Questions orales

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle vingt questions orales au Gouvernement.

Frais d'optique

Mme Karine Claireaux .  - Plus de la moitié des Français porte en permanence des dispositifs correcteurs de la vision, sans lesquels ces citoyens ne pourraient pas vivre normalement.

Le décret du 18 novembre 2014, en son article 2, limite les remboursements des frais d'optique par les mutuelles dans le cadre des contrats solidaires et responsables ; son but avoué : abaisser le prix des lunettes, pour que le reste à charge soit le moins élevé possible.

Une maladie de la vision n'est pas considérée comme un handicap et, en conséquence, le dispositif médical correcteur de vision est soumis à une TVA de 20 %. L'opération de chirurgie réfractaire, non remboursée par la sécurité sociale, est également soumise à ce taux de TVA.

Le poids du prix des prothèses oculaires ne devrait pas uniquement peser sur les mutuelles et les ménages. Ne serait-il pas envisageable d'instaurer, pour les lentilles et verres correcteurs, une TVA au taux réduit de 5,5 % ? C'est celle qui s'applique aux autres prothèses médicales : audioprothèses, attelles, corsets orthopédiques, ou encore implants mammaires.

L'opération de chirurgie réfractaire ne pourrait-elle pas être prise en charge, au moins partiellement, par la sécurité sociale ? Cela la ferait sortir du champ d'application de la TVA, et en ferait grandement diminuer le coût ? Le Gouvernement envisage-t-il de telles mesures ?

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes .  - L'accès de l'ensemble de la population aux soins optiques est une préoccupation que partage le Gouvernement. Les frais d'optique sont de plus en plus en plus élevés. Plus les complémentaires remboursent, plus les prix augmentent. Afin de casser cette spirale inflationniste, le Gouvernement a pris le décret du 19 novembre 2014. Sur la TVA, le droit européen prévoit que seuls les équipements destinés aux handicapés sont éligibles à une TVA réduite, l'optique en est exclue. La chirurgie réfractaire, quant à elle, n'est pas prise en charge par la sécurité sociale. Certains organismes complémentaires la remboursent partiellement. Le projet de loi de modernisation de notre système de santé, que l'Assemblée nationale a adopté, instaure un tarif social pour ces frais. Plus d'un million de foyers pourront en bénéficier. Enfin, la ministre de la santé a confié une mission à l'Igas pour renforcer l'accès aux soins visuels, qui se concentre sur la réduction des délais d'attente. Cette mission débouchera sur un plan d'action.

Mme Karine Claireaux.  - Merci pour cette réponse. Bruxelles devrait prendre conscience qu'une vision en diminution constitue le début d'un handicap.

Entrée du Gouvernement au capital d'Alstom

M. Jean-François Longeot .  - Lors de la cession à l'américain General Electric de l'essentiel de la branche « énergie » d'Alstom, le Gouvernement avait pris la décision d'entrée à hauteur de 20 % dans le capital d'Alstom. C'était en juin 2014.

Selon les propos de M. Montebourg, cette décision permettait à l'État, en rachetant les deux tiers de la participation de Bouygues, de siéger au conseil d'administration du groupe Alstom et d'en devenir le principal actionnaire, afin de pouvoir y exercer sa « vigilance patriotique ». Pour démontrer son engagement auprès du groupe Alstom, le Gouvernement avait conditionné son feu vert au rapprochement avec General Electric à plusieurs impératifs : celui de disposer d'un représentant au conseil d'administration du groupe, celui de prendre une participation de 20 % dans le capital d'Alstom. Où en est-on ?

Comment rassurer les salariés ? Alstom réalise un chiffre d'affaires de 6 milliards d'euros face au rapprochement des deux groupes industriels chinois, CNR et CSR, qui « pèsent » 18 milliards à 20 milliards d'euros annuels.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes .  - Les nominations de deux administrateurs choisis par l'État, aux termes de l'accord conclu avec Bouygues le 22 juin 2014, interviendront lorsque l'assemblée générale d'Alstom aura approuvé l'opération avec General Electric, sans doute au dernier trimestre. Ainsi l'État aura 20 % des droits de vote et la possibilité d'acquérir jusqu'à 20 % des actions d'Alstom.

Le décret du 14 mai 2014 ne conditionnait pas l'accord avec General Electric à l'entrée préalable de l'État au capital d'Alstom.

Quant aux perspectives d'avenir de l'activité transport d'Alstom, vous soulignez à juste titre que ce secteur d'activité connaît une recomposition significative, notamment chinoise. Le Gouvernement est très attentif à l'insertion d'Alstom dans cet environnement en mutation, au même titre que les dirigeants et les organes de gouvernance de la société. Pour faire face à cette concurrence, il est fondamental que l'endettement d'Alstom soit nul afin de saisir les occasions stratégiques qui peuvent se présenter et de disposer des bonnes capacités de développement dans ce secteur.

M. Jean-François Longeot.  - Nous devons être vigilants, en effet, face au développement des concurrents chinois. J'ai bien noté que le Gouvernement est attentif à la situation de ce groupe industriel français, dont le savoir-faire est un atout pour notre économie.

« Plus beaux villages de France »

M. Rémy Pointereau .  - Les communes labellisées « Plus beaux villages de France » adhèrent à une association nationale qui reconnaît les qualités de leur patrimoine immobilier et touristique et les autorise à utiliser un logo qui leur apporte un rayonnement national. Les 157 communes membres bénéficient d'un programme de communication touristique, dont Apremont dans le Cher.

Leur participation à l'activité économique est insuffisamment prise en compte, même si le président de l'association est membre de droit du conseil national du tourisme. Ces communes pourraient bénéficier, au moins partiellement, des mesures fiscales attribuées aux communes reconnues touristiques. Ce ne serait qu'une juste reconnaissance du rôle d'animation qu'elles jouent dans les territoires ruraux. Le Gouvernement envisage-t-il de donner à ces communes, qui font la richesse de la France, un statut leur attribuant des avantages et des dotations compensant les obligations liées à leur patrimoine, à son entretien et à la communication nécessaire pour le faire connaître ?

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes .  - Ces communes bénéficient déjà d'un cadre réglementaire et législatif. Leur statut les distingue des autres communes. Elles bénéficient, en application de l'article L. 2334-7 du code général des collectivités territoriales, d'un concours particulier au sein de la dotation globale de fonctionnement (DGF). L'article L. 2333-26 du même code leur donne la possibilité d'instituer une taxe de séjour, qui leur apporte une ressource supplémentaire.

Ces communes peuvent également accéder au label d'excellence de « Station classée de tourisme », qui entraîne surclassement démographique, majoration de l'indemnité des élus et, sous certaines conditions, perception d'une taxe additionnelle aux droits de mutation.

