Mardi 5 avril 2011

- Présidence de M. Serge Lagauche, président -

Table ronde avec les représentants des élus et des parents d'élèves

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. - Notre mission commune d'information sur le système scolaire est chargée de dresser le bilan de l'organisation territoriale du système scolaire et d'évaluer les expérimentations menées en matière d'éducation. A cette fin, elle auditionne des représentants de la communauté éducative et effectue des visites, tant en France (elle s'est rendue dans le Val-de-Marne, en Rhône-Alpes et se rendra dans la Somme, dans le Nord, en Bretagne et à Marseille) que dans les pays européens (elle s'est rendue en Belgique, aux Pays-Bas, au Portugal et en Suisse, et elle se rendra probablement en Pologne).

Une première table ronde a réuni des représentants des personnels de l'éducation nationale et avant qu'une autre table ronde ne rassemble des représentants du monde socioprofessionnel, qui est un partenaire de la communauté éducative, la présente table ronde réunit des représentants des élus locaux et des parents d'élève.

Devrions-nous aller vers une éducation nationale plus décentralisée ?

Comment concilier la nécessaire adaptation à la diversité des territoires et l'exigence d'équité nationale ? Comment définissez-vous votre action éducative ? Comment appréciez-vous la complémentarité de votre action éducative avec celle du ministère de l'éducation nationale et, éventuellement, du ministère en charge de la politique de la ville ?

La répartition des compétences entre les collectivités territoriales et l'État en matière éducative est-elle satisfaisante ?

M. Jean Boinet, président des maires ruraux de Corrèze, maire de Rosiers d'Egleton et membre de la commission école, Association des maires ruraux de France (AMRF). - La petite commune dont je suis maire, située en Corrèze, possède des écoles et appartient à une intercommunalité dont je suis membre du conseil. Les maires ruraux souhaitent, en tant qu'association d'élus, être partenaires de l'éducation nationale et être entendus d'elle. Ceci leur semble très important car, trop souvent, l'école est le dernier service public que conserve leur commune. Les maires ruraux veilleront à participer à une éducation nationale décentralisée, qui devra nécessairement les intégrer. J'entends, au cours de cette réunion, obtenir un éclairage et des assurances.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. - Nos travaux en sont au stade du diagnostic ; il n'est pas encore temps de formuler de propositions.

M. Emmanuel Duru, responsable des affaires juridiques de l'Assemblée des Communautés de France (AdCF). - Je m'exprimerai devant vous à titre technique.

La question de la décentralisation scolaire prend place dans un contexte très particulier, celui de la profonde mutation des collectivités locales, à laquelle le Sénat n'est pas étranger.

Les élus intercommunaux nourrissent un certain nombre d'interrogations, notamment sur la répartition des compétences et sur la fin annoncée des financements croisés. Je m'en tiendrai pourtant, dans un premier temps, à l'aspect intercommunal de la question scolaire. Nous assistons à des mouvements contradictoires qui suscitent l'interrogation des élus locaux. En effet, alors que la carte intercommunale sera généralisée avant la fin du mandat en cours et que la carte syndicale subit une rationalisation, les pouvoirs publics nationaux encouragent vivement le transfert aux intercommunalités de la compétence scolaire, dans un contexte économique et budgétaire très contraint, qui place les communes dans des situations difficiles, et dans un contexte où l'intercommunalité est fréquemment appelée à supporter les charges liées à cette compétence.

L'intercommunalité s'est, en quelque sorte, sortie par le haut de la réforme territoriale, mais l'évolution qualitative de son périmètre et, en particulier, l'extension des communautés de communes voulue par le Parlement et par le Gouvernement soulève la question de la gestion de proximité de la compétence scolaire, qui se posera avec d'autant plus de force qu'un certain nombre de Regroupements Pédagogiques Intercommunaux (RPI) aujourd'hui adossés à des syndicats ont vocation à disparaître. Nous nous trouvons donc en présence d'un double mouvement : d'une part, la rationalisation des structures porteuses de la compétence scolaire et l'agrandissement des périmètres communautaires et, d'autre part, l'adossement des RPI aux communautés de communes dans le cadre du décret d'application de la loi Carle. L'agrandissement du périmètre des communautés de communes soulèvera la question de la proximité et celle des outils communautaires qui, à notre avis, manquent encore pour exercer la compétence scolaire de manière efficace et dans le respect de l'identité des communes.

M. Yves Fournel, adjoint au maire de Lyon et vice-président de la commission éducation de l'Association des maires des grandes villes de France (AMGVF). - Les grandes villes de France développent des projets éducatifs locaux depuis plus de quinze ans et leur intervention sur l'ensemble des temps éducatifs de l'enfant, y compris le temps scolaire, se renforce.

Leur intervention a pris, lorsqu'elle a commencé, la forme d'un aménagement des temps de l'enfant : classes à projet artistique et culturel, conservatoires d'éducation musicale, éducation physique et sportive, apprentissage de la natation, classes découverte. Il faut également noter que quinze villes exercent pour l'État la compétence de santé scolaire.

Au-delà de ces interventions ponctuelles, des villes, toujours plus nombreuses, mettent en oeuvre des projets éducatifs locaux cohérents, qui visent à réunir toutes les procédures qui se sont succédées au cours des dernières années (contrats éducatifs locaux, contrats temps libre, contrats enfance jeunesse, contrats locaux d'accompagnement à la scolarité).

En conséquence, la plupart de nos villes sont engagées au-delà de leurs compétences, parfois pour des budgets importants. Elles ne sont pas seulement des guichets de financement ; elles constituent également des points de convergence de l'ensemble des acteurs. Elles cherchent à réunir l'ensemble des ressources humaines et des compétences d'un même territoire dans une véritable démarche de ville éducatrice.

Si leurs démarches ont porté leurs fruits, les villes sont confrontées à de nombreuses difficultés. La première est la diminution continue des subventions de l'État. Ainsi, cette année, dans notre département, en l'absence de crédits pédagogiques, les classes à projet artistique et culturel ne pourront pas se dérouler. En outre, pour développer leur politique éducative, les villes ont besoin de temps. Elles ne peuvent pas construire à court terme une coopération de fond entre les différents acteurs. Elles doivent pérenniser les actions mises en oeuvre et les évaluer avec le concours des autres acteurs. Un projet éducatif cohérent demande une confiance entre les acteurs. Or la confiance se construit et se gagne ; elle ne peut pas s'imposer.

De ce fait, après quinze années d'expérimentation, nous considérons qu'il est nécessaire de reconnaître les projets éducatifs locaux dans la loi et de légitimer ainsi l'intervention des communes - sans toutefois l'imposer -, de telle manière que ces projets ne dépendent pas des aléas des nominations des inspecteurs d'académie et des recteurs.

Je prendrai encore l'exemple de la petite enfance, située à la croisée des compétences de l'État, des départements et des communes. Nous subissons, aujourd'hui, la diminution de la scolarisation des enfants âgés de deux ans. Cette diminution est très forte, puisque, à la prochaine rentrée, ces enfants ne seront plus pris en compte, pour l'établissement de la carte scolaire, que dans les quartiers prioritaires. Sans évoquer la régression éducative que cette évolution constitue, les établissements de petite enfance devront accueillir les centaines d'enfants lyonnais qui ne seront ainsi plus scolarisés. Il y a là un champ de coopération important. Il ne s'agit ni d'imposer la scolarisation des enfants âgés de deux ans, ni de l'interdire, mais de permettre une entrée progressive à l'école maternelle en fonction du développement de l'enfant, et non pas seulement en fonction d'une décision ministérielle. Des structures passerelles, qui associaient des professionnels de la petite enfance, de l'éducation nationale et des villes, ont été expérimentées. Nous souhaitons que de telles initiatives se développent - elles seraient moins coûteuses que l'école maternelle.

Pour pouvoir inscrire la coopération dans la durée, nous ne souhaitons pas un transfert de compétences. Nous souhaitons que l'État assume sa responsabilité dans l'école, qui est une institution de la République ; mais, s'il nous faut un État fort, il nous faut également un État qui reconnaisse ses partenaires. L'école seule ne peut pas grand-chose, elle a besoin de son environnement et de son territoire. Nous souhaitons trouver les moyens de structurer la coopération entre les différents partenaires au niveau des territoires, de telle manière qu'ils soient à égalité. Nous devons inventer ensemble, par le dialogue, les structures de coopération, et les contractualiser dans la durée. La durée des contrats pourrait, par exemple, être celle du mandat communal.

M. Alexandre Touzet, représentant de l'Association des maires de France (AMF). - L'AMF vous remercie d'avoir organisé cette concertation et, plus généralement, vous remercie pour votre travail de concertation, notamment concernant le financement des écoles privées sous contrat. Je m'exprimerai à titre technique.

La séparation entre l'activité scolaire d'une part et la gestion des locaux et l'activité périscolaire de l'autre est assumée par les maires. Ceux-ci estiment que la politique éducative forme, avec la politique culturelle, sociale et sportive, un ensemble. Il est donc difficile de séparer l'activité scolaire de la gestion communale dans son ensemble.

La diversité de l'action des collectivités dans le domaine éducatif est également revendiquée. Or on a vu que, parfois, le mouvement d'unification marquait un recul. Ainsi, alors que les communes finançaient des cours d'anglais à l'école, il a été demandé à des enseignants de les dispenser, alors qu'ils n'étaient pas nécessairement formés pour cela.

