Mercredi 31 mars 2010

- Présidence de M. Claude Birraux, député, président -

Organismes extraparlementaires - Désignation de membres

L'Office a désigné Mmes Geneviève Fioraso, députée, et M. Brigitte Bout, sénateur, pour siéger au conseil d'administration de l'ANDRA (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs), conformément aux dispositions du décret n° 92-1391 du 30 décembre 1992, modifié par le décret 2010-47 du 13 janvier 2010.

Saisine sur l'état des recherches sur les perturbateurs endocriniens et leurs effets sur la santé

M. Claude Birraux, député, président, a indiqué que l'Office avait été saisi par la commission des affaires sociales du Sénat d'une étude sur l'état des recherches sur les perturbateurs endocriniens et leurs effets sur la santé.

Après que M. Jean-Claude Etienne, sénateur, vice-président, eut évoqué la candidature d'un sénateur comme rapporteur, sous réserve de confirmation lors d'une prochaine réunion, un débat s'est engagé, auquel ont pris part MM. Claude Birraux, député, président, Jean-Claude Etienne, sénateur, premier vice-président, et Daniel Raoul, sénateur, sur le contexte particulier de l'étude demandée, compte tenu de l'adoption récente par le Sénat d'une proposition de loi tendant à suspendre la commercialisation de biberons fabriqués à base de bisphénol A et des évaluations réalisées par l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA).

Nomination de rapporteurs

L'Office a désigné MM. Christian Bataille et Claude Birraux, députés, rapporteurs de l'évaluation du nouveau plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs (PNGMDR).

Audition de M. Alain Fuchs, président du CNRS

L'Office a procédé à l'audition de M. Alain Fuchs, président du CNRS, accompagné de MM. Joël Bertrand et Xavier Inglebert, directeurs généraux délégués respectivement à la science et aux ressources de l'établissement.

M. Alain Fuchs, après avoir souligné que le CNRS couvre tous les champs disciplinaires et doit tirer parti de cette continuité disciplinaire dans le cadre de la nouvelle organisation nationale de la recherche, et rappelé les missions nationales exercées par le CNRS, notamment pour les grands instruments de recherche, a évoqué les enjeux liés au positionnement du CNRS vis-à-vis de l'Agence nationale de la recherche (ANR), de l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (AERES), et des universités.

M. Alain Fuchs a ensuite présenté aux membres de l'Office la nouvelle organisation du CNRS découlant du décret n° 2009-1348 du 29 octobre 2009.

Il a rappelé qu'il s'agissait d'une réforme tendant à resserrer la direction de l'établissement, à en simplifier l'organigramme, avec notamment une structuration autour d'une dizaine d'instituts thématiques, et à en améliorer la gouvernance et la dynamique, notamment en ce qui concerne les aspects interdisciplinaires des activités de recherche et l'émergence de nouvelles thématiques.

Evoquant ensuite la stratégie du CNRS, il a tout d'abord souligné que celle-ci s'inscrivait dans un contexte d'évolution profonde de l'ensemble du système français de recherche publique avec, notamment, la création d'agences nouvelles, telles que l'ANR ou l'AERES, et la montée en puissance d'universités et de grandes écoles autonomes.

Dans ce contexte, le CNRS, grâce aux moyens financiers et humains dont il dispose, doit contribuer à l'émergence de politiques scientifiques locales sur de grands sites universitaires, avec de cinq à dix campus d'excellence, en partie financés par le grand emprunt national, ainsi qu'au renforcement des autres grandes universités, et favoriser une meilleure articulation, au niveau local, entre les activités de formation, de recherche et de valorisation. Cette évolution s'inscrit dans la stratégie de Lisbonne, afin de développer des sites universitaires « visibles » au niveau international.

M. Alain Fuchs a noté que des universités françaises, ainsi fortifiées, seraient plus attractives, s'agissant d'organiser des échanges avec les universités nord-américaines, lesquelles se montrent aujourd'hui intéressées par l'organisation de séjours à l'étranger pour leurs étudiants.

M. Alain Fuchs a ensuite rappelé les atouts dont dispose le CNRS comme acteur du renouveau de la recherche française :

- une bonne image en France et à l'étranger,

- une concentration de moyens (85 %) sur les quinze principaux sites, avec une participation active aux réflexions en cours sur les regroupements ou les fusions d'établissements (comme à Saclay et à Strasbourg), ou la création et la restructuration d'ensembles universitaires dans de grandes métropoles (Bordeaux, Toulouse, Montpellier, ...),

- une capacité d'expertise et de conseil très appréciable.