L'ensemble de ces dispositions législatives et réglementaires répond à des critères objectifs, sélectifs et exigeants.

Il n'est évidemment pas possible de conférer à des collectivités territoriales des avantages budgétaires, en fonction d'un classement qui résulte de la seule appréciation d'une association de collectivités territoriales, même si tout le monde reconnaît le sérieux du travail de l'association des plus beaux villages de France. Toute dotation supplémentaire devrait être prélevée sur l'enveloppe globale des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales et il est préférable de privilégier des critères objectifs de richesse et de charge. Le statut de « Plus beaux villages de France » offre à ces communes de nombreuses retombées.

M. Rémy Pointereau.  - Beaucoup de ces communes n'ont pas toujours une hôtellerie développée. Le statut de « Plus beaux villages de France » implique des charges supplémentaires, sans recettes supplémentaires, en ces temps de disette budgétaire. Le village d'Apremont a, en conséquence, du mal à boucler son budget.

Compte « pénibilité » dans le bâtiment

M. Olivier Cigolotti .  - Les artisans du bâtiment s'inquiètent du compte « pénibilité ». Si la reconnaissance de la pénibilité au travail par les lois du 9 novembre 2010 et du 20 janvier 2014, constitue une réelle avancée sociale, l'application du dispositif pose problème aux artisans du secteur. Aussi, je me réjouis de l'annonce faite par le Premier ministre, le 26 mai dernier, d'une simplification du dispositif et d'un délai de six mois pour son application.

Certes, les entreprises n'auront plus à remplir la fameuse fiche individuelle, mais juste à déclarer à la caisse de retraite les salariés exposés, en appliquant un « référentiel » fixé par la branche.

Définir un « référentiel » par branche, c'est réussir à trouver un point d'équilibre. La fédération française du bâtiment avait recommandé de mettre en place une commission, composée de plusieurs médecins pour pouvoir évaluer, au fil de la carrière, l'exposition des salariés aux principaux facteurs de pénibilité. Un tel dispositif libèrerait les entreprises d'une charge supplémentaire.

Il faut maintenant élaborer les « référentiels » destinés à forfaitiser les points de pénibilité. Il serait bon de reporter l'entrée en vigueur du dispositif du 1er juillet 2016 au 1er janvier 2017. Les entreprises n'auront certes plus la fiche individuelle à remplir, mais la déclaration automatisée des données sociales (DADS) doit être produite à partir d'un logiciel de paie qui n'existe pas encore, surtout dans les TPE et PME.

L'information du salarié sur son degré d'exposition et sur les points qu'il aura accumulés pose un autre problème, alors que le président du conseil d'administration de la CNAV a lui-même reconnu une « défaillance du service public », due notamment à la complexité de traitement des dossiers. Ne risque-t-on pas un transfert de charges des entreprises vers une caisse qui a, semble-t-il, déjà bien du mal à assumer ses missions ?

Quelles mesures le Gouvernement entend-il mettre en oeuvre pour accompagner les entreprises du bâtiment et des travaux publics et simplifier le dispositif ?

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes .  - Je vous prie d'excuser l'absence de M. Rebsamen, retenu auprès du président de la République et du Premier ministre pour un conseil restreint consacré à la croissance et à l'emploi dans les TPE et PME.

Le compte « pénibilité » suscite des craintes. Certaines d'entre elles s'expliquent par le besoin de s'approprier un dispositif nouveau ; d'autres sont dues, à des sources de complexité dans sa mise en oeuvre. Or un droit effectif pour les salariés doit être simple à appliquer. Pour le Gouvernement, son principe et sa mise en oeuvre doivent faire consensus.

À cette fin, le Premier ministre a chargé M. Christophe Sirugue, député de Saône-et-Loire, M. Gérard Huot, chef d'entreprise, ainsi que M. Michel de Virville de formuler des propositions, qui lui ont été remises le 26 mai dernier, et transposées aussitôt par amendements du Gouvernement dans le projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi, adopté par l'Assemblée nationale le 2 juin et que vous examinerez d'ici à la fin de ce mois.

Quatre mesures découlent du rapport Sirugue-Huot-Virville.

Le dispositif est simplifié : la transmission de la fiche individuelle ne reposera plus sur l'employeur. C'est la caisse de retraite qui informera les salariés à la fois de leur exposition et des points dont ils bénéficient.

Les déclarations des employeurs sont sécurisées : l'évaluation des six nouveaux facteurs dépendra de référentiels établis au niveau des branches professionnelles, et pour lesquels les employeurs n'auront plus de mesures individuelles à prendre.

La détermination des six facteurs est décalée au 1er juillet 2016, pour laisser aux branches le temps de réaliser les référentiels. Les salariés ne seront pas pénalisés : ils bénéficieront, pour le second semestre 2016, des points correspondant à une année entière.

Enfin, la prévention de la pénibilité est renforcée : elle figurera au coeur du troisième plan « Santé au travail ».

M. Olivier Cigolotti.  - La situation particulière des entreprises du BTP doit être prise en compte.

La séance, suspendue à 9 h 55, reprend à 10 h 05.

Inscription sur les listes électorales spéciales en Nouvelle-Calédonie

M. Pierre Médevielle .  - Le Conseil constitutionnel a établi, en 1999, la possibilité de voter aux élections provinciales pour les individus domiciliés en Nouvelle-Calédonie depuis au moins dix ans, indépendamment de leur date d'installation sur le territoire calédonien. La révision constitutionnelle de 2007 a limité l'inscription sur ces listes spéciales aux personnes arrivées avant le 8 novembre 1998.

La Cour de cassation a, dans son arrêt du 3 octobre 2013, imposé l'inscription sur la liste électorale générale de février 1998 comme condition nécessaire à l'inscription sur ces listes. Cette disposition entraîne de manière rétroactive la radiation de 5 000 citoyens. Cela semble contraire aux principes démocratiques. Si la Cour européenne des droits de l'homme a jugé acceptable que la condition de dix ans de résidence soit retenue comme restriction de vote en raison de la phase transitoire dans laquelle se trouve la Nouvelle-Calédonie, il apparaît peu probable qu'elle se prononce favorablement sur les restrictions apportées par les jurisprudences successives.

Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre afin d'éclaircir la législation en vigueur ?

Le comité des signataires s'est réuni le 5 juin. Des avancées ont eu lieu mais reste en suspens la question des personnes non inscrites sur les listes électorales avant 1998.

Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer .  - Depuis les évènements de 1988 et les accords de Nouméa de 1998, la question du corps électoral est ouverte. Le Conseil constitutionnel a décidé le 15 mars 1999 que seraient électeurs ceux inscrits au tableau annexe, installés depuis au moins dix ans en Nouvelle-Calédonie.

En revanche, si le Constituant a effectivement, en 2007, introduit une disposition cumulative à la condition de dix ans de résidence, cette disposition ne limitait pas l'inscription sur les listes électorales spéciales aux personnes arrivées en Nouvelle-Calédonie avant le 8 novembre, mais à celles inscrites au tableau annexe établi en 1998.

C'est le sens de la précision désormais apportée au dernier alinéa de l'article 77 de la Constitution. Le tableau auquel se réfèrent l'accord de Nouméa et les articles 188 et 189 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie est le tableau dressé à l'occasion de la consultation relative à l'Accord de Nouméa organisée en 1998 et comprenant les personnes non admises à y participer.

La Cour de cassation n'a pas ajouté une nouvelle condition restrictive, elle s'est montré fidèle à la Constitution et à la loi organique. Tout électeur inscrit sur la liste électorale générale est automatiquement inscrit au tableau, sauf s'il remplit les conditions pour être inscrit sur la liste électorale spéciale et en fait la demande.

Le comité des signataires réuni le 5 juin a pris en compte ce litige, en décidant de dresser un inventaire et de se retrouver à nouveau pour faire le point.

M. Pierre Médevielle.  - Merci pour ces éclaircissements. Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault s'était engagé à suivre cette question avec attention. Les récents arrêts de la Cour de cassation ont ravivé de fortes tensions. Certains électeurs ne comprendraient pas d'être retirés des listes, alors qu'ils habitent en Nouvelle-Calédonie depuis plus de vingt-cinq ans. J'espère qu'un accord sera trouvé à l'automne, afin que le travail en cours en Nouvelle-Calédonie puisse se poursuivre dans la sérénité.

Sécurité routière en Seine-Maritime

Mme Agnès Canayer .  - Pour 2014, le dernier bilan, datant d'il y a quelques jours, 3 300 personnes sont décédées sur les routes de France, soit 120 de plus que l'année précédente. Le Gouvernement a annoncé des mesures nouvelles. Cette hausse de la mortalité touche particulièrement les usagers vulnérables, piétons, cyclistes et cyclomotoristes et, dans une moindre mesure, les automobilistes.

Le Gouvernement avait présenté lors du dernier Conseil national de la sécurité routière (CNSR) une série des mesures, qui semblent rester au stade de l'expérimentation, dont la réduction de la vitesse à 80 km/h sur les routes nationales, ou les tests salivaires de détection de l'usage de stupéfiants.

En Seine-Maritime, 94 personnes sont mortes en 2014, soit 6 de plus qu'en 2013. Pour le premier trimestre 2015, nous dénombrons déjà 12 victimes. Les causes des accidents sont dues surtout à l'alcool et à la consommation de drogues et de substances psychoactives.

Le Gouvernement entend-il renforcer les contrôles au moyen de dispositifs de détection ? Où en sommes-nous ? En Seine-Maritime, les collectivités territoriales sont mobilisées. La politique de sécurité routière est transversale par nature.

La commune d'Arques-la-Bataille a été reconnue pour sa politique innovante en matière d'action préventive, par une écharpe d'or. Elle a su cibler les seniors et les jeunes, qui représentent les populations les plus à risque, associer les parents, aménager sa voirie.

Comment le Gouvernement entend-il s'appuyer sur ces heureuses initiatives des collectivités locales, au niveau national, pour renforcer la prévention et la doter de moyens ? Je regrette que rien ne soit prévu en ce qui concerne les seniors. Enfin, quelle sera l'ampleur des contrôles de police et de gendarmerie ?

Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer .  - Je vous prie d'excuser l'absence de M. le ministre de l'intérieur, qui a présenté, en janvier dernier, 26 mesures visant à mieux protéger l'ensemble des usagers de la route, les plus vulnérables -tels les piétons, les cyclistes et usagers de deux-roues motorisés- comme les automobilistes.

Ce plan concerne tous les facteurs comportementaux générateurs d'accidents : vitesse, alcool, drogue, usage du téléphone, etc... C'est ainsi que nous garantirons durablement la sécurité des Français sur la route.

Font partie de ces mesures : l'abaissement du taux légal d'alcoolémie de 0,5 gramme par litre de sang à 0,2 g/l pour tous les conducteurs novices ; la lutte contre la vitesse excessive, avec la poursuite de la modernisation des 4 200 radars installés sur les routes de France, qu'ils soient « double-face », mobiles, de nouvelle génération ou « chantiers », pour la sécurité du personnel qui intervient chaque jour sur les routes.

Sur la recommandation du CNSR, nous avons décidé, sur le modèle de l'interdiction du téléphone tenu en main, d'interdire l'usage au volant de tous les systèmes nécessitant des écouteurs, des oreillettes ou des casques.

En Seine-Maritime, même si le nombre de personnes tuées sur les routes a augmenté légèrement l'an dernier, la tendance est à la baisse depuis 2010 : 67 cette année-là, 52 en 2011, 57 en 2012, 51 en 2013 et 54 en 2014. La variation s'explique par des aléas climatiques, des causes humaines, pas seulement par la consommation d'alcool et de drogues.

La part des accidents dus à l'alcool est en moyenne de 27 % sur trois ans en Seine-Maritime, contre 30 % en France métropolitaine. Le taux de 40 % en 2013 n'est pas significatif car il s'applique à un nombre de cas relativement faible. Il est préférable de se fonder sur une période de référence de trois ans.

La sécurité routière est l'affaire de tous. La coopération entre tous les acteurs est absolument nécessaire.

Mme Agnès Canayer.  - L'usage de tests pour détecter l'usage de drogues et substances psychoactives doit être généralisé pour lutter efficacement contre ce fléau.

Police nationale dans la Drôme

M. Gilbert Bouchet .  - Je regrette l'absence de M. Cazeneuve. Les effectifs de police nationale dans le département de la Drôme sont en nombre insuffisant et plus particulièrement dans la région de Valence pour les deux communes de Portes-Lès-Valence et de Valence.

Portes-Lès-Valence est une ville de 10 000 habitants qui, depuis son passage en zone de police, a perdu des effectifs. Auparavant, elle avait à sa disposition 17 gendarmes dont 13 officiers de police judiciaire. L'État s'était engagé à installer un poste de police à effectifs identiques mais rien n'a été fait. Or, face à la recrudescence de la délinquance, notamment celle des mineurs, le maire de cette commune se trouve confronté à un manque cruel de moyens humains et matériels.

