Imposition des revenus de source locale à Saint-Martin et à Saint-Barthélemy (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la proposition de loi organique modifiant le livre III de la sixième partie du code général des collectivités territoriales relatif à Saint-Martin, présentée par MM. Louis-Constant Fleming, Jean-Paul Virapoullé et Mme Lucette Michaux-Chevry (procédure accélérée), et la proposition de loi organique tendant à permettre à Saint-Barthélemy d'imposer les revenus de source locale des personnes établies depuis moins de cinq ans, présentée par M. Michel Magras (procédure accélérée).

Ces deux textes feront l'objet d'une discussion générale commune.

Discussion générale commune

M. Louis-Constant Fleming, auteur de la proposition de loi relative à Saint-Martin  - (Applaudissements au centre et à droite) Je mesure aujourd'hui l'étendue du chemin parcouru depuis l'adoption de la loi organique du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer, à laquelle j'avais assisté depuis la galerie des visiteurs. Deux ans et demi plus tard, devenu le premier sénateur de Saint-Martin, j'ai l'honneur de vous présenter une proposition de loi tendant à clarifier les compétences fiscales transférées par l'État à cette collectivité.

Désormais régie par l'article 74 de la Constitution, cette dernière exerce les compétences autrefois dévolues aux communes, au département et à la région de Guadeloupe, auxquelles s'ajoutent plusieurs autres compétences transférées. Elle doit ainsi accomplir des missions d'intérêt général qu'elle finance au moyen d'impôts levés sur la base de sa compétence fiscale : l'article L.O. 6314-3 du code général des collectivités territoriales dispose que la collectivité fixe les règles relatives aux impôts, droits et taxes « dans les conditions prévues à l'article L.O. 6314-4 ».

Mais ce renvoi à l'article suivant du code empêche Saint-Martin d'exercer pleinement sa compétence fiscale. En effet, l'article L.O. 6314-4 fixe une règle dite des cinq ans selon laquelle, pour être considérées comme fiscalement domiciliées à Saint-Martin, les personnes physiques ou morales auparavant domiciliées dans un département de métropole ou d'outre-mer doivent avoir résidé à Saint-Martin pendant au moins cinq ans. Cette règle visait à prévenir le risque de délocalisation de particuliers ou de sociétés vers Saint-Martin, dont on supposait que le régime fiscal serait particulièrement attractif. Ce préjugé s'est révélé faux : la fiscalité de la collectivité, nécessaire au financement de ses charges, n'a rien à avoir avec celle d'un paradis fiscal, ni pour ses résidents, ni pour les opérateurs internationaux.

Les autorités économiques et financières de l'État ont souhaité le maintien de la règle des cinq ans : nous en prenons acte. Le problème tient aux effets de cette règle sur la compétence fiscale de la collectivité et, par voie de conséquence, sur ses ressources propres. Dans l'esprit des élus de Saint-Martin comme, je le crois, du législateur organique de 2007, la règle des cinq ans est une simple règle de domicile : elle institue un critère de domicile qui s'ajoute aux critères usuels afin de déterminer la résidence fiscale d'une personne physique ou morale. Son effet sur la compétence fiscale de la collectivité devrait se résumer à ce que celle-ci ne puisse imposer selon le régime des résidents que les contribuables qui répondent à cette condition, sans préjudice du droit propre à toute juridiction disposant de la compétence fiscale de taxer suivant le régime des non-résidents les revenus trouvant leur source sur son territoire et réalisés par les autres contribuables.

Les administrations financières de l'État en ont décidé autrement : elles considèrent que la règle des cinq ans est une règle de compétence et que la collectivité de Saint-Martin n'a le droit d'exercer sa compétence fiscale qu'à l'endroit des personnes pouvant être considérées comme fiscalement domiciliées sur son territoire. Afin de trancher ce conflit d'interprétation, le Gouvernement a sollicité un avis du Conseil d'État, rendu le 27 décembre 2007, selon lequel la règle des cinq ans laissait à la collectivité le droit d'imposer les revenus de source saint-martinoise des personnes domiciliées hors d'un département de métropole ou d'outre-mer mais non des personnes qui, venant de métropole ou d'un DOM, se trouvent à Saint-Martin depuis moins de cinq ans, ni des personnes physiques ou morales n'ayant jamais cessé d'être domiciliées dans un département de métropole ou d'outre-mer.

Cette restriction de la compétence fiscale de la collectivité l'a privée des ressources fiscales attendues de l'imposition de divers revenus : bénéfices réalisés par les sociétés françaises exploitant à Saint-Martin un établissement mais ayant leur siège en métropole, dans un DOM ou depuis moins de cinq ans à Saint-Martin ; revenus fonciers et plus-values immobilières de source saint-martinoise réalisés par les nombreux contribuables domiciliés dans un département de métropole ou d'outre-mer ; dividendes de source saint-martinoise distribués à des bénéficiaires domiciliés en métropole ou dans un DOM ; salaires versés à des personnes ayant transféré leur domicile à Saint-Martin sans répondre à la condition des cinq années de résidence.

Or la collectivité de Saint-Martin, malgré des dépenses publiques modérées et une politique fiscale prudente, se trouve confrontée à de très sérieuses difficultés de trésorerie et de financement, liées aux effets du changement statutaire. La fin du versement mensuel par l'État de douzièmes provisoires calculés par rapport aux montants émis des anciens impôts directs locaux oblige la collectivité à recourir à des avances de trésorerie auprès d'établissements financiers, sans qu'il soit prévu de compenser cette charge. L'octroi de mer, qui permettait de financer les charges communales transférées, a été supprimé. Des retards ont été pris dans la perception de divers impôts -droits de mutation, taxes sur les plus-values immobilières et les conventions d'assurances- en raison de l'inadaptation des circuits financiers au changement statutaire. Enfin, la collectivité fait face au défaut total ou partiel de perception de divers impôts : c'est le cas de la taxe d'habitation, faute d'un logiciel d'application opératoire.

Ces difficultés ont convaincu les administrations économiques et financières de l'État de la nécessité de reconnaître à la collectivité de Saint-Martin une pleine compétence de juridiction fiscale sur les revenus trouvant leur source sur son territoire, sans mettre en cause la règle des cinq ans. Tel est l'objet de l'article premier. Le risque de double imposition résultant du concours des juridictions fiscales de l'État et de Saint-Martin sera éliminé par les dispositions, conformes au modèle de l'OCDE, de la convention contre la double imposition qui doit être conclue entre l'État et la collectivité. Nous ne voyons pas d'objection à ce que, dans l'attente de l'entrée en vigueur de cette convention, les dispositions relatives au crédit d'impôt prévues par le texte de la commission des lois servent à éviter la double imposition.

Nous souhaitons que certaines précisions soient apportées au dispositif statutaire concernant les compétences fiscales de la collectivité et leur application par les agents de l'État. Le préfet, ou le directeur des services fiscaux, rendrait exécutoires les rôles d'impôts directs perçus pour la collectivité. Les personnels de la collectivité, placés sous l'autorité de l'État, apporteraient leur concours à l'exécution des opérations d'assiette, de contrôle et de recouvrement des impôts. Il est important, tant pour des motifs d'emploi que d'acceptation du devoir contributif, que de jeunes saint-martinois soient associés à ces opérations.

Nous vous proposons également, par voie d'amendement, que soit reconnue au conseil territorial de la collectivité la possibilité de recourir aux règles de l'État en matière douanière pour l'application d'impositions assises sur des importations, telle la taxe sur les carburants. La collectivité n'entend pas exercer la compétence douanière mais cette procédure permet d'appliquer des impositions créées ou maintenues par la collectivité dans le cadre de sa compétence fiscale.

