Certificats d'obtention végétale (Suite)

M. le président.  - Nous reprenons l'examen de la proposition de loi relative aux certificats d'obtention végétale.

Discussion des articles (Suite)

M. Rémy Pointereau, rapporteur de la commission de l'économie.  - Je souhaite que l'examen de l'article 14 soit réservé jusqu'à l'arrivée de M. Le Maire.

M. Patrick Ollier, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement.  - Favorable.

M. Daniel Raoul.  - Cela aurait été étonnant !

Article 12

M. le président.  - Amendement n°6 rectifié, présenté par M. Raoul et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 4

Après les mots :

conditions mentionnées

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

à l'article L. 623-2.

M. Daniel Raoul.  - Une différence est faite entre les conditions de nullité selon qu'il s'agit d'un certificat délivré sur la base de documents et renseignements fournis par l'obtenteur - critères H et S- ou non. Je ne souhaite pas qu'on la conserve.

On aurait pu, monsieur le président, éviter de siéger cet après-midi, en modifiant l'ordre du jour de mardi ! Nous aurions été plus nombreux !

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - Cette rédaction est plus simple : favorable.

M. Patrick Ollier, ministre.  - La proposition de loi reprenait exactement les termes de la convention Upov. S'en écarter ne fait pas problème. Favorable.

L'amendement n°6 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°46, présenté par M. Le Cam et les membres du groupe CRC-SPG.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Soit qu'il concerne une espèce du domaine public existant à l'état naturel, ou résultant des pratiques paysannes traditionnelles ou endémiques. »

Mme Annie David.  - Mes collègues Le Cam et Schurch regrettent que ce débat ait été coupé ; ils n'ont pu venir ce vendredi. Et voilà qu'à ce découpage, vous ajoutez la réserve : tout cela n'est pas très sérieux.

Il faut envisager aussi l'appropriation d'une espèce existante ou dont on s'aperçoit qu'elle l'était au moment de l'obtention du COV. Cet amendement de bon sens préserve les espèces endémiques et les agricultures traditionnelles.

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - La précision est inutile : le certificat ne peut être accordé que si la variété est « nouvelle, homogène, distincte et stable ».

M. Patrick Ollier, ministre.  - Nous aussi sommes soumis à ce problème de disponibilité, madame David, moi le premier. Que l'ordre du jour soit bousculé en fin de session extraordinaire est banal ; et l'usage de la réserve est parfaitement constitutionnel.

Sur l'amendement, je suis l'avis négatif du rapporteur. Un COV ne peut concerner, par définition, une variété préexistante dans le milieu naturel. Moi aussi, je souhaite favoriser les pratiques paysannes traditionnelles -mais l'expression est juridiquement imprécise.

M. Daniel Raoul.  - Je m'abstiendrai sur cet amendement car il est partiellement satisfait, grâce à mon amendement qui a fait disparaître le mot « découverte » du texte.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Je voterai cet amendement avec un peu de malice : tout vient de la nature -3,5 milliards d'années d'évolution- et de la sélection faite par les paysans depuis 20 000 ans...

L'amendement n°46 n'est pas adopté.

L'article 12, modifié, est adopté.

Article 13

M. Daniel Raoul.  - M. Yung est très sensible à cet article 13, qui concerne les droits de propriété intellectuelle pour les inventeurs salariés. Il craint toutefois que le droit qui y est inscrit demeure théorique et que les inventeurs concernés soient mal rémunérés. Certains inventeurs salariés du secteur privé sont contraints de saisir la commission nationale ou les tribunaux pour faire valoir leurs droits. Il ne suffit pas de sauter comme des cabris en disant « Innovation ! Innovation ! », il faut donner aux inventeurs le moyen de faire reconnaître leurs droits et d'obtenir une juste récompense de leur travail.

L'article 13 est adopté.

Articles additionnels après l'article 14

M. le président.  - Amendement n°14, présenté par M. Raoul et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase de l'article L. 632-1 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « les plus » sont supprimés.

M. Daniel Raoul.  - C'est rédactionnel.

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - Vous rouvrez le débat que nous avons eu lors de la loi de modernisation agricole (LMA). Cet amendement est un cavalier : ce texte ne concerne en rien la représentativité des organisations agricoles.

M. Patrick Ollier, ministre.  - Cet amendement est un cavalier, comme les suivants. Et vous le savez bien ! Vous savez aussi que M. Le Maire a toujours veillé à ce que l'ensemble des organisations représentatives soient associées. Avis défavorable, comme aux deux amendements suivants.

L'amendement n°14 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°15, présenté par M. Raoul et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

A la première phrase de l'article L. 632-4 du code rural et de la pêche maritime, après les mots : « est subordonnée », sont insérés les mots : « à la représentation de l'ensemble des organisations syndicales d'exploitants agricoles à vocation générale habilitées à siéger nationalement et ».

M. Daniel Raoul.  - Il est défendu.

L'amendement n°15, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°16, présenté par M. Raoul et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa de l'article L. 632-6 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le prélèvement de ces cotisations est subordonné à la représentation, dans les organisations interprofessionnelles concernées par des accords étendus, de l'ensemble des organisations syndicales d'exploitants agricoles à vocation générale habilitées à siéger nationalement. » ;

M. Daniel Raoul.  - L'article L. 632-6 habilite les interprofessions à prélever sur tous les membres des professions les constituant, que ces membres soient adhérents ou non, des cotisations résultant des accords étendus. Cet amendement conditionne ce prélèvement à la représentation dans l'interprofession de l'ensemble des syndicats agricoles à vocation générale.

Les engagements pris par le Gouvernement lors de l'examen de la LMA et relatifs à la représentativité syndicale ne sont toujours pas tenus.

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - Vous allez encore plus loin que tout à l'heure. La représentativité se fait au sein des chambres d'agriculture. Encore un cavalier.

