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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



Questions orales

Prolifération des éoliennes dans les Hauts-de-France

M. Antoine Lefèvre

M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports

Réalisation d'un réseau express métropolitain dans le département d'Indre-et-Loire

M. Serge Babary

M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports

Pollution liée à Metaleurop

Mme Sabine Van Heghe

M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports

Réforme du code minier

M. Georges Patient

M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports

Organisation territoriale de la distribution publique d'énergie

M. Marc Laménie

M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports

Représentation des entreprises du secteur éolien au sein de l'Ofate

Mme Sylvie Vermeillet, en remplacement de Mme Anne-Catherine Loisier

M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports

Avenir de la ligne ferroviaire Grenoble-Veynes

Mme Patricia Morhet-Richaud

M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports

Situation des lycéens sportifs de haut niveau et nouveau baccalauréat

M. Michel Savin

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

Accompagnants d'élèves handicapés

M. Didier Marie

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse

Centre d'action médico-social du Mans

Mme Nadine Grelet-Certenais

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé

Conditions de travail du personnel hospitalier

M. Patrice Joly

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé

Avenir de la télémédecine

Mme Catherine Procaccia

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé

Campagnes des industries de l'alcool auprès des jeunes

M. Bernard Jomier

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé

Hôpital René-Muret de Sevran

Mme Éliane Assassi

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé

Lutte contre les cancers pédiatriques

Mme Catherine Procaccia, en remplacement de Mme Jacky Deromedi

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé

Urgences pédiatriques

M. Jean-Louis Lagourgue, en remplacement de Mme Colette Mélot

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé

Pêche et obligation de débarquement

M. Michel Canevet

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation

Pêche du saumon dans l'Adour

M. Max Brisson

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation

Crise de la filière forestière en Moselle et dans le Grand Est

M. Jean-Marc Todeschini

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation

Prise en charge des mineurs handicapés

Mme Sylvie Vermeillet

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation

Inquiétudes pour Bridgestone à Béthune

Mme Cathy Apourceau-Poly

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances

Distribution du courrier dans le Val-de-Marne

M. Laurent Lafon

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances

Dématérialisation des marchés publics

M. Laurent Duplomb

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances

Difficultés bancaires des « Américains accidentels »

M. Richard Yung

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances

Frais de gestion des épaves de voitures

Mme Nathalie Delattre

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances

Statut des forestiers-sapeurs

M. Jacques Genest

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances

Agence de gestion et de développement informatique

M. Bernard Bonne

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances

Comptabilité des établissements pour personnes âgées dépendantes

M. Gilbert Bouchet

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances

Dysfonctionnements des services postaux dans l'Essonne

Mme Jocelyne Guidez

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances

Prime de vie chère et aides au logement en Haute-Savoie

Mme Sylviane Noël

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement

Dédoublement de la réduction de loyer de solidarité

M. Alain Cazabonne

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement

Utilisation de la cocarde par les maires

M. Jean-Marc Boyer

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement

Guichet de cohésion numérique et aide à l'équipement numérique

M. Jean-Yves Roux

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement

Situation de France-Antilles

Mme Victoire Jasmin

M. Franck Riester, ministre de la culture

Entretien des églises de l'Oise

M. Max Brisson, en remplacement de M. Édouard Courtial

M. Franck Riester, ministre de la culture

Financement de la sécurité sociale pour 2020

Discussion générale

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales

Mme Catherine Deroche, rapporteure de la commission des affaires sociales pour l'assurance maladie

M. Bernard Bonne, rapporteur de la commission des affaires sociales pour le secteur médico-social

M. Gérard Dériot, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les accidents du travail et les maladies professionnelles

M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l'assurance vieillesse

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure de la commission des affaires sociales pour la branche famille

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis de la commission des finances

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales

Exception d'irrecevabilité

Mme Laurence Cohen

Discussion générale (suite)

M. Guillaume Arnell

M. Michel Amiel

Mme Cathy Apourceau-Poly

M. Daniel Chasseing

M. Yves Daudigny

M. Olivier Henno

Mme Corinne Imbert

M. Stéphane Artano

Mme Jocelyne Guidez

M. Jean-François Rapin

M. Jean-Louis Tourenne

Mme Corinne Féret

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État

Renvoi en commission

M. Alain Milon, président de la commission

Discussion des articles de la première partie

ARTICLE ADDITIONNEL avant l'article premier

Discussion des articles de la deuxième partie

ARTICLE 3

Mme Laurence Cohen

ARTICLE 4

Mme Laurence Cohen

ARTICLE 5

Mme Cathy Apourceau-Poly

ARTICLE 6

Mme Laurence Cohen

Discussion des articles de la troisième partie

ARTICLE 7

Mme Michelle Gréaume

ARTICLES ADDITIONNELS

Annexes

Ordre du jour du mercredi 13 novembre 2019

Analyse des scrutins publics




SÉANCE

du mardi 12 novembre 2019

17e séance de la session ordinaire 2019-2020

présidence de M. David Assouline, vice-président

Secrétaires : Mme Jacky Deromedi, M. Joël Guerriau.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance est adopté.

Questions orales

M. le président.  - L'ordre du jour appelle 35 questions orales.

Prolifération des éoliennes dans les Hauts-de-France

M. Antoine Lefèvre .  - Le développement des éoliennes est devenu un sujet de mécontentement, en particulier dans les Hauts-de-France. Outre les passages en force malgré les avis négatifs des communes, les utilisations sans autorisation de chemins communaux ou encore l'accaparement de parcelles communales, la multiplication anarchique des éoliennes mite inexorablement les paysages de cette région et exaspère les populations.

À ce jour, les Hauts-de-France remplissent déjà les objectifs fixés pour 2020. Début 2019, 1 500 éoliennes sont installées, dont 540 dans l'Aisne, 800 sont autorisées et non encore construites, et 733 dossiers sont en cours d'instruction... Sans rationalisation ni gestion des paysages, ces machines atteignent des hauteurs supérieures à 200 mètres, implantées à 500 mètres des habitations.

Le triplement du parc éolien terrestre pour porter le nombre de machines à 15 000 en 2028 et le droit à déroger aux dispositions relatives à l'enquête publique suscitent de grandes et fortes inquiétudes.

La Cour des comptes, en avril 2018, s'inquiétait du coût prohibitif pour les finances publiques : les contrats de l'éolien vont coûter « 40,7 milliards d'euros en vingt ans », ceci pour « 2 % de la production française ».

Dans les campagnes, les éoliennes séparent ceux qui touchent de l'argent, propriétaires et collectivités, et ceux qui subissent les nuisances.

Il faut donc faire un état des lieux général des avantages et inconvénients des nouvelles productions d'énergie que ce soit l'éolien, le photovoltaïque, ou la méthanisation - ceci en associant les collectivités locales, les élus et les habitants aux projets ayant une incidence évidente sur leur quotidien.

M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports .  - Mme Borne, qui ne peut être parmi vous ce matin, m'a chargé de vous répondre.

La France veut porter à 40 % les énergies renouvelables en 2030. Le programme pluriannuel de l'énergie (PPE) confirme cette ambition. Les objectifs fixés à 2028 ne portent pas le nombre d'éoliennes en France à 24 000 mâts, mais à environ 15 000, soit moins d'un doublement par rapport à 2018. Les nouvelles installations sont plus efficaces et permettent de produire la même énergie que les anciennes avec un nombre plus réduit de mâts. Elles sont également moins coûteuses que dans le passé.

Le développement des projets éoliens est par ailleurs encadré par l'État. L'autorisation des projets relève du préfet ; une étude d'impact est effectuée, sous l'égide de la Commission nationale du débat public (CNDP). Cette étude ne peut être remplacée par l'enquête électronique qu'à certaines conditions strictes.

Les projets d'implantation d'éoliennes sont différents selon les territoires. Le Gouvernement veut accompagner la filière éolienne, dans un dialogue avec les régions.

M. Antoine Lefèvre.  - Xavier Bertrand, président de la région Hauts-de-France, a demandé la fin de ces implantations et a récemment rencontré Emmanuelle Wargon sur ce sujet. J'espère qu'on pourra mieux prendre en compte cette problématique pour les Hauts-de-France et associer les populations aux projets.

Réalisation d'un réseau express métropolitain dans le département d'Indre-et-Loire

M. Serge Babary .  - J'attire votre attention sur la réalisation d'un réseau express métropolitain dans le département d'Indre-et-Loire, en particulier pour le noeud ferroviaire de Tours-Saint-Pierre-des-Corps.

Le projet de loi d'orientation des mobilités (LOM) confirme la priorité donnée à la désaturation des villes et de leurs accès et à l'amélioration des liaisons entre les territoires ruraux ou périurbains et les pôles urbains. Aussi, l'un des cinq programmes d'investissement porte sur « la résorption de la saturation des grands noeuds ferroviaires, afin de doubler la part modale du transport ferroviaire dans les grands pôles urbains ». Pour le traitement des noeuds urbains saturés, le rapport annexé au projet prévoit d'engager « 2,6 milliards dans les dix années à venir - hors Île-de-France -, associant État, collectivités locales ou SNCF ». L'État y contribuerait à hauteur de 1,3 milliard d'euros.

Avant le 1er janvier 2020, SNCF Réseau doit présenter à l'approbation du Gouvernement un plan d'ensemble explicitant les objectifs poursuivis, les zones du réseau concernées par ce plan, les délais et les principales étapes de réalisation.

De par sa position centrale et sa densité de lignes - dix branches ferroviaires, dont deux lignes à grande vitesse -, le noeud ferroviaire de Tours-Saint-Pierre-des-Corps est un point stratégique au niveau national et représente l'occasion de promouvoir des mobilités du quotidien décarbonées. Les onze intercommunalités du département sont innervées par les huit branches de l'étoile ferroviaire tourangelle et offrent 33 points d'arrêt. Le ferroviaire peut donc être une alternative sérieuse à l'automobile et un lien entre les territoires.

Le 11 septembre 2019, les présidents des onze intercommunalités du département ont sollicité la ministre de la Transition écologique et solidaire afin que le bassin de vie tourangeau puisse devenir un terrain d'expérimentation du réseau express métropolitain.

Dans quelle mesure le bassin tourangeau pourra être intégré au plan d'ensemble de désaturation des grands noeuds ferroviaires ?

M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports .  - La LOM vise à améliorer les transports du quotidien, notamment dans les métropoles, par des liaisons rapides, fréquentes et interconnectées, organisées selon un schéma directeur, à l'instar du réseau express d'Île-de-France.

Nous voulons doubler la part du ferroviaire grâce aux autorités organisatrices de transport (AOT) régionales et locales, comme dans les noeuds de Bordeaux, Toulouse, Marseille ou Lyon.

Le Gouvernement accompagne les 20 noeuds ferroviaires majeurs de France, dont Tours-Saint-Pierre-des-Corps. Malgré une moyenne de 2,7 millions de voyageurs par an sur 8 branches ferroviaires, le mode ferroviaire est encore sous-utilisé dans l'aire urbaine de Tours.

Début 2020, le plan d'ensemble de SNCF Réseau identifiera le contexte et les ambitions poursuivies. J'appelle les élus à se rapprocher de SNCF Réseau pour un travail partenarial.

M. Serge Babary.  - Les infrastructures, rayonnantes et denses, existent et les dix intercommunalités et la métropole ont signé ensemble un document, témoin de leur volonté politique commune.

Pollution liée à Metaleurop

Mme Sabine Van Heghe .  - La pollution générée par l'usine Metaleurop Nord pose problème. Pendant plus d'un siècle, cette usine a fourni l'industrie française en zinc et en plomb ; elle faisait vivre des centaines de familles dans le Pas-de-Calais jusqu'à sa fermeture en 2003, mais elle a également pollué les sols avec des métaux lourds. Des centaines d'habitants ne peuvent disposer de leurs propriétés, certaines cultures sont impossibles et chaque projet d'urbanisme nécessite un décapage des sols très onéreux. Les élus de la communauté d'agglomération d'Hénin-Carvin ont demandé à l'État la réparation du préjudice écologique subi. L'État s'est contenté de constater les dégâts. Les élus locaux demandent donc la dépollution par l'État de tous les sols pollués. En décidant de ne pas compenser l'exonération de taxe foncière, le Gouvernement a décidé de ne pas honorer la parole de l'État, ce qui occasionne pour ces communes un manque à gagner d'un million d'euros. Quelle est la position du Gouvernement ?

M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports .  - Le ministère de la Transition écologique et solidaire est actif sur ce dossier complexe et sensible de la pollution générée par l'ancienne usine de Metaleurop. Avant la fermeture de l'usine, les émissions de plomb dans l'air et l'eau ont été divisées par 30 à la suite de la réglementation sur les installations classées.

En 2003, un contrat de reconversion industrielle du site a été signé par l'État et les acteurs locaux : sur 66 millions d'euros de coût, les financements publics se sont élevés à 14,1 millions d'euros.

La zone autour de l'usine a été déclarée périmètre d'intérêt général et a fait l'objet de restrictions d'urbanisme par différents arrêtés préfectoraux ; 2 millions d'euros ont été versés à l'Ademe pour dépolluer les sols environnants, y compris chez des particuliers.

Le 21 novembre 2018, Olivier Dussopt avait répondu sur la non-compensation financière de la taxe foncière.

Mme Sabine Van Heghe.  - La pollution demeure importante, votre réponse ne me satisfait pas et ne saurait constituer un solde de tout compte. L'État est responsable et doit l'assumer.

Réforme du code minier

M. Georges Patient .  - Chaque année, 10 tonnes d'or sont extraites illégalement des sols guyanais et 400 millions d'euros volatilisés, volés à un territoire en retard en matière d'équipement, qui en aurait besoin.

Face à cette situation, une obstruction administrative arbitraire bloque l'exportation légale des gisements d'or.

Les projets de réforme du code minier mettent en émoi le secteur minier, qui doit se battre pour exister.

La future procédure de demande d'instruction des titres miniers sera complexifiée, elle durera de quatre à six ans. Pourquoi ne pas obliger l'administration à répondre plus rapidement, en faisant valoir que son silence tacite vaut autorisation, comme dans d'autres secteurs ?

Souhaitez-vous éteindre cette filière ? Sera-t-il possible d'exploiter légalement des mines d'or en Guyane ?

M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports .  - La réforme du code minier s'inscrit dans la continuité des travaux et des concertations antérieures, avec la volonté que les projets miniers autorisés soient à la hauteur de nos ambitions en matière d'environnement.

Ce projet prend en compte les enjeux environnementaux, économiques et sociaux des territoires dès les premières autorisations. L'objectif est d'aboutir à des procédures plus transparentes, des décisions plus protectrices de l'environnement et des modalités de participation du public renforcées tout particulièrement pour les titres de recherches et préalablement aux premières demandes de travaux. Par ailleurs, cette révision des procédures d'autorisation ne sera pas nécessairement plus longue si l'ensemble des parties prenantes sont concertées bien en amont des décisions.

Monsieur le sénateur, je ne doute pas que la ministre ait à coeur d'associer les parlementaires dans les concertations sur ce projet de réforme tant attendu et je sais que vous avez d'ailleurs été reçu par le cabinet de la ministre le 22 octobre dernier sur ce sujet.

M. Georges Patient.  - Ne laissons pas le champ libre aux pilleurs d'or qui polluent la Guyane avec leur mercure : pour dix tonnes d'or, ils répandent dix tonnes de mercure dans notre sol...

Organisation territoriale de la distribution publique d'énergie

M. Marc Laménie .  - Ma question porte sur l'organisation territoriale de la distribution d'énergie.

Depuis 1965, la fédération départementale d'énergies des Ardennes (FDEA), syndicat intercommunal à vocations multiples, est l'autorité organisatrice de la distribution publique d'énergie (AODE) dans le département.

À ce titre la FDEA, qui regroupe l'ensemble des communes ardennaises, assure le maintien et le développement d'un réseau électrique de qualité et participe également au déploiement des bornes de recharge pour les véhicules électriques ainsi qu'à la réalisation de la cartographie numérique du territoire.

Son assise géographique et son antériorité en font un interlocuteur fiable des communes et intercommunalités et un organisme de conseil et de mutualisation.

L'article 3 bis B du projet de loi relatif à l'énergie et au climat prévoit d'ailleurs la possibilité pour les AODE de recevoir des aides financières pour leur action en faveur du développement des énergies renouvelables au sein des communes ainsi que pour les opérations visant à faciliter la transition énergétique.

Dans ces conditions, la menace d'un démantèlement de ces organismes au profit d'un éclatement de leurs compétences entre des groupements de communes se révélerait contre-productive. Les maires des Ardennes sont inquiets.

Quelles assurances pouvez-vous nous donner quant au maintien des AODE dans leur configuration actuelle ?

M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports .  - Les syndicats d'énergie jouent un rôle déterminant, avec leurs investissements pour la qualité de la distribution d'énergie et l'accompagnement du département pour le développement des énergies renouvelables.

Nous ne voulons pas du tout les affaiblir. Le projet de loi Engagement et proximité ne comporte aucune mesure concernant les syndicats d'énergie, le Gouvernement a réaffirmé leur importance et confirmé leur rôle dans le projet de loi Énergie-Climat.

En particulier, les syndicats pourront prendre en charge, pour le compte de leurs membres, tout ou partie des travaux nécessaires à l'amélioration de la performance énergétique des bâtiments dont ils sont propriétaires.

Le Gouvernement a également souhaité étendre le champ d'intervention du financement des aides aux collectivités territoriales pour l'électrification rurale (Facé), outil de péréquation indispensable dont bénéficient de nombreux syndicats.

M. Marc Laménie.  - Merci de cette réponse rassurante pour nos élus. La FDEA a beaucoup oeuvré dans les Ardennes, nous tenons à son avenir.

Représentation des entreprises du secteur éolien au sein de l'Ofate

Mme Sylvie Vermeillet, en remplacement de Mme Anne-Catherine Loisier .  - Mme Anne-Catherine Loisier attire l'attention de Mme la ministre de la Transition écologique et solidaire, sur la représentation des entreprises du secteur éolien au sein de l'Office franco-allemand pour la transition énergétique (Ofate). Cet organisme qui coordonne les politiques franco-allemandes, a ses bureaux dans les locaux même du ministère et est financé pour plus d'un tiers par celui-ci. Son comité de pilotage est composé des quatre syndicats d'énergie renouvelable franco-allemands et nombre des autres membres ont des intérêts particuliers dans ce secteur. Il semblerait donc que le « lobby » éolien soit financé par le ministère lui-même.

Selon le rapport franco-allemand de l'agora Energiewende et de l'institut du développement durable et des relations internationales Energiewende et la transition énergétique à l'horizon 2030, « [...] si des capacités nucléaires sont retirées du mix français, la compétitivité des centrales à charbon maintenues dans le système en Allemagne est améliorée. »

L'Allemagne aurait donc doublement intérêt à ce que la France renforce ses capacités de production d'énergie éolienne car elle compte de nombreuses entreprises dans ce secteur et la baisse des capacités nucléaires françaises rendrait plus compétitives les centrales à charbon et donc leur maintien en Allemagne.

Qu'en pensez-vous au regard des intérêts de la France en matière de politique énergétique ?

M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports .  - Je vais vous rassurer. L'Ofate, créé en 2006, promeut l'information et la coopération entre la France et l'Allemagne sur les énergies renouvelables. Association, il n'a pas d'objectif politique, et couvre toutes les énergies renouvelables, pas seulement l'éolien. De format mixte public-privé, il est financé par les États et les professionnels de l'énergie. Ses rapports sont publics. La coopération franco-allemande est un atout pour la transition énergétique. L'Ofate n'a pas participé au rapport que vous critiquez, qui prend comme hypothèse un marché sur-capacitaire, qui n'est plus d'actualité, avec la fermeture des centrales à charbon allemandes.

Mme Sylvie Vermeillet.  - Merci de votre réponse. Mme Loisier était perplexe quant au choix français de réduire ses capacités nucléaires, incitant dès lors l'Allemagne à maintenir ses centrales à charbon, ce qui n'est pas bon pour l'environnement.

Avenir de la ligne ferroviaire Grenoble-Veynes

Mme Patricia Morhet-Richaud .  - Le 27 mai, monsieur le secrétaire d'État, vous avez effectué le trajet Grenoble-Veynes en train. La SNCF fermera la ligne pour travaux. Vous avez annoncé en septembre dans le Dauphiné Libéré votre engagement à faire réaliser des travaux par l'État sur cette ligne, pour sauver l'étoile de Veynes. Pour autant, rien ne s'est passé. Les élus locaux et les habitants ne se sont pas entendus, faute d'investissement, les travaux de modernisation et de sécurisation des voies prévus sur la section Livron Veynes privent tout simplement les Hautes-Alpes - 140 000 habitants, 387 586 lits touristiques, 20 millions de nuitées par an -, d'une desserte ferroviaire via Valence.

Quelle est la position de l'État sur le dossier ? Quel sera le montant des travaux et quel sera le calendrier prévisionnel ?

M. Jean-Baptiste Djebbari, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports .  - Cette ligne est indispensable à la vitalité du territoire. Des travaux sont prévus en 2020, sauf sur la section Vif-Lus-la-Croix-Haute-Veynes, faute d'entretien lourd depuis des décennies.

Toutefois, je vous confirme qu'une étude de la remise en état de la ligne, financée à 50% par l'État, est en cours. Les résultats sont attendus de manière imminente.

De mars à décembre 2021, la branche Livron-Veynes sera fermée pour travaux, afin d'assurer pour l'avenir la pérennité de l'axe ferroviaire de Valence à Briançon et ainsi, le maintien des circulations du train de nuit Paris-Briançon.

Une offre de substitution au train de nuit sera également mise en place en 2021 pendant les travaux.

Le Gouvernement a demandé au préfet de région Provence-Alpes-Côte-D'azur d'organiser un nouveau comité de pilotage d'ici la mi-décembre 2019 afin d'étudier avec les collectivités locales les propositions actualisées de SNCF Réseaux et d'arrêter un tour de table financier.

En tout état de cause, soyez assurée que l'État veillera à ce que les solutions pour pérenniser la desserte des Hautes-Alpes soient mises en oeuvre dans les meilleures conditions pour les usagers du train.

Mme Patricia Morhet-Richaud.  - Merci. Il y a urgence pour notre territoire. Nous attendons le rapport Philizot. (M. Marc Laménie applaudit.)

Situation des lycéens sportifs de haut niveau et nouveau baccalauréat

M. Michel Savin .  - Ma question porte sur la situation des lycéens actuellement engagés dans un parcours spécifique aménagé visant l'obtention du baccalauréat tout en pratiquant intensément une discipline sportive à haut niveau, par exemple les skieurs de haut niveau dans mon département. La promotion inscrite depuis 2018, qui n'est pas concernée par la réforme du baccalauréat, passera ce diplôme en juin 2021, soit la même année que le premier nouveau baccalauréat réformé. Depuis un an, ces élèves sont donc préparés au baccalauréat actuel, et certains ont même d'ores et déjà passé des épreuves mais la décision concernant leurs conditions d'obtention finale de leur baccalauréat n'est toujours pas définie.

Le double projet, éducatif et sportif, est une politique sportive et éducative ambitieuse, largement portée par le Gouvernement.

Aussi, il apparaît nécessaire de sécuriser le parcours de ces jeunes sportifs, en leur permettant de passer l'examen auquel leurs professeurs les préparent actuellement. Cette solution apparaît comme la plus raisonnable pour nos espoirs sportifs de demain, et répond avant toute chose à une question d'égalité. Une proposition a été soumise par le rectorat de Grenoble, mais elle est restée sans réponse.

Quelle est votre opinion ? Comment rassurer ces jeunes et leurs familles ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - Ces jeunes ne devront pas être lésés par la réforme, c'est une évidence. La rectrice de Grenoble a pris en main la situation des 143 élèves concernés. Les trimestres de première et de terminale ont été répartis sur deux années scolaires, ainsi l'examen final sera passé in fine en 2021. Ce cas a été prévu par la réforme et notamment l'article 10 de l'arrêté du 10 juillet 2018 sur les modalités du contrôle continu. Celui-ci peut être validé par des épreuves sportives ponctuelles à la fin de la terminale, pour les sportifs de haut niveau.

Au titre du contrôle continu, les élèves doivent certes se présenter à une épreuve commune pour l'ensemble de la spécialité, la philosophie et le grand oral, mais il ne le permet pas. Un arrêté prévoira prochainement une dispense pour cette épreuve de spécialité non suivie en terminale. La réforme s'adapte donc à ces cas particuliers.

M. Michel Savin.  - J'espère que votre réponse rassurera les parents d'élèves. Nous resterons vigilants. Il faut éviter de multiplier les rattrapages d'épreuves, difficilement compatibles avec les compétitions.

Accompagnants d'élèves handicapés

M. Didier Marie .  - Ma question porte sur la situation que vivent de nombreux accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH), dans l'académie de Rouen comme ailleurs.

Sur les 12,4 millions d'élèves scolarisés, 400 000 sont en situation de handicap - troubles autistiques, dyspraxie, dyslexie, hyperactivité - et doivent avoir un AESH. Tel n'est cependant pas le cas. À Rouen, depuis septembre, plus de 200 AESH travaillent sans contrat voire sans salaire. Cette précarité est incompréhensible au regard de l'importance de leur rôle pour la scolarité des élèves handicapés. Cela nuit à l'inclusion scolaire.

Comment expliquer une telle situation ? Est-ce lié à la mise en place des pôles inclusifs d'accompagnement localisés (PIAL) ? Comment comptez-vous y remédier ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse .  - À la rentrée 2019, 365 000 élèves handicapés ont été accueillis et le nombre d'AESH recrutés a augmenté, avec des contrats plus stables qu'auparavant. Il y a eu effectivement quelques lacunes à Rouen. Nous avons recruté plus d'AESH pour prendre en compte les recommandations des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). Mais la paie de septembre n'a parfois pas été versée en raison de problèmes administratifs.

Fin septembre et fin octobre, des acomptes ont cependant été versés. Certains cas, toutefois, n'ont pas été réglés, notamment à Rouen. Le ministère veille à une régularisation rapide de ces situations.

M. Didier Marie.  - Espérons que cela se fasse rapidement. Des contrats de trois ans sont un progrès, mais il faudrait, à terme, offrir des CDI aux AESH pour accompagner leur professionnalisation.

Centre d'action médico-social du Mans

Mme Nadine Grelet-Certenais .  - Je souhaite attirer votre attention sur la situation critique du centre d'action médico-social précoce du Mans (CAMSP).

Le CAMSP du Mans accueille plus de deux cent soixante enfants en situation de handicap dans le but que ceux-ci puissent vivre sereinement et s'intégrer en société. Or, depuis 1993, son personnel exerce dans des locaux préfabriqués inadaptés. Cela ne peut plus durer. Les locaux, devenus de surcroît insalubres, ne sont pas aux normes. Ainsi, les entrées ne sont même pas accessibles aux fauteuils roulants. Un comble pour un établissement d'accueil de personnes en situation de handicap ! Par ailleurs, le nombre de demandes de prise en charge par le CAMSP ne cesse d'augmenter chaque année.

Face à ces difficultés, les professionnels du CAMSP, très investis et motivés, trouvent des expédients : le personnel n'hésite pas à partager son bureau à chaque nouvelle intervention pour pouvoir recevoir un enfant supplémentaire. En mai 2018, il a monté un projet d'achat de nouveaux locaux avec un plan d'investissement à l'attention de l'ARS des Pays-de-la-Loire. Cela fait maintenant un an et demi qu'il attend une réponse, alors que la situation presse.

La ministre des Solidarités et de la Santé ainsi que la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées ont insisté sur l'importance de la prévention et ont réitéré cette priorité dans le cadre du plan autisme 2018-2022 afin de favoriser le diagnostic précoce.

Il faut urgemment trouver une solution à la demande des équipes et leur apporter toute la reconnaissance qu'elles méritent. Quelles mesures peuvent être mises en place dans les meilleurs délais pour accueillir ces enfants dans des conditions dignes ?

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - Les conditions d'installation de cette structure sont effectivement précaires. L'agence régionale de santé (ARS) et le département de la Sarthe travaillent à une amélioration. L'ARS a réuni le 2 octobre les acteurs concernés. Une méthode de travail a été retenue. Le CAMSP sera implanté en septembre 2021 à l'hôpital du Mans. Le projet architectural doit désormais être précisé, l'association gestionnaire doit finaliser l'expression de ses besoins. Dans cette attente, des travaux de rénovation seront réalisés sur les locaux actuels.

Mme Nadine Grelet-Certenais.  - Je communiquerai votre réponse à une équipe motivée mais un peu désespérée par les reports et délais successifs.

Conditions de travail du personnel hospitalier

M. Patrice Joly .  - Les conditions de travail des personnels hospitaliers dans la stratégie nationale « Ma Santé 2022 » relèvent d'un enjeu de santé publique, parce qu'elles concernent la préservation de la santé de ces personnels dans un environnement de travail particulièrement pathogène, à fort taux de pénibilité et dont les contraintes sur les organismes sont lourdes de conséquences. Le secteur hospitalier pâtit d'un manque notoire de personnel. L'hôpital n'attire plus les étudiants. Des études démontrent clairement que le manque durable de personnel engendre des désorganisations importantes au sein de la majorité des hôpitaux français. Des effets délétères sur la santé sont prouvés par les épidémiologistes.

