Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle vingt-six questions orales.

Colonies de vacances et sécurité des enfants

M. Michel Amiel .  - Le 22 août 2009, lors d'une colonie de vacances aux États-Unis, deux jeunes Françaises, Léa et Orane, ont perdu la vie. L'accident de la route en cause a donné lieu à un rapport de l'inspection générale de la jeunesse et des sports, remis en 2013, qui a établi un certain nombre de préconisations, dont la plus importante consiste, pour les séjours itinérants de mineurs à l'étranger, « à créer un régime de déclaration renforcée, applicable à chaque séjour et fondé sur des critères essentiels fixés par l'État, éventuellement issus d'une charte d'engagement élaborée par les structures professionnelles ». Rien ne s'est passé depuis lors. Pourquoi ne pas créer une procédure d'agrément spécifique ? Quelle est la position du Gouvernement sur cette mesure et les autres proposées dans ce rapport ?

M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes .  - La protection des mineurs en accueil collectif à caractère éducatif est une priorité du Gouvernement. Le dramatique accident que vous évoquez a donné lieu à un rapport de l'inspection générale de la jeunesse et des sports, remis en décembre 2013, qui préconise la création, pour les séjours itinérants de mineurs à l'étranger, d'un régime de déclaration renforcée fondé sur des critères essentiels, éventuellement issus d'une charte. Les organisateurs sont soumis à une déclaration où figurent des informations sur les modalités d'accueil, le public accueilli et le personnel encadrant, ainsi que des précisions, le cas échéant, sur la date et le lieu des étapes.

À l'étranger, les représentations françaises sont systématiquement informées.

Depuis 2015, toutes les sessions de formations, BAFA, BAFD, peuvent être effectuées à l'étranger. D'autres mesures sont à l'étude, comme le renforcement des conditions d'encadrement ou l'obligation d'informer sur les modalités de transport.

Enfin, depuis le 15 janvier, l'autorisation de sortie du territoire a été rétablie pour les mineurs.

M. Michel Amiel.  - Je reste sur ma faim. Le régime de déclaration renforcée sécuriserait les séjours de mineurs à l'étranger ; évitons à tout prix que ce type d'accident se reproduise.

Création d'une régie auprès du greffe du tribunal de Mata Utu

M. Louis-Jean de Nicolaÿ, en remplacement de M. Robert Laufoaulu .  - Veuillez excuser M. Laufoaulu, souffrant. L'article R. 123-20 du Code de l'organisation judiciaire (COJ) dispose qu'il est institué auprès de chaque greffe une régie de recettes et une régie d'avances fonctionnant dans les conditions prévues pour les régies des organismes publics. Afin de soutenir l'activité du bâtiment et des travaux publics à Wallis et Futuna, il est apparu nécessaire de mettre en place une telle régie pour le recouvrement des créances par voie de saisie-arrêt des rémunérations, afin de réactiver le fonds de garantie à l'habitat.

En 2014, le Gouvernement a donc instauré une sous-régie auprès du tribunal de Mata Utu, rattachée au tribunal de première instance de Nouméa. L'inconvénient tient à l'éloignement des sites. Il convient donc de créer une véritable régie auprès du greffe du tribunal de première instance de Mata Utu, conformément à ce que prévoit la loi. Que compte faire le Gouvernement ?

M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes .  - L'Assemblée territoriale a sollicité la création d'une régie de recettes pour mettre en oeuvre le recouvrement de créances par saisie des rémunérations. La disposition du code de l'organisation judiciaire que vous citez n'étant pas applicable à Wallis et Futuna, la création d'une régie supposerait un décret en Conseil d'État.

La demande de création d'une sous-régie à Mata Utu, rattachée au tribunal de première instance de Nouméa, se heurte à une fragilité juridique inhérente aux sous-régies ainsi qu'à l'incompatibilité des logiciels utilisés. La Chancellerie envisage donc la création d'une régie à part entière à Mata Utu au cours du premier semestre 2017 : un projet de décret en Conseil d'État est en cours de rédaction, les ministères des finances et de l'outre-mer ont été saisis et l'appui technique de la Chancellerie est acté.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ.  - Merci de cette bonne nouvelle.

Situation des Chagos

Mme Gélita Hoarau .  - Le pire malheur qu'un peuple puisse subir est l'exil forcé hors de sa terre natale, la déportation imposée par une puissance étrangère. C'est ce qu'ont subi les Chagossiens chassés dans les années soixante-dix par les Britanniques qui ont loué l'île de Diego Garcia aux États-Unis pour y installer une base militaire. Voilà un demi-siècle que les Chagossiens, abandonnés, déracinés, ont été relégués dans des bidonvilles.

Leur combat a progressivement été reconnu, mais s'est heurté à une décision inique de la Chambre des Lords en 2008. Malgré une étude de faisabilité sur les conditions de leur retour, malgré l'engagement de Theresa May d'ouvrir les négociations avec Maurice, Londres a opposé une fin de non-recevoir le 16 novembre 2016 en prolongeant le bail de la base militaire. Les Chagossiens crient leur révolte, que partagent tous ceux qui sont épris de liberté.

Le Gouvernement français est-il décidé à défendre auprès de Londres et de Washington la cause des Chagossiens, pour leur retour effectif aux Chagos ?

M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes .  - Le différend oppose le Royaume-Uni à la République de Maurice - le Gouvernement français ne saurait donc prendre position.

La France n'est pas insensible au sort des Chagossiens. Après quarante ans d'exil, ces 9 000 personnes, installées à Maurice, aux Seychelles ou au Royaume-Uni, connaissent toujours des difficultés d'insertion économique et sociale. Mais le sort de cette population est lié à un problème de souveraineté. La France encourage le Royaume-Uni et la République de Maurice à trouver une solution à leur différend par la voie du dialogue, engagé depuis plusieurs mois, dont je ne doute pas qu'il aboutira.

Mme Gélita Hoarau.  - Merci, je ne manquerai pas de rapporter vos propos aux Chagossiens qui viennent trouver aide et solidarité à La Réunion.

Détachement de salariés dans le secteur aérien

M. Vincent Capo-Canellas .  - Je me réjouis que le ministre des affaires européennes me réponde, car ma question porte sur le détournement des textes européens en matière de salariés détachés par certaines compagnies aériennes. Alors que Vueling et Ryanair ont été condamnées par la justice française pour travail dissimulé, la Commission européenne a ouvert une procédure contre la France et lui demande de reconnaître les formulaires de détachement, dits E101 et E102, délivrés par l'Espagne et l'Irlande pour les personnels de ces deux compagnies, au nom du droit européen.

D'abord utilisé pour des prestations de service, ce recours au détachement de salariés par des compagnies qui opèrent au départ de la France a ensuite été détourné pour s'appliquer à une activité habituelle stable. Les personnels prétendument détachés par ces compagnies ne résidaient ni en Espagne ni en Irlande, et ne s'y rendaient pas non plus dans le cadre de leurs activités professionnelles.

Il faut renforcer les contrôles de ces transporteurs low cost pour vérifier l'application de nos règles sociales, refuser de voir les formulaires E101 et E102 s'appliquer à ces situations de détachements fictifs et obliger les compagnies européennes exerçant une activité permanente en France à cotiser à l'Urssaf et aux régimes complémentaires de retraite. Que compte faire le Gouvernement pour lutter contre ce dumping social ?

M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes .  - Le Gouvernement est très attentif à cette question. Toutes les compagnies sont assujetties aux mêmes règles : la notion de base d'exploitation définit le droit du travail applicable. C'est sur ce fondement que Vueling et Ryanair ont été condamnées pour travail dissimulé.

Au niveau européen, la directive d'application sur la directive relative au détachement de 2014, qui a renforcé les modalités de sa mise en oeuvre, reste insuffisante ; nous soutenons la révision de la directive elle-même. À l'initiative de la France, les textes européens en vigueur précisent que chaque membre du personnel navigant est rattaché à la sécurité sociale de l'État membre où se trouve sa base d'affectation.