S'agissant des rapports entre l'éducation nationale et les communes, le bureau de l'AMF a souvent rappelé trois principes. Le premier est l'utilité de la concertation dans les différentes réformes. Des réformes récentes ont donné lieu à quelques incompréhensions. Ainsi, le soutien individualisé a été annoncé de façon trop soudaine pour permettre aux maires d'adapter l'organisation du temps de repas et des transports scolaires. Le deuxième principe est celui de la prévisibilité. L'AMF est porteuse de la Charte des services publics, et il lui importe que les ouvertures et fermetures de classe s'inscrivent dans le temps. Ces ouvertures et fermetures ne peuvent être gérées à court terme et doivent être décidées en concertation avec les communes, de telle manière que les investissements qu'elles réalisent pour le développement des activités scolaires soient rentabilisés à moyen terme. Enfin, le troisième principe rappelé par l'AMF est celui de la continuité. L'État prend des initiatives, telle l'école numérique, mais ne garantit pas les conditions de mise en oeuvre de ces initiatives. Ainsi, dans le cas de l'école numérique, les logiciels nécessaires ne sont pas disponibles et la formation des enseignants insuffisante.

M. Mathieu Hanotin, vice-président du Conseil général de Seine-Saint-Denis, en charge des collèges et des questions de l'éducation nationale, Assemblée des départements de France (ADF). - Pour répondre à la question portant sur la décentralisation de l'éducation nationale, je prendrai appui sur le constat que je dresse depuis trois ans en tant que vice-président de conseil général. Nous avons choisi de montrer notre volonté de construire un partenariat avec l'éducation nationale. Cette volonté est indispensable. L'école ne peut pas se tenir à l'écart de son milieu. Elle doit être ouverte, mais également fermée, condition nécessaire d'un enseignement serein. Un partenariat très étroit entre l'éducation nationale et les collectivités est nécessaire pour que l'école revête ces deux caractères contradictoires.

Cependant, je ne crois pas qu'il soit nécessaire de transférer aux collectivités de nouvelles compétences, hormis peut-être des compétences marginales, telles que l'organisation du travail des agents techniques au sein des établissements ou les rapports hiérarchiques entre les intendants et les conseils généraux, qu'il faut clarifier. Si le transfert de compétence ne paraît pas nécessaire, il serait très utile d'institutionnaliser le partenariat entre l'éducation nationale et les collectivités, afin de reconnaître les différents acteurs de l'éducation. Une telle institutionnalisation permettrait aux collectivités locales de se retourner vers l'État. Celles-ci éprouvent parfois le sentiment qu'elles sont indispensables au fonctionnement des établissements scolaires. Si les textes en vigueur étaient strictement appliqués, aucun voyage scolaire ne pourrait être organisé par les collèges de Seine-Saint-Denis, aucun programme culturel ni programme sportif ne pourrait être mis en oeuvre, etc. En outre, l'institutionnalisation du partenariat entre l'éducation nationale et les collectivités locales permettrait aux autres acteurs de savoir à qui s'adresser.

La nouvelle politique d'accueil des élèves exclus que nous menons devrait incarner ce partenariat. Cette politique ne relève pas de nos compétences, mais nous la mettons en oeuvre car l'exclusion des élèves est un problème important en Seine-Saint-Denis - entre 800 et 1 000 élèves sont exclus de leur établissement chaque année, et entre 500 à 600 mesures d'exclusion temporaire sont prononcées chaque jour. Nous avons proposé une politique très volontariste, qui a permis que 93 % des élèves en ayant bénéficié n'aient pas été de nouveau exclus, mais nous estimons que l'éducation nationale doit participer plus qu'elle ne le fait actuellement à l'animation et au financement de ce dispositif - auquel le Conseil général contribue à hauteur de 80 %. Les dispositifs les plus adéquats sont ceux pour lesquels la collaboration entre les services de la mairie, les services du conseil général et les services de l'éducation nationale est la plus forte.

Concernant l'exigence d'équité nationale et la diversité des territoires, il nous semble que la Seine-Saint-Denis subit une triple peine. Certes, l'État lui accorde des moyens supplémentaires, puisqu'elle compte de nombreuses zones d'éducation prioritaire (ZEP), mais ces moyens sont insuffisants dans la lutte contre l'échec ; de plus, du fait de leur situation sociale difficile, les familles ne prennent pas le relais de l'école, et, enfin, la situation financière des collectivités est très difficile, ce qui limite leurs possibilités d'action. Nous devons nous battre pour une véritable égalité des droits, et non pour une simple équité. Ainsi, il faut comparer les résultats obtenus dans les différents départements, et non le rapport entre la dotation horaire et le nombre d'élèves, et, pour que ces résultats soient équivalents, adapter les moyens aux spécificités des territoires et des publics.

M. Jean-François Mézières, représentant de l'Association des régions de France (ARF). - En matière d'éducation, la région entre en scène après le département, puisqu'elle est compétente pour les lycées. L'éducation et la formation représentent la moitié du budget des conseils régionaux. Je voudrais situer l'enjeu que représentent la visibilité et la cohérence globale du système d'éducation et de formation sur le territoire régional. La relation entre la région et l'éducation nationale est primordiale, mais elle n'est pas unique. L'éducation nationale présente, en outre, un double visage ; d'une part, elle édicte des normes nationales, et, d'autre part, elle constitue le réseau territorial le plus important. Cependant, elle tend à réguler sans toujours tenir compte des autres réseaux. Parmi ceux-ci, on compte le ministère de l'agriculture. Le recteur de l'éducation nationale et son homologue du ministère de l'agriculture n'entretiennent, dans la plupart des académies, aucune relation. Il faut aussi noter que le réseau de l'éducation nationale n'est pas seulement constitué des établissements d'enseignement général et technologique, il est également formé des établissements d'enseignement professionnel et des Centres de formation d'apprentis (CFA), des GRETA, des Instituts universitaires de technologie (IUT), des Brevets de technicien supérieur (BTS) et des universités. Il faut leur ajouter les écoles de formation sanitaire et sociale, financées conjointement par la région et l'Agence régionale de la santé (ARS). Le conseil régional est, de fait, le seul acteur public qui ait une vision globale de ces différents établissements. Or le mode de financement de ces établissements n'est pas unique. La cohérence entre eux n'est donc pas donnée a priori, ni au sein des territoires régionaux, ni au sein des territoires infrarégionaux. Ainsi, on observe parfois, au sein d'une agglomération, une concurrence entre les établissements publics, alors que, dans d'autres territoires régionaux, il existe un manque manifeste d'offre de formation.

Le Contrat de plan régional de développement des formations professionnelles (CPRDF), créé par l'article 57 de la loi du 24 novembre 2009, est un élément de réponse à cette situation. Nous sommes désormais à mi-chemin sur la voie de la contractualisation. Mentionnons quelques questions qui restent posées. La première est celle des limites des périmètres respectifs de l'enseignement professionnel et de l'enseignement non professionnel, qui ne sont pas strictement définies. Un cours d'anglais, par exemple, peut constituer un cours professionnel s'il est dispensé à quelqu'un qui se destine à être traducteur ou professeur d'anglais. La deuxième est celle de la durée de la contractualisation. Le budget de l'éducation nationale est annuel et les cartes scolaires sont examinées chaque année, alors que le CPRDF est pluriannuel. Enfin, les différents représentants de l'État - le préfet, le recteur, l'ARS et Pôle emploi - n'agissent pas de façon cohérente. Le CPRDF peut être un bon outil de régulation, sous réserve que les questions que j'ai mentionnées soient résolues.

Mme Renée Nicoux, sénatrice de la Creuse et membre du Bureau et du Comité directeur de l'Association nationale des élus de la montagne (ANEM). - J'interviens en tant que membre de l'ANEM et maire de Felletin, petite commune de la Creuse.

Les zones rurales et les zones de montagne sont confrontées à un problème qui leur est propre : leurs effectifs scolaires sont faibles. Or l'école est un des moyens les plus importants d'aménagement du développement et de l'aménagement des territoires ruraux ou montagnards. Lorsqu'une commune perd son école, elle n'accueille plus de nouvelles familles. Nombre d'écoles des zones de montagne possèdent une classe unique. Ce mode de scolarisation est efficace, quoiqu'il le soit moins dans le secondaire, sans doute en raison d'un défaut d'ambition des familles. Les collèges et les lycées de proximité doivent proposer des formations répondant aux besoins des familles. Les élèves résidant dans une zone de montagne doivent souvent quitter leur famille pour poursuivre les études pour lesquelles ils voudraient opter. Ceux qui s'y refusent suivent des études qu'ils n'ont pas choisies.

Le nombre d'enseignants se réduit continûment ; il en résulte des regroupements d'écoles, donc des transferts de charges sur le conseil général, qui est contraint de financer le transport scolaire. En outre, la durée de la journée des enfants, qu'ils soient scolarisés en primaire ou en secondaire, s'en trouve augmentée, au détriment de leurs performances scolaires et de la qualité de l'enseignement. Nous proposons le maintien d'un maillage scolaire de proximité, ce qui nécessite le maintien du taux d'encadrement. Il nécessite également un partenariat entre l'éducation nationale et les collectivités locales pour les activités périscolaires, par exemple la restauration scolaire. L'école ne pourrait exister sans ces activités et ce partenariat. Permettez-moi d'illustrer par exemple les conséquences de la très forte réduction du personnel enseignant dans les zones de montagne. Le nombre d'enseignants remplaçant étant insuffisant, en période d'épidémie importante, le personnel étant insuffisant pour accueillir les élèves dans les écoles rurales, l'inspecteur d'académie est contraint de prélever des enseignants valides dans certaines écoles pour les affecter aux communes rurales, les élèves de ces enseignants étant répartis entre les classes restées ouvertes. Il est primordial de cesser la réduction des effectifs, qui ont atteint, ainsi que me l'a dit l'inspecteur d'académie que j'ai rencontré, le strict minimum.

