SÉANCE

du jeudi 13 février 2014

71e séance de la session ordinaire 2013-2014

présidence de M. Jean-Patrick Courtois,vice-président

Secrétaires : M. François Fortassin, Mme Odette Herviaux.

La séance est ouverte à 9 h 10.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine de la santé (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine de la santé.

Discussion générale

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé .  - Nous avons le devoir et la responsabilité de transposer le droit communautaire en droit interne, c'est une obligation constitutionnelle. Pour autant, il ne s'agit pas d'une simple duplication ; nous avons des marges de manoeuvre pour atteindre les objectifs du législateur communautaire. Ce texte en sera un exemple. En l'adoptant, nous renforcerons la sécurité de nos concitoyens.

Les deux premiers articles visent l'obligation d'assurance des chiropracteurs et des ostéopathes, dont le nombre augmente rapidement.

L'article 3 concerne les produits cosmétiques en adaptant le règlement du 30 novembre 2009. C'est un enjeu essentiel, les leaders mondiaux du secteur sont français. La terminologie est clarifiée, la notion de personne responsable précisée, la mise sur le marché des produits mieux encadrée sous le contrôle de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). L'évaluation des produits sera conduite conformément aux bonnes pratiques par des professionnels qualifiés. Dorénavant, tout utilisateur professionnel, distributeur ou consommateur devra avertir sans délai l'ANSM d'éventuels effets indésirables. Cet article aligne également les règles relatives aux produits de tatouage sur celles applicables aux produits cosmétiques.

L'article 4, qui concernait la vente de lentilles de contact correctrices sur Internet, a été supprimé ; ces dispositions ont été intégrées dans la loi sur la consommation votée définitivement hier.

L'article 5 traite de la vente en ligne de médicaments sur Internet, que nous avons encadrée autant que le permet la législation européenne. C'est un enjeu de sécurité sanitaire : les sites de vente devront être adossés à des officines et préalablement agréés par les ARS ; ne sera autorisée que la vente des médicaments hors prescription.

L'article 6 renforce l'obligation d'information des laboratoires titulaires d'une autorisation de mise sur le marché (AMM). Ils devront informer immédiatement et de façon motivée l'ANSM de la suspension ou du retrait d'un médicament, de même que du retrait ou du non-renouvellement d'une AMM dans un des pays de l'Union. Ces dispositions s'inscrivent dans le champ de la pharmacovigilance pour garantir à nos concitoyens, après les crises que nous avons connues, des médicaments plus sûrs et de meilleure qualité. Elles appartiennent pleinement à la stratégie nationale de santé - nous y reviendrons dans le prochain projet de loi de santé publique.

L'article 7 traite enfin des mentions obligatoires qui doivent figurer sur les prescriptions de certains médicaments biologiques. Une personne qui voyage au sein de l'Union européenne aura la garantie qu'elle pourra se faire prescrire dans chaque pays membre les médicaments dont elle a besoin.

J'en appelle à votre responsabilité et à votre engagement pour que ce texte, qui renforce la sécurité de nos concitoyens, soit adopté conforme.

M. Jacky Le Menn, rapporteur de la commission des affaires sociales .  - Notre commission, après de larges discussions, a adopté ce texte sans modification. Il le fallait, pour transposer le droit communautaire mais aussi pour renforcer la sécurité, la pharmacovigilance, la toxicovigilance et la tatouvigilance. Notre commission a toutefois regretté que les dispositions sur la vente de lentilles de contact sur Internet aient été intégrées à la loi sur la consommation : c'était d'abord un enjeu de santé publique.

Le droit communautaire ne nous prive pas de marges de manoeuvre. La France a ainsi choisi de limiter la vente de médicaments sur Internet aux médicaments hors prescription ; elle a de même retenu une interprétation large de l'obligation faite aux laboratoires de justifier le retrait d'un médicament sur un des marchés de l'Union.

