SÉANCE

du mardi 14 avril 2015

91e séance de la session ordinaire 2014-2015

présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : M. Philippe Adnot, M. Jean Desessard.

La séance est ouverte à 14 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Éloge funèbre de Claude Dilain

M. le président.  - (Mmes et MM. les sénateurs et les membres du Gouvernement se lèvent) La nouvelle du décès de Claude Dilain a provoqué, le 3 mars dernier, une profonde tristesse non seulement dans sa ville de Clichy-sous-Bois, qui lui était si chère, et dans le département de la Seine-Saint-Denis, pour lequel il s'était inlassablement battu, mais aussi au Sénat de la République qu'il avait rejoint en septembre 2011 et où il était unanimement apprécié et estimé.

Claude Dilain nous a quittés à l'âge de 66 ans. L'émotion que sa disparition a provoquée -dont les plus hautes autorités de l'État se sont fait l'écho- illustre que Claude Dilain était encore plus qu'un élu exemplaire. Inlassable défenseur des banlieues et des plus modestes, il était un « homme de bien », au sens classique du terme. Homme de convictions, il était un homme de coeur, un homme généreux, un homme d'écoute, un homme de parole.

L'engagement politique était d'abord, pour Claude Dilain, un acte de fraternité. Permettez-moi de lui donner une nouvelle fois la parole en citant les réponses qu'il avait faites, il y a moins d'un an, à une question sur l'engagement politique : « s'engager en politique ne devrait jamais être autre chose qu'un geste de fraternité parce que cela suppose de donner ce que l'on porte en soi, d'aller vers les autres, de ne pas se situer en surplomb, de ne pas agir avec arrogance ou condescendance. Nous ne devons jamais oublier que lorsque les citoyens nous élisent, ils ne nous placent pas sur un piédestal, mais ils nous accordent leur confiance. Nous avons le devoir de nous en montrer digne. L'actualité nous le montre aussi : quand on oublie la fraternité, d'abord on se met en dehors de la République, puisque notre devise inclut la fraternité, ensuite on se livre à des comportements cyniques où la fraternité n'a plus de place ».

Que dire de plus ? Sinon de relever l'actualité de ces propos de Claude Dilain, qui n'a jamais cessé d'être le porte-parole des quartiers les plus déshérités.

La fidélité de Claude Dilain à ses convictions et la noblesse morale qui le caractérisait se retrouvent dans l'itinéraire exemplaire du médecin pédiatre qu'il fut encore jusqu'à l'an dernier et qui concevait, là aussi, son métier comme l'engagement d'une vie ; du maire passionné de Clichy-sous-Bois qu'il avait été, comme il aimait à le rappeler, « durant seize ans, trois mois et vingt-trois jours » et du sénateur de Seine-Saint-Denis qui portait haut, depuis trois ans, les valeurs d'égalité et de solidarité qui étaient les siennes.

Claude Dilain était un fils de cette banlieue qu'il n'aura jamais cessé de défendre. Fils d'un ouvrier gazier, il avait grandi dans le quartier Bel-Air à Saint-Denis. Remarquable exemple du mérite républicain, il mena à bien de longues études médicales et, après avoir accompli sa spécialité en pédiatrie, ouvrit, en 1978, son cabinet dans cette ville de Clichy-sous-Bois pour laquelle il avait eu un coup de foudre, comme il l'expliquait dans son livre, publié en 2006, Chronique d'une proche banlieue.

Le médecin passionné qu'il était avait toujours été attentif à la vie de la cité. Son engagement de médecin et son engagement politique se rapprochaient dans son esprit : « Même quand je suis devenu maire, disait-il, je suis resté médecin. Je recevais les familles mais je veillais aussi à leur rendre visite, parce qu'il me semble essentiel de savoir comment vivent les gens, de les rencontrer chez eux ».

Claude Dilain fut maire de Clichy-sous-Bois de juin 1995 à octobre 2011, après avoir été réélu en 2001, puis en 2008, obtenant à chaque fois plus de 60 % des voix dès le premier tour.

A la tête de cette commune, Claude Dilain se battit avec abnégation pour lutter, sans jamais céder au découragement, contre les difficultés liées à la pauvreté, et parfois à la marginalité.

Sa première préoccupation était d'être un élu responsable et de démontrer qu'on pouvait être à la fois maire d'une ville manquant de moyens et en même temps un gestionnaire exemplaire. Il consacra ainsi son premier mandat de maire à redresser les finances de la ville.

Cela n'empêcha pas le maire de soutenir des projets remarquablement audacieux pour sa ville. Il avait ainsi fait venir en résidence des photographes et des écrivains et défendu le projet d'une « Villa Médicis » à Clichy-sous-Bois -un défi, mais aussi un message d'espérance, de lumière, comme la Renaissance.

Et lorsque le président Jacques Chirac, le recevant à l'Élysée, l'interrogea sur les besoins urgents de Clichy-sous-Bois, Claude Dilain réclama un tramway, qui devrait être opérationnel en 2018 et une présence policière accrue, sous la forme d'un commissariat, l'un n'étant pas antinomique de l'autre, au contraire.