Certains besoins locaux doivent être pris en compte. Lorsque la carte scolaire est révisée, les communes doivent en être averties deux ans auparavant, comme le prévoit la Charte des services publics. Il faut également diminuer le seuil de réouverture d'une classe. Les collectivités seraient prêtes à accepter que certaines classes ferment si elles savaient leur réouverture plus aisée. L'accueil des enfants de moins de trois ans résidant dans les zones de montagne est un gage de réussite scolaire. Ces zones peuvent être considérées comme des zones où l'environnement social est défavorisé, et ces enfants peuvent donc être pris en compte dans les effectifs pour l'établissement de la carte scolaire.

Il est proposé de favoriser les regroupements pédagogiques dispersés plutôt qu'intercommunaux, afin de permettre à chaque commune de disposer d'une classe. Une amélioration de l'offre pédagogique - notamment en matière d'enseignement musical ou linguistique - au moyen d'équipes mobiles académiques serait judicieuse. Pour développer l'offre périscolaire, il pourrait être recouru aux personnels ATOS (agent technicien et ouvrier de services) et ATSEM (agent territorial spécialisé d'école maternelle). Pour organiser cette offre, les collectivités locales doivent être informées suffisamment tôt du calendrier scolaire.

Celui-ci doit permettre que tous les élèves puissent accéder à la montagne. Certes, les classes découvertes doivent le leur permettre également - elles sont une solution pour les zones urbaines qui connaissent des difficultés d'enseignement -, mais, notamment pour des raisons économiques et parce qu'il faut maintenir l'attractivité des zones de montagne, l'étalement des congés est nécessaire.

Mme Claudine Caux, présidente de la Fédération des parents d'élèves de l'enseignement public (PEEP). - Notre fédération veut que les parents soient les premiers éducateurs de leurs enfants. Cependant, nous sommes attachés à l'éducation partagée, car il existe autant de parents et d'enfants différents que de territoires et d'établissements différents.

Nous sommes également attachés au socle commun. Les enfants doivent bénéficier des mêmes chances, mais il faut donner la priorité à l'enseignement primaire et élémentaire, notamment en formant les enseignants. Il pourrait être judicieux de créer une école du socle commun qui comprendrait l'école primaire et le collège, et permettrait que les enseignants de collège enseignent à l'école primaire. Ainsi, les élèves de primaire rencontreraient d'autres enseignants que leur instituteur - actuellement, la coupure entre l'école primaire et le collège est trop grande.

L'éducation nationale nous semble être une colonne vertébrale devant rester maître du jeu, mais aussi s'ouvrir aux autres partenaires, et notamment aux entreprises, qui pourraient intervenir au lycée et au collège pour présenter le monde professionnel. Nous souhaitons que les projets éducatifs et les projets d'établissement, établis pour une durée de trois ans, soient cohérents entre eux. Actuellement, deux écoles distantes de quelques centaines de mètres, ou un collège et une école primaire située à proximité, peuvent avoir deux projets incohérents entre eux. La formation des enseignants devrait également être cohérente. Les enseignants du secondaire doivent pouvoir enseigner à l'école primaire.

L'évaluation des élèves ne nous leur semble pas bénéfique. Les élèves doivent être vus comme des élèves capables de construire leur avenir de manière positive.

Le CPRDF présente un intérêt, quand il est appliqué, mais tous les acteurs qu'il concerne doivent être informés de son existence.

Mme Béatrice Chesnel, présidente de l'Union nationale des associations autonomes de parents d'élèves (UNAAPE). - Les organisations nationales de parents d'élèves participent à la vie des établissements scolaires. Elles ont pour mission d'assurer que la vie scolaire se déroule dans de bonnes conditions dans tous les établissements publics. Chacune d'entre elles agit en fonction de ses engagements particuliers, mais elles s'interrogent toutes sur les difficultés que rencontrent les enfants dans leur parcours scolaire, et participent en tant que membres de l'équipe éducative à l'amélioration constante du service public de l'éducation.

Pour l'UNAAPE, ceci ne peut se faire que dans la plus stricte neutralité politique. Nous sommes avant tout des parents d'élèves et nous n'intervenons qu'à ce titre. Nous ne sommes pas des spécialistes ni des techniciens de la décentralisation. Cependant, nous sommes des partenaires disponibles, attentifs, constructifs et prêts à accepter les évolutions du système scolaire ou de l'institution. Nos relations au sein de la communauté éducative se veulent respectueuses du rôle et de la place de chacun, dans le but d'apporter le meilleur pour le système éducatif, et donc pour tous les enfants au sein de l'école.

Depuis bientôt trente ans, la décentralisation a influé sur notre rôle et notre action de parents d'élèves. Elle a aussi changé et multiplié nos partenaires. Elle a été un facteur de rapprochement entre le pouvoir central et une gestion des besoins plus proche des réalités du terrain. Aujourd'hui, il nous semble que plus de décentralisation n'apportera pas de solution miracle aux problèmes que rencontre notre système éducatif. Pourquoi aller vers une éducation nationale plus décentralisée ? Il peut sembler plus facile de gérer la diversité au niveau local. Nous savons tous que la décentralisation a permis une amélioration de la gestion des établissements et de l'accueil des personnels, mais nous constatons également des différences entre les collectivités selon les moyens et qu'elles veulent ou peuvent consacrer à l'éducation. Ces différences engendrent des disparités qui échappent à l'égalité républicaine et territoriale. Si l'on considère qu'une entité territoriale n'est qu'une entité administrative, le problème de l'équité ne doit pas se poser. Cependant, les conseils régionaux, les conseils généraux et les municipalités sont des entités administratives, mais également politiques. Où se trouve l'équité des politiques régionales, quand chaque région décide de façon autonome la manière de financer ses actions ? Par exemple, il existe d'importantes disparités dans le financement des manuels scolaires. Ceux-ci sont entièrement gratuits dans certaines régions ; dans d'autres, ils ne sont qu'en partie financés par le conseil régional.

La décentralisation peut renforcer l'opacité du système éducatif et générer plus d'inégalités entre élèves selon leur situation géographique. Il est aisé de constater qu'il est bien plus difficile de gérer des situations en milieu rural qu'en milieu urbain. Il est important d'obtenir un traitement identique pour tous les élèves. L'UNAAPE souhaite que l'État reste le gardien des finalités essentielles du système éducatif. Il lui semble souhaitable de maintenir un pouvoir central qui impulse un projet national d'éducation.

Pour l'UNAAPE, la complémentarité dans le système éducatif se définit avant tout au travers d'un partenariat actif entre tous les membres de la communauté éducative. L'institution propose une forme d'instruction, en définissant le contenu et les formes d'apprentissage, le corps enseignant dispense cette instruction et les parents sont responsables du suivi de l'instruction et de l'orientation. Notre action éducative est fixée par les textes qui régissent la présence des parents d'élèves dans les établissements scolaires. Concrètement, les parents d'élèves autonomes s'investissent sans compter dans les différentes instances éducatives dont ils sont membres. Dans tous les cas de figure, les parents d'élèves élus ou désignés ne relèvent d'aucun lien hiérarchique avec les autres membres de la communauté éducative. Ils portent un regard non professionnel sur ce que l'institution fait vivre quotidiennement aux enfants. Parmi les principes qui ont toujours rassemblé les parents d'élèves de l'UNAAPE, celui de la primauté de la famille dans l'échelon éducatif est l'un des principaux.

C'est dans cette perspective que nous tentons de vivre le partenariat voulu par la loi de 1989, chacun des membres de la communauté éducative oeuvrant dans la plus grande cohérence possible, pour que chacun des enfants confiés à l'école réussisse au mieux sa scolarité. Membres à part entière de la communauté éducative, nous pensons que notre rôle de parents d'élèves délégués doit être le reflet d'un véritable travail de partenariat et que cette fonction ne peut s'exercer que dans la confiance, le respect mutuel, l'écoute, le dialogue et la transparence, afin de construire et de réaliser ensemble la scolarité des élèves, ceci dans nos relations avec l'éducation nationale comme avec les collectivités territoriales. Le partenariat implique l'égalité de traitement entre les partenaires.

Nous souhaiterions que les parents d'élèves soient davantage associés à l'élaboration des projets d'établissement - nous constatons, dans ce domaine, de grandes disparités entre établissements. Nous souhaiterions aussi que les projets éducatifs locaux, qui présentent un grand intérêt mais ne concernent que les grandes villes, soient étendus aux petites villes.

M. Jean-Jacques Hazan, président de la Fédération des conseils de parents d'élèves des écoles publiques (FCPE). - Je vous remercie de l'intérêt que cette mission porte à l'organisation de l'école et à son développement. Elle fonde son analyse sur des évaluations internationales, sur les difficultés, avantages et inconvénients de notre système éducatif. Parmi ces inconvénients figure la formation des enseignants, qui, à notre avis, a été détruite.

La décentralisation est une réalité. Depuis longtemps, dans deux écoles différentes, on ne dispense pas la même leçon à la même heure, ce qui est judicieux, puisque les enfants sont différents. Il est donc judicieux de soulever la question de la décentralisation et de l'autonomie des acteurs.