Le droit européen facilite aussi la diffusion de produits français dans des secteurs majeurs de notre économie, comme la cosmétique - notre troisième excédent commercial -, dont la sécurité sera renforcée.

Quelques questions, madame la ministre : un dommage non fautif causé par un chiropracteur ou un ostéopathe ne sera pas couvert par leur assurance professionnelle ni par l'Oniam, car ces praticiens ne sont pas reconnus comme des professionnels de santé. Le patient pourra donc ne pas être couvert à hauteur du préjudice subi. On peut redouter en outre une certaine confusion lorsque ces professionnels exercent par ailleurs une profession de santé reconnue.

Aucun référentiel des bonnes pratiques n'existe pour ces professions, ce qui est regrettable. Et qui réalisera les expertises ? Il faudra clarifier le statut de ces deux professions ; sans doute la grande loi de santé publique en sera-t-elle l'occasion.

L'article 3 va mobiliser des ressources rares... La question se pose de la répartition des responsabilités entre les différentes agences. Quid en outre du statut des tatoueurs et de l'offre illicite de tatouages sur Internet ?

Enfin, je m'interroge, à l'article 7, sur le label éthique pour certains produits sanguins ; il est bon de valoriser le don du sang, mais la portée de cette disposition réglementaire est incertaine.

Reste que ce texte important doit être adopté sans modification.

Mme Muguette Dini .  - Le groupe UDI-UC ne s'opposera pas à ce projet de loi qui, de toute façon, doit être adopté : il transpose des directives européennes. Mais comment ne pas s'interroger sur le retard pris par la France, dans la transposition de ce texte comme de tant d'autres ? Nous risquons des pénalités... Il faudra mettre fin à ces dérives. En 2009, j'avais noté en séance que le Gouvernement et les fonctionnaires qui le représentent à Bruxelles ne défendaient pas toujours les positions prises par le Sénat dans ses résolutions européennes et parfois pas même les consignes de l'exécutif... Nous devons aussi nous interroger sur l'intervention des parlementaires en matière de transposition.

Cela dit, ce texte nous donne enfin un cadre légal clair régissant les soins transfrontaliers et la mobilité des patients. Je salue l'obligation faite aux ostéopathes et aux chiropracteurs de souscrire une assurance professionnelle. Vous avez annoncé, madame la ministre, une réforme de la profession d'ostéopathe. Les jeunes qui choisissent cette voie, parfois mal formés, peinent à se constituer une clientèle. Peut-être faut-il engager une réflexion sur le nombre d'écoles et la qualité de la formation qui y est dispensée. Les étiopathes, de leur côté, qui arguent de leurs six années de formation universitaire, demandent un statut. Où en sont vos réflexions sur tous ces sujets ?

Vous avez mis des garde-fous à la vente en ligne des médicaments sur Internet, c'est heureux. En revanche, je regrette que les dispositions sur la vente de lentilles sur Internet aient été intégrées au projet de loi sur la consommation. Ces produits, parce qu'ils sont en contact direct avec la cornée, ne sont pas des produits de grande consommation. Nous aurions pu étudier, dans ce texte, une véritable délégation de compétence des ophtalmologistes vers les opticiens.

Enfin, j'ai cosigné avec Mme Jouanno deux amendements pour interdire, totalement ou seulement en direction des femmes enceintes et des enfants de moins de trois ans, les substances cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques (CMR) et les perturbateurs endocriniens dans les produits cosmétiques.

Le groupe UDI-UC votera ce texte et vous remercie par avance, madame la ministre, des réponses que vous nous apporterez.

Mme Isabelle Pasquet .  - Ce texte technique procède d'une obligation communautaire ; il est aussi l'occasion de renforcer la sécurité de nos concitoyens.

Je salue les deux premiers articles sur les chiropracteurs et les ostéopathes tout en regrettant que la reconnaissance de ces professionnels passe seulement par une obligation de souscrire une assurance qui sera d'ailleurs partielle car plafonnée. Que se passera-t-il si la réparation du dommage excède celui-ci ?

