COMMISSIONS MIXTES PARITAIRES

Mardi 7 mai 2019

- Présidence de M. Philippe Bas, président -

La réunion est ouverte à 9 h 30

Commission mixte paritaire sur le projet de loi organique portant modification du statut d'autonomie de la Polynésie française et commission mixte paritaire sur le projet de loi portant diverses dispositions institutionnelles en Polynésie française

Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution et à la demande de M. le Premier ministre, une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de loi organique n° 259 (A.N., XVe leg.) portant modification du statut d'autonomie de la Polynésie française et une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi n° 260 (A.N., XVe leg.) portant diverses dispositions institutionnelles en Polynésie française se sont réunies à l'Assemblée nationale le mardi 7 mai 2019.

Les commissions mixtes paritaires ont tout d'abord procédé à la désignation de leurs bureaux, identiques et ainsi constitués : Mme Yaël Braun-Pivet, députée, présidente ; M. Philippe Bas, sénateur, vice-président ; M. Guillaume Vuilletet, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale et M. Michel Darnaud, sénateur, rapporteur pour le Sénat.

Les commissions mixtes paritaires ont procédé ensuite à l'examen des dispositions restant en discussion.

Mme Yaël Braun-Pivet, députée, présidente. - Je vais d'abord donner la parole aux deux rapporteurs sur l'ensemble des deux textes.

M. Mathieu Darnaud, sénateur, rapporteur pour le Sénat. - Je me félicite que nous soyons réunis aujourd'hui pour examiner les quelques dispositions restant en discussion des projets de loi organique et ordinaire relatifs à la Polynésie française. Ces deux textes, comme vous le savez, visent pour l'essentiel à moderniser le statut de la Polynésie française pour faciliter l'exercice de ses compétences par le pays, ainsi que sa coopération avec l'État et les communes de Polynésie.

Alors que les précédentes révisions du statut, en 2007 et 2011, avaient plutôt pour objet de resserrer la réglementation pour mettre fin aux dérives observées dans le passé, la réforme actuelle est un témoignage de confiance vis-à-vis des responsables polynésiens, qui ont su renouer avec la stabilité institutionnelle, assainir la situation budgétaire du pays et, surtout, remettre son économie en marche.

Le projet de loi organique a également pour objet de corriger une malfaçon de la réforme de 2011 qui concerne les modalités de remplacement des représentants à l'assemblée de la Polynésie française. Il est urgent de mettre fin à une incertitude juridique qui peut mettre en péril la stabilité institutionnelle du pays.

Enfin, le projet de loi organique reconnaît solennellement la contribution, ou plutôt la mise à contribution de la Polynésie française pour la construction de la capacité de dissuasion nucléaire et la défense de la Nation. Il inscrit en tête du statut de la Polynésie les principes de l'indemnisation des victimes des essais nucléaires, de l'entretien et de la surveillance par l'État des sites d'expérimentation, et de l'accompagnement de la reconversion économique et structurelle du pays à la suite de la fin des essais.

Le travail parlementaire a permis d'enrichir très substantiellement les deux textes. J'en veux pour preuve plusieurs points importants comme la réforme du régime contentieux des lois du pays qui permettra d'accélérer la mise en oeuvre des politiques locales, la faculté donnée aux autorités polynésiennes de saisir le Conseil d'État de questions de droit portant sur la délimitation de leurs compétences et sur le domaine des lois du pays, ou encore l'assouplissement du régime des sociétés publiques locales créées par la Polynésie française ainsi que des incompatibilités frappant les membres d'autorités administratives indépendantes locales. Il y a aussi la transformation de la dotation globale d'autonomie en prélèvement sur recettes afin de sanctuariser cette ressource versée à la Polynésie française depuis la fin des essais nucléaires et destinée à accompagner sa reconversion. Je veux enfin citer les dispositions visant à encourager la coopération entre les collectivités polynésiennes ou encore les importantes adaptations, inspirées de la proposition de loi du député Serge Letchimy, qui faciliteront la sortie de l'indivision foncière en Polynésie française. Ce dernier point nous tient particulièrement à coeur puisque le Sénat a consacré un rapport récent à ce sujet.