La France proposera la modification des textes précisant les modes de fonctionnement des compagnies.

La portée des formulaires attestant de la législation applicable en cas d'inexactitude voire de fraude devrait faire l'objet de précisions par la Cour de justice de l'Union européenne. La France soutiendra la remise en cause des formulaires qui attestent d'une décision de législation de sécurité sociale erronée ou obtenue par fraude.

M. Vincent Capo-Canellas.  - Merci. La mobilisation des services de l'État sera utile pour lutter contre la fraude et garantir l'application des textes. Je prends acte de l'engagement du Gouvernement sur la révision de la directive.

Droit à l'image des monuments historiques

M. Louis-Jean de Nicolaÿ .  - Le propriétaire d'un monument historique supporte de lourdes charges d'entretien sans bénéficier du contrôle de son image, alors que les créations architecturales récentes sont, elles, protégées par le droit d'auteur. Toute personne tirant des revenus commerciaux de prises de vues ou de l'image d'un monument historique devrait contribuer à l'entretien du monument concerné : c'est la logique du mécanisme d'autorisation préalable du gestionnaire pour toute utilisation à des fins commerciales de l'image des immeubles qui constituent les domaines nationaux, mis en place par la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine (LCAP).

La liberté de panorama, votée dans la loi pour une République numérique, exclut du domaine commercial les reproductions et représentations d'oeuvres architecturales et de sculptures placées en permanence sur la voie publique, diffusées par les particuliers sur les réseaux sociaux. Qu'en pensez-vous, madame la ministre, et quelles actions concrètes pourraient être prises en la matière ?

Mme Marie-France de Rose.  - Très bien.

Mme Audrey Azoulay, ministre de la culture et de la communication .  - Le droit à l'image des domaines nationaux a été introduit par amendement parlementaire dans la loi LCAP. Le ministère a établi une liste indicative d'une vingtaine de domaines, qui sera in fine fixée par décret en Conseil d'État. Une liste de six domaines dont le périmètre ne fait pas débat a d'ores et déjà reçu l'avis favorable de la Commission nationale des monuments historiques et le décret a été adressé au Conseil d'État. Les autres domaines nationaux feront l'objet de décrets complémentaires.

La France compte 43 000 immeubles protégés au titre des monuments historiques, mais qui ne présentent pas la même dimension symbolique que les monuments nationaux. Nous ne souhaitons pas privatiser l'image du patrimoine monumental, et la jurisprudence de la Cour de cassation permet déjà la compensation d'un trouble de jouissance anormal du propriétaire.

Les propriétaires n'étant pas les concepteurs des monuments, on ne saurait leur étendre le bénéfice du droit à l'image sur les créations architecturales récentes.

Je rappelle enfin que la hausse des autorisations d'engagement dédiées aux monuments historiques atteint 6 % en 2017 : en moyenne, les crédits ont été de 335 millions d'euros par an, contre 313 sous le précédent quinquennat.

M. Louis-Jean de Nicolaÿ.  - Bien sûr, on ne peut pas protéger le droit à l'image pour les 43 000 monuments historiques, mais certains sont particulièrement reconnaissables, et leur image parfois utilisée à des fins commerciales, par exemple pour vendre des glaces... Il faudrait en tenir compte.

Merci d'avoir maintenu les crédits : notre patrimoine en a besoin.

Émission « La Rue des allocs »

M. Roland Courteau, en remplacement de M. Yannick Vaugrenard .  - M. Yannick Vaugrenard, que je vous prie d'excuser, attire l'attention du Gouvernement sur l'émission « La Rue des allocs » diffusée par la chaîne M6.

Diffusée le 17 août et le 17 novembre 2016, cette émission, présentée comme un « documentaire-réalité », filme des habitants du quartier de Saint-Leu, l'un des plus pauvres d'Amiens.

Nos concitoyens ont été choqués par la stigmatisation, les clichés - alcoolisme, travail au noir - et les préjugés que véhicule l'émission à l'égard des personnes en grande difficulté financière et sociale.

La Fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale (Fnars) a saisi le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) pour qu'il fasse cesser la diffusion de l'émission. Or si celui-ci a déploré le choix du titre de l'émission, « à connotation péjorative, et qui ne reflétait d'ailleurs pas la diversité des situations et des comportements des résidents du quartier de Saint-Leu à Amiens », il n'a relevé aucun « manquement de M6 à ses obligations ». Décision surprenante !

Des habitants de Saint-Leu ont été insultés devant chez eux, l'émission ayant divulgué leur adresse. Cette émission est manifestement contraire à la loi visant à lutter contre la discrimination à raison de la précarité sociale du 24 juin 2016 - on ne peut tolérer une telle absence d'éclairage ou de contrepoint.

Nous traversons une période difficile, qui rappelle les plus sombres de notre histoire, et d'aucuns cherchent des boucs émissaires. Pauvres et stigmatisés, cette double peine a assez duré ! Quelles mesures ont été engagées afin que de telles initiatives ne se renouvellent pas ?

Mme Audrey Azoulay, ministre de la culture et de la communication .  - Cette émission a en effet provoqué de vives réactions de la part des téléspectateurs et des associations, dont la Fnars, qui a demandé au CSA de faire suspendre un programme qualifié de stigmatisant et honteux.

Le CSA a considéré que la chaîne n'avait méconnu aucune de ses obligations légales. Il est dans son rôle en garantissant l'exercice de la liberté de communication audiovisuelle dans les conditions que prévoit la loi, et ce n'est pas au ministre de la communication de se substituer à une autorité indépendante, quand bien même on ne se retrouverait pas dans la représentation donnée par cette émission de la réalité d'un quartier populaire, dans sa diversité.

La loi Égalité et citoyenneté a d'ailleurs renforcé le rôle du CSA dans la lutte contre les préjugés diffusés par voie audiovisuelle. Je me réjouis que le débat public y concoure.

M. Roland Courteau.  - De telles émissions sont inadmissibles et indignes de la République. Merci des initiatives utiles que vous prenez pour faire cesser ces discriminations et stigmatisations.

Évolution de la profession des infirmiers anesthésistes

M. Vincent Capo-Canellas, en remplacement de Mme Valérie Létard .  - Veuillez excuser Mme Létard. La profession infirmière anesthésiste est une catégorie distincte, sanctionnée par une formation de niveau master 2. Le décret d'actes des infirmiers anesthésistes diplômés d'État a été actualisé en septembre 2016 et une concertation a été engagée avec les organisations syndicales sur les questions statutaires. Les réunions des 12 et 25 janvier derniers ont acté la création d'un corps distinct des infirmiers anesthésistes diplômés d'État, ainsi que des propositions financières qui restent toutefois insuffisantes par rapport à la grille indiciaire de catégories équivalentes.

Il ne reste que quelques semaines pour faire aboutir une négociation qui aura duré pendant la totalité du quinquennat. Allez-vous finaliser un accord qui prenne en compte les attentes d'une profession, certes peu nombreuse mais essentielle pour le fonctionnement des blocs opératoires ?

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - Veuillez excuser Mme Touraine, qui est en Chine avec le Premier ministre. Les infirmiers anesthésistes sont les partenaires indispensables des médecins anesthésistes et réanimateurs. La profession évolue, leurs attentes sont légitimes.

Dès 2012, un travail a été engagé. Leur formation a été revue. Un groupe de travail a été constitué en 2015, impliquant les infirmiers, les médecins anesthésistes mais aussi les urgentistes. Nous avons actualisé le décret définissant la profession, actuellement en cours d'examen au Conseil d'État. La grille indiciaire a été modifiée en 2012, puis en 2015.

Des négociations salariales sont en cours, des propositions ont été adressées aux organisations syndicales et seront soumises au conseil supérieur de la fonction publique hospitalière le 16 mars. Bref, le dossier aboutira avant la fin de la mandature.