L'amendement n°16 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°17, présenté par M. Raoul et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l'article L. 632-8-1 du code rural et de la pêche maritime, après les mots : « autorités administratives compétentes », sont insérés les mots « et à tous les cotisants qui en font la demande ».

M. Daniel Raoul.  - Je ne vais pas de plus en plus fort, je change de sujet.

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - Autre cavalier.

M. Patrick Ollier, ministre.  - En outre, cet amendement est satisfait.

M. Daniel Raoul.  - Il est vrai que l'on peut toujours s'adresser à la commission d'accès aux documents administratifs (Cada) mais il serait préférable que chacun ait accès à ces documents par des voies plus simples.

L'amendement n°17 n'est pas adopté.

L'article 15 est adopté.

Article 15 bis

M. le président.  - Amendement n°56 rectifié, présenté par M. Demuynck.

Rédiger ainsi cet article :

Le chapitre préliminaire du titre VI du livre VI du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Son intitulé est ainsi rédigé :

« La conservation des ressources phytogénétiques pour l'agriculture et l'alimentation » ;

2° Il est complété par trois article L. 660-2 à L. 660-4 ainsi rédigés :

« Art. L. 660-2. - La conservation des ressources phytogénétiques pour l'agriculture et l'alimentation est organisée, dans l'intérêt général en vue de leur utilisation durable, en particulier pour la recherche scientifique, l'innovation et la sélection variétale appliquée, dans le but d'éviter la perte irréversible de ressources phytogénétiques stratégiques.

« Pour être enregistrée comme ressource phytogénétique pour l'agriculture et l'alimentation, une ressource phytogénétique d'une espèce végétale cultivée ou bien d'une forme sauvage apparentée doit satisfaire aux conditions suivantes :

« 1° Présenter un intérêt actuel ou potentiel pour la recherche scientifique, l'innovation ou la sélection variétale appliquée ;

« 2° Ne pas figurer au catalogue officiel des espèces et variétés de plantes cultivées, sauf dans des cas précisés par arrêté du ministre chargé de l'agriculture, notamment en cas de variétés de conservation

 « 3 ° Ne pas faire l'objet d'un certificat d'obtention végétale.

 « Art. L. 660-3. - Est identifiée comme ressource phytogénétique patrimoniale toute ressource phytogénétique satisfaisant aux conditions d'enregistrement définies à l'article L. 660-2 et notoirement connue comme faisant partie de l'histoire agricole, horticole, forestière et alimentaire nationale, sur le territoire national, notamment du fait qu'elle est représentative de cette histoire, qu'elle a été diffusée ou est présente sur le territoire ou qu'elle est emblématique d'une région.

« La conservation des ressources phytogénétiques patrimoniales est organisée, dans l'intérêt général, dans des conditions de nature à faciliter l'accès des citoyens et de la communauté internationale à des échantillons de ces ressources compte tenu de leur intérêt global pour l'agriculture et l'alimentation.

« Ces ressources sont intégrées dans la collection nationale des ressources phytogénétiques mentionnée à l'article L. 660-1.

« Art. L. 660-4. - Les conditions d'enregistrement et de reconnaissance des ressources phytogénétiques définies aux articles L. 660-2 et L. 660-3 ainsi que les modalités de conservation et de valorisation des échantillons de ces ressources sont précisées par décret. »

M. Christian Demuynck.  - Après des années de débats, un consensus existe dans la communauté internationale agricole sur le fait que l'attribution d'une nationalité aux ressources phytogénétiques n'a pas de sens.

La ressource phytogénétique peut appartenir soit à une espèce végétale cultivée soit à une forme sauvage apparentée. Je supprime la notion d'intérêt particulier pour la remplacer par celle d'« intérêt actuel ou potentiel ».

Aussi bien les directives européennes, enfin, que les lois Grenelle permettent que des variétés anciennes présentes dans les collections puissent être remises en marché, et donc figurent dans une des listes du catalogue officiel. Il importe d'utiliser la notion de développement durable et de définir ce qu'est une ressource « patrimoniale ».

M. le président.  - Sous-amendement n°60 à l'amendement n° 56 rectifié de M. Demuynck, présenté par M. Le Cam et les membres du groupe CRC-SPG.

Amendement n°56, alinéa 6

Après les mots :

dans l'intérêt général

insérer les mots :

pour garantir que les générations futures pourront disposer des ressources nécessaires à leur alimentation, y compris celles dont on ignore aujourd'hui l'éventuel intérêt futur, pour leur intérêt patrimonial, culturel et gastronomique, et

Mme Annie David.  - Nous ignorons beaucoup des propriétés des espèces « biens communs ». On découvre aujourd'hui un intérêt à des espèces considérées hier comme des « mauvaises herbes ». Et que savons-nous des besoins des générations futures ? La conservation des ressources phytogénétiques ne doit pas être limitée aux besoins économiques immédiats de la recherche ou de la sélection.

M. le président.  - Sous-amendement n°65 rectifié à l'amendement n° 56 rectifié de M. Demuynck, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Amendement n°56 rect., alinéa 6

Après les mots :

sélection variétale appliquée,

insérer les mots :

pour leur intérêt patrimonial, culturel et gastronomique,

Mme Marie-Christine Blandin.  - Cet article inscrit enfin dans la loi la notion de collection nationale, dans la logique du Grenelle. Je précise qu'outre les variétés anciennes, il faut compter des variétés locales.

L'amendement Demuynck retient une finalité trop étroite : on ne peut savoir d'avance ce qui sera utile à la recherche. L'académicien Yvon Le Maho, qui a suivi des années durant la marche des manchots empereurs, n'imaginait pas qu'il découvrirait dans l'estomac des pères en couvade un peptide utile à la conservation de tous les aliments !

