Mardi 31 octobre 2023

- Présidence de M. Jean-François Longeot, président -

La réunion est ouverte à 16 heures.

Audition de M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports

M. Jean-François Longeot, président. - Mes chers collègues, nous avons le plaisir d'accueillir, pour ouvrir le cycle des auditions budgétaires, Monsieur Clément Beaune, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports.

Monsieur le ministre, avant d'entrer dans les détails du volet du projet de loi de finances pour 2024 relatif aux transports, je souhaite aborder la question de la révision de la trajectoire d'investissement de l'État en faveur des infrastructures de transport prévue par la loi d'orientation des mobilités (LOM) de 2019, un sujet qui tient à coeur aux membres de notre commission. Rappelons que l'article 3 de la LOM prévoyait une actualisation de cette trajectoire au plus tard avant le 30 juin 2023, puis tous les cinq ans.

Cette échéance est à présent dépassée et l'actualité de l'année 2023 a confirmé l'obsolescence de la trajectoire élaborée en 2019. Dans la foulée de la remise du rapport du Conseil d'orientation des infrastructures (COI) en février dernier, qui a proposé plusieurs scénarii de programmation en matière d'infrastructures de transport à l'horizon 2042, la Première ministre a présenté le plan d'avenir pour les transports, dont la régénération, la modernisation et le développement des réseaux de transport, ainsi que le soutien à l'intermodalité, constituent des axes majeurs.

La mise en oeuvre de cette nouvelle feuille de route a d'ailleurs déjà commencé : j'en veux pour preuve l'examen récent, par notre commission, de la proposition de loi relative aux services express régionaux métropolitains (Serm). Comme l'a rappelé Philippe Tabarot, rapporteur de ce texte, le choc d'offre en matière de transports collectifs que ce texte tend à provoquer dans dix métropoles nécessitera des investissements majeurs. L'État n'a pourtant pas encore précisé l'ampleur de son engagement financier sur ce sujet.

Or, les acteurs réclament une visibilité de long terme concernant la trajectoire d'investissement de l'État en matière d'infrastructures de transport, à commencer par l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit France) et les collectivités territoriales. Surtout, il est urgent de mettre cette trajectoire en cohérence avec les objectifs et priorités déjà annoncés par le Gouvernement.

Dès lors, où en est la préparation de la révision de la trajectoire financière de la LOM ? S'agissant des modalités de cette révision, envisagez-vous de passer par une loi portant spécifiquement sur les infrastructures de transport qui prendrait la forme d'une « LOM 2 », ou par un autre véhicule législatif qui ne serait pas spécifique aux transports ? Avez-vous d'ores et déjà une idée du calendrier d'examen de ce futur texte ?

J'en viens au sujet qui nous réunit, à savoir le projet de loi de finances (PLF) pour 2024. Les trois rapporteurs pour avis vous interrogeront tout à l'heure sur les dispositions qui concernent leurs secteurs respectifs. Je souhaite pour ma part vous entendre sur l'article 15 du texte, qui a une portée plus transversale. Cet article vise en effet à instaurer une taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance à laquelle seraient assujetties les entreprises dont les revenus d'exploitation excèdent 120 millions d'euros par an.

Si le dispositif concerne en principe tous les modes de transport, l'exposé des motifs indique que la taxe pèsera uniquement sur les sociétés concessionnaires d'autoroutes et sur les plus grands aéroports. Pouvez-vous préciser le champ des acteurs concernés par cette nouvelle taxe ? Est-il certain qu'elle n'aura pas de répercussions sur les modes massifiés que sont le mode ferroviaire et le mode fluvial ?

Dans le prolongement de cette question et du cycle d'auditions mené par notre commission avant l'été sur l'avenir des concessions autoroutières, je souhaite évoquer la fin des contrats de concession, dont la première échéance est prévue dès 2031. L'État dispose de peu de temps pour mener à bien ce chantier d'ampleur. Tout d'abord, pourriez-vous nous indiquer où en sont les travaux s'agissant de la définition du « bon état de retour » des infrastructures au concédant ? Dans son rapport de 2023 portant sur l'économie des concessions autoroutières, l'Autorité de régulation des transports (ART) a rappelé l'importance de cette question afin d'assurer la continuité du service autoroutier par-delà la fin des contrats en cours.

S'agissant de la préparation des futurs contrats, le régulateur a recommandé de réinterroger certains postulats du modèle concessif actuel. En particulier, il préconise de recourir à des contrats plus courts - d'une durée de vingt ans - pour permettre une remise en concurrence plus régulière.

À défaut d'une réduction de la durée des futurs contrats, l'ART préconise un renforcement de la régulation, au travers une revue périodique des paramètres des contrats et le renforcement des pouvoirs du régulateur, qui pourrait rendre des avis plus contraignants. Quel est l'état de la réflexion du Gouvernement s'agissant des modalités des futurs contrats concessifs et quel regard portez-vous sur ces propositions ? 

Pour terminer, je souhaiterais vous interroger sur l'avenir du fret ferroviaire dans notre pays. Comme vous le savez, il s'agit d'une préoccupation majeure pour notre commission, qui conduit un cycle d'auditions sur ce sujet dans le contexte de la procédure engagée par la Commission européenne sur les conditions de financement de Fret SNCF sur la période 2007-2019. Nous nous inquiétons de l'avenir de Fret SNCF et, au-delà, des conséquences de cette procédure pour le fret ferroviaire, qui semblait pourtant enfin renouer avec une dynamique positive. Aussi, monsieur le ministre, pourriez-vous dresser un état des lieux des discussions en cours sur l'avenir de Fret SNCF et sur les modalités du plan de discontinuité envisagé ?

M. Clément Beaune, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports. - Je suis heureux d'évoquer devant vous le PLF pour 2024 et les priorités retenues dans ce texte. Je rappelle en premier lieu qu'il importe, depuis la LOM, de conserver une perspective pluriannuelle et exhaustive quant aux investissements de l'État en matière de transports.

Le PLF pour 2024 est marqué - j'insiste sur ce point - par une très forte augmentation des moyens dédiés aux transports. L'année précédente, j'avais déjà présenté un budget en augmentation de 13 % et une hausse équivalente est prévue en 2024. Sur une période de deux ans, les engagements financiers de l'État en faveur des mobilités auront donc connu une progression de près de 30 %.

Dans le cadre de la planification écologique, la Première ministre a annoncé un renforcement des moyens consacrés à la transition écologique avec 7 milliards d'euros en crédits de paiement et 10 milliards d'euros en autorisations d'engagement. Les transports représentent la majeure partie de cette hausse, avec 1,6 milliard d'euros prévus dans le PLF. Plus largement, il faut considérer l'ensemble du périmètre consolidé : outre le programme 203, d'autres outils budgétaires sont concernés, dont le bonus écologique, les aides à l'aéronautique ou encore l'Agence de financement des infrastructures de France et la Société du Grand Paris (SGP), ce qui porte l'effort total en faveur des transports à 13,6 milliards d'euros.

Ce budget se concentre sur les grandes priorités que j'avais décrites lors de ma prise de fonction, à savoir les transports du quotidien et la décarbonation transversale des transports. Quelque 8 milliards d'euros sont ainsi alloués aux mobilités vertes, c'est-à-dire principalement les transports ferroviaires et collectifs, mais aussi le transport fluvial et le vélo ; environ 2 milliards d'euros sont consacrés au verdissement de secteurs fortement polluants, à commencer par le transport aérien et le transport routier ; enfin, l'enveloppe restante sera dédiée à la modernisation du réseau routier. Par ailleurs, un budget annexe prévoit 1 milliard d'euros pour soutenir la modernisation et l'amélioration de la sécurité de la navigation aérienne.

Au-delà de ces axes de la décarbonation et des transports du quotidien, une attention particulière est apportée au transport ferroviaire et aux transports collectifs, qui représentent 85 % du coeur des crédits du ministère des transports, à savoir le programme 203.

