Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les réponses du Gouvernement à dix-huit questions orales.

Gare des Arcs-Draguignan

M. Pierre-Yves Collombat.  - Je souhaite de nouveau attirer l'attention de M. le secrétaire d'État chargé des transports sur la desserte de la gare des Arcs-Draguignan et les manquements de la SNCF à ses obligations de service public, si tant est qu'elle en soit encore un... Cette gare dessert 52 communes varoises, dont celles de la communauté d'agglomération dracénoise et du golfe de Saint-Tropez, et le plus grand camp militaire d'Europe à Canjuers. Or la direction de la SNCF, après y avoir imposé sans concertation de nouveaux horaires qui pénalisent les actifs, vient d'y supprimer un arrêt sur la ligne TGV conduisant à Lyon et à Paris, sans plus de ménagement. En outre, alors que la communauté d'agglomération dracénoise a aménagé à grands frais les abords de la gare, la SNCF se refuse toujours à réaliser d'indispensables travaux pour améliorer l'accessibilité des personnes aux trains, si l'on excepte un équipement pour les bagages installé à la veille des élections régionales...

Les courriers des élus et de l'association des usagers sont restés sans réponse. J'ai moi-même renoncé à contacter la direction de la SNCF ou de Réseau ferré de France : il semble plus facile d'évoquer ces problèmes avec le ministre concerné !

La SNCF est-elle encore chargée d'une mission de service public ? A-t-elle des comptes à rendre aux représentants de la nation et à son Gouvernement, ou le président de la SNCF est-il empereur en son royaume ? Plus prosaïquement, comment peut-on entrer en contact avec les responsables de la SNCF ? Ces restrictions d'horaires signifient-elles que la gare des Arcs-Draguignan devra se contenter de regarder passer les TGV de la nouvelle ligne des « grandes métropoles » ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports.  - Il n'est pas normal qu'une entreprise, qui plus est publique, ne prenne pas la peine de répondre aux courriers des élus ; je ferai part au président de la SNCF de votre mécontentement.

La SNCF est chargée de desservir le territoire, aujourd'hui dans un contexte concurrentiel. Le trafic international peut désormais être assuré par d'autres compagnies, comme c'est le cas depuis quelques années pour le fret. Vous verrez peut-être bientôt des trains italiens dans la gare des Arcs-Draguignan.

Les modifications de la desserte de la gare des Arcs-Draguignan sont destinées, selon la SNCF, à améliorer la qualité du service rendu, non pas aux usagers mais aux clients : ne confondons pas. En 2010, les offres TGV Paris-Toulon et Paris-Marseille ont été différenciées afin d'accélérer les trains desservant Hyères et Toulon. Le cadencement, voulu par la région, facilite, depuis décembre 2008, la vie des usagers grâce à des horaires faciles à mémoriser ; il a impliqué de modifier les arrêts. Sur la ligne Marseille-Nice, les TGV s'arrêtent soit à Toulon, soit aux Arcs-Draguignan. Sachez que le temps de parcours entre cette dernière gare et Paris est de 4 heures 40.

En ce qui concerne l'accessibilité aux trains, une rampe à bagage est d'ores et déjà opérationnelle. Le schéma directeur d'accessibilité approuvé par la région en février 2008 prévoit de nouveaux équipements.

Vous regrettez l'absence de communication entre l'association des usagers et la SNCF. Un comité de ligne s'est pourtant réuni normalement et la direction de la SNCF a annoncé à l'association le programme des travaux. Toutefois, si le dialogue se révèle insuffisant, je le signalerai.

Cette gare importante doit être desservie correctement et la SNCF doit répondre aux sollicitations des usagers et des élus.

M. Pierre-Yves Collombat.  - Je vous remercie, monsieur le ministre, de vous être déplacé ce matin. Mais vous m'avez fait une réponse très classique : à vous en croire, ce qui se passe est inévitable... (M. le ministre le conteste) Pour le reste, vous vous êtes contenté de considérations sémantiques... Vous avez évoqué le contexte concurrentiel ; mais d'après les zélotes de la concurrence, celle-ci doit améliorer le service rendu ! Plutôt que d'usagers, vous préférez parler de clients ; mais si ceux-ci sont moins bien traités que ceux-là, je n'en vois pas l'intérêt ! La gare des Arcs-Draguignan, qui dessert une zone bien plus vaste que la communauté d'agglomération dracénoise, est ravalée au rang de gare subalterne, et le sera encore davantage lorsque la ligne à grande vitesse sera en fonction. Depuis Paris, on considère sans doute que seuls des touristes et des retraités vivent dans cette région... Quid des actifs ? Vous comprendrez que je reste sur ma faim.

Prolongement du RER E

Mme Catherine Dumas.  - Le projet de prolongement du RER E à l'ouest de Paris, qui doit relier la gare d'Hausmann-Saint-Lazare à Mantes-la-Jolie en passant par la Défense, est destiné à améliorer les communications entre l'est et l'ouest et à désengorger la ligne A. Il faudra, pour cela, construire de nouvelles infrastructures souterraines et des gares. Trois tracés sont à l'étude, dont deux prévoient la création d'une gare dans Paris intra muros. Compte tenu des données chiffrées présentées par le Stif, il semble que le tracé comprenant un arrêt à la Porte de Clichy ne puisse être retenu. Il ne resterait donc que deux tracés possibles, l'un qui prévoit un arrêt à la Porte Maillot, l'autre qui relie directement Saint-Lazare à la Défense.

L'attractivité économique du secteur de la Porte Maillot, où est implanté le Palais des Congrès, est telle que la ligne 1 du métro ne suffit plus à la desservir. Le prolongement de la ligne E, dont le coût est estimé entre 2,2 et 2,8 milliards d'euros, facilitera la vie quotidienne des Franciliens. La phase de consultation du public doit débuter cette année et les travaux commencer en 2013. Je souhaite, monsieur le ministre, que vous m'indiquiez quand et selon quelle procédure le tracé définitif sera choisi et quelles dispositions seront prises pour améliorer la desserte de la Porte Maillot.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports.  - Le Sénat débattra cet après-midi du Grand Paris. Le prolongement du RER E s'inscrit dans la même perspective. Pour l'heure, la ligne Éole s'arrête à la cathédrale ferroviaire de la gare Saint-Lazare.

Dans son discours du 29 avril 2009 sur le Grand Paris, le Président de la République a indiqué que l'objectif était d'achever cette ligne en 2017. Le Stif, en tant qu'autorité organisatrice des transports et RFF en tant que maître d'ouvrage, ont saisi la commission nationale du débat public (CNDP). Celle-ci a décidé qu'un débat serait animé par une commission particulière du débat public. RFF et le Stif établissent un dossier qui servira de base pour ce débat, dont je souhaite qu'il débute l'automne prochain. Il durera quatre mois. Le schéma de principe de l'opération pourrait ensuite être arrêté en 2011 et les études conduites pour un début des travaux en 2013.

Trois options de tracé de Haussmann-Saint-Lazare jusqu'à la Défense ont été retenues. L'une d'elles comprend un arrêt à la Porte Maillot avec la création d'une gare nouvelle. Cela serait très intéressant pour desservir le Palais des Congrès, les commerces et les grands hôtels. Aujourd'hui, seule fonctionne la ligne 1 mais son automatisation améliorera le confort des passagers et la régularité des trains. Je vous le confirme, le Gouvernement est très attaché au projet Éole.

Mme Catherine Dumas.  - Élue parisienne du 17e arrondissement, je suis très attentive à tous les projets qui structurent les déplacements et améliorent la desserte de Paris et de la petite ceinture, qu'ils soient ceux du Stif ou du Grand Paris.

Dépollution du site chimique de Ganagobie

M. Claude Domeizel.  - Ganagobie, dans les Alpes-de-Haute-Provence, est un haut lieu pour la prière, mais aussi pour la chimie...