M. Vincent Capo-Canellas.  - Il aura tout de même fallu cinq ans... Le travail de nuit des infirmiers anesthésistes a des répercussions sur leur vie personnelle, qui n'ont jamais été prises en compte, et le différentiel de traitement en fin de carrière est de 500 à 600 euros par rapport à d'autres catégories équivalentes. Merci de ne pas laisser ce dossier au prochain Gouvernement !

Innovation en oncologie et recherche en cancérologie

M. Alain Vasselle .  - Les progrès de la recherche en cancérologie se sont accélérés ces dernières années. Sur environ 355 000 nouveaux cas recensés chaque année en France, un cancer sur deux est guéri, notamment grâce aux progrès de la recherche, et les innovations thérapeutiques améliorent la vie des patients.

Ces progrès permettent depuis plusieurs années de développer de nouveaux médicaments appelés « thérapies ciblées » qui préservent au maximum les cellules saines environnant une tumeur.

Plus récemment, les immunothérapies redonnent espoir à des patients atteints de cancer jusqu'alors sans thérapies efficaces.

L'association de molécules - thérapies ciblées et immunothérapies - offrira sans doute bientôt de nouvelles pistes pour combattre les tumeurs résistantes. Des réflexions au plan national sont en cours sur le coût des traitements du cancer et sur les enjeux éthiques, objet de polémiques.

Quelles actions les pouvoirs publics entendent-ils mettre en place pour favoriser la recherche et l'innovation en oncologie et faire bénéficier rapidement les patients des résultats des essais cliniques ?

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - La recherche en oncologie est soutenue par le ministère de la santé, le ministère de la recherche, l'Institut national du Cancer (INCa) et l'Alliance pour les sciences de la vie et de la santé (Aviesan).

Le ministère de la santé finance tous les ans un appel à projets dédié, le Programme hospitalier en recherche clinique national en cancérologie (PHRC-K) permettant de soutenir des équipes développant des traitements de pointe en la matière.

Chaque année, le PHRC-K soutient les projets de recherche innovants. En 2016, 20 millions d'euros ont financé plus de quarante projets, et l'INCa finance une douzaine d'appels à projets dédiés à la recherche en cancérologie, dont les traitements innovants.

Le ministère de la santé participe en outre au plan France médecine génomique 2005, piloté par l'Aviesan, sur les techniques innovantes de séquençage à très haut débit pour certains types de cancers ; les deux premières plateformes seront mises en place en 2017.

Le rapport d'étape du troisième plan cancer, présenté la semaine dernière au président de la République, rappelle que la France entend poursuivre son effort de recherche, notamment fondamentale, en France et à l'international. La prise en charge du diagnostic et des traitements du cancer a connu un virage. La recherche doit être au rendez-vous pour que le plus grand nombre de patients bénéficient de ces progrès.

M. Alain Vasselle.  - Je prends acte des efforts significatifs du Gouvernement en matière de lutte contre le cancer. Mais comment concilier ce soutien à la recherche et le financement par l'assurance maladie, sachant que les traitements innovants coûtent très cher ?

Le Gouvernement doit poursuivre sa réflexion pour sortir de ces polémiques inutiles qui mettent les laboratoires sur le banc des accusés et inquiètent les patients.

Capacité d'accueil insuffisante des instituts médico-éducatifs

M. Alain Vasselle, en remplacement de M. Jérôme Bignon .  - Veuillez excuser M. Bignon. Selon l'Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis (Unapei), 47 500 personnes handicapées sont toujours en attente d'un accompagnement de proximité et 6 500 autres sont accueillies en Belgique par le biais d'un financement de la sécurité sociale, faute de solution en France. Un fonds d'amorçage de 15 millions d'euros a été créé. Sera-t-il pérennisé ?

Le manque de places disponibles au sein d'établissements spécialisés laisse des familles dans un grand désarroi. L'accès aux Instituts médico-éducatifs (IME), dédiés aux enfants et adolescents qui y sont orientés par les Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), se heurte à des listes d'attente considérables.

À l'IME d'Abbeville, la liste d'attente est de cinq ans ; une soixantaine d'enfants ne bénéficie pas de réelle prise en charge. Les alternatives, comme l'inclusion en milieu scolaire, s'avèrent inadaptées pour de nombreuses familles et provoquent des situations dramatiques.

Quelles dispositions d'urgence et à long terme le Gouvernement compte-t-il prendre ?

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - Ces difficultés existent depuis de nombreuses années, et sur tout le territoire. Entre 2012 et 2016, 19 000 places ont été créées en France, mais des familles restent, c'est vrai, sans solution. J'ai découvert avec surprise, en arrivant au ministère, que nous ne disposions pas de données sur les places disponibles ou sur les besoins réels. Nous avons, avec le CNSA et les MDPH, développé un système d'information approprié, via Trajectoire.

Avec la loi Santé, les MDPH pourront, dès le 1er janvier 2018, mettre enfin tous les acteurs autour de la table et proposer un plan d'accompagnement global aux personnes qui se retrouvent sans solution. La Somme sera précurseur, dès 2017.

À Abbeville, un travail spécifique a été conduit pour réduire les listes d'attente, améliorer les sorties d'IME pour les jeunes adultes en créant, par exemple, six places dans la maison d'accueil spécialisée de Saint-Valéry-sur-Somme ou quinze places en semi-internat à Amiens.

Le fonds de 15 millions d'euros pour financer les places en Belgique est pérenne. De nouveaux crédits ont été prévus en 2017 avec les 180 millions annoncés en mai par le président de la République. L'ARS Hauts-de-France pourra engager dès 2017 3 millions d'euros sur cette enveloppe.

M. Alain Vasselle.  - Certes, des efforts ont été fournis mais beaucoup reste à faire. Je prends acte du travail engagé pour améliorer la connaissance des besoins et de l'offre, car l'attente n'est pas vivable pour les familles. J'ose espérer que nous réussirons à progresser sur ce sujet.

Phagothérapie

Mme Maryvonne Blondin .  - Les antibiotiques occupent encore une place prépondérante dans la lutte contre les maladies infectieuses humaines et animales. On dénombre 160 000 cas d'infections dues à un germe résistant, et 12 500 décès.

L'OMS alerte sur la nécessité de lutter contre l'antibiorésistance. Le Gouvernement a annoncé, le 18 novembre 2016, une feuille de route visant à maîtriser l'antibiorésistance ; 330 millions d'euros seront mobilisés sur cinq ans.

Mais l'utilisation des bactériophages est encore trop négligée, alors qu'elle permettrait de sortir d'impasses thérapeutiques.

Un projet européen associant les hôpitaux militaires de Belgique, de la Suisse et de Percy à Clamart a été créé ; que compte faire le Gouvernement pour développer la phagothérapie ?

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - L'utilisation des bactériophages est régulièrement évoquée, elle est déjà pratiquée en Géorgie, en Russie ou encore en Pologne.

Pour l'heure, en Europe, les bactériophages n'ont pas de statut spécifique, même si la définition du médicament est susceptible de leur être appliquée. En France, depuis 2013, un essai clinique européen Phagoburn est en cours à l'hôpital d'instruction des armées Percy. L'étude est conduite en coopération avec l'ANSM, l'institut suisse des produits thérapeutiques, l'agence fédérale des médicaments et des produits de santé belge et l'agence européenne des médicaments. À ce stade, il n'existe pas de recommandation européenne sur les bactériophages.

Cependant, l'ANSM a décidé la constitution d'un comité technique sur le sujet le 13 janvier 2016. Ce comité, qui s'est réuni à deux reprises en 2016, a dégagé trois critères justifiant un accès précoce aux bactériophages : pronostic vital engagé ou pronostic fonctionnel menacé, impasse thérapeutique et infection mono-microbienne.

Les phages sont l'une des approches thérapeutiques innovantes, parmi d'autres, également prometteuses, portées par des biotechnologies souvent françaises.

Mme Maryvonne Blondin.  - Je vous remercie pour ces précisions. Effectivement, les bactériophages ne sont pas la seule alternative à l'antibiorésistance. Ils ont cependant fait leurs preuves : grâce à eux, certaines amputations ont été évitées. J'espère que la France approfondira cette piste.