Parmi les lignes directrices de cet effort essentiel en faveur du transport ferroviaire, j'insiste sur le chantier crucial de la régénération et de la modernisation du réseau ferroviaire, invisible mais dont les conséquences se font sentir dès lors que les investissements sont trop faibles. Nous atteignons désormais le niveau d'investissement le plus élevé depuis plusieurs décennies, avec 3,5 milliards d'euros l'an passé. L'objectif fixé par la Première ministre est d'atteindre 4,5 milliards d'euros d'ici à la fin de la législature en 2027.

En 2024, 300 millions d'euros supplémentaires sont consacrés à la régénération ferroviaire, un montant très vraisemblablement appelé à être pris en charge par le groupe SNCF compte tenu de ses résultats : au lieu de verser ses dividendes à l'État, il lui sera demandé d'investir dans ladite régénération, avant de définir ensuite une trajectoire pluriannuelle lisible, dans le cadre d'un contrat de performance révisé.

Une enveloppe de 3 milliards d'euros est aussi prévue pour les trains d'équilibre du territoire (TET), avec d'importants investissements pluriannuels sur des lignes trop longtemps négligées. Parmi elles, la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (Polt), la ligne reliant la capitale à Clermont-Ferrand ou encore la ligne Bordeaux-Marseille, sur lesquelles les travaux de modernisation et de régénération s'accompagnent du rachat de nouvelles rames.

Le fret ferroviaire est également inscrit au coeur de nos priorités. Comme je l'avais annoncé le 23 mai dernier, des investissements à hauteur de 4 milliards d'euros sont prévus sur dix ans dans les infrastructures, qui sont la clé de l'augmentation de la part modale du fret ferroviaire, conformément à la stratégie visant à doubler celle-ci dans le volume total du fret d'ici à la fin de la décennie.

J'insiste, en outre, sur les Serm, qui s'inscrivent dans les deux grands axes des transports du quotidien et de la décarbonation. Près de 800 millions d'euros sont prévus dans les contrats de plan État-région (CPER) en cours de discussion. Il s'agit d'un premier effort significatif de l'État qui sera ensuite complété pour chacun des Serm, schéma par schéma.

Je n'oublie pas l'enjeu de la qualité de service, le choc d'offre amorcé par les investissements devant se conjuguer au déploiement de nouveaux outils. Des polémiques ont été lancées au sujet du PLF pour 2024, dont seraient absents des crédits destinés au financement du Pass Rail ou du titre unique de transport. L'État mobilisera bien des crédits pour les financer, dans le cadre d'une discussion avec les régions qui doit permettre de rendre le Pass Rail opérationnel dès 2024. Parallèlement, nous expérimenterons, avec les collectivités volontaires, le titre unique que j'ai souhaité lancer en février 2023.

J'en viens à vos questions, monsieur le président. Tout d'abord, la visibilité pluriannuelle sur notre effort en matière de transports est non seulement une obligation prévue par la LOM, mais aussi un impératif politique, puisque nous devons présenter avec clarté notre engagement sur la durée.

Dans le prolongement du rapport du COI, la Première ministre a indiqué en février 2023, à l'occasion de la présentation du plan d'avenir pour les transports, que le scénario de la planification écologique nous sert de boussole. Celui-ci implique des investissements compris dans une fourchette de 25 milliards à 30 milliards d'euros d'ici à 2027. Cet engagement pourrait se matérialiser dans un document stratégique, mais ma préférence va à une loi de programmation. À cet effet, je consulte actuellement les groupes politiques du Sénat et de l'Assemblée nationale afin de trouver une voie de passage au milieu d'un agenda parlementaire fort chargé et de faire aboutir un tel texte. Une visibilité pluriannuelle consolidée sera présentée dans les prochaines semaines.

Compte tenu de l'ampleur de ces investissements, nous assumons de demander une contribution supplémentaire à certains acteurs du secteur des transports, avec la taxe sur les grandes concessions figurant à l'article 15. Les secteurs autoroutier et aéroportuaire devront ainsi contribuer au financement de la décarbonation pour un montant estimé à 600 millions d'euros par an, soit une recette estimée à 2,5 milliards d'euros d'ici à 2027 qui représenterait environ 10 % des investissements prévus par le scénario de planification écologique.

Ces recettes seraient affectées à l'Afit France, afin de clairement démontrer qu'elles sont destinées à financer les investissements dans les transports, et plus largement la décarbonation. Cette taxe n'a pas manqué de susciter des questions et des inquiétudes : je réaffirme, en particulier pour le secteur autoroutier, que l'évolution des tarifs des péages est encadrée par des contrats, et entérinée chaque année par des arrêtés du Gouvernement.

Même si certains représentants du secteur soutiennent une interprétation contraire, le Gouvernement estime que cette taxe est parfaitement conforme auxdits contrats. Il ne sera donc pas possible d'augmenter des tarifs au titre de cette taxe. Aussi, si certains représentants du secteur ont évoqué la perspective d'un recours ou d'une procédure contentieuse, j'affirme avec confiance que nous avons pris toutes les précautions juridiques garantissant la robustesse juridique de la taxe proposée, qui ne modifie aucunement la formule d'évolution des tarifs des péages autoroutiers.

J'en viens à la question, plus stratégique, de la fin des concessions, appelées à expirer à partir de 2031. Si la décision concernant leur avenir ne peut pas être prise au cours de cette législature, il importe de la préparer, de la manière la plus sereine possible. À cet effet, j'ai évoqué la piste d'une commission la plus ouverte possible - à des ONG, à des économistes et à des représentants des sociétés concernées - qui étudierait toutes les options juridiques, économiques et stratégiques qui s'offrent à nous pour l'après 2031. Ce travail doit être lancé dès à présent et je vous apporterai des précisions dans les prochaines semaines sur les modalités de ce travail de prospective.

J'ai toujours considéré que le modèle concessif présente de nombreux avantages, notamment celui de nous fournir des perspectives de long terme. Pour autant, ses paramètres peuvent être débattus et évoluer. Vous avez évoqué les préconisations de l'ART, dont celle qui vise à réduire la durée des contrats : il s'agit d'une des pistes à explorer pour cette future commission de travail.

S'agissant du fret ferroviaire, la Commission européenne a lancé une procédure le 18 janvier 2023 au titre des aides d'État supposées, ce que le Gouvernement déplore. Nous devons cependant en prendre acte, puisque nous sommes dans un État de droit.

Nous avons désormais le choix entre deux options, la première consistant à ignorer la procédure ou à se battre pied à pied avec la Commission européenne pendant de longs mois. Un tel positionnement nous expose au risque de devoir rembourser 5,3 milliards et, même s'il fallait ne s'acquitter que d'une partie de cette somme, l'opérateur public de fret ferroviaire n'y survivrait pas.

L'autre option, qui a ma préférence, a été retenue par le Gouvernement. Difficile, elle vise à parvenir à un accord rapide avec les autorités européennes afin d'assurer la pérennité de l'opérateur de fret ferroviaire. Des garanties sont d'ores et déjà actées, à commencer par l'absence de licenciements et le maintien de 90 % des emplois au sein de la nouvelle structure de fret ferroviaire, les autres agents devant rester au sein du groupe SNCF.

Un opérateur public pourra continuer son activité sur une partie du périmètre actuel, et il faudra éviter un report modal inversé, ce qui explique le plan de réinvestissement massif dans le fret, non seulement au moyen d'aides à l'exploitation augmentées et pérennisées, mais aussi et surtout par le biais de la rénovation des grandes gares de fret ferroviaire telles que celles de Miramas ou de Woippy. Nous mettrons ainsi un terme au sous-investissement en consacrant les sommes nécessaires.

Voilà, en résumé, les mesures que je pense être les plus protectrices des agents, de l'écologie et du fret ferroviaire. Vous l'aurez compris, je crois dur comme fer dans ce mode de transport.