L'article 3 se borne à transposer le règlement européen de 2009, qui est d'ailleurs d'application directe. Si les producteurs et exploitants sont soumis à une obligation rigoureuse de déclaration de la composition de leurs produits, il n'est pas exigé qu'ils réalisent des essais sur les effets indésirables des composants nanométriques de ceux-ci. Quid en outre des exceptions à l'interdiction d'utiliser des substances CMR ?

Peu de choses à dire sur l'article 4, sinon que nous aurions préféré que la vente des lentilles sur Internet soit encadrée dans un texte sanitaire.

L'article 5 limite la vente de médicaments sur Internet aux médicaments hors prescription. Le mouvement de libéralisation n'est pas à rejeter en bloc. Mais une récente étude de 60 millions de consommateurs montre qu'ils ne sont pas sans risque. Les sites devront être adossés à une pharmacie d'officine, mais les règles ne sont pas harmonisées dans l'Union, et on sait qu'un nombre significatif d'officines sont détenues par des sociétés financières. Il y a là une financiarisation de la santé à laquelle nous nous opposons. Que vaudra en outre l'information quand elle sera délivrée dans une langue étrangère ? Le groupe CRC votera contre l'article 5.

L'article 6 améliore la sécurité sanitaire mais reste en deçà de nos propositions ; l'ANSM doit cesser d'autoriser la mise sur le marché de produits qui n'ont pas démontré qu'ils étaient plus efficaces que d'autres déjà commercialisés.

L'article 7 sur les prescriptions frontalières est également bienvenu, de même que le label éthique des dérivés du sang.

Globalement, si ce n'est l'article 5, ce texte est bon. Le groupe CRC le votera.

M. Gilbert Barbier .  - Cela a été dit : ce texte adapte des dispositions techniques d'origine communautaire qui sont loin d'être anodines.

L'article premier, qui fait obligation aux chiropracteurs et ostéopathes de souscrire une assurance civile professionnelle, constitue une avancée même si la sinistralité dans ces professions est faible et si nombre d'entre eux sont déjà couverts. Pour autant, comment démontrer et évaluer la faute en l'absence de référentiel de bonnes pratiques ? Quid de l'expertise ? Autre problème, signalé par le rapporteur, l'indemnisation sans faute... À quand un statut pour les ostéopathes, madame la ministre ? Le métier a le vent en poupe, quelque 2 500 jeunes obtiennent le titre chaque année. Ils peinent à trouver une clientèle et à vivre de leur activité. Peut-être faut-il réduire le nombre d'écoles, définir des critères d'agrément plus exigeants...

L'encadrement de la vente de médicaments en ligne est une bonne chose. Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), un médicament sur deux vendu sur Internet est falsifié, c'est une vraie menace pour la santé publique. La France a fait le choix d'un encadrement maximal, ce qui n'est pas le cas partout dans l'Union. Au Royaume-Uni, il y a beaucoup de pure players... Ne nous leurrons pas, les faussaires auront toujours un temps d'avance... Près de 114 sites illégaux ont été identifiés et 812 000 médicaments falsifiés ont été saisis par les douanes françaises, sans compter que ces médicaments sont parfois présents dans les circuits officiels. Il est difficile de remonter les filières. Et on peut s'interroger sur la capacité des agences sanitaires à faire face si le nombre de sites de vente explose. Il faudra en tout cas rester vigilant et renforcer les contrôles.

L'article 6 s'inscrit dans le prolongement de la loi de 2011 ; il pose cependant question : quid de l'articulation de nos agences sanitaires, trop nombreuses et sans guère de cohérence ?

Quant à l'article 3, il renforce le contrôle des produits cosmétiques sur lequel la France avait déjà avancé avec les mentions « sans paraben » et « sans bisphénol A ». Pourquoi cependant avoir fait le choix de l'ANSM ?

Comme mes collègues, je déplore la suppression de l'article 4 : l'intégration des mesures relatives à la vente des lentilles sur Internet dans une loi sur la consommation accélèrera la marchandisation de ce secteur.