M. le président.  - Le lieu est magnifique et, quand je présidais la région, nous avons consacré beaucoup d'argent à la rénovation du monastère !

M. Claude Domeizel.  - Le site industriel d'Isotopchim a été ouvert en 1986 et l'activité, le marquage des molécules au carbone 14, était soumise au régime d'autorisation des installations classées pour la protection de l'environnement. A la suite de multiples procès-verbaux pour non-respect de l'autorisation préfectorale et pour rejets radioactifs non autorisés, l'entreprise a été mise en liquidation judiciaire en septembre 2000. Ses responsables ont abandonné les lieux sans éliminer les déchets. Les locaux ont subi une première phase de dépollution, prise en charge par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs. Aujourd'hui, la deuxième phase va commencer et ce ne sera pas la dernière. Le terrain appartient à la commune et la dépollution, prise en charge par l'État, donc par le contribuable, coûtera 4 millions d'euros ! Une telle situation pourrait-elle se reproduire ? Quelles mesures sont prises lors de l'installation d'une usine de ce type ? Quels contrôles sont mis en place pour prévenir les risques mais aussi pour contraindre les instigateurs à assumer le coût de la dépollution ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports.  - Mme Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie, m'a prié de vous apporter la réponse suivante. L'État poursuit la dépollution ; l'action engagée sur ce site est conforme à la politique suivie par le ministère du développement durable en cas de défaillance des responsables. Afin de ne pas dilapider l'argent public, l'État vérifie d'abord que ni l'exploitant ni le propriétaire du terrain ne sont solvables. La priorité reste, bien sûr, de prévenir de telles situations, en veillant à n'accorder d'autorisation qu'à des industriels capables d'assumer l'ensemble de leurs responsabilités et en contrôlant périodiquement les modes d'élimination des déchets. Les inspections par les services déconcentrés sont l'occasion de vérifier que l'exploitation se déroule dans le respect des arrêtés préfectoraux. Les dérives détectées donnent lieu à la prescription d'actions correctives par des arrêtés préfectoraux.

Le renforcement des effectifs de l'inspection des installations classées a été décidé dans le cadre du Grenelle de l'environnement. Une vigilance toute particulière s'exerce lorsque les enjeux de protection de l'environnement sont lourds ou lorsqu'il existe un risque important de défaillance de l'industriel. La loi dite Grenelle II, que vous avez votée et qui sera très prochainement débattue à l'Assemblée nationale, renforce encore l'application du principe pollueur-payeur, en obligeant par exemple une société mère à assumer les conséquences de l'activité d'une filiale, même quand celle-ci disparaît.

M. Claude Domeizel.  - Comme simple contribuable, je ne comprends pas qu'on ait pu aboutir à une telle situation ! On trouve dans le bâtiment des flacons dont on ne sait ce qu'ils contiennent ! Il va falloir les analyser pour savoir comment les éliminer... La commune propriétaire va devoir détruire le bâtiment et le dépolluer. On contrôle toujours tout mais, dans ce cas, on n'a pas su éviter pareille dérive, dont le coût atteindra 4 millions d'euros.

Pomme de terre transgénique

M. Christian Demuynck.  - La Commission européenne a récemment autorisé la culture, à des fins industrielles, de la pomme de terre transgénique Amflora. Or, chez nous, les anti-OGM, lobbyistes des firmes américaines, ont une fois encore caricaturé et stigmatisé le choix de Bruxelles. C'est pourtant une équipe de scientifiques franco-belges qui est à l'origine des premiers travaux sur les plantes transgéniques !

Dans le cadre du Grenelle de l'environnement, le ministre de l'écologie a lancé un programme de recherche sur les risques liés à la dispersion des OGM et les risques sanitaires. Ce programme, doté de d'un million d'euros pour 2010, vise à « soutenir la réflexion et les recherches sur les diverses dimensions liées aux OGM ». Il prétend fournir des connaissances scientifiques solides, neuves et pratiques. De nombreux travaux réalisés par la recherche publique française ou européenne existent déjà. Pourtant, le Gouvernement a cru bon de mettre en place un comité d'orientation, censé définir les thématiques prioritaires et veiller à la pertinence des recherches. Beaucoup de ses membres sont également présents dans le comité économique, éthique et social du Haut conseil des biotechnologies. Le Gouvernement a également créé un comité scientifique chargé de l'évaluation des projets de recherche. Pourquoi avoir créé ces deux structures supplémentaires pour suivre la dispersion des OGM ? On dénombre 35 000 publications sur le sujet dans les revues internationales. Et les avis des comités d'experts dans le monde entier concluent à l'absence de risque. Jamais aucune innovation n'a été autant étudiée !

Ne vaudrait-il pas mieux étudier le gain écologique de l'utilisation de variétés résistantes à des insectes par exemple ? Le Grenelle de l'environnement a conclu à la nécessité, je vous le rappelle, de réduire l'usage des pesticides.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports.  - Mme la secrétaire d'État chargée de l'écologie m'a prié de vous donner la réponse suivante. Le programme de recherche du ministère de l'écologie résulte des conclusions du Grenelle de l'environnement. Trois mesures avaient en effet été adoptées concernant les OGM : le renforcement des connaissances et de la recherche publique sur les OGM et les biotechnologies ; l'adoption d'une loi, et ce fut la loi du 25 juin 2008, relative aux organismes génétiquement modifiés et la création du Haut conseil des biotechnologies.

La première mesure visait à susciter des échanges au sein de la communauté scientifique et avec les parties prenantes. Il s'agissait aussi d'obtenir des connaissances nouvelles dans des domaines précis. Les conclusions du conseil, votées à l'unanimité des États membres en décembre 2008, ainsi que l'avis de décembre 2008 du Haut conseil sur les biotechnologies confirment l'exigence d'une recherche active sur les impacts environnementaux des OGM et leur intérêt agronomique. Le ministère de l'écologie et celui de l'agriculture ont saisi conjointement l'Inra et le CNRS pour examiner la résistance aux herbicides.

Il est important de pouvoir ainsi orienter la recherche vers les lacunes identifiées. J'ajoute que ce programme, comme tout autre, fait l'objet d'échanges entre un comité d'orientation, composé de représentants des ministères et des parties prenantes, qui exprime les besoins et contribue à la construction de la pertinence stratégique du programme, et un comité scientifique composé de chercheurs, qui veille à la pertinence et la qualité des propositions de recherche.

Ces comités font partie du dispositif habituel qui accompagne les programmes de recherche. Des questions comme celles portant sur les faibles doses ou sur l'équivalence en substance renvoient à d'autres programmes de recherche. Le Grand Emprunt devrait aussi comporter un volet biotechnologique.

M. Christian Demuynck.  - Je regrette l'absence de Mme Jouanno.

Pourquoi dépenser l'argent des contribuables à pratiquer des évaluations dont les résultats sont déjà connus du monde entier : les organismes génétiquement modifiés ne présentent aucune nocivité. Mieux aurait valu utiliser cet argent à informer nos concitoyens.

Installations classées et traitement des déchets

M. Michel Doublet.  - Ma question porte sur l'évolution de la nomenclature des installations classées et du traitement des déchets ultimes. Je prendrai pour exemple la communauté de communes Charente Arnoult Coeur de Saintonge, dont je suis vice-président. Elle couvre 15 000 hectares et 16 communes rurales et est en contrat avec la communauté de communes du Pays Santon, pour le traitement des déchets ultimes, jusqu'au terme du marché en cours, à savoir le 31 mars 2010, qui vient d'être prorogé de trois mois.