L'article 2 de ce texte propose que le conseil exécutif, jouant en quelque sorte le rôle d'un ministre du budget, délivre les agréments ouvrant droit à un avantage fiscal. En cas d'inertie des organismes professionnels compétents, le conseil exécutif assurerait un rôle supplétif pour désigner les membres des commissions administratives en matière fiscale. Au cas où la proposition de la commission des lois de maintenir la compétence du conseil exécutif pour la délivrance des permis de construire serait retenue, cette instance devrait déterminer l'assiette et la liquidation des taxes d'urbanisme. Nous vous soumettrons un amendement en ce sens. Le strict respect de la loi statutaire, qui réserve les opérations d'assiette, de contrôle et de recouvrement des impôts à l'administration fiscale de l'État, exclurait l'application des taxes d'urbanisme, communément assurée par les services des collectivités.

Enfin, cette proposition de loi organique comporte quelques dispositions accessoires visant à améliorer le fonctionnement général de la collectivité. L'article 5 permet de remplacer rapidement le président du conseil territorial : les dispositions prévoyant l'envoi d'un rapport aux conseillers territoriaux douze jours avant la réunion du conseil territorial ne s'appliqueraient pas à la réunion convoquée pour renouveler le conseil exécutif. L'article 3 traite des pouvoirs respectifs du président du conseil territorial et du conseil exécutif en matière de direction, d'animation et de contrôle de l'administration territoriale. Pour ces deux articles, nous nous en remettons à la sagesse de la commission des lois quant aux clarifications à apporter au dispositif statutaire. En outre, nous approuvons totalement ses propositions relatives à l'environnement.

Ce texte, qui a reçu un avis favorable du conseil territorial de Saint-Martin le 29 octobre 2009, clarifie l'exercice de la compétence fiscale de la collectivité. Il tient compte des engagements que j'ai pris dans le cadre de mes missions parlementaires et se conforme au souhait du Président de la République d'un plus grand respect de nos différences ultra-marines. Du fait de ces particularités, une mesure vitale pour un territoire peut s'avérer superflue pour un autre. Il est donc justifié que chaque collectivité, département ou territoire d'outre-mer puisse jouir de sa représentation nationale propre et dédiée.

Il est primordial que Saint-Martin exerce sa pleine compétence de source afin de disposer de son autonomie financière. Si, parallèlement, nous parvenons à consolider un partenariat avec l'État, la collectivité pourra s'ériger en modèle au sein de notre République, notamment dans le cadre de la réforme des collectivités territoriales. (Applaudissements à droite et au centre)

M. Michel Magras, auteur de la proposition de loi relative à Saint-Barthélemy.  - Cette proposition de loi organique procède à un ajustement de la loi organique statutaire du 21 février 2007 qui a érigé la commune de Saint-Barthélemy en collectivité d'outre-mer dotée de l'autonomie. En lui permettant d'imposer les revenus trouvant leur source localement, il s'agit de parachever le processus d'autonomie budgétaire et statutaire initié dans les années 1970.

Le statut fiscal particulier de Saint-Barthélemy trouve son origine dans le traité par lequel la Suède a rétrocédé l'île à la France. Le droit de quai, institué en 1974, est un des fondements de son autonomie budgétaire. Dès les premières lois de décentralisation, la commune de Saint-Barthélemy a obtenu le droit de gérer les infrastructures portuaires et aéroportuaires. Ce sont les poumons économiques de l'île, sources de développement, d'emplois et de recettes générées par les redevances sur les passagers et le mouillage des navires. En 2000, la loi d'orientation pour l'outre-mer a permis à la commune d'exercer certaines compétences départementales ou d'instaurer une taxe sur les carburants.

Saint-Barthélemy a conquis progressivement son autonomie budgétaire et s'est donné les moyens de réussir son évolution statutaire, aboutissement d'une pratique politique responsable s'appuyant sur les ressources locales tout en respectant les principes républicains. Ces années ont été animées d'une volonté farouche de trouver localement des ressources pour financer le projet de développement de l'île.

Le traité de rétrocession imposait à la France de maintenir le statut de port franc, ce qui vaut à l'île de nombreuses critiques. Toutefois, d'après l'évaluation des charges et du potentiel fiscal transféré, Saint-Barthélemy constitue davantage, pour l'État et les collectivités de la Guadeloupe, une source de recettes que de dépenses. De ce fait, la loi de finances rectificative pour 2008 a inscrit une dotation globale de compensation (DGC) des charges négative. Désormais, la collectivité ne perçoit plus de dotation de l'État mais verse chaque année 5,6 millions d'euros au budget de celui-ci.

Le mode de calcul de la dotation a suscité de nombreuses interrogations, liées à l'étendue du transfert de la compétence fiscale. Pour connaître les ressources et les charges transférées à la collectivité, l'impôt sur le revenu a été pris en compte dans le calcul du potentiel fiscal de Saint-Barthélemy. Aux termes de ce calcul, on peut considérer que l'État a transféré non pas la compétence fiscale mais sa compétence fiscale.

La question de la compétence de la collectivité pour imposer les revenus de source locale n'aurait normalement pas dû se poser. Toutefois, en raison de la clause exigeant cinq années de résidence pour obtenir le statut de résident fiscal, l'État perçoit doublement l'impôt sur le revenu pour une part non négligeable de la population : par le biais de la DGC et par l'imposition directe des non-résidents fiscaux considérés comme fiscalement domiciliés en métropole. Un an après le vote de la loi de finances rectificative pour 2008, la nécessité de modifier la loi organique pour permettre à la collectivité d'imposer une partie des revenus des non-résidents fiscaux prouve que l'imposition directe de ces derniers échappe à la collectivité, qui restitue ce trop-perçu par la DGC.

L'intention du législateur organique était de transférer à Saint-Barthélemy la compétence fiscale sur son territoire. L'objectif de la clause de résidence était de lutter contre l'évasion et la fraude fiscale. Le législateur ne s'est pas prononcé ex nihilo mais a légiféré en pleine connaissance du statut fiscal de la collectivité. D'après le code général des collectivités territoriales, « les personnes physiques ne peuvent être considérées comme ayant leur domicile fiscal à Saint-Barthélemy qu'après y avoir résidé pendant cinq ans au moins ». Il en est de même pour les personnes morales, en considérant leur siège effectif ou le contrôle de leur direction. Dans le cas contraire, ces personnes sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en métropole.

La loi fixe un principe de domiciliation fiscale sans préciser comment s'opère la répartition du droit d'imposer et du bénéfice de l'imposition. Un avis du Conseil d'État du 27 décembre 2007 a établi que la règle des cinq années de résidence doit être interprétée comme un droit exclusif de l'État d'imposer les revenus et la fortune des non-résidents. Dans une décision du 15 février 2007, le Conseil constitutionnel observait que les dispositions instaurant la clause de résidence « ne sauraient avoir pour objet, ni pour effet, de restreindre l'exercice des compétences transférées au législateur organique par l'article 74 de la Constitution », notamment dans les cas où la convention fiscale ne permettrait pas de lutter efficacement contre l'évasion fiscale.

S'appuyant notamment sur cette décision, une lecture de la loi organique considère que, par son avis, le Conseil d'État a, au contraire, réduit le champ de la compétence fiscale transférée à la collectivité. Selon un projet de convention fiscale transcrivant strictement l'avis du Conseil d'État, lorsque l'État impose, la collectivité n'a pas compétence pour imposer. L'État imposerait alors exclusivement les revenus des non-résidents fiscaux. En l'état de la rédaction de la loi organique, la convention fiscale ne peut en aucun cas prévoir une imposition partagée réglée par le biais d'un crédit d'impôt. Le rapporteur a souligné que la convention fiscale aurait dû pouvoir y remédier.