Mme Françoise Boog .  - La France a la réputation d'être un mauvais élève de l'Europe en matière de transposition de directives. Nos résultats sont toutefois meilleurs depuis 1997. Je salue l'engagement du Gouvernement, qui reprend celui de son prédécesseur, de présenter régulièrement des textes thématiques de transposition.

Nous regrettons la suppression de l'article 4, intégré à la loi sur la consommation. M. Savary l'avait dit au ministre Hamon sans être écouté : le secteur sanitaire est un marché particulier dans la mesure où le consommateur ne choisit pas le produit qu'il achète.

Encadrement des médicaments vendus sur Internet pour lutter contre la contrefaçon, pharmacovigilance, renforcement de la sécurité des produits cosmétiques, tout cela va dans le bon sens. De même que les articles premier et 2 sur l'assurance obligatoire des chiropracteurs et des ostéopathes. Quels sont vos projets pour ces professionnels, madame la ministre ?

Enfin, l'article 7 transpose la directive « soins transfrontaliers ». Il me donne l'occasion de déplorer la technicité parfois incompréhensible de ces textes de transposition. Les parlementaires nationaux doivent être mieux associés en amont. Ce projet de loi aurait pu être la première pierre d'une Europe de la santé, nous pouvions aller plus loin que les directives, devenir les initiateurs de la politique communautaire.

Madame la ministre, vous avez décidé, au nom de l'égalité, de ne pas prolonger au-delà de juin 2014 le droit d'option des travailleurs transfrontaliers en matière d'assurance maladie. Cela concerne 170 000 Français qui travaillent en Suisse et leurs familles. Il y a urgence. Ces travailleurs manifestent, les élus vous alertent. De quelle égalité parlons-nous ? Ces travailleurs ne trouvaient pas d'emploi en France, travaillent dans des pays où le droit du travail est moins protecteur, ils devront payer deux fois plus cher leur protection sociale. Au lieu de récompenser l'effort qu'ils fournissent de se rendre chaque jour dans un pays étranger pour travailler, vous les découragez de participer à la construction de l'Europe des peuples. Sans compter que leur fiscalité va augmenter.

Qu'adviendra-t-il des soins engagés ? Les conditions ne sont pas réunies pour l'extinction du droit d'option ; une étude d'impact s'imposait. Au nom de tous les élus transfrontaliers, je vous demande une nouvelle fois, madame la ministre, de bien vouloir surseoir à votre décision et de réunir tous les acteurs concernés pour trouver une solution.

En conclusion, le groupe UMP s'abstiendra sur ce texte technique à portée limitée.

M. Hervé Poher .  - Que dire quand tout a été dit ? (Sourires) Puisque le principal a été discuté, je resterai sur l'essentiel. Il est toujours heureux de voir arriver un texte de transposition de directive : le risque d'un recours et d'une amende s'éloigne. La France a souvent été un mauvais élève en matière de transposition, mais j'ai vu des mauvais élèves réussir...

Ce texte, très technique, n'en soulève pas moins de vraies questions de société. À première vue, il paraît disparate : assurance des ostéopathes et chiropracteurs, vente sur Internet, tatouages... C'est un melting pot ostéo-pharmaco-tatouo-vigilo-cosméto-médicamenteux - ne cherchez pas, ce mot n'existe pas dans le dictionnaire. Il y a néanmoins un fil directeur : apporter quelques touches supplémentaires et complémentaires pour renforcer la sécurité de tous : des patients - et je n'utilise pas le mot de consommateur à dessein - des chiropracteurs et ostéopathes. Ce melting pot représente donc tout de même une avancée incontestable.

Je nuancerai toutefois cet enthousiasme : comme mes collègues, je regrette de voir la vente des lentilles de contact sur Internet traitée par un texte relatif à la consommation.

Intellectuellement et symboliquement, pour ne pas dire plus, cela est dérangeant.