Il a estimé qu'il appartenait au CNRS, dans l'émergence de politiques scientifiques locales et la constitution en France de grands sites de recherche, à la fois complémentaires et concurrents, d'exercer plusieurs fonctions spécifiques importantes en tant que vigie, observateur, partenaire des établissements d'enseignement supérieur et des grandes écoles, instrument de cohésion nationale, élément d'attractivité, promoteur d'interdisciplinarité...

Il a fait valoir que cela excluait tant une dilution du CNRS dans l'université qu'un CNRS, au contraire, directif, qui impose ses vues à ses partenaires, l'établissement devant seulement répondre aux demandes de services de ces derniers et les inciter à réfléchir aux objectifs et aux modes de réalisation de leurs projets.

A l'issue de l'exposé de M. Alain Fuchs, M. Claude Birraux, député, président, s'est interrogé sur l'articulation, d'une part, entre les campus d'excellence, financés par le grand emprunt, et d'autres pôles de recherche, notamment les pôles de recherche et d'enseignement supérieur (PRES) et, d'autre part, entre le CNRS, le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) et l'Agence nationale de recherche (ANR), s'agissant de l'émergence d'activités scientifiques locales et de la poursuite des priorités nationales.

Il a observé que la taille des universités et des établissements de recherche n'était pas déterminante et que la multiplication des sources de financement de la recherche, y compris au niveau européen, ne facilitait pas la simplification de ses structures et de sa gouvernance.

M. Daniel Raoul, sénateur, a exprimé des préoccupations similaires, concernant la cohérence de l'ensemble des outils de la politique de la recherche et la définition de ses priorités à l'échelon national.

En réponse, M. Alain Fuchs a rappelé que l'action du CNRS s'efforçait d'être complémentaire de celle des universités qui étaient en train de se doter de leurs propres politiques de recherche, ce qui excluait, dans les relations avec celles-ci, tout doublon et toute forme de lutte de pouvoir.

Il a fait valoir que le CNRS n'était pas l'expert des universités mais copilotait, avec elles, un certain nombre d'unités de recherche tout en étant susceptible de leur apporter une plus-value appréciable en matière d'interdisciplinarité et de relations internationales, ces dernières devenant de plus en plus importantes.

Il a jugé nécessaire de trouver des moyens de simplifier les structures, actuellement insuffisamment coordonnées, de la recherche française, estimant que la situation était, de ce point de vue, en train de s'améliorer, grâce à une meilleure coopération et à des alliances plus nombreuses.

Il a rappelé que l'ANR, qui avait réussi son insertion dans le dispositif français de recherche, finançait à égalité des programmes finalisés et des programmes blancs.

S'agissant de la valorisation de la recherche, il a fait valoir qu'il fallait mener les projets à l'échelon pertinent, en se gardant de tout a priori idéologique et de tout cadrage rigide des initiatives. Il a observé, tout d'abord, qu'à tout grand site universitaire de recherche devaient correspondre des structures de valorisation, ensuite que tout ce qui pouvait être fait localement en la matière devait l'être, à condition que les moyens nécessaires soient réunis, enfin, qu'il était légitime de conserver au niveau national certaines compétences stratégiques propres à des domaines de recherche spécifiques, par exemple en ce qui concerne la découverte de nouveaux médicaments.

Il est convenu, avec M. Claude Birraux, député, président, de ce que la taille des établissements d'enseignement supérieur et de recherche n'était pas le seul élément à prendre en considération pour en évaluer la compétitivité, soulignant à cet égard que le nombre de doctorants était également un critère important.

Abordant la question des contrats d'emploi de chercheurs, M. Alain Fuchs a déclaré qu'un équilibre satisfaisant devrait être trouvé entre les contrats à durée indéterminée (CDI) et les contrats à durée déterminée (CDD), dont il convenait de ne pas abuser ; la question importante de la précarité, que le CNRS ne prône pas, recouvrant des situations différentes, selon qu'il s'agit de doctorants ou de post-docs, ou selon la durée des contrats considérés.

En réponse à une question de M. Claude Birraux, président, sur les relations entre sciences et société, M. Alain Fuchs a déploré la tendance actuelle à une dévalorisation des expertises scientifiques et à un nivellement des points de vue exprimés dans les débats publics, du fait de la facilitation de l'accès aux informations par Internet. Il a observé que la parole des experts, soupçonnés de collusion avec les intérêts des entreprises ou des Etats, était désormais jugée suspecte.

Il a souhaité que puissent être menées des recherches interdisciplinaires, comme celles réalisées au sein de l'Institut des sciences de la communication sur l'acceptabilité des innovations de grande consommation, afin de tenter de définir une voie moyenne.