Il n'y a que deux équivalents temps plein dans un commissariat annexe, régulièrement appelés en renfort à l'extérieur. Lorsque le poste doit être fermé en conséquence, la police nationale n'est alors plus joignable, même par téléphone, aucun renvoi d'appel n'étant opéré vers le commissariat de Valence.

Il faudrait au moins trois policiers supplémentaires pour pouvoir traiter les dépôts de plaintes. De plus, les dégradations augmentent avec un coût de 150 000 euros pour la commune.

Il serait judicieux de mettre en place un moyen efficace de liaison avec le commissariat de Valence, afin que les Pontois n'aient pas le sentiment d'être abandonnés. Pour faire face au regain de violence constaté, la municipalité mobilise tous ses moyens humains, avec la création de trois postes de policiers municipaux et matériels, avec l'installation de la vidéo protection. Mais elle ne peut se substituer aux forces publiques de l'État.

Le maire de la ville de Valence s'inquiète, quant à lui, à la veille de l'ouverture d'un nouveau centre pénitentiaire de 456 places, sans commune mesure avec les effectifs de l'actuelle maison d'arrêt de 137 places de détention, de voir les forces de police monopolisées par cette activité, au détriment de leur présence sur la voie publique, sachant que le territoire de la commune de Valence supporte deux zones de sécurité prioritaires (ZSP). Il faudrait 25 policiers supplémentaires.

Des effectifs supplémentaires de police nationale seront-ils rapidement affectés à la direction départementale de la sécurité publique de la Drôme ?

Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer .  - Le Gouvernement crée 500 postes de policiers chaque année, alors que 13 700 postes ont été supprimés entre 2007 et 2012.

La circonscription de Portes-Lès-Valence, Bourg-lès-Valence et Valence compte 262 agents en 2015 contre 252 en 2012. Ces effectifs peuvent en outre recevoir l'appui de services départementaux (brigade motocycliste urbaine, unité canine départementale, sûreté départementale).

Cette circonscription bénéficie d'une zone de sécurité prioritaire (ZSP) à Valence-le-Haut (quartiers du Plan et de Fontbarlettes), mise en place début 2013 et étendue début 2014, ce qui prouve l'engagement de l'État pour la sécurité des Valentinois.

Toutefois, il est vrai que le nombre de gardiens de la paix est légèrement inférieur aux moyennes nationales.

L'effectif départemental sera accru pour faire face aux missions liées à l'ouverture de la nouvelle maison d'arrêt. Le préfet de la Drôme réunit régulièrement les acteurs pour déterminer les besoins.

M. Gilbert Bouchet.  - Vous ne m'avez pas totalement répondu. Quels sont concrètement les effectifs prévus ?

Subventions au CNDS

Mme Élisabeth Doineau .  - Ma question porte sur les projets de répartition des subventions du Centre national pour le développement du sport (CNDS).

L'aide accordée à la Mayenne pourrait connaître une baisse très importante de 14,35 % en 2015, à laquelle il convient d'ajouter les réductions antérieures. La Mayenne -département le plus sportif de France- risque d'être fortement pénalisée par cette décision, les moyens du CNDS pourraient baisser de 33 millions d'euros.

Cette sentence risque de provoquer des licenciements et la fin d'activités de certains clubs, et ainsi des conséquences non négligeables pour les collectivités territoriales et l'ensemble des Mayennais.

En effet, les comités sportifs sont des acteurs incontournables des politiques publiques en matière de santé, de renforcement du lien social, d'éducation, notamment dans le cadre des temps d'activités périscolaires. Cette réduction de subvention pourrait être perçue par les élus locaux comme un nouveau désengagement de l'État, impliquant une nouvelle charge budgétaire pour les communes qui seraient sollicitées par les associations.

Cette réduction de l'aide financière du CNDS est d'autant plus mal ressentie qu'aucune explication n'a été présentée. Ne pénalisons pas les bons élèves.

Le Gouvernement entend-il réexaminer ce dossier dans l'intérêt du monde sportif et de tous les Mayennais ?

Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer .  - La situation financière, extrêmement difficile, du CNDS, due à des engagements excessifs, et dont nous avons hérité, a nécessité un plan de redressement pour la période 2013-2016.

Une large concertation avec les acteurs sportifs et les collectivités a donc été menée, à l'issue de laquelle Patrick Kanner et Thierry Braillard ont décidé de concentrer les efforts sur les publics les plus éloignés du sport, afin de réduire les inégalités d'accès à la pratique sportive. Priorité est donnée aux projets de développement du sport comme facteur de santé publique et au développement de l'emploi et de l'apprentissage dans les métiers du sport, en agissant pour la professionnalisation du mouvement sportif.

Une aide de 128 millions d'euros sera répartie à cette fin sur le territoire par les préfets de région, pour réduire les inégalités d'accès au sport. Dans votre région, l'enveloppe sera de 5 990 662 euros. Il appartient au délégué territorial, le Préfet des Pays-de-la-Loire, de répartir la dotation allouée entre les différentes associations du territoire régional, en s'appuyant sur les têtes de réseau au sein de la région.

Le Gouvernement, qui a dû réparer les erreurs du passé, est désormais tourné vers l'avenir.

Mme Élisabeth Doineau.  - J'entends bien. Cependant, la pratique du sport doit être soutenue.

Prolongement du tramway T4

M. Gilbert Roger .  - La ligne de tramway T4 doit relier, à terme, Aulnay-Bondy au plateau de Clichy-sous-Bois/Montfermeil.

Elle desservira notamment l'hôpital intercommunal dans le centre-ville de Montfermeil et sera connectée avec le RER B et le projet de TZen3, pour des trajets rapides et aisés entre Clichy-sous-Bois ou Montfermeil et Paris.

Ce projet, ardemment défendu depuis de trop nombreuses années, par les maires de Clichy-sous-Bois et de Montfermeil, a été obtenu peu de temps après les émeutes urbaines de 2005. Il désenclavera ces deux communes, inaccessibles par des transports en commun, alors qu'elles ne se situent qu'à quinze kilomètres de Paris.

Cependant, il se heurte à l'opposition des maires de Pavillons-sous-Bois et de Livry-Gargan.

Aujourd'hui, c'est le maire de Livry-Gargan, qui use d'un nouvel artifice en refusant de signer les arrêtés autorisant le début des travaux de dévoiement qui auraient dû commencer le 23 mars.

Dans l'hommage qu'il a rendu le 7 mars 2015 à notre collègue Claude Dilain disparu, le président de la République a exprimé son soutien à l'arrivée du tramway T4 à Clichy-sous-Bois, en rappelant que sa date de mise en oeuvre était 2018. Et d'ajouter : « nous le devons ».