Des lentilles ne sont pas des CD, ni des tee-shirts, ni des séjours de vacances. Mal utilisés, ces produits de santé peuvent être dangereux. Que cette façon de procéder ne se généralise pas pour tous les dispositifs médicaux et produits de santé, madame la ministre. Tout n'est pas que transaction, négoce et concurrence.

La cosmétovigilance est un vrai progrès. Un signal fort est envoyé à nos entreprises, leaders mondiaux du secteur. L'harmonisation des règles profitera aussi - on peut rêver ! - aux utilisateurs ; en divisant par deux les frais administratifs du secteur et en améliorant l'information des consommateurs, tous en bénéficieront.

Depuis 2004, la cosmétovigilance et la tatouvigilance sont du ressort de l'ANSM. Ces volets sont toutefois marginaux dans son activité. Le rapport Grall y a fait allusion. Cette agence est-elle la mieux placée pour remplir ces missions ? Poser la question, c'est y répondre. Ses personnels considèrent que cela ne relève pas de leur métier.

L'article 5 offre des garanties solides et rassurantes en matière de vente sur Internet. Le trafic de médicaments falsifiés est une activité très lucrative. Nous le savons. Heureusement, grâce à une politique efficace, notre pays est relativement épargné. Reste que la vente en ligne doit être contrôlée. Le maintien du monopole officinal est un choix courageux. D'autres pays en ont fait un autre, dont l'Allemagne où tous les médicaments peuvent être indistinctement vendus en ligne.

Si nous sommes rassurés par l'adossement à une pharmacie physique, le contrôle effectif des acteurs par les services répressifs demeurera une tâche difficile tant il est vrai que margoulins et faussaires sur le Net sont aussi nombreux que les faux génériques.

La place des ostéopathes et chiropracteurs dans notre fonctionnement collectif est un problème ancien. Nous savons que vous vous êtes attelée à le résoudre, madame la ministre, et nous vous en sommes reconnaissants.

Ce texte représente une avancée majeure pour la sécurité de nos concitoyens : le groupe socialiste vous invite à le voter.

Mme Marisol Touraine, ministre .  - Madame Boog, ce texte n'est que ce qu'il est. Il ne s'agit pas là de refonder la politique sanitaire qui d'ailleurs relève du niveau national - si c'était le cas, j'espère que les rangs de l'hémicycle seraient plus fournis. L'enjeu de ce texte, c'est la vigilance. Dans ce domaine, la France est à la pointe du combat en Europe. J'aimerais d'ailleurs que le groupe UMP m'apporte son soutien plutôt que de défendre, comme il le fait souvent, la logique du marché. La France mène d'autres combats, en matière de tabagisme par exemple. Monsieur Poher, vous avez raison : tout n'est pas commerce. Les garde-fous les plus solides possible ont été apportés, j'y ai veillé constamment. Vous avez tous regretté que la vente de lentilles sur Internet ait été décidée dans le cadre de la loi consommation. Je vous rappelle que cela résulte d'une initiative parlementaire, le Gouvernement ne l'avait pas inscrit dans son projet de loi.

La cosmétovigilance relève de l'ANSM. Transférer cette compétence supposerait de confier des pouvoirs de police sanitaire à une autre agence. La refonte des vigilances, qui sera effectuée dans la loi de santé publique, nous donnera l'occasion d'approfondir la réflexion.

Monsieur Le Menn, le label éthique pour le don du sang est une idée apparue dans le cadre de la mission confiée au député Olivier Véran. Ce label est demandé par les donneurs non par les receveurs, pour lesquels seule la sécurité compte. Il se heurte à des difficultés d'application, compte tenu du fonctionnement du marché européen. La réflexion, là encore, se poursuit.

Vous avez tous évoqué la question des régimes d'assurance des ostéopathes et des chiropracteurs. En ce domaine, la sécurité des patients est le seul critère qui doit nous guider. Ce texte constitue une première étape significative, puisque nous passons de rien à quelque chose.