Mon sous-amendement ajoute à l'intérêt patrimonial l'intérêt culturel -songeons au gui des druides ou la mythique mandragore- ainsi que l'intérêt gastronomique -la truffe noire aujourd'hui menacée. Ce que les ouvriers de l'institut Vavilov de Leningrad ont fait pour sauver leurs collections de céréales ou de pomme de terre pendant le siège de la ville, nous devons être capables de le faire.

M. le président.  - Sous-amendement n°66 rectifié à l'amendement n° 56 rectifié de M. Demuynck, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Amendement n°56 rect., alinéa 7

Après les mots :

 pour l'agriculture et l'alimentation

insérer les mots :

faisant partie de la collection nationale

Mme Marie-Christine Blandin.  - Amendement de précision.

M. le président.  - Sous-amendement n°61 rectifié à l'amendement n° 56 rectifié de M. Demuynck, présenté par M. Le Cam et les membres du groupe CRC-SPG.

Amendement n°56, alinéa 11

Après les mots :

à l'article L. 660-2 et

insérer les mots :

pouvant garantir que les générations futures pourront disposer des ressources nécessaires à leur alimentation, y compris celles dont on ignore aujourd'hui l'éventuel intérêt futur, ou

Mme Annie David.  - Je l'ai défendu.

M. le président.  - Sous-amendement n°64 à l'amendement n° 56 rectifié de M. Demuynck, présenté par M. Raoul et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Amendement 56 rect., alinéa 12

Après les mots :

accès des citoyens

insérer les mots :

, de toute personne physique ou morale

M. Daniel Raoul.  - Il s'agit de préciser que toute personne physique ou morale doit avoir accès à ce patrimoine variétal public qui est libre de droit et qui présente toujours un intérêt agronomique -afin d'inclure les professionnels et, notamment, les exploitants agricoles.

Un agriculteur de mon département continue de cultiver -pour son plaisir- des variétés anciennes de légumes. Or il est censé ne pas pouvoir les donner contre rémunération aux chercheurs de l'Inra -cela se fait en coulisses, heureusement...

M. le président.  - Amendement n°54, présenté par M. Le Cam et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 2

Après les mots :

intérêt général

insérer les mots :

pour garantir que les générations futures pourront disposer des ressources nécessaires à leur alimentation, y compris celles dont on ignore aujourd'hui l'éventuel intérêt futur, pour leur intérêt patrimonial, culturel et gastronomique,

Mme Annie David.  - Il est défendu.

M. le président.  - Amendement n°34, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2

Après les mots :

sélection variétale appliquée,

insérer les mots :

pour leur intérêt patrimonial, culturel et gastronomique,

Mme Marie-Christine Blandin.  - Il est défendu.

M. le président.  - Amendement n°35, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 3

Après les mots :

pour l'agriculture et l'alimentation

insérer les mots :

faisant partie de la collection nationale

Mme Marie-Christine Blandin.  - Amendement de précision.

M. le président.  - Amendement n°55, présenté par M. Le Cam et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 7

Après les mots :

à l'article L. 660-2 et

insérer les mots :

pouvant garantir que les générations futures pourront disposer des ressources nécessaires à leur alimentation, y compris celles dont on ignore aujourd'hui l'éventuel intérêt futur, ou

Mme Annie David.  - Il est défendu.

M. le président.  - Amendement n°18, présenté par M. Raoul et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 8

Après les mots :

des citoyens

insérer les mots :

, des exploitants agricoles

M. Daniel Raoul.  - Il est devenu le sous-amendement n°64.

L'amendement n°18 est retiré.

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - Favorable à l'amendement n°56 rectifié qui apporte des précisions utiles. Le sous-amendement n°60 se préoccupe des générations futures mais ajoute des termes risquant de restreindre la portée du dispositif ; défavorable pour cette raison. Même objection aux sous-amendements nos65 rectifié et 66 rectifié. Le sous-amendement n°61 rectifié, posant trop de conditions, risque d'être contreproductif. Le sous-amendement n°64 correspond à la modification qu'avait souhaitée la commission : favorable.

M. Patrick Ollier, ministre.  - Nous convergeons sur les intentions et divergeons sur la rédaction.

Je rends hommage à M. Demuynck, auteur de la proposition de loi, pour le dépôt de cet amendement n°56 rectifié -que le Gouvernement approuve. Le sous-amendement n°60 n'est pas opportun. Je pourrais être favorable à l'amendement n°65 rectifié, sous réserve qu'il soit rectifié pour insérer « en tant qu'élément du patrimoine agricole et alimentaire national vivant ». Défavorable, en revanche, aux sous-amendements nos66 rectifié et 61 rectifié. Favorable au sous-amendement n°64.

Défavorable, bien sûr, aux autres amendements.

Le sous-amendement n°60 n'est pas adopté.

Mme Marie-Christine Blandin.  - J'accepte la rectification à mon sous-amendement n°65 rectifié.

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - Favorable.

Le sous-amendement n°65 rectifié bis est adopté.

Le sous-amendement n°66 rectifié n'est pas adopté, non plus que le sous-amendement n°61 rectifié.

M. Daniel Raoul.  - Les variétés anciennes pourront être inscrites : fort bien. Mais tout n'est pas réglé. Qui sera responsable de cette inscription ? Qui paiera les droits ? Le cultivateur ? L'autorité publique ? L'Inra ?

Le sous-amendement n°64 est adopté.

Mme Annie David.  - Nous nous abstiendrons sur l'amendement n°56 rectifié tel que sous-amendé. Depuis toujours, les agriculteurs produisent, échangent, renouvellent la biodiversité cultivée. Or vous ne vous souciez que des intérêts des Bayer et autres Monsanto puisque les semences de ferme ne seront plus automatiquement autorisées -les royalties sont généralisées. L'Union française des semenciers vient de demander une augmentation de 30 % à 50 % des droits de licence pour la multiplication de semences destinées à la commercialisation de blé tendre -35 millions de charges supplémentaires selon la Confédération paysanne. Et vous faites du non-paiement de ces royalties un délit ; c'est aux semenciers de prouver la contrefaçon. Les échanges de petites quantités de semences entre agriculteurs relèvent de l'exception de sélection et non de la contrefaçon.