Comment maintenir la qualité des soins dans un environnement de travail de plus en plus difficile et un contexte de manque d'effectifs problématique ?

Depuis plusieurs mois, les établissements publics de santé sont secoués par des mouvements sociaux sans précédent, au sein des services des urgences, de maternité, de la protection de l'enfance, des structures pour personnes âgées, et dans les secteurs de la psychiatrie. Tous dénoncent le manque de moyens humains, matériels, budgétaires et la souffrance au travail.

Quelles sont les mesures envisagées à court et moyen termes ?

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - L'amélioration des conditions de travail des hospitaliers est indispensable pour préserver la qualité des soins et l'attractivité de l'hôpital. Nous la devons à ceux qui soignent tous les jours nos concitoyens.

Les tensions sociales dans les établissements de santé ne datent pas d'hier. Nous avons lancé une stratégie nationale de la qualité de vie au travail, dont certaines mesures sont déjà en place. Un observatoire national de la qualité de vie au travail doit exploiter les données existantes pour formuler des recommandations. Un dispositif de médiation à l'échelle nationale et inter-régionale est en cours de déploiement, qui interviendra notamment pour des conflits liés aux conditions de travail.

Enfin, le Gouvernement a pris depuis deux ans des mesures concrètes : tarifs hospitaliers augmentés en 2018, pour la première fois depuis dix ans, plan « Ma Santé 2022 » qui accompagne l'évolution des carrières des professionnels de santé, ou bien encore réforme des études médicales pour éviter le gâchis de la sélection en fin de première année. Des travaux sont en cours pour adapter les parcours professionnels des hospitaliers et leur permettre de diversifier leur mode d'exercice. Des mesures sont prévues pour soutenir le management dans les hôpitaux. Mme la ministre s'est engagée à prendre de nouvelles décisions dans les jours prochains.

M. Patrice Joly.  - Les sondages montrent que la santé est la première préoccupation des Français. Il y a urgence à agir, d'autant plus que les hôpitaux sont souvent le premier et le dernier recours dans les territoires.

Avenir de la télémédecine

Mme Catherine Procaccia .  - Depuis septembre 2018, l'assurance maladie rembourse les téléconsultations faites via un ordinateur, un smartphone ou une tablette, mais limite ce remboursement à celles qui sont réalisées auprès du médecin traitant ou d'un médecin ayant une connaissance préalable du patient.

Si ce dispositif se développe, sa progression est beaucoup plus lente que prévu. Pour des prévisions annoncées par le Gouvernement à 500 000 actes en 2019, et un million en 2020, à peine 60 000 utilisations ont été constatées après un an d'application, alors que 350 millions de consultations physiques sont réalisées chaque année en France.

La pratique concerne presque majoritairement l'Île-de-France. Seulement 1 600 médecins libéraux ont facturé des actes de télémédecine cette année. Certaines plateformes n'arrivent pas à obtenir le remboursement des actes de la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM). La téléconsultation permet de désengorger les services médicaux d'urgence, et d'avoir accès plus facilement à un médecin. Il n'y a pas de raison de pénaliser les malades qui font l'effort de ne pas se déplacer aux urgences en ne les remboursant pas.

Compte tenu de la nécessité pour les médecins et les utilisateurs de disposer d'une connexion internet suffisamment puissante pour obtenir une image nette, les téléconsultations peuvent être difficiles à pratiquer dans certaines parties du territoire.

Que compte faire le Gouvernement pour aider au développement de cette médecine que vous souhaitez médecine des temps modernes ?

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - La pratique de la médecine à distance est une opportunité majeure pour améliorer l'accès aux soins. Avec la tarification des actes de téléconsultation dans le plan « Ma Santé 2022 », le Gouvernement a cherché à favoriser une accélération sans précédent de son déploiement. On parle de 60 000 actes de téléconsultation. Il ne s'agit là que d'un indicateur, et les études sur le terrain révèlent un passage de 1 000 à 10 000 téléconsultations mensuelles entre décembre 2018 et juillet 2019 : la dynamique est bel et bien enclenchée. En sus de la téléconsultation, il existe aussi 33 000 patients en télésurveillance.

La répartition géographique des téléconsultations varie en fonction des besoins locaux et de la démographie régionale.

Les barrières à la télémédecine peuvent être surmontées, grâce à une évolution culturelle que nous favorisons. La Haute Autorité de santé a édité un guide des bonnes pratiques en télémédecine. Des formations sont mises en place dans le cadre du développement professionnel continu, qui pourront aussi être intégrées dans la formation initiale des professionnels de santé. Les infirmiers pourront pratiquer un acte d'accompagnement du patient à la téléconsultation. Les pharmaciens en officine seront aussi susceptibles d'oeuvrer en ce sens. L'application de ces mesures sera effective dès janvier 2020.

Quant au numérique, le Gouvernement s'est donné pour objectif un bon débit pour tous et la généralisation d'une couverture mobile de qualité dès 2020, et le très haut débit pour tous en 2022.

Mme Catherine Procaccia.  - Vous mentionnez 60 000 téléconsultations sans aborder le non-remboursement par la CNAM lorsque le médecin exerce dans un département différent de celui du patient. Il n'y a rien sur ce sujet dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Campagnes des industries de l'alcool auprès des jeunes

M. Bernard Jomier .  - Selon les chiffres rapportés par la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives, 85 % des adolescents de moins de 17 ans ont déjà consommé de l'alcool, 44 % ont déclaré une alcoolisation ponctuelle importante dans le mois, et près de 9 % en consomment régulièrement.

Notre socle législatif est bien en peine de protéger la jeunesse, car les alcooliers débordent d'imagination pour contourner la loi Évin : marques alibis pour parrainer des événements destinés aux jeunes, publicité directe via des influenceurs sur les réseaux sociaux, les exemples sont nombreux.

Vous avez préféré confier la prévention aux alcooliers eux- mêmes, de sorte que nous avons vu apparaître des campagnes d'apprentissage du goût, conduites auprès de très jeunes enfants et d'adolescents, les alcooliers faisant valoir qu'une bonne éducation dans l'enfance protège de tous les excès de consommation à l'âge adulte.

D'importants moyens de communication sont déployés dont le but est de développer une « culture du goût » dès le plus jeune âge, et de créer des « consommateurs avertis ». « Vins et Société », par exemple, présente des kits pédagogiques et des jeux s'adressant à des enfants entre 4 et 14 ans qui leur font découvrir l'univers de la vigne, les goûts et les terroirs. Cet apprentissage du goût dès le plus jeune âge est censé favoriser un comportement responsable chez les adultes « avertis » de demain. Or la santé n'est pas une affaire d'opinion ou de goût mais de science. La justification scientifique de ces programmes « d'éducation » est inexistante car les arguments pour les soutenir sont d'ordre culturel ou se réfèrent à la tradition. La science montre que cette prétendue « éducation à bien boire » est une incitation à boire.

Comment allez-vous mettre un terme à des pratiques en contradiction avec les objectifs de santé publique et promouvoir une réelle prévention contre les méfaits de l'alcool chez les jeunes ?

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - L'éducation au goût est effectivement brandie comme moyen de prévention des excès, sans justification scientifique. Une seule chose est sûre : l'alcool est toxique pour l'activité cérébrale des enfants et adolescents.

Le cadre scolaire doit garantir la neutralité de l'information. Jean-Michel Blanquer a eu l'occasion de rappeler aux recteurs d'académie que toutes les précautions nécessaires devaient être prises en cas d'utilisation de ces kits, du fait des risques d'incitation à la consommation d'alcool.

La promotion des comportements favorables à la santé auprès des jeunes est essentielle. Nous avons notamment lancé le service sanitaire des 48 000 étudiants en santé et nous avons inscrit le rôle prioritaire de l'école dans le plan « Priorité prévention ». Nous agissons ensemble pour que nos enfants apprennent les bons réflexes pour leur santé, dès le plus jeune âge, afin qu'ils deviennent des adultes autonomes exerçant leur choix de manière éclairée.

M. Bernard Jomier.  - Si votre avis est le même que le nôtre sur ces campagnes, mettez-y fin. Mettez aussi en place, comme en Ecosse, un prix minimal de l'alcool, également envisagé en Irlande et aux Pays-Bas, et qui a montré son efficacité.

Hôpital René-Muret de Sevran

Mme Éliane Assassi .  - Sans réponse à ma question écrite de juin sur les fermetures au sein de l'hôpital René-Muret de Sevran, je vais la poser à nouveau. Des salariés de l'établissement sont présents en tribune.

L'ensemble des services est touché et notamment le service longue durée, par manque de médecins. Aucune annonce n'a été faite.

Le dispositif de recrutement choisi par l'hôpital - activer le réseau - est un échec. Neuf médecins ont démissionné, il n'y a plus d'internes depuis mai 2019. Le service de médecine gériatrique a fermé huit lits ; l'unité de géronto-psy n'a plus de psychiatre depuis des mois malgré l'apport d'une plus-value pour les patients ; la pérennité de l'unité de soins palliatifs est remise en question depuis le départ d'un médecin en juin 2019 et d'un autre à la fin de cette même année ; le service d'addictologie a dû fermer six lits sur vingt-deux par manque d'un médecin. L'hôpital de jour du service nutrition obésité fonctionne au ralenti en demi-service depuis août.

Depuis le mois de septembre, il ne reste qu'un médecin pour les quatre services de longs séjours de 179 lits. La direction a décidé de réduire le nombre de patients à 90 lits.

Lorsque tous les lits sont ouverts, ils sont occupés. Dorénavant, les patients sont mis à la porte de l'hôpital.

Au regard de la démographie des personnes âgées, il faudrait plutôt augmenter le nombre de lits de gériatrie... Et que dire du projet du Gouvernement d'admettre directement les patients âgés en service de médecine gériatrique pour leur éviter les urgences ? Et cela, alors que le groupe Korian a annoncé la construction d'une structure privée de 166 lits de soins de suite à côté de l'hôpital. Comment allez-vous réagir ?

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - L'hôpital René-Muret de Sevran connaît des difficultés liées aux départs de médecins en gériatrie, en soins palliatifs et en addictologie. Le contexte de pénurie explique des délais incompressibles en matière de recrutement. La communauté médicale s'est mobilisée pour restreindre les fermetures et maintenir l'offre de soins.

Cet hôpital joue un rôle stratégique en Seine-Saint-Denis. Une stratégie de transformation de l'offre, notamment celle de longue durée, devrait contribuer à prendre en compte ces difficultés de recrutement. Le nombre de lits de soins de suite et de réadaptation neurologique devrait augmenter. Pour les soins de longue durée, les locaux sont trop vétustes. Il faut aussi consolider la filière gériatrique.

Des échanges ont eu lieu avec les syndicats sur l'évolution du site, dont le positionnement sera amélioré dans la chaîne de soins du territoire. L'AP-HP prévoit de proposer, dès 2020, une formation d'assistants de soins à 370 aides-soignants.

Mme Éliane Assassi.  - Les faits sont têtus, et votre réponse ne calmera pas les angoisses.

Lutte contre les cancers pédiatriques

Mme Catherine Procaccia, en remplacement de Mme Jacky Deromedi .  - Mme Jacky Deromedi attire l'attention de Mme la ministre des Solidarités et de la Santé sur la lutte contre les cancers pédiatriques.

Chaque année, environ 2 550 nouveaux cas de cancers sont diagnostiqués chez les enfants et les adolescents. On estime qu'un enfant sur 440 sera atteint d'un cancer avant l'âge de 15 ans. C'est la première cause de décès par maladie chez l'enfant, en France. Certains parents envoient leurs enfants à l'étranger pour participer à des essais cliniques, mais avec des risques et des coûts plus importants.

Pendant l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous veillerons à ce que les montants consacrés à la lutte contre les cancers pédiatriques soient à la hauteur.

En janvier, Mme Deromedi a demandé, avec 100 sénateurs, que le cancer pédiatrique soit déclaré grande cause nationale, sans réponse du Gouvernement. Il y avait probablement d'autres priorités... Combien de petits anges devront encore mourir ? Combien de familles continueront à crier leur désespoir ? Madame la ministre, quand nous annoncerez-vous une bonne nouvelle en inscrivant le cancer pédiatrique comme grande cause nationale ?

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - Le Premier ministre se prononcera le moment venu sur cette labellisation. La lutte contre le cancer des enfants et des adolescents est une priorité du plan Cancer 3. L'effort de recherche français sur le cancer pédiatrique représente 10 % du financement de la recherche publique en cancérologie. En 2018, les moyens publics alloués ont été augmentés de 5 millions d'euros par an.

Le soutien aux aidants familiaux a été renforcé avec le nouveau congé de présence parentale. L'évaluation des moyens dédiés est une avancée. Autre progrès majeur, le droit à l'oubli devait être étendu aux pathologies cancéreuses subies avant 21 ans. L'accès aux solutions médicales les plus innovantes reste un enjeu majeur, qui sera intégré à notre stratégie nationale de lutte contre le cancer.

Mme Catherine Procaccia.  - Mme Deromedi aurait sans doute souhaité une réponse plus ambitieuse et une mise en oeuvre plus rapide des solutions. Mourir et souffrir d'un cancer est difficile. C'est encore plus épouvantable quand un enfant est touché. L'accès aux soins thérapeutiques doit être facilité. Les parents ne devraient pas être contraints à appeler aux dons pour faire soigner leur enfant à l'étranger.

Urgences pédiatriques

M. Jean-Louis Lagourgue, en remplacement de Mme Colette Mélot .  - C'est une question de Mme Mélot. Vingt-cinq hôpitaux d'Île-de-France sont menacés de fermeture, faute d'internes en nombre suffisant.

La répartition des internes de médecine générale dans les différents services de pédiatrie de la région s'est faite sans tenir compte des besoins des hôpitaux, notamment les plus éloignés du centre de Paris, dont Marne-la-Vallée et les deux services de Meaux et de Melun, en Seine-et-Marne.

Selon l'agence régionale de santé (ARS), les résultats de la procédure de choix des internes de médecine générale pour le semestre d'hiver 2019 ont conduit à une réduction du nombre d'internes ayant choisi d'effectuer leur stage dans un service de pédiatrie, mais surtout à une répartition de ces 159 internes qui n'est pas en adéquation avec les besoins de fonctionnement des services de pédiatrie et d'urgences pédiatriques. Ce sont 327 postes d'internes qui ont été ouverts mais seulement 159 internes les ont choisis. Une écrasante majorité a choisi des postes à Paris et en petite couronne, avec pour résultat, une sous-dotation des établissements de grande couronne, déjà pénalisés par la démographie défavorable des pédiatres.

L'ARS a trouvé la parade en relançant la procédure au motif d'une rupture d'égalité. Qu'allez-vous faire pour éviter ce type de situations ?

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé .  - Plusieurs pistes ont été envisagées. L'ARS d'Île-de-France a relancé en urgence la procédure et, le 22 octobre, la commission de répartition a ajusté le nombre de postes et les mesures de soutien aux internes. Le 29 octobre, 182 internes ont choisi le stage de médecine générale en pédiatrie contre 159 la première fois, avec une meilleure répartition géographique.

Mais le déséquilibre persiste. Dans le nord des Yvelines notamment, d'autres solutions devront être trouvées en accord avec l'ARS. Une prime incitative mensuelle de 400 euros sera versée aux 267 internes ayant changé de lieux de stage, et cela durant toute la durée du stage.

Pêche et obligation de débarquement

M. Michel Canevet .  - L'obligation de débarquement, appelée également « interdiction de rejet », est une question sensible dans un grand pays de pêche comme le nôtre. Il est difficile de sélectionner les espèces à rejeter ; cela pose des difficultés de stockage sur les bateaux ; les structures portuaires doivent être adaptées.

Le comité départemental des pêches maritimes et des élevages marins du Finistère a proposé en juin 2018 d'adapter les quotas de pêche, de fermer certaines zones et surtout de valoriser les rejets. Il est inacceptable d'obliger à pêcher puis à rejeter ! Peut-on infléchir la position de la Commission européenne sur le sujet ?

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation .  - La France s'est opposée à la Commission européenne sur l'obligation de débarquement, qu'elle doit désormais mettre en oeuvre au titre de la politique commune de pêche.

Notre objectif est d'améliorer la sélectivité : ajouter des contraintes aux pêcheurs n'est pas une option. La France s'est efforcée de limiter les conséquences négatives de la mesure. Ainsi, une bourse d'échanges sera mise en place pour couvrir les prises accessoires inévitables.

Une exemption de minimis, une flexibilité interzonale et inter-espèces ont aussi été obtenues grâce notamment aux propositions du comité interdépartemental des pêches du Finistère, dont nous nous sommes inspirés et j'en remercie les membres. Il est essentiel que les producteurs déclarent leurs rejets. Nous faisons tout pour répondre aux demandes des pêcheurs.

M. Michel Canevet.  - Je suis heureux de votre mobilisation sur le sujet. Venez dialoguer avec les professionnels dans le Finistère, ce sera fructueux.

Pêche du saumon dans l'Adour

M. Max Brisson .  - Chaque année, lors de l'ouverture de la pêche en première catégorie dans les Pyrénées-Atlantiques, se joue les mêmes scènes de tensions entre pêcheurs amateurs installés aux bords des gaves d'Oloron et pêcheurs professionnels de l'estuaire et du port de Bayonne.

Ces tensions sont principalement liées à l'intensité de la pêche, supposée trop forte à l'embouchure et qui empêche le saumon de remonter le gave. Les associations de défense de l'environnement dénoncent un risque pour le renouvellement de l'espèce, contesté par les pêcheurs professionnels. Le 21 juin, le tribunal administratif de Pau a demandé des mesures pour faire cesser la pêche au filet dérivant dans les eaux du port de Bayonne, malgré une étude du comité interdépartemental des pêches concluant à l'absence de risque pour l'espèce.

Monsieur le ministre, vous étiez venu il y a un an au port de Saint-Jean-de- Luz / Ciboure. Il faut faire le point sur la ressource pour rétablir la sérénité. Où en est-on dans l'Adour et les gaves ?

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation .  - Selon le code des transports, la pêche est désormais interdite dans les ports de commerce, donc également dans celui de Bayonne, mais le gestionnaire du port, la chambre de commerce et d'industrie de la région Nouvelle-Aquitaine en l'espèce, pouvaient accorder une dérogation.

Les services de l'État se sont beaucoup impliqués dans ce dossier, et le comité de gestion des poissons migrateurs, commission administrative compétente pour régler les usages et organiser la concertation, a joué un rôle important.

Les acteurs locaux gèrent les pêcheries de saumon en fonction de contraintes incontournables, définies dans les directives internationales de l'Organisation de conservation du saumon de l'Atlantique nord, et dans la réglementation nationale. Pour apaiser les tensions, il faut objectiver les connaissances sur l'état des stocks. Il semble que la population de saumon sur l'Adour soit en voie de rétablissement. Je suis favorable à votre demande : une étude complète serait nécessaire, mais l'initiative doit venir des acteurs locaux.

Je fais confiance aux services de l'État pour mettre en place cette étude.

M. Max Brisson.  - Merci d'avoir séparé ce qui relève du code des transports et de la protection de l'environnement, et merci aussi d'appuyer ma demande d'études.

Je compte sur vous pour fédérer les acteurs.

Crise de la filière forestière en Moselle et dans le Grand Est

M. Jean-Marc Todeschini .  - À l'été 2019, les forêts du Grand Est, et particulièrement du massif vosgien, ont été les victimes d'attaques d'un insecte xylophage, qui prolifère lors des étés chauds et secs : le scolyte. En 2018, des milliers de mètres cubes de bois ont dû être abattus dès les premiers signes d'attaques, et mis en vente. Mais l'afflux massif de résineux a fait mécaniquement baisser des deux tiers sur les marchés le prix moyen du mètre cube. Malheureusement, l'hiver 2018-2019 a été clément et l'été 2019 encore plus chaud et sec que celui de 2018. L'Office national des forêts (ONF) parle désormais de centaines de milliers de mètres cubes de bois à traiter, c'est-à-dire de dizaines de milliers d'arbres à couper au plus vite et à commercialiser. C'est une véritable tempête silencieuse, le volume est supérieur à celui issu des tempêtes de Noël 1999.

Il n'y a aucun moyen de lutter efficacement contre cet insecte, vivant sous l'écorce des arbres, si ce n'est un hiver froid et des arbres capables de se défendre en produisant de la sève et des terpènes à haute concentration quand ils ne souffrent pas de stress hydrique. Dans l'avenir, ces conditions d'absence de sécheresse et de froid hivernal risquent d'être plus difficiles à réunir. L'ONF annonce, à court ou moyen terme, la disparition de tous les résineux dans les forêts situées à moins de 500 mètres d'altitude, ce qui entraînera une fragilisation de l'ensemble du biotope forestier. De nombreux feuillus souffrent à leur tour de l'assèchement du sol : les frênes de Moselle sont touchés par la chalarose ; les hêtres, particulièrement sensibles à la sécheresse, souffrent beaucoup et meurent également nombreux.

En Moselle, le président des communes forestières, Michaël Weber, et le président des propriétaires forestiers privés, Didier Daclin, ont alerté sur les pertes financières qui se chiffrent en centaines de milliers d'euros. Toute la filière bois est profondément touchée et 70 % des forêts du Grand Est appartiennent à l'État.

Quelles mesures prendrez-vous face à ce désastre sanitaire ? Allez-vous mettre en place un grand plan forestier avec l'aide des fonds européens, à l'instar de celui de Jean Glavany en 1999 ? Quel rôle sera joué par l'ONF, que vous comptez démanteler ?

M. le président.  - 40 secondes de dépassement, vous pouvez me remercier...

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation .  - ... surtout pour des paroles erronées. Nous ne souhaitons absolument pas démanteler l'ONF qui doit rester le coeur du dispositif forestier de notre pays.

J'ai une pensée pour Philippe Leroy, sénateur de votre territoire et acteur incontournable de la filière bois.

Les scolytes ravagent 7 000 hectares de nos forêts. Un hiver très froid régulerait la situation, mais le réchauffement climatique ne le laisse pas espérer.

Nous n'avons encore qu'un aperçu de l'impact de la sécheresse sur les feuillus. Un récent rapport du GIEC indique que la forêt française, qui est un bijou absolu, permet de capter du carbone sans fin ; cependant, ses essences ne sont pas forcément les mieux adaptées au réchauffement climatique. J'ai récemment réuni le Conseil supérieur de la forêt et du bois (CSFB) pour prendre des mesures exceptionnelles, comme cette enveloppe de 16 millions d'euros dédiée à la forêt. J'ai également demandé la mise en place d'un plan stratégique, dès le mois de mars, qui s'appuiera sur les remontées du terrain, en concertation avec les communes forestières, et le centre national de la propriété forestière.

Le président de la République a réuni, jeudi dernier, le conseil de défense écologique. La France présentera un plan stratégique de défense de nos forêts, essentielles pour la lutte contre le changement climatique.

Prise en charge des mineurs handicapés

Mme Sylvie Vermeillet .  - Les directives nationales visent à scolariser en milieu ordinaire au moins 80 % des mineurs avec troubles du comportement. Il s'agit de sortir les mineurs des établissements relevant de l'agence régionale de santé (ARS) pour les scolariser en établissement classique.

L'ARS a souhaité que les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) signent une convention pour mettre en oeuvre le dispositif d'interventions thérapeutiques, éducatives et pédagogiques (ITEP). Ce dispositif permet de sortir des mineurs de leur structure pour qu'ils restent à domicile avec intervention d'un service d'éducation spécialisée et de soins à domicile (Sessad). La MDPH du Jura a refusé de signer cette convention, en raison de ses conséquences financières pour les conseils départementaux.

Ces directives vont dans le bon sens. Toutefois les conseils départementaux s'inquiètent de l'augmentation des dépenses obligatoires qui en résultent. L'État a-t-il prévu des compensations financières ?

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation .  - Mme Cluzel, ne pouvant être présente, m'a chargé de vous répondre.

Il n'y a pas de report de charges de fonctionnement sur les collectivités territoriales pour les dépenses des ITEP. Nous devons garantir aux personnes handicapées d'être pleinement citoyennes.

La loi du 11 février 2005, annoncée par le président Chirac, a ouvert la voie à une véritable politique inclusive, - école, emploi, logement notamment - en s'appuyant sur les ressources du milieu ordinaire, et sur les opérateurs médico-sociaux.

Il faut déployer les moyens médico-sociaux au plus près des besoins, non les réduire. Les ITEP s'adressent à un public rencontrant des difficultés psychologiques mais dont les capacités cognitives sont préservées, en simplifiant leur parcours, sans rupture scolaire, et sans passer par les MDPH.

En 2018, une convention régionale a été signée en Bourgogne-Franche-Comté, avec l'ensemble des partenaires, sauf les MDPH du Jura et de la Côte-d'Or.

J'invite la MDPH du Jura à rejoindre ce dispositif, dont la réussite est unanimement saluée.

Mme Sylvie Vermeillet.  - Merci d'avoir essayé de convaincre le conseil départemental du Jura, lequel m'a fait parvenir la liste des nouvelles charges induites par le dispositif. Le minimum requiert de les évaluer et, le cas échéant, de les compenser.

Inquiétudes pour Bridgestone à Béthune

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - Depuis un an, l'attitude de Bridgestone inquiète. Veut-il fermer le site de Béthune ? Le groupe japonais a développé des usines en Europe de l'Est, et met en concurrence ses sites d'Europe de l'Ouest. Le site de Béthune est privé d'investissements. La direction a ramené l'objectif de production de 18 000 pneus par jour à 9 000 en décembre 2019. Une centaine d'emplois intérimaires sont en passe d'être supprimés.

Nous savons que le président de la République a échangé avec le Premier ministre du Japon, et le ministre avec le président européen du groupe, M. Paolo Ferrari, sans que rien ne transpire de ces rencontres. Ce silence contribue à installer une psychose anxiogène chez les salariés et les élus du territoire. Le sort de Goodyear, à Amiens, est dans toutes les mémoires.

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances .  - Ce dossier a été particulièrement suivi par le Gouvernement, qui avait salué la perspective de l'accord collectif de performance de mai dernier.

L'actionnaire s'engageait à investir massivement sur le site et à conserver plus de 1 000 emplois, avec l'assurance d'un plan de charge correct de l'usine jusqu'en 2021. Les salariés ont hélas refusé, par référendum, cet accord, en raison notamment d'informations parfois erronées, au moment de sa présentation.

Nous avons bien sûr maintenu le contact avec l'actionnaire principal de Bridgestone, mais la conjoncture est délicate pour le marché du pneumatique en France et en Europe.

Les Chinois sont passés de 5 % à 30 % de parts de marché en dix ans, en raison des choix des consommateurs attirés par des prix inférieurs.

Les échanges se poursuivent entre la direction et mes équipes en lien avec la région des Hauts-de-France. À ce stade, aucun des éléments transmis ne permet d'affirmer que le groupe Bridgestone souhaite fermer l'usine. Chacun doit prendre ses responsabilités pour un climat social apaisé et une issue favorable pour l'avenir de ce site.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - La direction n'a jamais investi dans ce site, notamment sur les pneus connectés, plus rentables.

Salariés et élus ont besoin d'avoir l'État à leurs côtés. Quels signes pouvez-vous nous donner ? J'espère que la réunion avec l'intersyndicale jeudi prochain ira en ce sens.

Distribution du courrier dans le Val-de-Marne

M. Laurent Lafon .  - Depuis de trop nombreuses semaines, la distribution du courrier postal à Vincennes et à proximité s'est fortement dégradée, et aggravée ces derniers temps, avec des quartiers entiers non desservis, ce qui pénalise particuliers et entreprises, paralysées. À ce jour, ces démarches et les nombreuses sollicitations de nos concitoyens n'ont pas abouti.

Le contrat d'entreprise entre l'État et La Poste pour 2018-2022, signé en janvier 2018, lie l'État à La Poste pour la bonne exécution des quatre missions de service public confiées par la loi à celle-ci, dont le service universel postal courrier et colis fait partie.

L'article L. 1 du code des postes et des communications électroniques définit les contours du service universel qui comprend notamment une levée et une distribution six jours sur sept sur l'ensemble du territoire national. Le contrat entre l'État et La Poste n'est pas respecté.

Je salue l'engagement, la mobilisation et la détermination des équipes municipales et des maires de Maisons-Alfort et Charenton, Vincennes et Saint-Mandé, notamment, à rappeler au Gouvernement les obligations du service public postal.

Ils ont mis en relation La Poste avec les entreprises locales et tous les acteurs susceptibles de résorber le déficit d'emploi. L'opérateur doit transmettre chaque semaine les chiffres sur les courriers en souffrance. La semaine passée, 40 % de ceux de Vincennes seulement étaient traités et l'on espérait un retour à la normale à la fin du mois.

Il faut poursuivre les efforts, tandis que de nouvelles difficultés apparaissent dans d'autres communes du département. C'est une évolution positive, mais nous restons mobilisés, d'autant que de nouveaux problèmes apparaissent à Villecresnes, Santeny ou Chevilly-Larue.