Les débats parlementaires montrent que, pour ce qui est de la condition de résidence, l'intention du législateur organique était uniquement d'introduire un mécanisme de prévention de l'évasion fiscale et en aucun cas de restreindre l'étendue de la compétence fiscale de Saint-Barthélemy. Cette proposition de loi organique a pour objet d'éliminer toute ambigüité et de conformer le texte de la loi statutaire à l'intention du législateur.

Il vous est proposé tout simplement de clarifier la loi organique statutaire afin que Saint-Barthélemy puisse imposer les plus-values immobilières réalisées sur son territoire par des personnes y résidant depuis moins de cinq ans. Ainsi, la clause de résidence cessera d'amputer la collectivité d'une partie de son potentiel fiscal, donc de son autonomie budgétaire.

Contrairement aux idées reçues, l'impôt sur les plus-values immobilières est plus systématique et plus élevé qu'en métropole : il s'établit à 37,1 % de la plus-value réalisée au cours des cinq premières années suivant l'acquisition d'un bien, soit 25 % pour la collectivité, le reste étant constitué de contributions sociales fixées et perçues par l'État.

Paradoxalement, le maintien d'un droit exclusif de l'État pour l'imposition des non-résidents fiscaux rend la spéculation immobilière à Saint-Barthélemy plus avantageuse pour les personnes fiscalement domiciliées en métropole, ce à quoi Saint-Barthélemy n'a aucun intérêt puisque la spéculation augmente les prix de l'immobilier et du foncier. Dans cet esprit, des résidents fiscaux de la collectivité pourraient installer leur société hors de son territoire pour bénéficier d'une moindre imposition des plus-values. Pareille diminution nette de ses recettes hypothéquerait rapidement l'autonomie financière de la collectivité.

Permettre à la collectivité d'imposer ces revenus renforcera la lutte contre la fraude et l'évasion fiscale. En effet, un contribuable métropolitain vendant sa résidence principale bénéficie d'une totale exonération fiscale sur la plus-value, alors que le code des contributions locales dissuade toute opération immobilière spéculative.

Le rapporteur a très opportunément souhaité préciser la rédaction initiale pour éliminer toute double imposition dès la loi organique, ce dont je me réjouis car cette précision donne son sens à la convention fiscale entre l'État et la collectivité de Saint-Barthélemy, dont le principe figure au 3° de l'article L.O. 6214-4 du code général des collectivités territoriales. Il faut dire qu'en application de l'avis déjà mentionné du Conseil d'État, le projet de convention rendait caduc le volet « élimination des doubles impositions » en opérant une répartition exclusive du droit d'imposer.

Cette proposition de loi organique parachève le statut de Saint-Barthélemy. La volonté du législateur organique est préservée puisque les résidents depuis moins de cinq ans restent soumis en priorité à la fiscalité nationale. De surcroît, l'État continue à percevoir les contributions sociales sur les plus-values immobilières. En retrouvant le droit de lever une contribution sur les biens immobiliers de source locale, la collectivité voit son autonomie budgétaire confortée. Elle affiche clairement sa volonté de limiter la spéculation sur son territoire. Le nouveau résident de l'île participe au budget de cette collectivité d'accueil et bénéficie d'un crédit d'impôt déductible de sa contribution nationale. La convention fiscale prévue par la loi organique devient indispensable, au bénéfice de l'État et de la collectivité.

Pour ces raisons, je vous propose d'adopter le texte de la commission. (Applaudissements à droite)

M. Christian Cointat, rapporteur de la commission des lois.  - Lorsque nous avons adopté le statut de Saint-Martin et celui de Saint-Barthélemy en février 2007, nous avons permis à ces deux communes de la Guadeloupe de s'ériger en collectivités d'outre-mer autonomes disposant d'importantes compétences fiscales. Pour prévenir tout risque d'évasion fiscale, nous avons instauré un garde-fou ne conférant la qualité de résident fiscal de ces collectivités qu'après cinq ans de résidence. Dans l'intervalle, les personnes physiques et morales sont réputées avoir leur domicile fiscal dans un département français. Concrètement, il s'agit de la Guadeloupe. Les intéressés sont taxés en conséquence, des conventions fiscales évitant les doubles impositions.

Ce dispositif dérogatoire ne mettait nullement en cause la compétence de source de ces deux collectivités. D'ailleurs, l'imposition exclusive par l'administration fiscale française ne figure nulle part, non plus que la moindre mesure d'interdiction pour les collectivités. Ces dispositions nous avaient paru clairement permettre que l'administration fiscale française impose les personnes physiques et morales, sans préjudice de l'imposition des mêmes contribuables par les collectivités pour leurs revenus de sources locale, les conventions fiscales réglant les aspects pratiques.

Il peut donc sembler inutile de modifier la loi organique à ce sujet. Mais alors, pourquoi examiner ces deux propositions de loi ? Est-ce parce que, nos ordres du jour étant trop chargés, il faut s'occuper de l'inutile pour reprendre la formule du poète cité dans cet hémicycle par Charles Pasqua : « C'est bien plus beau lorsque c'est inutile » ? Non, car c'est malheureusement nécessaire.

En effet, se fondant sur l'avis rendu par le Conseil d'État, les services fiscaux ont interprété la loi organique d'une manière non conforme à la volonté du législateur. En résulte le refus de reconnaître pendant cinq ans la compétence de source des collectivités, ce qui les a privées de recettes non négligeables, sans bénéfice pour le Trésor public.

Ces deux propositions de loi organique tendent donc à inscrire dans le statut que les deux collectivités exercent la compétence fiscale de source même pendant la période dérogatoire de cinq ans.

Cette compétence était implicitement reconnue dans la loi organique portant statut de ces deux collectivités. Vu l'interprétation inappropriée du texte par le Conseil d'État, votre commission n'a pu que souscrire à la proposition, afin d'éviter ambiguïtés et conflits d'interprétation. Ainsi, la volonté du législateur organique de février 2007 prévaudra sur l'interprétation rendue par le Conseil d'État en décembre de cette même année.

Un crédit d'impôt compensera les doubles impositions constatées entre le 1er janvier 2010 et la conclusion des conventions fiscales entre l'État et chacune des collectivités.

A la lumière de ces regrettables péripéties, votre commission s'est interrogée sur la pertinence, à terme, de cette règle dérogatoire de cinq ans. Étant spécifique à ces deux collectivités, ce régime pourrait suggérer que la France entretient deux paradis fiscaux. Il vous est donc proposé qu'un rapport d'évaluation soit présenté au Parlement après dix ans.

La commission a par ailleurs fait sienne une suggestion présentée à l'article premier de la proposition de loi organique relative à Saint-Martin afin d'éviter qu'un résident métropolitain ou ultra-marin ne s'établisse pendant un an à l'étranger ou dans une collectivité d'outre-mer avant de s'installer à Saint-Martin afin d'y devenir immédiatement résident fiscal. Ce serait facile, cette île étant partagée entre la France et les Antilles néerlandaises, avec une libre circulation garantie par le traité de Concordia qui a instauré cette partition en 1648.

Pour cette raison, le texte de la commission subordonne la domiciliation fiscale dans cette collectivité à cinq années de résidence à l'étranger ou à Saint-Martin.

La proposition de loi organique relative à Saint-Barthélemy se limite aux aspects fiscaux alors que celle concernant Saint-Martin porte aussi sur d'autres aspects du statut, ce que votre commission juge prématuré deux ans après son entrée en vigueur. Par suite, elle vous propose de conserver la collégialité des décisions d'autorisation du Conseil exécutif en matière d'urbanisme et de fonctionnement.