L'usage de semences de ferme présente pourtant de grands avantages écologiques. Les chercheurs doivent, certes, être rémunérés. Mais quelle recherche voulons-nous ? Dans quel but et par qui ? A qui revient la charge de sélectionner de nouvelles variétés ? Il faudra une loi qui reconnaisse réellement les droits des agriculteurs sur leurs semences pour répondre à ces questions.

Les sénateurs CRC-SPG voteront contre cette proposition de loi.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Dans la rédaction Demuynck comme dans le texte original, il est question d'éviter la perte de ressources phytogénétiques « stratégiques » : mais c'est toute la nature qui, inventant les possibles de demain, est stratégique. D'où mon abstention.

L'amendement n°56 rectifié, sous-amendé, est adopté et devient l'article 15 bis.

Les amendements nos54, 34, 35, et 55 deviennent sans objet.

L'article 16 est adopté, ainsi que l'article 17.

M. Patrick Ollier, ministre.  - M. Le Maire arrive incessamment. Commençons.

Article 14 (Réservé)

L'amendement n°47 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°8, présenté par M. Raoul et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 4

Après les mots :

l'article L. 623-4

insérer les mots :

et afin de sauvegarder la production agricole

M. Daniel Raoul.  - Comme dans l'article 14 du règlement communautaire de base, il est utile de préciser que cette dérogation à la protection des obtentions végétales, aussi appelée « privilège de l'agriculteur », est motivée par la volonté de sauvegarder la production agricole.

La convention Upov laisse à chaque État membre le droit de restreindre les droits de l'obtenteur pour les semences de ferme. Certes, une compensation financière se justifie, pour préserver la recherche : nous y reviendrons.

M. le rapporteur lui-même a évoqué cette pratique. La réutilisation des semences est un droit ancestral ; pourquoi ne pas aller plus loin ?

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - Cela signifierait : sans semence de ferme, point de salut. Vous êtes de l'Anjou...

M. Daniel Raoul.  - Le jardin de la France !

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - ...qui fournit beaucoup de semences ; vous allez à l'encontre des intérêts de votre région.

Votre précision aurait mieux sa place dans un exposé des motifs. De surcroît, les semences de ferme ne sont pas le seul moyen de sauver la production. N'incitons pas, enfin, les agriculteurs à délaisser la mention « certifié »...

M. Patrick Ollier, ministre.  - Cette précision, en effet, relève de l'exposé des motifs. Ici, elle soumettrait le droit à l'utilisation des semences de ferme à ce seul objectif. Défavorable.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Je salue l'attitude de M. Raoul, qui fait passer l'intérêt général avant celui des entreprises de son département !

Semences d'obtenteur et semences de ferme participent l'une et l'autre à la production agricole, dans sa diversité.

M. Daniel Raoul.  - La rédaction de l'amendement n'est sans doute pas optimale.

L'amendement n°8 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°25, présenté par Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard et Mme Voynet.

Alinéa 4

Remplacer les mots :

les espèces énumérées par un décret en Conseil d'État 

par :

toutes les espèces 

Mme Marie-Christine Blandin.  - L'article vise à sécuriser l'usage de semences de ferme. La convention Upov est trop floue : comment interpréter le terme de « raisonnable » ?

Nous sommes en situation de pénurie, aggravée par la sécheresse. Limiter l'utilisation des semences de ferme, dans ces conditions, serait bien inopportun. D'autant qu'il s'agit là d'un droit immémorial. Il serait donc incorrect de passer par un décret, dont on ne sait combien d'espèces il visera.

Après un an de réflexion collective sur la stratégie nationale sur la biodiversité, il est étrange de vouloir, ici, la réduire.

L'amendement n°49 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°7 rectifié bis, présenté par M. Raoul et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 4

Remplacer les mots :

les espèces énumérées par un décret en Conseil d'État

par les mots :

les espèces énumérées par le règlement (CE) n°2100/94 du Conseil du 27 juillet 1994 instituant un régime de protection communautaire des obtentions végétales ainsi que pour d'autres espèces qui peuvent être énumérées par un décret en Conseil d'État

M. Daniel Raoul.  - L'article 14 du règlement du Conseil du 27 juillet 1994 instituant un régime de protection communautaire des obtentions végétales énumère une liste de 21 espèces, plus une concernant le Portugal, pour lesquelles les semences de ferme sont autorisées. Les auteurs de cet amendement estiment donc que la législation nationale doit au minimum se fonder sur cette liste communautaire, et peut aussi concerner d'autres espèces qui devront être énumérées dans un décret, pour tenir compte des spécificités de notre territoire national.

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - La convention Upov ne justifie l'utilisation de semences de ferme que par son caractère courant sur un territoire. Une autorisation générale n'est pas opportune. Rejet, donc, de l'amendement n°25. En revanche, la commission est favorable à l'amendement n°7 rectifié bis, ce qui peut satisfaire en partie Mme Blandin.

M. Bruno Le Maire, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.  - Je vous prie d'excuser mon absence : elle a permis de porter le crédit d'impôt sur l'agriculture biologique de 2 000 à 2 500 euros !

L'amendement n°25 va trop loin, au regard de la convention Upov : avis défavorable. Favorable, en revanche, à l'amendement n°7 rectifié bis.

L'amendement n°25 n'est pas adopté.

L'amendement n°7 rectifié bis est adopté.