Le mode de traitement actuel ne répond pas aux nouvelles normes, si bien que la préfecture de la Charente-Maritime refuse d'accorder à la communauté de communes du Pays Santon son plan d'épandage. La prestation facturée par le Pays Santon pour le traitement des déchets ultimes est de 86 euros de la tonne. Au regard des éléments énoncés ci-dessus, les conditions du futur marché s'établiraient à 109 euros la tonne. Le syndicat intercommunautaire du Littoral nous demande un prix sensiblement identique ; le Smictom de Surgères évoque un coût de 21 euros par habitant, hors impact de la future construction. Faut-il confier le traitement de nos déchets ultimes à un prestataire privé pour un traitement par enfouissement avec valorisation ? Les coûts seraient alors situés au niveau des prix actuels mais il faudrait alors disposer d'un quai de transfert pour transvaser la collecte dans des bennes. Ce qui est actuellement rendu impossible par la rubrique 322 A de la nomenclature des installations classées, laquelle devrait être prochainement modifiée.

Il me serait donc agréable que vous puissiez me dire quand cette modification sera effective.

Les élus souhaitent poursuivre leurs efforts en matière de collecte et de valorisation des déchets mais nous sommes trop souvent confrontés à des contraintes administratives qui pèsent sur nos projets.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports.  - Je vais répondre au président de l'association des maires de mon département au seul nom de Mme Jouanno.

Nous vivons une période charnière dans le domaine des déchets. Les tables rondes du Grenelle de l'environnement puis le vote de la loi Grenelle 1 ont fixé de nouveaux objectifs, ambitieux et réalistes : produire moins de déchets, en valoriser plus et donc en envoyer moins en incinération et centres de stockage. L'article 46 de la loi Grenelle 1 incite à une valorisation accrue de la matière organique contenue dans les déchets ménagers. Le retour au sol de cette matière devra être privilégié, en cohérence avec la hiérarchie des modes de traitements définie par la directive de novembre 2008. Cet enfouissement répond de plus à l'obligation communautaire portée dans la directive de 1999 relative aux décharges. Ces éléments doivent être intégrés aux réflexions des élus.

La réglementation sur les installations classées n'interdit en rien leur réalisation mais conditionne, dans certains cas, cette dernière à l'obtention préalable d'une autorisation préfectorale. Le retour d'expérience de l'exploitation de certaines installations et les améliorations apportées aux techniques industrielles ont conduit mes services à prévoir un classement de l'activité de transit, tri et regroupement de déchets non dangereux sous le régime administratif de la déclaration, avec contrôle périodique dès que le volume de déchets susceptibles d'être présents dans l'installation est inférieur à 1 000 m3. Le décret modificatif de la nomenclature des installations classées est à la signature de Mme Jouanno ; il prend en compte cette modification et sera publié au Journal officiel dans les prochains jours.

Les départements ont demandé à l'État des aides de financement ; les promesses seront honorées.

M. Michel Doublet.  - Je vous remercie pour ces réponses rassurantes.

Dispositif Scellier en zone C

M. Bernard Fournier.  - Je souhaite attirer votre attention sur les dispositions de l'article 83 de la loi de finances pour 2010 qui assouplit le dispositif d'aide à l'investissement locatif privé pour les communes classées en zone C. Ce dispositif était issu du rapport d'information parlementaire de juillet 2008 de MM. Scellier et Le Bouillonnec, à la suite des décisions du Conseil de modernisation des politiques publiques du 4 avril 2008, lequel avait proposé de recentrer les aides fiscales à l'investissement locatif privé dans les zones où les besoins de logements sont prioritaires et le marché du logement locatif privé connaît des tensions. Il s'agissait de protéger les particuliers qui peuvent être incités à investir là où l'état du marché locatif ne leur permet pas de louer leur bien dans des conditions optimales.

Comme l'avait été le dispositif Robien, le dispositif Scellier est centré sur les zones où le marché est le plus tendu. Selon L'arrêté du 3 mai 2009, seules les zones A, B1 et B2 bénéficient d'aides à l'investissement locatif privé, ce qui exclut les communes de la zone C. Toutefois, l'article 83 de la loi de finances pour 2010 a rendu possible l'ouverture d'une procédure locale de dérogation pour les programmes ayant fait l'objet d'un agrément ad hoc par le ministre du logement, après avis du maire de la commune d'implantation ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale territorialement compétent en matière d'urbanisme. Il est donc désormais possible de proposer des opérations en Scellier dans une commune située en zone C.

Les élus comptent sur ces dispositifs pour assurer le développement urbain, économique et démographique de leurs communes. Ces dispositions devant s'appliquer à compter de l'imposition des revenus de 2010, je souhaite que vous me précisiez ce que prévoit le futur décret.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports.  - . Je vous prie de bien vouloir excuser M. Apparu, dont je vais lire la réponse.

Le dispositif Scellier est destiné à soutenir la production de logements locatifs privés dans les zones où la demande de logements est très forte. Par l'article 83 de la loi de finances pour 2010, le législateur a donné la possibilité au ministre du logement de délivrer des agréments ponctuels à des communes. Tous les éléments du décret ne sont pas encore complètement arrêtés mais le secrétaire d'État au logement et à l'urbanisme veille personnellement à l'avancement de ce dossier.

La demande d'agrément pourra être introduite après avis du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme. L'agrément porte sur une seule commune mais on pourra faire une demande groupée pour l'ensemble des communes relevant d'un EPCI compétent en matière d'urbanisme, sans pour autant priver la décision de son caractère individuel. La commune devra disposer d'un programme local de l'habitat (PLH) ou être membre d'un établissement public de coopération intercommunale doté d'un tel programme. Ce document, qui analyse les marchés locaux du logement, attestera l'existence de tensions sur le secteur locatif. Le PLH est aussi le lieu d'expression de la stratégie des collectivités locales en matière de logement ; il montre donc la cohérence entre la demande de dérogation et la politique globale des collectivités. La demande pourra aussi contenir tout document que le pétitionnaire jugera utile. Le Comité régional de l'habitat donnera un avis. La demande sera instruite par le ministère du logement et comprendra l'analyse d'indicateurs statistiques de tension du marché immobilier sur la commune, l'analyse de l'offre et des besoins en logements et, le cas échéant, des éléments d'expertise sur la situation du marché immobilier local. Enfin, il sera fait publicité de l'agrément dans la presse locale.

Il reste à régler quelques arbitrages entre M. Apparu et Mme Jouanno.

M. Bernard Fournier.  - C'est avec beaucoup d'impatience que les communes attendent ce décret.

Électricité photovoltaïque

M. Michel Boutant.  - Quand la défense de l'environnement est chaque jour davantage prise en considération dans les politiques publiques, est-il logique d'avoir réduit le prix d'achat de l'électricité photovoltaïque, cette énergie propre et renouvelable par excellence, dans l'arrêté du 12 janvier 2010 ? De même, pourquoi avoir établi une différence de traitement entre les particuliers et les services d'enseignement et de santé qui bénéficient d'un tarif de 0,58 euro par kWh, contre 0,42 euro pour les bâtiments agricoles ? Il est également dommageable que l'on applique le nouveau tarif aux projets déposés après le 1er novembre 2009. C'est sanctionner les agriculteurs qui ont consenti de lourds investissements dans des panneaux photovoltaïques quand la vente d'énergie propre peut compenser partiellement la baisse considérable des revenus agricoles. Dans ces conditions, ne pourrait--on pas aménager l'arrêté du 12 janvier ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports.  - Monsieur le sénateur, vous avez raison de soulever cette question à laquelle il nous faut souvent répondre sur le terrain. Pour atteindre l'objectif du Grenelle de l'environnement en matière d'énergie renouvelable, nous avons mis les moyens nécessaires : des crédits d'impôt, des exonérations fiscales, des appels d'offres sur le solaire et la biomasse et des tarifs préférentiels d'achat de l'électricité. Cette politique porte ses fruits : deuxième producteur européen d'énergies renouvelables, la France installe 1 000 MW d'éolien par an et nous avons près de 45 000 installations solaires raccordées au réseau. Résultat, les grandes entreprises internationales du secteur veulent désormais s'installer en France !

