé, a un impact négatif sur la compétitivité française.

La sécurité de l'emploi est trompeuse, puisqu'elle engendre, au contraire, une insécurité pour les « outsiders », en marge du marché du travail. L'emploi à vie est aujourd'hui un modèle dépassé en raison des variations des conditions de concurrence sur les marchés. Par exemple, si le marché du ciment est relativement stable, malgré une baisse de la consommation sur longue période, il existe d'autres marchés susceptibles de s'effondrer dans un laps de temps très bref, ce qui nécessite une forte capacité d'adaptation.

S'agissant de l'association des salariés à la gouvernance des entreprises, elle doit être conçue comme un moyen de rapprocher le lieu des décisions de leur point d'application, afin que la stratégie de l'entreprise soit mieux comprise et anticipée. Pour autant, il convient d'éviter autant que possible le formalisme d'une législation qui ferait de la participation des salariés un rituel sans substance. Moins le dialogue est formalisé, plus il est susceptible d'aboutir à des résultats concrets.

De manière générale, la vigueur du dialogue social, qui doit s'apprécier qualitativement, repose davantage sur les pratiques individuelles des entreprises que sur l'existence ou non d'une législation contraignante. Si l'on prend l'exemple du bilan social des entreprises, les engagements chiffrés qu'il comporte ne sont pas susceptibles d'indiquer véritablement si l'entreprise pratique un management social efficace.

La participation des syndicats aux décisions de l'entreprise se heurte en France à leur absence de tradition gestionnaire et parfois à leur opposition à cette démarche. En Allemagne, si la participation des syndicats est susceptible de ralentir certaines évolutions, on observe néanmoins qu'en période de situation de crise pour l'entreprise, elle est utile à la compréhension et à la résolution en commun des problèmes. De façon générale, la participation des salariés fait courir le risque d'une certaine ritualisation des rapports sociaux, les relations entre administrateurs et dirigeants étant, par exemple, modifiées par la simple présence des salariés dans les conseils.

A propos de l'instauration des 35 heures, son impact doit être déploré pour deux raisons :

- d'une part, l'augmentation des coûts salariaux relatifs de la France par rapport à l'Allemagne porte préjudice à notre compétitivité : s'il est impensable de s'aligner sur les coûts de certains pays en développement, il est en revanche indispensable de prendre en compte l'environnement concurrentiel européen lorsque l'on prend des décisions telles que celle de réduire le temps de travail ;

- par ailleurs, les 35 heures ont modifié le rythme de travail des cadres, ce qui est un facteur pris en compte par les groupes internationaux lorsqu'ils veulent investir en France.

Enfin, l'amélioration du pacte social passe par une prise en considération accrue de la question de l'employabilité. La législation a engendré une formation professionnelle continue coûteuse et inefficace.

Un débat s'est ensuite instauré.

Répondant à Mme Patricia Schillinger, rapporteur, qui demandait des précisions sur l'impact des 35 heures, en soulignant l'existence d'un grand nombre de salariés rémunérés au niveau du SMIC tandis que les charges des ménages augmentent continûment, M. Bertrand Collomb a estimé que la compétitivité était obérée moins par les niveaux de salaires pratiqués que par le montant des charges et des impôts, incriminant notamment la taxe professionnelle. Il a rappelé que le sentiment d'une baisse de pouvoir d'achat provenait, d'une part, d'une diminution du revenu disponible après dépenses obligatoires, et, d'autre part, de l'augmentation des besoins de consommation en raison de la diffusion des nouvelles technologies. L'augmentation des salaires n'est tenable que s'il y a augmentation de la productivité.

Répondant à M. Joël Bourdin, président, rapporteur, il a précisé que la productivité générale provenait, d'une part, de l'amélioration des installations, d'autre part, des économies d'énergie et, enfin, de l'organisation du travail et de la polyvalence des salariés.

Puis M. Joseph Kergueris a énoncé deux remarques :

- il a estimé que la taxe professionnelle était la contrepartie de services assurés par les collectivités locales et que ces services étaient de nature à améliorer la productivité des entreprises ;

- les 35 heures n'ont pas seulement obéré les coûts mais aussi les conditions de travail.

En réponse, M. Bertrand Collomb a maintenu que les contraintes législatives uniformes étaient sources de difficulté. Si la diminution du temps de travail est une tendance historique forte, elle a été bousculée en France par une démarche inadaptée. Faire évoluer empiriquement le temps de travail en fonction de l'évolution de la productivité et de la concurrence aurait été préférable.