L'amendement n°52 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°10 rectifié, présenté par M. Raoul et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 5

Remplacer cet alinéa par cinq alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 623-24-2. - L'agriculteur doit une indemnité aux titulaires des certificats d'obtention végétale dont il utilise les variétés pour produire des semences de ferme sauf dans les cas suivants :

« - il s'agit d'un petit agriculteur au sens du règlement (CE) n°2100/94 du Conseil du 27 juillet 1994 instituant un régime de protection communautaire des obtentions végétales ;

« - il utilise le produit de la récolte des semences de ferme à des fins d'autoconsommation sur son exploitation ;

« - il utilise les semences de ferme pour des cultures réalisées en application d'obligations agro-environnementales ;

« - il est confronté à des difficultés d'approvisionnement sur le marché des semences.

M. Daniel Raoul.  - Nos chemins vont ici quelque peu diverger. Les petits agriculteurs peuvent être exonérés de l'obligation de payer une indemnité à l'obtenteur de la variété concernée : doivent être concernés les agriculteurs qui cultivent pour produire des semences de ferme, mais également la production pour autoconsommation, sur tous les types de culture : l'autonomie est un objectif majeur. Un accord est intervenu pour le blé tendre : la rémunération des obtenteurs -sous forme de l'oxymore « contribution volontaire obligatoire »- n'est due que lors de la collecte de la récolte par les collecteurs agrées, c'est-à-dire lorsqu'il y a volonté de mise sur le marché.

Enfin, certaines pratiques environnementales, comme la contrainte de couverture hivernale des sols imposée par la directive Nitrate, doivent également être exonérées dès lors qu'il n'y a pas commercialisation, ni même troc.

L'autre cas, enfin, qui devrait être exonéré concerne les pratiques liées aux perturbations importantes sur le marché : dans de tels cas, les semences de ferme, par exemple, devraient être utilisées. Mettons fin à l'hypocrisie. On sait bien que ces pratiques ont cours. Dès lors qu'il n'y a pas commercialisation, pourquoi pénaliser ?

M. le président.  - Amendement n°27, présenté par Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard et Mme Voynet.

Alinéa 5

Après les mots :

l'agriculteur

insérer les mots :

qui effectue une sélection conservatrice visant à reproduire les caractères distinctifs et uniquement les caractères distinctifs de la variété protégée ou qui commercialise sa récolte sous la dénomination de la variété protégée 

Mme Marie-Christine Blandin.  - Mon amendement vise la sélection conservatrice. Il s'agit de définir la spoliation comme une contrefaçon, à l'image de ces montres et de ces sacs que l'on vend sous le manteau. Si l'agriculteur n'affiche pas une sélection conservatrice, par transmission, il n'y a aucune raison qu'il doive payer une indemnité à l'obtenteur -lequel sait se protéger en attendant d'avoir des résultats sur six générations avant de commercialiser une semence qui aura peu de chances de conserver ses qualités...

L'amendement n°48 n'est pas défendu, non plus que l'amendement n°53.

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - L'amendement n°10 rectifié pose une vraie question. Cependant, l'exception environnementale me parait trop large. Quant à l'autoconsommation, il est difficile de dire que toute commercialisation est exclue : quid du bétail qui sera vendu, ayant été ainsi nourri ? Et vous créez une distorsion de concurrence avec l'éleveur qui achète des semences...

Certaines espèces, de plus, posent problème : ainsi, l'autoconsommation est importante pour les pois et l'orge fourragère : aujourd'hui, ces deux espèces sont sinistrées car il n'y a plus de recherche.

Comment, enfin, déposer des instruments de ratification de la convention Upov ? On risque de voir les obtenteurs s'orienter vers une protection européenne, plus onéreuse mais plus large.

La question de l'autoconsommation peut se régler dans un cadre négocié : c'est déjà le cas pour le blé... Au reste, le coût pour l'agriculteur reviendrait à 3 ou 4 euros l'hectare : ce n'est pas énorme. Je vous propose donc une nouvelle rédaction de l'amendement qui ne mentionne pas explicitement l'autoconsommation et qui complète l'alinéa 5 par une phrase ainsi rédigé : « Sans porter atteinte aux intérêts légitimes des titulaires de certificats d'obtention végétale, l'accord interprofessionnel mentionné à l'article L. 623-24-3 peut, pour des usages qu'il définit, exonérer les agriculteurs du paiement de cette indemnité. Cette rédaction est plus ouverte.

La commission avait émis un avis de sagesse : elle serait favorable sous réserve de cette rectification. Sinon, à mon grand regret, avis défavorable à l'amendement n°10 rectifié.

L'amendement n°27 vise les seuls agriculteurs multiplicateurs ; la solution est curieuse : quelle différence entre semence de ferme des multiplicateurs et semences certifiées ? Cela est contraire à l'esprit du texte et aux règles de la propriété industrielle.

M. Daniel Raoul.  - Le débat a duré près d'une heure en commission.

M. le président.  - Vous n'êtes pas obligé de recommencer ! (Sourires)

M. Daniel Raoul.  - Je rappelle simplement qu'une majorité de la commission était favorable à l'amendement. C'est le président de la commission qui a souhaité un avis de sagesse pour maintenir de bonnes relations avec le ministère, ce que je peux comprendre...

La convention Upov, monsieur le rapporteur, tient compte de la valeur de la récolte. Je maintiens donc ma rédaction. Celle que vous proposez est sans valeur normative. Quelle est la valeur de la récolte dans la bande des cinq mètres ? Il n'y en a pas !

M. Bruno Le Maire, ministre.  - L'amendement n°10 rectifié pose une vraie question. Mais j'appelle M. Raoul à reconsidérer sa position sur la rectification proposée par M. Pointereau, qui répond à vos préoccupations et constitue une bonne solution. Quant à la protection de l'écosystème, elle est prévue pour certaines variétés, comme la moutarde.

Défavorable à l'amendement n°27, pour les raisons qu'a indiquées le rapporteur.

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - Si rectification il y a, favorable. Sinon, sagesse, plutôt défavorable.