Pour autant, le photovoltaïque a fait l'objet d'une bulle spéculative : EDF enregistrait chaque mois environ 5 000 demandes de contrat d'achat mi-2009, 3 000 par jour début janvier. Ces demandes, pour nombre d'entre elles, concernent des bâtiments neufs, dont l'utilité est souvent sujette à caution. Par exemple, des étables qui n'abritent pas d'animaux, dont la construction a été parfois conseillée par d'étranges personnages dont l'honnêteté n'est pas la qualité première... D'où le nouvel arrêté tarifaire de janvier destiné à lutter contre cette spéculation à l'état pur. Si celui-ci tient compte de la très forte baisse du prix des panneaux photovoltaïques ces derniers mois, il reste, observe Mme Jouanno qui m'a chargée de vous donner cette réponse, le dispositif le plus incitatif au monde avec un tarif inchangé de 0,58 euro kWh pour les particuliers et, quel que soit le bâtiment concerné, un tarif de 0,50 euro pour les bâtiments existants et de 0,42 euro pour les nouvelles constructions. Ce dernier tarif, qui ménage un taux de rentabilité de plus de 10 % d'après les calculs de la commission de régulation de l'énergie, est plus élevé qu'en Allemagne où -ce n'est pas faire injure à nos voisins que de le dire- l'ensoleillement est pourtant moindre.

Tous les contrats signés seront honorés, aucune rétroactivité ne sera appliquée. Grâce à l'arrêté du 23 mars dernier pris en étroite concertation avec le Parlement, les projets qui étaient avancés bénéficieront de l'ancien dispositif. Pour conclure, je regrette vivement que des aigrefins spéculent sur le dos d'agriculteurs dont nous connaissons tous la très grande misère. De tels comportements sont moralement condamnables. Développons une vraie filière des énergies renouvelables en la protégeant de la spéculation !

M. Michel Boutant.  - Soit. Mais, pour éviter que les agriculteurs ne soient piégés encore une fois par des spéculateurs, mieux vaudrait organiser, via les directions départementales des territoires plutôt que les directions départementales de l'agriculture et de la forêt, une campagne d'information.

M. le président.  - Que ces réponses ministérielles sont technocratiques ! (Marques d'approbation et sourires sur tous les bancs)

Coffres-forts numériques

Mme Catherine Morin-Desailly.  - La dématérialisation croissante des documents administratifs, tels les bulletins de paie, présente de nombreux avantages en termes de rapidité, de réduction des coûts de traitement et d'envoi et de diminution de la surface de stockage. Néanmoins, elle constitue un défi pour l'État qui doit garantir la confidentialité et la pérennité des informations transmises. Le principe de l'indépendance entre le document écrit et son support technique, posé dans la loi du 13 mars 2000, est peu applicable. Comment le Gouvernement compte-t-il remédier à cette situation ? Ensuite, pour résoudre le problème du nécessaire stockage à long terme de ces documents, ne faudrait-il pas promouvoir les coffres-forts électroniques, ces services en ligne hautement sécurisés permettant d'archiver, d'indexer et de retrouver facilement l'ensemble des fichiers numériques sensibles ? Le cadre juridique actuel est insuffisant -je pense à l'ordonnance du 8 décembre 2005 qui a jeté les bases d'un espace de stockage en ligne exploité sous la responsabilité de l'État et à la loi de simplification et de clarification du droit qui a autorisé la dématérialisation du bulletin de paie des salariés. Madame la ministre, comment comptez-vous encourager le développement de ces nouveaux usages ?

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de la prospective et du développement de l'économie numérique.  - Pour profiter pleinement de la dématérialisation de certains documents, il faut, madame la sénatrice, poser un ensemble cohérent de briques de confiance. L'impression papier des bulletins de salaire, mais également des factures d'énergie ou de téléphone utilisées comme preuves de domicile ou des relevés d'identité bancaires, sont juridiquement valables pour constituer un dossier administratif. Néanmoins, pour garantir que l'impression papier n'a pas fait l'objet d'une altération frauduleuse, je travaille avec l'Intérieur et le ministère chargé de la réforme de l'État, ainsi qu'avec les acteurs concernés, à la mise au point d'un code-barres infalsifiable, garant de l'authenticité de ces justificatifs.

Il sera ainsi possible de vérifier qu'un document papier, qu'il s'agisse d'un original ou d'une impression réalisée par l'usager, contient bien des données authentiques.

Sur le second point, l'administration propose déjà à l'usager, avec le portail mon.service-public.fr, un compte personnalisé. Sur ce compte en ligne, l'usager peut effectuer des démarches dématérialisées avec différents services : les caisses de retraite, les Urssaf, les allocations familiales, la sécurité sociale... Il peut déjà joindre en justificatif les différents documents demandés sous forme dématérialisée, qu'il les ait reçus ainsi ou qu'il les ait scannés. La liste des administrations accessibles par ce portail a vocation à s'allonger.

Plus généralement, dans un rapport remis en février à Éric Woerth et à moi-même, le groupe d'experts du numérique présidé par Franck Riester a recommandé, pour améliorer les relations numériques entre l'administration et les usagers, de faciliter le recours aux documents dématérialisés pour toutes les télé-procédures. Mon.service-public.fr constitue un exemple de coffre-fort électronique gratuit dédié aux échanges avec l'administration.

D'autres offres commerciales de coffre-fort électronique apparaissent également, gratuites ou payantes, pour stocker les documents dématérialisés des internautes et permettre des échanges avec différents partenaires publics ou privés. Les garanties offertes par ces offres commerciales sont d'ordre contractuel. Il est donc important que les utilisateurs choisissent des sociétés de confiance, capables de garantir la sécurité de leurs documents ainsi que leur archivage sur le long terme, plusieurs décennies s'il s'agit de bulletins de salaire. La Fédération nationale des tiers de confiance, qui regroupe les professions des experts-comptables, des greffiers de tribunaux de commerce et des huissiers de justice ainsi que les principales sociétés offrant des prestations de dématérialisation et de sécurité électronique, propose un label applicable aux coffres-forts électroniques et qui distingue les prestataires de confiance. Il faudra lui faire une plus grande publicité.

Mme Catherine Morin-Desailly.  - Je vous remercie de cette réponse aux questions que se posent beaucoup d'administrations et d'entreprises au sujet d'une dématérialisation très souhaitable dans l'optique d'un développement durable mais sur laquelle elles demandent de légitimes garanties.

Filière aquacole

M. Yannick Botrel.  - Ma question s'adresse au ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.

L'évolution de la filière aquacole, inquiétante, peut faire disparaître de nombreux pisciculteurs. La consommation de poissons en France a nettement progressé au cours des vingt dernières années, passant de 17,5 kg par an et par habitant à 24 kg. Or, pour ce qui est de l'élevage de poissons d'eau douce, en dix ans, la salmoniculture française a perdu 20 % de sa production, 27 % de ses sites et 35 % de ses emplois car elle est directement victime des distorsions de concurrence de pays situés hors de l'Union européenne, en particulier.

Pour le poisson, notre balance commerciale est déficitaire de 1,6 milliard par an et ce déficit ne cesse de se creuser. Les produits d'importation envahissent les étals alors que, souvent, ils ne respectent pas les critères de qualité sanitaire des produits français. Vendus décongelés, ils arrivent à profusion en Europe, tels le panga ou le tilapia, provenant généralement d'Asie ou d'Afrique. Vendus peu cher, ils déstabilisent le marché et les deux grandes régions de production de salmonidés que sont la Bretagne et l'Aquitaine subissent fortement cette pression.

L'une des sources de distorsion vient de l'absence de différenciation, à l'étal, entre produits frais et produits décongelés. Pourtant, les consommateurs ont le droit d'être informés. En plus d'être étiquetés, les produits frais et les produits décongelés devraient être placés séparément sur les étalages.