L'influence et l'implication des collectivités territoriales dans l'éducation est sans commune mesure avec ce qu'elle était avant la première décentralisation, ni même à ce qu'elle était voici dix ans. La place qu'ont prise les collectivités territoriales excède les compétences qui leur ont été déléguées. Elles concourent en effet à la réussite des élèves en leur offrant un accompagnement périscolaire, des moyens numériques, etc. Ces compétences ont parfois été prises en charge par choix politique de personnes éclairées sur le rôle et la finalité de l'école et sur le bénéfice de celle-ci en matière de santé, d'intégration et d'emploi. J'ai donc écouté avec intérêt le réquisitoire contre les suppressions d'emplois dans l'éducation nationale.

Les projets éducatifs locaux montrent que les villes et les territoires mènent une réflexion globale. Ainsi, ils montrent qu'ils sont conscients que leur action est nécessaire en dehors de la classe, lieu où se joue la réussite scolaire. Pour la FCPE, si la classe est par elle seule insuffisante, la réussite nécessite la transformation des relations pédagogiques au sein de la classe.

La dépense intérieure d'éducation a perdu un point de PIB en vingt ans. Cette diminution n'est pas négligeable. En outre, sa répartition s'est modifiée dans une forte proportion. Les collectivités territoriales supportent désormais 25 % de cette dépense, contre quelques pourcents voici quinze ans. On note que les dépenses de l'État ont décru plus vite que ne croissait celles des collectivités territoriales. D'autres pays (les États-Unis et l'Allemagne, par exemple) augmentent leurs dépenses d'éducation. Les résultats de l'étude PISA montrent que, si la croissance des dépenses d'éducation n'est pas le seul facteur de réussite, elle est un facteur très important lorsqu'elle est associée aux évolutions pédagogiques.

L'implication des collectivités territoriales engendre des risques de différenciation, notamment parce que la capacité contributive de ces collectivités est variable. Cette différenciation n'est certes pas aussi importante que la différenciation sociale ou que la manière dont cette dernière est reproduite au sein de l'école - dans notre pays plus qu'ailleurs, comme le montre l'étude PISA -, mais elle existe. Il serait judicieux que l'État impose une contribution minimale. La décentralisation s'est accomplie, jusqu'à présent, sans réguler l'autonomie laissée aux différents acteurs.

Ce constat est particulièrement vrai pour l'école maternelle. Il faut noter, à ce propos, que les territoires ruraux sont considérés comme défavorisés. Ainsi, la mairie de Millau, qui a introduit, devant le tribunal administratif, un recours contre la décision de son inspecteur d'académie, a obtenu le maintien de son école maternelle par suite de la prise en compte des enfants âgés de moins de trois ans dans la carte scolaire. Le nombre de places dans l'école maternelle montre l'absence de continuité de décision entre la collectivité locale et la collectivité nationale. Ainsi que l'a montré le rapport de la Cour des comptes, les dépenses pour la petite enfance n'ont jamais été aussi élevées, le nombre de places de crèche créées n'a jamais été aussi important, mais la capacité d'accueil des enfants âgés de moins de trois ans dans une structure collective diminue depuis que l'État a décidé de déscolariser ces enfants. La proportion de ces enfants scolarisés est passée de 30 % à 10 % - soit une diminution de 150 000 enfants.

La Cour des comptes note aussi qu'il n'y a pas égalité de traitement entre les écoles primaires, en termes de fournitures scolaires. Il serait judicieux de prévoir une contribution minimale des collectivités locales concernant ces fournitures. Le Danemark, bien que son gouvernement ne soit pas social-démocrate, ne demande aucune contribution financière aux parents d'enfant de moins de douze ans, ni pour les activités scolaires ou périscolaires, ni pour les fournitures.

L'inégalité de traitement se poursuit au collège. La fourniture en manuels scolaires est à la charge de l'État, mais celui-ci ne s'acquitte pas de son devoir en totalité. Lorsque le programme d'une matière est modifié, l'État ne fournit que 70 % des manuels nécessaires s'il s'agit d'une matière scientifique, et seulement 50 % s'il s'agit d'une langue. Pour diminuer le poids du cartable des élèves et ainsi prévenir les douleurs dorsales, vingt départements ont décidé de financer l'achat de collections de manuels supplémentaires. Il n'existe, concernant les manuels scolaires, aucune réflexion commune à l'État, aux collectivités territoriales et aux parents.

Une compétence, celle de la sectorisation des lycées, n'est pas partagée. La sectorisation des lycées généraux ou polyvalents devrait être déléguée.

La maîtrise, par les collectivités territoriales, de leurs compétences déléguées est difficile concernant la pause méridienne. La restauration scolaire est déléguée aux conseils généraux pour les collèges et aux conseils régionaux pour les lycées, mais ces collectivités territoriales ne choisissent pas la durée de la pause méridienne. Certains enfants ne disposent que de trente minutes pour manger. Cette situation ne peut perdurer.

L'école ouverte, c'est-à-dire l'ouverture des locaux de l'école en dehors des temps scolaires, fait fréquemment l'objet de débats. Elle soulève le problème du partage des responsabilités entre une institution territoriale et un établissement public qui, trop souvent, garde ses portes fermées, ce qui l'empêche de devenir une maison des savoirs ou de la connaissance.

La durée des projets d'établissement étant de trois ans, il est anormal que la carte scolaire soit modifiée chaque année. Une évolution si fréquente ne permet aucune continuité de réflexion, ni dans le pilotage de l'institution ni dans l'action des collectivités territoriales. Elle compromet la continuité de fonctionnement des collectivités territoriales - notamment en ce qui concerne l'application des accords de réduction du temps de travail des agents municipaux.

Dans les zones rurales, dans certains cas, il est proposé de conserver les regroupements pédagogiques intercommunaux tels qu'ils existent, et, dans d'autres cas, de procéder à des regroupements physiques pour construire des pôles scolaires, au motif qu'il est préférable de rassembler tous les services en un même lieu. Ces décisions de construction de pôles scolaires, qui remettent en cause l'aménagement du territoire, doivent être prises en concertation avec les élus. En outre, une enquête publique doit être menée. La présence d'une école est, en effet, l'un des critères pour lesquels on choisit de s'installer dans une commune. Ces remarques valent également pour le second degré.

Enfin, je rappellerai que la FCPE est favorable à un service de restauration scolaire obligatoirement fourni par les collectivités territoriales ou par l'État.

Mme Caroline Saliou, représentante de l'Association des parents d'élèves de l'enseignement libre (APEL). - Les établissements privés sous contrat d'association avec l'État remplissent une mission de service public. L'APEL occupe une place dans la communauté éducative de ces établissements et ses parents d'élèves participent à la vie de ces établissements. Ils prennent part aux commissions d'accompagnement à l'orientation et mettent en place des partenariats avec les entreprises.

Nous pensons que le lien avec les collectivités territoriales est très important. L'APEL est favorable à la décentralisation sous réserve du respect de l'équité nationale. Or certains conseils généraux ont fourni des ordinateurs aux élèves scolarisés dans un établissement public, mais non à ceux scolarisés dans un établissement privé.

Concernant le lien entre les collectivités territoriales et le système éducatif, nous pensons qu'il faut tirer les enseignements des relations entre les écoles primaires et les communes. Ces relations, très étroites, pourraient inspirer les conseils généraux et les conseils régionaux. Elles sont toutefois insuffisantes. Il faut leur adjoindre des liens entre les communes, les communautés de communes, les conseils généraux et les conseils régionaux.

Il faut souligner que les régions qui élaborent leurs projets éducatifs avec le concours des parents d'élèves sont celles qui obtiennent les meilleurs résultats.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. - Deux mots ressortent de vos propos : le partenariat et la cohérence. Vous les avez souvent employés pour en dénoncer l'insuffisance. Concernant le partenariat, vous voulez que l'État reconnaisse ses partenaires. Certains souhaitent que le partenariat soit institutionnalisé. Comment estimez-vous qu'on puisse l'améliorer et l'institutionnaliser ?

Comment améliorer la cohérence ? Vous avez évoqué le CPRDF, qui est le lieu de cette cohérence. Quel bilan dressez-vous de la mise en place de ce dispositif ? Quels outils peuvent-ils être construits en ce qui concerne l'enseignement primaire et le collège ?

M. Pierre-Yves Jardel, maire d'Orbais-l'Abbaye, président du groupe de travail éducation de l'Association des maires de France (AMF). - Le partenariat est l'élément qui fait le plus défaut. Depuis toujours, les écoles primaires et les communes ont toujours été associées. Cependant, l'éducation nationale et les élus agissent de moins en moins fréquemment dans le même sens. Les solutions à ce problème existent. Une charte relative à l'organisation de l'offre des services publics en milieu rural a été adoptée en 2006. Elle prévoit notamment que l'annonce des fermetures de classe s'effectue deux ans avant la date envisagée. Elle n'a jamais été appliquée.

Quelques décisions malheureuses - comme celle de la fermeture des écoles le samedi matin, que tous jugent aujourd'hui inopportune, et celle du Service minimum d'accueil (SMA) - a justifié que nous nous plaignions auprès du ministère de l'éducation nationale, qui nous a annoncé qu'une charte des bonnes relations entre les collectivités locales et lui-même serait élaborée. Une seule rencontre s'est tenue, et cette charte n'a jamais plus été évoquée. La situation est pourtant très préoccupante. Prenons l'exemple des espaces ludiques dans les écoles que le ministère envisage, depuis plusieurs années, d'aménager dans les écoles et de doter de jouets fabriqués en France. Le ministère a financé des expérimentations, et il invite désormais les fabricants français de jouets à vendre leurs jouets aux communes.