Quelles mesures prendrez-vous pour que La Poste respecte strictement le contrat de service public universel qui la lie à l'État dans le Val-de-Marne ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances .  - La loi du 9 février 2010 a confirmé le service universel postal, dont dépend la distribution du courrier. Nous veillons à la qualité de ce service.

Mais l'adaptation de l'organisation de la distribution revient à La Poste. Le transport et la distribution de courrier diminuent inexorablement : de 17,7 milliards d'objets en 2010 à 9,9 milliards d'objets en 2018, soit une réduction de 43 % en dix ans. La Poste doit s'adapter.

Elle développe de nouvelles activités pour préserver ses obligations de service. Pour ce faire, elle a choisi d'investir sur l'atout majeur que représente son réseau de factrices et de facteurs. Toutefois, elle connaît des difficultés de recrutement dans le Val-de-Marne où les grands chantiers en Île-de-France, (le Grand Paris, les Jeux Olympiques 2024, la remise à niveau de certaines infrastructures, la construction de 70 000 logements) captent une part importante du marché de l'emploi. La Poste s'efforce de trouver au plus vite des solutions en s'appuyant sur ses partenaires locaux.

La Poste a mis en place de nouvelles organisations, le 16 septembre dernier, dans les centres de Vincennes et Saint-Mandé. Dans le Val-de-Marne, comme ailleurs, elles nécessitent un temps d'adaptation et d'ajustement. Malgré des difficultés, un plan de retour à la normale est prévu rapidement. À l'échelle régionale, 45 facteurs experts seront pleinement opérationnels dès le mois de novembre, dont 15 plus particulièrement mobilisés sur le département du Val-de-Marne.

L'État veille à ce que les adaptations menées par La Poste en matière de distribution du courrier soient conçues et conduites de façon à maintenir un haut niveau de qualité de service au profit des usagers.

Dématérialisation des marchés publics

M. Laurent Duplomb .  - Pouvez-vous me répondre, avec bon sens, sans lire de texte, simplement, en me livrant votre vision, après avoir bien écouté ma question, sur le seuil de dématérialisation des marchés publics, de 25 000 euros depuis le 1er octobre 2018 ?

Souvent, les maires sont obligés de répondre en urgence à des travaux nécessaires. En Haute-Loire, une commune doit ainsi aménager un bâtiment pour l'installation d'un dentiste à partir du 15 décembre.

Or, avec la règle de dématérialisation à partir de 25 000 euros de travaux, il faut un règlement de consultation, un cahier des charges, un descriptif quantitatif, une analyse des offres, une notification des offres retenues, suivie des choix des entreprises, et j'en passe, le tout dans des délais encadrés et stricts : tout cela prend trois mois !

Madame la ministre, lâchez du lest aux maires, dématérialisez à partir de 50 000 ou 70 000 euros, avec un appel d'offres simplifié, pour les petits travaux, avec trois devis, le maire choisissant le moins cher ou celui qui répond le mieux aux critères prédéfinis ! Cette technocratie nous ajoute du retard et énormément de papiers. Les entreprises n'arrivent guère à répondre pour des montants aussi faibles. Répondez-moi sans lire, donnez-moi votre vision et votre avis personnels ! (Bravos et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances .  - Soit. Vous confondez dématérialisation et procédures d'appels d'offres qui s'appliquent à compter du seuil de 25 000 euros. Un décret qui sera prochainement publié et est en cours d'examen au Conseil d'État le portera à 40 000 euros, soit le niveau médian en Europe, dès début 2020.

Pour le reste, la dématérialisation est une obligation européenne, qui - faut-il le rappeler ? - simplifie tout de même la vie des administrations et des entreprises, en particulier des TPE et des PME, et réduit les coûts administratifs de 5 % à 25 %. Elle nécessite cependant un bon réseau internet...

MM. Jacques Genest et Bernard Bonne.  - Oh oui !

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État.  - ... pour télécharger le cahier des charges, raison pour laquelle nous travaillons sur le très haut débit et la 4G. Bref, la dématérialisation est une simplification, pour les entreprises et les collectivités locales, et je m'en réjouis : voici ma réponse, sans papier !

M. Jacques Genest.  - Presque !

Difficultés bancaires des « Américains accidentels »

M. Richard Yung .  - Ma question concerne les difficultés bancaires et fiscales auxquelles sont confrontés les Français binationaux dits « Américains par accident » - nés sur le sol américain et qui ont de ce fait la nationalité américaine, sans être en relation avec ce pays - victimes collatérales de l'accord franco-américain du 14 novembre 2013 de mise en oeuvre de la loi américaine Foreign Account Tax Compliance Act, dite « Fatca ».

Le Gouvernement avait engagé une action diplomatique auprès des autorités américaines en vue d'obtenir un traitement dérogatoire, leur permettant, soit de renoncer à la citoyenneté américaine par une procédure simple et gratuite, soit d'être exonérés d'obligations fiscales américaines. Où en est-on ?

La question de la CSG et de la CRDS a finalement été réglée par un accord entre les deux administrations fiscales.

Depuis le 18 mars 2010, un dégrèvement est possible pour les personnes ayant renoncé à leur citoyenneté américaine.

En revanche, il semble qu'aucune avancée n'ait été enregistrée s'agissant de la transmission du numéro d'identification fiscale (NIF) américain. Craignant de faire l'objet de sanctions à compter du 1er janvier 2020, les banques françaises ont fait savoir qu'elles pourraient fermer les comptes des « personnes américaines » se trouvant dans l'impossibilité de fournir un NIF américain. Quelque 40 000 comptes bancaires seraient concernés. Les démarches entreprises par le Gouvernement auprès des autorités de Washington ont-elles des chances d'aboutir d'ici le 31 décembre 2019 ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances .  - Nous travaillons à ce dossier, en particulier avec les Pays-Bas.

Nous avons obtenu des avancées concernant la CSG et la CRDS. Des situations de double imposition ont ainsi été résolues.

Les difficultés rencontrées avec les établissements bancaires du fait du NIF font l'objet de discussions avec les autorités américaines car la dérogation précédemment accordée pour recueillir ce numéro d'identification arrive à échéance au 1er janvier 2020.

Pour conserver un compte en banque, les « Américains par accident » ont en effet besoin d'un Tax Identification Number (TIN) que l'administration américaine ne leur délivre pas. La situation est ubuesque.

Notre initiative a abouti à une publication par l'IRS (Internal Revenue Service), le 15 octobre, d'un complément aux instructions existantes, stipulant que l'absence du TIN transmis par les banques ne conduirait pas à une fermeture des comptes concernés.

Les négociations se poursuivent toutefois pour préciser la réglementation : avec mon homologue des Pays-Bas, nous allons cosigner un courrier afin de continuer à mettre la pression sur les autorités américaines, de telle sorte que les banques françaises puissent continuer en toute sécurité leurs relations avec ces Américains particuliers.

M. le président.  - Madame la ministre, j'attire votre attention sur le fait que vous avez dépassé d'une minute votre temps de réponse.

Frais de gestion des épaves de voitures

Mme Nathalie Delattre .  - La gestion par les municipalités d'épaves de voitures dont le propriétaire est injoignable ou inconnu est un problème récurrent pour nos mairies.

Il n'existe aucune définition juridique de « l'épave de véhicule ». Mais plusieurs dispositions législatives permettent aux autorités publiques, au premier rang desquelles le maire, de procéder à l'enlèvement des véhicules hors d'usage. Il dispose d'un pouvoir d'injonction lui permettant de mettre en demeure le titulaire du certificat d'immatriculation de remettre le véhicule en état de circuler ou de le transférer dans un centre de véhicules hors d'usage agréé.

Lorsque cette mise en demeure n'est pas suivie d'effet, le maire peut recourir à un expert automobile pour déterminer si le véhicule est réparable ou non. Si le véhicule est réparable, le maire procède à la mise en fourrière du véhicule mais, s'il est irréparable et constitue donc une épave, le maire peut procéder à son évacuation d'office vers un centre de véhicules hors d'usage agréé.

Mais le financement de ces opérations conduites par le maire et la municipalité lorsque le propriétaire du véhicule en question est injoignable ou inconnu n'est pas précisé. Lever ce flou juridique était le but de mon amendement, présenté dans le cadre du projet de loi Engagement et proximité, et que le Gouvernement a balayé d'un revers de la main, au motif que ce dernier était satisfait...pourtant personne ne semble l'être !

La facilitation de l'accès au système d'immatriculation des véhicules (SIV) pour la direction générale des finances publiques permettrait d'assurer le recouvrement des frais par le dernier propriétaire de la carte grise du véhicule enregistré. Actuellement, seul le maire en tant qu'officier de police judiciaire a un accès direct au SIV mais, sur le terrain, cela ne semble pas être un outil utile ou applicable. Les agents des finances publiques pourraient utilement y avoir accès pour accélérer les procédures et libérer ainsi les collectivités territoriales de cette charge qui atteint, pour Bordeaux, 226 euros par véhicule, après une procédure chronophage et décourageante. Quelles mesures comptez-vous prendre ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances .  - Ces frais sont en effet à la charge de la collectivité territoriale lorsque le propriétaire est introuvable. Leur coût est élevé. Pour le limiter, simplifier et moderniser les procédures, un dispositif nouveau sera mis en oeuvre, dès le 1er janvier 2020. La Délégation à la sécurité routière développe un système d'information national des fourrières qui sera opérationnel à la fin 2020.

Les ventes frauduleuses des véhicules d'occasion rendent parfois complexes le recouvrement des frais : l'accès au système d'immatriculation des véhicules, auquel les collectivités locales pourront adhérer, est, en revanche, garanti aux agents publics par l'article L. 332-7 du code de la route.

C'est pourquoi nous avions estimé que votre amendement était satisfait.

Statut des forestiers-sapeurs

M. Jacques Genest .  - Les forestiers-sapeurs sont des fonctionnaires territoriaux chargés de la surveillance des massifs forestiers et de la réalisation des travaux d'entretien, pour prévenir les feux de forêt, au profit d'ouvrages classés « défense des forêts contre les incendies ». Ce sont des partenaires incontournables pour les sapeurs-pompiers.

Bien qu'ils aient obtenu des évolutions de leur statut avec la reconnaissance de leurs compétences professionnelles, le métier de forestier-sapeur n'est pas référencé par le répertoire des métiers territoriaux élaboré par le centre national de la fonction publique (CNFPT). La catégorie d'emploi retenue dans le cadre de la prise en compte de la pénibilité au travail et dans le calcul de leurs pensions de retraite est la catégorie sédentaire, qui ne correspond pas aux missions qu'ils effectuent et aux risques qu'ils encourent.

Une classification de leur métier dans la catégorie active ouvrirait droit pour les agents titulaires qui remplissent les conditions de durée de services nécessaires, à certains avantages en matière de retraite. Ce serait aussi une reconnaissance pour des professionnels dévoués.

La prise en compte de la pénibilité de certains métiers devait faire l'objet d'une réflexion d'ensemble dans le cadre de la réforme des retraites. Quelle est la position du Gouvernement concernant les voies d'amélioration du statut des forestiers sapeurs ? Faudra-t-il attendre quarante ans, qu'ils soient tous grands-pères?

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances .  - Les fonctionnaires territoriaux affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) peuvent se voir reconnaître un classement particulier, en catégorie active, en fonction des tâches réalisées.

L'arrêté du 12 novembre 1969 précise les contours de cette catégorie. Les sapeurs-pompiers professionnels et certains ouvriers professionnels y sont intégrés, ainsi que les adjoints techniques territoriaux qui occupent parfois un emploi de forestier sapeur. Le Gouvernement n'envisage pas d'étendre le champ de cet arrêté avant l'aboutissement des négociations en cours sur la pénibilité et les risques dans le cadre de la réflexion transversale et globale menée par le Haut-commissaire aux retraites. Elle doit aboutir en 2020 et pas dans quarante ans !

M. Jacques Genest.  - Je vous remercie, mais je connais bien le CGCT... Je retiens surtout que le Gouvernement n'entend rien changer. À ce rythme, ce sera plutôt dans quarante ans puisque certains régimes spécifiques devraient finalement être épargnés. Pauvres sapeurs-forestiers !

Agence de gestion et de développement informatique

M. Bernard Bonne .  - J'ai été saisi par des maires de petites communes rurales car l'assujettissement de l'Agence de gestion et de développement informatique (Agedi) aux impôts commerciaux entraînerait pour les communes membres une hausse insoutenable de leurs coûts informatiques.

Malgré les questions écrites adressées à vos services, ils sont restés évasifs et s'abritent derrière le secret fiscal, alors que les comptes de l'Agedi, établissement public gestionnaire de deniers publics, sont publics. Cela n'a aucun sens.

Les autres arguments invoqués par votre administration sont totalement infondés. Le Gouvernement justifie l'assujettissement de l'Agedi à l'impôt sur les sociétés, par le fait que le syndicat ne répondrait pas à un besoin fondamental des populations. Or la jurisprudence limite cette exigence aux cas où il existe une régie, ce qui n'est pas le cas de l'Agedi. Il paraît également aberrant de prétendre que doter une mairie de moyens informatiques nécessaires à son bon fonctionnement, à l'heure de la dématérialisation des services, ne répond pas à un besoin collectif des populations.

Par ailleurs, au regard de « la règle des 4P » - produit, public, prix, promotion - qui permet d'analyser les conditions dans lesquelles la concurrence s'exerce vos services ne peuvent, comme ils le font, prétendre que l'activité de l'Agedi soit lucrative et non distincte des éditeurs privés. En effet, les adhérents de l'Agedi n'acquittent à aucun moment un prix qui incorporerait une marge. La logique qui prévaut est celle d'un partage des coûts sur la base de cotisations des membres en fonction de leur population.

Les prestations, logiciels, formation et hotline sont assurés sans aucune contrepartie financière. L'Agedi fournit des matériels à ses membres. Les collectivités membres de l'Agedi sont, dans leur immense majorité, des collectivités de petite taille qui ne disposent ni du budget, ni du personnel possédant les compétences informatiques nécessaires. Enfin, l'Agedi ne procède à aucune démarche de promotion commerciale. Ce syndicat n'exerce donc en aucune façon son activité dans les mêmes conditions que les acteurs privés de l'édition de logiciels.

Cette position de l'administration fiscale ne dissimulerait-il pas la volonté politique d'une nouvelle ponction fiscale sur les collectivités, souvent parmi les plus pauvres, via leurs syndicats ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances .  - Du fait du secret fiscal, nous ne fournissons pas d'informations précises sur l'Agedi, pas plus que sur tout autre particulier ou entreprise ou organisation, quels qu'ils soient.

Le régime applicable résulte de la nature des activités de la structure : si elles sont lucratives, les syndicats mixtes sont assujettis à l'impôt sur les sociétés mères. Des dérogations sont possibles si leur activité est indispensable à la satisfaction des besoins collectifs. Cela réclame un examen au cas par cas. Des discussions approfondies sont en cours entre l'Agedi et la DGFiP.

M. Bernard Bonne.  - Je transmettrai votre réponse aux maires concernés sur la possibilité d'obtenir une exonération.

Comptabilité des établissements pour personnes âgées dépendantes

M. Gilbert Bouchet .  - Ma question porte sur l'adaptation de l'instruction comptable des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) rattachés aux établissements de santé, qui ne permet pas actuellement de lisser sur plusieurs années les charges afférentes aux investissements immobiliers. En effet, les départements, en leur qualité d'autorité de tarification, doivent autoriser la constitution de provisions pour immobilisation et affecter un excédent réel d'exploitation à un compte spécifique qui pourra être repris lors de la réalisation des investissements. Une modification de l'instruction comptable est nécessaire.

Dans la Drôme, six établissements sont concernés dont l'Ehpad de Beauvallon, géré par le centre hospitalier de Valence. Pour ce dernier, le plan pluriannuel, approuvé par l'agence régionale de santé (ARS) et le conseil départemental, prévoit des provisions qui ont été refusées par la Direction générale des finances publiques (DGFiP).

Dans quelle mesure peut-on modifier l'instruction comptable actuelle « M21 » pour intégrer l'application d'un dispositif de provision pour investissement similaire à celui prévu par la « M22 », afin de permettre à ces établissements de réaliser leurs investissements destinés à l'amélioration de l'accueil des séniors tout en maîtrisant l'évolution des prix de la journée pour l'usager ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances .  - Les Ehpad sont financés par les départements, l'assurance maladie et les usagers au titre de l'hébergement. Le tarif est déterminé par le président du conseil départemental. Lors de travaux de réhabilitation, les charges d'immobilisation peuvent conduire à augmenter le prix de journée à due concurrence.

Les arrêtés de 2008 et de 2014 sur les instructions budgétaires et comptables M21 et M22 permettent de verser des avances aux établissements pour régler ces charges sans augmenter leurs tarifs. Ce dispositif vaut pour l'ensemble des Ehpad publics.

Les instructions M21 et M22 offrent les mêmes possibilités aux Ehpad en matière de provisionnement et de financement des charges liées à des investissements. Cette analyse est partagée par la Direction générale de la cohésion sociale.

Dysfonctionnements des services postaux dans l'Essonne

Mme Jocelyne Guidez .  - Je souhaite attirer votre attention sur les dysfonctionnements des services postaux dans le département de l'Essonne. En effet, depuis plusieurs mois, de nombreuses communes sont touchées par des difficultés liées à l'acheminement du courrier. Celles-ci sont régulières et exaspèrent de plus en plus la population. C'est le cas d'Igny, de Bures-sur-Yvette, des Ulis, de Vert-le-Petit, du Coudray-Montceaux, de Bouray-sur-Juine, de Saintry-sur-Seine, de Saint-Chéron notamment.

Ces difficultés s'expliquent par la gestion des ressources humaines, en particulier lorsque le personnel n'est pas remplacé pendant les vacances. À ces perturbations s'ajoutent les différents projets de modification d'horaires d'ouverture de quelques bureaux et ceux, encore plus dommageables, de fermeture définitive contre lesquels les élus locaux demeurent pleinement mobilisés.

Ces situations ne sont pas sans conséquences pour les collectivités territoriales, les particuliers et les entreprises. Malgré l'envoi de courriers officiels et le soutien de parlementaires, des maires ont décidé d'agir en justice. Cette situation ne peut plus durer. Le principe d'égalité, reconnu dans la Constitution, ne saurait être apprécié à degrés variables selon les territoires. Il appartient aux acteurs privés et publics de se mobiliser en faveur d'un service de proximité et de qualité. Quelles démarches le Gouvernement entend-il prendre avec le groupe La Poste pour mettre fin à cette situation et pour instaurer, enfin, une égalité de traitement entre les communes ?

Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances .  - J'ai apporté des éléments de réponse sur les réorganisations en cours à La Poste à M. Lafon. La situation est similaire en Essonne. Depuis le début de l'année, 43 facteurs ont été recrutés dans l'Essonne, afin d'améliorer rapidement la situation : seuls trois sites sur 35 rencontrent des difficultés. Ils feront l'objet d'un soutien particulier.

En 2019, des recrutements ont été réalisés alors qu'ils étaient prévus en 2020 sur ces sites.

Mme Jocelyne Guidez.  - Les horaires d'ouverture des postes sont plutôt en voie de contraction...

Prime de vie chère et aides au logement en Haute-Savoie

Mme Sylviane Noël .  - Vivre et travailler en Haute-Savoie coûte cher, ce qui pose aujourd'hui de sérieux problèmes sur le marché de l'emploi de ce département, public comme privé.

Avec plus de 10 000 nouveaux habitants chaque année en Haute-Savoie, il devient difficile de maintenir certains services à la population pourtant vitaux, par manque de candidats. En effet, les agents qui arrivent du reste de la France renoncent au bout de quelques mois à rester en poste du fait du coût élevé de la vie, et notamment du logement.

Dans tous les secteurs d'activité, le taux de vacance de postes est critique, surtout dans la fonction publique hospitalière.

La proximité avec la Suisse voisine, notamment dans le Genevois et le Chablais, amplifie encore ce phénomène en particulier pour les professions du secteur de la santé, en raison de l'attractivité des salaires en Suisse.

Cet été, 150 lits d'établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ont été fermés dans le département, faute de personnel. L'octroi d'une prime de vie chère ou indemnité de résidence en Haute-Savoie se révèle aujourd'hui incontournable.

Il faut aussi corriger le zonage A, B, C qui est inadapté. Il prend comme critère de classement la tension du marché immobilier local. De nombreuses communes de la Haute-Savoie, et notamment celle de Chamonix-Mont-Blanc, mériteraient d'être classées en zone B1 au lieu de leur classement actuel en zone B2. Ainsi, un appartement à Chamonix coûte 6 454 euros du mètre carré et 8 647 euros pour une maison. Bloquée en zone B2, la commune est privée de nombreuses aides à l'investissement locatif intermédiaire, notamment la TVA à taux réduit qui s'applique aux logements intermédiaires portés par les investisseurs institutionnels en zone A et B1.

La Haute-Savoie, en raison de son caractère atypique, mérite un zonage adapté. Quelles sont les intentions du Gouvernement ?

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement .  - Vous avez raison, le logement empêche l'installation des agents du service public dans certains territoires. Faut-il faire évoluer le zonage ? La politique de logement doit être territorialisée ; le « Denormandie dans l'ancien » est mis en oeuvre par les communes, ainsi que je le voulais.

Le projet de loi de finances pour 2020 prévoit une expérimentation en Bretagne consistant à confier le zonage aux collectivités territoriales.

Deuxième élément, la production de logements abordables, ce qui passe par la production de logements sociaux mais aussi l'accès à des logements à loyers modérés via les organismes de foncier solidaire. La solution réside, c'est évident, dans une politique territorialisée.

M. le président.  - Je suspends la séance pour la cérémonie d'hommage aux sénateurs et fonctionnaires morts pour la France.

La séance, suspendue à midi cinq, reprend à midi vingt-cinq.

Dédoublement de la réduction de loyer de solidarité

M. Alain Cazabonne .  - Saisi par une maire de Gironde, également présidente de l'office HLM de la métropole, j'attire votre attention sur la politique du Gouvernement en matière de logement social. La concentration annoncée des bailleurs sociaux couplée à une baisse de leurs ressources inquiète fortement les offices publics de l'habitat. Ce mouvement a été engagé par la loi de finances pour 2018 et la loi ELAN, avec la mise en place de la réduction de loyer de solidarité (RLS), l'augmentation de la TVA, l'augmentation de la contribution à la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS)... Certes, des compensations existent, comme la vente d'HLM pour créer des ressources supplémentaires, toutefois suspendues à l'accord du maire, le taux d'endettement limité à 50 % par la Caisse des dépôts et consignations (CDC), les prêts de haut de bilan bonifiés (PHBB) et les prêts dits « booster » pour favoriser la construction neuve. Cela est insuffisant, au vu de tous ces facteurs qui ont un impact lourd sur les organismes de logements sociaux. Ces derniers sont obligés de se regrouper, ce qui réduit fortement, sur les territoires, le nombre des acteurs en mesure de développer et de gérer le patrimoine locatif social. Le doublement de la réduction de loyer de solidarité, programmé pour 2020, va accélérer ce mouvement néfaste pour nos agences nationales de l'habitat. Comment pallier ces difficultés ?

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement .  - Je crois au modèle français du logement social, envié par nos voisins britannique et allemand. Le logement social est un véritable tremplin pour certains ménages, parfois une aide qui dure toute une vie.

Je me suis opposé à toute financiarisation des bailleurs sociaux, et face aux doutes suscités par notre réforme du secteur, nous avons instauré une clause de revoyure avec les bailleurs sociaux.

Nous avons également signé avec l'ensemble des familles de bailleurs sociaux, en avril dernier, un pacte prévoyant l'agrément de 110 000 logements par an et des objectifs tant en construction qu'en rénovation.

Les regroupements favorisés ont commencé, dans le prolongement d'une dynamique déjà engagée. Plus de huit organismes sur dix ont déjà procédé à ces regroupements. La réforme va dans le bon sens, je crois.

M. Alain Cazabonne.  - Je prends acte de l'engagement du ministre et transmettrai votre réponse, mais le diable est dans les détails.

M. Julien Denormandie, ministre.  - Je suis à votre disposition.

Utilisation de la cocarde par les maires

M. Jean-Marc Boyer .  - L'actualité récente abonde d'agressions verbales et physiques contre les élus. Le respect dû au représentant de la démocratie locale, officier de police judiciaire (OPJ) n'existe plus. Il conviendrait que les maires puissent apposer la cocarde tricolore sur leur véhicule, ce que le décret du 30 septembre 1989 sur le sujet ne les autorise pas à faire.

Répondant à une question de Rémy Pointereau, le ministre de l'Intérieur a suggéré des signes alternatifs qui sont à disposition des maires, comme le blason ou les armoiries... Ce serait un peu ridicule de les transporter dans sa voiture ! Pourquoi ne pas autoriser la cocarde ?

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement .  - Veuillez excuser la ministre Jacqueline Gourault et le ministre Sébastien Lecornu, qui m'ont prié de vous répondre. Mais avant cela je tiens, à titre personnel, à adresser tout mon soutien, ma reconnaissance et ma gratitude pleine et entière aux maires. Ils sont les représentants de la République au quotidien sur nos territoires.

Le respect dû aux élus dépasse la question de la cocarde. Comment le faire vivre ? Dans une société républicaine, la singularité des élus du peuple est reconnue.

Vous avez déjà rappelé les éléments de réponse dans votre question ! Le décret de 1989 n'autorise pas, effectivement, les maires à utiliser la cocarde. La question a été débattue lors de l'examen du projet de loi Proximité et engagement. Nous avons choisi de ne pas faire évoluer la législation.

Guichet de cohésion numérique et aide à l'équipement numérique

M. Jean-Yves Roux .  - Le Premier ministre a annoncé, le 22 mars 2019, l'ouverture du guichet de cohésion numérique, attendu depuis de long mois.

Les foyers situés dans des territoires où la fibre peut difficilement être installée pourront bénéficier de technologies alternatives par le satellite et la boucle locale radio, et bénéficieront à ce titre d'une aide de 150 euros. Or, quelques mois après l'annonce, la mise en oeuvre est difficile.

Le montant maximal de 150 euros par foyer semble très en deçà du coût réel de certaines infrastructures : l'achat d'une parabole, équipement très prisé en montagne, mais aussi d'un décodeur et leur installation coûtent en totalité au moins 350 euros soit 42 % du minimum vieillesse : une somme trop élevée pour les plus modestes. Certains sites nécessiteront des choix technologiques encore plus onéreux.

À La Rochelle, le satellite a été la solution retenue comme la plus pertinente... sur le plan économique uniquement, car elle n'est pas la plus adaptée ! Il s'agit pourtant d'aménagement du territoire ! Que va faire le Gouvernement ?

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement .  - Vous connaissez mon engagement sur le sujet. Nous avons conclu un new deal avec les opérateurs. Fin 2019, 4 millions de logements seront fibrés, soit quatre fois plus qu'en 2016-2017 ; le rythme de déploiement du très haut débit est doublé. C'est un effort sans commune mesure avec celui de nos voisins.

Toutefois, il reste des endroits où la fibre et le fil n'arriveront pas en premier. C'est alors la double peine, puisque les solutions adaptées seront plus coûteuses.

Face à cela, nous agissons sur deux fronts : renforcer les infrastructures territoriales, avec les réseaux d'initiative publique (RIP), et le guichet numérique, rouvert il y a trois semaines ; accompagner les Français qui doivent acheter un boîtier pour le satellite ou le hertzien, nous apportons une aide de 150 euros. Onze opérateurs se sont déjà engagés dans le dispositif.

Situation de France-Antilles

Mme Victoire Jasmin .  - J'attire votre attention sur la situation du groupe de presse quotidienne régionale, France-Antilles, avec ses 280 salariés aux Antilles et en Guyane.

France-Antilles, le seul journal de presse écrite des Antilles-Guyane, est aujourd'hui, cinquante-cinq ans après sa création, menacé de disparition pour des difficultés financières.

Des décisions du tribunal de commerce de mai 2019 ont été suivies d'un projet de reprise et d'annonces de soutien. Mais l'angoisse demeure. Qu'allez-vous faire pour éviter les licenciements ? Que deviendra le patrimoine immobilier ? La mise en place d'un Comité interministériel des restructurations industrielles (CIRI) n'a pas rassuré.

M. Franck Riester, ministre de la culture .  - La presse quotidienne régionale joue un rôle essentiel dans notre démocratie, comme le président de la République l'a rappelé, s'exprimant à l'occasion des cent ans de La Montagne. Par son tissu et son pluralisme, la presse quotidienne régionale joue un rôle de lien important.

Le CIRI est mobilisé pour accompagner France-Antilles. Une mission commune est menée par les inspections générales des affaires culturelles et de l'administration. Nous sommes mobilisés pour réduire l'impact social au minimum ; nous travaillons à un plan de filière pour ces groupes de presse. Avec ma collègue des outre-mer, nous réfléchissons aussi à des solutions spécifiques pour ces territoires.

Le pluralisme des opinions sera préservé, soyez-en assurée.