Avec 140 000 tonnes de poissons frais vendus en 2009, les éleveurs français devraient constituer un secteur économique fiable. La filière a su respecter des critères de durabilité et les écoles d'agriculture forment les producteurs de demain. Mais l'aquaculture d'eau douce est en déclin. Quelle mesure volontariste M. Le Maire compte-t-il proposer à l'échelle européenne pour que les pisciculteurs français et ceux des États membres retrouvent des perspectives d'avenir pour leur production ?

Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de la prospective et du développement de l'économie numérique.  - Avant toute chose, je tiens à excuser Bruno Le Maire qui est aujourd'hui en déplacement dans l'Essonne avec le Président de la République.

Alors que la France dispose, avec ses 5 500 kilomètres de côtes et ses collectivités d'outre-mer, d'un potentiel exceptionnel et que la demande des consommateurs est en constante augmentation, son secteur aquacole peine à se développer, si bien que notre balance commerciale en produits de la pêche et de l'aquaculture est déficitaire.

Pour remédier à cette situation, le Gouvernement a pris plusieurs initiatives.

Dès juin 2008, la France a soumis à ses partenaires européens un mémorandum pour le développement de l'aquaculture européenne que dix-sept d'entre eux ont signé. Depuis lors, la Commission européenne a présenté, en avril 2009, une nouvelle stratégie pour le développement de l'aquaculture durable en Europe, suivie, en juin 2009, de l'adoption à l'unanimité par le Conseil de conclusions en faveur du développement d'une aquaculture durable. C'est avec ce même objectif que le ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche défendra, dans le cadre du projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche, la création de schémas régionaux de l'aquaculture marine. Ils auront notamment pour objet d'identifier les sites existants propices au développement de cette activité et de le faciliter.

La vente des produits d'importation décongelés au rayon frais entraîne de réelles distorsions de concurrence et c'est pourquoi consigne a été donnée aux agents de contrôle d'accorder une attention particulière au respect de l'étiquetage et de la mention de l'origine des produits décongelés. Je transmettrai au ministre votre demande d'une présentation séparée des produits frais et des produits décongelés.

Enfin, pour favoriser la consommation de produits frais et originaires de nos régions, le Comité interprofessionnel pour la promotion des produits d'aquaculture, lancera prochainement, avec l'aide de FranceAgrimer, une campagne nationale de promotion.

M. Yannick Botrel.  - Je vous remercie de cette réponse qui apporte des éléments intéressants. Mais j'avais surtout insisté sur l'aquaculture d'eau douce : il ne faudrait pas l'oublier dans la réflexion globale.

Tribunaux d'instance parisiens

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - L'éventuel regroupement des tribunaux d'instance parisiens dans la future cité judiciaire des Batignolles à l'horizon 2015 a été annoncé mi-janvier par le Premier président de la cour d'appel. Il n'a pourtant été à aucun moment évoqué lors de l'établissement de la nouvelle carte judiciaire et il n'a jamais été question, dans les déclarations de la ministre de la justice de l'époque, d'une suppression des tribunaux d'instance parisiens. A aucun moment non plus le Gouvernement actuel, interpellé à ce sujet à plusieurs reprises, y compris par moi-même, notamment lors de la discussion du budget, n'a apporté de réponses claires. La majorité du Conseil de Paris s'est prononcée en faveur du maintien des tribunaux d'instance parisiens, structures de proximité si utiles. Beaucoup craignent que ce regroupement soit synonyme de diminution des moyens et de déshumanisation des procédures et qu'il porte un coup fatal à la justice de proximité déjà bien mal en point.

On peut aussi légitimement s'interroger sur les aménagements des transports publics prévus car la ligne 13, qui dessert ce quartier déjà plus que surchargée, sera forcément empruntée par une partie des 10 000 personnes qui travailleront à la cité judiciaire, sans parler des justiciables qui s'y rendraient. Pouvez-vous m'apporter des réponses claires quant aux intentions de l'État en la matière et nous rassurer sur l'indispensable concertation qui devra être engagée avant toute décision ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.  - Votre question me permet de confirmer ce que j'ai déjà indiqué à plusieurs reprises, notamment devant les parlementaires, lors de mes auditions à l'occasion du projet de loi de finances pour 2010. Dans le cadre du transfert du tribunal de grande instance à Batignolles, une réflexion est effectivement engagée sur le sort des tribunaux d'instance. Je n'ai pris à ce jour aucune décision définitive. La réflexion doit tenir compte de l'intérêt des justiciables, des transports ou des capacités de mutualisation.

Il y a trois solutions : le maintien de la situation actuelle -qui n'est pas forcément la meilleure option-, le regroupement des tribunaux d'instance autour de quatre pôles ou la constitution d'une entité unique aux Batignolles, au sein d'une grande cité judiciaire où même les avocats envisagent de s'installer. La décision sera prise après concertation étroite avec les élus concernés.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Je vous remercie de confirmer que la décision n'est pas encore prise. Je ne suis pas systématiquement pour le maintien des situations actuelles.

Je reconnais que Paris n'est pas un département facile. Le nombre d'affaires à gérer est énorme. Regrouper tout cela dans une cité judiciaire unique n'est pas le choix que je ferais. Il faudra réfléchir aux questions de proximité, de commodité de déplacement et veiller au maintien des moyens car on sait ce qu'il en est, à cet égard, des rapprochements de structures... Tout cela mérite réflexion.

Conditions de travail au TGI de Pontoise

Mme Raymonde Le Texier.  - La situation de la justice dans le Val-d'Oise est critique. Au tribunal de grande instance de Pontoise, sur un effectif total de 65 magistrats, 11 postes sont vacants et 40 postes de fonctionnaires sur 167 ne sont pas pourvus ; un quart des effectifs manque au tribunal pour enfants. Situation révélatrice de la manière dont est aujourd'hui rendue la justice en France.

Les magistrats dénoncent non seulement les atteintes sans précédent portées à l'indépendance de la magistrature mais aussi la misère d'un service public qui n'est plus en mesure de traiter dans des conditions normales les attentes des justiciables : allongement des délais, audiences surchargées, temps consacré à chaque affaire abrégé... Le manque d'effectif retarde la prise en charge et augmente la durée de traitement de situations humaines douloureuses. Les magistrats, sur lesquels pèsent de lourdes responsabilités pour un salaire loin de faire rêver, s'inquiètent de ne pouvoir remplir correctement leur mission de service public. Il est vrai que cette situation ne date pas d'hier mais elle atteint aujourd'hui un seuil dangereux.

La fronde qui a eu lieu lors de la rentrée solennelle du TGI de Pontoise en est la preuve. Les magistrats ont voulu alerter les représentants du peuple que nous sommes sur la gravité de la situation. Que l'État ne soit plus en mesure d'exercer dans des conditions acceptables une de ses fonctions régaliennes essentielles est déjà grave, qu'il ait été alerté et n'agisse pas pour remédier à la situation est dramatique.

D'autant que l'ouverture du procès Concorde va mobiliser un nombre important de personnels, qui feront cruellement défaut dans les services où ils sont normalement affectés. Les limites de l'acceptable sont aujourd'hui dépassées. La qualité de notre justice est en jeu. De cela, le ministère est comptable.

Quels engagements êtes-vous prête à prendre, madame la ministre, pour que le tribunal de Pontoise puisse travailler dans de bonnes conditions ?

Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.  - Je suis plus que quiconque attachée au bon fonctionnement de la justice, qui souffre d'avoir trop longtemps manqué de moyens. Mais depuis quelques années, le mouvement s'est inversé. Ainsi, les effectifs localisés au TGI de Pontoise sont-ils passés de 57 en 2002 à 65 en février 2009 : huit postes de magistrats ont été créés en sept ans.

Aujourd'hui, seuls deux postes restent non pourvus, et non pas onze comme on l'a entendu dire : un poste de juge d'instruction et un poste de juge chargé de service au tribunal d'instance de Gonesse, qui, pour remédier aux difficultés récurrentes que nous avons à le pourvoir, sera inscrit sur la liste des postes offerts aux auditeurs sortant de l'ENM.