A l'article 3 de la proposition de loi organique relative à Saint-Martin, votre commission n'a donc pas modifié les dispositions relatives à la responsabilité de chaque conseiller exécutif pour les affaires et les services dont il est chargé par le président du conseil territorial. Dans ce texte, votre commission a supprimé l'article 4 autorisant le président du conseil territorial à délivrer les autorisations d'utilisation ou d'occupation du sol et à liquider les taxes afférentes aux opérations d'urbanisme et de construction.

Comme elle l'a fait en Nouvelle-Calédonie et souhaite le faire pour les autres collectivités d'outre-mer, votre commission a introduit dans chacune des deux propositions de loi organique des dispositions tendant à prendre en compte les préoccupations environnementales.

Au terme de tous ces aménagements de précision, la loi organique portant statut de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy sera enfin interprétée comme il se doit, dans l'intérêt de l'État comme dans celui des deux collectivités. (Applaudissements à droite)

M. Bernard Frimat.  - Le Sénat est appelé à examiner deux propositions de loi organique tendant à clarifier et à conforter la compétence fiscale des collectivités d'outre-mer de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy. Le sujet n'est pas inconnu de ceux qui ont examiné, en juin dernier, le projet de loi organique relatif à l'évolution institutionnelle de la Nouvelle-Calédonie et de Mayotte. En effet, certainement motivé par l'urgence liée aux difficultés financières auxquelles est confrontée la collectivité de Saint-Martin, Louis-Constant Fleming avait déposé, avant même que le rapporteur ne dépose les siens, un amendement relatif aux règles fiscales applicables à l'île. En commission, il avait retiré cet amendement, précisant avoir obtenu du Gouvernement l'assurance qu'un projet de loi organique spécifique à Saint-Martin serait déposé à la rentrée 2009.

Non seulement le Gouvernement n'a pas tenu son engagement de déposer un projet de loi, mais il est apparu que les aménagements envisagés par la proposition de loi organique relative à Saint-Martin intéressaient également la collectivité de Saint-Barthélemy. La passivité du Gouvernement aboutit à ce que le Sénat examine deux textes de rattrapage dans l'urgence et dans le cadre de la semaine sénatoriale. Le Gouvernement aurait pu et dû réagir plus tôt car il disposait de l'avis du Conseil d'État, saisi par le ministre de l'économie pour trancher la divergence d'interprétation entre les services fiscaux et les deux collectivités, depuis le 27 décembre 2007 ! Depuis presque deux ans : admirez la nécessité de la procédure accélérée ! II est donc apparu très vite que les deux nouvelles collectivités créées en juillet 2007 se trouvaient dans l'incapacité d'exercer leur compétence fiscale « de source ».

L'inaction du Gouvernement est d'autant plus blâmable que la décision du Conseil d'État a retardé la conclusion des conventions fiscales entre chacune des collectivités et l'État dès lors que celui-ci se trouvait dans l'impossibilité de rétrocéder aux collectivités les sommes qu'il n'avait pas prélevées.

Le rapporteur affirme que la volonté du législateur était claire et il a qualifié ces propositions de loi organique d'inutiles. II juge que l'avis du Conseil d'État résulte d'« une interprétation erronée » de la loi organique statutaire. Pourquoi n'a-t-il pas, en toute logique, déposé une motion tendant à décider qu'il n'y a pas lieu d'engager la discussion du texte du fait de son caractère superflu ? Cela nous aurait évité de commencer l'examen du texte suivant après 23 heures... L'avis du Conseil d'État n'ayant aucune force contraignante, le Sénat aurait pu faire l'économie de ce débat. Si, en définitive, le rapporteur a fait un choix différent, c'est sans doute que la volonté du législateur n'était pas explicite puisque le Parlement se saisit à nouveau de la question pour y apporter des clarifications.

Les deux propositions de loi organique comblant la carence du Gouvernement, il est démontré, une fois encore, l'existence d'une porosité certaine entre l'initiative parlementaire et la volonté de l'exécutif d'user de tout moyen pour faire adopter ses textes au pas de charge. D'où le recours général à la procédure accélérée, dont il faut bien convenir qu'elle devient la procédure dominante, contrairement à la volonté affirmée par tous, pendant la révision constitutionnelle, de limiter le recours à l'urgence. Il n'y a plus d'urgence, il y a procédure accélérée, ce qui, à force, pose le problème de l'utilité du bicaméralisme.

Mme Nathalie Goulet.  - C'est vrai.

M. Bernard Frimat.  - Sur l'imposition des revenus de source locale, la rédaction retenue par la commission des lois conforte la compétence fiscale des deux collectivités, détaille la répartition des compétences dans l'application des opérations fiscales, apporte les précisions nécessaires pour prévenir les doubles impositions et elle renforce la règle des cinq ans de résidence afin que cette dernière ne soit pas dévoyée au moyen de délocalisations temporaires dans le seul but d'échapper à l'impôt.

Mme Nathalie Goulet.  - « Quel crime abominable... »

M. Bernard Frimat.  - Échapper à l'impôt, lutter contre l'évasion fiscale, il m'aurait plu que le Gouvernement témoignât de la même volonté dans le projet de loi de finances où il fait précisément le contraire, en organisant un grand nombre de possibilités d'évasion par le biais de niches fiscales qui profitent majoritairement aux plus aisés. De tels procédés, amplifiés par le bouclier fiscal, portent atteinte à l'égalité et à la progressivité de l'impôt sur le revenu et écartent toute perspective de retour à l'équilibre budgétaire. Vous êtes les champions du déficit ! (M. Jean-Pierre Bel approuve)

A Saint-Barthélemy comme à Saint-Martin, il serait utile que le Gouvernement indique quels moyens de contrôle seront mis en oeuvre par l'État pour vérifier le respect des conditions de domiciliation effective sur le territoire des deux collectivités, ainsi que les procédures envisagées pour distinguer les revenus générés sur place de ceux générés en métropole ou dans les autres DOM. Là aussi, si l'État ne met pas en place de contrôles suffisants, l'évasion fiscale risque d'être importante : il sera facile, dans ce cas, de créer un siège social sur place et de continuer son activité extérieure comme si de rien n'était.

Mais les collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy devront également jouer le jeu et veiller à transmettre à l'État toute information utile afin de faciliter la recherche et la répression des fraudes. Il en va de la crédibilité du statut de collectivité d'outre-mer (COM) car on ne peut pas, dans les conditions économiques et sociales actuelles, donner, en plus, un moyen d'échapper à l'impôt à tous ceux qui peuvent se délocaliser dans ces collectivités.

Bien qu'il faille prendre en compte la situation particulière de Saint-Martin -île partagée avec les Pays-Bas et, là, M. Marleix n'y est pour rien (sourires)- et de Saint-Barthélemy, la compétitivité fiscale dans cette zone géographique ne peut tout justifier. Si l'on ne peut les qualifier de paradis fiscaux au sens strict utilisé pour les îles Caïman et leurs semblables, Saint-Barthélemy et Saint-Martin restent néanmoins des territoires particulièrement cléments au regard de l'imposition. Saint-Barthélemy ne connaît pas l'impôt sur le revenu pour ses résidents fiscaux et pour les revenus réalisés sur l'île. Quant à Saint-Martin, dès 2007, son conseil territorial a utilisé sa compétence fiscale pour y supprimer l'ISF et voter une réduction générale de l'impôt sur le revenu. Chacun appréciera.