Quelles mesures et instructions le Gouvernement compte-t-il prendre pour commencer sans délai ces travaux reconnus d'utilité publique ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - Comme vous, je suis convaincu de l'intérêt de ce projet de prolongement du T4. Il profitera également aux habitants de Pavillons-sous-Bois et de Livry-Gargan, qu'il reliera à la ligne 16 du futur Grand Paris Express.

Le Gouvernement a tenu à ce que l'État s'engage fortement, aux côtés de la région, du STIF, de SNCF-Mobilités et de SNCF-Réseau, dans le contrat de plan État-région (CPER), pour un démarrage sans délai des travaux. Le préfet de Seine-Saint-Denis a réuni au sein d'un comité de pilotage tous les acteurs concernés. Dans ce cadre, les difficultés mises en avant par la ville de Livry-Gargan ont pu être examinées afin de mettre en place un plan de financement adapté : la Caisse des dépôts et consignations (CDC) apportera des prêts bonifiés. Les services de l'État et de la ville se réuniront régulièrement. L'arrêté sera bientôt pris par le maire. Le gouvernement est vigilant.

M. Gilbert Roger.  - Enfin ! J'espère que la ligne sera inaugurée avant ma retraite.

Financement des ouvrages de rétablissement des voies

Mme Évelyne Didier .  - La loi du 7 juillet 2014 a modifié le code général de la propriété des personnes publiques. L'article L. 2123-12 du code général prévoit un décret en Conseil d'État pour préciser les modalités d'application. Ce décret n'a pas été publié.

L'article L. 2123-11 du même code prévoit que le ministre chargé des transports procèdera à un recensement des ouvrages d'art de rétablissement des voies qui relèvent ou franchissent les réseaux routiers, ferroviaires et fluviaux de l'État et de ses établissements publics et pour lesquels il n'existe aucune convention en vigueur. Le ministre a précisé que le recensement des ouvrages d'art et de rétablissement des voies était en préparation.

Je rappelle que les collectivités territoriales n'ont pas décidé la construction de ces ouvrages ; les maires ne peuvent pas assurer seuls les recensements. Le conseil d'évaluation des normes n'a toujours pas examiné le projet de décret. Où en est-on, Monsieur le Ministre ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - Je salue l'esprit de co-construction qui a présidé à l'élaboration de la loi du 7 juillet 2014, dont vous êtes l'auteur.

L'Assemblée des départements de France a souhaité poursuivre la discussion sur le projet de décret. Comme vous, je souhaite son adoption rapide. Le retard pris s'explique par la recherche d'un texte consensuel.

Si la dernière version du texte agrée à l'ADF, elle sera soumise au Conseil d'évaluation des normes et au Conseil d'État en juillet. Le taux de retour est encourageant, les services de l'État apportent toute l'assistance nécessaire aux collectivités. Le recensement des ouvrages a débuté en février. Nous mettons au point une méthodologie commune avec SNCF Réseau et VNF. Le Gouvernement est déterminé à faire appliquer la loi que vous avez portée.

Mme Évelyne Didier.  - Merci. La parole d'un ministre dans l'hémicycle rassurera davantage les maires de mon département que la mienne.

Avenir des trains intercités

Mme Laurence Cohen .  - Les 34 lignes TET dites intercités transportent quotidiennement environ 100 000 voyageurs. Quelque 335 villes sont desservies, assurant des liaisons essentielles aux déplacements des Français. La vocation de ces trains est de relier entre elles les grandes villes de notre pays, à une vitesse se situant entre le train à grande vitesse et le train express régional. Le constat est unanime du vieillissement du réseau et du matériel, l'offre est peu attractive et les temps de parcours allongés.

D'après les informations parues dans la presse à la suite du rapport Duron, la suppression de plusieurs de ces lignes et l'abandon de plusieurs arrêts en gares seraient envisagés. Des trains de nuit seraient également supprimés.

Ces lignes sont essentielles pour les populations. Les supprimer, c'est les abandonner. Si ces intentions étaient confirmées, on assisterait à la formation de véritables déserts ferroviaires. À cela s'ajouteraient des fermetures de gares, de boutiques SNCF, des suppressions d'emplois. Mes craintes sont renforcées par le projet de loi Macron et ses autocars, une aberration écologique à quelques mois de la Cop 21. Comment le Gouvernement entend-il renforcer le service public ferroviaire ? Ne sacrifions pas le rail à la route.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - Les trains intercités, délaissés par mes prédécesseurs, doivent être modernisés. Leur modèle économique est fragilisé par leur baisse de fréquentation, l'hétérogénéité des dessertes et leur imbrication avec les TER.

La commission Duron a rendu le 26 mai son rapport, qui n'engage pas le Gouvernement. La commission du développement durable du Sénat en a débattu le 28 mai dernier ; nous y reviendrons cet après-midi dans l'hémicycle.

Fin juin, je présenterai une feuille de route pour pérenniser et moderniser cette offre indispensable à certains territoires. Le Gouvernement entend dans la concertation clarifier l'articulation entre les TET et les TER, en tenant compte des exigences liées à l'aménagement du territoire et du développement des autres formes de mobilité.

Mme Laurence Cohen.  - Sage décision que cette concertation. Les élus communistes ont tenu une conférence de presse il y a un mois sur les menaces pesant sur les TET. Au nom de la modernisation, ne supprimons pas des lignes qui correspondent aux besoins des populations et à un impératif écologique, au contraire de la libéralisation du transport par autocars portée par la loi Macron.

Permis de recherches de mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux

Mme Sylvie Goy-Chavent .  - Le ministère de l'écologie a, récemment, pris la décision de ne pas renouveler le permis des Moussières, dont le périmètre couvre les départements de l'Ain, des deux Savoie et du Jura. Dans ces quatre départements comme ailleurs en France, les aquifères de type karstique sont la principale ressource en eau potable. Selon la communauté scientifique, leur vulnérabilité aux pollutions est particulièrement élevée. Aux États-Unis, plusieurs accidents de forage ont entraîné l'infiltration immédiate et irréversible des polluants dans les réserves naturelles d'eau potable avec une hausse spectaculaire des affections cancéreuses.

Sous l'effet des migrations de fluides induites par la recherche et l'exploitation des hydrocarbures, les fractures géologiques constituent des drains qui accélèrent la contamination des réserves souterraines d'eau potable. D'autres types de fuites sont possibles par déficience de la protection du forage.

En d'autres termes, l'exploration et l'exploitation des réserves d'hydrocarbures dans les zones karstiques françaises provoqueraient de véritables catastrophes. Sans parler des effets à long terme sur la faune et sur la flore.