Syndrome d'alcoolisation foetale

M. Alain Milon .  - Ma question s'adressait à la ministre de la santé, je ne doute pas que le docteur Neuville pourra y répondre. Je m'inquiète du format du message à caractère sanitaire à destination des femmes enceintes qui doit figurer sur le conditionnement des boissons alcoolisées, et qui prend en pratique la forme d'un pictogramme.

Cette obligation résulte d'une initiative de la commission des affaires sociales du Sénat, et plus particulièrement d'Anne-Marie Payet, qui s'est engagée de longue date dans la prévention des pathologies liées à l'alcool, notamment s'agissant du syndrome d'alcoolisation foetale (SAF).

Alors même qu'il est largement évitable, puisqu'il résulte principalement de la mauvaise information des femmes enceintes, le SAF continue de constituer la première cause de handicap non génétique chez l'enfant. Dans les cas les plus graves, il peut entraîner la mort in utero ; la plupart du temps, il est à l'origine de troubles neuro-développementaux divers, qui ont des effets pour toute la vie.

Face à ce fléau, la communauté scientifique comme la classe politique ont montré une mobilisation accrue au cours des dernières années, qui devrait porter ses fruits à moyen terme. Une action déterminante pourrait cependant être engagée dès aujourd'hui, par voie réglementaire, pour remédier au caractère illisible du logo de prévention pour les femmes enceintes.

De très petite taille, il est en effet souvent à peine discernable, d'autant qu'il apparaît le plus souvent en noir et blanc. Dans son rapport du 22 mars 2016, l'académie de médecine relevait d'ailleurs que ce pictogramme est « à totalement reconsidérer dans sa taille, son symbole, son positionnement et sa lisibilité ».

Le Gouvernement a-t-il d'ores et déjà engagé des travaux pour y remédier ?

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - Monsieur le président de la commission des affaires sociales, vous avez raison : la consommation d'alcool pendant la grossesse, même en très petite quantité, peut avoir des conséquences graves sur la santé de l'enfant. Concrètement, 700 à 1 000 enfants sont concernés chaque année par le SAF. Selon une enquête de 2010, 17 % des femmes enceintes ont bu de l'alcool une fois par mois, plus de 2 % deux fois par mois voire davantage.

Les fabricants privilégient l'harmonie du packaging aux dépens du message à caractère sanitaire, obligatoire depuis 2007. Résultat, d'après une enquête de la direction générale de la santé en 2012, un quart des buveuses déclarent ne même pas l'avoir remarqué.

Le Comité interministériel du handicap du 2 décembre dernier a décidé une mesure visant à améliorer la lisibilité et la visibilité du pictogramme. Un groupe de travail a été créé pour élaborer une charte graphique garantissant la bonne diffusion du message de prévention. Ses travaux débuteront en mars. Jusqu'au dernier jour, nous oeuvrerons pour la santé publique.

M. Alain Milon.  - Je ne souhaite à personne ce dernier jour... Au mois de mai, nous avons participé à une réunion de travail à La Réunion où le SAF est particulièrement développé. Nous avions conclu à l'importance d'une information plus visible pour que chaque femme enceinte ait conscience qu'elle joue à la roulette russe lorsqu'elle boit un verre d'alcool.

Prise en charge psychiatrique des 16-25 ans

M. Yves Daudigny .  - Je veux attirer l'attention du Gouvernement sur l'absence de prise en charge adaptée des jeunes patients en psychiatrie.

Dans l'Aisne, les jeunes souffrant de troubles psychiatriques peuvent être accompagnés par une unité de pédopsychiatrie pour adolescents en cas d'hospitalisation à temps plein, par une des équipes du centre psychothérapeutique pour adolescents pour une hospitalisation de jour ou de liaison pour un suivi externe.

Selon son degré d'autonomie et d'avancement dans son parcours de soins, chaque jeune trouve une réponse adaptée à sa situation dans un délai raisonnable jusqu'à 16 ans.

À partir de 16 ans et 3 mois, les jeunes relèvent de la psychiatrie adulte. Alors que leurs maladies ne sont pas encore nécessairement installées et qu'ils apprennent à les appréhender, ils se trouvent en contact avec des patients adultes, à des stades différents de leurs maladies. Cette mixité pose problème tant pour les patients que pour les soignants, qui ne peuvent pas adapter leurs soins.

Partant de ce constat, les soignants de l'établissement de santé mentale départemental de l'Aisne proposent la mise en place, à titre expérimental, d'une structure spécifique, adaptée aux jeunes de 16 à 25 ans, pour assurer une continuité dans leurs parcours de vie et de soins. Elle éviterait des hospitalisations graves et onéreuses.

Dans un département largement touché par les suicides, par l'alcoolisme et les addictions, sous-doté en personnel médical, elle représenterait un outil de santé public pertinent. Nous espérons l'entier soutien du Gouvernement.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - L'extension de la psychiatrie infanto-juvénile jusqu'à 18 ans a fait l'objet de préconisations dans les récents rapports Laforcade et Moro-Brison.

Le comité de pilotage de la psychiatrie, mis en place le 17 janvier 2017, en a fait sa priorité. Une réflexion sera donc menée dans les mois à venir, en tenant compte de la démographie des professionnels.

Sans attendre et sous l'impulsion constante du ministère des affaires sociales et de la santé, le territoire a été maillé de maisons des adolescents pour accueillir les jeunes de 11 à 25 ans. La circulaire du Premier ministre du 28 novembre dernier renforce ce dispositif. En outre, de nombreux établissements ont mis en place des structures spécialisées pour adolescents : en 2014, on en recensait 209.

La ministre demandera à l'agence régionale de santé des Hauts-de-France d'apprécier la faisabilité technique de l'expérimentation proposée dans l'Aisne, qui paraît tout à fait intéressante, et d'étudier les modalités éventuelles d'un accompagnement financier sur des crédits du fonds d'intervention régional.

M. Yves Daudigny.  - Merci. Nul besoin d'insister au Sénat, qui a lancé une mission d'information sur la psychiatrie des mineurs, sur la nécessité de maintenir la pédopsychiatrie et de l'articuler avec la psychiatrie pour adultes.

L'Aisne est un département de réussite économique et culturel en même temps qu'un territoire de grande souffrance humaine. Je souhaite apporter la réponse la plus efficace aux jeunes de 15-25 ans en évitant des prises en charge coûteuses.

Laissez-moi citer à cette occasion le livre Je suis ado et j'appelle mon psy de Thierry Delcourt, professionnel d'un département voisin.

Intolérance aux radiations électromagnétiques artificielles

M. Alain Duran .  - J'ai été récemment saisi du cas d'une personne confrontée à des conditions de vie très problématiques, en raison de l'isolement auquel elle est contrainte pour se protéger des radiations électromagnétiques artificielles. Il en résulte des conséquences en termes de conditions de vie, d'accès à l'emploi, à la sociabilité et aux services essentiels.

Cette situation risque d'être encore dégradée par l'autorisation accordée en 2015 à Orange de démanteler le parc de cabines téléphoniques que l'entreprise restait tenue de maintenir, en vertu du principe de service universel d'accès au téléphone, lequel est désormais relativisé par le développement de la téléphonie mobile.

Le retrait des dernières cabines téléphoniques en état de fonctionner risque de constituer une perte définitive, extrêmement préjudiciable, pour l'accès aux télécommunications. La personne qui a sollicité mon attention est contrainte de résider dans une habitation mobile, afin de rester éloignée des radiations. La cabine téléphonique est le seul lien avec ses proches et le monde extérieur. Elle n'est certainement pas la seule dans ce cas.

Quelles mesures entendez-vous prendre pour lutter contre cette exclusion ?

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - L'article 129 de la loi Croissance et activité a retiré la publiphonie du périmètre du service universel, mais non sans précaution. Orange s'est engagé à ne pas retirer les cabines dans les lieux non couverts par le réseau mobile et à informer les élus.