M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes. - Avant de vous interroger sur les dispositions et crédits du PLF pour 2024 consacrés aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes, monsieur le ministre, je me félicite de constater que nos multiples alertes, conjuguées au rapport du COI, ont enfin servi d'électrochoc. La Première ministre a ainsi présenté le 24 février dernier un plan d'avenir pour les transports prévoyant 100 milliards d'euros d'investissements d'ici à 2040. Bien que de nombreuses zones d'ombre subsistent, dont l'épineuse question du partage du financement, cette perspective de long terme mérite d'être saluée.

Horizon inédit pour certains, communication de plus pour d'autres, je souhaite pour ma part vérifier la force de cette ambition. Vous évoquez un effort sans précédent pour 2024, nous y voyons bien plus une progression de petits pas. Placé au carrefour des enjeux de la décarbonation, de la hausse des prix des carburants, de l'accessibilité aux zones peu denses ou encore de la décongestion des métropoles, le secteur des transports doit désormais progresser bien plus vite.

S'agissant du transport ferroviaire, je m'interroge sur la déclinaison concrète du plan d'avenir pour les transports et de cette « nouvelle donne ferroviaire » annoncée par la Première ministre en février dernier. Plus de huit mois plus tard, où en sommes-nous ? Certes, nous observons dans le PLF pour 2024 une augmentation des crédits consacrés aux transports ferroviaires, et je m'en réjouis.

Pour autant, les moyens déployés ne sont pas encore à la hauteur des objectifs. Nous le voyons dans le cadre de l'examen de la proposition de loi relative aux Serm dont je suis le rapporteur et qui ne prévoit aucunement les modalités de financement de ces projets. Certes, près de 800 millions d'euros de crédits devraient être engagés pour les études préalables dans les CPER, mais nous ne savons rien de l'engagement de l'État afin de financer les travaux.

Ce constat pourrait être décliné à bien d'autres égards : pour ne prendre qu'un exemple, nous n'avons toujours ni visibilité ni trajectoire de financement précise pour la modernisation du réseau ferroviaire, alors que nous accusons un retard considérable sur le déploiement de l'European Rail Traffic Management System (ERTMS) et de la commande centralisée du réseau.

Comme vous le savez, le transport ferroviaire est un secteur de temps long. À la fois pour conserver notre filière industrielle d'excellence, mais aussi pour permettre aux transporteurs et aux gestionnaires d'infrastructures d'assurer leurs missions dans de bonnes conditions, Nous avons donc besoin de visibilité. Aussi - je rejoins le président sur ce point -, à quand une nouvelle loi de programmation pour les infrastructures de transports ou, a minima, une ventilation des dépenses des 100 milliards d'euros annoncés par la Première ministre ? Et à quand une révision du contrat de performance entre SNCF Réseau et l'État qui a fait l'unanimité contre lui ?

Par ailleurs, pourriez-vous faire le point sur l'avancée du chantier Lyon-Turin, qui est un sujet de préoccupation majeur pour notre commission ?

Pour ce qui concerne le transport fluvial, je rappelle que la révision du contrat d'objectifs et de performance de Voies navigables de France (VNF), conclu en avril 2021, a permis de fixer un cap au développement du transport fluvial pour la période 2020-2029.

En application de la LOM, ce document doit être révisé en 2023 pour la première fois : où en sont les travaux d'actualisation de ce document ? Dans ce cadre, prévoyez-vous de revoir à la hausse la trajectoire d'investissements de VNF en faveur du réseau fluvial - qui s'établit actuellement à 3 milliards d'euros d'ici à 2030 -, afin de tenir compte du plan d'avenir pour les transports et des nouvelles recettes qui seront dégagées grâce à la taxe sur les infrastructures de transport de longue distance que vous avez évoquée ?

S'agissant du transport maritime et des ports, je souhaite évoquer le règlement européen sur le déploiement d'une infrastructure pour carburants alternatifs, adopté en septembre dernier. Ce texte fixe notamment des objectifs ambitieux en matière de déploiement d'infrastructures de recharge dans les ports maritimes pour permettre l'alimentation électrique des navires à quai. Il est par exemple prévu, d'ici à 2030, que les ports appartenant au réseau central du réseau transeuropéen de transport (RTE-T), les plus fréquentés, soient équipés pour fournir chaque année l'alimentation électrique à quai pour au moins 90 % des escales effectuées par des navires porte-conteneurs de plus de 5 000 tonnes.

Le projet de loi de finances pour 2024 ne comporte aucune mesure sur ce point, si ce n'est l'enveloppe de 175 millions d'euros prévue par le plan de relance depuis 2021, désormais presque intégralement consommée. Comment le Gouvernement envisage-t-il d'accompagner financièrement les ports maritimes dans cette transition ?

Enfin, allez-vous vous mobiliser aux côtés des élus pour contester la suppression, sans aucune concertation préalable, des lignes régulières d'Air France depuis Nice vers Orly ? Véritable faute, cette décision met en danger l'attractivité de notre merveilleuse Côte d'Azur : nous ne pouvons l'accepter.

M. Stéphane Demilly, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs au transport aérien. - Monsieur le ministre, après avoir traversé les turbulences de la crise sanitaire, le transport aérien entre aujourd'hui dans une période plus sereine. Selon la direction générale de l'aviation civile (DGAC), le trafic aérien devrait atteindre en 2024 son niveau de 2019. Le ciel n'est toutefois pas encore pleinement dégagé pour le secteur, et je m'interroge sur plusieurs mesures fiscales du PLF pour 2024 qui le concernent.

L'article 13 du PLF prévoit des mesures relatives à la taxe incitative relative à l'utilisation d'énergie renouvelable dans les transports (Tiruert). L'objectif cible d'incorporation de carburants aériens durables passe ainsi de 1,5 % en 2024 à 2 % en 2025.

Autrement dit, si les compagnies aériennes n'atteignent pas la cible, elles paieront une pénalité équivalente au montant du manque de carburant durable, lui-même multiplié par un coefficient d'une pénalité de non-respect des règles. Sans oublier le fait que, sur le plan fiscal, le double compte, c'est-à-dire la multiplication par deux des montants incorporés, disparaît : seule l'incorporation réelle de carburant durable sera dorénavant prise en compte.

Or la plupart des compagnies s'acquittent du paiement de la taxe et n'incorporent pas le pourcentage cible actuel, qui n'est que de 1 %. Le Président de la République a dévoilé à l'occasion du salon du Bourget un plan, qui me semble encore timide, en faveur des carburants aériens durables. D'où ma première question : comment comptez-vous accompagner ces objectifs d'incorporation ?

Ma deuxième interrogation porte sur la taxe sur l'exploitation d'infrastructures de transport de longue distance, un intitulé assez long qui signifie en clair que l'on souhaite mettre à contribution les grands aéroports tels que ceux de Paris et de Nice.

Les aéroports me semblent être les victimes collatérales d'une collision malheureuse entre la volonté gouvernementale de taxer les profits des concessions autoroutières et l'analyse du Conseil d'État qui considère qu'il ne peut y avoir qu'un seul « mouton noir » dans le transport. Il en résulte une nouvelle offensive contre le transport aérien, déjà victime, pourtant, d'une transition énergétique particulièrement coûteuse.

L'impact de cette taxe devrait avoisiner une centaine de millions d'euros sur les aéroports du groupe Aéroports de Paris (ADP), qui seront ensuite naturellement répercutés sur les redevances payées par les compagnies aériennes, et au premier chef par Air France.

Comment comptez-vous limiter les effets de distorsion de concurrence de ce dispositif au détriment d'Air France et au profit des compagnies étrangères low cost présentes dans les aéroports régionaux ?

Par ailleurs, des amendements visant à accroître les prélèvements fiscaux sur l'aviation d'affaires ont été adoptés par nos homologues de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire de l'Assemblée nationale. Quelle est votre position personnelle sur ces propositions ?

Toujours au sujet du transport aérien, je me réjouis de la stabilité des crédits consacrés aux lignes d'aménagement du territoire (LAT). Je tiens à vous rappeler, monsieur le ministre, que la commission fait preuve d'une vigilance renforcée sur ces lignes essentielles au désenclavement de certains territoires.