Selon plusieurs experts de l'administration américaine, la déstabilisation des couches profondes du sous-sol peut également entraîner des microséismes. Or certains projets de forage concernent la zone de la centrale nucléaire du Bugey...

Ne faut-il pas interdire, sur l'ensemble du territoire, tous les projets de forage d'hydrocarbures en milieu karstique et à proximité des ouvrages sensibles ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche .  - Je vous prie d'excuser l'absence de Mme Royal, en déplacement aux États-Unis.

Les zones karstiques justifient effectivement une vigilance supplémentaire. En France, le code minier est strict : les travaux d'exploration et d'exploitation sont très réglementés -obligation de cuvelage et de cimentation associée notamment- et ils ne peuvent être engagés qu'après accord des ministres de l'écologie et de l'économie et étude d'impact sur les risques environnementaux. Le public est largement associé à la décision lors de l'enquête publique.

Mme Sylvie Goy-Chavent.  - J'aurais préféré une réponse plus claire, vous n'avez fait que rappeler la procédure... Dans le Figaro et sur son compte Twitter, Mme Royal indiquait que les gaz de schiste n'étaient plus d'actualité et qu'elle refusait toute demande d'autorisation de forage. Les lobbies ont-ils eu raison de sa détermination ? Le combat continuera sur mon territoire. Les élus sont au côté des populations pour que des projets dangereux ne voient pas le jour.

Missions des centres de gestion de la fonction publique territoriale

Mme Catherine Troendlé .  - L'article 25 de la loi du 26 janvier 1984 autorise les centres de gestion de la fonction publique territoriale à répondre à des demandes de mise à disposition d'agents émanant des collectivités qui les sollicitent en vue d'assurer le remplacement d'agents momentanément indisponibles ou d'assurer des missions temporaires ou en cas de vacance d'un emploi. Tel est le cas des archivistes du Haut-Rhin.

Or la chambre régionale des comptes d'Alsace relève une concurrence déloyale faite aux cabinets privés, tout comme au personnel des archives départementales, adoptant ainsi une conception étroite et erronée du principe de spécialité. Si cette conception devait prévaloir, l'article 25 précité perdrait toute portée.

La mise à disposition des archivistes pour suppléer à l'absence de service d'archives dans les collectivités renforce le rôle mutualisateur des centres de gestion, qui proposent des services accessibles à toutes les collectivités, notamment les plus contraintes. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale .  - Je vous prie d'excuser l'absence de Mme Lebranchu, retenue.

L'article 25 de la loi du 26 janvier 1984 et le décret du 26 juin 1985 sont clairs : l'archivage ne fait pas partie des compétences optionnelles qui peuvent être mises en oeuvre par les centres de gestion. Le Conseil d'État l'a confirmé par son interprétation du principe de spécialité, dans son avis du 7 juillet 1994. Depuis, la jurisprudence est constante.

Mme Catherine Troendlé.  - Merci pour cette réponse claire. Je regrette toutefois que l'archivage ne fasse pas partie des missions des centres de gestion. Vous n'ignorez pas le coût des prestations privées. Peut-être faut-il envisager une évolution du droit ?

M. André Vallini, secrétaire d'État.  - Sans doute...

Fermeture de l'établissement pénitentiaire de Lure

M. Michel Raison .  - Le 3 avril 2015, à l'occasion d'un déplacement à Lure, la Garde des Sceaux a réaffirmé que la maison d'arrêt de cette petite ville est, par son implantation en coeur de la ville et sa taille humaine, en totale adéquation avec l'esprit de la politique pénale qu'elle souhaite mettre en oeuvre. Malgré cela, elle a confirmé la fermeture de l'établissement pour des raisons de sécurité qui interdiraient toute exploitation du site - motif que je continue de contester, la haute administration pénitentiaire souhaitant de longue date sa fermeture.

La Garde des Sceaux a également précisé avoir obtenu, dans le cadre du triennal 2015-2017, le lancement d'un nouveau programme pénitentiaire permettant de créer plus de 3 200 places nettes. Elle évoque la reconstruction d'un autre établissement dans les environs de Lure, sans autre précision. Ce projet sera-t-il intégré au plan de financement 2015-2017 ? Quel sera le choix de son lieu d'implantation et surtout sa taille - on parle aussi de la fermeture de la prison de Vesoul ? Quel sera l'avenir du bâtiment aujourd'hui désaffecté qui reste propriété de l'État ? Que la ville soit prioritaire pour acquérir le bâtiment nous fait une belle jambe (Sourires) au vu de son état. Ce serait une provocation...

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale .  - Mme la Garde des Sceaux, dont je vous prie d'excuser l'absence, a dû se résoudre en responsabilité à fermer la maison d'arrêt de Lure après trois expertises concordantes ; la sécurité des personnels et des détenus était en péril.

L'administration pénitentiaire travaille avec la région et les autres ministères intéressés pour soutenir la commune et étudier les modalités de l'éventuelle construction d'un nouvel établissement en région Bourgogne-Franche-Comté.

Le devenir du site sera décidé dans le cadre du triennal 2017-2020. Un rapprochement se fera avec la commune dans les meilleurs délais pour étudier avec elle un projet urbain cohérent.

M. Michel Raison.  - On ne me fera pas avaler que des architectes d'aujourd'hui ne peuvent pas faire ce que ceux du XIXe siècle ont réussi. La nouvelle implantation sera décidée au sein de la grande région Bourgogne-Franche-Comté. Si elle est éloignée à Dijon, ce sera pire encore.

Je prends note que les ministères vont se rapprocher de la ville. Mais je sais comment les choses fonctionnent, il m'a fallu un mandat complet de maire pour trouver une solution à la disparition d'un quartier militaire... En l'état, je ne vois guère qu'une démolition et une reconversion du site.

Résidence alternée et contribution aux frais des enfants

M. Dominique Bailly .  - La résidence alternée est de plus en plus envisagée par les parents. C'est un marqueur fort de l'évolution de la société et de la volonté d'implication des pères dans l'éducation de leurs enfants. Le Sénat a accompagné ce processus en votant le 17 septembre 2013, lors de l'examen de la loi pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, un amendement visant à privilégier la résidence alternée et en instaurant un délit d'entrave à l'exercice de l'autorité parentale.

Néanmoins, le partage des frais inhérents à ce mode de garde est parfois peu équitable dans les situations de résidence alternée. En effet, la contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants est fixée selon un barème précis, en fonction de critères de revenus et du nombre d'enfants. Même si l'enfant réside chez ses deux parents et que ces derniers participent à la même hauteur aux charges qui lui sont relatives, le parent ayant le revenu le plus élevé verse une contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants au second parent. Cette contribution s'ajoute à d'éventuels salaires et prestations sociales et familiales, celles-ci ne pouvant être, selon la loi, versées qu'à un seul des deux parents.