Quant à la taxe professionnelle, elle comporte deux défauts majeurs :

- elle est concentrée sur certaines entreprises qui ne sont pas nécessairement celles qui bénéficient le plus des services rendus par les collectivités : c'est pourquoi un système de redevance pour services rendus pourrait être envisagé ;

- la taxe influe directement sur le prix de revient de l'usine ce qui est très défavorable à la localisation des investissements étrangers en France.

Répondant à M. Jean-François Mayet, qui demandait s'il existait réellement un pacte social compte tenu des rigidités existantes, résultant notamment des 35 heures, M. Bertrand Collomb a insisté sur la nécessité de ne pas partir battu d'avance, c'est-à-dire de dépasser un certain catastrophisme propre à notre pays. La responsabilité de ce catastrophisme est partagée :

- les entreprises noircissent parfois le tableau pour être mieux à même d'y réagir ;

- les politiques prennent des positions qui peuvent aggraver les situations ;

- le matraquage médiatique, notamment sur le thème de la crise, contribue au pessimisme ambiant.

Le pacte social ne peut aujourd'hui être construit qu'autour de l'objectif commun d'améliorer la compétitivité de l'économie, en aidant les salariés à évoluer dans un sens compatible avec le contexte concurrentiel et l'évolution des conditions économiques.

Puis M. Gérard Miquel a défendu l'intérêt de la réduction du temps de travail, qui a permis d'améliorer la productivité de certaines entreprises, et qui constitue un vrai progrès dans certains métiers pénibles. S'agissant de la taxe professionnelle, il a rappelé qu'elle permettait aux collectivités territoriales d'investir, ce dont profitaient directement et indirectement, par le biais d'une amélioration de leur environnement, les entreprises.

M. Bertrand Collomb a estimé que la fiscalité locale devait être clarifiée par l'attribution à chaque type de collectivité du produit d'un impôt, afin de créer un sentiment de responsabilité. Par ailleurs, la question de la réévaluation des bases demeure toujours posée.

Répondant à M. Joël Bourdin, président, rapporteur, qui se demandait si la mondialisation avait modifié les termes du pacte social à l'intérieur du groupe Lafarge, M. Bertrand Collomb a souligné que l'entreprise s'était développée en maintenant son attachement à la culture française, qu'elle s'efforçait d'exporter. Les implantations étrangères de Lafarge ayant dynamisé son activité en France, elles ne sont pas perçues comme une menace par les salariés.

En conclusion, répondant à M. Joël Bourdin, président, rapporteur, qui l'interrogeait au sujet de l'idée de répartir la valeur ajoutée en trois tiers, M. Bertrand Collomb a tout d'abord indiqué que l'augmentation des résultats des entreprises bénéficiait en premier lieu à leurs clients, en raison de l'existence d'une forte concurrence. Par ailleurs, la globalisation financière place les actionnaires en position de force. Il n'existe en réalité pas de répartition idéale uniforme de la valeur ajoutée. En revanche, il faut absolument intéresser les collaborateurs des entreprises aux résultats de celles-ci. S'agissant des mécanismes d'intéressement et de participation, la superstructure législative mériterait, là encore, d'être simplifiée.

Mercredi 24 mars 2010

- Présidence de M. Joël Bourdin, président -

Pacte social - Audition de M. Francis Mer, ancien ministre de l'économie et des finances, président du conseil de surveillance du groupe Safran

La délégation a procédé à l'audition de M. Francis Mer, ancien ministre, président du conseil de surveillance du groupe Safran.

A titre liminaire, M. Francis Mer a souhaité aborder le contexte économique et démographique général, préalable nécessaire à une réflexion prospective sur le pacte social dans l'entreprise en France.

L'économie mondiale connaît, et connaîtra longtemps, une phase de développement sans précédent, avec l'amélioration constante du niveau de vie des Chinois, des Indiens, des Brésiliens ou des Africains.

Cependant, le monde occidental sera découplé de cette tendance, en raison du volume de l'endettement contracté ces dix dernières années. Une récente étude du cabinet de consultants Mac Kinsey a évalué le volume et l'évolution, ces vingt dernières années, de la dette de tous les acteurs, publics ou privés, au sein de différents pays. Il ressort de cette étude que les champions de l'endettement sont le Japon, passé d'une dette cumulée représentant 3,9 fois le PIB (produit intérieur brut) en 1990 à 4,7 PIB en 2009, suivi dorénavant de près par l'Angleterre, passée de 2,2 PIB à 4,66 PIB dans le même intervalle, puis de l'Espagne passée de 1,3 PIB à 3,66 PIB. L'Italie et la France ont vu leur endettement total progresser de 2 PIB en 1994-1995 à 3,2 PIB en 2009. Enfin, les Etats-Unis et l'Allemagne sont passés, respectivement, de 2 PIB à 3 PIB et de 2,7 PIB à 2,9 PIB au cours de ces vingt dernières années. En comparaison, la situation des pays émergents apparaît « confortable », puisque l'endettement total de la Chine représente 1,6 PIB, celui de l'Inde, 1,3 PIB, celui de la Russie, 0,7 PIB et, enfin, celui du Brésil, 1,4 PIB.