S'agissant des statuts, je vous accorde qu'un nombre excessif d'ostéopathes arrive chaque année sur le marché. Et, pour dire les choses de manière modérée, que les écoles délivrent des formations de qualité inégale. Des groupes de travail sont à l'oeuvre au ministère. Le cas des étiopathes est tout à fait différent. Ceux-ci pratiquent une médecine naturelle, qui n'est pas reconnue par la médecine conventionnelle sur le plan scientifique. Les travaux de la Miviludes ont donné lieu à la création d'un groupe de travail chargé d'identifier des risques de dérives sectaires dans le domaine médical. De leur côté l'Inserm et la Haute Autorité de santé étudient les diverses pratiques pour voir dans quel cadre elles peuvent rentrer. L'objectif n'est pas de les labelliser toutes, mais d'identifier les pratiques prometteuses et d'alerter sur les pratiques potentiellement dangereuses.

Madame Pasquet, monsieur Barbier, la chaîne légale d'approvisionnement fait l'objet de toute notre attention. De fait, la matière première des produits de santé est souvent fabriquée hors de l'Union. Nous devons renforcer et mutualiser les contrôles au niveau européen et engager des discussions avec les pays partenaires. Je me suis récemment entretenue avec mon homologue chinois ; il faudra avec l'Inde entreprendre la même démarche. La question est d'importance car, contrairement à ce que l'on croit, les mêmes matières premières servent à la fabrication de médicaments génériques et des médicaments de marque.

Le droit de l'Union européenne n'a pas grand-chose à voir avec la question des travailleurs frontaliers en Suisse. La récente votation jette, en outre, une nouvelle lumière sur cette affaire. Le cadre juridique des transfrontaliers existe depuis dix ans maintenant, avec la fixation dans la Constitution du principe d'égalité devant les contributions et les prestations. Le régime dérogatoire ne se justifie plus. Nous avons décidé une extinction progressive du dispositif, qui avait été annoncée sous la majorité précédente, afin d'en atténuer les effets. Nous créons un taux intermédiaire de 6 % avant de passer à 8 % le 1er janvier 2016. Les frontaliers bénéficieront de dispositions spécifiques : possibilité de choisir un médecin traitant suisse, bénéfice maximal de la chaîne de remboursement, poursuite des traitements lourds engagés... Nous avons tout fait pour éviter une rupture de prise en charge. Le mode de vie particulier du frontalier est ainsi protégé.

La discussion générale est close.

Discussion des articles

L'article premier est adopté, de même que l'article 2.

ARTICLE 3

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié, présenté par Mmes Jouanno, Dini, Férat et Morin-Desailly, M. Roche, Mmes N. Goulet et Goy-Chavent et MM. J. Boyer, Détraigne, Bockel, Capo-Canellas, Vanlerenberghe et Guerriau.

Après l'alinéa 9

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

« Sont suspendues la fabrication, l'importation, l'exportation et la mise sur le marché à titre gratuit ou onéreux de tout produit cosmétique comportant : 

« 1° soit une des substances définies comme cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques de catégorie 2 au sens de la partie 3 de l'annexe VI du Règlement CE n°1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relatif à la classification, à l'étiquetage et à l'emballage des substances et des mélanges, modifiant et abrogeant les directives 67/548/CEE et 1999/45/CE et modifiant le règlement (CE) n°1970/2006 ;

« 2° soit un perturbateur endocrinien présentant de probables effets sérieux pour la santé humaine, identifié dans les conditions fixées à l'article 59 du Règlement (CE) n°1907/2006 du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2006 concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), instituant une agence européenne des produits chimiques, modifiant la directive 1999/45/CE et abrogeant le règlement (CEE) n°793/93 du Conseil et le règlement (CE) n°1488/94 de la Commission ainsi que la directive 75/769/CEE du Conseil et les directives 91/155/CEE, 93/67/CEE, 93/105/CE et 2000/21/CE de la Commission.