L'éducation représente pourtant déjà une dépense très lourde pour les communes. Elle correspond à 37 % des dépenses de fonctionnement de ma commune. Nous avons fait de nombreux efforts. La communauté de communes à laquelle appartient ma commune a ainsi fermé sept écoles disséminées, où les enseignants ne voulaient plus enseigner. En contrepartie, elle a ouvert trois groupes scolaires de six classes où les enseignants sont heureux de travailler. Ainsi, en créant une synergie, une alliance, une collaboration très efficace entre les enseignants et les maires, nous avons rencontré le succès. Nous collaborons aussi avec les parents d'élèves et l'académie, mais pourquoi ne pouvons-nous jamais débattre des problèmes importants avec le ministère ?

M. Mathieu Hanotin. - Pour conclure un partenariat, il faut que les acteurs aient une vision commune de l'objectif à atteindre - au coeur duquel doit se situer la réussite de tous les élèves. Cette condition est très importante. Par ailleurs, il faut que cesse la stigmatisation des collectivités territoriales. L'État ne peut, d'un côté, affirmer que les collectivités territoriales gaspillent l'argent public, et, de l'autre, demander à ces mêmes collectivités d'agir au-delà de leurs compétences légales. Si certains veulent que les collectivités reviennent à leurs compétences strictes, nous montrerons quelles conséquences une telle décision aurait sur le fonctionnement des établissements scolaires.

M. Yves Fournel. - Nous sommes disposés à contribuer à la rédaction d'une proposition de loi qui reconnaisse et pérennise les projets éducatifs locaux et qui mette en place un observatoire national des politiques éducatives locales, de façon à permettre une évaluation partagée des politiques.

M. Jean-François Mézières. - La loi prévoit que les CPRDF soient signés au mois de juin, alors que leur élaboration a débuté au mois de décembre 2010 ou de janvier 2011. Ce délai est trop bref. Les CPRDF présentent l'avantage d'obliger les parties au dialogue. Il faudra toutefois éviter qu'ils ne marquent qu'un accord sur des objectifs qui sont des lieux communs - telle la lutte contre l'échec. Au contraire, il faut réaliser un diagnostic fin des territoires et entrer progressivement dans un véritable engagement de moyens et de contractualisation pluriannuelle qui puisse être transcrit avec les Écoles des parents (EPE). Le CPRDF doit être le cadre du projet pluriannuel des lycées.

M. Jean-Jacques Hazan. - Les cadres de la coopération et du dialogue existent, mais ne jouent pas leur rôle. Nous pourrions suggérer leur aménagement, peut-être en leur confiant un pouvoir décisionnel. Ces structures, le conseil départemental de l'éducation nationale, le conseil académique et le conseil territorial de l'éducation nationale - qui ne se réunit jamais - devraient être un point de rencontre et de dialogue ; elles ne sont aujourd'hui que le lieu où sont présentés les cartes scolaires, lesquelles sont désapprouvées à l'unanimité mais appliquées.

Mme Maryvonne Blondin. - L'implication des représentants de parents d'élèves dans ces structures est importante, mais quelle fraction des parents d'élèves représentent-ils ? On affirme souvent que les familles défavorisées ne sont pas représentées par les associations de parents d'élèves.

Les politiques autour de l'école, telles que les classes à projet artistique et culturel (PAC), ont été abordées. Le ministre de l'éducation nationale a évoqué l'apprentissage de l'anglais à partir de trois ans. Cet apprentissage a été organisé par certaines collectivités territoriales. Ces collectivités ont sollicité les communes qui, dans ma région, ont refusé de participer au financement de cet enseignement, arguant que cela relevait du rôle de l'État. La situation des langues régionales est similaire. Le conseil général du Finistère a développé l'enseignement du Breton dans les écoles primaires. Les élus locaux ici présents ont-ils participé à de telles expériences ?

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. - L'arrêt du plan « écoles numériques rurales » a-t-il soulevé des difficultés ?

M. Yannick Bodin. - Vous avez souvent évoqué le ministère de l'éducation nationale pour regretter son incapacité à agir. Avez-vous réfléchi à une organisation du rôle régalien de l'État en matière d'éducation qui soit différente de la ligne directe entre le ministère et les collectivités territoriales ?

Concernant les projets éducatifs locaux, les parents d'élèves estiment qu'un des défauts du système éducatif français est qu'il fonctionne selon une succession de ruptures sanctionnées par des constats d'échec. N'existe-t-il pas une manière plus cohérente et plus forte, par exemple les projets éducatifs locaux, de lier la totalité des collectivités locales d'un même territoire avec l'école, les familles et les élèves ?

La situation en matière d'éducation varie en effet selon les régions. La région Ile-de-France a décidé la gratuité des manuels scolaires et mis en oeuvre cette décision en quatre ans. D'autres régions ne possèdent pas les moyens de prendre une telle décision. Quelle péréquation peut être mise en oeuvre pour de telles compétences ? Faut-il qu'elle s'applique à travers le budget de l'éducation nationale, qu'elle prenne la forme d'une dotation aux collectivités territoriales, ou qu'elle consiste en une caisse de péréquation éducation-formation ? Cette péréquation ne devra pas remettre en cause l'autonomie d'intervention des départements et des régions.

Mme Françoise Férat. - Je suis le rapporteur du budget pour l'enseignement agricole et j'ai mené, pour le ministre de l'agriculture, une mission sur l'ensemble du territoire. J'ai constaté que les relations entre les recteurs et les Directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF) diffèrent d'une région à l'autre. Il faudra du temps pour construire ces relations.

M. Jean-François Mézières. - Je rejoins l'avis qui a été exprimé sur les structures de partenariat. Les Conseils académiques de l'éducation nationale (CAEN) sont des chambres d'enregistrement.

Concernant la répartition et la solidarité, l'ARF estime que les décisions prises résultent de choix politiques. S'il faut créer, dans chaque domaine, des caisses de mutualisation et de compensation, épargnons-nous la décentralisation.

Pour illustrer les relations entre l'État et les collectivités territoriales, je vous indiquerai que ma région a connu quatre recteurs en cinq ans. La continuité du dialogue s'en trouve compromise. Il peut être important que le conseil régional et le rectorat concluent un accord cadre.

M. Emmanuel Durru. - Ces échanges me rappellent ceux relatifs aux relations entre les collectivités territoriales et le ministère de la culture. Or, dans le domaine de la culture, la déconcentration a créé les Directions régionales des affaires culturelles. Faudrait-il créer des Directions régionales des affaires scolaires ?

Le partenariat nécessite de restaurer la confiance entre l'État et les collectivités. Par ailleurs, ce partenariat ne doit pas être conclu seulement entre l'État et les collectivités territoriales ; il doit également relier les collectivités territoriales entre elles, notamment pour permettre la mutualisation de leurs moyens.

La véritable question est celle de l'échelle d'action. L'échelle de planification doit-elle être celle de l'exécution ? Peut-on créer des autorités organisatrices pour des domaines tels que l'éducation ?

Mme Renée Nicoux. - Les inspections académiques et les rectorats sont des structures suffisantes de la déconcentration. Il n'est pas utile d'en créer de nouvelles.

Nous constatons que les régions n'ont aucun rôle à jouer dans les demandes de création de sections et de filières. Ces créations sont décidées par le rectorat selon les moyens attribués à l'académie. Les relations entre les rectorats des régions contiguës sont insuffisantes. Deux régions voisines peuvent ainsi entrer en concurrence pour certaines filières.

Mme Claudine Caux. - Permettez-moi de répondre à la première question de Mme Blondin.

Je suis la présidente d'une fédération qui a été créée en 1926. Elle possède une double représentativité, qu'elle tire des résultats qu'elle obtient aux élections des représentants des parents d'élève et du nombre de ses adhérents, qui s'élève à 220 000 familles. Cependant, au sein des conseils départementaux de l'éducation nationale, les parents d'élèves ne disposent que de sept représentants. Ces instances sont celles qui se réunissent le plus fréquemment. Les CAEN ne se réunissent qu'au quart de la fréquence prévue, le quorum n'étant jamais atteint.

Nous tenons à notre rôle de représentant des parents d'élèves. Je réside dans une zone d'éducation prioritaire depuis vingt ans, et je n'ignore pas la situation des parents défavorisés.

M. Jean-Jacques Hazan. - Au vu du taux de participation aux dernières élections de parents d'élèves, nul ne contestera aux fédérations de parents d'élèves leur représentativité.

Concernant l'autonomie de gestion des collectivités territoriales, il faut d'abord noter que la péréquation s'effectue grâce à la dotation générale de fonctionnement. En matière de dépenses, il ne s'agit plus de péréquation, mais de choix politique. Cependant, il est anormal que l'État n'impose rien dans le domaine de l'école. Il pourrait fixer une subvention minimale pour chaque enfant entrant au collège.

Concernant les interlocuteurs, il faut évoquer le niveau de ceux-ci. L'éducation nationale a créé des comités locaux d'éducation - qui n'ont pu remplir leur vocation, en raison d'une grève des inspecteurs. Il manque à l'éducation nationale une colonne vertébrale qui pourrait prendre la forme d'un corps d'inspecteurs jouant un rôle d'animateur et d'encadrant pédagogique donnant un cap et des objectifs, notamment concernant l'enseignement obligatoire. Un inspecteur d'académie est un véritable interlocuteur s'il n'est pas uniquement chargé de compter les élèves.

