A droite en sortant, dans l'embrasure de la dernière fenêtre de la Galerie Est, le visiteur peut admirer quelques volumes de la Description de l'Égypte, disposés dans un des meubles spécialement réalisés à cette fin par l'ébéniste Morel.

Lors de la campagne d'Égypte (1798-1801), le général Bonaparte s'était fait accompagner de cent soixante-sept des plus grands savants de l'époque, chargés d'établir une description générale et fidèle de ce pays. Dans le même temps, étaient institués une commission et un Institut d'Égypte, dont la direction fut confiée à Vivant-Denon, futur directeur du Musée du Louvre. Dans des conditions souvent pénibles, parfois périlleuses, des géographes, des mathématiciens, des astronomes, des archéologues, des naturalistes et de très grands artistes vont conjuguer leurs talents pour glaner une immense moisson d'informations, dont Bonaparte ordonne la publication en 1802.

La campagne elle-même avait duré trois ans ; cette publication intégrale représentera une aventure de trente ans... Quatre cents graveurs sur cuivre, les meilleurs typographes des ateliers de l'Imprimerie impériale puis, après la chute de l'Empire, ceux de l'Imprimerie Royale mèneront à bien cette tâche immense, qui s'achève avec la parution, en 1828, du dernier des vingt-trois in-folio (dix de texte et treize de planches et de cartes) d'un recueil considéré comme fondateur de l'égyptologie française.

Pour enchâsser cette réalisation pharaonique, un somptueux écrin s'imposait : l'entreprise -un meuble à l'antique dans le plus pur style " retour d'Égypte "- fut menée à bien par l'ébéniste parisien, Charles Morel, à partir de décorations conçues par Edme-François Jomard.

 La Description de l'Égypte connut un énorme retentissement, si bien qu'à la même époque, d'autres " meubles égyptiens " furent confectionnés en Europe, plus extraordinaires les uns que les autres (par exemple, en 1828, celui de Johan Hoegl et Grammer, en marqueterie façon ébène, exécuté pour l'Abbaye bénédictine de Salzbourg).

Morel lui-même réalisa différents modèles de son fameux meuble, depuis l'acajou orné de bronze jusqu'au simple noyer rehaussé de bois d'amarante. Un exemplaire du meuble égyptien figure en bonne place dans la salle de lecture de la Bibliothèque de l'Assemblée nationale. Celui qui orne l'Annexe de la Bibliothèque du Sénat, en placage d'acajou, a été offert par le Roi Louis-Philippe à la Chambre des Pairs.