SÉANCE

du mercredi 27 mai 2020

85e séance de la session ordinaire 2019-2020

présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires : M. Yves Daudigny, Mme Patricia Schillinger.

La séance est ouverte à 15 heures.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions d'actualité

M. le président.  - L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement sous le format adapté, qui est destiné à évoluer à partir du 2 juin. Je renvoie aux présidents de groupe la tâche d'informer les membres de leur groupe.

Je salue ceux de nos collègues qui ont accepté de siéger depuis les tribunes, dont un président de groupe. (Sourires) Ils démontrent ainsi leur engagement et seront bien entendu comptabilisés parmi les présents.

Notre séance se déroule dans le respect des règles sanitaires en place depuis le mois de mars. J'invite chacun à respecter les distances de sécurité et les gestes barrières.

Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

Plan de relance franco-allemand pour l'Europe (I)

M. Richard Yung .  - (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM) Le plan de 500 milliards d'euros proposé la semaine dernière par Angela Merkel et Emmanuel Macron doit permettre aux pays de l'Union de relancer leur économie, gravement touchée par la pandémie. Cette initiative, exceptionnelle par son ampleur, traduit la solidarité entre les pays de l'Union européenne. Saluons l'engagement courageux de la chancelière.

Ursula von der Leyen devra trouver l'articulation entre ce plan et le cadre financier pluriannuel 2021-2027 : il ne saurait être un prétexte pour diminuer le budget européen et devra respecter les priorités de l'Europe verte et du numérique.

Certains pays, les « frugaux », ne veulent ni mutualisation ni solidarité, seulement des prêts remboursables - même si leurs économies, guère florissantes, dépendent largement des importations.

Les négociations vont être dures pour les convaincre. Il reste à trancher les clefs de répartition, les secteurs concernés, les modalités de remboursement, etc. Où en sont les discussions en cours ?

Les 750 milliards d'euros qui viennent d'être annoncés par la Commission sont-ils une bonne base pour bâtir un compromis ambitieux ? (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances .  - Avec cette proposition, la Commission européenne frappe fort et juste, à la hauteur de la responsabilité historique qui est la sienne : engager la relance de l'ensemble des pays européens confrontés à la pire crise de leur histoire, sur la base d'un plan de relance verte.

Ce plan reprend intégralement les propositions franco-allemandes. C'est un motif de fierté : 500 milliards d'euros sur la base d'une levée de dette commune - une première historique - qui nous garantit des taux d'intérêt des plus raisonnables, plus 250 milliards d'euros de prêts qui s'ajoutent aux 540 milliards d'euros décidés le 9 avril par les ministres de l'économie. Au total, 1 300 milliards d'euros pour l'ensemble des pays européens, qui montrent que l'Europe est au rendez-vous de l'histoire.

Sur les 500 milliards d'euros de dépenses budgétaires directes, la France en touchera 40 milliards, qui financeront les plans de relance sectoriels pour le tourisme, l'automobile, l'aéronautique, les dépenses de santé, la rénovation de l'hôpital.

Tous les États européens pourront financer leur relance, investir dans l'avenir. Je les appelle tous, y compris les « frugaux », à soutenir ce plan. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)

Plan de relance franco-allemand pour l'Europe (II)

M. Yvon Collin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE) La semaine dernière, la France et l'Allemagne ont proposé un plan de relance de 500 milliards d'euros, sur la base d'un emprunt communautaire.

Cette initiative est nécessaire ; tout doit être fait pour qu'elle aboutisse car le plan de relance de la Commission européenne, en partie fondé sur des prêts, ne suffira pas à amortir la récession dramatique qui guette.

C'est aussi une nécessité pour l'Allemagne qui tire sa croissance de ses exportations, notamment vers l'Union européenne. Les Allemands ne scieront pas la branche sur laquelle ils sont assis !