L'Assemblée nationale a grandement amélioré les deux textes, tant sur le plan rédactionnel que sur le fond. Elle a précisé la portée de plusieurs dispositions, et les a complétées en supprimant notamment l'extension malvenue en Polynésie française de la dépénalisation du stationnement payant.

Je veux remercier très sincèrement mon collègue rapporteur, M. Guillaume Vuilletet, ainsi que l'ensemble de nos collègues députés, de l'esprit de coopération qui a présidé à nos travaux. La navette parlementaire a ici montré une nouvelle fois toute son utilité.

Je sais que certains collègues polynésiens auraient souhaité que nous allions encore plus loin. Mais je veux que chacun mesure les avancées que comprennent ces deux projets de loi, dans leur rédaction issue des travaux de nos deux assemblées. Demain, grâce à ces textes, les institutions de la Polynésie française seront plus solides, leur fonctionnement plus fluide, les problèmes fonciers rencontrés par un grand nombre de nos concitoyens polynésiens pourront trouver une solution, et la République aura solennellement reconnu sa « dette nucléaire » à l'égard de la Polynésie française. Ne boudons pas notre plaisir.

M. Guillaume Vuilletet, député, rapporteur pour l'Assemblée nationale. - L'Assemblée nationale était la seconde assemblée saisie sur ces textes. Elle a bénéficié de tout le travail accompli auparavant : travail de fond par les élus polynésiens de la majorité et des oppositions, travail de compromis par le Gouvernement et notamment par les ministres des outre-mer et de la justice, travail de synthèse enfin par les sénateurs.

Nous avons abordé avec beaucoup de respect les équilibres définis en amont et nous ne les avons modifiés qu'à la marge, notamment sur des points techniques. C'est une des raisons qui font que nos commissions mixtes paritaires devraient être fructueuses : les deux assemblées se situent déjà dans une très grande proximité.

Pour ce qui concerne le projet de loi organique, en séance publique, sur la rédaction très symbolique de l'article 1er, les débats ont fait émerger la volonté générale de parler de « mise à contribution » et non seulement de « contribution » de la Polynésie française. Ce changement, auquel le Gouvernement et la Commission se sont ralliés, a été adopté à l'unanimité, ce qui est exceptionnel à l'Assemblée nationale. J'invite les sénateurs à se mêler à ce consensus.

En ce qui concerne le projet de loi ordinaire, nous avons encore onze articles en discussion. Pour autant, les députés ont très peu amendé sur le fond : la plupart de nos divergences sont formelles, voire rédactionnelles. Tout au plus avons-nous supprimé les demandes de rapport, comme nos commissions s'y attachent toujours. Nous avons aussi adopté un article final qui règle une difficulté juridique en matière de redevance de stationnement. Les dispositions relatives au foncier, qui importent beaucoup aux Polynésiens et qui ont été travaillées en amont avec la Chancellerie, sont notamment restées pratiquement inchangées.

Voici l'esprit dans lequel l'Assemblée nationale a travaillé : un esprit de responsabilité, un esprit de concorde entre tous les groupes parlementaires pour aboutir au meilleur texte possible, pour parvenir à répondre au mieux aux besoins et aux attentes des Français de Polynésie. Nous avons pris de la fierté à oeuvrer en faveur de la différenciation des territoires et de la prise en compte des particularités locales, comme nous nous en fixons l'objectif dans la prochaine révision constitutionnelle. Il nous revient désormais de parachever ce travail.

Les commissions mixtes paritaires ont ensuite procédé à l'examen des dispositions restant en discussion.

EXAMEN DES ARTICLES DU PROJET DE LOI ORGANIQUE

Mme Yaël Braun-Pivet, députée, présidente. - Je vous propose d'entamer nos travaux comme l'ont fait nos deux assemblées, c'est-à-dire avec le projet de loi organique.

L'Assemblée nationale a approuvé la quasi-totalité des choix opérés par le Sénat, de sorte qu'un seul article demeure en discussion.

Article 1er

Mme Yaël Braun-Pivet, députée, présidente. - Je mets aux voix l'article 1er dans la rédaction issue des travaux de notre commission mixte paritaire.