En 2009, l'Anses n'a pas pu démontrer le lien entre les émissions électromagnétiques et les souffrances des personnes hypersensibles. Elle prépare un nouveau rapport pour 2017.

Nous ne pouvons pas, pour autant, ignorer ces souffrances. Depuis juillet 2012, une expérimentation médicale est menée à l'hôpital Cochin. Les patients ont été reçus dans le centre de consultations de pathologies professionnelles et de l'environnement de leur région, un suivi de leurs symptômes a été effectué durant un an.

En attendant les conclusions de l'Anses ainsi que le rapport sur l'électrosensibilité prévu par l'article 8 de la loi du 9 février 2015, de nouvelles mesures paraissent prématurées.

M. Alain Duran.  - Nous attendons avec impatience les conclusions de ces travaux. Les souffrances des personnes hypersensibles sont bien réelles, je salue l'engagement que vous avez pris de les considérer.

Hôpital Jean-Verdier de Bondy

M. Gilbert Roger .  - Depuis le regroupement des trois hôpitaux de Seine-Saint-Denis - Avicenne, Jean-Verdier et René-Muret - en un groupe hospitalier, la direction de l'assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP) a décidé le départ des services de pointe de l'hôpital Jean-Verdier, notamment de ceux de cancérologie et de chirurgie digestive. Et voici qu'un groupe de travail prévoit de transférer encore une fois à l'hôpital Avicenne les services d'hépato-gastroentérologie, de réanimation, la radio interventionnelle, l'école d'infirmières, la maternité, la pédiatrie et la procréation médicale assistée. C'est à couper le souffle ! D'autant que l'AP-HP se renseignerait pour valoriser les terrains qu'occupe l'école d'infirmières pour y réaliser une opération immobilière juteuse.

Le droit à l'accès aux soins pour tous est menacé. L'hôpital Jean-Verdier doit rester un hôpital universitaire de proximité répondant aux besoins de la population. L'AP-HP doit renoncer à ces funestes projets.

Je vous demande, madame la ministre, de bien vouloir mettre un terme à ces transferts de services du CHU Jean-Verdier vers Avicenne.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion .  - Je vous demande d'excuser l'absence de Marisol Touraine. L'objectif du nouveau groupe hospitalier est de mutualiser les équipements et services techniques au bénéfice des patients, afin qu'ils jouissent d'un parcours de soins complet.

Des réflexions sont engagées sur l'offre de soins. Cependant, ces réflexions ne préjugent pas des décisions de l'AP-HP qui devra s'assurer que tous les habitants ont accès aux soins. L'AP-HP est très attachée à Jean-Verdier : elle a engagé une opération de modernisation de plus de 8 millions d'euros pour rénover les urgences adultes et de pédiatrie ainsi que l'unité médico-judiciaire. Une structure ambulatoire innovante pourrait y voir le jour pour allier soin de proximité et excellence universitaire afin de mieux répondre aux besoins d'une population confrontée à un fort déficit en consultations générales et spécialisées.

M. Gilbert Roger.  - En vérité, les 8 millions d'euros seront plus que couverts par la vente des terrains. Ce que programme l'AP-HP, c'est tout simplement la disparition de l'hôpital Jean-Verdier.

Maintien d'une liaison ferroviaire directe entre Paris et Malesherbes

M. Jean-Pierre Sueur .  - Malesherbes, qui appartient désormais à la commune nouvelle du Malesherbois, est la seule commune du Loiret reliée directement à Paris, par le RER D. Environ 600 personnes par jour empruntent cette ligne, sur laquelle on déplore un nombre élevé de retards.

Le projet de mettre fin à cette liaison directe et d'imposer un changement de train à Corbeil aurait immanquablement pour effet de dégrader les conditions dans lesquelles les usagers du Malesherbois effectuent leurs déplacements et d'augmenter sensiblement la durée de leur trajet. Environ 12 000 usagers, qui prennent leur train dans les gares situées au sud de Corbeil, seraient également touchés. Les circulations se reporteraient du train vers la voiture, ce qui serait également préjudiciable à tous ceux qui doivent se rendre chaque jour à Paris pour y travailler. Le 13 janvier, j'ai reçu une lettre de la SNCF (On fait remarquer à l'orateur, qui montre ladite lettre, qu'il doit s'en estimer heureux) où l'on me promet de belles locomotives et moins de retards en contrepartie de la suppression de la liaison directe.

Madame la ministre, je redouble donc ma question : soutiendrez-vous le maintien de la liaison directe ? J'attends avec espoir votre réponse.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité .  - Le renforcement et l'amélioration du réseau existant sont la première préoccupation du ministre des transports. La ponctualité du RER D de 85,5 % est réduite à 64 % au sud de Corbeil-Essonnes. Malgré les efforts de la SNCF, la hausse du trafic aggrave la situation. D'où la modification de la structure de l'offre envisagée. Le 11 janvier dernier, le STIF a délibéré. La SNCF a conduit un travail d'analyse en concertation avec les élus et les associations d'usagers.

Difficultés de Goussainville à Châtelet le soir, complexité de la circulation à Corbeil et saturation prévisible entre Melun et Paris le matin, des solutions ont été envisagées pour toutes les fragilités identifiées sur cette ligne. La simplification du noeud de Corbeil conduirait à réduire la longueur du RER D vers le sud et à envisager la suppression de la desserte directe de Malesherbes qui ne fonctionne pas bien. Une correspondance robuste entre la branche de Malesherbes et le tronc principal du RER D serait organisée.

Le secrétaire d'État aux transports a cependant pris note des réticences des usagers et des élus, il demandera au STIF d'examiner la possibilité de maintenir des trains directs.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Vous indiquez un taux de ponctualité de 64 %. Cela signifie plus d'un train sur deux en retard ! Supprimer une ligne directe améliorera-t-il vraiment le sort des voyageurs ? Je vous remercie sincèrement pour l'ouverture dont vous nous avez fait part à la fin de votre propos.

Sécurisation de la route nationale 248 à Frontenay-Rohan-Rohan

M. Philippe Mouiller .  - La route nationale 248 à hauteur de la commune de Frontenay-Rohan-Rohan, particulièrement accidentogène, doit être sécurisée. Cette opération d'aménagement routier a été retenue dans le cadre du volet mobilité multimodale du CPER 2015-2020, une enveloppe de 16 millions d'euros a été dégagée. Or ces crédits n'ont pas été alloués sur l'exercice 2016 et nous manquons d'informations pour 2017.

Dans quels délais ces travaux seront-ils effectivement entamés et la sécurisation de ce carrefour sera-t-elle achevée ?

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité .  - L'État a pleinement conscience de l'importance de la sécurisation de la route 248. Deux carrefours avec le réseau secondaire départemental ont été identifiés : celui avec la RD 118, dit carrefour du silo, et celui avec la RD 102. Alain Vidalies souhaite un échange en un seul point avec la route nationale 118 par un carrefour dénivelé. Toutefois, au vu des disponibilités budgétaires, l'opération ne pourra pas être lancée dès 2017. L'étude d'opportunité sera engagée à partir de 2018. Si le projet est approuvé, viendront ensuite les études techniques et environnementales puis les acquisitions foncières.

M. Philippe Mouiller.  - Madame la ministre, la programmation du CPER s'achève en 2020. Si tant est que les crédits soient reconduits, les habitants et les élus locaux devront attendre longtemps avant de voir les travaux achevés.

Ligne ferroviaire Carcassonne-Quillan

M. Roland Courteau .  - À de nombreuses reprises, j'ai alerté le Gouvernement sur le projet de la direction régionale de SNCF Réseau de fermer le segment ferroviaire Limoux-Quillan à la fin de l'année 2017. L'engagement avait été pris dans le CPER de rénover et d'exploiter l'ensemble de la ligne. La décision de la SNCF est d'autant plus inacceptable que ce segment connaît une hausse de fréquentation ces dernières années. On sait son importance pour le développement économique du territoire - les projets fret, nombreux, ne se concrétisent pas faute d'investissement - et le tourisme. L'enjeu est également environnemental. Madame la ministre, vous qui êtes attachée au développement durable, pouvez-vous nous donner des assurances ?