Les pays industrialisés ont connu une forte accélération de leurs taux d'endettement, non pas tant en raison des interventions des Etats, somme toute raisonnables jusqu'à la crise actuelle, mais à cause du comportement des ménages et des entreprises, y compris financières. Par exemple, l'endettement des foyers espagnols est passé de 30 % du PIB en 1990 à 90 % en 2009.

Cet état de fait est d'autant plus problématique qu'il n'a même pas entrainé, ces dix dernières années, une croissance moyenne annuelle du PIB par tête appréciable, compte tenu de l'impact de la crise récente.

En conséquence, le contexte des vingt prochaines années sera marqué par la nécessité du désendettement. Si, jusqu'à la fin 2010, on peut attendre en France une reprise technique liée à la nécessité de reconstituer les stocks, le pronostic est moins favorable pour la suite.

Outre le désendettement, le deuxième grand phénomène auquel nous serons confrontés est celui du vieillissement, moins, d'ailleurs, aux Etats-Unis où l'immigration, souvent choisie, s'effectue à un rythme relativement soutenu, qu'en Europe. La croissance s'en trouvera affectée de ce coté de l'Atlantique, tandis que se poseront les problèmes liés à la dépendance, dont la gestion est probablement constitutive du pacte social français et, s'il en est un, européen.

M. Francis Mer a indiqué que le troisième phénomène majeur, qui constitue aussi un défi, est celui du risque de tassement de la croissance potentielle. A cet égard, il a relevé que le dernier rapport de la Délégation à la prospective du Sénat, intitulé « L'économie française et les finances publiques à l'horizon 2030 », dont M. Joël Bourdin est l'auteur, avance, dans certains scénarios, le chiffre de 2 % de croissance potentielle pour les vingt prochaines années, rythme lui paraissant optimiste.

En effet, la croissance repose, à la fois, sur les gains de productivité et sur l'innovation. Rien ne sert d'augmenter la productivité si le nombre d'heures travaillées diminue pour un volume de production inchangé. Pour favoriser la croissance, les gains de productivité doivent donc être couplés avec un renouvellement de l'offre. Comment renforcer le potentiel d'innovation français ? Les 2 % du PIB français affectés à la recherche et au développement ne sont pas, comparativement, un mauvais chiffre, mais celui-ci n'est obtenu qu'à la faveur d'un effort public nettement supérieur à celui consenti dans d'autres pays.

En France, les entreprises ne consacrent pas suffisamment d'argent à la recherche, même si certaines d'entre elles échappent naturellement à cette critique. Il convient de changer cet état d'esprit pour dessiner le profil d'une entreprise conquérante, qui ose prendre des risques et ne se contente pas de gestion au quotidien. Pour parvenir à ce résultat, il faut d'abord comprendre que l'entreprise constitue d'abord un ensemble d'hommes et de femmes, et non pas une machine à gagner de l'argent pour ses actionnaires. Les ressources humaines ont une spécificité à mettre en avant et l'entreprise doit, pour accroître ses performances, améliorer les compétences de son personnel et reconnaître la qualité des contributions individuelles à l'entreprise.

En réponse à M. Joël Bourdin, qui s'est interrogé sur une hypothétique perte de la « valeur travail » en France, M. Francis Mer, ne rejoignant pas non plus ce constat, a estimé que la question est de passer du « je travaille pour vivre » au « je vis pour travailler ».

M. Jean-Luc Fichet a estimé, pour sa part, que la rémunération est un facteur important. Par ailleurs, il a observé, concernant la gestion de la ressource humaine, que le management a entraîné une augmentation des objectifs, des contraintes et du stress qui a même poussé certains salariés au suicide. M. Francis Mer s'est déclaré effaré par le cas de France Telecom, où les personnes se sont vues appliquer aveuglément certaines méthodes. Le management doit être un état d'esprit positif, que porte volontiers le « manager de terrain », hélas trop souvent évincé au profit du « manager d'entreprise », en proie aux exigences de la financiarisation. Il convient aujourd'hui de créer un environnement pédagogique conduisant le « top management » à changer de paradigme.