Mme Victoire Jasmin.  - J'espère que le Gouvernement se saisira de ce dossier.

Entretien des églises de l'Oise

M. Max Brisson, en remplacement de M. Édouard Courtial .  - Je pose cette question au nom du sénateur de l'Oise, M. Édouard Courtial. Elle porte sur l'entretien du patrimoine religieux de l'Oise.

Malgré leur engagement, les élus ne peuvent plus entretenir les églises rurales.

Un amendement de la loi de restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris prévoyait que les excédents reviennent aux petites églises de campagne.

Malgré un dispositif spécifique du conseil départemental de l'Oise pour aider 48 communes à restaurer leurs édifices, le reste à charge est souvent insurmontable.

C'est pourquoi l'article 24 du projet de loi Engagement et proximité a prévu un subventionnement à 100 %. Mais ceci ne sera-t-il pas défait à l'article 50 du projet de loi de finances sur le mécénat ?

Monsieur le ministre, ces églises sont le coeur battant des villages de France.

M. Franck Riester, ministre de la culture .  - Sur les 320 millions d'euros consacrés aux monuments historiques, la dotation pour les édifices religieux s'élève à 127 millions d'euros, certes pour les cathédrales, mais pas seulement. Les directions régionales de l'action culturelle soutiennent les restaurations, et nous avons aussi augmenté le montant du fonds spécifique pour le patrimoine des petites communes, de 15 millions d'euros.

La dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) est un autre levier d'action. Le Gouvernement a aussi porté de 2 000 à 20 000 habitants le seuil de labellisation par la Fondation du patrimoine.

Vous le voyez, nous essayons de répondre de manière ciblée à cette problématique spécifique. Citons enfin le Loto du patrimoine et la mission menée par Stéphane Bern.

M. Max Brisson.  - Je vous remercie de votre réponse ; mais vous n'avez pas répondu sur le mécénat et les dispositions du projet de loi de finances pour 2020 sur ce point.

La séance est suspendue à midi cinquante.

présidence de M. Gérard Larcher

La séance reprend à 16 heures.

Financement de la sécurité sociale pour 2020

M. le président.  - L'ordre du jour appelle l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2020.

Discussion générale

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé .  - Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) est un instrument majeur de la conduite des politiques publiques. C'est dans un esprit de responsabilité que j'en présente devant vous les grands axes. La maîtrise de nos dépenses est un impératif. Nous ne pouvons hypothéquer l'avenir de notre protection sociale ni faire peser sur les générations futures le poids d'une dette insoutenable.

Nous ne faisons pas des économies à tout prix, notamment dans des secteurs en souffrance. Construire la protection sociale du XXIe siècle, c'est pérenniser un système public et universel de santé et créer de nouveaux droits pour faire face à de nouveaux risques, technologiques, industriels ou phytosanitaires. À ce titre, je me réjouis de la création d'un fonds d'indemnisation des victimes de produits phytosanitaires, initié par le groupe socialiste au Sénat.

Nous devons aussi appréhender les risques liés au vieillissement et à la perte d'autonomie. Le PLFSS engage le premier volet de la réforme de la dépendance, avec l'indemnisation du congé de proche aidant pour trois mois. Je remercie les sénateurs qui ont initié ce débat, à commencer par le groupe Union centriste.

Envisager l'avenir de notre protection sociale, c'est aussi changer de méthode et passer d'une approche curative à une approche préventive, prendre en compte des trajectoires individuelles et non le seul statut.

Il s'agit d'intervenir avant que les risques ne se manifestent. Je pense au scandale des pensions alimentaires non versées. Avec Christelle Dubos, nous proposons un dispositif qui sécurise les familles monoparentales.

Prévenir l'apparition des risques sociaux, c'est aussi démultiplier nos efforts auprès des plus fragiles. Avec Adrien Taquet, nous systématisons le bilan de santé et l'orientation dans un parcours de soins des enfants de l'aide sociale à l'enfance (ASE).

Notre protection sociale doit s'attacher toujours plus aux individus, aux parcours et aux transitions. La complexité est souvent cause de ruptures des droits. Nous simplifions, en articulant mieux les aides sociales et le passage d'une aide à une autre, afin que le système s'adapte aux trajectoires. C'est par exemple l'automatisation de la bascule entre le revenu de solidarité active (RSA) ou l'allocation aux adultes handicapés (AAH) vers les droits à la retraite, ou l'accès à la nouvelle complémentaire santé solidaire.

Autre simplification, l'allègement des procédures pour vérifier l'aptitude à la pratique sportive des mineurs, qui suscite, je le sais, des interrogations.

Nous étoffons les parcours de soins post-cancer et mettons en place un nouveau droit pour les femmes enceintes habitant loin d'une maternité. Nous n'esquivons pas les inégalités territoriales ; au contraire, nous allons vers les populations fragiles. C'est le sens de la réforme du financement de la psychiatrie et des mesures de lutte contre les déserts médicaux, avec les contrats d'installation et les exonérations de cotisations, comme je m'y étais engagée.

Un autre engagement portait sur le financement des hôpitaux de proximité. Transformer notre système de santé, c'est aussi redonner du sens et de la confiance. Je connais la situation de l'hôpital public, j'y ai exercé toute ma carrière. Les causes sont multiples et les responsabilités partagées, mais des années de régulation violente ont conduit à une crise de l'investissement et à une crise existentielle.

Nous avons commencé à agir avec le dégel 2018 et la restitution de la sous-exécution de l'Objectif national des dépenses d'assurance maladie (Ondam) 2018. En 2019, l'Ondam a été relevé à 2,5 %.

Un pacte de refondation des urgences a été annoncé, et un amendement adopté à l'Assemblée nationale en ce sens.

Le chantier de l'attractivité des métiers du vieillissement et des professions hospitalières devra lui aussi concourir au nécessaire choc de confiance.

L'Ondam 2020 est construit sur une hypothèse de progression de 2,3 %, soit 1,7 million d'euros de ressources supplémentaires pour l'hôpital. À l'initiative du Gouvernement, un amendement a été adopté à l'Assemblée nationale pour donner une vision pluriannuelle aux établissements.

Enfin, nous réformons les modes de financement pour inciter à plus de prévention, à une plus grande pertinence des soins et une meilleure coordination entre les professionnels.

Depuis plusieurs semaines, je rencontre les acteurs de l'hôpital ; j'échange aussi avec les élus et les représentants des usagers. J'ai déjà fait des annonces sur les urgences. Je poursuis les réflexions sur l'attractivité, sur la prochaine campagne tarifaire et sur les investissements hospitaliers.

Je ferai des annonces dans les prochains jours. Le plan global que je suis en train d'établir prendra en compte nos échanges. Je comprends votre impatience, car je respecte le rôle du Parlement.

Votre commission des affaires sociales a adopté une motion de renvoi en commission. C'est un acte fort, mais l'hôpital mérite un débat. Des discussions sont en cours sur l'Ondam hospitalier ; cela suppose des arbitrages difficiles, dans des circonstances exceptionnelles. Le Parlement sera associé à ces travaux.

Les tarifs, les règles de gestion des ressources humaines, l'accompagnement des établissements sont également étudiés. Ne nous privons pas d'un débat démocratique sur la sécurité sociale. Le PLFSS n'est pas qu'un acte de responsabilité budgétaire, c'est la clé d'un système de protection et de droits sociaux qui fait la fierté de la République. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM et sur certaines travées du groupe UC)

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics .  - Ce débat sera l'occasion de confronter nos visions. Mme Buzyn a évoqué l'accès aux droits, je me concentrerai sur les équilibres généraux et les recettes.

La non-compensation de certaines exonérations de cotisations sociales cristallise les critiques. Mais les points d'accord avec la commission des affaires sociales sont plus nombreux que les points de divergence.

C'est d'abord l'objectif de maîtrise des dépenses sociales afin d'en assurer la soutenabilité, tout en protégeant les plus vulnérables. En 2020, le solde de la sécurité sociale sera plus dégradé que prévu avec un déficit de 5,1 milliards d'euros. Cela s'explique d'une part par des hypothèses macro-économiques moins favorables, d'autre part par les réponses d'ampleur apportées à la crise économique et sociale de l'automne dernier.

Nous assumons de dégrader temporairement nos comptes sociaux mais n'avons pas pour autant oublié nos objectifs. Nous poursuivons une politique budgétaire sérieuse et efficace. Nous avons maîtrisé la dépense publique, avec 40 milliards d'euros de dépenses évitées depuis 2017 ; réduit les déficits, de 20 milliards d'euros entre 2019 et 2020 ; baissé les prélèvements obligatoires de 30 milliards sur l'ensemble du quinquennat ; stabilisé notre endettement. La sécurité sociale a pris sa part : ses dépenses demeurent maîtrisées et des efforts sont demandés à tous, notamment aux entreprises, pour revenir à l'équilibre en 2023, avec un plafonnement de la déduction forfaitaire spécifique.

La dette portée par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) sera apurée d'ici 2024 ; en 2019, nous en sommes aux deux tiers, avec 171 milliards d'euros apurés sur 260 milliards.

Dans ce contexte, j'émettrai un avis défavorable aux amendements qui étendent ou renforcent des niches sociales, comme l'incitation pour les employeurs à prendre en charge les abonnements de transports. Aussi légitimes soient-elles, ces propositions ne sont pas financées et sont en contradiction avec la position constante du Sénat pour limiter au maximum les niches fiscales et sociales.

Nous devrions en revanche nous retrouver sur la reconduction de la prime exceptionnelle entièrement défiscalisée et désocialisée qui a permis de distribuer en 2019 2,2 milliards d'euros à cinq millions de salariés. En 2020, elle sera conditionnée à la conclusion d'un accord d'intéressement. J'ai entendu votre demande que cette prime reste exceptionnelle, c'est pourquoi nous l'inscrivons dans la continuité de notre action en faveur du partage de la valeur dans l'entreprise.

Dans un esprit de simplification, nous fusionnons d'ici 2021 les trois déclarations fiscales et sociales des travailleurs indépendants, comme le proposent de longue date M. Cardoux, président de la mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (Mecss), et le rapporteur général.

Nous poursuivons l'unification du recouvrement social autour des Urssaf pour que les entreprises n'aient plus qu'un seul interlocuteur.

Autre point d'accord, la contemporanéisation du crédit d'impôt et des aides pour les personnes dépendantes et handicapées. À terme, 1,1 million de personnes en bénéficieront. Idem pour l'exonération de cotisations sociales de l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle dans la fonction publique, pour favoriser la mobilité.

Nombreux sont donc les points de convergence.

La non-compensation de l'exonération des heures supplémentaires, avancée au 1er janvier 2019, avait été adoptée l'année dernière. L'article 3 du PLFSS prolonge ce choix, qui figurait déjà dans le programme de stabilité.

Du point de vue du contribuable, il y a ce que l'État demande au bénéfice de la collectivité. De même, une dépense est une dépense, qu'elle relève du budget de l'État ou de celui de la sécurité sociale. Sur les 17 milliards d'euros des mesures d'urgence économiques et sociales, 14 milliards sont à la charge du budget de l'État et 2,8 sont à la charge de la sécurité sociale. Elle n'est pas complètement sollicitée.

M. Yves Daudigny.  - Heureusement !

Mme Laurence Rossignol.  - Le Gouvernement est trop bon !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Nous souhaitons une clarification et une responsabilisation de chaque sphère. Toutes les administrations publiques participent à l'effort de redressement des comptes. Avec ou sans compensation, l'essentiel est préservé car ce PLFSS comporte des mesures fortes comme la ré-indexation des pensions inférieures à 2 000 euros, l'indemnisation du congé de proche aidant, le fonds d'indemnisation des victimes de produits phytosanitaires, des mesures pour l'hôpital... Cela répond à une exigence de justice sociale, de protection des plus vulnérables et de prise en compte de nouveaux risques. Ce texte est responsable, cohérent avec notre objectif de redressement des comptes sociaux, seul moyen de préparer l'avenir et de préserver notre modèle social.

Je partage les propos de Mme Buzyn sur la motion de renvoi en commission et souhaite un débat sur ce PLFSS. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM et sur certaines travées du groupe UC)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales .  - Après les annonces du Journal du Dimanche, c'est peu dire que nous sommes irrités, et inquiets sur le rôle du Parlement. On y apprend que vous avez réussi votre négociation, que le Président a tranché et que des moyens nouveaux seront attribués à l'hôpital, les carrières revalorisées et la dette de 30 milliards d'euros reprise par l'État. Tout cela est très bien, je vous félicite, mais vous n'en révélerez la teneur que le 20 novembre ! Nous allons donc attendre...

M. Bernard Jomier.  - On fait tapisserie !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - À quoi sert le Parlement ? (Applaudissements sur toutes les travées, à l'exception de celles du groupe LaREM) À quoi sert le débat sur ce PLFSS, si tout se passe en-dehors de cette enceinte ? (« À rien ! » sur les travées du groupe Les Républicains)

Nous allons examiner un texte qui, sitôt voté, sera...

M. Pierre Ouzoulias.  - Insincère !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Sinon insincère, du moins obsolète. L'Ondam sera à revoir. Vous annoncez une loi sur l'hôpital, avec des mesures nouvelles. Elles sont nécessaires, chacun en convient. Pourquoi ne pas faire voter le nouvel Ondam au Sénat ?

Espérons que, lors de la discussion de l'article 59, vous pourrez nous en dire plus, pour que les droits du Parlement soient respectés ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)

L'exercice 2019 présente un déficit de 5,4 milliards d'euros et un déficit de 5 milliards nous est présenté pour 2020. Le timide retour à l'équilibre se ferait en 2023 seulement ; la sécurité sociale aura accumulé 17 milliards de nouveaux déficits d'ici là.

La conjoncture a été, en effet, moins bonne que prévu. La masse salariale n'a augmenté que de 3 %, d'où une perte de 1,6 milliard d'euros de recettes par rapport aux prévisions. Les dépenses des branches maladie et vieillesse ont par ailleurs dérapé de 1,2 milliard d'euros. Voilà qui explique la moitié de la dégradation du solde.

L'autre moitié tient au choix du Gouvernement de ne plus compenser les pertes de recettes à la sécurité sociale, selon le principe du « chacun chez soi ».

Notre commission ne peut vous suivre dans cette logique qui méconnait la vraie nature de la sécurité sociale. À l'inverse du budget de l'État, il n'y a pas de grand pot commun, mais l'affectation de ressources précises à des dépenses précises, selon le principe fondateur de chacun selon ses moyens à chacun selon ses besoins. Quand je paie mon assurance habitation ou mon abonnement téléphonique, l'argent sort certes de la même poche mais je sais où il va ! De même, les Français savent pourquoi ils payent des cotisations, de la CSG ou de la CRDS : faire face à la maladie, aux accidents, aux charges de famille, et un jour vivre de leur retraite.

De plus, le principe de non-compensation repose sur un postulat qui n'existe plus puisque les excédents de la sécurité sociale ont disparu. L'État impécunieux s'est précipité pour faire les poches de la sécurité sociale avant qu'elles ne soient pleines. Je défendrai au nom de la commission plusieurs amendements refusant toute nouvelle entorse à la loi Veil.

Soyons conscients toutefois qu'il faudra maîtriser l'évolution des dépenses de la sécurité sociale. Même si l'État compense, les comptes sociaux risquent de rester longtemps dans le rouge.

La commission proposera ses propres solutions structurelles, difficiles mais compréhensibles par les Français.

Les plans d'économies pour l'hôpital ne suffisent plus : il faudra effectivement des mesures nouvelles.

La commission proposera une gestion sérieuse, capable de revenir à des comptes équilibrés et d'apurer la dette. Si nous laissons les comptes sociaux glisser, quelque 45,7 milliards de découverts auront été accumulés d'ici 2023. À l'heure où s'éteindra la Cades, la sécurité sociale sera alors plus endettée qu'à sa création ! Sisyphe sera en quelque sorte, revenu au pied de la montagne... (On apprécie sur les travées du groupe Les Républicains.)

On ne saurait balayer la question de la dette de l'Acoss en arguant des taux bas. Le Conseil constitutionnel risque d'ailleurs de nous rappeler à l'ordre...

Revenons à l'essentiel : la sécurité sociale n'est pas une sous-branche de l'État mais une entité autonome. Elle répartit les sommes qu'elle perçoit et ne devrait donc pas créer de déficits. Pourtant, le « trou » de la sécurité sociale existe... Consacrons toutes les ressources destinées à le reboucher à ce seul usage ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et Les Indépendants)

Mme Catherine Deroche, rapporteure de la commission des affaires sociales pour l'assurance maladie .  - (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC) La loi Santé votée l'an dernier a signé une ambition de transformation de notre système de soins. La crise de l'hôpital rend cette transformation plus nécessaire et plus pressante.

Nous reconnaissons des avancées dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale mais il a un goût d'inachevé.

La ministre a donné des gages aux acteurs hospitaliers. La pluriannualité est un enjeu majeur pour une vision plus prospective des besoins en santé et répond à l'incertitude permanente qui obère la capacité des établissements à lancer des projets structurants. L'investissement en berne affecte les conditions de travail comme la prise en charge des patients.

Mme la ministre a annoncé un plan de soutien ciblé sur l'investissement et l'attractivité des métiers à l'hôpital. C'est un engagement lourd de sens.

Mais comment débattre de ce PLFSS sans avoir connaissance des moyens qui seront déployés ? Le Parlement aussi a besoin de visibilité ! C'est pourquoi la commission proposera de surseoir au vote de l'Ondam pour 2020.

Nous soutiendrons, moyennant des ajustements, les mesures concernant le financement de la psychiatrie ou des urgences, tout comme les incitations à l'installation dans les zones sous-dotées, déjà votées par le Sénat.

Nos principales divergences concernent le volet relatif aux produits de santé. Nous reviendrons ainsi sur la procédure de référencement sélectif des fauteuils roulants. La fixation du prix des médicaments prend un virage peu compatible avec les principes que nous défendons : la mobilisation du tiers payant en cas d'égalité entre princeps et générique n'a pas été assez approfondie et le projet de loi de financement porte, de façon générale, manifestement atteinte à la négociation conventionnelle pour la fixation du prix de certains produits de santé. L'accès précoce aux médicaments connaît par ailleurs des restrictions préoccupantes.

Enfin, la stratégie globale du Gouvernement sur l'innovation thérapeutique nous interroge. Je vous proposerai un dispositif expérimental visant à adapter nos procédures.

Sous ces réserves, la commission vous demande d'adopter le budget de la branche maladie (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC).

M. Bernard Bonne, rapporteur de la commission des affaires sociales pour le secteur médico-social .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le 13 juin dernier, le Premier ministre annonçait que ce PLFSS serait une première étape de la réforme de la prise en charge du grand âge, « grand marqueur social » du quinquennat. La volonté politique est manifeste. La mission El Khomri vient de rendre ses conclusions sur les métiers du grand âge, dans la lignée du rapport de Dominique Libault, unanimement salué. Mais les unanimités sont souvent louches.

Non que les préconisations du rapport Libault soient contestables, au contraire. Nécessité du virage domiciliaire, baisse du reste à charge ou hausse du taux d'encadrement en Ehpad - nous les approuvons largement pour les avoir en partie déjà écrites, voire votées.

Mais nous sommes loin du financement d'une véritable politique de prise en charge des bientôt 2,5 millions de personnes dépendantes de notre pays.

M. René-Paul Savary.  - Très bien !

M. Bernard Bonne, rapporteur.  - La minceur du volet médico-social du présent texte élève le teasing législatif au rang des beaux-arts !

Certes, l'Ondam médico-social bénéficie d'un renfort inédit de 130 millions d'euros qui correspond à la sous-exécution attendue des soins de ville. C'est ce qui avait été gelé en début d'année...

Les mesures nouvelles pour 2020, loin d'engager le virage domiciliaire, sont essentiellement consacrées aux établissements, avec la poursuite de la convergence financière pour les Ehpad. Seul signal aux métiers du grand âge, la prime d'assistant de soins en gérontologie, pour un montant de 15 millions d'euros, soit 150 000 euros par département en moyenne.

Sur l'aide à domicile, l'enveloppe de 50 millions d'euros est loin des besoins, estimés à 550 millions d'ici 2024. Il faudrait cinq fois plus pour hisser tous les professionnels du secteur au niveau du Smic !

Je ne dirai rien du financement du congé de proche aidant par une caisse toujours plus en déficit, ou du financement des établissements médico-sociaux par le surplus des amendes radars...

La commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l'adoption du volet médico-social, car mieux vaut peu que rien, mais nous attendons davantage. Il faudra clarifier les compétences, unifier la gouvernance et surtout pérenniser le financement de la politique du grand âge. (Applaudissements sur les travées des groupes Les publicains et UC)

M. Philippe Mouiller.  - Bravo !

M. Gérard Dériot, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les accidents du travail et les maladies professionnelles .  - Les excédents cumulés de la branche Accidents du travail-Maladies professionnelles (AT-MP), 4,8 milliards d'euros en 2020, se transforment en véritable cagnotte. Le solde sera de 1,4 milliard d'euros jusqu'en 2023, de quoi alimenter la trésorerie des autres branches.

Le gonflement des capitaux propres et le transfert d'un milliard d'euros à l'assurance maladie pour la sixième année consécutive interroge les fondements assurantiels de la branche : les cotisations AT-MP, censées responsabiliser les employeurs, sont détournées au profit de la branche maladie alors que les rentes restent sous-revalorisées. De même, les excédents ne sont pas mobilisés pour le développement de la prévention. Les moyens du fonds national de prévention des AT-MP ne représenteront que 2,7 % des dépenses ; les excédents dorment en trésorerie à l'Acoss.

Je me réjouis de la création du fonds d'indemnisation des victimes des pesticides, mais l'effort est en réalité limité aux travailleurs agricoles non-salariés et aux enfants exposés in utero si un de leurs parents a été exposé. En outre, le financement de la mesure repose sur les seuls agriculteurs et les employeurs qui supporteront le coût des transferts de branches et du relèvement de la taxe sur les pesticides. Faut-il rappeler que c'est l'État qui autorise l'usage des pesticides comme le chlordécone ? Pourquoi ne pas avoir retenu une participation de l'État à l'indemnisation des victimes, comme pour l'amiante ou les contaminations transfusionnelles ? Notre commission a adopté plusieurs amendements pour améliorer le dispositif. Sous ces réserves, elle vous demande d'adopter le volet AT-MP. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)

M. René-Paul Savary, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l'assurance vieillesse .  - (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains) Pour la branche vieillesse, le compte n'y est pas. Mêmes causes, mêmes effets. L'an dernier, j'indiquais que la commission des affaires sociales rejetait la sous-revalorisation des prestations sociales par rapport à l'inflation et reculait l'âge minimum légal de la retraite de 62 ans à 63 ans. Cette année encore, notre commission a adopté deux amendements similaires : l'un supprime l'article 52 sur la revalorisation différenciée des prestations sociales et des pensions, l'autre décale l'âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans au 1er janvier 2025 pour les assurés nés après 1963. Pour mémoire, l'âge moyen de départ à taux plein s'établit à 63,1 ans.

La crise sociale, qui a placé le pouvoir d'achat - en particulier des retraités - au centre de ses revendications, a conduit le Gouvernement à revenir sur des décisions dont le Sénat avait souligné le danger : le retour à une CSG de 6,6 % pour les retraités et la sous-revalorisation des pensions à 0,3 % en 2020 au-delà de 2 000 euros bruts par mois.

Autre changement, la trajectoire financière de la branche vieillesse s'est dégradée, avec un déficit de 4,6 milliards en 2020 et de 6,6 milliards en 2023.

Il pourrait avoisiner 10 à 15 milliards en 2025 !

Le mode de calcul différentiel que propose le Haut-Commissaire Delevoye se base sur une trajectoire financière problématique. Je vous invite donc, madame la ministre, à entendre nos propositions !

En supprimant l'article 52, nous réaffirmons que la baisse des pensions n'est pas le bon levier pour rééquilibrer la branche vieillesse. Ce serait une rupture avec le principe contributif même, avec le contrat social implicite. Quelle confiance les jeunes générations peuvent-elles dès lors avoir en leur retraite ?

Le recul de l'âge légal est le moyen le plus efficace de garantir l'équilibre : avec l'allongement de la vie, assumons que les Français travaillent plus longtemps pour financer un bon niveau de retraite.

Nous devons aussi répondre au défi des fins de carrière. Le Gouvernement devrait recentrer le dispositif de retraite anticipée pour carrière longue sur les carrières pénibles. N'hésitez pas à nous suivre, madame la ministre ! (Mme Françoise Gatel applaudit.) Quand le Parlement n'est pas écouté, c'est la rue qui parle et le Gouvernement qui capitule. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure de la commission des affaires sociales pour la branche famille .  - Ce projet de loi comporte des avancées pour les familles mais ne relance pas une politique familiale victime de trop nombreux renoncements.

Après dix ans de déficit, la branche famille a retrouvé un solde excédentaire en 2018 et pourrait apurer sa dette en 2022. Cette situation financière aurait pu être l'occasion de renforcer la politique familiale. Pourtant ce PLFSS demande encore des efforts aux familles.

L'an dernier, le Gouvernement a engagé un quasi-gel des prestations familiales pour une économie de 260 millions d'euros, ce qui revient à un recul de pouvoir d'achat, notamment pour les familles monoparentales : 140 euros de moins pour une famille monoparentale de deux enfants entre 1 et 2 SMIC. Le Gouvernement nous propose de reconduire cette sous-revalorisation des prestations familiales à 0,3 % en 2020 pour une économie d'environ 100 millions d'euros, alors que l'inflation devrait atteindre 1 %. La commission des affaires sociales s'y oppose. Je rappelle qu'à l'initiative de Gérard Dériot, la commission a aussi souhaité maintenir la majoration des indemnités journalières au bénéfice des familles nombreuses que l'article 56 propose de supprimer. Il est temps de mettre un terme aux mesures d'économie sur les familles et de relancer une politique familiale ambitieuse, alors que le nombre de naissances a diminué de 8,5 % en dix ans.

Le premier objectif assigné à la branche famille est de compenser les charges de famille selon une logique de redistribution horizontale. Or depuis 4 ans, la modulation des allocations familiales génère une économie de 770 millions d'euros par an. Le nombre des bénéficiaires de la prestation partagée d'éducation de l'enfant ne cesse de diminuer depuis sa création, car les conditions de recours sont trop rigides et le montant de l'allocation trop faible. Il faut tirer les conséquences de l'échec de cette réforme.

Il faut soutenir le développement des modes de garde, alors que pour deux places de crèche qui s'ouvrent, une place se ferme. Nous resterons attentifs au déploiement des bonus inclusion handicap, territoire et mixité sociale, qui contribueront à augmenter le nombre de places d'accueil dans tous les territoires.

D'autres mesures constituent des avancées intéressantes, comme la mise en place d'une intermédiation financière pour le recouvrement et le versement des pensions alimentaires par les CAF, avec l'allocation de moyens humains supplémentaires pour garantir la mise en oeuvre du dispositif.

Le fameux article 49 a fait couler beaucoup d'encre... L'affichage de la disponibilité des places dans les crèches et chez les assistants maternels sur le site internet mon-enfant.fr facilitera l'accès aux modes de garde pour les familles. Pour lever les inquiétudes des assistants maternels, la commission a adopté un amendement précisant que le manquement aux obligations de déclaration ne pourra pas constituer à lui seul un motif de retrait d'agrément.

La commission regrette que ce projet de loi de financement ne consacre pas davantage de moyens à la politique familiale qui devrait être conçue comme une politique d'investissement dans l'avenir face au vieillissement de notre population. Elle vous proposera de vous opposer à la sous-revalorisation des prestations familiales et d'adopter les autres articles relatifs à la branche famille, sous réserve des amendements déposés. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains)

M. Alain Joyandet, rapporteur pour avis de la commission des finances .  - Quelle déception que ce projet de loi de financement ! Le Gouvernement nous avait annoncé la fin du déficit dès 2019 ; ce texte est un cruel démenti. Le déficit cumulé du régime général et du FSV devrait atteindre 5,4 milliards d'euros, alors qu'un excédent de 0,1 milliard était espéré en début d'exercice. La non-compensation des mesures d'urgence économique et sociale représente une perte de 2,8 milliards d'euros. La sécurité sociale a, en réalité, financé les mesures prises en faveur des gilets jaunes, en contradiction avec ses missions originelles...

Ces mesures ne suffisent pourtant pas à justifier le creusement du déficit des comptes sociaux qui résulte aussi d'un défaut de pilotage. Le ralentissement de la croissance économique était en effet prévisible, et la progression des dépenses aurait pu être mieux contenue.

Le projet de loi de financement diffère le retour à l'équilibre des comptes sociaux à l'horizon 2023, ce qui est optimiste compte tenu des hypothèses retenues en matière de progression de la masse salariale et en l'absence de mesures structurelles visant les dépenses de l'assurance maladie. L'Ondam annoncé sera-t-il tenu face à la crise constatée au sein des hôpitaux ?