Le maire de Clichy-sous-Bois était en effet devenu, en 2005, le symbole de nos banlieues et avait acquis une stature nationale -et même au-delà- lorsque la mort tragique de deux adolescents fut à l'origine, chacun s'en souvient, de trois semaines de troubles et d'émeutes dans de nombreuses cités.

Claude Dilain fut alors sur tous les fronts, passant ses jours et ses nuits sur le terrain. Il ne cessa jamais d'appeler à la paix et d'interpeller les autorités sur la détresse de certains de nos quartiers.

En 2010, il avait organisé dans sa ville une visite pour des parlementaires. Il saisit cette occasion pour exprimer un message qu'il jugeait essentiel : que la politique de la ville ne pourra résoudre les problèmes des banlieues les plus difficiles que si elle est défendue au plus haut niveau de l'État.

C'est dans cet état d'esprit, et pour porter la voix de ceux qui vivent dans les quartiers, et qui parfois sont sans voix, que Claude Dilain fut élu, le 25 septembre 2011, sénateur de la Seine-Saint-Denis.

Membre assidu de notre commission des affaires sociales -où il était estimé de tous pour sa compétence et sa courtoisie-, la banlieue et la problématique du logement dégradé restèrent toujours au coeur de son action.

Il fut au Palais du Luxembourg, durant trois ans et demi, un acteur passionné de la politique de la ville et un défenseur acharné des territoires en difficulté.

Il mit une nouvelle fois en évidence son dynamisme et sa grande compétence dans ces domaines, en étant l'un des rapporteurs au Sénat de la loi pour l'accès au logement et à un urbanisme rénové -la loi Alur.

Il remit aussi au Gouvernement un rapport remarquable de vérité sur les « copropriétés dégradées », grand problème de sa commune, dans lequel il préconisait des mesures extraordinaires, seules capables à ses yeux de répondre au problème.

Il établit encore un bilan, qu'il jugeait décevant, de l'application de la loi sur le droit au logement opposable, dont il souhaitait une amélioration de la gouvernance dans le respect de la mixité sociale.

Enfin, la reconnaissance unanime des compétences de Claude Dilain se traduisit en 2014 par sa nomination comme président du conseil d'administration de l'Agence nationale de l'habitat (Anah). Il succédait à notre ancien collègue, Dominique Braye.

Dans toutes ses fonctions liées à son mandat de parlementaire, Claude Dilain demeura l'homme de convictions qu'il n'a jamais cessé d'être. « Le rôle des hommes politiques, disait-il, est de retisser le lien social là où il n'y a plus forcément le sentiment d'appartenir à la même communauté républicaine et ce quelles que soient notre origine ou notre couleur de peau ».

Estimant qu'il lui fallait consacrer tout son temps à son mandat de parlementaire, il démissionna de son mandat de maire, se consacrant sans compter à son mandat de sénateur. Il était d'ailleurs, depuis octobre dernier, secrétaire du Sénat. Le 17 février, il était encore à cette tribune pour interroger le Gouvernement afin de faire avancer la cause des personnes handicapées, singulièrement dans les établissements scolaires.

Claude Dilain aura mis toute son énergie au service des plus faibles.

Sa personnalité, et l'action exceptionnelle qu'a conduite Claude Dilain tout au long de sa vie publique, font honneur à notre mandat.

À nos collègues du groupe socialiste, à nos collègues de notre commission des affaires sociales, qui perdent l'un de leurs membres, ainsi qu'à Mme Évelyne Yonnet, qui a la lourde charge de lui succéder, j'exprime à nouveau notre sympathie attristée.

À ses cinq enfants, à ses petits-enfants et à son épouse, je présente les condoléances sincères du Sénat de la République et leur dis la peine personnelle que je prends à leur chagrin.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement.  - Merci, monsieur le président, pour l'hommage sincère et juste que vous venez de rendre à Claude Dilain. Le Gouvernement s'y associe. Ce grand élu de la République, cet homme d'exception a consacré sa vie à lutter contre les inégalités, la relégation et les conditions de vie indigne des banlieues. C'était un humaniste, un altruiste. Petit-fils d'un éboueur anarchiste, fils d'un ouvrier, il grandit en Seine-Saint-Denis. Devenu pédiatre, loin de quitter ces quartiers déshérités, il vient au contraire s'installer à Clichy-sous-Bois, où il fut longtemps le seul pédiatre.

Là commence son engagement associatif, puis politique : il est élu maire en 1995. Partisan du non-cumul, il ne quitte sa mairie que pour entrer au Sénat. Pendant ses seize années de mandat, il continue son activité de médecin. Il devait apprendre autant dans son bureau de maire que dans son cabinet de médecin. Il mène un combat contre la pénurie de services publics, le chômage et les marchands de sommeil. Constatant la faible participation aux élections de 2010, il soulignait le sentiment d'abandon des banlieues.