Puis, M. Francis Mer a précisé à M. Joël Bourdin que les syndicats de salariés ont un comportement de plus en plus responsable, que la réforme des retraites permettra d'éprouver.

Par ailleurs, M. Francis Mer a estimé que les employeurs français ont plus de difficultés à tenir compte de l'intérêt national dans leurs raisonnements que les employeurs américains ou allemands. En Allemagne, toutes les parties prenantes, qu'il s'agisse de l'Etat, des chefs d'entreprise ou des salariés, sont orientées vers le souci de la performance des entreprises nationales.

Mme Patricia Schillinger s'est alors interrogée sur les moyens dont les entreprises françaises disposent pour offrir aux chercheurs des rémunérations attractives. M. Francis Mer a estimé qu'il convient en priorité de faire une « pédagogie de la recherche » auprès des entreprises, sans laquelle une mesure telle que le crédit impôt recherche (CIR) risque d'être essentiellement affectée à l'amélioration des marges. Par ailleurs, les rémunérations des chercheurs, à commencer par celles du secteur public, ainsi que celles du monde enseignant, devraient être en effet rehaussées pour attirer les meilleurs profils.

M. Jean-Luc Fichet a estimé que les chercheurs sont, certes, insatisfaits du niveau de leurs salaires, mais qu'ils déplorent surtout la gestion de leur temps, l'entreprise souhaitant une rentabilité immédiate. Ainsi, les innovations dans le secteur pharmaceutique tendent à se faire plus rares. Par ailleurs, il a déploré que, dans la filière automobile, 80 % des équipements achetés par les constructeurs allemands proviennent d'équipementiers nationaux, tandis que ce ratio tombe à 20 % pour les constructeurs français.

M. Francis Mer a expliqué cette asymétrie par une gestion différente de la globalisation de la part des constructeurs allemands. Aussi bien les maisons mères que leurs sous-traitants ont décidé d'arrêter de fabriquer ce qui pouvait l'être à l'extérieur dans des conditions de qualité équivalente et pour un coût moindre. Les gains ainsi enregistrés ont été affectés à l'amélioration de la performance de l'entreprise, en « tirant » le personnel vers le haut. Il n'a donc pas été décidé de recourir massivement à une sous-traitance étrangère, mais d'acheter à l'étranger certains composants. En revanche, la sous-traitance s'est organisée en France, notamment dans le secteur automobile, sur la seule considération du facteur prix.

M. Joël Bourdin, président, ayant observé que la politique allemande avait requis, de la part des syndicats, une démarche réfléchie et prospective, M. Francis Mer a estimé que, en France, si les problèmes étaient posés en des termes économiquement clairs, les syndicats se montreraient, de même, généralement coopératifs.

M. Yvon Collin, après avoir fait part de son intérêt pour la place centrale de l'homme dans la vision du management de M. Francis Mer, a remarqué que la croissance de la dette privée, certes insoutenable, venait compenser des revenus insuffisants, rappelant que le modèle allemand reposait cependant sur des rémunérations contenues et une demande soutenue par les exportations. Dans ces conditions, il s'est posé la question du partage de la valeur ajoutée. M. Francis Mer a estimé qu'il fallait se préoccuper non seulement du partage, mais aussi de la création de la valeur ajoutée. M. Joël Bourdinprésident, ayant évoqué le problème connexe de la rémunération dans la fonction publique, M. Francis Mer a estimé que la politique de non remplacement d'un fonctionnaire sur deux, initiée avec succès à Bercy, peut rencontrer des limites, par exemple dans l'éducation nationale. Le problème de fond demeure, en dernière analyse, celui des rapports de « management » du cadre vis-à-vis de ses subordonnés, dont la critique pouvait être étendue, sous un certain angle, aux rapports des professeurs vis-à-vis de leurs élèves.

En conclusion, M. Francis Mer a insisté sur la nécessité de mobiliser le potentiel des hommes et des femmes aussi bien dans le secteur privé que public en créant les conditions de leur plaisir à travailler. Il a ajouté que l'employabilité est la première responsabilité de l'employeur, estimant, par exemple, que licencier une personne employée trente ans à faire la même chose, même avec un chèque conséquent, est irresponsable. Enfin, il a précisé, a propos du bilan des « 35 heures », que l'erreur de Mme Martine Aubry avait été de croire qu'une diminution du travail se traduirait automatiquement par une augmentation du nombre de postes. Cependant, aujourd'hui, compte tenu des aménagements apportés aux 35 heures et de l'attachement des salariés à cette formule, toute remise en cause apparaîtrait imprudente.