Le texte confirme la non-compensation par l'État des mesures d'urgence économique et sociale, dérogeant ainsi à la loi Veil. Certaines des exonérations auxquelles s'applique ce transfert de financement, comme celles visant les jeunes entreprises innovantes, ou les indemnités de rupture conventionnelle des fonctionnaires démontrent bien que la logique du Gouvernement reste confuse et à géométrie variable, privilégiant une gestion à vue de la sécurité sociale. Si les non-compensations pouvaient s'entendre en 2018, elles sont désormais à rebours de la réalité des comptes sociaux faute de recettes nouvelles. Quant à la réduction des niches fiscales - 90 milliards d'euros -, rien n'est envisagé.

Le financement de la sécurité sociale ne repose plus que pour moitié sur les cotisations sociales, de sorte qu'on peut douter de la pertinence du maintien d'une loi spécifique. On ne sait plus très bien qui doit quoi à qui... Je parle à titre personnel, mais pourquoi ne pas nous orienter vers une loi de finances générale ? (M. Gérard Dériot proteste.)

En 2019, il restera 89 milliards d'euros de dette à amortir à la Cades. Le Gouvernement a renoncé au transfert d'une fraction de CSG vers la Cades, soit 5 milliards d'euros d'ici 2022 en vue d'un apurement de la dette de l'Acoss à partir de 2020. Le déficit des comptes sociaux devrait conduire cette dette à progresser pour atteindre 46 milliards d'euros à l'horizon 2022, avec une forte exposition à un risque de retournement des marchés financiers. Il faut envisager un apurement en 2024, via une réaffectation de la Contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), ce qui rend illusoire une baisse des prélèvements obligatoires.

Demeure, en outre, la question du financement de la dépendance tel que proposé par le rapport de Dominique Libault. Attention cependant : financer un nouveau risque à l'aide d'une ressource faite pour amortir la dette sociale dégraderait le solde entendu au sens de Maastricht. La commission des finances s'en remet aux positions de la commission des affaires sociales. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Nassimah Dindar applaudit également.)

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Nassimah Dindar applaudit également.) Le projet de loi de financement pour la sécurité sociale pour 2019 promettait un retour à l'équilibre des comptes sociaux. Il aura vécu moins de deux semaines, le temps que les mesures dites « gilets jaunes » ne mettent à mal l'équilibre de la sécurité sociale et le sérieux du Gouvernement en matière de finances publiques.

Le PLFSS 2020 nous propose une expérience plus originale encore avec une caducité d'emblée. Nous avons en effet appris dimanche par voie de presse que le niveau de l'Ondam hospitalier serait revu afin de financer des mesures en faveur des personnels hospitaliers, et que la dette des hôpitaux serait reprise par l'État afin de faciliter le financement des investissements. Pour autant, pour l'instant, pas d'amendement du Gouvernement sur ces sujets... On nous annonce des précisions pour le 20 novembre, soit au lendemain du vote solennel au Sénat. Il est permis de s'interroger sur la validité d'un tel texte au regard de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale et sur le respect dû au Parlement. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Nassimah Dindar, MM. Michel Laugier et Stéphane Artano applaudissent également.)

La commission des affaires sociales avait pris, à titre conservatoire, la décision de ne pas adopter un Ondam provisoire. Nous confirmerons cette position. Je mets en garde le Gouvernement : à trop vouloir se passer du Parlement et des corps intermédiaires, il risque de se retrouver bien seul face aux mouvements sociaux en cours ou à venir... (M. Ladislas Poniatowski et Mme Catherine Troendlé le confirment.) Ce face-à-face dangereux pourrait conduire à la paralysie et à l'abandon des réformes, alors qu'il est dans l'intérêt de notre pays de faire évoluer sa protection sociale pour construire un système de santé tout à la fois de pointe et solidaire, pour assurer des retraites décentes et une politique de soutien aux familles. La protection sociale appartient à l'identité même de notre pays. Laisser filer les déficits, c'est la mettre en péril.

La situation de l'hôpital résulte de l'absence prolongée de réformes structurelles. À passer le budget des hôpitaux sous la toise, à grand renfort de mesures de régulation pour tenir l'Ondam, tout le système craque, et il est déjà, me semble-t-il, trop tard. Le temps que les mesures d'organisation portent leurs fruits, il faut réarmer l'hôpital. Le Gouvernement n'a pas d'autre choix.

De même pour le financement de la dépendance et de la réforme des retraites... Nous ne pouvons attendre quarante ans les fruits d'une hypothétique réforme ! La commission des affaires sociales appelle le Sénat et le Gouvernement à prendre sans tarder leurs responsabilités.

Quid de l'avenir de la dette sociale logée à l'Accoss et d'une éventuelle prolongation de la Cades ? Nous avons du mal à saisir les intentions du Gouvernement... S'agit-il d'un aiguillon pour inciter à la vertu budgétaire ? C'est la logique même de la sécurité sociale qui se trouve ainsi mise à mal, le sens des cotisations sociales et au-delà le consentement à les payer.

Le rapporteur général a cité Sisyphe. Je convoquerais le tonneau des Danaïdes... La vocation de la sécurité sociale est la redistribution des bien portants vers les malades, des actifs vers les personnes âgées, des célibataires vers les familles. La redistribution passe par les prestations et non par les prélèvements. L'objet de la sécurité sociale n'est pas de financer des mesures de pouvoir d'achat.

Quel était l'objectif de la loi Veil ? Que le remplacement des cotisations soit pérenne et que leur baisse ne se traduise pas par davantage de déficits. Dans les ministères, l'allègement de charges, en période de disette budgétaire peut être tentant, car payé par la sécurité sociale.

À l'Assemblée nationale, un amendement de Jean-Pierre Door a très justement évité une tentative de non-compensation, qui contrevenait au rapport Charpy-Dubertret sur lequel le Gouvernement s'appuie. Les non-compensations ne changent rien à l'échelle des finances publiques et ne servent qu'à loger un bout de déficit en dehors du budget de l'État. Le texte que nous examinons n'étant que provisoire, il reste une opportunité à saisir pour le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)

Exception d'irrecevabilité

M. le président.  - Motion n°792, présentée par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

En application de l'article 44, alinéa 2, du Règlement, le Sénat déclare irrecevable le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2020 (n°98, 2019-2020).

Mme Laurence Cohen .  - L'an dernier, redoutant que la représentation parlementaire ne discute pour la dernière fois un projet de financement de la sécurité sociale, nous avions déjà déposé une motion d'irrecevabilité constitutionnelle. Le projet de réforme constitutionnelle prévoyait l'examen commun du budget de l'État et de celui de la sécurité sociale avec, en filigrane, l'idée de transférer les excédents potentiels de la sécurité sociale vers le budget de l'État.

Le fort mécontentement exprimé dans la rue vous a contraints à repousser cette réforme. Et quinze jours après le vote du projet de loi de financement, le président de la République annonçait les mesures d'urgences économiques et sociales en faveur des gilets jaunes.

L'autonomie de la sécurité sociale a été préservée, mais reste en danger. À l'Assemblée nationale, vous disiez, madame la ministre, que le projet de loi de financement de la sécurité sociale n'était pas seulement un « acte de responsabilité budgétaire » mais aussi un « instrument politique » permettant de « réaffirmer la présence de l'État social à chaque étape de la vie ». Comment justifiez-vous, dès lors, cette envolée des exonérations patronales non compensées par l'État, faisant fi de la loi Veil du 25 juillet 1994 ? Nous n'avons pas la même vision de ce que vous appelez « la présence de l'État social à chaque étape de la vie »...

La baisse des taux de cotisations patronales et l'exonération totale des cotisations, désormais non compensées par l'État créent un déficit artificiel des comptes de la sécurité sociale. C'est la double peine pour les assurés sociaux qui financent deux fois un déficit dû aux choix politiques du Gouvernement.

Chaque année, la sécurité sociale se voit contrainte d'assumer des choix qui ne dépendent pas d'elle ! Elle doit notamment rembourser, à marche forcée, la dette qui pèse sur elle, depuis la crise financière. En 2019, elle a réduit son déficit logé à la Cades de 11,7 milliards d'euros.

Madame la ministre, que voulez-vous dire quand vous nous parlez de dépenses de santé trop importantes ? Les dépenses de la sécurité sociale ont augmenté de 2,1 % soit nettement moins que le PIB à 2,7 %. La sécurité sociale ne souffre pas d'une explosion de ses dépenses mais d'un manque de financements. Mais il faut dire qu'agiter « le trou de la sécurité sociale » permet de justifier la baisse des prestations et de préparer le terrain pour réduire les pensions de retraite lors de la future réforme Delevoye !

L'ensemble des allégements généraux de cotisations et d'exonérations ciblées représenteront 66,4 milliards d'euros en 2020. Selon la Cour des comptes, les niches sociales seraient en réalité proches de 90 milliards d'euros. Nous sommes à un tournant, puisque les allégements et les exonérations ont explosé au point de dépasser le montant des recettes de la branche famille. Depuis 2013, le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) a amputé près de 100 milliards d'euros de cotisations sociales pour un effet quasi nul en termes de création d'emplois !

Comment ne pas rappeler ici qu'en 2020, la part des cotisations sociales ne représente plus que 50,7% des recettes de la sécurité sociale ? Le principe même des exonérations de cotisations sociales doit être abandonné, car c'est une catastrophe pour notre système de protection sociale mais également pour notre économie. Elles favorisent la croissance des marges et des dividendes plutôt que la croissance économique et l'emploi.

Nous ne sommes pas les seuls à refuser la remise en cause de l'autonomie budgétaire de la sécurité sociale. Au Sénat comme à l'Assemblée Nationale, d'une partie de la droite à la gauche, mais également jusque dans votre majorité, on émet des réserves. À l'article 17, un amendement du rapporteur général refuse les nouvelles non-compensations de l'État. Nous le soutiendrons si cette motion n'était pas votée.

Jamais budget de la sécurité sociale n'a été autant contesté. Les organisations syndicales, les associations d'usagers, des fédérations hospitalières, les conseils d'administration des caisses de la sécurité sociale ainsi que la Mutualité française se sont publiquement prononcés contre ce budget. Vous bafouez le principe d'autonomie organique et financière reconnu par notre législation républicaine. Nous ne pouvons pas laisser passer ce projet de loi de financement qui ne tient pas compte de l'état réel de notre système de santé, de la situation dramatique des hôpitaux, de l'épuisement et de la colère des personnels soignants.

Vous parlez de mesures en préparation que vous dévoilerez le 20 novembre pour résoudre les problèmes de l'hôpital : c'est prendre les parlementaires pour de doux naïfs, sinon pour des imbéciles. C'est votre troisième projet de loi de financement et vous persistez à programmer 4,2 milliards d'euros de moins pour la santé, dont plus d'un milliard pour l'hôpital. Vos choix durcissent l'accès aux soins des patients et les conditions de travail des soignants. Sans moyens supplémentaires, comment répondre à des situations dramatiques ? Comment répondre aux problèmes de la psychiatrie ? Qu'en est-il de votre projet de loi sur la dépendance et le grand âge ? Que répondrez-vous aux manifestants, syndicats, collectif Inter-Urgences, personnalités, du 14 novembre prochain ? C'est un grand mouvement, largement soutenu par la population. Nous serons à leurs côtés, et aussi le 5 décembre contre votre réforme injuste des retraites.

Il ne s'agit plus de limiter les dégâts par quelques amendements ; c'est toute la logique qu'il faut revoir car elle remet totalement en question notre système de solidarité conçu par Ambroise Croizat, ministre communiste, Pierre Laroque, haut-fonctionnaire, et soutenu par le général de Gaulle. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE ; Mmes Évelyne Perrot et Corinne Imbert applaudissent aussi.)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Il faut que le débat ait lieu. Avis défavorable, dès lors.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Avis défavorable.

Mme Laurence Rossignol.  - Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale opère une triple rupture : l'autonomie budgétaire de la sécurité sociale, qui reçoit le dernier coup de couteau ; l'objectif de rétablissement des comptes publics, avec le déficit punitif et artificiel dont vous affectez la sécurité sociale, le contrat de confiance, avec vos annonces de dimanche dans un journal - dont vous refusez de discuter avec le Sénat le mardi suivant...

Nous savons depuis longtemps que votre rapport avec le Parlement est spécial, car vous le considérez comme une formalité encombrante. Dans le nouveau monde, il vaut mieux être riche et en bonne santé que pauvre et malade. Le groupe socialiste votera la motion. (Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE)

La motion n°792 tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité est mise aux voix par scrutin public de droit.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°29 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 340
Pour l'adoption   87
Contre 253

Le Sénat n'a pas adopté.

présidence de Mme Catherine Troendlé, vice-présidente

Discussion générale (suite)

M. Guillaume Arnell .  - (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE ; M. Loïc Hervé applaudit également.) À l'automne dernier, le Gouvernement promettait un retour à l'équilibre des comptes sociaux, annonce bienvenue après dix-huit ans de déficit. Ce projet de loi de financement présente des comptes dégradés et la promesse de retour à l'équilibre est reportée à 2023.

Nous regrettons la non-compensation des mesures d'urgence économiques et sociales par l'État, contraire à la loi Veil du 25 juillet 1994. L'État ne peut prétendre jouer un rôle majeur dans la conduite des comptes de la sécurité sociale que s'il est irréprochable en la matière. C'est dans cet esprit que plusieurs sénateurs RDSE ont déposé des amendements.

Deux chiffres : 10 %, c'est le pourcentage d'entités hospitalières qui ont fermé de 2008 à 2018. L'autre, 834 380, c'est celui des séjours à l'hôpital en plus pour la même période. Il est difficile d'améliorer la performance des hôpitaux s'il y a moins d'établissements et plus de patients.

Le RDSE salue la pérennisation de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, bien qu'elle soit conditionnée désormais à un accord d'intéressement. Cette condition peut être légitime pour les grandes entreprises mais risque de nuire aux salariés des plus petites entreprises.

La situation des urgences est préoccupante. Nous serons attentifs à la proposition du député Thomas Mesnier, ancien médecin urgentiste, qui propose une réforme du financement des urgences.

L'expérimentation du cannabis thérapeutique est intéressante, notamment dans le cas de maladies incurables ou chroniques pour lesquelles la morphine n'a plus d'effets, comme la sclérose en plaques. En plus d'être davantage soulagé de leurs douleurs, ces personnes n'auraient plus besoin de se rendre aux urgences.

Notre Haute Assemblée s'était saisie de la question des proches aidants, à travers la proposition de loi de Jocelyne Guidez, promulguée en mai dernier. Le Gouvernement met en place le congé de proche aidant que nous avions proposé et qui concrétise une attente forte...

Mme la présidente.  - Veuillez conclure.

M. Guillaume Arnell. - Cela ne peut être qu'une étape, le montant et surtout la durée de ce congé étant particulièrement restreint.

M. Michel Amiel .  - L'élaboration du budget de la sécurité sociale nous rappelle le supplice de Sisyphe : alors qu'on s'approche de l'équilibre, le rocher dévale et tout est à recommencer. La dégradation des comptes est liée aux mesures « gilets jaunes », aux mesures d'indexation des retraites inférieures à 2 000 euros, mais aussi à une dynamique moins favorable de la masse salariale.

Les mesures d'urgence furent approuvées à l'unanimité, montrant, s'il est besoin, que la vie de nos concitoyens ne peut se réduire à une logique comptable, même si « en même temps » la dette sociale n'est pas une fatalité à laquelle on puisse se résigner.

Le déficit global devrait être de 1,1 milliard d'euros pour 2023 avec retour à l'équilibre du régime général, et la fin de la Cades, prévue par la loi pour 2024, ne sera pas synonyme de fin de la dette sociale, puisque 47 milliards d'euros de dette seront cette même année portés par I'Acoss. Ces chiffres ne tiennent pas compte de l'innovation, dont le coût devient extravagant : les dernières immunothérapies coûtent 500 000 euros par patient et par jour pour soigner le cancer - et non pas une maladie rare ! Ils ne tiennent pas compte non plus de la prise en charge du grand âge.

Si l'on voulait prolonger l'existence de la Cades pour éponger les 45 milliards d'euros de dette restants, cela procéderait d'une loi organique ce qui rend l'hypothèse pour le moins fragile. Nul doute qu'il faudra des financements spécifiques.

Il faudra sans doute une dizaine d'années, madame la ministre, pour que votre loi de réorganisation de notre système de santé, porte ses fruits et se traduise aussi dans le domaine financier. Cela nécessitera sans doute d'aller plus loin dans le contrôle de la pertinence des soins, dont la dérive représenterait 25 % du budget. Peut-être faudra-t-il faire des choix politiques difficiles - même si le reste à charge de 7 % reste parmi les plus faibles de l'OCDE.

On parle de remplacer la gouvernance paritaire par l'État - cela ressemble pour nombre de nos concitoyens à une querelle byzantine.

Pour la branche maladie, l'article 25 rassemble les acteurs publics et privés de la psychiatrie dans un modèle de financement commun basé sur une dotation populationnelle complétée par des financements prenant en compte des critères qualitatifs. L'article 26 bis applique ce même principe pour les urgences. Sans doute faudra-t-il un effort tout particulier pour ce secteur et l'hôpital public en général, si l'on veut conserver à ce dernier son attractivité. Saluons l'article 24, qui présente un financement sur la base d'une trajectoire pluriannuelle. L'article 37 prévoit un forfait transport-hébergement pour les femmes enceintes éloignées des maternités.

Pour la branche AT-MP, excédentaire cette année, la création d'un fonds d'indemnisation des victimes des pesticides - à l'article 46 - est à saluer, avec un guichet unique géré par la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole. Il faudra surveiller la situation aux Antilles, avec le scandale du chlordécone.

Pour la branche vieillesse, l'article 52 prévoit l'indexation sur l'inflation pour les retraites inférieures à 2 000 euros par mois, celles supérieures à 2014 étant revalorisées à hauteur de 0,3 %. L'article 53 évitera les ruptures de ressources avec le passage d'un minimum social à la retraite.

Pour la branche famille, à la suite du rapport de Dominique Libault sur le grand âge et l'autonomie, l'article 45 prévoit la mise en place d'un congé indemnisé du proche aidant, d'un montant de 50 euros par jour pour une durée de 3 mois. Quant à l'article 48, il crée une agence de recouvrement des impayés de pensions alimentaires qui joue le rôle d'intermédiation financière.

J'ai commencé avec Sisyphe, je terminerai par lui. Albert Camus disait : « Il faut imaginer Sisyphe heureux. » (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - Le PLFSS 2020 était très attendu par le personnel médical en grève depuis six mois - aux côtés desquels nous serons dans la rue, le 14 novembre. Madame la ministre, vous refusez d'affronter Bercy, et vous refusez de changer de cap. Vous poursuivez les exonérations de cotisations et remettez en cause les fondamentaux de notre protection sociale, née du Conseil national de la Résistance. Vous n'en avez jamais assez de prendre aux familles, aux salariés, aux retraités, aux jeunes, aux plus fragilisés ! C'est la boulimie.

En 2020, c'est le coup de massue : l'hôpital public servira de variable d'ajustement à votre budget. Pourtant, les services d'urgence multiplient les grèves, car les 4,2 milliards d'euros d'économie sont la goutte qui fait déborder le vase des personnels hospitaliers, en souffrance. Ils ne veulent plus travailler dans des conditions indignes pour eux-mêmes mais surtout pour la qualité des soins aux patients. Que leur répondez-vous ? Une augmentation de l'Ondam à 2,1 % en dessous de l'évolution naturelle des dépenses de santé ! Décidemment, « quand on veut noyer son chien, on dit qu'il a la rage ».

Et ce n'est pas votre réforme du financement des hôpitaux de proximité qui va changer la donne. Vous aurez beau jeu de déplacer les services pour mutualiser toujours davantage les moyens, les malades eux ne déménagent pas avec les hôpitaux.

L'obligation pour les industriels de constituer un stock de sécurité de deux à quatre mois sur les médicaments d'intérêt thérapeutique majeur et la création de sanctions contre les laboratoires pharmaceutiques, en cas de pénurie du médicament vont dans le bon sens mais arrivent trop tardivement par rapport à la crise que connaissent les malades.

Il est incroyable qu'en France et en Europe la puissance publique ne soit plus en capacité de produire des médicaments, alors que les pharmacies des hôpitaux, notamment à l'AP-HP, disposent d'un savoir-faire à valoriser.

Vous avez fait adopter à l'Assemblée nationale un amendement offrant aux établissements de santé une visibilité sur l'évolution de leurs ressources financières. À quoi bon si c'est pour leur dire que les caisses resteront vides pendant trois ans ?

L'État doit arrêter de se défausser sur la sécurité sociale et assumer ses dépenses. Les gilets jaunes ont exprimé leur ras-le-bol. Le président Macron a fait des annonces et mis en place des aides d'urgence pour répondre à cette colère. C'est au budget de l'État de porter les 3 milliards d'euros que vous prenez aux services de santé. La colère des uns ne peut pas se régler par un tour de passe-passe qui consiste à déshabiller les infirmiers, les aides à domicile, les retraités, tous en lutte, pour habiller, très légèrement, certaines catégories de travailleurs pauvres.

Ce projet de loi de financement est truffé de contradictions. Alors que 60 000 femmes doivent faire plus de 45 minutes de trajet pour aller à la maternité, vous préférez éloigner les services et payer l'hôtel pour les mères concernées. La fermeture des maternités de proximité est un non-sens : on ne déclenche pas son accouchement comme on réserve sa chambre d'hôtel !

Les contradictions sont trop nombreuses pour ne pas y voir une volonté délibérée de faire des économies sur les dos des plus précaires. Vous préparez le prochain mauvais coup avec la réforme des retraites. La fusion des caisses au sein des Unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (Urssaf) est un test pour préparer la fusion des régimes de retraite dans un système par points. Alors que votre grand texte sur la dépendance est toujours remis à plus tard, le projet de loi de financement prévoit 405 millions d'euros pour les Ehpad : c'est peu pour répondre aux besoins actuels et à venir.

Nous avons déposé plus d'une dizaine d'amendements : suppression de la taxe sur les salaires, moratoire sur la fermeture de lits et de services, etc.

Votre projet est très dangereux. Vous faites le choix de l'austérité et du libéralisme, contre les besoins de santé et les services publics. Pourtant, l'argent existe ! Il est dans la poche de ceux que vous privilégiez.

En plus, votre projet de loi n'est pas fiable. Vous allez proposer des mesures non incluses dans ce projet de loi le 20 novembre ! Ce budget est donc incertain et insincère ; le groupe CRCE ne le votera pas. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)

M. Daniel Chasseing .  - Le PLFSS concilie le difficile exercice de maîtrise des dépenses et financement de mesures prioritaires pour améliorer la santé des Français et la couverture des risques sociaux.

Le Gouvernement fait porter sur les comptes sociaux 2,7 milliards d'euros de mesures d'urgence en réponse à la grave crise sociale. Certes, il ne faut pas mettre la France en porte à faux par rapport à ses engagements européens, mais le retour à l'équilibre est ainsi reporté de 2020 à 2023, et les déficits sociaux en subissent les conséquences, atteignant 5,4 milliards d'euros cette année et 5,1 milliards d'euros l'an prochain.

L'Ondam sera tenu avec une progression de 2,3 % largement en deçà du rythme d'évolution. Le rythme sera difficile à tenir notamment à l'hôpital, où les urgences sont sous tension et qui connaît depuis des années des difficultés de fonctionnement et d'investissement.

Je regrette la décision du Gouvernement de reconduire la sous-revalorisation des prestations sociales à 0,3 % de l'inflation - hormis pour les plus faibles, inférieures à 2 000 euros par mois, comme notre groupe l'avait proposé l'an dernier. Nous soutiendrons l'amendement d'Élisabeth Doineau.

La branche retraites se dégrade ; trouvons des solutions pour développer l'activité des seniors, après 62 ans, par un dialogue avec les syndicats. Il y a urgence.

Hormis ces trois points, ce PLFSS comporte des avancées qui simplifient la vie des entreprises, valorisent le travail, renforcent la justice sociale, réforment le financement du système de santé.

Nous saluons la reconduction de l'exonération de charges sur la prime exceptionnelle pour le pouvoir d'achat, mais nous souhaitons que les PME en soient exemptées.

Le projet de loi est un texte de justice sociale avec la plateforme, créée à l'article 48, d'intermédiation pour le reversement des pensions alimentaires.

La complémentaire santé, la création d'un droit à l'hébergement des femmes enceintes, la prise en charge des cotisations sociales des jeunes médecins s'installant en zone sous-dense pour une durée de deux ans, l'indemnisation du congé de proche aidant répondent à des attentes fortes de la société, mais la durée de trois mois sur toute la carrière prévue pour cette dernière mesure est trop restrictive. Nous proposons deux amendements pour l'étendre à quatre et six mois.

Nous saluons la création du fonds d'indemnisation pour les victimes de maladies professionnelles liées aux pesticides, ainsi que son extension aux riverains exposés, tout comme les mesures pour lutter contre la pénurie de médicaments à l'article 34 et celles visant à combattre la fraude sociale à la carte vitale, proposées par le groupe les Indépendants et Jean-Pierre Decool.

Les hôpitaux devront offrir un système d'urgence au moins de jour, quand les Centres hospitaliers régionaux (CHR) sont trop éloignés. Il faut repenser le financement de la psychiatrie et la développer, notamment la pédopsychiatrie. Le manque de lits épuise le personnel des établissements qui accueillent les mineurs présentant des troubles du comportement. Je proposerai une équipe mobile par département.

Nous sommes sensibles à la situation des Ehpad, où il manque 80 000 emplois, pour 3,2 milliards d'euros de charges. La dotation du Gouvernement, à hauteur de 450 millions d'euros, est un débat mais elle ne permettrait pas la création d'1,5 ETP dans chacun des 7 500 établissements. Développons la formation des infirmiers et aides-soignants à domicile.

Malgré la non-compensation des exonérations que nous regrettons, le PLFSS apporte des avancées incontestables. Nous souhaitons le retour à l'équilibre des comptes de la sécurité sociale en 2023 et espérons que les débats améliorent le texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants ; Mme Véronique Guillotin applaudit également.)

M. Yves Daudigny .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR) Le contexte écrase presque le texte. La grande manifestation du 14 novembre mobilisera infirmiers, internes, médecins... Le collectif Inter-Hôpitaux a fait suite au collectif Inter-Urgences.

Le contexte, ce sont aussi les énièmes annonces au Journal du dimanche cette fois-ci, qui interrogent sur le fonctionnement de l'exécutif, en particulier dans son rapport avec le Parlement.

Le 28 octobre, le président de la République, bouleversé par la « souffrance au travail » de « nos infirmières, nos aides-soignantes et nos médecins qui sont d'un dévouement incroyable », promet une « réponse d'urgence» ; et de préciser : « soyons clairs, il faut qu'on remette des moyens ». Le constat est dit ! Le personnel médical est désabusé, la sécurité des patients est menacée... Et cette loi de financement de la sécurité sociale est hors du temps, avec un Ondam hospitalier de 2,1 % seulement !

Le projet approuvé par l'Assemblée nationale continue d'asphyxier un hôpital devenu entreprise depuis 2003, qui a réduit ses coûts de 8 milliards d'euros tout en augmentant son activité de 14 %.

Madame la ministre, vous annoncez plus de moyens. Quelle utilité ont donc nos débats ?

Le groupe socialiste propose une loi d'orientation et de programmation pour l'hôpital et notre système de santé garantissant des moyens pluriannuels et des investissements pour répondre aux attentes du personnel qui crie : « ils vont tuer la sécu » ! Vous remettez en cause l'autonomie du système social. L'État doit compenser.

Vous fabriquez et affichez un véritable déficit politique allant à l'encontre du rétablissement des comptes, nourrissant des discours inquiets, forgés d'idées reçues, de poncifs sur la viabilité de notre protection sociale.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 annonçait le pillage des excédents potentiels de la sécurité sociale au bénéfice de l'État. En 2019, la sécurité sociale prend à sa charge des mesures d'urgence sans que l'État compense cet effort. Elle ne peut donc pas dégager de moyens supplémentaires pour l'hôpital. C'est une injustice totale. La dette des organismes sociaux atteindrait 47,5 milliards d'euros en 2024.

La sécurité sociale doit porter les mesures prises après la crise des gilets jaunes et, en conséquence, des familles et des retraités verront leur pouvoir d'achat affecté.

Certes, nous saluons l'indemnisation du proche aidant, fût-elle de portée limitée, l'expérimentation du cannabis thérapeutique ou le forfait pour un parcours global post-traitement aigu du cancer.

Nous déposerons des amendements sur le fonds d'indemnisation des victimes de pesticides ou les missions des hôpitaux de proximité.

C'est un texte de renoncement, à l'équilibre des comptes sociaux, frileux sur les moyens donnés à la mise en oeuvre de la feuille de route « Ma santé 2022 », en décalage avec la réalité de la crise de l'hôpital et une dévalorisation du rôle du Parlement, alors que 82 % des Français jugent la santé « tout à fait prioritaire ». (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR ; Mme Laurence Cohen applaudit également.)

M. Olivier Henno .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Les PLFSS se suivent et ne se ressemblent pas. En 2018, le débat portait sur l'augmentation de la CSG ou de la TVA sociale.