L'article 1er du projet de loi organique portant modification du statut d'autonomie de la Polynésie française, seule disposition restant en discussion, est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

EXAMEN DES ARTICLES DU PROJET DE LOI

Mme Yaël Braun-Pivet, députée, présidente. - Nous en venons au projet de loi portant diverses dispositions institutionnelles en Polynésie française.

La commission mixte paritaire est saisie de onze articles encore en discussion.

Article 1er

L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale.

Article 2

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale.

Article 3

L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale.

Article 4

L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 7

L'article 7 est adopté dans la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale.

Article 10

L'article 10 est adopté dans la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale.

Article 13

L'article 13 est adopté dans la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale.

Article 14

La commission mixte paritaire supprime l'article 14.

Article 15

L'article 15 est adopté dans la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale.

Article 16

La commission mixte paritaire supprime l'article 16.

Article 17

L'article 17 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Mme Yaël Braun-Pivet, députée, présidente. - Y a-t-il des demandes de prise de parole ?

Mme Lana Tetuanui, sénatrice. - Je voudrais déplorer, même si les textes comprennent des avancées importantes, la suppression par l'Assemblée nationale de deux articles auxquels j'étais très attachée, notamment celui sur la lisibilité du droit.

Les lois sont votées à Paris, à 20 000 kilomètres de la Polynésie française, et elles ont souvent déjà changé avant d'être appliquées dans nos nombreuses îles ! Je regrette par exemple le tout dernier décret, pris en application de la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle, qui a imposé la délivrance gratuite des actes d'état civil, ce qui constitue un manque à gagner important pour les mairies. Les élus polynésiens nous en ont fait le reproche : que faisiez-vous à Paris pendant le vote de cette loi ? Mais je place ma confiance dans le président de notre commission des Lois, M. Philippe Bas, pour continuer à porter ce sujet de la lisibilité du droit.

J'ai parlé récemment avec le président de la Polynésie française : notre vote est attendu avec impatience. Je vous remercie tous pour l'adoption de l'article 1er du projet de loi organique. Mais notre combat n'est pas fini : il faut maintenant faire en sorte que la Polynésie décolle vraiment économiquement.

Mme Maina Sage, députée. - Mes chers collègues, je souhaite également vous remercier et m'associer aux propos de ma collègue sénatrice Lana Tetuanui. Ce texte, qui a fait l'objet de quatre ans de travaux entre le gouvernement de la Polynésie française et l'État, a trouvé un accueil très positif au Sénat qui l'a adopté à l'unanimité. J'en remercie le rapporteur, M. Mathieu Darnaud.

À l'Assemblée nationale, nous avons également recherché les conditions d'un accord de l'ensemble des groupes, au moins sur l'article 1er de la loi organique. Ce dernier est, en effet, très important pour la Polynésie française. Si 99 % des demandes de la Polynésie française ont été acceptées lors de l'examen par le Sénat, l'écoute dont a fait preuve le rapporteur de l'Assemblée nationale, M. Guillaume Vuilletet que je remercie, nous permet d'aboutir à un accord unanime aujourd'hui.

M. Philippe Gosselin, député. - Une fois n'est pas coutume, je salue la sagesse du Gouvernement qui a permis, en séance publique, de modifier à la marge la référence à la contribution de la Polynésie française à la défense nationale. Grâce à cela, nous nous retrouvons aujourd'hui pour entériner une évolution législative très importante pour les Polynésiens qui résulte d'un échange fructueux entre la majorité et l'opposition, mais aussi entre le Sénat et l'Assemblée nationale. Ce résultat est fidèle à l'esprit des accords de l'Élysée.

Mme Catherine Kamowski, députée. - Je partage la satisfaction générale d'être parvenu à un moment d'unité nationale par un vote unanime sur l'article 1er du projet de loi organique. Cela confirme la place du territoire polynésien dans la République et ce que nous lui devons malgré les milliers de kilomètres qui nous séparent. La Polynésie française avait besoin que la loi puisse s'appliquer sur son territoire en tenant compte de ses spécificités, dans un esprit de différenciation équitable.

La commission mixte paritaire adopte le texte du projet de loi portant diverses dispositions institutionnelles en Polynésie française issu de ses délibérations.

La réunion est close à 9 h 55.