M. Yves Fournel. - L'organisation de l'éducation nationale est une question importante, mais il ne faut pas que le recteur se comporte localement comme le ministre se comporte nationalement. Sans de véritables structures de partenariat opérationnel, ce que ne constituent pas les instances de consultation que sont les conseils départementaux de l'éducation nationale (CDEN) et les CAEN, la déconcentration peut être pire que la centralisation, dans la mesure où chaque recteur peut choisir les grandes orientations.

Si les établissements scolaires étaient plus autonomes et possédaient les outils nécessaires à cette autonomie, et si ces établissements concluaient avec les collectivités territoriales des contrats faisant l'objet d'une évaluation, certains échelons intermédiaires de l'éducation nationale deviendraient inutiles.

M. Mathieu Hanotin. - Le dialogue nécessite des structures de travail opérationnelles. Une loi ou une circulaire peut créer un « effet système » en s'inspirant des expériences concluantes. Des structures de collaboration permettent que celle-ci ne dépende plus des hommes.

Concernant l'enseignement secondaire, il faut souligner que la réforme territoriale empêchera toute politique de proximité, car les conseils territoriaux devront gérer les collèges et les lycées. Le financement est la contrepartie du partenariat. Or, aux côtés d'une politique nationale, la politique de proximité est nécessaire.

Enfin, le financement me semble être la contrepartie indispensable du partenariat. La première forme que doit prendre ce financement est le remboursement, par l'État, de ce qu'il doit aux conseils généraux.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. - La réforme territoriale peut toutefois accroître la cohérence des politiques locales.

Deux questions, s'agissant des partenariats des équipes éducatives locales avec les élus locaux et les parents :

- Comment les élus locaux et les parents d'élèves sont-ils associés aux expérimentations menées au sein des établissements scolaires ?

- Vous paraît-il nécessaire de faire évoluer le statut juridique, le degré d'autonomie et les modes de fonctionnement des écoles et des établissements publics locaux d'enseignement (EPLE) ?

Mme Caroline Saliou. - Le partenariat entre les parents d'élève et l'équipe éducative a déjà été évoqué. Il revêt une grande importance. Nous devons mettre en place des expérimentations qu'il faut que nous évaluions. Il faudrait cependant que nous évaluions auparavant les réformes en cours. Nous sommes favorables à l'autonomie des établissements, des équipes éducatives, des chefs d'établissement et des enseignants dans le cadre fixé par les établissements eux-mêmes.

M. Jean-Jacques Hazan. - Souvent, les expérimentations sont menées dans le cadre des projets d'établissement ; les parents y sont alors associés. Ces expérimentations locales, portant par exemple sur l'organisation de forums, sont souvent un succès.

En revanche, les parents d'élèves - et les élus - sont peu associés aux expérimentations nationales. Par exemple, les réformes introduites en 2008, dont le passage à la semaine de quatre jours, n'ont pas fait l'objet d'une concertation approfondie. Nous connaissons le résultat de ces réformes. En février 2009, six mois après l'instauration de la semaine de quatre jours, nous avons engagé une campagne intitulée « Six mois, ça suffit ! ». Il est difficile de revenir sur une réforme, surtout si l'on a contraint les collectivités territoriales et les parents d'élèves à l'exécuter contre leurs souhaits. L'association des parents d'élève à la réforme des programmes du primaire aurait sans doute abouti à de meilleurs programmes que ceux qui ont été adoptés et qui ne sont pas appliqués - parce que n'étant pas applicables. L'aide individualisée, qui a désorganisé le temps du midi, l'heure de début de classe et parfois l'enfant lui-même, n'a pas été mise en oeuvre de façon partenariale. Je citerai encore une expérimentation, celle de la mallette des parents. Celle-ci étant fondée sur le contact, il est normal qu'une discussion se soit menée. On peut toutefois regretter qu'elle n'ait pas été plus profonde et plus précoce, et que les résultats de cette expérimentation n'aient pas été partagés.

L'évolution du statut juridique des établissements du premier degré soulève de nombreuses questions. Les directeurs d'école éprouvent des difficultés dans la gestion des coopératives scolaires. Je ne suis pas certain que leur déléguer la gestion d'une partie du budget communal améliore la situation. La modification du statut juridique des établissements du premier degré n'est pas, à nos yeux, un objectif d'amélioration de la qualité de l'enseignement. La transformation de l'école primaire doit, avant tout, être pédagogique. Une réforme seulement administrative générerait des coûts supplémentaires et sans doute, pour les maires, quelques déconvenues - la délégation de la gestion de la restauration scolaire est déjà parfois difficile.

La réflexion sur la transformation de l'école existe. Les inspecteurs de circonscription ne jouent pas le rôle d'organisateur et d'interlocuteur. Alors qu'ils sont censés assumer les fonctions de chefs d'établissement, pourquoi demander aujourd'hui qui dirigera l'école ? Les directeurs actuels ne veulent pas remplir cette fonction, car ils ne veulent pas créer de lien hiérarchique entre eux et les enseignants du premier degré. Croit-on qu'on fera émerger des directeurs en créant des établissements publics ?

A nos yeux, l'évolution des établissements du premier degré doit s'accomplir en vue de l'acquisition du socle commun. Il existe déjà des établissements : ce sont les circonscriptions d'inspection, dirigées par un inspecteur. Les écoles comprises dans une même circonscription doivent être organisées autour du collège et l'inspecteur doit donner une cohérence à leurs projets respectifs.

Mme Béatrice Chesnel. - Nous participons très peu aux expérimentations scolaires, que nous découvrons bien souvent une fois mises en place. L'UNAAPE souhaite que les parents d'élèves soient consultés sur le bien-fondé, le lieu, la durée des expérimentations, ainsi que sur l'évaluation de leurs résultats.

Je ne partage pas l'avis de M. Hazan sur l'expérimentation « mallette des parents ». Les parents d'élèves de l'académie de Créteil ont été associés à cette expérimentation ; ils ont participé à son élaboration. En revanche, nous avons été écartés de l'expérimentation « cours le matin - sport l'après-midi ». Les parents n'en ont pas été informés préalablement.

Bien souvent, lorsque les élus sont remplacés, la politique menée par une collectivité territoriale change. Cela constitue une difficulté. Il est proposé que les Établissements publics d'enseignement primaire (EPEP) puissent être présidés par un élu politique. Il nous semble préférable qu'ils le soient par le directeur de l'école. Nous ne sommes donc pas opposés à l'octroi de la personnalité morale aux écoles, sous réserve que les responsabilités de chacun soient déterminées et que les parents d'élèves conservent leur représentation.

Nous craignons qu'une augmentation du degré d'autonomie des établissements ne nuise au recrutement des professeurs, certaines régions étant plus attrayantes que d'autres. Certaines régions pourraient éprouver des difficultés à recruter des professeurs.

Il apparaît que certains pays de l'OCDE dont l'organisation était initialement très décentralisée ont adopté une organisation centralisée pour certains domaines de l'éducation, notamment l'établissement des programmes et l'égalité des examens. Nous estimons que des examens propres à chaque région, situation à laquelle pourrait conduire la déconcentration, serait contraire à l'égalité territoriale.

Mme Claudine Caux. - Les parents d'élèves sont rarement associés aux expérimentations menées dans les établissements du second degré. Siégeant au conseil d'administration de ces établissements, ils en sont cependant informés.

En revanche, siégeant au conseil d'école, les parents d'élèves de primaire sont mieux informés des expérimentations conduites dans les écoles primaires. Une relation de confiance s'établit entre les parents, les enseignants et les directeurs d'école. Nous avons été associés à l'expérimentation de la « mallette des parents », mais il faut souligner que celle-ci concerne les parents. Notons toutefois que toutes les expérimentations menées dans les établissements scolaires concernent les parents d'élèves. Il serait judicieux que les parents soient associés à l'évaluation des expérimentations.

La PEEP est favorable à l'évolution du statut juridique des établissements d'enseignement primaire. Depuis longtemps, elle se prononce en faveur de la création d'un véritable statut de directeur d'école. Cependant, sa préférence va à l'école du socle commun plutôt qu'aux EPEP. Une école du socle commun permettrait de mettre en adéquation les écoles et les collèges autour d'un projet commun, créant ainsi une continuité éducative et pédagogique. L'autonomie nécessite la modification du statut des EPLE et la constitution des projets éducatifs locaux. Les parents, mais également les collectivités territoriales, doivent être représentés dans les conseils d'administration. Il faut donner aux parents d'élèves toute leur place, ce qui n'est pas le cas, par exemple, lorsqu'on organise un conseil d'école à 14 heures.

Mme Renée Nicoux. - Je crois en effet qu'il n'est pas admissible que les conseils d'administration ou les conseils d'école se tiennent à un horaire qui interdit aux parents d'élèves d'y assister.

Les conséquences d'une expérimentation pour les collectivités territoriales doivent être prises en compte. Celles de l'expérimentation des cours le matin et du sport l'après-midi ne sont pas nulles. En effet, les élèves de primaire ne sont pas les seuls usagers des équipements sportifs. En outre, toutes les collectivités ne disposent pas d'équipements sportifs équivalents. Si cette expérimentation est généralisée, il faudra que les collectivités territoriales consentent de lourds investissements.