En 2019, c'était le niveau des pensions et l'âge de la retraite. Dans le PLFSS 2020, les débats sont nombreux. Le groupe UC déposera des amendements pour améliorer le texte, comme de coutume, mais surtout pour ouvrir des champs de réflexion sur l'équilibre des comptes sociaux, la maîtrise de la dépense sociale et la compensation.

L'année dernière, les assemblées ont voté un budget à l'équilibre pour la première fois depuis dix-huit ans, ce qui paraissait un retour à l'éthique de la responsabilité. L'évocation, cette année, du mythe de Sisyphe est juste !

Les quelque 5,4 milliards d'euros de déficit sont dus à une baisse conjoncturelle des recettes, à des dépenses plus importantes que prévues et aux mesures d'urgence sociale.

Allons plus loin que de voter un PLFSS seulement à l'équilibre glissant.

Les projections gouvernementales sont très optimistes - trop ? - pour la fin de la période. Nous espérons qu'elles seront tenues mais devons tenir un cap réaliste. La part des dépenses d'assurance maladie augmente pour atteindre 8 % du PIB aujourd'hui.

La maîtrise de la dette sociale est un enjeu majeur. Les historiens seront sévères avec notre choix de reporter les coûts de notre santé et de notre sécurité sociale sur les générations futures par l'emprunt, qu'ils regarderont comme une aberration...

M. Loïc Hervé.  - Une lâcheté !

M. Olivier Henno.  - Oui, sans doute.

Le PLFSS comporte des dispositions techniques n'appelant pas de commentaire mais aussi des choix forts, par exemple à l'article 52, sur la fin de la taxation des prestations familiales. Mme Doineau a déposé un amendement, dont j'espère l'adoption ; l'article 7 sur l'accord d'intéressement, la reconduction de la prime exceptionnelle, la non-compensation de la loi portant mesures d'urgence économiques et sociales...

Au moment où l'assurance maladie est moins financée par les cotisations, comment défendre le chacun chez soi ? Cette tuyauterie n'est-elle pas paradoxale ?

La sécurité sociale est la racine de notre solidarité nationale, partie intégrante de notre identité. Elle ne doit pas devenir un gouffre sans fond pour nos finances. Finissons-en avec la dette sociale ! C'est le grand enjeu des dix prochaines années.

Le groupe UC a conscience de la difficulté de l'exercice, dans un contexte difficile - gilets jaunes, crise des hôpitaux...

Certes, la question du grand âge, la prévention, l'aide à la psychiatrie sont des enjeux à venir. Nous sommes au bout de cette hésitation sur les choix.

Vos propositions dans Le Journal du Dimanche ne sont pas illégitimes, elles sont nécessaires, mais nous devons les connaître avant de traiter le PLFSS.

Je conclurai en citant Jules Renard : « La brume, cela rend brumeux et ne génère jamais la confiance ». (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

M. Loïc Hervé.  - Il faut dissiper le brouillard !

Mme Corinne Imbert .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Nous examinons le premier PLFSS d'une nouvelle décennie. Pendant dix ans, le régime de la sécurité sociale a été constamment déficitaire. Des excédents auraient permis de résoudre la situation catastrophique des services d'urgence ou de traiter les problèmes du grand âge.

La fin 2018 a été marquée par le mouvement des gilets jaunes. Le Gouvernement a décidé de mesures d'urgence économiques et sociales pour y répondre, mais elles ont un impact financier sur le PLFSS.

La loi Veil du 25 juillet 1994 prévoyait une compensation par l'État du manque à gagner pour la sécurité sociale. Nous ne pouvons tolérer que l'autonomie de la sécurité sociale soit bafouée. Nous connaissons l'appétence du président de la République pour le modèle anglo-saxon, mais je le dis solennellement, la France n'a pas vocation à s'aligner sur ces modèles. Nous devons réaffirmer les principes ayant présidé à la création de la sécurité sociale en 1945...

M. Victorin Lurel.  - Très bien !

Mme Corinne Imbert.  - Nous soutiendrons la suppression à l'article 3 des dispositions de non-compensation des mesures d'urgence économiques et sociales par cohérence avec la loi Veil, afin de réaffirmer le rôle du législateur sur le budget de la sécurité sociale.

Les mouvements sociaux actuels, inédits, doivent être entendus, qu'ils concernent les Ehpad ou les hôpitaux... Ils traduisent des situations alarmantes. Comment tolérer que des tentes fassent office de salles d'opération en Guadeloupe ? C'est digne du tiers-monde !

La situation n'est pas difficile, ce serait un euphémisme !

Le PLFSS était très attendu par les professionnels de santé. Le compte n'y est pas.

Sur votre précédente loi, il a fallu une commission mixte paritaire tendue pour trouver des solutions. Vos propositions sont inacceptables.

Nous sommes là pour vous aider mais il faut nous écouter. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

La santé est un sujet trop sérieux, mais ne décourageons pas les professionnels de santé. Le projet de loi Engagement et proximité a vu Gouvernement et Sénat travailler de concert afin de parvenir à un texte équilibré et pragmatique.

Écoutez la voix des territoires que nous représentons ! En particulier pour le projet de loi sur le grand âge et l'autonomie, où la question du financement sera essentielle ; or je crains que les moyens ne suffisent pas. Le Gouvernement s'entête, avec hypocrisie, à promettre que le système de soins sera meilleur en termes de droits, sans que les devoirs soient accrus, et alors que les moyens ne sont pas suffisants.

Le groupe Les Républicains défendra le recul de l'âge de départ à la retraite à 64 ans, même si cette mesure n'est pas populaire.

Nous ne pouvons que saluer la volonté du Gouvernement de mieux accompagner les aidants, même si le financement de la mesure reste incertain. Puisqu'il faut toujours rendre à César ce qui lui appartient, je tiens à saluer le travail de Jocelyne Guidez sur ce sujet, avec sa proposition de loi déposée au Sénat dès juin 2018.

Des doutes persistent sur le financement des hôpitaux de proximité. L'hôpital est déjà l'une des variables d'ajustement de la sécurité sociale ; il ne faudrait pas que la santé devienne celle de l'exécutif.

Veillons à ce que le projet de loi de financement de la sécurité sociale ne devienne pas obsolète à peine voté.

Le Sénat avait tiré la sonnette d'alarme avant le mouvement des gilets jaunes. Les revendications qu'il portait demeurent d'actualité.

Le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale comme les autres participe à la consolidation ou, au contraire, à la destruction de notre modèle de société. Il ne s'agit, en effet, pas seulement de santé, mais de la France, de son Histoire, de son idéal et du legs qu'elle souhaite transmettre aux générations futures. Nous ne voulons pas du modèle de financement que vous nous proposez. Or, il suffit parfois d'une étincelle pour faire vaciller tout un peuple et compromettre l'ensemble d'un modèle économique et social.

Conscient que vous essayez de desserrer l'étau budgétaire qui bride notre système de santé, le groupe Les Républicains espère que vous ferez mieux, à défaut de bien faire. Vous pouvez compter, à cet effet, sur notre soutien. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

M. Stéphane Artano .  - Le 12 juin, le Premier ministre s'est engagé à déposer un projet de loi sur la dépendance, souhaitant faire de la prise en charge du grand âge un marqueur du quinquennat. Les moyens financiers inscrits dans le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale ne sont cependant pas à la hauteur de cette ambition.

L'allongement de la vie s'accompagne très souvent de la perte d'autonomie. Les sacrifices financiers et les drames humains qui en résultent sont bien réels, quand les personnes âgées sont accueillies parfois de façon indigne et que le personnel soignant travaille dans des conditions déplorables.

Je me félicite de la convergence tarifaire pour les Ehpad, mais je regrette que le secteur des aides à domicile soit mal pris en compte : 50 millions d'euros, ce n'est pas assez pour répondre aux besoins du secteur et opérer une refonte globale. Il faut revoir en profondeur le système de tarification des services d'aide à domicile.

Je souhaite un projet de loi grand âge ambitieux. Dans cette attente, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 ne comporte pas de levier significatif ; les mesures prévues manquent de vision de long terme.

L'indemnisation des victimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles est insatisfaisante. Ils ne peuvent plus racheter leur rente. Or, ils rencontrent souvent des difficultés d'accès au crédit. Je regrette le retrait à l'article 54 de cet apport en capital qui peut les aider à concrétiser un projet professionnel.

Avec Pascale Gruny, nous avons commis un rapport d'information « pour un service universel de santé au travail ». J'espère que la plateforme annoncée aidera à repérer les salariés en désinsertion. « La sécurité sociale, c'est d'abord un immense progrès social et le plus grand facteur de cohésion sociale, qui existe en France et que nous avons le devoir de préserver pour les générations futures », a dit Simone Veil. C'est dans cet esprit que je souhaite que nous débattions. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE)

Mme Jocelyne Guidez .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Je partage les analyses du rapporteur général et d'Oliver Henno sur l'équilibre général du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020. Nous nous étonnons que la volonté du Gouvernement n'ait pas été au rendez-vous pour les urgences hospitalières ou pour nos Ehpad. Parfois, un seul directeur gère plusieurs établissements, dans nos départements. Notre système de santé, qui traverse une crise majeure depuis plusieurs mois, ne tient qu'au dévouement et à l'abnégation des professionnels.

Comme l'a souligné Catherine Deroche, il est dommage que le plan très attendu sur l'hôpital soit présenté après le vote du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Nous nous joignons à la demande de la commission des affaires sociales de soutenir l'installation des jeunes médecins en zones sous-dotées. Les crédits et les ambitions pour le grand âge sont en-deçà des enjeux : ainsi, l'effort pour les assistants de soins en gériatrie dans les Ehpad, ne représente que 150 000 euros par département.

Le projet de loi annoncé en faveur du grand âge et de l'autonomie devra être à la hauteur.

Nous saluons le parcours global post-traitement du cancer. Il faut aller encore plus loin en matière d'innovation sur les maladies graves ou rares.

Nous nous interrogeons, en revanche, sur la portée de l'article 30. L'ambition de vaincre la maladie doit plus que juste nous mobiliser.

S'agissant de la branche famille, le fractionnement du congé de présence parentale est une bonne nouvelle pour les parents d'enfant malade. Je déposerai un amendement pour que les agents du service public puissent en bénéficier.

La création d'une plateforme publique recensant l'offre de garde de jeunes enfants va également dans le bon sens. L'article 49 ne nous satisfait cependant pas totalement. Nous soutiendrons l'amendement de Mme Doineau sur la suspension d'agrément des assistantes maternelles.

Pour le handicap, 200 millions d'euros de mesures nouvelles sont annoncés.

Un enjeu majeur de formation demeure : comment mieux encourager les personnes d'opter pour la profession de soignant en Ehpad ?

Enfin, l'indemnisation, pendant 66 jours, pour les aidants familiaux, si elle constitue un progrès, une première étape encourageante, qui reprend partiellement et de manière différente une partie de ma proposition de loi, votée à l'unanimité au Sénat, n'est pas suffisante. Je la voterai bien évidemment.

Bien que le virage social du quinquennat ressemble plus à la promenade des Anglais qu'à un lacet du col du Tourmalet, (Sourires) le groupe UC votera ce budget. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

M. Jean-François Rapin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Construire « l'État providence du XXIe siècle » : tel serait l'objectif du Gouvernement à travers ce PLFSS.

La reconstruction du système de protection sociale est un vaste chantier et le groupe Les Républicains espère ajouter sa pierre à ce vaste chantier.

Il est dommage de creuser le déficit de la sécurité sociale en ne compensant pas la perte de recettes. La Cour des comptes a estimé qu'un retour à l'équilibre ne peut se réaliser par un simple décalage dans le temps du remboursement de la dette sociale. Des réformes structurelles sont nécessaires.

De fait, les mesurettes prévues par le PLFSS, telles que le versement de la pension alimentaire par les CAF, quoique nécessaires, ne sont pas suffisantes.

L'article 34 porte sur la pénurie de médicaments, sur laquelle MM. Decool et Daudigny ont travaillé. Madame la ministre, comme ancien médecin, pensez-vous vraiment que sanctionner les industries de santé répondra durablement aux tensions d'approvisionnement ?

Les patients, dans ma région, sont parfois contraints d'acheter leurs médicaments en Belgique. Il faut repenser toute la chaîne de production et revoir les contrôles qualité. Les sanctions prendront effet en janvier alors que c'est à cette date que vous recevrez le résultat des premières évaluations.

Il y a un an, le Gouvernement était contraint de prendre des mesures d'urgence pour répondre à la crise des gilets jaunes. Nous nous réjouissons que vous vous inspiriez d'initiatives sénatoriales telles que celle portée par Olivier Paccaud et moi, ainsi que par le député Olivier Dassault, mais regrettons que la prime ne soit pas pérenne. Vous reconduisez, cette année, cette mesure exceptionnelle en faveur du pouvoir d'achat, mais ses modalités d'application désincitent plus qu'elles n'encouragent les employeurs à valoriser le travail des salariés. Vous souhaitez de la simplification, mais vous imposez un accord d'intéressement pour le versement de ladite prime. Nous avons déposé un amendement de suppression dont il me tarde de débattre...

Oui, l'État social doit être présent à chaque âge de la vie.

L'article 30 du PLFSS durcit l'autorisation temporaire d'utilisation (ATU) pour les médicaments innovants.

Pour un milliard de dollars investis, nous sommes passés de dix médicaments mis sur le marché dans les années soixante-dix à un au début des années 2000.

Cette évolution montre la complexité croissante des procédures de mise sur le marché. Avec l'article 30, la situation risque de s'aggraver. La sécurisation à l'excès des procédures ne doit pas faire obstacle à l'innovation thérapeutique.

Au total, ce PLFSS n'est pas à la hauteur des enjeux. Ses considérations sont plus économiques que sociales.

J'espère que l'examen de ce PLFSS sera l'occasion d'un véritable dialogue. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe UC)

M. Jean-Louis Tourenne .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR) Une question me taraude : quelles innovations l'autoproclamé « nouveau monde » a-t-il engagées ? La gauche a pris tant d'initiatives originales et justes - je pense au RMI, à la garantie jeunes, au mariage pour tous, à la CMU, à la PUMa, au PACS, à la prise en charge des pensions alimentaires par la CAF...

Qu'en est-il du nouveau monde ? Rien, seulement des dégradations de l'existant, avec les licenciements facilités, la précarisation sans cesse croissante, des reculs, tels que des fermetures de maternités. Ce qui est nouveau, c'est seulement le vocabulaire, sorte de novlangue dont la prétendue modernité et le pseudo-humanisme cachent de plus en plus mal la misère et le désespoir qui gagnent les plus défavorisés...

M. Roland Courteau.  - Très juste !

M. Jean-Louis Tourenne.  - Or 62 % des 8-14 ans craignent de tomber dans la précarité.

Le mécontentement gronde. Le recul des places en crèche dans les quartiers populaires et les territoires ruraux est particulièrement regrettable.

Vous puisez allègrement dans les ressources de la sécurité sociale pour tenter de nourrir artificiellement le budget de l'État. Les cotisations d'assurance pour la santé et l'avenir sont détournées pour masquer la gestion inconséquente du budget de la Nation.

Les créations d'emploi sont à l'actif du précédent quinquennat - 328 000 en 2017, 168 000 en 2018, ce qui explique une moindre augmentation de la masse salariale et une baisse drastique des recettes - leur chute brutale est de votre fait.

Vous employez les mots du triomphe pour évoquer votre plan de lutte contre la pauvreté mais ce ne sont que 150 misérables millions d'euros qui y seront consacrés en 2019, quand la pauvreté, avec vous, ne cesse d'augmenter. Vous en supprimez opportunément l'Observatoire. Et ce seront les départements qui en porteront la charge.

Il faut 150 ans à un jeune Français précaire pour atteindre le salaire moyen. Comment ne pas comprendre le désarroi de nos concitoyens ?

Je voterai, pour cause de vide, contre ce PLFSS en lévitation au-dessus des réalités.

Wilkinson et Pikett, auteurs d'une étude intitulée « Pour vivre heureux, vivons égaux ! » indiquent que dans les sociétés inégalitaires, les pauvres ne sont pas les seuls à souffrir car il y a plus de violences et une santé dégradée. À méditer, n'est-ce pas ? (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR)

M. Roland Courteau.  - Bravo !

M. Yves Daudigny.  - Très bien !

Mme Corinne Féret .  - Ce PLFSS est plutôt un projet de loi de sous-financement de la sécurité sociale. Le PLFSS ne doit pas être la variable d'ajustement du budget de l'État !

Il est loin d'être à la hauteur des attentes et des besoins. La situation est pourtant très critique dans les hôpitaux et particulièrement aux urgences.

Je centrerai mon propos sur le secteur médico-social. Quelque 50 millions d'euros seulement sont consacrés à l'aide à domicile, alors que le maintien à domicile est pourtant le choix de neuf Français sur dix concernés par la perte d'autonomie. Or le nombre de personnes âgées devrait augmenter de 20 % d'ici 2030.

Ces métiers difficiles souffrent d'un déficit d'attractivité. Dans le Calvados, les professionnels sont confrontés à une pénurie de personnel et doivent refuser des interventions. Cela pose un problème de société.

Le rapport de Dominique Libault, le président du Haut Conseil pour le financement de la protection sociale, plaide pour un développement du maintien à domicile. Myriam El Khomri constatait pour sa part, dans son rapport sur les métiers du grand âge, la difficulté de recruter des professionnels dans ce secteur et le défaut de vocations. Il faudrait créer 18 500 postes supplémentaires par an, ce qui coûterait 825 millions d'euros par an. Mais où trouver les moyens ? Nous attendons votre loi sur le grand âge. Elle ne sera hélas pas discutée en 2019 comme initialement prévu. Il y a pourtant urgence ! Les départements, qui versent des aides, sont exsangues ; les professionnels de santé à bout.

En juin, lors de sa déclaration de politique générale, le Premier ministre avait annoncé que ce PLFSS serait la première étape d'une réforme ambitieuse pour la prise en charge du grand âge, priorité du quinquennat. Il n'en est rien, hélas, au prétexte que le projet de loi est en préparation. Mais quand il nous sera présenté, nous devrons nous prononcer sur des mesures non financées. Cela n'a pas de sens. Il est pourtant urgent d'apporter des solutions. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR)

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État .  - Un mot d'abord des compensations. Le PLFSS ne représente pas une rupture ! Depuis la loi Veil qui en posait le principe, de nombreuses mesures non compensées ont été prises par les gouvernements successifs. Au contraire, nous avons apporté des clarifications, dans la loi de programmation comme dans le PLFSS de l'an dernier. Nous continuons sur cette lancée : l'État compense ainsi intégralement les allègements généraux, à hauteur de 81 millions d'euros. Le contexte a certes changé avec 5,4 milliards d'euros de déficit en 2019 lié à la dégradation du contexte macro-économique. Nous en tenons compte en supprimant, pour 3 milliards d'euros, certains transferts du budget de la sécurité sociale à celui de l'État.

Les mesures bénéficient majoritairement aux citoyens qui en ont le plus besoin. Je pense notamment à la non-imposition des heures supplémentaires : les deux tiers des ouvriers en effectuent, comme 46 % des employés, contre 20 % pour les cadres. Nous avons également réindexé les pensions de moins de 2 000 euros sur l'inflation, ce qui se traduira par 428 euros en plus pour un retraité dont la pension est de 1 900 euros.

Le déficit de l'État tangente les 100 milliards d'euros, contre 5,5 milliards d'euros pour la sécurité sociale, ne l'oublions pas... Nous respectons pour autant le principe d'autonomie financière de la sécurité sociale - il n'est pas question de fusionner projet de loi de finances et PLFSS. Quant à l'affectation de recettes spécifiques à la sécurité sociale, je rappelle que les choses ont changé depuis de nombreuses années, que 50 milliards d'euros sont versés au budget de la sécurité sociale au titre de la compensation des allègements généraux, 5 milliards d'euros de crédits budgétaires pour des exonérations ciblées, divers dispositifs étant en outre financés par des recettes fiscales.

La dette sociale a été aux deux tiers apurée. Sa résorption est une priorité, car nous ne voulons pas léguer un système déséquilibré aux générations futures. La dette est financée par l'Acoss à des taux négatifs depuis 2018. Son plafond d'emprunt n'augmentera que d'un milliard d'euros en 2020 en dépit d'un déficit de 5 milliards d'euros. En 2019, la Cades aura remboursé 16 milliards d'euros de dette, il en ira de même en 2020. En 2022, la dette de l'Acoss s'élèvera à 75 milliards d'euros. Nous pourrions la transférer à la Cades - ce qui exigerait une loi organique - ou réaliser des économies permettant de le financer : c'est cette seconde voie que nous choisissons.

Monsieur Joyandet, vous avez évoqué, comme d'autres, les niches sociales. Nous menons un travail d'évaluation de leur efficacité. La Cour des comptes les estime à 90 milliards d'euros, mais ce calcul intègre les taux réduits de CSG, auxquels personne ne veut toucher. Si nous les déduisons, la somme s'établit à un peu plus de 60 milliards d'euros.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Nous aurons l'occasion d'évoquer diverses mesures du PLFSS mais je souhaite concentrer mon propos sur l'hôpital qui traverse une crise profonde. Nous devons y apporter des réponses à la hauteur des enjeux. Il importe de restaurer la confiance dans le financement du système de santé, indépendamment des travaux déjà engagés autour de ce PLFSS. Il n'est pas vrai que les décisions soient déjà prises. Des discussions, des pistes, bien sûr, car nous travaillons à des solutions, avec l'ensemble des acteurs. Mais les arbitrages sont complexes, nous n'avons pas le droit à l'erreur.

Vous souhaitez attendre des annonces et vous évoquez la date du 20 novembre. Certaines mesures pourraient être intégrées en nouvelle lecture au PLFSS, lorsqu'elles relèvent du domaine législatif. Est-ce une raison pour ne pas discuter de ce texte et de certains dispositifs d'origine sénatoriale - comme le fonds d'indemnisation des victimes de pesticides - avant le 20 novembre, qui ne correspond à aucune date fixée, sinon par un article de presse ?

Vous qualifierez ce budget d'insincère. Je ne le crois pas, pas plus qu'à une absence de respect du Parlement. Celui-ci décide du niveau de l'Ondam sur proposition du Gouvernement et vote l'ensemble des mesures de la protection sociale. Nos débats sont utiles et l'hôpital ne mérite pas moins.

La discussion générale est close.

Renvoi en commission

Mme la présidente.  - Motion n°936, présentée par M. Milon, au nom de la commission des affaires sociales.

En application de l'article 44, alinéa 5, du Règlement, le Sénat décide qu'il a lieu de renvoyer à la commission le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, de financement de la sécurité sociale pour 2020 (n° 98, 2019-2020).

M. Alain Milon, président de la commission .  - Nous avons examiné le PLFSS en commission des affaires sociales le 6 novembre. En dépit du travail de ses rapporteurs, elle n'a pu se prononcer de façon éclairée sur ce texte important, car d'importantes incertitudes entourent le niveau des moyens financiers destinés à la santé et à l'hôpital.

Le Gouvernement n'a transmis aucun élément d'information concernant une modification de l'Ondam. Pourtant, un grand journal a annoncé que Mme la ministre avait remporté d'importants arbitrages budgétaires de nature à améliorer la situation financière des hôpitaux et la rémunération des personnels.

Si cela est vrai, tant mieux ! Mais pour le Sénat, la situation n'est pas acceptable. Elle compromet la sincérité des débats et contrevient à l'esprit de l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale.

La commission des affaires sociales proposera le rejet de l'article 59 sur l'Ondam, en l'état, afin de mieux y travailler en nouvelle lecture. Elle propose aussi au Sénat, en adoptant la motion n°936, de lui renvoyer le texte, puisque le brouillard entourant l'Ondam est susceptible de fausser l'ensemble de la discussion, y compris le niveau des recettes adéquat des régimes de sécurité sociale.

Cela permettra au Gouvernement d'indiquer enfin avec précision ses intentions pour réviser le niveau de l'Ondam et pour répondre à la crise hospitalière - maintenant et non en nouvelle lecture, car nous aurons alors suffisamment d'éléments pour travailler.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement ne peut être favorable à une telle motion. Le PLFSS a fait l'objet d'échanges nombreux et comprend des mesures attendues par nos concitoyens. En outre, il ne faudrait pas nous laisser enfermer par une procédure parlementaire brève - après quinze jours, le texte sera renvoyé à l'Assemblée nationale, assorti des seuls amendements que le Sénat aura eu le temps d'adopter. Nous formons le voeu que la discussion puisse s'engager dès maintenant.

Nous veillerons à associer le Parlement aux mesures envisagées pour l'hôpital, et à les traduire concrètement - mais cela est difficile, tant qu'elles ne sont pas fixées. Avis défavorable à la motion.

Mme Laurence Cohen.  - Nous voterons cette motion. Je regrette cependant le rejet de notre motion d'irrecevabilité constitutionnelle sur les mesures de non-compensation des exonérations. Certes, il y en eut par le passé, monsieur le ministre, mais jamais de cette ampleur - ce n'est pas seulement nous qui le disons, mais les autres groupes politiques, et la Cour des comptes.

Je ne doute pas que le Gouvernement veuille répondre à la crise de l'hôpital, mais nous nous trouvons dans un brouillard à couper au couteau. Il y aura sans doute, dites-vous, une augmentation de l'Ondam, mais à quelle hauteur ? Accepterez-vous les 4,5 % que réclament tous les professionnels de santé et les fédérations hospitalières ? Modifierez-vous votre politique d'exonérations massives ? Nous n'avons aucune réponse...

Nous voterons cette motion, mais je crains que ce ne soit un coup d'épée dans l'eau, qui retardera simplement nos débats de quelques heures. Je vous propose de nous retrouver après le 20 novembre, quand Mme la ministre aura daigné nous révéler la réalité de son budget. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)

Mme Michelle Meunier.  - Nous sommes viscéralement attachés au financement de la sécurité sociale et à sa pérennité. Le PLFSS a été présenté fin septembre, alors que les urgences hospitalières étaient en grève. Malgré vos annonces d'un plan à 750 millions d'euros, la mobilisation des soignants n'a pas faibli. Le collectif Inter-Urgences nous a éclairés sur ce que dissimule votre budget. Des patients vulnérables sont en danger ; des effectifs sont en sursis.

Vous évoquez dans le JDD une éventuelle augmentation de l'Ondam, des investissements, une revalorisation. Nous sommes prêts, c'est notre rôle de parlementaires d'en discuter, et nous avons précisément à notre agenda la discussion d'un PLFSS. Par conséquent, qu'attendons-nous ?

Le groupe socialiste a des propositions à faire. Mais quand verrons-nous enfin la copie du Gouvernement ? Jeudi prochain ? Ou le 20 novembre n'est-il pas la vraie date ?

Les bases sérieuses de discussion ne sont pas à ce stade posées, en ce qui concerne l'hôpital. Nous soutiendrons la motion. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR)

M. Michel Amiel.  - Nous ne la voterons pas. Je peux comprendre le mouvement d'humeur de la commission des affaires sociales, mais pas au point de renoncer à la discussion de l'ensemble du texte ! Comme tous les parlementaires, nous attendons des mesures fortes, sans que cela remette en cause, à nos yeux, le débat sur le PLFSS.

La motion n°936 est adoptée.

En conséquence, le renvoi en commission est ordonné.

Mme la présidente.  - En application de l'article 44, alinéa 5, du Règlement, lorsque le Sénat adopte une motion de renvoi en commission sur un texte inscrit par priorité à l'ordre du jour sur décision du Gouvernement, la commission doit présenter ses conclusions au cours de la même séance, sauf accord du Gouvernement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement est attaché à l'application stricte de l'article 44 et souhaite que la commission donne son avis dans la même séance.

Mme la présidente.  - De quelle durée souhaitez-vous que soit la suspension, monsieur le président ?

M. Alain Milon, président de la commission.  - Nous pourrions reprendre à 21 h 30.

La séance est suspendue à 19 h 30.

présidence de M. Jean-Marc Gabouty, vice-président

La séance reprend à 22 h 15.

Nous avions demandé une suspension de la séance en raison de l'article paru dans la presse qui nous avait fait comprendre que des arbitrages avaient été obtenus, sur la reprise de la dette des hôpitaux ou l'évolution de carrière des professionnels hospitaliers.

La commission des affaires sociales n'était pas satisfaite des réponses apportées par les ministres en séance. Ils sont venus s'exprimer devant la commission, à notre demande, et affirment que les informations de la presse n'émanent pas d'annonces officielles.

M. Jean-François Husson.  - On a tout inventé ?

M. Alain Milon, président de la commission.  - Après discussion, la commission a donc voté la reprise de nos travaux.

Mme Laurence Cohen.  - À la majorité, pas à l'unanimité !

Discussion des articles de la première partie

ARTICLE ADDITIONNEL avant l'article premier

M. le président.  - Amendement n°777 rectifié bis, présenté par M. Daudigny et les membres du groupe socialiste et républicain.

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet un rapport au Parlement sur le financement des établissements hospitaliers par l'ONDAM et sur l'opportunité d'une loi d'orientation et de programmation pour l'hôpital pour les années 2020 à 2025.