La décision de la Cour constitutionnelle allemande sur la légalité de la politique monétaire de la Banque centrale européenne avait jeté un grand froid. Le choix franco-allemand d'une approche budgétaire pour soutenir les pays endettés pourrait marquer un tournant.

Ce plan incarne-t-il la solidarité tant attendue par les États membres les plus touchés par la crise ? Ouvre-t-il la voie à la mutualisation des dettes que Berlin avait toujours refusée jusque-là ? Est-il une réponse à la décision de la Cour de Karlsruhe qui aurait pu affaiblir la politique économique européenne et la zone euro ?

M. Jean-Claude Requier.  - Très bien.

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances .  - La proposition de la Commission européenne est historique, et marque une avancée majeure dans l'affirmation de l'Union européenne sur la scène internationale. Historique par son ampleur : 1 300 milliards d'euros au total pour la relance. L'Union européenne nous permet de nous sauver d'une crise économique sans précédent.

Historique aussi car à l'origine de cette proposition, il y a le couple franco-allemand, moteur de l'Union européenne, qui permet de casser le plafond de verre.

Historique enfin car, pour la première fois, nous acceptons la mutualisation des dettes sur un projet de financement de dépenses budgétaires : cela permet d'avoir un taux d'intérêt le plus faible possible, un remboursement étalé sur trente ans ; c'est un geste politique majeur de solidarité envers les États qui ont été les plus touchés, à commencer par l'Espagne et l'Italie. Ce devrait être un motif de fierté. Les États remboursent en fonction de leurs capacités économiques. Oui, il y aura un transfert budgétaire. Au lieu de pousser des hauts cris, on devrait dire : chapeau bas ! La solidarité en Europe ne sera pas qu'un mot ; elle est désormais un principe et un acte. (Applaudissements sur les travées des groupes LaREM et RDSE)

Soutien au secteur culturel

M. Pierre Ouzoulias .  - La décision d'autoriser la réouverture du Puy du Fou, le 2 juin, aurait été prise lors d'un conseil de défense et de sécurité nationale - sans doute du fait de la nature des manifestations qu'accueille ce parc, comme les combats de gladiateurs ! (Rires)

Nous sommes heureux pour les nombreux professionnels de la culture du Puy du Fou. Notre peine est, en revanche, immense pour les artistes, les intermittents du spectacle, les auteurs, les compositeurs, ces professionnels sur lesquels repose le rayonnement culturel de notre pays, plongés dans l'angoisse, qui attendent de votre Gouvernement une aide vigoureuse pour résister à la crise qui risque de les emporter.

Avec eux, ce sont des milliers de structures culturelles qui risquent de disparaître. Ce réseau a fait de notre pays la première destination touristique. Il mobilise 2,4 % de la population active et 50 milliards d'euros. Il a fait de la culture un service public, permis l'élévation artistique et l'émancipation intellectuelle. Or il risque d'être emporté par la crise alors que nous avons tant besoin de culture pour la surmonter.

Pas une semaine sans que votre Gouvernement n'annonce des plans de sauvetage de plusieurs milliards d'euros. La culture doit, elle, se contenter de proclamations lyriques et de vaines promesses. Monsieur le ministre, à quand un grand plan de sauvetage de la culture ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur plusieurs travées du groupe SOCR ; M. Gérard Longuet et Mme Catherine Troendlé applaudissent également.)

M. Franck Riester, ministre de la culture .  - Je ne puis vous laisser dire cela. Dès le début de la crise, le Gouvernement a été au rendez-vous pour que les mesures transversales soient accessibles au secteur de la culture : fonds de solidarité, PGE, exonérations et reports de charges, chômage partiel...