Vu l'objectif poursuivi -la lutte contre l'évasion fiscale-, nous ne nous opposerons pas à la clarification proposée. Mais cela ne signifie pas que, pour autant, nous approuvions la situation particulière de ces collectivités d'outre-mer. Si la proposition de loi concernant Saint-Barthélemy s'en tient au seul objet fiscal, il n'en n'est pas de même pour celle concernant Saint-Martin qui comporte un chapitre Il portant sur le fonctionnement du conseil territorial et du conseil exécutif, sans lien direct avec le chapitre premier. Son examen semble inopportun et, en tout état de cause, non justifié par l'urgence. La commission des lois a, à juste titre, supprimé l'article 4 mais les motivations sur lesquelles elle s'est appuyée pourraient s'appliquer tout autant à l'article 3.

Quant à l'article 5, le rapporteur -et nous pouvons lui faire confiance sur ce point car c'est lui qui rapportait sur la loi organique portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer de 2007- juge cette disposition inutile. Nous sommes seulement dans la deuxième année d'application du statut des deux collectivités et il serait bon d'attendre pour procéder à des premiers aménagements pratiques car nous ne disposons pas du recul nécessaire pour porter une appréciation d'ensemble sur ce qui fonctionne et ce qui mérite d'être ajusté. Pour toutes ces raisons, nous avons déposé plusieurs amendements tendant à supprimer le chapitre Il de la proposition de loi organique relative à Saint-Martin. S'ils étaient adoptés, ils resitueraient le texte sur son véritable objet.

Enfin, le rapporteur a procédé dans les deux textes à une coordination environnementale qui lui tient à coeur. La volonté de protéger et de mettre en valeur les espaces naturels de ces îles est louable car la maîtrise du sol et la préservation de l'environnement sont deux des conditions d'un développement harmonieux de ces deux collectivités. Toutefois, ces dispositions apparaissent comme autant de cavaliers législatifs qui viennent se surajouter aux dispositions du chapitre II. Elles ne présentent aucun lien avec l'objet principal des deux propositions de loi organique et, au surplus, elles adaptent à ces deux collectivités des dispositions qui n'ont pas été définitivement adoptées par le Parlement.

Ces propositions de loi organique étant déférées de droit au Conseil constitutionnel, nous aurons l'occasion d'apprécier la marge de tolérance qu'il applique à la nature du lien entre un amendement et le texte que celui-ci propose de modifier. Cette question n'est pas anodine car elle intéresse directement la portée du droit d'amendement.

Voilà le sentiment du groupe socialiste sur ce texte. Nous vous donnons acte qu'il existe un problème pour les revenus de source. Nous comprenons que vous l'ayez posé : c'est votre devoir de parlementaires. Nous regrettons qu'il n'ait pas été traité en son temps par le Gouvernement, cela nous aurait évité bien des inconvénients... et le plaisir de nous retrouver ce soir ! (Applaudissements à gauche)

M. Daniel Marsin.  - Depuis plusieurs années, les deux îles de Saint-Martin et Saint-Barthélemy sont confrontées à des phénomènes d'évasion fiscale, sources de malentendus entre les services fiscaux de l'État et les collectivités territoriales concernées.

La loi organique du 21 février 2007 relative à leurs compétences fiscales prévoit une obligation de résidence d'au moins cinq ans à Saint-Barthélemy pour y avoir sa résidence fiscale. Les personnes physiques ou morales ne satisfaisant pas à cette règle sont réputées avoir leur domicile fiscal en métropole. Parallèlement, une convention fiscale devait permettre d'éviter les phénomènes de double imposition.

Pour tenir compte de la situation financière difficile de Saint-Martin, la loi organique statutaire dispose que cette règle des cinq ans ne s'y applique pas aux personnes physiques ou morales établies auparavant à l'étranger, et notamment dans la partie néerlandaise de l'île, considérées comme domiciliées fiscalement à Saint-Martin dès leur installation.

Mais alors que le législateur avait considéré que la compétence fiscale de Saint-Martin et Saint-Barthélemy autorisait ces collectivités à imposer les revenus de source locale des personnes installées depuis moins de cinq ans sur leur territoire, le Conseil d'État, saisi en décembre 2007 par le Gouvernement, a rejeté la « compétence de source » pour les deux collectivités, leur interdisant ainsi de soumettre à des impôts par elles définis les revenus de source locale. Il devenait urgent de régler le problème et de faire prévaloir la volonté du législateur. C'est ce que font ces textes, en reconnaissant aux deux collectivités la compétence de source, sans préjudice de la compétence générale d'imposition de l'État.

Ces textes participent à l'effort accompli par le Gouvernement depuis l'an dernier pour mettre fin aux niches fiscales, notamment outre-mer. Néanmoins, on peut regretter que l'État n'ait pas compensé toutes les recettes perdues par Saint-Martin. La voilà au fond logée à même enseigne que les autres collectivités territoriales françaises, qui n'attendent plus grand-chose de l'État en matière de compensation... Je le dis alors qu'en ce moment même les maires ultramarins sont réunis, comme tous les ans, à l'hôtel de ville de Paris, à la veille de l'ouverture du congrès des maires, et à quelques jours du débat, décisif pour les collectivités, sur la suppression de la taxe professionnelle.

La majorité des membres de mon groupe s'abstiendra sur ces deux textes

Pour ma part, comme sénateur de la Guadeloupe, et malgré les observations que je viens de formuler, je prends acte des avancées contenues dans ces textes et, pour accompagner mes collègues dans leur volonté de clarifier ces compétences, je les voterai. (Applaudissements sur les bancs UMP)

Mme Odette Terrade.  - Ainsi donc, certaines propositions de loi sont si urgente qu'elles méritent que le Gouvernement en appelle à la procédure accélérée...

Il y a deux ans que la Guadeloupe s'est trouvée amputée de ses îles du nord, soit la partie française Saint-Martin et Saint-Barthélemy. Si les populations locales étaient favorables à l'émergence de deux nouvelles collectivités territoriales, il n'en était pas de même pour la Guadeloupe qui avait manifesté son désaccord... Et nous voici aujourd'hui avec une collectivité territoriale de Saint-Martin comptant environ 35 000 habitants et une collectivité territoriale de Saint-Barthélemy en comptant un peu plus de 8 000. Le renouvellement sénatorial de septembre 2008 a doté le Sénat d'un parlementaire pour chacune de ces deux collectivités, élus par moins de vingt électeurs. Et il s'en est fallu de peu que deux sièges de députés soient créés, si le Conseil constitutionnel n'avait mis le holà. Lors de la discussion du projet de loi relatif au découpage électoral des élections législatives, il faudra se redemander s'il est logique que 20 000 électeurs soient représentés à l'Assemblée nationale, ou s'il ne serait pas plus logique qu'ils continuent à participer, comme par le passé, à l'élection du député de la 4e circonscription de la Guadeloupe.

M. Robert del Picchia.  - Ce débat est dépassé !

Mme Odette Terrade.  - Lors du dernier scrutin européen, Saint-Martin a voté à un peu plus de 11 % et Saint-Barthélemy un peu moins de 15 %, données qui ne permettent en aucun cas de tirer les moindres conclusions quant à l'attachement des résidents à la collectivité nationale.

Nous avons eu l'occasion de souligner les différences existant entre les deux collectivités. Saint-Martin, par la proximité d'un territoire néerlandais, est vouée à une économie touristique de masse accueillant une foule qu'on espère croissante de retraités nord-américains argentés servis par un personnel venu de l'ensemble de la Caraïbe et des Antilles. Autant dire une économie dépendante de l'évolution des cours respectifs du dollar et de l'euro, dans un contexte de moins-disant fiscal permanent, notamment dans la partie hollandaise. La position géographique de l'île en fait en outre un point stratégique pour les échanges de services, notamment bancaires et financiers, entre les différentes parties du continent américain. L'Institut d'émission d'outre-mer soulignait dans son dernier rapport les problèmes récurrents de l'économie locale : dissimulation de salariés, fausse sous-traitance, l'île comptant plus de 4 000 entreprises pour 35 000 habitants, dissimulation d'activité, dissimulation d'heures supplémentaires...