Notre instance est également particulièrement investie sur un sujet central pour nos concitoyens, à savoir la limitation des nuisances sonores aéroportuaires. La taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA) souffre d'un rendement en berne depuis la crise sanitaire. À l'inverse, le niveau de nuisances ne diminue pas.

Pour rattraper le retard pris dans les travaux d'isolation phonique des bâtiments, un abondement budgétaire important est nécessaire, mais celui-ci ne semble pas figurer parmi les mesures. S'agit-il d'un oubli délibéré de votre part ?

J'en viens maintenant à la situation de la DGAC. Je tiens à saluer l'ambition affichée concernant sa trajectoire de désendettement. La commission veillera à ce que cette dernière soit respectée, sans pour autant obérer les nécessaires investissements de modernisation.

Néanmoins, je m'inquiète du risque de dérapage des dépenses de personnel, d'où ma cinquième question : quel est le coût de l'accord de « trêve olympique » conclu avec le principal syndicat des contrôleurs aériens et la DGAC en septembre dernier, que l'on pourrait qualifier de paix négociée ?

Enfin, et pour conclure, permettez au sénateur de la Somme que je suis de vous poser une dernière question sur le projet de barreau ferroviaire Roissy-Picardie et la ligne ferroviaire de 6,5 kilomètres reliant Vémars et Marly-la-Ville dans le Val-d'Oise. La signature d'un accord européen est évoquée afin de boucler, à fin 2026, le financement d'un projet qui est passé de 350 millions d'euros en 2017 à 570 millions d'euros aujourd'hui. Confirmez-vous cette information ?

M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports routiers. - Je souhaite vous interroger, monsieur le ministre, sur quatre points.

Le premier concerne les zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m). D'une part, l'article 26 du PLF pour 2024 prévoit la rétrocession du produit des amendes prononcées en ZFE-m aux collectivités territoriales. À ce sujet, où en est le développement de l'outil de lecture automatisée des plaques d'immatriculation (Lapi), dont le déploiement accuse déjà plusieurs années de retard ? La nouvelle échéance du deuxième semestre 2024 sera-t-elle respectée ? S'agissant de l'acquisition du dispositif, sera-t-elle entièrement à la charge des collectivités territoriales ou un soutien financier est-il à l'étude ?

D'autre part, Madame Barbara Pompili a rendu il y a quelques jours son rapport consacré à l'acceptabilité des ZFE-m. Elle y recommande notamment d'inscrire ces zones dans une politique globale de mobilité, afin de développer les alternatives à l'usage individuel de la voiture. Dans cette perspective, il me semble indispensable de renforcer l'interopérabilité des titres de transport : la billettique peut en effet être un levier efficace pour encourager l'intermodalité et tendre vers des mobilités « sans coutures » à l'échelle des bassins de vie.

Identifiez-vous des pistes pour encourager le développement de systèmes billettiques interopérables au niveau local, en intégrant l'ensemble des services de transport alternatifs à l'autosolisme et en articulant les offres de transport relevant des différentes autorités organisatrices de la mobilité ?

Le deuxième point concerne les aides à l'acquisition de véhicules propres pour les usagers, et plus particulièrement le leasing social qui doit permettre aux ménages les plus modestes de louer un véhicule électrique pour 100 euros par mois. Les documents budgétaires indiquent que ce dispositif, annoncé depuis le printemps 2022 par le Gouvernement, entrera en vigueur au 1er janvier 2024.

Or, en dépit de l'imminence de cette échéance, les paramètres et les modalités de mise en oeuvre du dispositif n'ont toujours pas été clarifiés. Pourriez-vous nous présenter les règles d'éligibilité à ce leasing social, et nous indiquer si des critères spécifiques sont prévus pour tenir compte de la proximité d'une ZFE-m ?

En complément, où en est-on de la mise en oeuvre de l'expérimentation sur le prêt à taux zéro sur l'acquisition de véhicules peu polluants pour les personnes travaillant ou résidant en ZFE-m, introduit dans la loi « Climat et résilience » d'août 2021 sur l'initiative de notre commission ?

J'en viens à présent aux infrastructures de transport routier, en vous interrogeant à mon tour sur l'article 15 du PLF pour 2024, qui porte création d'une taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance. Il est prévu d'affecter le produit de cette taxe, qui pourrait s'élever à 600 millions d'euros pour la première année, à l'Afit France, ce dont on peut a priori se réjouir tant son action constitue un levier de report modal au bénéfice des modes massifiés.

Cela étant, la mise en oeuvre de cette nouvelle taxe suscite plusieurs interrogations. Tout d'abord, comment pouvez-vous garantir concrètement que cette taxe ne sera pas répercutée sur les usagers des autoroutes, qui ont déjà subi d'importantes augmentations des péages ces dernières années ?

Ensuite, plusieurs dirigeants de sociétés concessionnaires d'autoroutes ont fait publiquement part de leur intention de porter cette taxe au contentieux si elle venait à être instaurée, considérant qu'elle n'est pas conforme à la clause de neutralisation fiscale prévue par les contrats de concessions. Ces déclarations sont de nature à nous inquiéter quant à la solidité juridique du dispositif. Comment pourrions-nous renforcer la robustesse de cet article ?

J'en arrive à la problématique du financement des mobilités en zones peu denses. Nous nous réjouissons de l'introduction de l'article 27 bis, qui porte relèvement du taux plafond du versement mobilité de 0,25 point à Paris et dans les trois départements de la petite couronne.

Pour autant, cela ne règle pas la question plus profonde du financement des mobilités dans les zones les moins denses, dont la base fiscale ne suffit pas à lever le versement mobilité et qui sont marquées par une plus grande dépendance à l'automobile que les zones urbaines. Comment envisagez-vous de soutenir ces territoires dans leur marche vers des transports moins carbonés ?

Pour finir, je relaie une interrogation de mon collègue Olivier Jacquin qui rappelle que la transition écologique et le déploiement des ZFE-m nécessitent une augmentation considérable des moyens financiers dédiés aux transports collectifs. Le Groupement des autorités responsables de transport (Gart) sollicite une concertation nationale sur le versement mobilité : êtes-vous prêt à répondre à cette demande et à débattre, sans tabou, d'une révision de l'ensemble des paramètres, à commencer par le seuil d'assujettissement et la liberté de fixer les plafonds localement, en particulier lorsque les territoires sont dépourvus d'une base fiscale adéquate ?

M. Clément Beaune, ministre délégué. - Monsieur le sénateur Philippe Tabarot, vous m'avez interrogé sur le choix du support du plan d'avenir pour les transports, afin de lui conférer la plus grande visibilité possible. Vous aurez compris mon intérêt pour une loi de programmation, qui reste à ce stade une hypothèse de travail étudiée avec l'ensemble des groupes politiques de l'Assemblée nationale et du Sénat.

Quoi qu'il arrive, le scénario de planification écologique servira de référence au Gouvernement. Le PLF pour 2024 se fonde bien sur cette trajectoire.

J'insiste, de plus, sur le fait que différentes briques du plan d'avenir ont d'ores et déjà été posées, dont la nouvelle génération des CPER. Le montant annuel, tel qu'il ressort de deux tiers des mandats adressés aux préfets pour la part de l'État, connaît ainsi une augmentation de 50 % par rapport à la génération précédente, traduisant bien la priorité accordée à des investissements renforcés, en particulier dans le ferroviaire et les transports collectifs.

De surcroît, nous avons lancé le chantier des Serm, dont une première part du financement est intégrée aux CPER. La deuxième part ne peut quant à elle pas être déterminée dans l'immédiat puisqu'elle dépendra de la nature des projets portés par les collectivités locales, plus ou moins avancés selon les cas. Une fois la loi votée, un délai de quelques mois leur sera accordé afin qu'elles soumettent leurs projets. Après validation par le ministère, les études et les premiers travaux suivront, en mobilisant d'abord les crédits des CPER puis en prévoyant une étape de négociations financières, qui pourrait prendre la forme de conférences de financement.