M. Daniel Raoul.  - Vous connaissez, monsieur le rapporteur, les témoignages que l'on a eus en commission. Je ne vois pas la valeur ajoutée de votre rectification. D'autant que nous sommes au début de la navette.

Vous savez bien, monsieur le ministre, que la maîtrise de l'écosystème est un vrai problème : ne me faites pas monter la moutarde au nez ! (Sourires)

L'amendement n°10 rectifié n'est pas adopté.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Je visais celui qui commercialise une variété un peu différente mais qu'il appelle du même nom qu'une variété protégée.

L'amendement n°27 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°26, présenté par Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard et Mme Voynet.

Après l'alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La moitié des indemnités dues par les agriculteurs abonde un fonds de soutien à la recherche en vue de financer des programmes collectifs de recherche sur les espèces dites mineures ainsi que sur des variétés adaptées à des conduites culturales diversifiées et permettant de répondre à la réduction des intrants.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Actuellement, 15 % des indemnités dues par les agriculteurs doivent abonder un fonds de soutien à la recherche et 85 % vont aux obtenteurs.

Je rappelle que les budgets publics mettent déjà plus de 5 milliards d'euros en défiscalisation en faveur des entreprises. Certaine recherches peuvent, au reste, aller contre l'intérêt général. N'oublions pas, enfin, que la protection de la biosphère est devenue, avec le Grenelle, un objectif majeur.

Le partage moitié-moitié que je propose, au profit de la recherche publique, est équitable, d'autant que les semences utilisées pour la recherche proviennent de prélèvements effectués dans les champs, sans autorisation des cultivateurs.

M. le président.  - Amendement n°11, présenté par M. Raoul et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Après l'alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Un tiers des indemnités dues par les agriculteurs abonde un fonds de soutien à la recherche en vue de financer des programmes collectifs de recherche sur les espèces dites mineures ainsi que sur des variétés adaptées à des conduites culturales diversifiées et permettant de répondre à la réduction des intrants.

M. Daniel Raoul.  - Amendement de repli. Dans le cadre de l'accord blé tendre, il a été décidé que seulement 15 % -seulement- du montant des CVO prélevées sur les agriculteurs serviraient à alimenter le Fonds de soutien à l'obtention végétale, soit 1 million sur les 7 collectés.

Le FSOV permet de financer des programmes de recherche collectifs dans le domaine du blé tendre. La répartition devrait être revue : un tiers au lieu de 15 %.

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - L'amendement n°26 contredit l'amendement n°23, qui voulait supprimer les obtenteurs... En fait, il crée et affecte une taxe, sans doute incompatible avec la convention Upov, qui requiert que les atteintes aux droits de l'obtenteur ne soient pas trop importantes. Défavorable. Même avis sur l'amendement n°11, pour les mêmes raisons.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis : il n'est pas opportun de créer un tel fonds.

L'amendement n°26 n'est pas adopté.

L'amendement n°11 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°28, présenté par Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard et Mme Voynet.

Alinéa 6

Supprimer cet alinéa.

Mme Marie-Christine Blandin.  - En l'absence de convention avec l'obtenteur, sa rémunération est ici renvoyée à un décret. C'est prélever des royalties, y compris sur les variétés du domaine public, en contradiction avec le règlement européen du 27 juillet 1994.

L'amendement n°50 n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°12, présenté par M. Raoul et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Alinéa 6

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 623-24-3. - Les conditions d'application de la dérogation définie à l'article L.. 623-24-1, y compris les modalités de fixation du montant de l'indemnité visée à l'article L. 623-24-2 sont arrêtées dans le cadre d'accords interprofessionnels conclus dans les conditions prévues au chapitre II du titre III du livre VI du code rural et de la pêche maritime ou de contrats entre le titulaire du certificat d'obtention végétale et l'agriculteur concerné, ou entre un ou plusieurs titulaires de certificats d'obtention végétale et un groupe d'agriculteurs concernés.

« Par défaut, elles sont établies par un décret en Conseil d'État. Les commissions permanentes compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat sont consultées sur ce projet de décret.

M. Daniel Raoul.  - Il convient de donner la priorité, dans un premier temps, à la conclusion d'accords interprofessionnels. En l'absence d'accord des acteurs de la filière semence, un décret pourra établir ces conditions. Il faut laisser du temps à la négociation collective.

M. le président.  - Amendement n°9 rectifié bis, présenté par M. Raoul et les membres du groupe socialiste.

Alinéa 6

Après les mots :

à l'article L. 623-24-2,

Insérer les mots :

dont le montant est sensiblement inférieur au montant perçu pour la production sous licence de matériel de multiplication de la même variété,

M. Daniel Raoul.  - Il s'agit de préciser que seuls sont concernés par cet alinéa les agriculteurs qui produisent des semences de ferme. Comme dans le règlement communautaire de base, nous donnons une indication sur le montant de cette rémunération, qui doit être sensiblement inférieure au montant de la rémunération payée sous licence. Je laisse à M. le ministre le soin de peser ce « sensiblement ».

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - L'intervention publique ne se fait qu'au moment de la fixation des règles : l'État est légitime à intervenir. Défavorable à l'amendement n°28.

Le dispositif proposé par l'amendement n°12 est excessivement lourd : défavorable.

D'accord sur l'exigence d'un montant inférieur, c'est bien ce que prévoit la convention. Mais le terme de « sensiblement » est sujet à interprétation... La différence doit être plus que sensible : significative. Favorable, en dépit de cette observation.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Même avis que le rapporteur.

L'amendement n°28 n'est pas adopté.

L'amendement n°12 n'est pas adopté.

L'amendement n°9 rectifié bis est adopté.

M. le président.  - Amendement n°13 rectifié, présenté par M. Raoul et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 7

Après les mots :

permettant de garantir

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

la traçabilité des produits issus de variétés faisant l'objet de certificat d'obtention végétale.