Et c'est à une économie dont la production réelle est presque impossible à déterminer que nous irions, avec ce texte, donner un système fiscal en grande partie localisé ?

Avec Saint-Barthélemy, on a plutôt affaire à une sorte de quartier huppé qui serait venu se fixer au milieu des Antilles. Et là encore, l'économie marche au tourisme et aux services qui lui sont associés, autour d'une population choisie, plus européenne qu'antillaise.

Par où les deux îles se rejoignent, c'est qu'il y règne un univers fiscal particulièrement favorable aux plus hauts revenus -pas d'ISF, pas de TVA à Saint-Martin, une fiscalité allégée pour les entreprises...

Les deux textes qui nous sont soumis ne visent qu'à donner force de loi aux codes fiscaux propres existants, et à encourager l'existence, sur notre territoire, d'un double paradis fiscal. Paradis non pas, à Saint-Martin, pour les bénéficiaires de la prime pour l'emploi, abrogée par le conseil territorial au motif d'un coût trop élevé, mais pour bien des résidents de Saint-Barthélemy, qui semblent avoir quelques difficultés à s'acquitter de leurs impôts.

Il s'agit, en somme, de préserver les apparences, tandis que l'on compte sur la diligence des chambres de commerce pour établir plus précisément la réalité de la matière fiscale. Sachant que les revenus, quel que soit leur mode d'imposition, continueront de bénéficier dans les deux îles, d'un traitement qui pas grand-chose à voir avec le principe d'égalité devant l'impôt. Vous aurez compris que nous ne voterons aucun de ces deux textes. (Applaudissements sur les bancs CRC)

Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer.  - Ce Gouvernement n'a cessé de démontrer sa détermination à voir chaque collectivité d'outre-mer adopter sa trajectoire propre en décidant de son évolution statutaire.

Vous vous êtes, en juillet dernier, prononcés sur la départementalisation de Mayotte, aboutissement d'un processus historique. Vous aurez à débattre dans quelques semaines des consultations qui se dérouleront en Guyane et en Martinique en janvier prochain.

Lors de la consultation de 2003, les communes de Saint-Martin et Saint-Barthélemy ont choisi d'avoir un destin différent de celui de la Guadeloupe. Leurs sénateurs ont rappelé que cette évolution statutaire reflète deux réalités bien différentes. Elle a entraîné de nombreux transferts de compétences complexes à mettre en oeuvre, les deux collectivités assumant désormais à la fois les compétences de la région, du département et des communes.

Parce qu'après deux ans d'exercice, ils ont identifié des blocages concrets, vos deux collègues ont chacun pris l'initiative de déposer une proposition de loi organique visant à adapter les institutions locales à leurs besoins spécifiques.

En juillet dernier, lors du vote des projets de loi organique sur la Nouvelle-Calédonie et sur Mayotte, le Gouvernement s'était montré favorable à un examen rapide de ces propositions. L'agenda parlementaire l'a conduit à appuyer cette initiative de manière à éviter qu'un autre véhicule législatif puisse être considéré comme un cavalier.

Les deux textes ont une vertu de clarification. Le rapporteur a rappelé l'origine des divergences d'interprétation. Le droit d'imposer l'ensemble des revenus de source locale doit être reconnu aux deux collectivités, une convention fiscale évitant ensuite les doubles impositions. Ces mesures seront effectives au titre des revenus 2009 si les textes sont adoptés avant le 31 décembre 2009. J'insiste sur un impératif qui justifie la procédure accélérée. (M. Bernard Frimat en doute)

La situation de Saint-Martin appelle des réponses rapides et ce dispositif est déterminant pour résoudre les difficultés créées par la perte de l'octroi de mer -12 millions de manque à gagner- ainsi que pour pallier des causes structurelles. Le Gouvernement a d'ailleurs diligenté une mission des inspections générales des finances et de l'administration à Saint-Martin. Quant à Saint-Barthélemy, l'intérêt de la proposition de loi est double : la taxation des plus-values immobilières luttera efficacement contre la spéculation immobilière tandis que l'État pourra percevoir les cotisations sociales afférentes aux revenus et biens imposés par la collectivité.

Je remercie le groupe UMP d'avoir inscrit ces textes sur son ordre du jour réservé.

M. Bernard Frimat.  - Ce n'est pas son ordre du jour réservé !

Mme Marie-Luce Penchard, ministre.  - J'avais déjà débattu de ce sujet le 20 octobre dernier. Je salue l'initiative et la réactivité de MM. Fleming et Magras pour aménager le statut de leur collectivité dans la transparence et l'efficacité. (Applaudissements à droite)

La discussion générale est close.

Discussion des articles de la loi organique relative à Saint-Martin

Article additionnel

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par M. Fleming.

Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l'article L.O. 6314-3 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu'elle exerce sa compétence dans les matières mentionnées au 1°, la collectivité peut fixer comme règles de perception et de procédure celles prévues en matière douanière par les lois et règlements de l'État. »

M. Louis-Constant Fleming.  - Il s'agit de clarifier la base juridique des impositions assises sur des volumes identifiés chez les importateurs, ainsi de la taxe de consommation sur les produits pétroliers.

M. Christian Cointat, rapporteur.  - Cet amendement, s'il se comprend très bien, est inutile puisque cette compétence appartient déjà à la collectivité. La loi n'a pas à le préciser : si vous êtes compétent, faites ce que vous voulez.

M. Bernard Frimat.  - Exactement !

M. Christian Cointat, rapporteur.  - Ne disons pas que tout ce qui n'est pas précisé dans la loi n'est pas autorisé : ce serait donner du grain à moudre à la puissance publique qui a parfois du mal à comprendre le cadre de la loi. Retrait ?

Mme Marie-Luce Penchard, ministre.  - On voit bien que vous souhaitez clarifier les choses mais nous faisons la même analyse que le rapporteur : le conseil territorial est déjà compétent. Retrait ?

M. Louis-Constant Fleming.  - Maintenant que ces garanties sont gravées dans le marbre du compte rendu, je retire l'amendement.

L'amendement n°1 est retiré.

Article premier

I. - L'article L.O. 6314-4 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) Aux premier et second alinéas du 1°, les mots : « est établi » sont remplacés par les mots : « était, dans les cinq ans précédant leur établissement à Saint-Martin, établi » ;

b) Après le 1°, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :

« 1° bis Les personnes physiques ou morales ayant leur domicile fiscal dans un département de métropole ou d'outre-mer, ou étant réputées l'avoir en vertu des dispositions du 1°, sont soumises aux impositions en vigueur dans ces départements ;

« Sans préjudice des dispositions de l'alinéa précédent, les personnes physiques ou morales ayant leur domicile fiscal dans un département de métropole ou d'outre-mer, ou étant réputées l'avoir en vertu des dispositions du 1°, sont soumises aux impositions définies par la collectivité de Saint-Martin pour les revenus ou la fortune trouvant leur source sur le territoire de cette collectivité. » ;

c) Le dernier alinéa est supprimé ;

1° bis (nouveau) Après le I, il est inséré un I bis ainsi rédigé :

« I bis. - Les modalités d'application du I sont précisées par une convention conclue entre l'État et la collectivité de Saint-Martin en vue de prévenir les doubles impositions et de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales.

« Avant l'entrée en vigueur de cette convention, les personnes physiques ou morales ayant leur domicile fiscal dans un département de métropole ou d'outre-mer ou à Saint-Martin, ont droit à un crédit d'impôt imputable sur l'impôt dû dans le territoire où se situe leur domicile fiscal au titre de l'exercice ou de l'année civile au cours desquels le crédit est constaté, à raison des revenus provenant de l'autre territoire.