Le Président de la République a rappelé que les arts et la culture sont une priorité et annoncé la prolongation des droits des artistes et techniciens, qui sont le ciment de la vie culturelle dans les territoires, jusqu'à fin août 2021. Nous avons réarmé le Centre national de la musique, créé grâce au vote du Sénat, doté l'Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles de 105 millions d'euros. Accompagner la reprise du secteur passe par des aides financières mais avant tout par la possibilité pour les artistes de retrouver leur public. Nous travaillons à poursuivre le déconfinement pour le spectacle vivant, les cinémas, les grands musées et monuments historiques. Le Gouvernement est pleinement mobilisé. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)

Réforme de l'assurance chômage

Mme Claudine Lepage .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR) La crise sanitaire entraîne dans son sillage une crise sociale et économique sans précédent. Si le chômage partiel a servi de filet social, votre volonté de le réduire et le durcissement de l'accès à l'indemnisation avec l'entrée en vigueur de la réforme de l'assurance chômage vont accroitre la précarisation.

Les travailleurs les plus fragiles sont les plus impactés par la crise, et le seront encore plus par cette réforme. Je pense aux extras dans la restauration ou l'évènementiel, aux auxiliaires de vie et aides-soignants...

Le report à septembre du second volet de la réforme de l'assurance chômage ne suffit pas : il faut abroger l'ensemble. Son objectif est purement comptable : faire des économies budgétaires au détriment des chômeurs et masquer artificiellement les statistiques. C'est cette même logique qui a dégradé l'hôpital public. Quand abrogerez-vous cette réforme ? (Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE)

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail .  - L'activité partielle a permis de protéger 12 millions de salariés, 1 million d'entreprises et de sauvegarder les compétences.

La crise sanitaire se prolonge d'une crise économique et sociale imprévisible : il y a trois mois, nous nous réjouissions de la baisse du chômage à 8,1 %, de la hausse de 16 % de l'apprentissage. Ce temps semble loin...

Nous avons pris des mesures d'urgence immédiates pour protéger les plus vulnérables. Le décret du 14 avril a prolongé les droits de ceux qui arrivaient en fin de droits. Demain, vous voterez, je l'espère, la prolongation des droits des intermittents jusqu'au 31 août 2021. La période d'affiliation pour calculer les droits passe de 24 à 27 mois. Nous avons traité le cas de ceux qui venaient de démissionner, suspendu la dégressivité, modifié le calcul du salaire journalier de référence.

Pragmatisme, efficacité économique, justice sociale, voilà notre boussole. La suite de la réforme sera décidée après discussion avec les partenaires sociaux.

Fonds de compensation de la TVA

M. Alain Marc .  - Vous savez l'importance de l'investissement des communes, monsieur Darmanin, vous qui êtes maire. (On s'amuse à droite.)

Actuellement, le Fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) est versé deux ans après la réalisation de la dépense aux collectivités n'ayant pas conventionné avec l'État au titre du plan de relance, un an après pour les autres ; pour les EPCI à fiscalité propre et les communes nouvelles, le remboursement intervient dans l'année.

Or nombre de communes, faute de trésorerie suffisante, doivent contracter des prêts relais pour financer leurs investissements - et notamment les dépenses de TVA. C'est un frein à l'initiative locale.

Il est indispensable de préserver la capacité financière de nos communes afin qu'elles continuent d'assurer les services essentiels à la population, mais aussi de relancer les investissements indispensables au soutien du tissu économique local.

Afin d'atténuer le choc financier, ne pourrait-on prévoir une récupération de la TVA dès la première année, notamment pour les communes ayant effectué un investissement de plus de 100 000 euros. Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour répondre à la demande des élus ?

M. Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics .  - Vous avez raison, les collectivités territoriales sont celles qui investissent le plus et soutiennent l'économie sur l'ensemble du territoire. Malgré la crise, il ne faut pas reproduire les erreurs du passé en baissant les dotations. C'est pourquoi le Premier ministre discute avec les associations d'élus ; il réunira vendredi à Matignon les communes et intercommunalités, les départements et l'outre-mer.