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité .  - Dans le CPER 2011-2013, 1 million d'euros était prévu pour financer des études sur cette ligne. Dans le CPER 2015-2020, pas moins de 11 millions d'euros ont été investis par l'État. Ce montant permet de traiter la section entre Carcassonne et Limoux, c'est un engagement fort pour la haute vallée de l'Aude. La première phase des travaux sur la ligne Carcassonne-Quillan s'achèvera en mars 2017, la deuxième phase au premier trimestre 2018.

La rénovation de la portion Limoux-Quillan, de 30 kilomètres, représente un investissement de 40 millions d'euros qui n'est pas financé. Il faut chercher les réponses les plus pertinentes. Le nouvel exécutif de la région Occitanie a organisé des états généraux du rail durant lesquels a été jugée prioritaire la sauvegarde de la ligne Carcassonne-Quillan. Les investissements en faveur de la section Limoux-Quillan devront relever, soit des collectivités territoriales, soit du prochain contrat de plan.

Convention de Berne sur les loups

M. Gérard Bailly .  - Madame la ministre, je vous interpelle en tant que président du groupe d'études sur l'élevage avec mes convictions et mes tripes. En 1979, l'année où la convention de Berne a été signée, le nombre de loups était très limité, ce n'est plus vrai. On estime qu'il atteint désormais environ 500. La présence du loup est désormais signalée dans tous les massifs français de l'est de la France jusqu'en Lorraine, sa prolifération est particulièrement rapide dans le Massif central et, tout particulièrement, en Lozère et en Aveyron. Les plans loup n'ont pas permis d'enrayer le phénomène. Veut-on complètement décourager nos éleveurs ? Va-t-on les laisser seuls protéger leurs bêtes parce que le loup est considéré comme une espèce protégée ? On leur demande de veiller au bien-être animal, ils voient 9 000 de leurs bêtes mourir dans d'atroces souffrances chaque année. (L'orateur brandit des photographies) On aimerait entendre l'association L214 sur ce sujet. Le 4 février 2017, Le Progrès a publié les chiffres italiens : 100 à 150 loups dans les Alpes, 1 070 à 2 472 dans les Apennins. Et on parle d'une espèce en voie de disparition ? Les éleveurs, pour défendre leurs troupeaux, utilisent des chiens patous qui leur valent des procès de la part des randonneurs.

Le Gouvernement a-t-il demandé la révision de la convention de Berne ? Cet après-midi, l'Assemblée nationale accueille les rencontres parlementaires du loup ; c'est dire si nous espérons, madame la ministre, une réponse précise de votre part.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité .  - Nous sommes très attachés à la protection du patrimoine naturel mais aussi au maintien du pastoralisme. La France se doit de respecter la convention de Berne pour les 300 loups recensés sur notre territoire.

Il serait absurde de nier que le retour du loup est synonyme de profonds bouleversements pour la gestion des troupeaux. Le dossier « loup » ne doit plus être géré au coup par coup, nous avons besoin d'une stratégie claire et partagée par tous. Le 7 juillet 2016, j'ai lancé une démarche d'évaluation prospective du loup en France à l'horizon 2025-2030.

Depuis cent ans, les éleveurs ont vécu sans le loup. Nous leur demandons de s'adapter. L'État est à leurs côtés pour sauvegarder le pastoralisme. La formation des éleveurs et l'utilisation de certains chiens - les patous - doivent être prises en compte.

M. Gérard Bailly.  - J'ai posé, comme M. Gremillet avant moi, une question écrite sur la révision de la convention de Berne. À une époque où l'argent est rare, nous avons dépensé 1,32 million pour le loup en 2004 puis 12 millions d'euros en 2014 et 18,2 millions d'euros en 2015 sans compter les aides apportées aux éleveurs. Je préfère voir mourir quelques loups plutôt que des milliers de bêtes dans des conditions atroces.

Concessions hydroélectriques des vallées du Lot et de la Truyère

M. Alain Marc .  - Le rapport d'information du 26 octobre 2016 de l'Assemblée nationale a rappelé le rôle déterminant de l'hydroélectricité dans le mix énergétique français et dans la transition énergétique à venir, rôle qui a été confirmé par la programmation pluriannuelle de l'énergie.

La loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique a introduit la possibilité pour l'État de prolonger des concessions hydroélectriques pour y réaliser des investissements. L'État, qui défend cette option pour les concessions de la vallée du Rhône, devrait la considérer pour les barrages des vallées du Lot et de la Truyère. Elle est synonyme d'emplois et de ressources pour les collectivités. Quelles sont les intentions du Gouvernement ?

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité .  - Le Gouvernement défend une mise en oeuvre équilibrée de la loi qui a consolidé le régime de la concession : regroupement des concessions, prorogation de la concession en contrepartie d'investissements, possibilité de constituer des sociétés d'économie mixte lors du renouvellement des concessions.

Ce dossier fait l'objet d'échanges avec la Commission européenne, dans le cadre de la procédure ouverte par la mise en demeure adressée à la France en octobre 2015. Le traitement des concessions hydroélectriques dans la vallée du Lot et de la Truyère s'inscrira dans la réponse globale et équilibrée que la ministre recherche avec la Commission européenne.

M. Alain Marc.  - Les barrages du Lot et de la Truyère produisent 10 % de l'énergie hydroélectrique en France. À la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale où je siégeais auparavant, nous étions tous d'accord pour les considérer stratégiques. EDF doit continuer à les exploiter, le contraire serait inconcevable.

Réfection des locaux du commissariat d'Épernay

Mme Françoise Férat .  - Le commissariat de police d'Épernay est si vétuste que les policiers ne peuvent travailler ni recevoir les usagers convenablement, en assurant la confidentialité des dépôts de plainte. Les légers travaux de réhabilitation d'urgence ne suffisent pas. Le Secrétariat général pour l'administration de la police de Metz avait fait de ce dossier une priorité, et le 19 novembre 2013, Hélène Conway-Mouret nous assurait qu'il recevait toute l'attention du ministère. Dès la fin décembre 2012, le Gouvernement s'était engagé devant les députés à étudier la faisabilité du projet de rénovation dans le cadre de la prochaine programmation triennale, aujourd'hui échue... Le 26 octobre dernier, le Premier ministre annonçait une enveloppe de 250 millions d'euros et une enveloppe supplémentaire pour des travaux de maintenance devenus urgents dans les commissariats et les casernes. Cet argent n'est pas arrivé dans la Marne !

Le commissariat de police d'Épernay, comme l'hôtel de police de Metz, doit être entièrement rénové. Quand tiendrez-vous vos engagements ?

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité .  - Les conditions de travail des policiers sont un sujet essentiel, y compris pour les citoyens et les victimes. Nous leur devons un service public moderne. C'est pourquoi les crédits d'équipement et d'investissement de la police sont en hausse depuis le début du quinquennat. Face aux besoins considérables, le ministre de l'Intérieur a annoncé fin octobre un plan de sécurité publique de 250 millions d'euros, dont 16 millions consacrés à des travaux immobiliers urgents, délégués dès le 4 novembre aux services territoriaux.

Le commissariat d'Épernay, incontestablement vétuste, fait l'objet régulièrement de travaux d'urgence : rénovation de l'accueil et sécurisation en 2015 et 2016. Le plan de sécurité publique permettra de financer des travaux de sécurité incendie et sur la tuyauterie de chauffage. Il faudra aller au-delà. Plusieurs hypothèses ont été émises : construction neuve sur le site actuel ou ailleurs, extension-réhabilitation... Cette dernière solution semble techniquement la plus fiable. Dans le contexte budgétaire contraint, ce projet de 6 millions d'euros élaboré n'a pas encore pu être programmé.