Pour ce qui concerne la régénération du réseau ferroviaire, je rappelle que l'objectif consiste à augmenter les investissements annuels de 3 à 4,5 milliards d'euros d'ici à 2027, le PLF pour 2024 permettant de franchir la première marche. Cet effort revêtira dans un premier temps la forme d'investissements internes au groupe SNCF ; dans un second temps, il conviendra d'actualiser un contrat de performance qui a au moins le mérite de donner une perspective sur dix ans.

Le secteur des transports est indéniablement complexe de par la diversité des outils budgétaires et la décentralisation des compétences. Néanmoins, mis bout à bout, ces outils traduisent concrètement l'ambition du plan d'avenir pour les transports.

S'agissant du projet Lyon-Turin, l'État a pris un engagement clair sur le financement des accès. J'ajoute qu'une discussion constructive a été relancée avec le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez, en particulier au sujet du financement des études des accès, discussion qu'il conviendra de faire aboutir d'ici à la fin 2023. Le scénario du grand gabarit étant retenu, il faut désormais en assurer le financement : l'État est prêt à aller jusqu'à 3 milliards d'euros, tandis que la région est prête à cofinancer la phase d'études.

Pour ce qui concerne VNF, le schéma d'emploi retenu signifie que l'État ne demandera pas à l'établissement public de « rendre » des emplois, malgré le fait que la modernisation et l'automatisation libèrent des effectifs. Ce geste significatif, qui répond à une demande formulée par le Sénat, démontre l'importance que nous accordons au transport fluvial.

Par ailleurs, la révision du contrat d'objectifs et de performance (COP) de VNF est engagée et doit aboutir d'ici à la fin de l'année. Conformément aux travaux du COI, la trajectoire d'investissements sera rehaussée, tout en poursuivant la modernisation de l'établissement. Je souhaite d'ailleurs rendre ici hommage à son directeur général Thierry Guimbaud, qui a accompli un travail remarquable.

L'électrification des ports maritimes découle quant à elle de la réglementation européenne, qui fixe l'horizon de 2030 pour l'ensemble des ports du réseau transeuropéen. Nous avons mobilisé à cette fin 175 millions d'euros dans le cadre du plan de relance, 115 millions d'euros au titre des CPER et parfois d'autres crédits tels que le fonds vert, utilisé par exemple à Marseille-Fos pour accroître l'effort de l'État en complément des actions de la région et de la ville.

Comme l'a annoncé le Président de la République lors de sa visite dans la cité phocéenne, nous devrions même être en avance par rapport à nos obligations européennes en matière d'électrification à quai. Cela devrait être également le cas des ports du Havre et de Dunkerque.

J'en viens aux lignes aériennes en remarquant que le Gouvernement, accusé à la fois de fermer et de maintenir des lignes, porte sans doute une position de juste milieu. Si la décision incriminée a été prise non pas par l'État mais par Air France, je regrette avec vous la méthode retenue, trop rapide. Une discussion approfondie en amont avec les élus concernés aurait été préférable.

Néanmoins, il s'agit d'une étape de travail et j'ai demandé à la direction d'Air France de mener des discussions afin que la desserte soit assurée au bon niveau, y compris au-delà de l'horizon de 2026 annoncé par la compagnie. Cette desserte pourrait être assurée par Transavia, mais la discussion ne fait que commencer et je souligne qu'Air France est attachée - et les élus, de façon légitime, encore davantage - à la qualité d'une desserte vers Paris, indispensable tant sur le plan économique que touristique. Je suivrai ces travaux de concertation de près.

Monsieur le sénateur Stéphane Demilly, la filière des carburants durables est appelée à devenir stratégique et j'appelle à la cohérence dans ce domaine : on ne peut pas demander des efforts à l'aviation si on ne soutient pas, y compris par des aides publiques, sa stratégie de décarbonation. Ces aides recouvrent les 300 millions d'euros annuels versés par le Conseil pour la recherche aéronautique civile (Corac), ainsi que l'enveloppe de 200 millions d'euros annoncée par le Président de la République au Bourget afin de financer des investissements sur des sites de production de carburants durables.

Concernant la Tiruert, il nous faut mettre en adéquation la réglementation française avec le système européen. Si nous avons été pionniers dans ce domaine en mettant en place des mandats d'incorporation de ces carburants durables, la réglementation européenne va désormais plus loin en durée et en ambition. Il est bien sûr exclu d'imposer à nos compagnies des systèmes contradictoires, et c'est bien le système issu du règlement ReFuelEU qui sera appliqué.

J'en viens à la taxe sur les infrastructures et en particulier aux aéroports. Le débat sur les seuils est légitime : s'ils avaient été fixés à un niveau trop bas, les aéroports régionaux, mais aussi certains ports, auraient été mis à contribution alors qu'ils ne disposent pas des mêmes capacités contributives, avec de possibles répercussions sur l'emploi et la desserte. D'où ce choix du Gouvernement de proposer une taxe assortie d'un seuil.

Il faudra évaluer ses effets dans les années à venir, notamment en déterminant si le mécanisme profite à des compagnies low cost qui opèrent plutôt dans les aéroports régionaux que dans ceux concernés par la taxe. Attaché au pavillon français, je serai très vigilant quant à ces effets induits de compétitivité relative. Je note d'ailleurs avec satisfaction que la compétitivité d'Air France s'est rétablie, notamment grâce au soutien de l'État.

Pour ce qui est de ma position sur l'aviation d'affaires, elle n'a pas varié depuis le mois d'avril dernier : je souhaite pouvoir compléter la taxe portée par la dernière loi de finances sur les avions détenus en propre par une taxe équivalente sur les avions loués.

La TNSA, ensuite, mériterait effectivement d'être refondue afin de continuer à financer les travaux nécessaires contre les nuisances aéroportuaires. Des difficultés de délai de financement existent depuis la sortie de la crise du covid.

Pour en venir à l'accord de « trêve olympique » conclu dans le secteur du contrôle aérien, je considère qu'il n'est ni une rançon ni une honte, mais qu'il est au contraire un motif de fierté. Les syndicats signataires l'ont en partie rendu public, et je ne communiquerai pas de chiffres précis aujourd'hui dans la mesure où les négociations sociales se poursuivent. Le syndicat majoritaire, dont le courage doit être salué, a fait preuve de responsabilité, ce qui a permis d'aboutir à un accord raisonnable tenant compte de l'inflation.

Dans la perspective des jeux Olympiques, il est de notre responsabilité collective de nous prémunir contre tout blocage des transports aériens qui nuirait à l'image de la France. Cet accord, aussi majeur qu'équilibré, a au contraire permis d'anticiper les difficultés et doit être salué. De la même manière, le Sénat a voté la proposition de loi de Vincent Capo-Canellas qui réforme le contrôle aérien tout en respectant le droit de grève. Prenons de la hauteur et considérons l'image d'ensemble : le secteur aérien se modernise grâce aux efforts de ses salariés et agents, dans le cadre d'un dialogue social qui s'est amélioré.

S'agissant du projet Roissy-Picardie, une solution de financement des surcoûts devra être trouvée pour ce chantier majeur. Si nous n'avons pas obtenu un financement européen pour l'instant, l'État assumera une part importante afin de permettre l'aboutissement du projet dans les délais prévus.

Monsieur le sénateur Hervé Gillé, le marché de la Lapi a été lancé et l'horizon fixé reste celui de 2024. Pour ce qui est de l'interopérabilité des titres de transport, plusieurs régions et métropoles sont volontaires pour expérimenter le titre unique de transport avant sa généralisation dans les deux années à venir, ce qui permettra de roder ce dispositif.

Concernant le leasing social, les paramètres seront présentés dans les prochaines semaines. En effet, les réservations devront être ouvertes avant la fin de l'année afin que les premiers véhicules soient disponibles en 2024. Nous avons retenu un critère environnemental qui conduira à privilégier des véhicules produits en France et en Europe : personne ne comprendrait, en effet, que des subventions écologiques soient accordées à des industries étrangères.