M. Daniel Raoul.  - Les produits soumis au triage étant les produits de la mise en culture d'une variété protégée, il faut vérifier que ceux-ci sont bien conformes à la variété protégée par un COV.

M. le président.  - Amendement n°29, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 7

Compléter cet alinéa par les mots :

sauf dans le cas de multiplication de semences de variétés du domaine public ou sélectionnées à la ferme pour les adapter au milieu local  à des fins d'autoconsommation

Mme Marie-Christine Blandin.  - Je reviens à la charge sur l'autoconsommation. Les agriculteurs qui utilisent les semences de ferme ne sont pas des contrebandiers. Ils ne spolient en rien le revendeur puisque rien n'entre dans le circuit de consommation. Cette pratique va dans le sens de la santé humaine comme de la préservation de l'écosystème. La filière semencière n'a pas à craindre de concurrence de ces pratiques, qui servent l'ensemble de la société.

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - Favorable à l'amendement n°13 rectifié, qui veut que ne soient visées que les seules variétés protégées.

Cette rédaction est équilibrée, j'espère que M. Raoul se souviendra de notre attitude au moment du vote final.

L'amendement n°29 est satisfait par l'amendement n°13 rectifié.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Je regrette que la parité ne soit pas respectée, au détriment de Mme Blandin... (Sourires)

L'amendement n°13 rectifié est adopté.

L'amendement n°29 devient sans objet.

L'amendement n°51 n'est pas soutenu.

M. le président.  - Amendement n°30, présenté par Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard et Mme Voynet.

Alinéa 8

Compléter cet alinéa par les mots :

, sauf dans le cas d'échanges de petites quantités de semences entre agriculteur au vue d'une adaptation locale qui relève de l'exception de sélection

Mme Marie-Christine Blandin.  - Si les agriculteurs échangent leurs semences, ce n'est pas pour faire du commerce parallèle mais pour revitaliser le patrimoine génétique. Pour les mêmes raisons qui font que l'on évite les mariages consanguins, que l'on va chercher son conjoint ailleurs. Souvenez-vous de Lévi-Strauss !

Le rapporteur va me dire que « petit » est imprécis. Je veux bien écrire « raisonnable » que le rapporteur jugeait tout à l'heure précis...

M. le président.  - Amendement n°31, présenté par Mme Blandin et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 9

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 623-24-5. - Conformément au règlement CE n°2100/94 du 27 juillet 1994 la responsabilité du contrôle de l'application du présent article ou des dispositions adoptées au titre du présent article incombe exclusivement aux titulaires de certificats d'obtention végétale. Dans l'organisation de ce contrôle, ils ne peuvent pas avoir recours aux services d'organismes officiels. Toute information pertinente est fournie sur demande aux titulaires par les agriculteurs et les prestataires d'opérations de triage à façon; toute information pertinente peut également être fournie par les organismes officiels impliqués dans le contrôle de la production agricole, si et seulement si cette information a été obtenue dans l'exercice normal de leurs tâches, sans charges ni coûts supplémentaires. Ces dispositions n'affectent en rien, la législation communautaire et nationale ayant trait à la protection des personnes en ce qui concerne le traitement et la libre circulation des données à caractère personnel. »

Mme Marie-Christine Blandin.  - L'État n'a pas à s'immiscer dans ce qui relève du domaine privé. Ce n'est pas la police qui cherche les pirates informatiques, c'est la Hadopi. J'espère qu'après avoir inventé la RGPP, le Gouvernement ne va pas inventer une police des semences.

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - 100 kg de graines de carottes, c'est une « petite quantité » avec laquelle on peut ensemencer 1 000 hectares ! Défavorable à l'amendement n°30, il n'appartient pas à l'État de créer un outil statistique. Que pense le Gouvernement de l'amendement n°31 ? Je n'y suis pas défavorable. Mais l'Europe ne pose aucune exigence sur ce point et il faudrait supprimer « conformément au règlement CEE ».

M. Bruno Le Maire, ministre.  - L'amendement n°30 n'est pas conforme au droit européen. L'amendement n°31 n'est pas utile. Pour que l'État contrôle, la loi doit le prévoir et la Cnil veille.

L'amendement n°30 n'est pas adopté.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Je retire l'amendement n°31 car je fais confiance à la Cnil.

L'amendement n°31 est retiré.

M. le président.  - Amendement n°32, présenté par Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard et Mme Voynet.

Après l'alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 623-24-6. - Pour l'application de l'article 9 du traité international sur les ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture, la politique agricole encourage la contribution des agriculteurs à la conservation des ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture. En conséquence, elle reconnaît leurs droits de sélectionner, de conserver, de réutiliser, d'échanger et de vendre leurs propres semences dans le cadre et pour leur production agricole courante. Lorsque la ressource utilisée au départ est protégée par un certificat d'obtention végétale ou contient l'expression d'un gène breveté, les droits de l'obtenteur ne s'étendent aux semences de ferme que si elles sont reproduites avec une sélection conservatrice visant à reproduire les caractères distinctifs de la variété protégée ou si la récolte est commercialisée sous la dénomination de la variété protégée. »

Mme Marie-Christine Blandin.  - Nous voici au coeur du métier d'agriculteur. Les fabricants de pâte à tarte toute faite vont-ils nous interdire de faire des tartes à domicile ?

Les tomates coeur de boeuf ou les courges spaghettis redécouvertes ne sont pas le fruit des obtenteurs mais de jardiniers « amateurs », au sens étymologique du terme. Il en va semblablement pour les céréales que redécouvrent certains boulangers ou nutritionnistes.

Les paysans doivent être reconnus à juste titre comme les principaux conservateurs de la diversité des espèces.

Cet amendement met la France sur la voie des engagements pris à Nagoya.

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - Vous recyclez de diverses manières le même amendement, auquel nous sommes défavorables.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Défavorable.