Mme Muguette Dini.  - Selon une récente étude, de nombreux produits cosmétiques contiennent des perturbateurs endocriniens, substances chimiques modifiant la régulation hormonale des êtres vivants.

Un impact sur la fertilité est soupçonné, de même qu'une responsabilité dans la survenance des cancers du sein et de la prostate. Certains produits contiennent plusieurs de ces substances, en quantité importante, à commencer par les vernis à ongles suivis par les fonds de teint et les rouges à lèvres.

Cet amendement interdit leur utilisation dans les produits cosmétiques.

M. le président.  - Amendement n°2 rectifié, présenté par Mmes Jouanno, Dini, Férat et Morin-Desailly, M. Roche, Mmes N. Goulet et Goy-Chavent et MM. J. Boyer, Détraigne, Bockel, Capo-Canellas, Vanlerenberghe et Guerriau.

Après l'alinéa 9

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

« Sont suspendues à compter du 1er janvier 2015 la fabrication, l'importation, l'exportation et la mise sur le marché à titre gratuit ou onéreux de tout produit cosmétique destiné aux femmes enceintes, aux femmes allaitantes, aux nourrissons ou aux enfants jusqu'à trois ans comportant : 

« 1° soit une des substances définies comme cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques de catégorie 2 au sens de la partie 3 de l'annexe VI du Règlement CE n°1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relatif à la classification, à l'étiquetage et à l'emballage des substances et des mélanges, modifiant et abrogeant les directives 67/548/CEE et 1999/45/CE et modifiant le règlement (CE) n°1970/2006 ;

« 2° soit un perturbateur endocrinien présentant de probables effets sérieux pour la santé humaine, identifié dans les conditions fixées à l'article 59 du Règlement (CE) n°1907/2006 du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2006 concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), instituant une agence européenne des produits chimiques, modifiant la directive 1999/45/CE et abrogeant le règlement (CEE) n°793/93 du Conseil et le règlement (CE) n°1488/94 de la Commission ainsi que la directive 75/769/CEE du Conseil et les directives 91/155/CEE, 93/67/CEE, 93/105/CE et 2000/21/CE de la Commission.

Mme Muguette Dini.  - Amendement de repli.

M. Jacky Le Menn, rapporteur.  - Ces amendements sont contraires au droit européen. Les adopter nous exposerait à des sanctions et menacerait, en outre, les entreprises françaises. J'y vois des amendements d'appel. La commission des affaires sociales s'en remet donc à l'avis du Gouvernement.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Avis défavorable à défaut d'un retrait. Les cosmétiques sont déjà encadrés par le droit européen. Les produits classés en risque 1 ne sont pas mis sur le marché ; les autres sont évalués de manière permanente.

De plus, la faisabilité de ces amendements est incertaine, pour des produits mis sur le marché quasi quotidiennement. Le paraben est composé de plusieurs substances. Les produits cosmétiques à pénétration faible ne sont, en outre, pas aussi nocifs que les produits ingérés. Nous restons toutefois vigilants et nous en traiterons dans le plan santé environnement.

Mme Muguette Dini.  - La présence de ces substances dans des produits de santé ou de soins pose de vraies questions. La pénétration de ces produits n'est pas plus faible que celle de certains médicaments, qui agissent à travers la peau. Lorsque vous aurez trouvé le moyen d'empêcher l'utilisation de ces substances, il sera temps d'en informer nos fonctionnaires et ceux de Bruxelles... Pour l'heure, je retire mes amendements.

Mme Marisol Touraine, ministre.  - Je veux rassurer Mme Dini. Nous travaillons à l'élaboration d'une stratégie sur les perturbateurs endocriniens.

Les amendements nos1 rectifié et 2 rectifié sont retirés.

L'article 3 est adopté.

L'article 4 demeure supprimé.

L'article 5 est adopté, de même que l'article 6 et l'article 7.

Le projet de loi est définitivement adopté.

La séance est suspendue à 10 h 45.

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présidence de M. Jean-Pierre Bel

La séance reprend à 15 heures.