Ce choix assumé de souveraineté aura pour conséquence de ne mettre à disposition du public, dans un premier temps, qu'un nombre relativement réduit de véhicules, qui se compteront par dizaines de milliers plutôt que par centaines de milliers. La montée en puissance de ce dispositif devra néanmoins permettre d'atteindre 100 000 véhicules d'ici à la fin de la législature. Il est aussi appelé à être très attractif, puisque certains véhicules seront accessibles à moins de 100 euros par mois. Enfin, le débat sur la priorité à accorder à certains territoires pourra être mené. 

La taxe sur les infrastructures, de nouveau, n'entraînera pas une augmentation du prix des péages. Je tiens à réaffirmer - peut-être est-ce une conception surannée - que le Gouvernement conçoit les projets de taxe ensuite votés par le Parlement, et que les assujettis doivent ensuite s'y plier.

Concernant les zones peu denses, je partage votre avis au sujet du versement mobilité et des limites de leur potentiel fiscal. Néanmoins, d'autres solutions existent : dans le cadre du plan France Ruralités, 90 millions d'euros de crédits spécifiques sont ainsi prévus pour financer et soutenir des solutions de mobilité rurale développées par les intercommunalités. Il peut s'agir, par exemple de l'autopartage ou du déploiement de bornes électriques.

Sur la question de Monsieur le sénateur Olivier Jacquin relayée par Hervé Gillé, je suis favorable à la proposition du Gart d'organiser une concertation nationale. L'Assemblée des départements de France (ADF) et Régions de France m'ont également sollicité sur le sujet.

La question du financement des mobilités doit être posée, notamment dans le cadre des Serm, mais pas seulement. Monsieur le sénateur Philippe Tabarot a poussé l'idée d'une conférence de financement ; je ne sais pas ce que décidera la commission mixte paritaire, mais je suis ouvert à ce que l'État assume cette discussion de manière globale avec l'ensemble des collectivités.

M. Guillaume Chevrollier. - Monsieur le ministre, vous avez fait part de votre engagement pour les transports du quotidien avec une part importante pour le ferroviaire. En Mayenne, le TGV est très fréquenté ; les trains sont complets. La région des Pays de la Loire va annoncer la commande d'une trentaine de nouvelles rames. Allez-vous la soutenir pour améliorer la desserte ferroviaire dans le Grand Ouest ?

Je rappelle que cette même région a subi l'abandon du projet de Notre-Dame-des-Landes et que les engagements du contrat d'avenir signé il y a quatre ans ne sont pas tenus, notamment en ce qui concerne le réaménagement de l'aéroport.

Je siège au Conseil national de l'air. La RATP s'est engagée pour améliorer la qualité de l'air dans les transports souterrains parisiens. L'Europe est également mobilisée pour relever ces ambitions. Quel accompagnement le Gouvernement entend-il apporter à la RATP sur ce sujet ?

M. Clément Beaune, ministre délégué. - Oui, il y a des progrès à faire sur la desserte à grande vitesse, qui rencontre des problèmes de fiabilité depuis cette année. J'ai engagé un travail avec la SNCF pour comprendre les dysfonctionnements. Des problèmes conjoncturels doivent être résolus et, de manière générale, il faut conserver et améliorer cette desserte.

Nous devons investir encore davantage dans les mobilités, et ce d'autant plus dans la région Pays de la Loire, envers laquelle l'État à une dette. Cela veut dire assumer et avancer sur la question de l'aéroport Nantes-Atlantique, comme je l'ai fait à Nantes en annonçant que nous devions relancer la procédure d'appel d'offres concernant sa modernisation. Je préfère lancer une concertation avec les élus pour améliorer la nouvelle procédure et la réengager le plus rapidement possible plutôt que de tergiverser.

J'ai assumé ce choix et me rendrai de nouveau à Nantes à la mi-novembre pour m'entretenir avec l'ensemble des élus concernés. J'espère que nous aurons, d'ici là, abouti sur le contrat de plan État-région, qui traduira concrètement - et non de manière « éthérée » comme dans un slogan - la priorité donnée aux mobilités en région Pays de la Loire dans la relation avec l'État.

Sur la qualité de l'air, qui ne concerne pas que la région parisienne, je remercie la région Île-de-France et Île-de-France Mobilités, laquelle a renforcé les moyens donnés à son opérateur principal et historique pour déployer des moyens de ventilation et de filtration innovants et améliorer, comme l'ont annoncé Jean Castex et Valérie Pécresse, la transparence sur la qualité de l'air.

L'un des problèmes à cet égard est que nous ne disposons pas de normes de référence pour mesurer la qualité de l'air dans un réseau souterrain comme le métro. L'établissement de normes européennes mettrait fin aux fantasmes.

Je redis que, si des efforts pour améliorer la qualité de l'air sont nécessaires, il n'y a pas de risques à prendre les transports publics. Le remarquable plan mené par la RATP n'a pas montré de prévalence des maladies respiratoires. Nos transports publics sont un atout pour la santé publique et la décarbonation des mobilités, et non une contrainte.

M. Pascal Martin. - Une nouvelle fois, je souhaite vous interroger sur le projet de contournement est de Rouen, essentiel pour les 500 000 habitants de la métropole et pour la région Normandie. Les conditions de circulation actuelle sont intolérables, tant pour les particuliers que pour les entreprises.

Cela fait cinquante et un ans que ce contournement est attendu. Tous les recours ont été purgés par le Conseil d'État, validant la déclaration d'utilité publique de 2020. En 2021, le Premier ministre Jean Castex avait engagé une consultation en vue de la mise en concession pour « engager très concrètement » le projet, ce que le Président de la République a confirmé à Rouen.

Les collectivités territoriales se sont engagées financièrement à hauteur de 245 millions d'euros. Un courrier, cosigné par plus de mille élus locaux, traduisant l'impérieuse nécessité du projet a été adressé à la Première ministre.

Quand l'État, maître d'ouvrage de ce projet, s'engagera-t-il concrètement et définitivement sur ce projet ?

M. Jacques Fernique. - L'augmentation des crédits se décline-t-elle concrètement dans le scénario retenu de planification écologique ? Il y a certes des signaux : CPER, nouvelles taxes... Pour autant, si vous affirmez qu'il y aura moins de projets routiers, celui de l'A69 est maintenu et l'importance du secteur routier se maintient, voire augmente - les crédits sont stables en euros constants.

Pour le rail, nous n'avons pas d'éléments tangibles prouvant que le plan de 100 milliards d'euros est engagé. En février dernier, la Première ministre nous annonçait que la déclinaison opérationnelle du plan d'avenir pour les transports serait construite d'ici à l'été ; manifestement, ce n'est toujours pas le cas. Nous avons vu que les 300 premiers millions étaient destinés à abonder le fonds de concours de la SNCF.

Au regard de la planification écologique, ne s'agit-il pas d'un budget d'attente ? Notre rapporteur a évoqué une progression par petits pas. Des arbitrages déterminants doivent être pris pour que la loi de programmation pluriannuelle soit effective : financement des Serm, versement mobilité, principe du pollueur-payeur pour le kérosène...

M. Éric Gold. - Monsieur le ministre, vous êtes venu récemment à Clermont-Ferrand, où vous avez pu mesurer les fortes attentes, légitimes, des usagers de la ligne Clermont-Paris. Le temps de trajet régresse et les incidents se répètent - irrégularités et suppressions de trains - la faute à un matériel inadapté et vieillissant. Notre ville est le chef-lieu de département le plus mal relié à la capitale.

Le schéma directeur de la ligne porté par l'État et SNCF Réseau prévoit d'importants travaux de modernisation de la voie ferrée pour près de 900 millions d'euros. La livraison des nouvelles rames Oxygène, prévue pour la fin de 2023, a été largement différée. Pouvez-vous m'apporter des éléments de calendrier précis et nous rassurer sur le budget et la disponibilité des crédits ?