L'amendement n°32 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°33, présenté par Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Desessard et Mme Voynet.

Après l'alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Pour application des articles 5 et 6 du traité international sur les ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture, il est instauré une taxe sur les semences non librement reproductibles. Le produit de cette taxe sera destiné à encourager et soutenir la recherche publique pour la sélection et la mise sur le marché de semences reproductibles, les efforts des agriculteurs pour gérer et conserver les ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture et leur implication dans des programmes de sélection participative qui renforcent la capacité de mise au point de variétés spécifiquement adaptées aux différentes conditions sociales, économiques et écologiques, y compris dans les zones marginales. »

Mme Marie-Christine Blandin.  - Qui, au Sénat, a peur de la recherche ? Personne, et certainement pas les écologistes, malgré les propos du ministre lors de la discussion générale.

Nous proposons d'apporter des financements à la recherche participative, qui s'inscrit dans la perspective du traité international sur les ressources phytogénétiques. La taxe que nous proposons d'instaurer serait assise sur les semences qui ont été modifiés pour les rendre irreproductibles. Les plantes qui en sont issus sont figées ; elles ne peuvent donc participer à l'avenir de l'humanité. Elles méritent donc une petite taxe pour financer beaucoup de recherche.

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - Vous contredisez votre amendement n°23, qui excluait de faire supporter de nouvelles taxes aux agriculteurs.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Ce ne sont pas les mêmes !

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - Au vu de son imprécision, il faut croire que c'est un amendement d'appel.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Défavorable.

L'amendement n°33 n'est pas adopté.

M. Daniel Raoul.  - Je reviens, devant M. Le Maire cette fois, sur la question du pluralisme dans la représentation de la profession agricole.

Les amendements nos14, 15, 16 et 17 avaient déjà été défendus dans le cadre de la LMA, en 2010. M. le ministre nous avait alors parlé d'évolution spontanée qui irait dans le sens de l'Histoire. Depuis, rien, même lors de la récente crise laitière qui a poussé les syndicats minoritaires à agir de façon désespérée. Les pouvoirs publics sont seuls à même de garantir la représentativité des organisations agricoles : celle-ci relève de la loi. Nous revenons donc à la charge. Il n'est ni nécessaire d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer.

M. Bruno Le Maire, ministre.  - Je suis favorable à ce que nos discussions sur l'avenir de l'agriculture soient ouvertes à toutes les organisations syndicales agricoles, y compris la Confédération paysanne. Les interprofessions sont de droit privé ; c'est à elles de prendre l'initiative de s'ouvrir. L'esprit de responsabilité des uns et des autres doit prévaloir.

M. Daniel Raoul.  - Puisque vous avez rejeté l'amendement n°10 sur l'autoconsommation, je voterai contre l'article 14, en espérant que la navette fera évoluer les choses.

L'article 14, modifié, est adopté.

Vote sur l'ensemble

Mme Marie-Christine Blandin.  - Non, monsieur le rapporteur, vous ne m'avez pas tout à fait tout refusé !

L'article 15 vise la contrefaçon « volontaire », introduite à notre demande, du temps de la loi Bizet.

Pour le reste vous n'avez pas fait preuve d'une grande sollicitude à notre égard. Vous acceptez qu'on parle des interêts légitimes des obtenteurs mais pas de la représentation légitime des syndicats minoritaires, des limites raisonnables des semences de ferme mais pas des échanges raisonnables entre paysans. Les renseignements seront fournis exclusivement par les obtenteurs ; l'affaire du Médiator nous a laissé un goût amer en ce domaine.

Nous ne sommes pas à la hauteur des signatures de la France.

Les écologistes voteront contre cette proposition de loi.

M. Christian Cambon.  - Le modèle français de protection de l'innovation est original. Nous devons le conforter. C'est pourquoi l'UMP a tenu à déposer cette proposition de loi, qui préserve la spécificité de notre système équilibré.Ce texte consolide notre modèle de propriété intellectuelle, fournit un cadre juridique à l'utilisation des semences de ferme. Il donne un nouveau signal de l'engagement du pays aux côtés des professionnels.

Le groupe salue l'excellent travail du rapporteur.

Il votera cette proposition de loi qui engage notre filière végétale et tout un pan de notre recherche. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Daniel Raoul.  - Élu d'une ville où siège un certain nombre d'organismes liés à la semence, j'aurais pu voter ce texte. Mais le refus de mon amendement n°10 destiné simplement à sortir de l'hypocrisie m'amène à m'abstenir, dans un esprit positif.

Mme Françoise Laborde.  - Sous son aspect technique, cette proposition de loi touche deux secteurs clés de notre économie nationale, celui de la semence et notre agriculture. La France a été pionnière dans la mise en place de ce COV ; il était paradoxal qu'elle n'ait pas adapté sa législation aux standards internationaux.

La totalité des semences industrielles sont issues de semences sélectionnées par des dizaines de générations de paysans.

L'article 14 ne nous satisfait pas totalement ; le RDSE votera néanmoins ce texte en espérant que la navette l'améliorera.

M. Rémy Pointereau, rapporteur.  - Je suis heureux que ce texte soit revenu au Sénat, cinq ans après... Il était attendu par tous les professionnels ainsi que par un grand nombre d'organismes gérant la filière des semences. Il est protecteur et équilibré.

Si nos variétés faisaient l'objet d'un brevet à l'américaine, on aboutirait à une privatisation des ressources naturelles.

La pratique de semences de ferme sera autorisée dans certains cas. Il faut que la solidarité se manifeste en faveur de la recherche. C'est une question de sécurité alimentaire à l'heure du changement climatique.

Je remercie nos collègues, le président Emorine et le ministre.

« C'est à force de répandre le bon grain qu'une semence finit par tomber dans un sillon fertile » écrit Jules Verne. Je souhaite qu'il en aille ainsi pour ce texte !

La proposition de loi est adoptée.