Il se battit pour désenclaver sa commune et obtint, de haute lutte, l'arrivée du tramway T4 pour rapprocher Clichy de Paris. Son grand combat fut celui contre le mal-logement. Le plan du Gouvernement pour les quartiers sensibles, annoncé en mars dernier, est largement inspiré de ses propositions visant à lutter contre la ghettoïsation.

Pragmatique, il voulait montrer la réalité dégradée de sa commune aux responsables politiques en incitant régulièrement députés, sénateurs et ministres sur le terrain. Loin de tout misérabilisme, il était animé par la colère et l'indignation face aux injustices. Pendant les émeutes de 2005, il arpente, tous les jours et toutes les nuits, les rues de Clichy pour apaiser les tensions. Il luttait à la fois contre la violence aveugle et contre la stigmatisation des jeunes de banlieues. Seule une politique de la ville ambitieuse peut réconcilier les banlieues et le reste du territoire, estimait-il.

Depuis 2011, Claude Dilain était devenu une voix marquante du Sénat, où il fut rapporteur de plusieurs grandes lois sur le logement et l'urbanisme, avocat du Grand Paris et d'une meilleure répartition des richesses entre Paris et la proche banlieue.

Il traitait chacun, ouvrier ou ministre, de la même manière, avec la même écoute, le même respect. Son engagement et ses combats, contre les injustices et les inégalités, ne s'éteignent pas. À nous de les faire vivre et de reprendre sa saine colère, tout entière dirigée vers l'action.

Au nom du Gouvernement, je présente à la famille de Claude Dilain, à ses collègues et à ses collaborateurs mes plus sincères condoléances.

(Mmes et MM. les sénateurs ainsi que les membres du Gouvernement observent un moment de recueillement)

La séance est suspendue à 14 h 55.

présidence de M. Jean-Claude Gaudin, vice-président

La séance reprend à 15 h 45.

Conférence des présidents

M. le président.  - Je vais vous donner lecture des conclusions de la Conférence des présidents qui s'est réunie cet après-midi.

Semaine réservée par priorité au Gouvernement.

Aujourd'hui, MARDI 14 AVRIL

L'après-midi, le soir et la nuit :

- Suite du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

MERCREDI 15 AVRIL

À 14 heures 30 et le soir :

- Suite du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

En outre, à 14 heures 30 :

- Désignation des vingt-trois membres de la mission d'information sur la commande publique.

JEUDI 16 AVRIL

À 9 heures 30, à 16 heures 15, après les questions d'actualité au Gouvernement, et le soir :

- Suite du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

VENDREDI 17 AVRIL

À 9 heures 30, à 14 heures 30, le soir et la nuit :

- Quatre conventions internationales en forme simplifiée ;

- Suite du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

Éventuellement, SAMEDI 18 AVRIL

À 9 heures 30 et à 14 heures 30 :

- Suite du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

Suspension des travaux en séance plénière du lundi 20 avril au dimanche 3 mai.

Semaine réservée par priorité au Gouvernement

LUNDI 4 MAI

À 10 heures, à 14 heures 30, le soir et la nuit :

- Suite du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

MARDI 5 MAI

À 14 heures 30, le soir et la nuit :

- Suite du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques ;

- Projet de loi ratifiant l'ordonnance du 19 décembre 2014 relative à l'élection des conseillers métropolitains de Lyon ;

- Projet de loi relatif à la réforme de l'asile.

MERCREDI 6 MAI

À 14 heures 30 :

- Explications de vote des groupes sur le projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

De 15 heures 30 à 16 heures :

- Vote par scrutin public sur ce projet de loi.

À 16 heures :

- Proclamation du résultat du scrutin public.

À 16 heures 15 et le soir :

- Projet de loi modifiant la loi du 2 juillet 2004 relative à l'octroi de mer ;

- Éventuellement, suite du projet de loi ratifiant l'ordonnance du 19 décembre 2014 relative à l'élection des conseillers métropolitains de Lyon ;

- Suite du projet de loi relatif à la réforme de l'asile.

En outre, à 14 heures 30 :

- Désignation des vingt et un membres de la commission d'enquête sur le bilan et le contrôle de la création, de l'organisation, de l'activité et de la gestion des autorités administratives indépendantes.

JEUDI 7 MAI

À 9 heures 30 et à 16 heures, après les questions cribles thématiques sur la forêt française :

- Deux conventions internationales en forme simplifiée ;

- Projet de loi autorisant la ratification de l'accord d'association entre l'Union européenne et la Communauté européenne de l'énergie atomique et leurs États membres, d'une part, et l'Ukraine, d'autre part ;

- Suite de l'ordre du jour de la veille.

Semaine sénatoriale de contrôle.

LUNDI 11 MAI

À 14 heures 30 et le soir :

- Suite du projet de loi relatif à la réforme de l'asile.

L'ordre du jour du mardi 12 au vendredi 29 mai reste inchangé.

L'ordre du jour est ainsi réglé.