M. Jean-Claude Anglars. - Mon collègue Éric Gold a parlé de la ligne Paris-Clermont ; pour ma part, j'irai jusqu'à Rodez. En effet, le train de nuit Paris-Rodez est une catastrophe.

L'an dernier, vous m'avez indiqué que vous étudiiez la possibilité de renouveler le matériel roulant. Pouvez-vous nous donner un calendrier sur ce sujet ?

Par ailleurs, le tronçon Rodez-Sévérac-le-Château constitue un chaînon manquant sur la RN 88. L'État vient de concéder ce tronçon à la région Occitanie et au département. Ce dernier s'est engagé à réaliser les travaux. Cet itinéraire est particulièrement accidentogène : deux décès ont encore eu lieu la semaine dernière sur cette ancienne route nationale, qui doit être transformée en deux fois deux voies. Où en sont les discussions dans le cadre du CPER ?

M. Franck Dhersin. - Chacun connaît la situation de Fret SNCF : injonctions de l'Europe, déficit... Comment la voyez-vous évoluer dans les mois à venir ? C'est important pour les trois ports de mon département, qui utilisent le fret.

M. Jean-Pierre Corbisez. - Il y a un an, le Président de la République annonçait sa volonté de relancer les RER métropolitains, volonté qui s'est récemment traduite par des engagements financiers lors du Conseil de planification écologique.

Je me réjouis que le Serm de Lille soit concerné. Au-delà de la création d'une voie entre Lille et Hénin-Beaumont, une nouvelle gare doit être créée à Lille. L'enveloppe prévue dans le CPER est estimée à 700 millions d'euros de subventions de la part de l'État pour un projet coûtant de 7 milliards à 9 milliards d'euros.

Pouvez-vous confirmer que ce premier versement permettra de lancer les études préalables et les premiers investissements et que le ministère continuera de suivre ce projet dans le temps ?

Mon département compte une plateforme trimodale, Delta 3, terminus des trains de la soie. Or lorsque les entreprises de mon département veulent utiliser le fret ferroviaire, on les renvoie d'office vers Geodis, la filiale de transport routier de la SNCF. Comment comptez-vous intervenir pour rendre le fret accessible au plus grand nombre ?

M. Gilbert-Luc Devinaz. - L'avancement des travaux de la ligne Lyon-Turin me semble difficile à cerner. En toute logique, les accès au tunnel devraient être livrés en même temps que le tunnel de base, en 2030. Or, nous sommes loin de tenir ce calendrier.

Vous avez répondu à Philippe Tabarot que le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes envisageait de participer au financement des études, mais ce dernier a posé la condition que d'autres collectivités territoriales le fassent également. Où en sont les négociations avec les départements ?

Dans le même temps, SNCF Réseau envisage de moderniser la ligne historique Modane-Dijon. J'ai lu que le COI aurait souhaité limiter l'accès à ce futur tunnel par cette liaison. Avouez que des précisions s'imposent !

M. Pierre Barros. - On peut se féliciter de la centaine de milliards d'euros mis sur la table, même si le sujet est inépuisable en matière de financement. Toutefois, je m'interroge sur la rénovation des réseaux existants. Des moyens sont nécessaires pour que les Serm historiques fonctionnent mieux, notamment pour réaliser des travaux d'électrification - je pense notamment au secteur de Périgueux, dans la circonscription de Marie-Claude Varaillas.

Le plus gros Serm de France, c'est la région parisienne. Il existe et doit être remis à niveau. Où en est-on de la rénovation des réseaux RER et Transilien ? Les délais ne cessent de s'allonger, à la fois sur le matériel roulant, les infrastructures et les systèmes de régulation. Il s'agit d'une question stratégique, le réseau national étant fait de telle sorte que tout transite par Paris.

Je constate que le projet de CDG Express, qui fait l'objet de financements publics et privés, avance plus vite que la remise à niveau du RER B.

Par ailleurs, la ligne TGV Amiens-Creil-Roissy est un très mauvais exemple. En tant que maire de Fosses, j'ai participé aux travaux avec les élus pour déterminer par où passerait la ligne, et le tracé retenu par SNCF Réseau n'est pas celui des élus. C'est regrettable.

M. Cédric Chevalier. - Le fret aérien se développe fortement et entraîne la création de nouvelles pistes, ce qui va à l'encontre de la politique environnementale du Gouvernement en matière de consommation du foncier.

Des solutions existent en province pour seconder les plateformes parisiennes. Parmi elles, l'aéroport de Vatry, situé à moins de 150 kilomètres de la capitale, présente de nombreux avantages : il comporte la plus longue piste d'atterrissage d'Europe et une plateforme pouvant traiter 200 000 tonnes de fret par an. Il peut accueillir tous types d'avions, tous les jours de l'année, en limitant les nuisances pour les riverains.

Les collectivités soutiennent à bout de bras cet aéroport ; elles ne peuvent pas faire plus. Le président du conseil départemental a même évoqué au début de l'année sa mise en vente à des opérateurs chinois.

L'État doit trouver des solutions pour réinternaliser les flux de fret en France et réduire l'impact carbone. Quelle est votre position sur ce sujet, et en particulier sur l'aéroport de Vatry ?

M. Fabien Genet. - En Saône-et-Loire et en Bourgogne du sud, la liaison entre Moulins-sur-Allier, Paray-le-Monial et Lyon fait l'objet d'une grande mobilisation des cinq intercommunalités irriguées par cet axe. C'est une question d'aménagement du territoire : les métropolitains installés en Bourgogne du sud doivent pouvoir aller travailler à Lyon.

Or le constat est sans appel : sous-utilisation du matériel roulant, pas d'aller-retour Lyon-Paray-le-Monial dans la journée... La ligne compte l'un des plus forts taux d'irrégularité, ce qui dissuade les habitants de prendre le train.

L'an dernier, vous m'aviez dit qu'une rénovation était prévue en 2025 et que des études étaient en cours. Certes, nous ne sommes pas encore en 2025, mais le dossier a-t-il avancé ? Les travaux nécessaires d'urgence entre Saint-Agnan et Gilly-sur-Loire pourront-ils être réalisés dès 2024 ?

Enfin, la ligne entre Étang-sur-Arroux et Autun - ville sous-préfecture, soeur de Rome il y a deux mille ans et porte du Morvan - a été neutralisée pour travaux en mars 2020, puis jamais rouverte.

L'expérimentation d'une navette autonome, qui serait capable de rouler et sur la route et sur le rail, est évoquée. Soutenez-vous cette innovation ? Se concrétisera-t-elle ?

M. Alexandre Ouizille. - Ma question prolonge celle de mon collègue de la Somme sur la ligne Roissy-Picardie. Vous avez eu des mots apaisants, mais où en sommes-nous des discussions avec l'Union européenne sur le financement ? Quid de l'engagement pris par l'État de boucler le tour de table des financements ?

En pétitionnant en gare de Creil, j'ai été interpellé par des habitants me disant qu'ils avaient acheté dans cette ville en pensant que la ligne arriverait bientôt. Quels délais avez-vous en tête pour l'achèvement de cette ligne ?

M. Sébastien Fagnen. - Depuis de trop nombreuses années, la Normandie pâtit d'une desserte ferroviaire changeante et irrégulière. Il y a une quinzaine d'années émergeait l'idée d'une ligne Paris-Normandie, qui apporterait de nombreux bénéfices - meilleure qualité de service, ponctualité, augmentation du trafic - et renforcerait l'attractivité de la région, qui compte des ports investis pour le développement des énergies marines renouvelables, en particulier celui de Cherbourg.

Toutefois, pour que cette ligne devienne réalité, un fort volontarisme doit prévaloir. Les collectivités normandes se sont investies, notamment pour la réalisation du saut-de-mouton près de la gare de Clichy-Levallois. Quel est le plan de financement de l'État pour concrétiser la ligne Paris-Normandie et selon quel calendrier ?