M. Yves Daudigny.  - Nous mesurons la gravité de la crise de l'hôpital, dont les urgences ne sont qu'un symptôme. Cet amendement vise à ce que le Parlement débatte des orientations et objectifs assignés à notre système de santé pour les cinq années à venir : réouverture de lits, revalorisation des salaires, attractivité des métiers, investissements dans l'immobilier, les équipements et l'innovation.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Avis favorable. Nous en avons suffisamment débattu.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Avis défavorable à une loi de programmation. Nous prenons déjà des mesures pour l'hôpital. Pour la première fois depuis dix ans, les tarifs étaient en hausse en 2019. 300 millions d'euros ont été rajoutés à l'Ondam et les mises en réserve de 2018 ont été dégelées. Les tarifs pour 2020 seront au moins aussi élevés qu'en 2019. Nous travaillons à un plan global pour l'hôpital public qui vise à augmenter sa capacité d'investissement, à rendre les carrières hospitalières plus attractives et à fidéliser le personnel. Ce projet de loi de financement donnera en outre une visibilité pluriannuelle aux établissements sur leur financement. Autant de mesures pour rendre des marges de manoeuvre à l'hôpital public.

M. Alain Milon, président de la commission.  - Il est utile de savoir exactement où nous allons. Votons cet amendement pour maintenir la pression sur le Gouvernement, en attendant les précisions à venir.

Mme Laurence Cohen.  - Nous soutenons cet amendement. Les moyens que vous dites avoir dégagés, madame la ministre, ne sont que des transferts. C'est tout à fait insuffisant au regard de la situation actuelle des hôpitaux. Les services des urgences sont en lutte depuis huit mois, et les manifestations annoncées prouvent la colère et l'amertume des professionnels de santé. Nous avons besoin de clarté.

L'amendement n°777 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.

L'article premier est adopté.

L'article 2 est adopté.

La première partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale, modifiée, est adoptée.

Discussion des articles de la deuxième partie

ARTICLE 3

Mme Laurence Cohen .  - Nous contestons la non-compensation des exonérations par laquelle le Gouvernement tourne le dos à la loi Veil du 27 juillet 1994. Elle n'est pas inédite mais son ampleur est énorme.

Vous nous direz que d'un point de vue comptable, cela revient au même pour les Français. Mais du point de vue de la justice sociale et de la solidarité, ce n'est pas indifférent. Le budget de l'État est financé par l'impôt, le budget de la sécurité sociale par les cotisations sur le travail. Les exonérations - plusieurs milliards d'euros ! - pèsent dès lors sur le seul travail. Le Gouvernement, en s'entêtant, fait peser un lourd tribut sur les assurés sociaux, sur le système de protection social et sur notre économie.

Deuxième injustice, vous faites peser sur la sécurité sociale les mesures d'urgence arrachées par les gilets jaunes. Je ne doute pas que nos amendements seront suivis.

M. Yves Daudigny.  - L'an dernier, le Gouvernement annonçait que la sécurité sociale serait enfin en excédent en 2019. Or le déficit cumulé du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) atteint 5,4 milliards d'euros, et sera encore de 5,1 milliards en 2020. Certes, la masse salariale a été moins favorable que prévue, les dépenses des branches maladie et vieillesse plus importantes, mais surtout, les nouvelles mesures d'urgence, non compensées, pèsent pour 2,7 milliards d'euros. Le Gouvernement déroge à la loi Veil de 1994, règle d'or selon laquelle toute exonération de cotisation donne lieu à compensation intégrale par le budget de l'État.

Vous organisez le pillage de l'édifice social fondé en 1945 sur les valeurs de justice et de solidarité. Au mépris de l'autonomie de la sécurité sociale, Bercy accroît son emprise et prépare la captation de potentiels excédents. La prochaine étape sera-t-elle la fongibilité totale dans le budget de l'État ?

M. René-Paul Savary.  - Nous connaissons les difficultés de l'hôpital, des retraites, et nous découvrons un PLFSS de plus en plus compliqué, entre déficit organisé et obsolescence programmée ! Nous pensions que les décisions avaient été prises et nous apprenons à l'instant que vous ne savez pas encore comment vous réglerez les problèmes de l'hôpital. Entre le déficit, les moyens supplémentaires pour l'hôpital et les mesures paramétriques pour préparer la réforme des retraites, que d'incertitudes !

M. le président.  - Amendement n°526 rectifié, présenté par MM. Antiste, Todeschini et Lalande, Mme G. Jourda, M. Duran, Mmes Taillé-Polian, Monier et Artigalas et MM. Jomier et Temal.

Supprimer cet article.

Mme Marie-Pierre Monier.  - Selon la Cour des comptes, le déséquilibre des comptes de la sécurité sociale s'explique avant tout par la politique d'exonérations de cotisations sociales. Celles-ci doivent faire l'objet d'une compensation intégrale par l'État.

M. le président.  - Amendement identique n°570, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - C'est une décision grave que d'amputer les recettes de 3 milliards d'euros, alors que la sécurité sociale est en déficit de 5,1 milliards d'euros. La non-compensation des mesures « gilets jaunes » est une attaque sans précédent contre l'autonomie de la sécurité sociale. Elle aura pour conséquence des coupes budgétaires sur les hôpitaux, des fermetures de lits voire d'établissements, des Ehpad sinistrés... Les faibles primes obtenues par quelques-uns pèsent peu face à cette véritable casse du service public de la santé !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Avis défavorable. Au-delà de la question de la non-compensation, cet article contient des dispositions utiles sur la répartition des recettes entre les branches qu'il convient de conserver.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Avis défavorable, tant à la suppression totale que partielle de l'article.

Les amendements identiques nos526 rectifié et 570 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°527 rectifié, présenté par MM. Antiste, Todeschini et Lalande, Mme G. Jourda, M. Duran, Mmes Taillé-Polian, Monier et Artigalas et MM. Jomier et Temal.

Alinéas 1 à 12

Supprimer ces alinéas.

Mme Viviane Artigalas.  - La non-compensation à la sécurité sociale des mesures d'urgence va à l'encontre du principe de compensation intégrale - objet d'entorses croissantes depuis 2017. Ainsi, le crédit d'impôt de taxe sur les salaires n'a pas été compensé en 2018.

Pour 2020, ces non-compensations s'élèveraient à 3,5 milliards d'euros. Autant de ressources qui devraient revenir à la sécurité sociale !

M. le président.  - Amendement n°943, présenté par le Gouvernement.

Alinéa 8

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

II.  -  Le dernier alinéa du III de l'article L. 14-10-5 du code de l'action sociale et des familles est ainsi rédigé :

« Avant imputation aux sections mentionnées aux IV, V et VI, l'ensemble des contributions mentionnées aux 1°, 1° bis et 3° de l'article L. 14-10-4 du présent code destinées aux personnes handicapées, soit au titre des établissements et services financés par la sous-section mentionnée au 1 du I du présent article, soit au titre de la présente section, doit totaliser au moins 20 % du produit de ces contributions. »

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Coordination corrigeant une erreur matérielle.

M. le président.  - Amendement n°168, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales.

Alinéas 9 à 12

Supprimer ces alinéas.?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Nous supprimons les mesures de non-compensation proposées à l'article 3.

M. le président.  - Amendement identique n°274 rectifié ter, présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano, Castelli et Corbisez, Mme Costes, MM. Dantec et Jeansannetas, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Requier et Cabanel.

Mme Nathalie Delattre.  - Le groupe RDSE dénonce la dérogation à la loi Veil assumée par le Gouvernement. Les mesures « gilets jaunes » concernent le pouvoir d'achat, pas la sécurité sociale.

Les efforts des professionnels de santé pour enrayer le trou de la sécurité sociale ne sont pas récompensés, masqués qu'ils sont par la non-compensation.

M. le président.  - Amendement identique n°572, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Michelle Gréaume.  - La compensation est le principe, non l'exception. L'État n'a pas à faire financer ses choix politiques par les assurés sociaux. Va-t-on demander aux travailleurs de financer eux-mêmes la hausse de leur pouvoir d'achat ? Sans compter que la prime n'étant qu'incitative, elle ne bénéficie pas à tous !

M. le président.  - Amendement identique n°806 rectifié, présenté par M. Daudigny et les membres du groupe socialiste et républicain.

M. Yves Daudigny.  - La non-compensation de l'exonération de cotisations sur les heures supplémentaires et de la perte de recettes liées à la création d'un taux de CSG intermédiaire fait suite à la l'exonération de forfait social des entreprises versant un intéressement, qui a entraîné une perte de recettes de 500 millions d'euros.

À la différence des précédentes dérogations à la loi Veil, vous faites de la non-compensation des exonérations une véritable doctrine. Or la fongibilité entre le budget de l'État et le budget de la sécurité sociale, c'est la fin de l'autonomie de la protection sociale !

M. le président.  - Amendement n°528 rectifié, présenté par MM. Antiste, Todeschini et Lalande, Mme G. Jourda, M. Duran, Mmes Taillé-Polian, Monier et Artigalas et MM. Jomier et Temal.

Alinéas 10 et 12

Supprimer ces alinéas.

Mme Gisèle Jourda.  - La non-compensation des mesures d'urgence représente près de 2,8 milliards d'euros de manque à gagner pour les comptes sociaux. Elle interroge sur les marges de manoeuvre réelles dont nous disposons alors que sont encore devant nous les grands chantiers de la dépendance - qui coûtera 9,2 milliards d'euros d'ici 2030 - et de la réforme des retraites. Nous craignons que le Gouvernement ne fasse supporter par la sécurité sociale le financement des régimes de retraite de la fonction publique.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Avis défavorable à l'amendement n°527 rectifié qui supprime des mesures utiles de correction de la répartition entre branches.

Avis favorable à l'amendement n°943 du Gouvernement ainsi qu'aux amendements nos274 rectifié ter, 572 et 806 rectifié, identiques à celui de la commission.

L'amendement n°528 rectifié ne va pas aussi loin que l'amendement de la commission. Il tombera si ce dernier est adopté.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Avis défavorable à l'amendement n°527 rectifié, ainsi qu'à l'amendement n°528 rectifié.

L'État compense très largement les exonérations que supporte la sécurité sociale : les allègements généraux sont financés par l'affectation d'une fraction de TVA pour 51 milliards d'euros. Nous assumons de demander à la sécurité sociale de financer les mesures d'urgence économiques et sociales à hauteur de 2,8 milliards d'euros.

Je n'accepte pas la notion de déficit organisé. Avec ou sans les mesures d'urgence, la sécurité sociale aurait été en déficit. Nous espérons retrouver en 2020 la trajectoire de retour à l'équilibre.

J'ai recensé une vingtaine de dérogations à la loi Veil, de la non-compensation d'une exonération de 25 millions d'euros en 2014 à celle des cotisations maladie minimales pour les travailleurs indépendants en 2013, qui coûte aujourd'hui 1 milliard d'euros à la sécurité sociale...

Sur les 17 milliards d'euros de la loi portant mesures d'urgence économiques et sociales, 14 milliards seront supportés par l'État, dont le déficit s'est accru quand celui de la sécurité sociale se réduisait. La non-compensation ne se traduit pas par une augmentation de la dette sociale, l'effort d'apurement étant trois fois supérieur au déficit constaté en 2019. Avis défavorable.

L'amendement n°527 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement n°943 est adopté.

Les amendements identiques nos168, 274 rectifié ter, 572 et 806 rectifié sont adoptés.

L'amendement n°528 rectifié n'a plus d'objet.

M. le président.  - Amendement n°571, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'alinéa 7

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  L'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« ....  -  Le montant de la contribution est majorée de 15 % pour tout revenu d'activité ou du patrimoine dépassant un seuil fixé par décret en Conseil d'État, sans que ce montant puisse excéder quatre fois le salaire horaire minimum légal. »

Mme Laurence Cohen.  - Le poids des allègements généraux de cotisation a conduit la Cour des comptes à s'interroger sur le caractère général de la dérogation. Pour nous, le financement de la sécurité sociale passe par la suppression des exonérations, la lutte contre la fraude patronale, la mise à contribution des revenus financiers et l'industrie pharmaceutique.

La solidarité est à la base de notre contrat social. Chacun doit contribuer selon ses moyens et recevoir selon ses besoins. Cela suppose d'augmenter les cotisations sur les plus hauts salaires, d'autant que les inégalités de revenus se creusent.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Avis défavorable. L'efficacité de la CSG tient à sa large assiette et à son taux relativement modéré. La complexifier, y créer des niches risquerait de nourrir un sentiment d'injustice. Restons-en au système actuel.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - L'amendement contrevient au principe d'égalité devant l'impôt dans la mesure où votre taux diffère en fonction de la nature du revenu et non de la capacité contributive. Par ailleurs, c'est à la loi de fixer le taux et l'assiette des impositions de toute nature, dont relève la CSG. Avis défavorable.

L'amendement n°571 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°573, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'alinéa 12

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  Après le premier alinéa de l'article L. 131-7 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Toute dérogation au premier alinéa du présent article fait l'objet d'un vote de la part des caisses de sécurité sociale dans le cadre de la saisine pour avis sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale. »

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - La multiplication des exonérations met en péril notre système de protection solidaire. Il faut dire stop : le point de non-retour a été franchi, l'édifice menace ruine.

Nous proposons, pour verrouiller la prolifération des exonérations, que toute nouvelle dérogation fasse l'objet d'un vote des caisses paritaires.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Les caisses s'expriment déjà sur le PLFSS. La commission des comptes de la sécurité sociale ne manque pas non plus de le faire. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Avis défavorable car satisfait : l'article L. 203 du code de la sécurité sociale prévoit déjà une saisine pour avis des conseils. Et votre amendement serait inopérant car il ne prévoit pas les conséquences selon le résultat du vote.

À la demande du groupe CRCE, l'amendement n°573 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°30 :

Nombre de votants 328
Nombre de suffrages exprimés 328
Pour l'adoption   87
Contre 241

Le Sénat n'a pas adopté.

À la demande du groupe CRCE, l'article 3, modifié, est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°31 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 341
Pour l'adoption 301
Contre   40

Le Sénat a adopté.

ARTICLE 4

Mme Laurence Cohen .  - Seule la création d'un pôle public du médicament mettra un terme aux ruptures de stocks organisés par les industriels, qui n'hésitent pas à stopper la production des médicaments insuffisamment rentables. Notre amendement en ce sens s'est heurté à l'article 40. Nous le financions par la suppression de l'abattement forfaitaire de 2,5 millions d'euros et de 3 % des dépenses des industriels, sachant que Sanofi, qui a perçu des millions d'euros, a supprimé plus de 4 500 emplois sur le territoire depuis 2008 et s'apprête à fermer un nouveau site de recherche à Vitry-Alfortville. Il est temps de mettre les industriels à contribution.

M. le président.  - Amendement n°574, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Supprimer cet article.

Mme Michelle Gréaume.  - Cet article semble être la compensation aux industriels du médicament des 920 millions d'euros de baisse de prix. Au prétexte que le chiffre d'affaires de la filière aurait diminué en 2018, vous relevez le taux de déclenchement de la contribution due par les entreprises - oubliant que les chiffres de 2017 étaient exceptionnels, et que l'année 2018 n'est qu'un retour à la normale. Ce cadeau est injustifié, à l'heure où Sanofi prévoit un plan social de 300 personnes, malgré un bénéfice net de 6 milliards en 2018 et après avoir touché 300 millions d'euros de crédits d'impôts.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Avec cet outil, le législateur a un moyen transparent pour redéfinir l'assiette de l'impôt au regard de la capacité contributive. Vu les circonstances, il est opportun de relever le seuil. Avis défavorable.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Avis défavorable. Les causes de pénurie de médicaments sont très diverses. Un pôle public pourrait répondre au désinvestissement de certains industriels sur des médicaments rares ou peu rentables, mais pas aux pénuries dues au manque de matières premières comme ce fut le cas pour les corticoïdes. Ce n'est pas une réponse miracle aux pénuries !

Mme Laurence Cohen.  - C'est une des réponses.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Nous relevons le seuil de déclenchement de la clause de sauvegarde pour compenser la baisse du chiffre d'affaires des industriels en 2018. Des médicaments innovants arrivent sur le marché. Vu les baisses de prix très importantes sur les médicaments anciens, la hausse du chiffre d'affaires global est en réalité très modérée. Avis défavorable.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Cette réponse n'est pas satisfaisante. Il n'y a pas une seule solution à la pénurie de médicaments : il faut une politique coordonnée. Les mesures prises ne sont pas à la hauteur. Rien n'est fait pour maintenir l'emploi et la production en France. Le CICE peut être intéressant, quand la concurrence internationale est forte, mais encore faut-il s'assurer des contreparties ! Nous tirons la sonnette d'alarme. Alors que l'industrie pharmaceutique était l'un de nos fleurons, l'autonomie, l'indépendance et la qualité ne sont plus assurées.

L'amendement n°574 n'est pas adopté.

L'article 4 est adopté.

ARTICLE 5

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - En 2019, 16 milliards d'euros sont allés au remboursement de la dette plutôt qu'aux prestations, notamment celles des hôpitaux publics, pour le remboursement à marche forcée de la Cades. Or ils proviennent du transfert des bons du Trésor, les créanciers réclamant des rendements plus élevés.

Nous contestons cet objectif, alors que l'Acoss bénéficie de taux d'intérêt moins élevés, et que le Gouvernement envisage de reprendre la dette des hôpitaux. Qu'en est-il des différences de taux selon les banques ?

Il faut un audit citoyen de la dette sociale qui détermine la part illégitime devant être annulée.

L'article 5 est adopté.

ARTICLE 6

Mme Laurence Cohen .  - Le personnel des hôpitaux a consenti des sacrifices énormes. Nous sommes proches du point de rupture, le personnel voit sa charge augmenter et ses métiers dévalorisés. L'activité hospitalière a augmenté de 15 %.

Même la meilleure organisation des services ne peut fonctionner faute de moyens. L'Ondam hospitalière à 2,1 % n'est pas tenable. Il faut le revaloriser : or nous venons d'apprendre que, contrairement à ce que prétend la presse, il n'en est pas question.

Nous demandons 10 milliards d'euros en 2020, correspondant à l'évolution naturelle des dépenses en hausse de 4,5 %. Les hôpitaux ont besoin de 100 000 emplois maintenant, les Ehpad de 300 000 emplois en trois ans. Écoutez ce cri d'alarme, madame la ministre, qui s'exprimera sous nos fenêtres dans quelques jours.

M. le président.  - Amendement n°529 rectifié, présenté par MM. Antiste, Todeschini et Lalande, Mme G. Jourda, M. Duran, Mmes Taillé-Polian, Monier et Artigalas et M. Temal.

Supprimer cet article.

Mme Gisèle Jourda.  - L'année 2019 a été marquée par un mouvement social sans précédent dans la santé, qui dénonce l'austérité dans laquelle les médecins, les infirmiers, les aides-soignants sont contraints de travailler.

Cela touche toutes les branches : les soins de ville, notamment dans les zones sous-denses, sont en tension. Les patients, faute de pouvoir se soigner chez leur médecin, se rendent alors à l'hôpital. Les urgences doivent faire face à un afflux de patients inouï.

Cette situation de tension, qu'on retrouve aussi dans les Ehpad, dans les services pour personnes en situation de handicap, est le fruit d'une politique austéritaire, ainsi que d'une pression sur les finances de la sécurité sociale.

Or les propositions faites dans le présent PLFSS ne sont pas à la mesure des enjeux. Le Gouvernement promettait lors de l'examen du plan Santé 2022 de renforcer les hôpitaux de proximité. Un tel taux d'Ondam rend impossible de telles promesses puisque les moyens alloués sont complètement sous-évalués.

Supprimons cet article 6.

M. le président.  - Amendement identique n°575, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Aujourd'hui, 90 % des Français sont solidaires des mouvements sociaux dans les hôpitaux car notre hôpital est en train de mourir de cette rigueur budgétaire aveugle. Jusqu'à des chefs de service peu habitués aux manifestations se mobilisent. Ayons un plan de rattrapage ! Aucune mesure du Gouvernement n'est adaptée à la mesure de la crise.

On nous annonçait une remontée de l'Ondam, mais les besoins sont énormes et on a ponctionné 800 millions d'euros sur les hôpitaux publics.

La question des urgences est vitale, avec un besoin d'argent pour investir, recruter et revaloriser le salaire des professionnels.

La situation est inédite. On ferme l'hôpital public, faute de dotations suffisantes et on le met aux enchères pour une reprise par le privé. C'est le cas près d'Angers, où, pour la première fois dans notre histoire, on offre un hôpital public au privé. S'il est utile et équilibrable, il doit rester public. Une offre a été faite par l'ARS et le CHU d'Angers, une autre par « le Noble Âge » - belle formule ! -, groupe privé spécialiste du handicap.

M. le président.  - Veuillez conclure.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Nous ne pouvons cautionner cette stratégie, qui conjugue austérité budgétaire et abandon de l'hôpital public.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - La commission des affaires sociales cautionne les inquiétudes sur l'hôpital. Catherine Deroche propose de supprimer l'article 59 fixant l'Ondam pour 2020.

L'article 6 vise l'exécution de l'Ondam 2019, dont la mise en oeuvre est quasi terminée. Il serait donc quasi inopérant de le supprimer.

Avis défavorable aux amendements nos529 rectifié et 575.

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - J'ai annoncé la semaine dernière que je m'opposais à la vente au secteur privé de l'hôpital de Longué. L'affaire est donc réglée. (M. Stéphane Piednoir s'exclame.) Il est hors de question de vendre des hôpitaux publics au privé, je préfère le redire devant vous.

Vos amendements ne rajouteraient aucun financement à l'Ondam. Si nous acceptions votre amendement, il rendrait insincère le budget de la sécurité sociale pour 2019. C'est pourquoi mon avis est défavorable. Nous ne pouvons pas revenir en arrière sur 2019 et nous prenons acte, évidemment, des dépenses de l'Ondam de ville.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Merci de votre réponse sur Longué. Mais les déstabilisations d'hôpitaux se multiplient et il faut attendre une crise pour que le Gouvernement finisse par agir. Mais les solutions ne sont pas à la hauteur.

Mme Catherine Deroche.  - Il y avait un choix à faire en Maine-et-Loire. Mais la décision a été rendue publique avant que le président du département en ait été avisé...

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Pour combien de temps encore y aura-t-il un hôpital public, compte tenu des fermetures de lits, de services et des baisses de moyens ?

Vous nous dites que cet amendement rendrait le budget insincère ? Mais il l'est déjà, puisque vous annoncerez vers le 20 novembre une série de mesures qui le rendront tel !

Les amendements identiques nos529 rectifié et 575 ne sont pas adoptés.

L'article 6 est adopté.

La deuxième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale, modifiée, est adoptée.

Discussion des articles de la troisième partie

ARTICLE 7

Mme Michelle Gréaume .  - L'article 7 est le reflet de la politique du Gouvernement en faveur du seul patronat. Avec la reconduction de la prime exceptionnelle, le Gouvernement veut éviter, au profit des seuls intérêts capitalistes, toute amplification du conflit social porté par les gilets jaunes il y a un an, et tout gonflement de la revendication pour une augmentation générale des salaires et pensions. Le patronat des grandes entreprises préfère verser quelques miettes plutôt que de subir un mouvement social d'une ampleur inédite susceptible de remettre en cause leurs intérêts financiers.

Et le Gouvernement en rajoute une couche avec des exonérations de cotisations sociales - preuve de l'organisation du déficit de la sécurité sociale par le Gouvernement !

M. le président.  - Amendement n°275 rectifié bis, présenté par Mme N. Delattre, MM. Arnell, Artano, A. Bertrand, Castelli, Collin, Corbisez, Dantec et Gold, Mme Guillotin, M. Jeansannetas, Mme Jouve et MM. Labbé, Léonhardt, Requier et Cabanel.

I.  -  Alinéa 1

Après le mot :

employeurs

supprimer la fin de cet alinéa.

II.  -  Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

III.  -  Alinéa 4, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

IV.  -  Alinéa 5

Après les mots :

à l'article L. 344-2 du même code

supprimer la fin de cet alinéa.

V.  -  Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

....  -  La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

.... - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Nathalie Delattre.  - En décembre 2018, le Gouvernement incitait les entreprises à instaurer une prime exceptionnelle, qui a connu un franc succès : ainsi, cinq millions de salariés auraient gagné 400 millions d'euros en moyenne.

Cette prime est logiquement reconduite, mais sous réserve d'un accord d'intéressement, ce qui exclut de fait de nombreuses entreprises. De nombreux salariés pourraient se voir donc exclus de cette prime.

Cet amendement supprime la condition d'accord d'intéressement.

M. le président.  - Amendement n°281 rectifié, présenté par MM. Rapin, Retailleau et Paccaud, Mmes Gruny, Di Folco, Lavarde, Estrosi Sassone et L. Darcos, MM. D. Laurent et Pellevat, Mme Eustache-Brinio, MM. de Nicolaÿ, Magras, Grosperrin, Bazin et Vaspart, Mme Ramond, M. Cambon, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Gilles, Savin, Charon, Piednoir et Bascher, Mme Duranton, MM. Panunzi, Brisson, Lefèvre et de Legge, Mmes Dumas et Imbert, MM. Gremillet, Le Gleut, Cuypers, Danesi et Mandelli, Mmes Deromedi et Raimond-Pavero, MM. Saury, Kennel et Babary, Mme Berthet, M. Genest, Mme Lamure et MM. Perrin, Raison, Duplomb et J.M. Boyer.

I.  -  Alinéa 1

Après le mot :

employeurs

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

soumis à l'obligation prévue à l'article L. 5422-13 du code du travail ou relevant des 3° à 6° de l'article L. 5424-1 du même code.

II.  -  Alinéas 2 et 6

Supprimer ces alinéas.

III.  -  Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

.... -  La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

.... -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Jean-François Rapin.  - Je connais bien cette prime puisque avec Olivier Paccaud et d'autres collègues des groupes Les Républicains et UC j'avais présenté une proposition de loi intégralement reprise par le président de la République.

Nous avons prévu une mesure pérenne. L'avis de Mme Gréaume, dont je comprends les raisons politiques, me semble dur, en effet, comme l'a dit Mme Delattre.

Cette prime a été une réussite, puisque cinq millions de salariés en ont bénéficié. Mais l'adosser à un accord d'intéressement est un retour en arrière, qui exclura de nombreuses entreprises et donc de salariés au regard de la complexité administrative.

M. le président.  - Amendement n°423 rectifié bis, présenté par MM. Henno, Kern, Janssens et Moga, Mme Joissains et MM. Delahaye, Delcros, Prince, Cazabonne et Capo-Canellas.

I.  -  Alinéa 1

1° Après le mot :

employeurs

insérer les mots :

dans les entreprises de onze salariés et plus

2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Pour les entreprises de moins de onze salariés, l'employeur est autorisé à attribuer une fois par an, à l'ensemble des salariés qu'il emploie, la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, dans les conditions prévues au même V.

II.  -  Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

...  -  La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

...  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Olivier Henno.  - S'agit-il d'une prime exceptionnelle ou pérenne, et quels seront les impacts des accords d'intéressement ? Ils sont souvent complexes pour les PME. N'obligeons pas les entreprises de moins de 11 salariés à un tel accord. !

M. le président.  - Amendement n°55 rectifié bis, présenté par MM. Morisset et Bonne, Mme Bruguière, MM. Daubresse et de Legge, Mmes Deseyne, Delmont-Koropoulis, Deromedi, Duranton et Imbert, MM. D. Laurent, Meurant, Mouiller, Pellevat, Pierre et Poniatowski, Mme Puissat, MM. Saury, B. Fournier, Bizet et Bonhomme, Mmes Garriaud-Maylam et Morhet-Richaud et MM. Raison, Husson et Mandelli.

I.  -  Alinéa 1

1° Après le mot :

employeurs

insérer les mots :

dans les entreprises de onze salariés et plus

2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Pour les entreprises de moins de onze salariés, l'employeur est autorisé à attribuer, entre le 1er janvier et le 31 décembre 2020, à l'ensemble des salariés qu'il emploie, la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, conformément au 4° du II et au V du présent article.

II.  -  Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

...  -  La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

...  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Jean-Marie Morisset.  - Cet amendement de repli exonère d'accord les entreprises de moins de 11 salariés.

M. le président.  - Amendement identique n°449 rectifié bis, présenté par MM. Chasseing, Guerriau, Decool, Menonville et Fouché, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Laufoaulu, Capus, Wattebled et A. Marc, Mme Goy-Chavent et MM. Laménie et Mayet.

M. Franck Menonville.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement identique n°928 rectifié bis, présenté par M. Forissier, Mme C. Fournier, MM. Brisson, Panunzi, Piednoir, Savin, Chaize, Cambon, Sol et de Nicolaÿ, Mmes Eustache-Brinio et Dumas, M. Savary, Mmes Berthet, Lassarade, Bories et Lamure, MM. Bazin, Gremillet et Longuet, Mmes de la Provôté, Guidez, Vermeillet et Vullien, MM. Bonnecarrère, Cadic, Delahaye, Kern, Louault, Longeot, Mizzon et Prince, Mme Billon, M. P. Martin et Mme Létard.