« Ce crédit d'impôt, égal à l'impôt effectivement acquitté à raison de ces revenus dans l'autre territoire, ne peut excéder la fraction d'impôt due au titre de ces mêmes revenus dans le territoire où se situe leur domicile fiscal. Corrélativement, l'impôt acquitté à raison de ces revenus dans l'autre territoire n'est pas déductible de ces mêmes revenus dans le territoire où se situe leur domicile fiscal. » ;

2° Le II est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Cette convention définit les modalités de rétribution des agents de l'État. » ;

b) Il est ajouté deux alinéas ainsi rédigés :

« Les impôts directs et les taxes assimilées de la collectivité sont recouvrés en vertu de rôles rendus exécutoires par le représentant de l'État dans la collectivité. Celui-ci peut déléguer ses pouvoirs au directeur des services fiscaux compétent pour l'application de l'impôt dans la collectivité de Saint-Martin.

« Des personnels de la collectivité de Saint-Martin, placés sous l'autorité de l'administration de l'État, peuvent apporter leur concours à l'exécution des opérations visées au premier alinéa. »

II. - Le 1° et le 1° bis du I s'appliquent aux revenus afférents, suivant le cas, à toute année civile ou tout exercice commençant à compter du 1er janvier 2010 et à l'impôt sur la fortune établi à compter de l'année 2010.

Les conséquences financières résultant pour l'État de l'application du I sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

III (nouveau). - Au cours de la dixième année suivant l'entrée en vigueur de la loi organique n°2007-223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer, l'application des conditions de résidence définies au 1° du I de l'article L.O. 6314-4 du code général des collectivités territoriales fait l'objet d'un rapport d'évaluation. Ce rapport est transmis aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat avant la onzième année suivant l'entrée en vigueur de ladite loi organique.

M. le président.  - Amendement n°7, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 19

Supprimer cet alinéa.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre.  - Le Gouvernement lève le gage.

M. Christian Cointat, rapporteur.  - Avis extrêmement favorable. (Sourires)

L'amendement n°7 est adopté.

M. le président.  - Amendement n°6, présenté par M. Cointat, au nom de la commission.

Compléter cet article par trois paragraphes ainsi rédigés :

IV.- Le dernier alinéa de l'article L.O. 6380-1 du code général des collectivités territoriales est supprimé.

V.- La perte de recettes résultant pour Saint-Martin des dispositions du IV est compensée par la majoration à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement.

VI.- La perte de recettes résultant pour l'État du V est compensée par la majoration à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Christian Cointat, rapporteur.  - Nous avons sans doute voulu être trop subtils lorsque nous avons voté la loi de 2007. Nous avions alors distingué Saint-Martin, plus pauvre et voisine des dynamiques Antilles néerlandaises, et Saint-Barthélemy, commune riche. Il semblait normal d'appliquer à celle-ci le droit commun alors qu'à Saint-Martin, on permettait à ceux qui ne venaient pas du territoire départemental d'être exonérés de la règle des cinq ans, l'État se substituant, compte tenu des difficultés, à la collectivité pour prélever l'impôt. C'est vraisemblablement cette trop grande subtilité qui a laissé penser que le législateur souhaitait une compétence exclusive en matière fiscale. Nous avons donc voulu clarifier les choses : même traitement pour tout le monde, même compétence de source. Dans ces conditions, il n'y a pas de raison que l'État rembourse ce qu'il n'a pas prélevé et il est impératif de supprimer ce paragraphe pour que l'État ne soit pas lésé.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre.  - Je m'en remettrais à la sagesse si les paragraphes V et VI étaient supprimés.

M. Christian Cointat, rapporteur.  - Je rectifie l'amendement en ce sens : je ne puis qu'être très favorable à ce que le gage soit ainsi levé.

L'amendement n°6 rectifié est adopté, ainsi que l'article premier, modifié.

Article 2

I. - L'article L.O. 6353-4 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 5° Agréments et décisions desquels dépend le bénéfice d'un avantage prévu par la règlementation fiscale de la collectivité. »

II. - Après l'article L.O. 6353-4 du même code, il est inséré un article L.O. 6353-4-1 ainsi rédigé :

« Art. L.O. 6353-4-1.  - Le conseil exécutif peut participer à la désignation des membres des commissions administratives en matière fiscale, dans les conditions fixées par la réglementation fiscale de la collectivité. »

M. le président.  - Amendement n°2, présenté par M. Fleming.

Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Nonobstant les dispositions du II de l'article L.O. 6314-4, le conseil exécutif procède à la détermination de l'assiette et à la liquidation des taxes auxquelles donnent lieu les autorisations de construire et les autorisations d'utilisation et d'occupation du sol. Le conseil peut déléguer ses pouvoirs au responsable du service de l'urbanisme de la collectivité. »

M. Louis-Constant Fleming.  - Les opérations d'assiette, de contrôle et de recouvrement des impôts, droits et taxes de la collectivité sont réservées aux agents de l'État, lesquels ne sont pas en mesure d'y procéder à Saint-Martin, d'où cette dérogation à l'article L.O. 6314-4 du code général des collectivités territoriales autorisant la collectivité à déterminer et liquider la taxe due à l'occasion d'un permis de construire.

M. Christian Cointat, rapporteur.  - Le II de l'article 6314-4 est particulièrement explicite : il énonce clairement les compétences et les définit.

La commission des lois a aménagé la loi pour tenir compte des difficultés rencontrées par la collectivité de Saint-Martin, en indiquant notamment que la convention définit les modalités de rétribution des agents de l'État et que des personnels de la collectivité de Saint-Martin sous l'autorité de l'administration de l'État peuvent apporter leur concours au recouvrement. Tous les éléments sont là pour que la collectivité puisse exercer pleinement ses compétences.

En outre, votre amendement revient à transférer des compétences du conseil territorial au conseil exécutif, à rebours de l'esprit de la loi de 2007. Retrait, sinon rejet.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre.  - Le Gouvernement partage cette analyse. Sagesse, à moins d'un retrait...

M. Louis-Constant Fleming.  - Je suis satisfait d'entendre dans cette enceinte que la collectivité de Saint-Martin a toutes les compétences. Son président, présent dans les tribunes, en aura pris acte.

L'amendement n°2 est retiré.

L'article 2 est adopté.

Chapitre II Compétences du président du conseil territorial et du conseil exécutif

M. le président.  - Amendement n°3, présenté par M. Frimat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cette division et son intitulé.

M. Bernard Frimat.  - Je défendrai en même temps les amendements nos3, 4 et 5. Autant je conçois qu'il est urgent de régler un problème fiscal, autant il me paraît déplacé de profiter de ce texte pour aménager des dispositions statutaires qui n'ont pas deux ans d'âge. Le texte doit se conformer au titre du rapport, qui ne concerne que l'imposition des revenus de source.

Si ce texte vient en débat aujourd'hui, c'est que la Conférence des Présidents a jugé qu'il fallait donner satisfaction à nos collègues dans le cadre de la semaine sénatoriale pour remédier à la carence du Gouvernement, or la Constitution ne prévoit pas d'espace réservé au groupe majoritaire.

M. Christian Cointat, rapporteur.  - Je suis embarrassé car j'avais pensé, initialement, déposer des amendements identiques...

