SÉANCE

du jeudi 8 décembre 2016

31e séance de la session ordinaire 2016-2017

présidence de M. Thierry Foucaud, vice-président

Secrétaire : M. Jackie Pierre.

La séance est ouverte à 10 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle cinq questions orales.

Entretien des cours d'eau

Mme Colette Mélot .  - Au printemps dernier, la France a subi des intempéries d'une extrême violence qui ont entraîné un épisode de crues exceptionnel. En Seine-et-Marne, 232 communes ont été dévastées, soit la moitié des communes du département.

Les maires ont été exemplaires, mobilisant leurs équipes pour porter secours aux habitants, accueillir les sinistrés, prendre les mesures d'urgence et rétablir les services publics de proximité.

Aujourd'hui, des interrogations se font entendre sur les causes et la gestion de ces inondations. Les cotes des crues ont dépassé, en Seine-et-Marne, celles de 1910.

Le changement climatique est désormais une évidence et les territoires seront probablement confrontés à d'autres épisodes de ce type dans les années à venir. Depuis les années 1950, la Seine et ses affluents étaient à peu près calmes avec pour conséquence une sorte d'amnésie collective du risque d'inondation !

Les inondations constituent un risque majeur sur le territoire national. Seule une meilleure prévention réduira la facture laissée par ces événements exceptionnels. Il faut donc réduire la vulnérabilité des villes et des villages face à ces catastrophes naturelles.

Il est également important de veiller à ce que les obstacles qui pourraient obstruer le lit de la rivière soient régulièrement enlevés.

L'important est de retenir l'eau avant qu'elle n'arrive dans la rivière. Les grands équipements sont difficiles à réaliser pour des raisons à la fois d'espace et de coût. Mais la multiplication de petits barrages, de petites retenues est tout aussi efficace. L'important est de mieux gérer l'arrivée de l'eau pour éviter une montée rapide du niveau des cours d'eau.

L'inspection générale a mené une mission sur la crue du Loing. Elle devait rendre ses conclusions en novembre : qu'en est-il ?

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Les possibilités d'action pour réduire l'aléa sont nombreuses. Depuis plusieurs décennies, elles sont entreprises par les collectivités avec l'appui de l'État, notamment dans les Programmes d'actions de prévention des inondations (PAPI).

Un nouvel appel à projets « PAPI 3 » doit être mis en oeuvre à compter de 2018, sur la base d'un cahier des charges à publier début 2017. Il s'agit de mieux articuler les PAPI avec la directive inondations, de mieux anticiper la prise en compte des enjeux environnementaux et à d'articuler le dispositif avec la compétence Gemapi.

L'entretien des cours d'eau est fondamental mais ne suffit pas quand les pluies sont exceptionnelles. C'est pourquoi le nouveau plan vise à mieux associer les acteurs de l'État et les collectivités territoriales.

Mme Colette Mélot.  - J'attends les conclusions de la mission d'inspection, même si les inondations du printemps dernier n'étaient pas prévisibles.

Violences conjugales

M. Roland Courteau .  - Le dispositif électronique anti-rapprochement « DEPAR » consiste à contrôler, par un moyen matériel, l'interdiction faite à une personne, mise en examen pour un crime ou délit commis dans un contexte conjugal, de s'approcher de sa victime : il signale instantanément et à distance que l'auteur de violences se rapproche de celle-ci. Ce dispositif devait être expérimenté depuis 2010 dans plusieurs départements mais il ne l'a pas été faute que soient remplies les strictes conditions pénales qui doivent être réunies.

Contrairement à ce qui se passe avec le TGD (Téléphone grave danger), la victime est avertie en amont, dès que l'auteur des violences franchit le périmètre de protection, ce qui lui permet de se mettre à l'abri. Le Depar a fait la preuve de son efficacité dans les pays où il est appliqué : Portugal, Slovaquie, Espagne, Suisse, Grande-Bretagne. Que compte faire le Gouvernement pour faciliter son utilisation ?

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Le Depar est une expérimentation intéressante, novatrice, mais qui exige des conditions strictes. Appliquée dans les ressorts des TGI d'Amiens, Aix et Strasbourg, elle s'est avérée peu efficace malgré l'abaissement de sept à cinq ans du quantum de peines à partir duquel il est applicable. Un nouvel abaissement n'est guère envisageable car incompatible avec le droit européen qui exige une gravité plus grande pour le placement sous surveillance électronique.

C'est pourquoi le Gouvernement a préféré généraliser le TGD dans la loi sur l'égalité réelle, du 4 août 2014. En neuf ans d'application en Seine-Saint-Denis, aucune femme n'est décédée du fait de violences conjugales, preuve de son efficacité.

Allocation de rentrée scolaire

Mme Corinne Imbert .  - Modifiée par la loi, l'allocation de rentrée scolaire due au titre d'un enfant confié est versée à la Caisse des dépôts et consignations, qui en assure la gestion jusqu'à la majorité de l'enfant ou, le cas échéant, jusqu'à son émancipation. Avant le vote de cette disposition, un travail pédagogique était effectué avec les parents, qui bénéficiaient d'un accompagnement spécifique pour l'achat de fournitures scolaires.