Il est certes d'autres absences, pour congé maladie ou maternité, comme dans tous les services de l'État, mais qui ne sauraient être qualifiées de vacances. Il existe des mécanismes pour y pallier : treize magistrats placés près la cour d'appel de Versailles y ont vocation, dont une partie sont affectés au tribunal de Pontoise.

En ce qui concerne le tribunal pour enfants, l'effectif localisé de sept magistrats sera porté à huit pour 2010. Mes services étudient en outre attentivement la demande d'affectation supplémentaire de deux des magistrats placés près la cour d'appel de Versailles.

Pour parer aux besoins liés à l'ouverture du procès Concorde, l'effectif des juges non spécialisés a été augmenté de deux magistrats et sera à nouveau renforcé au deuxième trimestre par la nomination d'un troisième juge.

Le TGI de Pontoise compte donc 165 agents, 8 greffiers-chefs, 74 greffiers, 5 secrétaires administratifs, 71 adjoints administratifs et 7 agents techniques. A la suite de la commission administrative paritaire de mars et de l'affectation de nouveaux sortants de l'école des greffes, l'effectif sera porté à 174 personnes. J'ajoute que 6 postes supplémentaires de greffiers étaient inscrits à la CAP des 30 mars et 2 avril dernier, et que pour 2010, le TGI bénéficiera de crédits vacataires délégués.

Vous voyez donc que des efforts ont été déployés depuis plusieurs années, qui ont encore été renforcés par les dernières CAP.

Mme Raymonde Le Texier.  - Je vous remercie de ces précisions. Reste que l'augmentation des effectifs entre 2002 et 2009 se justifie largement par la croissance démographique d'un département qui, étant le plus jeune de France, compte par conséquent le plus grand nombre de jeunes prévenus. Le délai de leur prise en charge revêt, vous le savez, une importance toute particulière.

Quant aux congés de maternité que vous évoquez, on peut se demander si leur augmentation n'est pas liée à la féminisation de la profession, peut-être liée elle-même aux conditions de rémunération... Il faut savoir que certains magistrats travaillent plus de 70 heures par semaine pour un salaire de 3 000 euros par mois.

M. le président.  - Permettez-moi de saluer la présence dans nos tribunes d'une classe de lycée venant de Marseille.

Difficultés au Pôle emploi

Mme Françoise Cartron.  - Les graves difficultés de fonctionnement rencontrées par Pôle emploi ont des conséquences néfastes pour les demandeurs d'emploi. Issu de la fusion entre l'ANPE et les Assedic, Pôle emploi devait être plus efficace, plus réactif mais ce n'est toujours pas le cas deux ans après et les collectivités locales et les demandeurs d'emploi n'ont pu obtenir de réponses claires et juridiquement assurées à l'occasion du recrutement d'agents recenseurs. En Gironde, les demandeurs d'emploi recrutés par les mairies n'ont pu obtenir communication du seuil horaire de travail autorisé par l'administration sans perdre le bénéfice de l'allocation chômage. Le plus souvent, les demandeurs d'emploi ne parviennent pas à joindre Pôle emploi : les standards téléphoniques sont saturés et il n'y a pas assez de personnel. Les collectivités territoriales comme le centre de gestion de la fonction publique territoriale ont attendu plusieurs semaines des renseignements précis et aucun référent direct n'a été nommé. Cette confusion dans l'organisation provoque une insécurité juridique inacceptable pour les demandeurs d'emploi : comment connaître les conséquences financières exactes d'une reprise d'emploi ponctuelle quand les règles de calcul varient d'un département à l'autre, voire selon les interlocuteurs ? C'est pourtant le cas pour la compensation versée aux agents recenseurs. Alors que le chômage connaît une forte progression, décourager ainsi les demandeurs d'emploi à reprendre une activité, fût-elle ponctuelle, est inadmissible. Comment allez-vous remédier à ces difficultés de fonctionnement et faciliter les démarches des demandeurs d'emploi et des collectivités ou entreprises désirant embaucher ?

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie.  - Soyons francs, la distinction entre les volets indemnisation et accompagnement, qui prévalait avant la fusion entre l'ANPE et les Assedic, était préjudiciable aux demandeurs d'emploi. C'est vrai, la fusion n'a pas tout réglé en un seul jour mais elle a permis une réelle progression du service rendu. Les objectifs de réduction des délais d'inscription et d'indemnisation ont été atteints en 2009. Pôle emploi développera et approfondira son offre en 2010, en développant sa capacité d'analyse sectorielle, par la mise en place du 39.95 ainsi que grâce au recrutement par simulation pour les métiers en tension. Les dysfonctionnements que vous avez évoqués démontrent la nécessité d'améliorer le service rendu. Quant au cumul entre activité et indemnité, il est possible sous la triple condition que l'activité ne soit pas auprès du précédent employeur, qu'elle reste inférieure à 110 heures et que le salaire brut ne dépasse pas 70 % du salaire de référence. Si l'un de ces deux seuils est dépassé, l'allocation ne peut plus être versée. Le cumul peut se prolonger durant quinze mois, voire au-delà mais sur la base d'un nouveau calcul des droits de l'intéressé.

Le Gouvernement entend tout mettre en oeuvre pour que le Pôle emploi soit encore plus efficace, dans l'intérêt des demandeurs d'emploi comme des entreprises.

Mme Françoise Cartron.  - Je vous remercie de cette réponse et prends acte de la volonté du Gouvernement d'un meilleur service aux demandeurs d'emploi. Cependant, l'actualité en Gironde, c'est qu'en mars, à la suite d'un bug informatique, Pôle emploi n'a pas pu servir d'indemnités aux demandeurs d'emploi dont certains se retrouvent dans des situations financières extrêmement difficiles.

Aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprise

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Dans un contexte bouleversé par la crise, l'aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprise devrait être le moteur ou le vecteur de l'économie de marché et du développement d'entreprises nouvelles, au même titre que le statut d'auto-entrepreneur. Ce système est pourtant confronté à une série de questions. La circulaire du 30 novembre 2007 n'exige pas une activité effective, mais elle fixe un délai de 45 jours pour la transmission des dossiers et seule l'Urssaf est compétente pour examiner les dossiers qui lui sont transmis par le centre de formalités des entreprises. Or il arrive qu'un repreneur ne puisse, pour des raisons qui lui sont extérieures, déposer le dossier demandé dans les 45 jours et que le centre de formalités des entreprises ne le transmette pas à l'Urssaf, dont les décisions ne peuvent d'ailleurs être contestées. Comment expliquer que ce délai soit systématiquement opposé aux bénéficiaires de bonne foi, comment se fait-il que la transmission n'appartienne qu'au centre de formalité des entreprises et comment se pourvoir contre la décision de l'Urssaf ?

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie.  - L'aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprise, gérée par le ministère de l'emploi, consiste en une exonération de cotisations sociales ; 137 000 chômeurs en ont bénéficié l'an passé. Depuis le 1er décembre 2007, les CFE peuvent recevoir les demandes d'exonération de cotisation, qui doivent leur être adressées dans un délai de 45 jours maximum après le dépôt de l'aide elle-même, ce qu'ils sont libres de vérifier en exigeant un récépissé du dépôt de la demande. Après s'être assuré que le dossier est complet, le CFE doit le transmettre à l'Urssaf dans un délai de 24 heures et l'Urssaf statue alors dans un délai d'un mois, conformément au code du travail. Le CFE doit s'assurer que le dossier est complet, qu'il comporte en particulier l'attestation de l'Urssaf ; la procédure est strictement encadrée pour assurer que le demandeur satisfait bien aux conditions d'octroi de l'exonération de charges sociales. Les CFE ne font qu'appliquer les règles, sans ajouter de conditions : tous les dossiers complets sont transmis aux Urssaf.