Dans de nombreux cas, le parent versant ladite contribution voit donc ses revenus extrêmement réduits et jusqu'à parfois un niveau inférieur à ceux du parent aidé.

Comment améliorer l'équité financière entre les parents dans les cas de résidence alternée ?

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale .  - La résidence alternée est choisie dans 19 % des cas ; le plus souvent, elle ne s'accompagne pas d'une contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants ; lorsqu'elle l'est, elle consiste de plus en plus souvent en la prise en charge directe des frais. En cas de résidence alternée après accord des parents, ceux-ci s'entendent généralement sur le montant de la pension. Si ce n'est pas le cas, c'est le juge qui en décide, selon une table de référence élaborée en 2010 par des spécialistes, fondée sur des travaux universitaires et la pratique judiciaire. Des travaux sont en cours à la Chancellerie pour la rendre plus équitable, notamment dans les cas de résidence alternée, et plus généralement pour tenir compte de la réalité économique vécue par les couples qui se séparent.

M. Dominique Bailly.  - Merci pour cette réponse. Les cas sont peut-être minoritaires mais il doit en être tenu compte. C'est la « vraie vie », comme on dit.

Révision des valeurs locatives

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx .  - La généralisation à l'ensemble du territoire de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels, initiée au début de l'année 2013, fait suite à une expérimentation menée en 2011. Selon l'article 34 de la loi du 29 décembre 2010 de finances rectificative, cette révision est fonction d'un tarif déterminé à l'avance qui prend en compte le secteur locatif et la surface du bien.

Si cette réforme est de bon sens, on peut douter de la qualité des moyens mis en oeuvre pour solliciter l'avis des commissions intercommunales des impôts directs. Celles-ci ont émis, dans la plupart des départements dont le mien, la Gironde, des avis défavorables.

Tout d'abord, le délai de trente jours qui leur a été accordé a été jugé beaucoup trop court. Les fiches d'impact fournies aux commissions se sont révélées souvent parcellaires, voire inexploitables. Plus grave : ces fiches d'impact laissent entrevoir de fortes disparités puisqu'elles ne prennent pas en compte la réalité du marché - plus un local est grand et plus son loyer par mètre carré diminue. Cela se traduit par de fortes variations de cotisations entre les professionnels. Par exemple, les grandes surfaces sont avantagées et cotisent moins en proportion que les petits commerces de centre-ville.

Est-il possible de fournir aux communes des études d'impact plus détaillées ? Le Gouvernement accepte-t-il une remise à plat du processus de réforme ?

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale .  - Cette réforme a été engagée à l'initiative du Parlement et singulièrement de la commission des finances du Sénat. Elle est attendue depuis quarante ans, les élus la réclament depuis longtemps face à l'injustice actuelle. Toutes les tentatives ont échoué jusqu'ici.

M. Eckert a sollicité un report de son entrée en vigueur pour ne pas répéter les échecs du passé. Les critiques du processus sont prématurées. La seule manière d'avancer est que les commissions locales poursuivent leur tâche -elles sont seules à même d'évaluer les conséquences de la réforme- pour éviter les effets pervers et avoir une vision claire. Des évolutions pourront être actées dans le projet de loi de finances pour 2016. La réforme doit être soutenable pour l'ensemble des contribuables.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.  - Le Parlement veut cette réforme. Il ne faut pas en rester au formalisme des commissions locales. Remettez-vous en aux élus locaux. Le processus doit être exemplaire si nous voulons réussir ensuite la révision des valeurs locatives des locaux d'habitation.

La séance, suspendue à 11 h 25, reprend à 11 h 35.

Dispositif Malraux

M. François Commeinhes .  - Le programme national de requalification des quartiers anciens dégradés aide les communes à développer une politique sociale, économique et urbaine de lutte contre l'habitat indigne, de rénovation du parc existant et de revalorisation du patrimoine.

Vingt villes sont concernées par le programme en cours à échéance 2017, dont Montauban, Calais et Sète. L'Anah et l'Anru mobilisent 380 millions d'euros, avec un effet de levier de 1,5 milliard d'euros dans lequel la réduction d'impôt Malraux tient une place essentielle.

Ne mettons pas en cause la sécurité juridique et fiscale de ce dispositif. Ma ville de Sète a acquis quatre immeubles entiers vacants pour lesquels elle a obtenu la déclaration d'utilité publique ; deux autres immeubles sont en voie d'acquisition et deux autres encore ont été repérés. Limiter la réduction d'impôt Malraux au 31 décembre de cette année reviendrait à faire porter l'effort sur les communes dont les finances sont déjà mises à mal. Ne peut-on pas le proroger pour trois ans, en cohérence avec les calendriers opérationnels contractualisés dans le cadre des conventions pluriannuelles ?

Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication .  - La loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, dite « Grenelle II », prévoyait que les Zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP) deviendraient caduques au 14 juillet 2015, remplacées par des Aires de valorisation de l'architecture et du patrimoine (Avap). La loi Alur du 24 mars 2014 a reporté cette échéance au 14 juillet 2016. Seules 60 des 685 ZPPAUP ont été transformées en Avap ; les autres risquent de disparaître au 14 juillet 2016.

Le projet de loi relatif à la liberté de création, à l'architecture et au patrimoine a notamment pour objectif d'assurer une meilleure protection et mise en valeur du patrimoine urbain et paysager, par la création de cités historiques. Les ZPPAUP et Avap existantes intégreront automatiquement celles-ci et leurs règlements continueront de s'appliquer jusqu'à intégration dans un plan de sauvegarde et de mise en valeur ou dans un plan local d'urbanisme patrimonial. Les Avap en cours d'instruction à l'entrée en vigueur de la loi pourront poursuivre leur procédure de création jusqu'à leur terme selon les dispositions antérieures, dans un délai de trois ans. Une fois instituées, elles seront transformées automatiquement en cités historiques. Je veillerai à ce que ces dispositions soient adoptées avant la date butoir du 14 juillet 2016.

Le dispositif d'aide aux quartiers anciens dégradés vise à les réhabiliter : 40 projets ont été retenus et 50 000 logements bénéficient chaque année d'une subvention de l'État. Ils sont éligibles au dispositif Malraux dès lors que la restauration a été déclarée d'utilité publique. Le taux de réduction d'impôt s'élève à 30 % des travaux de restauration dans la limite annuelle de 100 000 euros.