Mme Françoise Férat.  - Si vous parlez de travaux urgents pour la réparation d'un tuyau... Encore une fois, le Gouvernement se contente de mesures d'affichage. Les sommes annoncées ne sont jamais dépensées. J'inviterai le ministre de l'Intérieur à venir constater lui-même l'état de délabrement du bâtiment.

Nous saluons tous le travail de la police ; il vous revient de leur offrir des conditions de travail convenables.

La séance, suspendue à 11 h 35, reprend à midi.

Augmentation des frais bancaires

M. Dominique Bailly .  - Fin 2016, les établissements bancaires ont annoncé une hausse importante de leurs tarifs. Ainsi, les frais de tenue de compte augmentent en moyenne de 13 %, avec un pic à plus de 90 % pour la Banque Postale et plus de 40 % pour la Banque Populaire. Les cotisations sur les cartes bancaires augmentent aussi, de plus de 3 % sur les cartes à débit immédiat, et même de 5 % à la Banque Populaire et à la Caisse d'Épargne. S'agissant enfin des retraits d'argent dans les distributeurs d'autres établissements, le prix annuel moyen pour cinq retraits augmente de 4,5 %, avec une hausse de 23 % dans les Banques Populaires, celle du Nord ayant même prévu de multiplier son tarif par trois en faisant payer un euro par retrait déplacé.

Je sais le Gouvernement attentif à l'évolution de ce secteur. De nombreuses réformes ont été engagées pour que les clients puissent faire jouer plus facilement la concurrence. Quelles actions envisage-t-il pour inciter les établissements bancaires à limiter ces frais ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation .  - La protection des consommateurs est un enjeu central de la régulation financière, et le Gouvernement est attentif à la question des frais bancaires, qui touchent en particulier les personnes les plus en difficulté. Certains tarifs bancaires ont été encadrés par la loi du 26 juillet 2013 : les commissions d'intervention ont été plafonnées à 80 euros par mois et 8 euros par opération, et même à 20 euros par mois et 4 euros par opération pour les personnes les plus en difficulté qui souscrivent l'offre spécifique instituée par la loi ou bénéficient des services bancaires de base dans le cadre du droit au compte. Le tarif de l'offre spécifique a lui-même été plafonné à 3 euros par mois.

Second levier utilisé par le Gouvernement, le renforcement de la concurrence. Les banques ont été obligées à plus de transparence sur leurs tarifs, et doivent avertir leurs clients avant tout prélèvement de frais d'incident ; la dénomination des frais et tarifs a été harmonisée pour faciliter les comparaisons. Un comparateur public est désormais disponible en ligne. Enfin, depuis février, les clients peuvent changer d'établissement plus aisément grâce au mécanisme de mobilité bancaire.

S'agissant plus précisément des frais de tenue de compte, un rapport du président du Comité consultatif du secteur financier, remis cet automne, souligne que plus de la moitié des clients en sont exonérés. La réflexion se poursuit.

M. Dominique Bailly.  - Merci de ces informations.

Dégradation du climat social au sein de l'Office européen des brevets

M. Richard Yung .  - Le climat social au sein de l'Office européen des brevets (OEB) se dégrade. Depuis 2010, le programme de réformes mis en oeuvre par la direction de l'OEB a porté atteinte à certains droits fondamentaux : droit de grève, liberté syndicale, droit à la négociation collective. L'OEB est l'organisation le plus souvent mise en cause devant le tribunal administratif de l'Organisation internationale du travail (TAOIT). Dans un arrêt de 2015, la Cour d'appel de La Haye a jugé illégales plusieurs mesures prises par la direction de l'OEB ; cette dernière s'est pourvue en cassation, invoquant l'immunité d'exécution. Depuis le début de l'année 2016, plusieurs sanctions ont été prononcées à l'encontre de délégués syndicaux : trois ont été licenciés et un rétrogradé. Des enquêtes et des procédures disciplinaires sont encore en cours.

Dans une résolution adoptée le 16 mars 2016, le conseil d'administration de l'OEB demande à son président de « veiller à ce que les sanctions et procédures disciplinaires soient non seulement équitables, mais aussi considérées comme telles, et d'étudier la possibilité de faire appel à une instance externe de réexamen, d'arbitrage ou de médiation ». Cette résolution a été ignorée par la direction de l'OEB, qui s'est contentée d'organiser une conférence sociale « Potemkine ».

Le bon fonctionnement de l'OEB étant indispensable au succès du futur brevet à effet unitaire, quelles solutions le Gouvernement envisage-t-il de proposer, par le truchement de la délégation française au conseil d'administration de l'OEB ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation .  - L'OEB est une organisation intergouvernementale opérationnelle depuis 1977 dont le conseil d'administration réunit les trente-huit États membres. Celui-ci a décidé de réformer le statut du personnel pour assurer la viabilité financière de l'organisation. En février 2015, la cour d'appel de La Haye a mis en cause certaines décisions internes à l'OEB, qui s'est pourvu auprès de la Cour suprême des Pays-Bas, laquelle a annulé les jugements et confirmé l'immunité juridictionnelle de l'office le 20 janvier 2017.

En mars 2016, la France a soutenu la résolution du conseil d'administration appelant à répondre rapidement à la problématique sociale de l'office. Cette résolution prévoyait un audit social, la présentation au conseil d'une évolution du règlement du personnel et la suspension des procédures disciplinaires engagées.

L'étude du cabinet PricewaterhouseCoopers, rendue en octobre 2016, témoigne d'un climat social dégradé qui nuit à l'image de l'organisation, mais aussi à l'image de la France - malgré des conditions de rémunération qui restent favorables. Elle propose des solutions.

Les représentants français au conseil d'administration seront attentifs à ce que soient trouvées les voies de l'apaisement. Pas moins de cinq ministres français se sont mobilisés à cet effet. Normaliser la situation est indispensable pour que l'office soit pleinement efficace, alors que le brevet européen à effet unitaire doit voir le jour.

M. Richard Yung.  - Vous avez raison, la situation actuelle nuit à la réputation de notre pays. Tout se passe au conseil d'administration de l'OEB, c'est là que la France doit faire entendre sa voix. Pourquoi ne pas convoquer un conseil des ministres en charge de la propriété intellectuelle qui pourrait, entre autres, débattre de ce dossier ?

CIR et fermeture des centres de recherche et développement d'Intel en France

Mme Brigitte Gonthier-Maurin .  - Je déplore que ma question, adressée au secrétaire d'État au budget qui était mon interlocuteur lors de la commission d'enquête sur le Crédit d'impôt recherche (CIR), ait été réorientée vers le secrétariat d'État à l'industrie.

L'été dernier, Intel a annoncé la fermeture de tous ses centres de recherche et développement et la suppression de 750 emplois de chercheurs et d'ingénieurs, soit près de 80 % des effectifs en France, sur les sites de Toulouse, Sophia-Antipolis, Montpellier, Aix et Rennes. Pourtant, Intel a bénéficié d'une prime à l'aménagement du territoire de 650 000 euros en 2009 pour l'ouverture du site toulousain, ainsi que du CIR, dont l'un des objectifs affichés est de créer des emplois... Selon Challenges, la créance de CIR d'Intel a atteint 8 millions d'euros en 2015 et même 28,5 millions entre 2010 et 2015 : « une mesure dispendieuse aux faibles retombées », conclut le magazine.

Dans le cas d'Intel, ce gaspillage d'argent public s'accompagne d'une véritable casse sociale, alors même que l'entreprise a dégagé en 2015 12 milliards de dollars de bénéfices et distribué 7,6 milliards de dividendes. Le cas n'est pas isolé...