Il faut préciser ce qu'on entend par autonomie. S'il s'agit d'une autonomie concernant l'organisation interne des établissements et le rôle des enseignants, elle existe déjà. En revanche, l'autonomie qui offrirait un rôle particulier au directeur, qui deviendrait un personnel administratif plutôt qu'un enseignant, ne profiterait à personne. La qualité de service diminuerait et les petites écoles rurales disparaîtraient. De plus, une telle autonomie remettrait en cause les concours de recrutement nationaux. Elle ouvrirait la voie aux abus et à un recrutement qui ne serait pas fondé sur les compétences et, in fine, elle aboutirait à la perte d'autonomie des établissements. Si on confie au chef d'établissement le rôle de recruter les professeurs, je ne donne pas cher de l'avenir de notre système d'éducation nationale. Notre système actuel fonctionne plutôt bien, et bien des pays nous l'envient. Pourquoi vouloir le détruire davantage ?

M. Jean-François Mézières. - Il faut élaborer un code de bonne conduite qui encadre les réformes et les expérimentations. Je livrerai deux exemples à l'appui de cette remarque. Un programme national d'excellence d'internat est mis en oeuvre, alors que les internats relèvent des compétences des conseils régionaux. Un tel programme ne peut donc que créer des tensions. Lorsque les programmes sont modifiés, les conséquences financières du remplacement des manuels ne sont pas prises en compte. De même, la réforme de l'enseignement technologique a entièrement changé la nature des bâtiments et du matériel nécessaires à cet enseignement.

Concernant l'autonomie, en tant que représentant des régions, j'évoquerai celle des lycées. Il faut préciser le contenu de cette autonomie. Qu'elle peut être l'autonomie d'un lycée qui dépend du rectorat pour sa dotation horaire et du conseil régional pour ses moyens en équipements ? Ceci montre que la contractualisation pluriannuelle est un enjeu important. Il existe, d'une part, des projets d'établissements, négociés entre chaque lycée et le rectorat indépendamment des conseils régionaux, et, d'autre part, dans certaines régions, des contrats d'objectifs et de moyens pluriannuels entre les conseils régionaux et les établissements. Il faut trouver une cohérence entre ces différents contrats.

Je voudrais également évoquer les outils dont disposent les conseils d'administration pour jouer pleinement leur rôle. La situation est très contrastée. Une minorité de conseils délibèrent au sens fort du terme, les autres se contentent d'enregistrer les décisions. Il faut souligner qu'un lycée s'inscrit dans un territoire. Son conseil d'administration doit donc être lié à toutes les forces vives d'un territoire. Enfin, l'autonomie des établissements nécessite des liens entre les différents établissements.

M. Pierre-Yves Jardel. - La grande diversité de nos territoires a été évoquée. Pourtant, on cherche souvent à appliquer partout la même solution, ce qui n'est pas efficace. Ainsi, le SMA n'est pas adapté au milieu rural. En effet, les grèves d'enseignants y sont moins nombreuses et les grands-parents, plus présents, peuvent garder les enfants en cas de grève. Pourtant, le SMA est appliqué partout de la même façon.

Le statut juridique des écoles est évoqué depuis dix ans. Pourquoi vouloir détruire quelque chose qui fonctionne ? L'école primaire française est efficace. Pourquoi vouloir confier au directeur d'école un rôle de chef d'établissement auquel les élus devront obéir ? Actuellement, ce sont les élus, en accord avec l'inspection d'académie, qui décident, par exemple, de construire une classe supplémentaire. Si une telle décision n'appartient qu'au directeur, celui-ci intimera aux élus l'ordre de financer la construction. Le lien historique entre les communes et l'école s'en trouvera rompu.

Jusqu'à présent, la compétence scolaire a peu été transférée aux communautés de communes. La réforme territoriale, qui généralise les communautés de communes, prévoit de porter à au moins 60 % le coefficient d'intégration fiscale des collectivités territoriales. Atteindre un tel degré d'intégration nécessite de transférer de nouvelles compétences, dont la compétence scolaire. Si les communautés de communes prennent la compétence scolaire, pourquoi faudrait-il créer une nouvelle couche administrative ? Ne serait-ce pas un moyen de retirer aux communes, qui n'ont jamais démérité, une de leurs compétences ?

M. Mathieu Hanotin. - Il faut distinguer l'autonomie pédagogique de l'autonomie fonctionnelle. La première doit être forte, mais doit s'inscrire dans le cadre de programmes nationaux et d'objectifs de réussite nationaux. Il faut renforcer la notion d'équipes d'enseignants et le rôle d'animateur de telles équipes. Quelques expérimentations conduites en Seine-Saint-Denis sur ce sujet rencontrent le succès. Elles montrent que des interpénétrations peuvent se produire entre les matières.

Concernant l'autonomie fonctionnelle, il me semble que la création d'EPLE n'a pas de sens. Je ne prétendrai pas que les collèges accomplissent un mouvement inverse, mais il faut noter que nous constatons chaque jour un peu plus que les collèges manquent d'un processus de mutualisation. Nous créons actuellement une centrale d'achats des denrées alimentaires, afin de ne pas laisser les établissements seuls face à la grande distribution. La mutualisation est une solution aux problèmes que rencontrent les petites entités. La situation actuelle soulève de nombreuses questions, notamment celle, que j'ai déjà évoquée, de la gestion des équipes chargées de l'activité fonctionnelle des collèges. On observe, aujourd'hui, une cassure entre l'intendance et les personnels d'entretien. Nous devons parvenir à faire émerger des chefs d'équipe et à mettre fin à la logique d'établissement. Les équipes affectées à un établissement particulier et mises à la libre disposition du chef d'établissement doivent être remplacées par des équipes affectées à un bassin de population, possédant une capacité de déplacement importante et composées de personnels formés. On ne peut exiger que chaque collège dispose d'un plombier, d'un électricien, etc. Si l'autonomie signifie l'indépendance fonctionnelle des établissements, elle n'est pas judicieuse.

Concernant les expérimentations, je suppose que vous évoquez celles de l'éducation nationale.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. - Le débat porte autant sur les expérimentations dont les collectivités locales sont à l'initiative que celles menées par l'éducation nationale.

M. Mathieu Hanotin. - Nous ne pouvons agir sans le concours de l'éducation nationale. Nous disposons d'un pouvoir politique d'impulsion qui s'accompagne d'un pouvoir financier - lequel est souvent utile pour convaincre les chefs d'établissement. Les expérimentations que nous pouvons ainsi mener sont un succès. En revanche, les expérimentations de l'éducation nationale sont menées de manière verticale. Ainsi, nous avons appris par la presse que le programme CLAIR (Collèges et lycées pour l'ambition, l'innovation et la réussite) serait mis en oeuvre en Seine-Saint-Denis, et, par un discours présidentiel prononcé en préfecture, que seraient créés des Établissements de réinsertion scolaire (ERS). Cette démarche n'est pas la plus judicieuse. Souvent, la réalité finit par triompher, mais après la perte de quelques mois. Ainsi, le projet d'ERS a été totalement modifié par rapport à sa version initiale. Il faut souligner que de tels programmes ne sont fructueux que lorsque l'annonce politique s'accompagne d'un travail de concertation.

Concernant l'évolution du statut juridique des EPLE, il me semble que leur statut actuel, défini par la loi de 1985, fait obstacle à l'investissement et au travail d'impulsion des collectivités territoriales. En effet, la responsabilité des chefs d'établissement est trop grande. En outre, les chefs d'établissement ne peuvent en être exonérés à aucun moment. En conséquence, ils refusent l'organisation d'actions pédagogiques à destination des enfants ou des parents hors des horaires d'ouverture, de peur de voir leur responsabilité pénale engagée. Différencier les responsabilités du chef d'établissement selon l'horaire serait judicieux. Il faut noter que ce débat n'est pas seulement important pour les expérimentations, il l'est également pour la mutualisation des équipements, qui est un enjeu majeur. Le conseil général de Seine-Saint-Denis a adopté voici peu un plan exceptionnel d'investissement - d'un montant de 723 millions d'euros et d'une durée de cinq ans -, qui prévoit que les collèges deviennent, pour partie, des équipements mutualisés. Sans évolution législative, cette mutualisation créera des difficultés.

M. Yves Fournel. - Pour près de 95 % d'entre elles, les expérimentations scolaires menées dans les grandes villes sont à l'initiative des communes. Il faut pouvoir leur donner un cadre, afin qu'elles s'inscrivent dans les objectifs généraux de l'école. Les villes de Brest, Rennes, Lyon et Grenoble ont conclu des contrats d'objectifs et de moyens pluriannuels avec l'éducation nationale, qui constituent le cadre de leurs expérimentations. Celles-ci feront ainsi l'objet d'une évaluation commune à l'éducation nationale et aux collectivités territoriales. Le cadre partenarial existe donc parfois, mais le problème est de le pérenniser.

Concernant les expérimentations conduites par l'éducation nationale, nous constatons fréquemment qu'elles s'achèvent avant même d'avoir été évaluées. Il vaudrait mieux respecter les partenaires et prévoir des financements plus équilibrés. La ville de Lyon a financé les intervenants musicaux à hauteur de 900 000 euros, les intervenants sportifs également à hauteur de 900 000 euros et le soutien aux projets éducatifs des écoles pour 200 000 euros. Le total de ces investissements se monte à 9 millions d'euros, alors que les crédits pédagogiques de l'inspection académique ne sont que de 50 000 euros. Un tel écart de financement des expérimentations n'est pas judicieux et ne pourra perdurer indéfiniment.