Mme Anne-Marie Escoffier.  - Vous rappelez les règles générales alors que je vous interrogeais sur le cas de chômeurs qui n'ont pu obtenir à temps certains documents et qui ne peuvent communiquer dans les délais leur dossier complet au CFE. Je vous réinterrogerai par écrit.

Avenir de l'usine First Aquitaine Industrie de Blanquefort

M. Alain Anziani.  - En reprenant l'an passé le site de l'usine Ford de Blanquefort, spécialisée dans la fabrication de boîtes de vitesses automatiques, la société allemande HZ Holding annonçait son intention d'y maintenir la plupart des 1 600 emplois. Depuis, la seule certitude est que Ford va y cesser son activité l'an prochain : les salariés, les sous-traitants et les élus s'inquiètent ! Le repreneur projette d'y produire des pièces d'éoliennes mais il lui faut trouver 50 millions, que les banques rechignent à lui prêter malgré l'intervention répétée de Mme Lagarde et des collectivités locales.

Monsieur le ministre de l'industrie, l'État a déjà fait un effort avec une prime d'un million, ce n'est pas suffisant pour un projet aussi important et qui relève bien de la politique industrielle de notre pays, tout comme du développement durable. Que comptez-vous faire pour inciter les banques à plus d'audace ? Quelles autres pistes pour diversifier la production ?

M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie.  - Le Gouvernement est très attaché à l'avenir du site de Blanquefort et à ses 1 600 salariés, nous ferons tout notre possible pour le maintien de l'activité industrielle. Le 11 février, Mme Lagarde a réuni un comité de suivi où le repreneur a présenté son plan, validé par un cabinet d'audit de renom et qui prévoit l'implantation d'une activité de transmission et de pièces d'éoliennes.

L'État est vent debout, vous rappelez sa participation à l'investissement immobilier et je vous annonce que sa part dans le projet pourra aller jusqu'à 12 millions, aux côtés des collectivités locales. Nous pourrons également mobiliser le Feder, pour 6 millions. Un financement bancaire est nécessaire, des négociations sont engagées avec le soutien du médiateur du crédit ; le projet pourra encore compter sur Oseo.

Je demanderai au préfet de région d'installer un comité de suivi local qui associera toutes les parties prenantes, en particulier les salariés, via le comité d'entreprise.

Je reste à votre disposition pour organiser une nouvelle réunion sur le plan national. Le Gouvernement, soyez-en certain, mobilisera toutes ses forces aux côtés des élus pour maintenir l'activité industrielle du site de Blanquefort, et l'emploi des 1 600 salariés !

M. Alain Anziani.  - Je vous remercie pour votre implication. Je n'en suis pas à ma première question sur ce sujet, chaque fois la réponse fait preuve d'un certain optimisme : j'espère que les actes suivront !

Médecins français formés à l'étranger

Mme Claudine Lepage.  - Les médecins de nationalité française titulaires d'un diplôme de médecine extracommunautaire ne peuvent occuper un poste de faisant fonction d'interne en France, au motif qu'ils possèdent la nationalité française, alors que cette possibilité est reconnue aux médecins étrangers.

Si l'on peut comprendre que des diplômés étrangers n'aient pas le droit d'exercice en France, faute d'avoir été sélectionnés au numerus clausus, il n'est pas normal d'interdire à des Français titulaires d'un diplôme étranger de présenter leur candidature à des postes de faisant fonction d'interne. Cette inégalité de traitement relève de la Halde !

Madame la ministre, comptez-vous autoriser ces médecins français, à exercer, comme leurs collègues étrangers, en qualité de faisant fonction d'interne ?

Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports.  - Les médecins français titulaires d'un diplôme extracommunautaire n'ont pas accès à l'attestation de formation spécialisée ni à l'attestation de formation approfondie spécialisée, qui seront bientôt remplacées par les diplômes de formation médicale spécialisée (DFMS) et de formation médicale spécialisée approfondie (DFMSA). Ces formations ont été conçues pour permettre aux médecins de nationalité extracommunautaire de compléter leur formation avant de retourner exercer la médecine dans leur pays d'origine. C'est dans le cadre de ces formations que les praticiens peuvent être recrutés en qualité de faisant fonction d'internes (FFI) et bénéficier ainsi d'une formation pratique complémentaire.

Soulignons que les titulaires de diplômes non européens ne sont pas tous soumis au même régime pour l'inscription en DFMS et DFMSA : seuls peuvent s'inscrire les médecins ayant obtenu leur diplôme dans un pays qui reconnaît le DFMS ou le DFMSA pour l'exercice de la spécialité. Ces diplômes ne sont pas qualifiants et ne donnent pas le droit d'exercer comme spécialiste dans l'Union européenne.

Toutefois, les ressortissants français titulaires d'un diplôme extracommunautaire ne sont pas privés de toute ressource. Grâce à la procédure d'autorisation d'exercice (PAE), s'ils ont satisfait à des épreuves de vérification des connaissances, ils peuvent être recrutés par un établissement public de santé en qualité de praticien assistant associé ou de praticien attaché associé, avant d'être autorisés à exercer la médecine en France.

Il n'y a donc pas de rupture d'égalité mais des dispositifs différents répondant à des objectifs et des besoins distincts.

Mme Claudine Lepage.  - Avouez que la situation est ubuesque. Cette inégalité de traitement pourrait valoir à la France d'être condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme. Alors que nous souffrons d'un manque de médecins, les jeunes praticiens français détenteurs de diplômes étrangers se voient tout juste offrir des postes d'aides-soignants. Je vous remercie cependant de m'avoir indiqué les différentes procédures.

Déchets d'activités de soins à risques infectieux

M. Jean-Claude Frécon.  - Je souhaite alerter Mme la ministre de la santé sur le traitement des déchets d'activités de soins à risques infectieux, nommés Dasri dans le jargon administratif et médical. Lorsque ces déchets sont produits dans un établissement médical, celui-ci doit en assurer le traitement. Mais lorsqu'ils sont le fait de patients en auto-traitement, il en va différemment : la loi de finances pour 2009 prévoyait qu'à compter du 1er janvier 2010, le principe de responsabilité élargie des producteurs s'appliquerait ; faute de collecte locale, le retour des Dasri dans les officines de pharmacie, les pharmacies à usage intérieur et les laboratoires de biologie médicale serait privilégié. Un décret en conseil d'État devait déterminer les conditions techniques et financières de la collecte et du traitement des déchets.

Or ce décret n'a toujours pas été publié. Pourquoi ? Il est urgent d'assurer la collecte des Dasri des patients en auto-traitement : dans mon département comme sans doute ailleurs, on en a retrouvé dans les ordures ménagères... L'insécurité est triple : administrative, car la responsabilité des personnes en charge du traitement des ordures ménagères -et notamment des élus locaux- est engagée, juridique, mais aussi sanitaire : si quelqu'un est contaminé, l'État en sera responsable.

Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports.  - La ministre de la santé et des sports tient beaucoup à ce que soit mise en place rapidement une filière sécurisée pour l'élimination des déchets d'activités de soins à risques infectieux des patients en auto-traitement. Il faut éviter qu'ils ne soient déposés avec les ordures ménagères car ils risquent alors de contaminer le personnel en charge de la collecte et du traitement, ainsi que l'entourage du patient. Ce problème concerne près de deux millions de patients, notamment les diabétiques.

L'article 30 de la loi de finances pour 2009 prévoit que l'obligation de collecte s'exerce dans le cadre de la responsabilité élargie des producteurs. Il a fallu s'interroger sur le champ des déchets concernés et celui des contributeurs financiers. Le projet de loi Grenelle II prévoit de modifier cet article pour ne viser que les déchets perforants, tels que les aiguilles.

Le décret d'application est d'ores et déjà en cours de préparation, sous la houlette du ministère chargé de l'écologie ; la ministre de la santé et des sports en sera cosignataire. Il sera soumis à la Commission consultative d'évaluation des normes et à l'Autorité de la concurrence, notifié à la Commission européenne, puis examiné par le Conseil d'État.