M. Bernard Frimat.  - Laissez-vous aller ! (Sourires)

M. Christian Cointat, rapporteur.  - Mais après avoir dialogué avec M. Fleming et pris attache avec les personnes intéressées, il m'est apparu utile d'apporter quelques aménagements mineurs qui ne concernaient pas directement la partie fiscale. Nous n'avons retenu qu'une infime partie de la proposition de loi organique de M. Fleming. Pour qui connaît Saint-Martin, ces ajouts ne sont pas si négligeables. Sans doute aurions-nous dû régler ces questions lors de la loi organique Dsiom... Nous profitons d'un véhicule législatif intéressant. Retrait, sinon rejet.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre.  - Ces dispositions sont nécessaires compte tenu du contexte à Saint-Martin, notamment en matière environnementale. Avis défavorable.

M. Bernard Frimat.  - Mes amendements ne portent pas sur les aspects environnementaux. Au Conseil constitutionnel de dire s'il s'agit de cavaliers : je me contente d'ouvrir l'écurie... (Sourires)

Vous dites que le projet de loi de 2007 était mal rédigé, imprécis... (M. le rapporteur le conteste) Si la procédure accélérée se justifie pour pallier la carence du Gouvernement, elle ne s'impose nullement ici. Pour Saint-Barthélemy, le texte s'en tient aux strictes dispositions fiscales.

M. Christian Cointat, rapporteur.  - Le chapitre sur l'environnement, que nous avions ajouté au texte relatif à la Nouvelle-Calédonie, ayant été validé par le Conseil constitutionnel, nous nous sommes sentis autorisés à faire de même pour Saint-Martin et Saint-Barthélemy, et nous ferons de même pour les autres collectivités d'outre-mer.

L'amendement n°3 n'est pas adopté.

Article 3

I. - L'article L.O. 6352-3 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le président du conseil territorial peut charger chacun des membres du conseil exécutif d'animer et de contrôler un secteur de l'administration de la collectivité. »

II. - L'article L.O. 6353-3 du même code est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est supprimé ;

2° La deuxième phrase du second alinéa est complétée par les mots : « en application de l'article L.O. 6352-3 ».

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par M. Frimat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

M. Bernard Frimat.  - Je l'ai défendu.

L'amendement n°4, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

L'article 3 est adopté.

L'article 4 demeure supprimé.

Article 5

La seconde phrase du premier alinéa de l'article L.O. 6322-2 du même code est complétée par les mots : « , et sans que les dispositions de l'article L.O. 6321-22 trouvent à s'appliquer à la réunion du conseil territorial convoquée à cette fin ».

M. le président.  - Amendement n°5, présenté par M. Frimat et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Supprimer cet article.

M. Bernard Frimat.  - Je l'ai défendu.

L'amendement n°5, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

L'article 5 est adopté, ainsi que l'article 5 bis.

Article 6

Les conséquences financières résultant pour l'État de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. le président.  - Amendement n°8, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre.  - Nous supprimons le gage.

L'amendement n°8, accepté par la commission, est adopté et l'article 6 est supprimé.

Vote sur l'ensemble de la proposition de loi organique relative à Saint-Martin

M. Jacques Gillot.  - Je partage l'analyse de M. Frimat, et j'étais tenté de m'abstenir avec mon groupe, mais par solidarité avec ces deux collectivités, je voterai les deux textes.

M. Bernard Frimat.  - Nous avions dit que nous ne nous opposerions pas à ce texte. Nos amendements ont été refusés : nous nous abstiendrons donc.

En application de l'article 59 du Règlement, l'ensemble de la proposition de loi organique est mise aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 211
Majorité absolue des suffrages exprimés 106
Pour l'adoption 189
Contre 22

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements au centre et à droite)

Discussion des articles de la loi organique relative à Saint-Barthélemy

Article premier

I. - Le I de l'article L.O. 6214-4 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Après le 1°, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :

« 1° bis Les personnes physiques ou morales ayant leur domicile fiscal dans un département de métropole ou d'outre-mer, ou étant réputées l'avoir en vertu des dispositions du 1°, sont soumises aux impositions en vigueur dans ces départements ;

« Sans préjudice des dispositions de l'alinéa précédent, les personnes physiques ou morales ayant leur domicile fiscal dans un département de métropole ou d'outre-mer, ou étant réputées l'avoir en vertu des dispositions du 1°, sont soumises aux impositions définies par la collectivité de Saint-Barthélemy pour les revenus ou la fortune trouvant leur source sur le territoire de cette collectivité. » ;

2° Le dernier alinéa est supprimé.

II. - Après le I de l'article L.O. 6214-4 du même code, il est inséré un I bis ainsi rédigé :

« I bis. - Les modalités d'application du I sont précisées par une convention conclue entre l'État et la collectivité de Saint-Barthélemy en vue de prévenir les doubles impositions et de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales.

« Avant l'entrée en vigueur de cette convention, les personnes physiques ou morales ayant leur domicile fiscal dans un département de métropole ou d'outre-mer ou à Saint-Barthélemy, ont droit à un crédit d'impôt imputable sur l'impôt dû dans le territoire où se situe leur domicile fiscal au titre de l'exercice ou de l'année civile au cours desquels le crédit est constaté, à raison des revenus provenant de l'autre territoire.

« Ce crédit d'impôt, égal à l'impôt effectivement acquitté à raison de ces revenus dans l'autre territoire, ne peut excéder la fraction d'impôt due au titre de ces mêmes revenus dans le territoire où se situe leur domicile fiscal. Corrélativement, l'impôt acquitté à raison de ces revenus dans l'autre territoire n'est pas déductible de ces mêmes revenus dans le territoire où se situe leur domicile fiscal. »

III. - Le I et le II s'appliquent aux revenus afférents, suivant le cas, à toute année civile ou tout exercice commençant à compter du 1er janvier 2010 et à l'impôt sur la fortune établi à compter de l'année 2010.

Les conséquences financières résultant pour l'État de l'application du II sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

IV. - Au cours de la dixième année suivant l'entrée en vigueur de la loi organique n°2007-223 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l'outre-mer, l'application des conditions de résidence définies au 1° du I de l'article L.O. 6214-4 du code général des collectivités territoriales fait l'objet d'un rapport d'évaluation. Ce rapport est transmis aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat avant la onzième année suivant l'entrée en vigueur de ladite loi organique.

M. le président.  - Amendement n°1, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 11

Supprimer cet alinéa.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre.  - Je lève le gage.

L'amendement n°1, accepté par la commission, est adopté.

L'article premier, modifié, est adopté.

L'article premier bis est adopté.

Article 2

Les pertes de recettes résultant pour l'État de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. le président. - Amendement n°2, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

Mme Marie-Luce Penchard, ministre.  - Je lève là encore le gage.

L'amendement n°2, accepté par la commission, est adopté et l'article 2 supprimé.

Vote sur l'ensemble de la proposition de loi organique relative à Saint-Barthélemy

M. Michel Magras.  - Je remercie les collègues qui sont intervenus. Je souhaite clarifier deux points à l'intention de Mme Terrade et de M. Frimat. Le congrès de Guadeloupe s'est prononcé à deux reprises à la quasi-unanimité pour l'évolution institutionnelle de Saint-Barthélemy en collectivité d'outre-mer. Et la population de Saint-Barthélemy s'est prononcée à 95,5 % en faveur de cette évolution, avec un taux de participation de 75,5 %.

Quant au risque de voir la collectivité devenir une terre d'évasion fiscale, je rappelle que les dispositions de la fiscalité locale ne s'appliquent qu'aux seuls revenus gagnés sur son territoire. Je suis moi-même domicilié à Saint-Barthélemy mais je paie mes impôts à l'État sur les revenus de ma fonction. J'espère vous avoir tous convaincus de voter ce texte.

En application de l'article 59 du Règlement, l'ensemble de la proposition de loi organique, modifié, est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 339
Nombre de suffrages exprimés 210
Majorité absolue des suffrages exprimés 106
Pour l'adoption 188
Contre 22

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements au centre et à droite)