Lorsqu'on souhaite que les établissements scolaires acquièrent une autonomie, il faut dire quel but on assigne à cette évolution. Quels sont les besoins actuels de ces établissements ? Ces besoins sont les projets d'équipes, les projets pédagogiques et, au-delà, les projets éducatifs globaux qui prennent en compte tous les temps de l'enfant. En conséquence, ces besoins soulèvent la question de l'ouverture des locaux et l'articulation des interventions des professionnels - dont les agents communaux. Il faut créer une communauté éducative. Il est illusoire de rechercher, pour créer cette communauté, une structure unique qui convienne tant aux groupes scolaires de trente classes qu'aux écoles à classe unique ou aux regroupements pédagogiques. La taille de certains groupes scolaires urbains est supérieure à celle d'un collège. Il ne me semble pas judicieux de placer les écoles du premier degré sous la tutelle administrative du collège - les maires y sont opposés. Le nécessaire développement de la coopération entre les écoles primaires et les collèges doit préserver l'identité des écoles du premier degré.

Les moyens humains et les moyens structurels de fonctionnement de nos écoles du premier degré sont insuffisants. Une commune ne peut verser de façon légale une subvention à une école - elle accorde généralement une subvention à la coopérative scolaire, laquelle est en gestion de fait. Si l'on veut créer une école ouverte mobilisant les ressources d'un territoire, il faudra lui donner les moyens de cette évolution. L'AMGVF n'a pas encore arrêté sa position, mais elle réfléchit à la notion d'établissement public de coopération éducative. La plupart des membres de l'AMGVF n'étaient pas favorables aux différentes propositions de loi relatives aux EPEP, car ceux-ci n'étaient qu'un outil de fonctionnement hiérarchique. Ces propositions de loi traitaient du statut du directeur d'école avant de traiter de la question du projet éducatif et du fonctionnement de l'école ; en outre, elles ne contenaient aucune disposition relative à l'articulation des temps scolaires. Nous ne voulons pas des EPEP. En revanche, une nouvelle structure - différente des EPLE - qui permettrait de faire travailler ensemble tous les acteurs de la communauté éducative autour d'un projet élaboré et évalué en commun serait utile, à condition qu'elle soit dotée de moyens de fonctionnement suffisants et que sa taille ne soit pas trop petite. Il faudra également une contractualisation entre cette structure et la collectivité territoriale - ce qui nécessitera une contractualisation entre la collectivité territoriale et l'État, afin de préserver l'école de l'intrusion de certains maires. Enfin, si nous parvenions à créer des structures de coopération éducative d'une taille suffisante, nous pourrions leur affecter les moyens des structures intermédiaires de l'éducation nationale.

M. Emmanuel Durru. - La question de la diversité territoriale, qui a été maintes fois évoquée, est liée à celle de l'expérimentation. L'intercommunalité scolaire constitue presque en soi une expérimentation, puisque seules 20 % des communautés de communes exercent la compétence scolaire ou périscolaire. On craint parfois que l'intercommunalité ne tue l'école communale. Or, au contraire, elle permet sa survie dans un contexte financier très contraint.

La Cour des comptes insiste sur le nécessaire transfert de compétences aux communautés de communes ou aux agglomérations. Les dispositifs législatifs existant incitent à l'adossement des Regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI) aux communautés de communes. Plus l'intégration communautaire sera importante, plus les conseils municipaux et les maires devront être associés, dans un cadre intercommunal, aux décisions. Les rapports entre les communes et les communautés de communes ne sont pas encore suffisamment développés sur des sujets aussi importants que la question scolaire.

M. Jean Boinet. - Je souscris aux propos des représentants de l'AMF et de l'ANEM. Le statut juridique de leur école n'est pas la préoccupation première des maires ruraux, qui se soucient avant tout de l'avenir de leur école, voire de leur commune. Dans un autre domaine que celui de l'éducation, des contrats régionaux de développement local ont été créés et donnent toute satisfaction. Ces contrats, devenus contrats de pays puis contrats territoriaux, engagent, notamment financièrement, l'ensemble des différents partenaires - l'État, la région, le département, les communautés de communes et les communes -, chacun dans le domaine de compétences qui le concerne. Ils permettent, dans le cadre d'un partenariat fort, l'application de projets, la gestion de structures, la mise en oeuvre de moyens mutualisés. Pourquoi ne pas adopter cette démarche partenariale dans le domaine de l'éducation ? Elle présenterait l'avantage de la transparence. Permettez-moi de rapporter une anecdote personnelle. La commune dont je suis maire a formé le projet de construction d'une école - pour un montant de deux millions d'euros. Elle a dû abandonner ce projet car le conseil municipal ignore si la commune possèdera encore une école dans deux ou trois ans. Les municipalités devraient être informées des décisions engageant l'avenir de leurs écoles au moins trois ans à l'avance.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur. - Le statut juridique des établissements scolaire n'est pas plus ma première préoccupation qu'elle n'est la vôtre. Cependant, la contractualisation doit reposer sur une base juridique - qui sera probablement différente de celle des EPLE -, afin que nous ne nous retrouvions pas dans une situation similaire à celle que nous avons connue pour les GRETA. Je conviens qu'il ne serait pas judicieux de donner le même statut juridique à tous les établissements scolaires, car on ne peut imposer les mêmes contraintes à un groupe scolaire de quatre classes et à un groupe scolaire de six cents élèves. Le statut juridique de l'établissement scolaire ne doit pas être lié à celui du directeur de l'école.

Concernant l'expérimentation, je retiens de vos interventions que celle-ci est un succès quand elle est partagée et un échec dans le cas contraire.

M. Yannick Bodin. - Le problème ne doit pas être traité sous l'angle du statut, car les établissements du premier degré présentent de grandes différences entre eux.

En revanche, plusieurs d'entre vous veulent que soit prise en compte l'école du socle commun, qui fait l'objet d'un large consensus. Ne faut-il pas réfléchir à ce qui fera l'unité de cette école ? On ne peut, il me semble, considérer séparément l'école primaire et le collège. Si l'autonomie est celle des équipes pédagogiques, cette autonomie ne doit pas conduire, sauf à faire disparaître l'école du socle commun, à une indépendance totale des enseignants du premier degré vis-à-vis de ceux du collège, ni, réciproquement, des seconds vis-à-vis des premiers. Quelle est la fonction de l'inspection de l'éducation nationale ? Un inspecteur de l'éducation nationale ne devrait pas consacrer 85 % de son temps à des tâches administratives et à la notation pédagogique des enseignants une fois tous les sept ans. Il doit devenir l'animateur d'un groupe d'enseignants. Cette réflexion sur le rôle de l'inspection concerne plus l'éducation nationale que les collectivités territoriales.

Mme Renée Nicoux. - Il existe des programmes nationaux et les enseignants sont autonomes. Si cette autonomie s'accroît, il faut que les enseignants du premier degré se lient aux enseignants du collège. Ce lien relève des compétences des inspecteurs. Plus généralement, tout ce qui se rapporte à l'enseignement relève des compétences de l'éducation nationale, et non de celles des collectivités territoriales.

M. Jean-François Hazan. - Il manque à l'éducation nationale une colonne vertébrale qui lui donne une cohérence, des objectifs et un cap, et qui soit l'interlocuteur privilégié de ceux qui sont chargés des « compléments pédagogiques ». A notre avis, ce rôle doit être joué par les chefs d'établissement, c'est-à-dire les inspecteurs de circonscription. Il faut donc créer 3 000 postes.

M. Mathieu Hanotin. - Il faut distinguer la direction pédagogique des établissements de leur direction fonctionnelle. Les directeurs de collège actuels ne disposent pas de suffisamment de temps à consacrer à la direction pédagogique de leur établissement.

Notez que, pour réviser l'ensemble de sa programmation pour les collèges, le conseil général de Seine-Saint-Denis a dû salarier un proviseur de vie scolaire en retraite. Cette situation est anormale.

Mme Caroline Saliou. - Les établissements privés sous contrat sont déjà autonomes. Notre expérience nous montre que cette autonomie est une chance pour les établissements et les enfants. Le sport l'après-midi a déjà fait l'objet d'expérimentations au sein de l'enseignement privé. Ces expérimentations ont été précédé d'une longue préparation à laquelle ont participé tous les acteurs, dont les collectivités locales, qui étaient appelées à prêter leurs équipements. Elles ont porté leurs fruits et certaines d'entre elles se poursuivent.

M. Yves Fournel. - La question des circonscriptions varie selon les territoires. La ville de Lyon compte neuf inspecteurs de l'éducation nationale. L'interlocuteur de la ville de Lyon est donc l'inspection académique. Les structures doivent certes être adaptées à la diversité des territoires, mais il faut rappeler que la majorité de la population vit dans les grandes aires urbaines.

Je ne crois pas que l'État puisse tout. Il ne peut être garant ni de l'équité, ni du bon fonctionnement des écoles et des établissements. Ainsi, un inspecteur ne peut recevoir ni donner de subvention ; une circonscription n'est donc pas un établissement. Nous continuons donc de plaider pour la création d'une structure nouvelle dirigée de façon démocratique et capable de contractualiser avec l'autorité administrative comme avec les collectivités territoriales. Il faut, au moins, laisser la possibilité aux collectivités territoriales de créer de telles structures.