Pourquoi donc refusez-vous de vous interroger sur l'efficacité de cette niche fiscale ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation .  - Le groupe Intel se restructure totalement, prévoyant la suppression de 11 % de ses effectifs, soit 12 000 emplois dont 750 dans notre pays sur environ un millier. Les compétences de ses employés sont reconnues à l'échelle mondiale. Le secrétariat d'État à l'industrie est très attentif à la situation d'Intel, de même que mes services, et notamment le Bureau de l'innovation de la Direction générale des entreprises (DGE). M. Sirugue et moi-même avons reçu les dirigeants d'Intel à plusieurs reprises et demandé la préservation de l'emploi, notamment à Toulouse et à Sophia. La question du remboursement de la prime d'aménagement du territoire sera examinée attentivement.

Je ne peux aborder en quelques minutes le sujet de la réforme du CIR, mais sachez que nous sommes déterminés à maintenir l'emploi sur notre territoire, à faire respecter par Intel ses obligations sociales et notamment les dispositions de la loi visant à reconquérir l'économie réelle de 2014 relatives à la revitalisation des bassins.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin.  - Même à Bruxelles, le CIR est vu comme un outil de dumping fiscal. Les services de Pierre Moscovici ont déclaré qu'il fallait nettoyer les niches. Un tel investissement public pose problème eu égard à son peu d'efficacité.

Révision des zones défavorisées agricoles

M. Jean-Marc Gabouty .  - La révision de la carte des zones défavorisées agricoles est en cours. Le ministère de l'agriculture a présenté une première carte le 22 septembre 2016, appliquant les huit critères biophysiques définis par l'Europe qui déterminent les communes affectées de handicaps naturels. Cette version provisoire exclut des communes aujourd'hui classées en zone défavorisée simple, où les agriculteurs ne pourraient donc plus bénéficier de l'Indemnité compensatoire de handicap naturel (ICHN), pourtant la seule subvention corrigeant les inégalités entre les zones défavorisées et les autres. C'est le cas en Haute-Vienne, notamment.

Cette situation serait aggravée par la suppression des aides à l'installation et de certaines aides à l'investissement présentant un taux d'aide supérieur pour les agriculteurs situés en zone défavorisée.

Lors de la deuxième étape, l'État dispose de marges de manoeuvre importantes. Des réunions et des simulations ont eu lieu. Le 29 décembre, le ministère de l'agriculture a fait état de la méthodologie employée et de certaines hypothèses, sans pour autant apporter d'assurances formelles aux agriculteurs concernés. Les rassurerez-vous ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation .  - Un rapport de 2003 de la Cour des comptes européenne l'a montré : les critères de classement, datant des années 1970, trop nombreux, trop divers, devaient être révisés, afin de préserver le système d'aides actuel.

Les cartes publiées en septembre, novembre et décembre n'étaient que les premières étapes d'un travail toujours en cours. Depuis la première mouture, le nombre de communes sortantes a été réduit de moitié. Nous voulons utiliser au mieux la marge de 10 % du territoire qui nous est laissée, sans élargir excessivement le zonage, ce qui fera baisser l'aide à l'hectare. En Haute-Vienne, quelques communes étaient exclues de la première carte, mais l'intégralité du département est couverte par la dernière version du zonage, comme la plus grande partie du bassin allaitant français. Là où il subsiste des difficultés, nous cherchons les critères adéquats pour prendre en compte les secteurs où l'élevage domine et où les agriculteurs sont en difficulté.

La prochaine réunion est prévue le 23 février, et la nouvelle carte sera publiée très prochainement.

M. Jean-Marc Gabouty.  - Merci de ces précisions rassurantes. Vous connaissez la précarité des agriculteurs, en particulier des éleveurs. Le soutien du Gouvernement est déterminant pour maintenir leur production, mais aussi assurer un aménagement harmonieux du territoire.

École en milieu rural

M. Jean-François Rapin, en remplacement de M. Patrick Masclet .  - Dans le département du Nord, environ un quart de la population vit en milieu rural. Si les élèves qui y sont scolarisés semblent mieux réussir, leurs trajectoires scolaires semblent moins ambitieuses comme l'attestent les taux d'orientation en classe de seconde. En outre, les bénéficiaires des mesures de carte scolaire, notamment du dispositif « plus de maîtres que de classes », sont presque exclusivement concentrés en ville. Les communes rurales connaissant des difficultés sociales majeures ont été exclues de la nouvelle politique de la ville, étant requalifiées en « territoires de veille active ».

Une charte de l'école rurale a été signée le 8 février 2017, c'est encourageant, mais le mouvement doit être amplifié. L'école n'a-t-elle pas pour mission de garantir la réussite de tous les élèves, quels que soient leur lieu de résidence et leur condition sociale ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation .  - Najat Vallaud-Belkacem est très attentive à l'école rurale. Le modèle d'allocation des moyens mis en place depuis 2015 opère un rééquilibrage en faveur des territoires les plus fragiles, après le travail de sape opéré par nos prédécesseurs - soit dit sans polémique. Après des années de destructions de postes, nous avons renoué le dialogue avec les élus, conclu des conventions de ruralité, et ainsi entrepris la reconquête par l'école des territoires ruraux. Cela représente pas moins de 240 emplois dans le nord depuis 2015. Il s'agit de coller à la réalité démographique et sociale des territoires.

La charte du 8 février 2017 prévoit un taux d'encadrement plus favorable dans les écoles rurales. Les moyens alloués aux nouveaux regroupements scolaires ont été sanctuarisés pendant trois ans, et nous nous efforçons de renforcer l'attractivité de ces territoires. Au total, vingt-quatre nouveaux postes seront consacrés à la ruralité dans le nord à la rentrée 2017, dont sept au titre du programme « plus de maîtres que de classes ». Notre engagement est bien réel.

M. Jean-François Rapin.  - Cette charte est récente. Espérons que les résultats seront au rendez-vous.

Construction de bureaux en Île-de-France

M. Christian Favier .  - En 2016, l'immobilier d'entreprise a connu une année record en Île-de-France, avec une hausse de 20 % de la production de bureaux. Mais au premier semestre, 75 % des bureaux agréés se situaient dans les Hauts-de-Seine et l'ouest parisien, contre 9 % dans le Val-de-Marne et zéro en Seine-et-Marne. C'est une tendance lourde : depuis dix ans, 47 % des nouveaux bureaux ont été ouverts dans les Hauts-de-Seine.

Les salariés en subissent les conséquences, avec des heures de trajet pénible. Ces écarts traduisent aussi les fortes inégalités économiques entre l'est et l'ouest de la région parisienne. Moins de bureaux, c'est aussi moins de contribution économique territoriale pour les collectivités, donc moins de moyens à redistribuer.

Faire venir des entreprises dans le Val-de-Marne, c'est possible : il y a de l'espace, des talents, les élus sont volontaristes et le futur métro sera un grand atout. Que compte faire le Gouvernement pour remédier au déséquilibre de la région ?

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargée du numérique et de l'innovation .  - Votre question soulève des enjeux économiques, sociaux, sociétaux.

Il faut d'abord se féliciter des bons résultats de la construction de bureaux en Île-de-France, qui a atteint des niveaux records : la barre des deux millions de mètres carrés est franchie. En 2016, l'État a autorisé la construction de bureaux sur une surface de 2,14 millions de mètres carrés, soit 70 % de plus que l'année précédente.

La surface agréée diminue légèrement à Paris, de 4 %, alors qu'elle montre un dynamisme remarquable dans le reste de la métropole : la hausse est de 128 % dans les Hauts-de-Seine, de 162 % en Seine-Saint-Denis et même de 216 % dans le Val-de-Marne ! Il est vrai que les Hauts-de-Seine concentrent encore 52 % des bureaux, mais le dynamisme est beaucoup plus fort à l'est. Le Gouvernement compte poursuivre sur cette voie, pour corriger les déséquilibres territoriaux.

M. Christian Favier.  - Merci de votre réponse, mais elle est insuffisante. Le différentiel de taxe sur les bureaux entre départements reste insuffisant, elle devrait être portée à 1 500 euros au lieu de 400 en zone 1. Il faut inciter les entreprises à s'installer à l'est, et construire des logements à l'ouest. Sinon, nos concitoyens devront continuer à faire trois heures de trajet par jour pour aller travailler.