M. François Commeinhes.  - Si je comprends bien, le régime fiscal actuel continue à s'appliquer pour les dossiers déjà lancés jusqu'à la fin des travaux. C'est très rassurant. Si ce n'est pas le cas, je déposerai un amendement en projet de loi de finances.

Logement étudiant

M. Patrick Abate .  - le nombre d'étudiants ne cesse d'augmenter - ils sont aujourd'hui 2,3 millions. Mais 7 % seulement d'entre eux ont accès à un logement social géré par les Crous ou les organismes conventionnés. La Cour des comptes a relevé ce taux et pointé des inégalités territoriales importantes.

La loi de finances 2015 a amputé d'un tiers les crédits dédiés des CPER, ce qui fragilise la poursuite du plan « 40 000 ». Je rappelle que le logement est le premier poste de dépense des étudiants. Beaucoup d'étudiants renoncent à un lieu d'étude ou à une orientation, faute de pouvoir se loger correctement. Beaucoup doivent travailler. Et le taux d'échec de ceux qui travaillent est plus élevé : 66 % contre 49 %.

Ces difficultés ne datent pas d'hier... Que compte faire le Gouvernement pour améliorer significativement la situation du logement social étudiant, sachant qu'il faudra aussi renforcer les moyens des Crous ?

Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication .  - Le Gouvernement a fait de la jeunesse une priorité, conformément aux engagements du président de la République.

Le plan « 40 000 » vise à créer 40 000 logements étudiants d'ici 2017 ; 25 % de l'objectif est aujourd'hui réalisé, soit 11 912 et 511 de plus que prévu dans la programmation. À la fin de l'année, la moitié du plan aura été atteint. Une circulaire a été adressée début 2015 aux préfets et aux recteurs pour les mobiliser et un travail interministériel est en cours pour simplifier la construction. De plus, le Gouvernement a facilité l'accès au logement avec la caution locative étudiante. Notre objectif est de favoriser la réussite de tous.

M. Patrick Abate.  - Je me réjouis de ces précisions, mais je reste vigilant. L'accès au logement est un élément de réussite des étudiants.

Carte scolaire en milieu rural

M. Claude Bérit-Débat .  - Je salue les efforts du Gouvernement pour redresser l'école de la République depuis trois ans et donner à tous les élèves les mêmes chances.

Toutefois, les territoires ruraux ont le sentiment d'être exclus de ce mouvement. On supprime ici et là des classes, souvent parce qu'un ou deux élèves manquent. Il est urgent de revoir les critères qui président à l'établissement de la carte scolaire, en assouplissant celui du nombre d'enfants ou en prenant par exemple en compte les temps de trajet ? La concertation avec les municipalités devrait être conduite en amont, sur une base pluriannuelle, ce qui donnerait davantage de visibilité aux élus pour leurs investissements.

Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication .  - Le ministère de l'Éducation nationale a entrepris de mieux répartir les moyens alloués aux académies ; il s'attache à prendre en compte une pluralité de facteurs géographiques et sociaux, comme les déplacements des élèves, le rattachement à un réseau d'éducation prioritaire ou la présence d'élèves à besoins éducatifs renforcés.

En Dordogne, la baisse du nombre d'élèves depuis deux ans a entrainé la suppression de sept postes, mais le taux d'encadrement reste le plus élevé de l'académie, 5,39 ; 445 petites écoles subsistent. Le préfet et l'inspectrice d'académie ont écrit aux maires et présidents d'EPCI en juin et novembre 2014, l'objectif étant la rationalisation à long terme de la carte scolaire. Le premier comité de pilotage s'est tenu le 21 janvier. Une feuille de route est en cours d'élaboration avec l'Union des maires.

M. Claude Bérit-Débat.  - Tout cela va dans le bon sens mais les maires ruraux demeurent inquiets. Ils souhaitent être mieux informés pour ne pas avoir par exemple à fermer une école qu'ils viennent juste de rénover. Obliger les élèves à effectuer de longs déplacements en car ne favorise pas la réussite scolaire. Les critères doivent être assouplis.

Centres d'information et d'orientation du Morbihan

M. Michel Le Scouarnec .  - On compte actuellement vingt-deux centres d'information et d'orientation (CIO) sur le territoire des quatre départements bretons, dont cinq dans le Morbihan. Il s'agit d'un véritable service public de proximité, contribuant efficacement à l'accès à l'information et à l'ambition scolaire. En 2014, le recteur a évoqué une évolution nécessaire. L'espace territorial, pertinent dans le Morbihan, pourrait être le bassin de population. Or la région ne compte que douze bassins de population, soit dix de moins que le nombre de CIO.

Plus de 30 000 collégiens et lycéens sont scolarisés dans le seul Morbihan, si l'on considère uniquement l'enseignement public. Le rectorat vient de décider la fermeture de quatre centres à Auray, Quimperlé, Loudéac et Landernau. Les familles morbihannaises ne disposeront plus d'un service public de proximité. Les agents des CIO s'inquiètent légitimement pour la continuité de leurs missions et de leurs conditions de travail.

Les CIO sont des éléments clés de la réussite scolaire pour tous et partout. Il faut que tous les partenaires soient associés à la réflexion. Quelles actions seront entreprises dans le Morbihan, comme sur l'ensemble de notre territoire, pour délivrer aux élèves une information suffisante ?

Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication .  - Le Gouvernement a fait de la lutte contre le décrochage scolaire une priorité. Des mesures relatives aux CIO figurent dans la loi de refondation de l'école et dans celle sur la formation professionnelle. Les recteurs ont engagé en 2014 une réflexion pour revoir les cartes académiques, en concertation avec les personnels et dans le dialogue avec les collectivités territoriales. Ces cartes doivent s'appuyer sur les bassins de vie, la carte des besoins de formation et les équilibres territoriaux.

Dans l'académie de Rennes, le rectorat a proposé une carte avec dix-sept CIO, soit cinq de plus qu'aujourd'hui. Plusieurs solutions sont encore à l'étude, notamment une implantation dans des lycées ou encore des permanences quelques heures par semaine. Dans le Morbihan, une permanence de plusieurs demi-journées à Auray devrait être assurée à la rentrée. Nous agissons avec le souci d'offrir aux élèves un service public d'orientation de qualité.

M. Michel Le Scouarnec.  - Je prends note de cette permanence, il n'en demeure pas moins que le temps de présence sur place des conseillers sera réduit.

Les personnels des CIO et les familles ne comprennent pas cette réforme. Il est nécessaire de mieux les associer. L'orientation est un élément crucial pour la réussite de notre jeunesse.

La séance est suspendue à 12 h 05.

présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : M. François Fortassin, M. Serge Larcher, Mme Colette Mélot.

La séance reprend à 14 h 30.