M. Alain Duffourg. - Je termine ce tour de France avec l'Occitanie : qu'en est-il du CPER ? Jean Castex avait permis de financer la deux fois deux voies entre Auch et Toulouse, dans une zone enclavée. Des financements sont-ils prévus pour poursuivre cette route jusque dans les Landes ? Où en sont les travaux de la RN 21, promis depuis environ cinquante ans ?

M. Clément Beaune, ministre délégué. - Je répondrai rapidement à vos questions et vous propose, si nécessaire, de compléter mes propos par des échanges directs ou écrits.

Sur le contournement est de Rouen, la priorité que vous avez affirmée est très claire, monsieur le sénateur Pascal Martin. Je n'entrerai pas dans le détail de chaque projet autoroutier car sous quelques semaines, une revue d'ensemble permettra de faire le point sur l'avancement des projets en cours. J'ai bien entendu votre position et celles relayées par d'autres acteurs récemment.

Monsieur le sénateur Jacques Fernique, en ce qui concerne les routes, les injonctions contradictoires font partie de la vie démocratique. (.)Il y a toujours des projets routiers ou autoroutiers, mais nous réduisons de 50 % la part des crédits routiers dans les CPER. Il s'agit d'un engagement de rééquilibrage modal très clair au profit du ferroviaire.

Je ne reviens pas sur nos engagements pour moderniser le réseau ferroviaire : le contrat de performance doit être ajusté pour graver dans le marbre l'effort progressivement et significativement accru en ce sens.

Le principe de pollueur-payeur se traduit dans la taxe sur l'exploitation des infrastructures de transport de longue distance qui vous est soumise : nous faisons contribuer les secteurs les plus polluants pour décarboner l'ensemble du secteur et développer les modes les moins polluants.

Sur le kérosène, les négociations se tiennent à l'échelle européenne. La France a demandé qu'un texte soit proposé par la Commission européenne. Les négociations sont en cours pour une taxation européenne, au-delà de la réforme de la directive ETS (European Trading Scheme).

Sur les lignes jumelles Paris-Clermont et Polt, monsieur le sénateur Éric Gold, mon engagement est clair. Je préside moi-même tous les trois mois le groupe de travail pour suivre les améliorations de qualité de service à court terme. Le schéma directeur à moyen terme est le suivant : premières livraisons de nouvelles rames en 2025, fin des livraisons en 2026 et fin des travaux en 2027.

Je suis conscient des perturbations tant que le réseau n'est pas finalisé, mais les rames Oxygène existent. Je vous propose d'ailleurs d'aller les voir en test avec d'autres élus. Je rappelle que l'État investit 1,3 milliard d'euros rien que pour la ligne Paris-Clermont.

Ma réponse vaut également pour la ligne Polt.

Pour être clair sur la RN88, il s'agit en effet, dans le cadre de la loi 3DS de février 2022 (loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et la simplification), de l'une des routes que nous transférons en partie à la région et en partie au département de l'Aveyron, car le président du conseil départemental Arnaud Viala y tient particulièrement. Sur le volet budgétaire, la discussion se tiendra, dans le cadre du CPER, avec la région, en association avec le département pour déterminer les crédits qui seront mobilisés.

Monsieur le sénateur Franck Dhersin, sur le fret, la situation évolue. L'opérateur Fret SNCF doit, selon l'équilibre que je défends, remettre des trains sur le marché. Les contacts ont été pris avec les clients depuis la fin du mois de juillet, pour qu'il n'y ait pas de report inversé. Nous devons conserver un opérateur ferroviaire public viable dans les prochains mois. Il s'agit d'assurer son avenir, et non de le laisser rembourser 5,3 milliards d'euros dans quelques mois, ce qui serait sa perte assurée.

Sur le RER métropolitain lillois, monsieur le sénateur Jean-Pierre Corbisez, il s'agit de l'un des projets les plus ambitieux et donc l'un des plus coûteux. Le CPER prévoit un financement important au titre du Serm, mais qui ne couvrira pas l'intégralité du financement de l'État. Nous devons définir avec le président de région, le président de la métropole et la Société du Grand Paris (SGP) le plan d'investissement et de financement, par étapes, dans les prochains mois.

Sur le manque d'accès au fret des entreprises locales, je reviendrai vers vous pour identifier les leviers que nous pouvons mobiliser.

Sur les accès au tunnel de la ligne Lyon-Turin, des travaux du COI ont préconisé ce décalage dans le temps de leur réalisation, mais ce n'est pas la position du Gouvernement. La priorité est d'assurer le financement du scénario du grand gabarit. C'est l'objet de la négociation que nous conduisons avec la région et les autres collectivités, notamment les départements de la Savoie et de la Haute-Savoie.

Monsieur le sénateur Pierre Barros, en effet, le Serm francilien existe : cela s'appelle le Grand Paris Express, projet déjà en route et entièrement financé. La prolongation de la ligne 14 du métro ouvrira dès l'an prochain. Sur le reste, l'investissement relève de la région et de l'autorité organisatrice de la mobilité (AOM), mais l'État est en accompagnement. C'est le principal objet de la négociation du CPER francilien que nous espérons finaliser, avec Valérie Pécresse, d'ici à la fin de l'année.

S'agissant de l'aéroport de Vatry, l'engagement est clair : il ne faut pas qu'il devienne chinois. À ma demande, le président d'Aéroports de Paris (ADP) étudie les complémentarités que nous pouvons déployer sur le fret aérien. L'aéroport a rendu de précieux services pendant la crise sanitaire liée à la covid-19 ; il convient de mettre sur pied un projet pérenne au-delà de cette période. Les équipes de gouvernance ont été renouvelées. Des perspectives existent en complément du fret de Roissy, j'en suis persuadé.

Monsieur le sénateur Fabien Genet, pour les projets en Bourgogne du sud, je reviendrai vers vous. Pour la ligne Étang-sur-Arroux-Autun, la fraternité - ou sororité - qui nous lie à Rome exige que nous soyons à la hauteur.

Pour la ligne entre Moulins-sur-Allier, Paray-le-Monial et Lyon, la discussion se poursuit dans le cadre du CPER et nous devrions avoir plus de visibilité sur le plan d'investissement partagé d'ici la fin de l'année.

S'agissant de la ligne Roissy-Picardie, je le redis : je préfère que nous ne fassions pas de plans sur la comète. C'est une déception, mais nous n'avons pas obtenu de financement européen et devons donc élaborer un plan de financement indépendant et robuste. Nous nous y attelons avec la région et le préfet de région pour que le calendrier soit tenu, c'est-à-dire la fin de la législature. Si de bonnes nouvelles nous parviennent, les sommes seront déduites des contributions des uns et des autres.

S'agissant de la ligne nouvelle Paris-Normandie (LNPN), nous avons une dette ferroviaire à l'égard de la Normandie, qui est mal desservie. Je me suis rendu en juillet au Havre avec la Première ministre, qui y a réaffirmé l'engagement de l'État sur ce projet prioritaire.

Enfin, s'agissant du CPER Occitanie, je crois pouvoir dire, monsieur Duffourg, que nous sommes proches d'un consensus avec Carole Delga sur le volet ferroviaire. Des discussions sont toujours en cours sur le volet routier, qui est plus contraint. J'espère signer un accord politique avec elle avant la fin de l'année.

M. Jean-François Longeot, président. - Je vous remercie pour ces réponses, monsieur le ministre. Nous vous transmettrons nos demandes sur les points spécifiques pour obtenir des réponses plus détaillées.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

Proposition de loi relative aux services express régionaux métropolitains - Désignation des candidats à la commission mixte paritaire

La commission soumet au Sénat la nomination de M. Jean-François Longeot, M. Philippe Tabarot, M. Didier Mandelli, M. Fabien Genet, M. Hervé Gillé, M. Simon Uzenat et Mme Nadège Havet, comme membres titulaires, et de M. Guillaume Chevrollier, Mme Marta de Cidrac, M. Franck Dhersin, M. Gilbert-Luc Devinaz, M. Pierre Barros, Mme Laure Darcos et M. Jacques Fernique, comme membres suppléants de l'éventuelle commission mixte paritaire.

La réunion est close à 17 h 40.