Désormais, ils reçoivent une simple notification de la caisse d'allocations familiales leur indiquant la nouvelle disposition. Cependant, les parents se tournent vers les services du département afin de connaître la procédure de récupération de l'allocation, ce à quoi les services départementaux répondent que l'allocation ne pourra être récupérée sous forme de pécule qu'à la majorité de l'enfant. De surcroît, alors même que sont développées des mesures d'accueil séquentiel ou de placement éducatif à domicile, le fait de ne pas verser directement l'allocation de rentrée scolaire aux parents alors que ces derniers doivent couvrir les frais inhérents à la rentrée scolaire est un non-sens. Étonnant aussi que cette mesure ait été mise en oeuvre sans attendre la publication du décret d'application. Les pupilles de l'État auraient besoin d'un tel dispositif, mais ils ne sont pas concernés ! Comment expliquer que tous les enfants d'une même fratrie n'aient pas le même régime ?

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Près de 40 % des jeunes de 18 à 25 ans vivant dans la rue ont eu un parcours en protection de l'enfance.

Depuis 2016, l'allocation de rentrée scolaire est versée pour les enfants confiés à l'Aide sociale à l'enfance (ASE) sur un compte bloqué à la caisse des dépôts et consignations jusqu'à sa majorité. C'est en effet à ce moment que le jeune a besoin d'un pécule pour entrer dans la vie adulte. Les parents continuent à toucher les allocations familiales si le juge en décide ainsi.

Lors d'un placement éducatif à domicile, l'enfant reste au domicile alors qu'il est juridiquement sous la responsabilité de l'ASE. Le Gouvernement va réfléchir à l'évolution de ce dispositif.

Mme Corinne Imbert.  - Vous ne dites rien sur les pupilles de l'État. Ni sur le fait que, dans une même fratrie, le traitement est inégal entre un enfant placé à l'ASE et les autres.

Politique de l'eau

M. Philippe Bonnecarrère .  - Tout d'abord, je vous adresse monsieur le ministre, toutes mes félicitations pour votre nomination.

La loi NOTRe a prévu d'ici 2020 une compétence générale en matière d'eau confiée aux intercommunalités. Cette compétence vient compléter le dispositif Gemapi qui conduit à confier cette même compétence aux intercommunalités d'ici le 1er janvier 2018.

Or la mise en oeuvre de la pratique est contraire à cette orientation et la centralisation l'emporte.

Un arrêté du 20 janvier 2016 relatif aux schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (Sdage) confie aux préfets ordonnateurs de bassins le soin d'élaborer des stratégies « Socle », donnant à celles-ci un tour prescriptif. Serait-il possible de renoncer à cette centralisation ?

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - La loi Maptam a confié la Gemapi aux EPCI à fiscalité propre, selon un schéma à trois niveaux : les EPCI à fiscalité propre, qui peuvent articuler cette compétence avec d'autres, comme l'urbanisme ; les établissements publics d'aménagement et de gestion de l'eau, par sous-bassin versant, pour la maîtrise d'ouvrage ; les établissements publics territoriaux de bassin, par grand bassin versant. La loi NOTRe a reporté le transfert de compétences à 2020. La première stratégie « Socle » sera arrêtée par le préfet, après avis du comité de gestion de bassin.

Je suis conscient que cette réponse technique n'est pas de nature à vous satisfaire. C'est un sujet auquel je suis moi-même très sensible ; je vous propose que nous en reparlions plus à fond.

M. Philippe Bonnecarrère.  - Je suis inquiet du caractère prescriptif de ces nouvelles stratégies. Les intercommunalités avaient la maîtrise d'ouvrage, c'était clair et efficient. On assiste à un retour en arrière.

Je perçois que vous êtes conscient du problème ; merci de vous faire notre interprète auprès de vos collègues du Gouvernement.

Pénurie de vaccins BCG

M. Christian Favier .  - Le nouveau vaccin BCG Biomed-Lublin mis à disposition par les autorités sanitaires françaises à cause de la pénurie du vaccin contre la tuberculose impose des contraintes qui rendent très difficile son utilisation par les services de protection maternelle et infantile. Un flacon de ce vaccin doit être utilisé pour cinq injections successives, ce qui oblige les centres de PMI à prévoir des consultations dédiées au seul BCG. Situation inacceptable, car le rôle des PMI ne peut se limiter à la vaccination. D'autant plus qu'avec la pénurie d'autres vaccins (Infanrix Penta et Tétra), les médecins de ville orientent les familles vers les médecins de PMI. Ainsi, les efforts fournis par les services de PMI du Val-de-Marne sont considérables pour faire face à ces pénuries, avec 11 000 enfants vaccinés en 2015 (soit 3 000 de plus que les années précédentes).

Le rapport bénéfice-risque de ce nouveau vaccin est-il identique à celui du vaccin danois SSI ? L'État entend-il désengorger les PMI et faire face à la pénurie de vaccins ?

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement .  - Le vaccin BCG connaît une pénurie d'échelle européenne, liée au fabricant danois, unique en Europe. L'ANSMM peut garantir la fiabilité du fournisseur polonais. Des informations techniques sont à disposition dans les centres départementaux.

La ministre de la santé a pris des mesures fortes avec des engagements concrets des industriels pour lutter contre les ruptures d'approvisionnement.

M. Christian Favier.  - Merci, mais c'est insuffisant : il faut relancer la production en France. Le vaccin polonais entraînerait des effets secondaires, et des surcoûts pour notre sécurité sociale. La vaccination est un pilier de notre santé publique, il faut régler ce problème dans les meilleurs délais.