Mme Catherine Fournier.  - Les entreprises n'ont pas forcément les directions des ressources humaines nécessaires. Mais leurs salariés ne sont pas pour autant de « petits » salariés.

Cet amendement est en cohérence avec le seuil de la loi Pacte de 11 salariés.

M. le président.  - Amendement n°448 rectifié, présenté par MM. Chasseing, Guerriau, Decool, Menonville et Fouché, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Laufoaulu, Capus, Wattebled, A. Marc et Pellevat, Mme Goy-Chavent et MM. Saury, Laménie et Mayet.

I.  -  Alinéa 1

1° Après le mot :

employeurs

insérer les mots :

dans les entreprises de cinquante salariés et plus

2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Pour les entreprises de moins de cinquante salariés, l'employeur est autorisé à attribuer une fois par an, à l'ensemble des salariés qu'il emploie, la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, dans les conditions prévues au V du présent article.

II.  -  Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

...  -  La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

...  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Franck Menonville.  - C'est un amendement de repli sur un seuil de 50 salariés.

M. le président.  - Amendement identique n°829 rectifié, présenté par Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain.

Mme Marie-Pierre Monier.   - La prime exceptionnelle a été un vrai succès. La subordonner à un accord d'intéressement pénaliserait PME et TPE, dont seulement 25 % sont couvertes par un tel accord, sans compter la complexité et le risque d'erreurs pouvant déboucher sur des redressements Urssaf.

M. le président.  - Amendement n°530 rectifié, présenté par MM. Antiste, Todeschini et Lalande, Mme G. Jourda, M. Duran, Mmes Taillé-Polian, Monier et Artigalas et M. Temal.

I.  -  Alinéa 1

1° Après le mot :

employeurs

insérer les mots :

dans les entreprises de deux-cent cinquante salariés et plus

2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Pour les entreprises de moins de deux-cent cinquante salariés, l'employeur est autorisé à attribuer une fois par an, à l'ensemble des salariés qu'il emploie, la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, dans les conditions prévues au V du présent article.

II.  -  Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

...  -  La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

...  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Viviane Artigalas.  - C'est un amendement de repli.

M. le président.  - Amendement n°576, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 1

Après le mot :

employeurs

insérer les mots :

occupant moins de deux-cent cinquante salariés

Mme Laurence Cohen.  - La prime exceptionnelle constitue en soi un outil de contournement du salaire socialisé, ce qui peut réduire chaque année la masse salariale et donc les rentrées de cotisations sociales pour la sécurité sociale.

Accorder cette prime aux grandes entreprises est injuste car elles ont la capacité d'augmenter les salaires sans passer par des dispositifs dérogatoires exonérés de cotisations sociales. En outre, elles sont les principales utilisatrices des dispositifs d'intéressement qui permettent de verser des primes à leurs salariés sans régler les cotisations sociales obligatoires. Ainsi, l'intéressement bénéficie à 75 % des salariés des entreprises de plus de 1 000 salariés.

À l'inverse, la prime peut se justifier pour les plus petites entreprises qui utilisent encore peu l'intéressement.

Cet amendement de repli limite le champ d'application de la prime exceptionnelle aux entreprises de moins de 250 salariés.

Le véritable problème, ce sont les bas salaires et le refus d'augmenter le Smic.

M. le président.  - Amendement n°727 rectifié bis, présenté par Mme Guillotin, MM. Arnell, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gold, Guérini et Jeansannetas, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Requier, Roux, Vall et Cabanel.

I.  -  Alinéa 5

Supprimer les mots :

lorsque ces établissements et services ont versé, au cours des douze mois précédents, une prime d'intéressement en application des dispositions du code de l'action sociale et des familles

II.  -  Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

....  -  La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

...  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Véronique Guillotin.  - Le code de l'action sociale et des familles permet en théorie des accords d'intéressement dans les établissements et services d'aide par le travail (ESAT).

Dans les faits, une très faible proportion des ESAT est en mesure de mettre en place un tel intéressement pour les travailleurs handicapés.

Cet amendement permet au plus grand nombre de travailleurs handicapés de bénéficier de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, afin de compléter des revenus généralement très faibles.

M. le président.  - Amendement n°424 rectifié bis, présenté par MM. Henno, Janssens, Kern et Delahaye, Mmes Joissains, Billon et C. Fournier et MM. Moga, Capo-Canellas et Cazabonne.

I.  -  Après l'alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...  -  Pour les entreprises de moins de 250 salariés, l'employeur est autorisé à attribuer une fois par an, à l'ensemble des salariés qu'il emploie, la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, dans les conditions prévues au V. 

II.  -  Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

...  -  La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

...  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Olivier Henno.  - Cet amendement supprime le fait de conditionner le versement de la prime exceptionnelle à la mise en place d'accord d'intéressement au sein de l'entreprise, pour les entreprises de moins de 250 salariés. 

M. le président.  - Amendement n°169, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales.

Alinéa 6

Remplacer le mot :

Le

par les mots :

La condition relative à la mise en oeuvre d'un accord d'intéressement prévue au

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Cet amendement concernant les associations sans but lucratif et les fondations reconnues d'utilité publique tomberait en cas d'adoption des autres. Avis favorable à l'amendement n°281 rectifié. Par cohérence, avis défavorable aux amendements en discussion commune, incompatibles avec l'amendement n°281 rectifié : 275 rectifié bis, 423 rectifié bis, 55 rectifié bis, 449 rectifié bis, 928 rectifié bis, 448 rectifié, 829 rectifié, 530 rectifié et 576.

Mais plus la prime sera générale, plus grand serait le risque de la voir pérennisée, au détriment des finances de la sécurité sociale. L'intéressement est par ailleurs revendiqué par les gaullistes sociaux, comme vous, monsieur Rapin...

À partir du moment où l'on supprime les accords d'intéressement, il n'y a plus de problème pour les ESAT... Avis du Gouvernement pour l'amendement n°424 rectifié bis.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - La prime exceptionnelle a été un succès, avec cinq millions de bénéficiaires. Mais nous voulons que cette prime s'inscrive dans la durée.

Une minorité des salariés de TPE-PME - 15 %, soit 1,4 million de salariés - en bénéficie. C'est pourquoi nous voulons développer ces accords d'intéressement. Nous avons supprimé le forfait social en 2019, et la prime est défiscalisée. La prime peut être versée pour trois ans ou un an.

Enfin, l'accord permet de nous garantir contre les effets d'aubaine. Les accords d'intéressement ne sont plus susceptibles de recours après six mois.

Nous avons mis à disposition des PME des accords-types d'intéressement, les formules pouvant être très simples, un simple référent dans l'entreprise peut le mettre en place.

Avis défavorable dès lors à tous les amendements, sauf au nos169 et 727 rectifié bis, opportuns au regard des spécificités des associations d'utilité publique des ESAT.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Si l'amendement n°281 rectifié de M. Rapin était voté, cela ne toucherait pas l'amendement n°727 rectifié bis qui est un peu différent. Avis favorable à l'amendement n°727 rectifié bis donc.

Quant à l'amendement n°424 rectifié bis, retrait : il ne serait pas sain pour la sécurité sociale de pérenniser une telle prime.

M. Jean-François Rapin.  - Monsieur le ministre, peut-on parler d'effet d'aubaine, sachant que les problèmes de pouvoir d'achat ne sont pas réglés : même si la situation n'est pas aussi insurrectionnelle que l'an dernier, elle demeure compliquée.

M. le rapporteur général parle de gaullistes sociaux, et cette prime a été justement proposée par Xavier Bertrand, qui en est l'un des représentants actuels les plus éminents.

Mme Pascale Gruny.  - Je rejoins Jean-François Rapin. L'an dernier, la prime a été décidée pour améliorer le pouvoir d'achat - la situation est toujours difficile.

Un accord d'intéressement - j'en ai écrit de tout simples - peut devenir problématique pour l'entreprise, dans la mesure où le bénéfice, par exemple, peut servir à investir ou à rembourser des emprunts. De plus, l'intéressement est fiscalisé. Il y a donc bien une différence par rapport à l'an dernier.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Je ne considère que ces primes soient une réussite : c'est une perte de recettes pour la sécurité sociale, d'abord en raison de la non-compensation, et ensuite car pour la moitié d'entre elles, c'est une substitution à une hausse de salaire et donc un manque à gagner de cotisations sociales. Elles ont touché moins de 10 % des salariés du privé. Et les autres ? Ce n'est pas la valorisation du travail : certains en bénéficient et pas d'autres. Ce n'est pas une bonne mesure.

Mme Frédérique Puissat.  - Monsieur le ministre, vous soulignez que des kits ont été mis à disposition des entreprises de 2 à 11 salariés : ils sont complexes. La commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a validé le fait que la prime ne soit pas conditionnée par l'intéressement.

M. Olivier Paccaud.  - Le mieux est l'ennemi du bien, monsieur le ministre. Je me fais le porte-parole des petits patrons de l'artisanat. J'en ai rencontré beaucoup ces derniers jours. En voulant développer l'intéressement, vous allez punir des salariés et même des petits patrons, heureux de faire bénéficier leurs employés de cette prime, dite « Macron » - que l'on pourrait aussi bien appeler « prime Rapin ».

Bien sûr, madame Lienemann, des hausses de salaires seraient en théorie préférables, mais elles ne sont pas faciles à mettre en place.

Plutôt que d'entrer dans un dispositif un brin machiavélique, revenons-en simplement à l'origine de cette prime, à ce qui a été mis en place l'an dernier, qui répond à l'attente de nombreux chefs d'entreprises et de très nombreux salariés !

M. le président. - Je vous propose de poursuivre l'examen de ce texte jusqu'à minuit et demi. (Assentiment)

M. Philippe Mouiller.  - La notion de liberté d'entreprendre semble difficile à appréhender par le Gouvernement : vous transformez une prime libre par une incitation à avoir tel ou tel comportement. L'effet boule de neige que nous avons pu observer serait perdu. Les artisans auraient voulu verser une telle prime, et ils seraient bloqués cette année.

Mme Nathalie Delattre.  - Je rendrai identique mon amendement à celui de M. Rapin. Il faut laisser toute liberté aux chefs d'entreprise de verser ces primes.

M. le président.  - Il devient l'amendement n°275 rectifié ter.

Amendement n°275 rectifié ter, présenté par Mme N. Delattre, MM. Arnell, Artano, A. Bertrand, Castelli, Collin, Corbisez, Dantec et Gold, Mme Guillotin, M. Jeansannetas, Mme Jouve et MM. Labbé, Léonhardt, Requier et Cabanel.

I.  -  Alinéa 1

Après le mot :

employeurs

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

soumis à l'obligation prévue à l'article L. 5422-13 du code du travail ou relevant des 3° à 6° de l'article L. 5424-1 du même code.

II.  -  Alinéas 2 et 6

Supprimer ces alinéas.

III.  -  Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

.... -  La perte de recettes résultant pour l'État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

.... -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Martin Lévrier.  - La liberté d'entreprendre est sauve : les entreprises peuvent verser des primes socialisées. Or il y a surtout un déficit de dialogue social en France. (Protestations sur les bancs du groupe les Républicains, ainsi que sur quelques bancs du groupe SOCR)

Nous en avons financièrement besoin. Je ne suis pas à l'aise avec le fait d'en priver les petites entreprises. Mais pour en discuter, il faudrait ne pas voter les deux premiers amendements.

M. Yves Daudigny.  - La prime n'est pas du salaire plein et entier : elle n'augmente pas le droit à la retraite, par exemple.

Dans une note de mars 2019, l'Insee a noté un recul de 0,3 % de la masse salariale, alors que celle-ci avait augmenté à la fin de l'année précédente.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - La prime a été un succès. Nous avons diffusé des accords-types d'intéressement aussi pratiques que possible.

Le Gouvernement maintient donc un avis défavorable, à l'exception des amendements nos727 rectifié bis et 169. Je lève le gage pour ces amendements.

Madame Lienemann, nous n'avons pas cessé nos efforts pour le pouvoir d'achat : la prime d'activité se traduit par un effort considérable en loi de finances initiale et en loi de finances rectificative.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Ce n'est pas du salaire !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - L'Insee le dit, 2019 restera comme une année particulièrement fertile en hausse de pouvoir d'achat.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Moi aussi, je suis pour une augmentation des salaires, plutôt que pour une prime. Avec cette prime, vous avez divisé les salariés. Je pense aux agents publics, notamment ceux de la fonction publique territoriale, de catégorie C. On les a vus défiler pour protester contre cette différence.

Les amendements identiques nos275 rectifié ter et 281 rectifié sont adoptés.

L'amendement n°423 rectifié bis, les amendements identiques nos55 rectifié bis, 449 rectifié bis, 928 rectifié bis et les amendements identiques nos448 rectifié et 829 rectifié n'ont plus d'objet, non plus que les amendements nos530 rectifié et 576.

L'amendement n°727 rectifié ter est adopté.

L'amendement n°424 rectifié bis est retiré.

L'amendement n°169 n'a plus d'objet.

M. le président.  - Amendement n°726 rectifié bis, présenté par Mme Guillotin, MM. Arnell, Artano, A. Bertrand, Castelli, Collin, Corbisez et Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gold, Guérini et Jeansannetas, Mme Jouve et MM. Labbé, Léonhardt, Requier et Cabanel.

Après l'alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Le A du présent I n'est pas applicable aux établissements privés non lucratifs du champ sanitaire, social et médico-social

Mme Véronique Guillotin.  - Cet amendement ouvre aux salariés des établissements privés non lucratifs du champ sanitaire, social et médico-social la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat.

Leurs difficultés et les efforts qu'ils ont consentis ces dernières années le justifient amplement.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Cet amendement n'est pas rédigé conformément à son objet. Retrait ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Même avis pour les mêmes raisons. Les accords d'intéressement ne sont pas forcément en lien avec les performances économiques. Dans les établissements à but non lucratif, c'est l'objet social qui peut être pris en compte.

L'amendement n°726 rectifié bis est retiré.

L'amendement n°531 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°577, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 14

Supprimer les mots :

de toutes les cotisations et contributions sociales d'origine légale ou conventionnelle

Mme Laurence Cohen.  - C'est le fondement de notre système de protection sociale. La prime apporte un petit plus. Mais supprimer la partie socialisée du salaire, c'est supprimer les biens fournis par la sécurité sociale, mais c'est aussi durcir pour le salarié ses droits au chômage. C'est un miroir aux alouettes.

M. le président.  - Amendement identique n°809 rectifié, présenté par M. Daudigny et les membres du groupe socialiste et républicain.

M. Yves Daudigny.  - Cet amendement resocialise la prime exceptionnelle, nous l'avions voté l'année dernière.

Rétablissons les cotisations sociales, pour ne pas amputer les recettes de la sécurité sociale, et augmentons les droits des salariés !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Ces amendements soulignent qu'une pérennisation n'est pas supportable pour les finances publiques. Mais par cohérence, avec l'avis favorable de la commission à sa reconduction, je me vois contraint de donner un avis défavorable.

M. Yves Daudigny.  - C'est triste !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Même avis.

Les amendements identiques nos577 et 809 rectifié ne sont pas adoptés.

À la demande du groupe CRCE, l'article 7 est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°32 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 246
Pour l'adoption 230
Contre    16

Le Sénat a adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS

M. le président.  - Amendement n°578, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Après le 5° bis de l'article L. 213-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Le recouvrement de la contribution mentionnée à l'article L. 245-17 ; »

2° Le chapitre 5 du titre IV du livre II est complété par une section ... ainsi rédigée :

« Section ...

« Contribution des revenus financiers des sociétés financières et non financières

« Art. L. 245-17.  -  Les revenus financiers des prestataires de service mentionnés au livre V du code monétaire et financier entendus comme la somme des dividendes bruts et des intérêts nets reçus, sont assujettis à une contribution d'assurance vieillesse dont le taux est égal à la somme des taux de cotisation salariale et patronale d'assurance vieillesse assises sur les rémunérations ou gains perçus par les travailleurs salariés ou assimilés mentionnés à l'article L. 241-3 du présent code.

« Les revenus financiers des sociétés tenues à l'immatriculation au registre du commerce et des sociétés conformément à l'article L. 123-1 du code de commerce, à l'exclusion des prestataires mentionnés au premier alinéa du présent article, entendus comme la somme des dividendes bruts et assimilés et des intérêts bruts perçus, sont assujettis à une contribution d'assurance vieillesse dont le taux est égal à la somme des taux de cotisations salariale et patronale d'assurance vieillesse assises sur les rémunérations ou gains perçus par les travailleurs salariés ou assimilés mentionnés à l'article L. 241-3 du présent code.

« Les contributions prévues au présent article ne sont pas déductibles de l'assiette de l'impôt sur les sociétés.

« Un décret fixe les taux de répartition de ces ressources entre les différentes caisses d'assurance vieillesse. »

II.  -  Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Nous débattons toujours sur le déficit de la sécurité sociale, pour rogner sur les prestations, les retraites, le fonctionnement des services publics de santé... La vérité, c'est que nous ne donnons pas à la protection sociale des moyens à la hauteur des attentes de nos concitoyens.

Élargissons la base des cotisants. Nous proposons comme chaque année que les sociétés financières et cotées en bourse versent une cotisation comparable à la CSG, qui serait bien plus juste que la CSG qui pèse sur les retraités les plus modestes.

Nous sommes les recordmen européens du versement des dividendes, avec encore 3,1 % d'augmentation au deuxième trimestre 2019, et cette situation est chronique. Seuls 5,3 % du produit des bénéfices vont aux salariés et 27,3 % aux investissements, en dépit de la nécessité de moderniser l'outil productif. Tout le reste va aux actionnaires !

Nous proposons donc d'abonder notre protection sociale, en affectant ces moyens supplémentaires à l'assurance vieillesse, montrant par là qu'il n'est pas obligatoire de diminuer massivement les retraites comme vous en avez l'intention.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Cet amendement alourdirait les prélèvements obligatoires. Je rappelle que les dividendes sont assujettis à la CSG.

Vous voulez créer une nouvelle contribution qui nuirait à la compétitivité de la France. Avis défavorable. (Mme Marie-Noëlle Lienemann proteste.)

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Même avis.

Mme Catherine Fournier.  - On parle de 5 % bénéficiant aux salariés mais on oublie la masse salariale versée aux employés.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Si les dividendes avaient un effet sur la compétitivité, nous serions les recordmen dans ce domaine également ! Mais ce n'est pas le cas, et le versement des dividendes spolie les investissements. En Allemagne, que vous citez toujours en exemple, on en verse moins, parce qu'on investit plus.

Notre système est une perversion économique, illégitime, qui en outre persiste aux dépens des PME, sous-traitantes de grandes entreprises qui leur serrent la vis. Au moins, que celles-ci cotisent à la protection sociale.

L'amendement n°578 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°327 rectifié quater, présenté par Mme Imbert, M. Pellevat, Mmes Morhet-Richaud, Micouleau, Puissat et Ramond, M. Vaspart, Mmes Bonfanti-Dossat et M. Mercier, M. Savary, Mme Bruguière, MM. D. Laurent et Morisset, Mmes L. Darcos et Gruny, MM. Brisson, de Nicolaÿ, Sol et Lefèvre, Mme Noël, MM. Rapin et Mandelli, Mme Deromedi, MM. Karoutchi, Saury et Genest, Mme Lamure, MM. Bonne et Pointereau, Mme Deseyne, MM. Grosperrin, B. Fournier et Gilles, Mmes Berthet, Troendlé et F. Gerbaud et M. Husson.

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le chapitre Ier du titre V du livre III du code de la sécurité sociale est complété par une section ... ainsi rédigée :

« Section ...

« Stages des étudiants en médecine réalisés dans des zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l'accès aux soins

« Art. L. 351-....  -  N'est pas considérée comme une rémunération au sens de l'article L. 242-1, la gratification, en espèces ou en nature, versée aux étudiants en médecine lors des périodes de stages prévus au II de l'article L. 632-2 du code de l'éducation, sous réserve qu'ils aient été accomplis dans une zone mentionnée au 1° de l'article L. 1434-4 du code de la santé publique, pendant une durée d'un an et dans le même lieu de stage.

« Un décret précise les modalités et conditions d'application du présent article, notamment le délai de présentation de la demande, qui ne peut être supérieur à deux ans.

« Le nombre de trimestres ayant fait l'objet d'une exonération de cotisations sociales en application du présent article est déduit du nombre de trimestres éligibles au rachat prévu au II de l'article L. 351-14-1 du présent code. »

II.  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I du présent article est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Corinne Imbert.  - Dans le cadre du projet de loi Ma Santé 2022, le Sénat avait obtenu, en commission mixte paritaire, la mise en place d'un stage obligatoire en autonomie d'au moins six mois pour les étudiants en médecine de troisième année de troisième cycle. Afin d'encourager ces étudiants à prolonger leur stage pour six mois supplémentaires sur le même lieu, cet amendement prévoit une exonération de cotisations sociales pour ceux qui effectuent un stage d'un an dans une zone sous-dotée. Ainsi, la mesure assurerait un renfort auprès des médecins installés et ancrerait davantage les futurs médecins dans ces territoires en proie à la désertification médicale.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Ce dispositif supplémentaire est cohérent par rapport à notre souhait que ces futurs médecins contribuent à réduire les déserts médicaux. Avis favorable.

M. Philippe Mouiller.  - Bravo !

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Défavorable. En réalité, ces étudiants de troisième cycle reçoivent un revenu et cotisent déjà à l'assurance vieillesse, quel que soit leur lieu de stage.

Lors de la loi Santé de juillet, nous avons adopté des mesures spécifiques concernant les zones sous-denses. En conséquence de quoi l'article 36 du PLFSS simplifie les incitations à l'installation en zone sous-dense. Je vous propose de renvoyer ce débat à l'article 36.

Mme Corinne Imbert.  - Je maintiens l'amendement, réponse à un rendez-vous manqué lors de l'examen du projet de loi en juillet.

M. René-Paul Savary, rapporteur.  - J'ai cosigné cet amendement qui est parfaitement logique, car les étudiants qui exerceraient auraient un revenu supplémentaire par rapport à leur revenu d'interne. Nous avions évoqué le problème des cotisations et le risque d'une perte de droits à la retraite. C'est la même logique ici.

Les décrets sont-ils prêts pour appliquer vos mesures au plus tôt, madame la ministre ?

Mme Agnès Buzyn, ministre.  - Les décrets sont pris très rapidement ; nous rendons compte dans les six mois. Je vous ferai parvenir des éléments précis à ce sujet.

L'article 36 regroupe l'ensemble des aides à l'installation. Nous avons pris des engagements à l'occasion de la loi Santé, sur les stages. Les étudiants en médecine cotisent déjà pour leur retraite : votre amendement n'aboutit donc pas au résultat recherché.

M. Yves Daudigny.  - Le groupe socialiste n'est pas favorable aux exonérations sociales, mais cet amendement m'apparaît complémentaire par rapport à la mesure que nous avons fait adopter et qui prévoit pour tous les étudiants de troisième cycle, en dernière année, un stage en ambulatoire sur six mois - notre souhait était initialement qu'il soit d'un an. Nous voterons donc l'amendement.

Mme Corinne Imbert.  - Madame la ministre, certes, ces étudiants sont des agents publics. Précisément, leurs cotisations sociales sont prises en compte : l'amendement tend à une exonération en échange de la prolongation du stage de six mois.

L'amendement n°327 rectifié quater est adopté et devient un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°580, présenté par Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 7

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  À titre expérimental et jusqu'au 31 décembre 2020, un dispositif d'exonération de cotisations, nommé « Objectif 32 heures », est institué. Il est mis en oeuvre au bénéfice des entreprises situées sur le territoire national qui embauchent, en contrat à durée déterminée, un salarié pour une durée de trente-deux heures, payée trente-cinq heures, dans des territoires dont la liste est fixée par arrêté conjoint des ministres chargés de l'emploi, de santé et du budget.

Les conditions de mise en oeuvre de ce dispositif sont définies par décret.

Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2020.

Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d'évaluation de l'expérimentation au plus tard le 15 septembre 2021.

II.  -  La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Cet amendement instaure une expérimentation intitulée « Objectif 32 heures ». Il s'agit d'inciter les employeurs à réduire le temps de travail de leurs salariés, avec un objectif de 32 heures payées 35. Cela sera utile pour la collectivité. Les salariés travaillent mieux et en meilleure santé lorsqu'ils travaillent moins.

Cette mesure résorberait rapidement le chômage. Les patrons seraient en contrepartie exonérés de cotisations sociales. Il est temps de subordonner les exonérations à des comportements vertueux.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général.  - Avis défavorable à cet amendement qui réduirait les recettes de la sécurité sociale et n'améliorerait pas la compétitivité de la France.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État.  - Même avis.

L'amendement n°580 n'est pas adopté.

M. le président.  - Nous avons examiné 35 amendements, il en reste 541.

Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 13 novembre 2019, à 15 heures.

La séance est levée à minuit trente-cinq.

Pour la Directrice des Comptes rendus du Sénat,

Jean-Luc Blouet

Chef de publication

Annexes

Ordre du jour du mercredi 13 novembre 2019

Séance publique

À 15 heures

Présidence : M. Gérard Larcher, président

Secrétaires : M. Guy-Dominique Kennel - Mme Patricia Schillinger

1. Questions d'actualité au Gouvernement

À 16 h 30 et le soir

Présidence : M. Vincent Delahaye, vice-président Mme Valérie Létard, vice-présidente

2. Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2020 (n° 98, 2019-2020)

Analyse des scrutins publics

Scrutin n°29 sur la motion n°792, présentée par Mme Laurence Cohen et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020

Résultat du scrutin

Nombre de votants : 341

Suffrages exprimés : 340

Pour :   87

Contre : 253

Le Sénat n'a pas adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Contre : 142

Abstention : 1 - M. Marc Laménie

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, président du Sénat, qui présidait la séance

Groupe SOCR (71)

Pour : 71

Groupe UC (51)

Contre : 51

Groupe LaREM (24)

Contre : 24

Groupe du RDSE (23)

Contre : 23

Groupe CRCE (16)

Pour : 16

Groupe Les Indépendants (13)

Contre : 13

Sénateurs non inscrits (6)

N'ont pas pris part au vote : 6 - M. Philippe Adnot, Mmes Sylvie Goy-Chavent, Christine Herzog, Claudine Kauffmann, MM. Jean Louis Masson, Stéphane Ravier

Scrutin n°30 sur l'amendement n°573, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Gréaume et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste, à l'article 3 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2020

Résultat du scrutin

Nombre de votants : 328

Suffrages exprimés : 328

Pour :   87

Contre : 241

Le Sénat n'a pas adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Contre : 143

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, président du Sénat

Groupe SOCR (71)

Pour : 71

Groupe UC (51)

Contre : 51

Groupe LaREM (24)

Contre : 24

Groupe du RDSE (23)

Contre : 22

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Marc Gabouty, président de séance

Groupe CRCE (16)

Pour : 16

Groupe Les Indépendants (13)

N'ont pas pris part au vote : 13 - MM. Jérôme Bignon, Emmanuel Capus, Daniel Chasseing, Jean-Pierre Decool, Alain Fouché, Joël Guerriau, Jean-Louis Lagourgue, Robert Laufoaulu, Claude Malhuret, Alain Marc, Mme Colette Mélot, MM. Franck Menonville, Dany Wattebled

Sénateurs non inscrits (6)

Contre : 1

N'ont pas pris part au vote : 5 - Mmes Sylvie Goy-Chavent, Christine Herzog, Claudine Kauffmann, MM. Jean Louis Masson, Stéphane Ravier

Scrutin n°31 sur l'article 3 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2020

Résultat du scrutin

Nombre de votants : 341

Suffrages exprimés : 341

Pour : 301

Contre :   40

Le Sénat a adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Pour : 143

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, président du Sénat

Groupe SOCR (71)

Pour : 71

Groupe UC (51)

Pour : 51

Groupe LaREM (24)

Contre : 24

Groupe du RDSE (23)

Pour : 22

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Marc Gabouty, président de séance

Groupe CRCE (16)

Contre : 16

Groupe Les Indépendants (13)

Pour : 13

Sénateurs non inscrits (6)

Pour : 1

N'ont pas pris part au vote : 5 - Mmes Sylvie Goy-Chavent, Christine Herzog, Claudine Kauffmann, MM. Jean Louis Masson, Stéphane Ravier

Scrutin n°32 sur l'article 7 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2020

Résultat du scrutin

Nombre de votants : 341

Suffrages exprimés : 246

Pour : 230

Contre :   16

Le Sénat a adopté

Analyse par groupes politiques

Groupe Les Républicains (144)

Pour : 143

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Gérard Larcher, président du Sénat

Groupe SOCR (71)

Abstentions : 71

Groupe UC (51)

Pour : 51

Groupe LaREM (24)

Abstentions : 24

Groupe du RDSE (23)

Pour : 22

N'a pas pris part au vote : 1 - M. Jean-Marc Gabouty, président de séance

Groupe CRCE (16)

Contre : 16

Groupe Les Indépendants (13)

Pour : 13

Sénateurs non inscrits (6)

Pour : 1

N'ont pas pris part au vote : 5 - Mmes Sylvie Goy-Chavent, Christine Herzog, Claudine Kauffmann, MM. Jean Louis Masson, Stéphane Ravier