Il est indispensable que ces déchets soient déposés dans des emballages adaptés afin d'éviter les risques infectieux et les blessures. Ces emballages doivent être mis à disposition des patients lors de la délivrance de médicaments injectables ou de dispositifs médicaux perforants. Le décret qui impose aux personnes responsables de la mise sur le marché de tels produits de fournir ces emballages aux patients est prêt. Il sera signé en même temps que l'autre.

M. Jean-Claude Frécon.  - Merci de ces précisions sur le contenu des décrets. Mais pourquoi les services du Gouvernement ont-ils attendu si longtemps avant d'y travailler ? Le délai est expiré depuis trois mois ! S'il faut consulter la Commission européenne, cela prendra du temps. En cas de problème sanitaire, qui pourrait être tenu pour responsable sinon l'État, c'est-à-dire nous tous ?

Archivage des images médicales

M. Alain Houpert.  - Par une décision du 21 juillet 2009, le Conseil d'État a annulé l'arrêté du 10 septembre 2007, pour autant qu'il approuvait les stipulations de l'avenant n°24 de la Convention nationale des médecins généralistes et des médecins spécialistes créant une option conventionnelle d'archivage des images médicales numériques, au motif que dans le cas où elle introduit des réserves de facturation, l'Union nationale des caisses d'assurance maladie ne peut laisser aux partenaires conventionnels le soin d'en définir les conditions. L'Uncam a demandé aux médecins qui avaient adhéré à cette option de rembourser les suppléments versés postérieurement à cette décision, ce qui pénalise les patients et les médecins. Ces derniers ont pourtant respecté le cahier des charges et investi dans des systèmes d'archivage coûteux.

L'archivage, en rendant possible la reproduction et la comparaison des documents conservés, améliore la qualité des examens radiologiques. Il est indispensable à la mise en place du dossier médical personnel, de la télé-imagerie ou de la télé-expertise. Il permet d'améliorer considérablement l'organisation et l'efficacité du dépistage du cancer du sein, entre autres.

Il appartient à la Caisse nationale d'assurance maladie de faire aboutir un nouvel accord sur l'archivage, qui tienne compte de la décision du Conseil d'État. Elle s'y refuse, alors qu'un protocole d'accord a été rédigé dès le début du mois de décembre. Mme la ministre de la santé compte-t-elle donner les instructions nécessaires afin de remédier au plus vite à cette situation ?

Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports.  - L'Uncam a créé, le 23 août 2007, une cotation spécifique pour financer l'archivage numérique des actes de radiologie, dont la facturation était réservée aux médecins ayant adhéré à l'option conventionnelle créée par l'avenant 24 de la convention médicale. Le Conseil d'État, dans son arrêté du 21 juillet 2009, a annulé cette cotation spécifique au motif que la création d'une telle option relevait de la compétence de l'Uncam et non des partenaires conventionnels. L'Uncam aurait dû récupérer les versements faits à ce titre mais Mme Bachelot-Narquin lui a demandé d'y renoncer.

Ni le développement de la radiologie ni la qualité des soins ne sont cependant menacés. En effet, la Cnamts a souligné, dans un rapport de juillet 2008, que les actes de radiologie bénéficient de marges nettes élevées, du fait d'importants gains de productivité et d'une croissance très rapide en volume.

Depuis 1991, le supplément pour la numérisation des images radiologiques aura coûté à l'assurance maladie plus d'un milliard d'euros. Depuis 2003, le nombre de scanners a augmenté de 35 %, celui des IRM de 86 % ; sur les onze premiers mois de 2009, la valeur des examens par scanner et par IRM a progressé respectivement de 9 % et 13 %.

Nombre d'établissements et de cabinets de radiologie se sont équipés du système Pals de communication et d'archivage des images avant même l'introduction du supplément dans la nomenclature. L'investissement a été largement financé par la réduction du budget « films et produits chimiques », jusqu'à 50 %. Avec la suppression du forfait d'archivage numérique, les radiologues font bénéficier la collectivité de leurs gains de productivité, ce qui concourt à préserver notre système solidaire.

M. Alain Houpert.  - Je remercie Mme Bachelot de ne pas demander le remboursement des suppléments. Mais, sans tomber dans le corporatisme -je suis moi-même radiologue-, je signale que la suppression de la cotation de l'archivage, comme la diminution d'autres cotations d'examens, fragilise la radiologie de proximité : nombre de cabinets de province ferment, au détriment de l'aménagement du territoire et de la présence médicale, car il n'est pas de médecine sans imagerie...

Plate-forme hospitalière de Melun

M. Yannick Bodin.  - Le 13 janvier 2009, j'interrogeais la ministre de la santé sur la plate-forme hospitalière de 650 lits qui devait être réalisée à Melun à l'horizon 2012. Le projet médical a été validé par l'ARH ; il est commun à l'actuel hôpital Marc Jacquet et à la clinique privée Les Fontaines. Un fort retard a été pris, les discussions étant engagées depuis 2004 avec le ministère... M. Laporte m'avait répondu, il y a plus d'un an, que le projet serait validé au second semestre 2009. Il n'en a rien été. Les élus locaux restaient en attente d'un geste. Or, dans un courrier du début de cette année, Mme la ministre demande que soit mis à profit le délai qui nous sépare de la date de dépôt formel des dossiers pour finaliser la réflexion sur le projet et le déposer à l'ARH d'Ile-de-France. Elle indique que le projet « fera l'objet d'une instruction très constructive de la part des services du ministère ». Cela n'avait donc pas été le cas précédemment ?

On nous annonce à présent une décision au premier semestre 2010 : il va falloir se dépêcher ! En outre, malgré la demande des partenaires locaux, le projet n'est toujours pas inscrit dans le plan Hôpital 2012. Les terrains ont été acquis par la ville et le conseil général, les études financées. Et d'immenses panneaux ont été plantés sur le site, annonçant l'ouverture du nouvel hôpital en 2012 : faut-il leur scier les pattes ou doit-on les laisser debout ?

L'inquiétude grandit chez les élus locaux. Une pétition circule désormais pour demander au ministère de s'engager par écrit en faveur de la plate-forme hospitalière qui concernera 300 000 habitants. Quand cet engagement écrit sera-t-il pris ? Quand le lancement du futur hôpital du sud Seine-et-Marne sera-t-il effectif ?

Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports.  - Mme Bachelot souhaite dissiper ces inquiétudes infondées. Le report de l'examen du projet à la deuxième tranche du plan Hôpital 2012 a été annoncé depuis longtemps. La première version du projet ne pouvait pas être instruite dans le cadre de la première tranche car elle nécessitait d'être approfondie. Ce projet est complexe et ambitieux, il coûtera 230 millions d'euros : il paraît légitime d'attendre un dossier irréprochable. Le Gouvernement ne saurait engager les ressources de l'assurance maladie sans disposer de toutes les garanties nécessaires. La ministre de la santé et des sports sera particulièrement attentive à ce que la plate-forme se traduise par une véritable mutualisation des activités afin de concilier optimisation de la prise en charge des patients et gains d'efficience. La recherche d'un juste dimensionnement doit aussi être au coeur de la réflexion. Depuis le dépôt de la deuxième version du préprogramme, les deux établissements, en lien avec l'ARH, ont beaucoup travaillé pour préciser tout ce qui devait l'être. Ils seront sans aucun doute en mesure prochainement de présenter un dossier solide.

M. Yannick Bodin.  - Je suis très déçu : M. Laporte m'a fait mot pour mot la même réponse il y a un an ! Les autres dossiers hospitaliers du département, celui du nord de la Seine-et-Marne et celui de Fontainebleau, ont progressé rapidement. La population de Melun ne comprendrait pas que la ministre répète ce qu'elle a dit il y a un an !