Les collectivités territoriales ne sont pas logées à la même enseigne : seulement 30 % de leurs recettes sont sensibles à l'activité économique. Les communes touristiques ou celles qui perçoivent de l'octroi de mer sont plus touchées ; ce sera aussi le cas, demain, des départements.

Comme je m'y étais engagé, le PLFR 3 comprendra des dispositions relatives aux collectivités territoriales. Le Premier ministre rendra bientôt les derniers arbitrages, une fois reçues les conclusions de la mission de Jean-René Cazeneuve. Le FCTVA peut être une solution, mais c'est un one shot. Or la question de l'investissement se posera aussi pour 2021. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM)

Agriculture

M. François Bonhomme .  - Ces derniers mois, la crise sanitaire a révélé ses faiblesses : dépendance en matière de médicaments ou de matériel médical comme les masques. Plus jamais, ce ne sera comme avant, nous a-t-on dit.

Nos agriculteurs, bien que mal considérés, continuent d'assurer les ressources de notre alimentation. Mais la Commission européenne a décidé de baisser de 10 % la superficie des terres cultivées et de signer un accord de libre-échange avec le Mexique.

Tout cela est absurde. Est-ce ainsi que nous assurerons notre souveraineté alimentaire ? La France fera-t-elle jouer son droit de véto pour s'opposer à ces accords de libre-échange ?

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation .  - La signature par le commissaire européen Phil Hogan, d'un accord avec le Mexique, découle d'un choix qui remonte à loin. Il est certain que cela tombe au mauvais moment, en pleine crise Covid. Le Parlement devra le ratifier. La souveraineté alimentaire est indispensable et il faut relocaliser, dans une certaine mesure. Le Président de la République l'a dit en janvier : nous devons travailler sur une exception agricole et agro-alimentaire.

Le fait que la Commission européenne ait choisi de faire passer à 10 % les surfaces d'intérêt écologique se justifie par le verdissement de la PAC, dont nous ne devons pas avoir peur, car nous sommes en avance dans cette voie. La France défendra quoi qu'il en soit les paiements pour services environnementaux sur lesquels le groupe socialiste et républicain et en particulier M. Montaugé a beaucoup travaillé. Les agriculteurs doivent être rémunérés pour leur travail, pour une meilleure agriculture et leur action en faveur de la biodiversité et de la transition écologique.

M. François Bonhomme.  - Nous aurions aimé une réaction plus rapide : la position de la France a été bien discrète sur cet accord. Les agriculteurs n'ont plus confiance et se demandent si votre ministère n'est pas qu'une succursale du ministère de l'environnement ou bien à la remorque des conceptions bureaucratiques de la Commission européenne.

M. Édouard Philippe, Premier ministre.  - Cela fait toujours plaisir !

Détection du SARS-CoV-2 par les réseaux d'assainissement

M. Jean-Paul Prince .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Dans la lutte contre la maladie due au coronavirus qui mobilise notre pays, la localisation de l'épidémie et la surveillance de ses déplacements constituent des enjeux cruciaux, pour des raisons sanitaires et économiques. Connaître plus précisément la diffusion du virus sur le territoire et l'intensité de l'épidémie au niveau local peut nous aider à lutter plus efficacement contre l'épidémie.

Un avis de l'Académie des technologies du 19 avril dernier attire l'attention sur le fait que la mesure de la concentration du génome dans les eaux usées en entrée de station d'épuration est une source d'information précieuse pour connaître l'étendue de la contamination sur un territoire donné.

L'information récoltée permettrait aux collectivités locales et aux ARS d'évaluer avec plus de précision l'état sanitaire du territoire dont ils ont la responsabilité et d'y apporter une réponse adaptée. Le coût en serait relativement modeste.

Des mesures de surveillance des eaux usées ont déjà été annoncées à l'étranger. Le Comité d'Analyse, Recherche et Expertise mis en place par le Président de la République a apporté son soutien à cette pratique.

Le Gouvernement prévoit-il d'effectuer des prélèvements de ce type dans le cadre de la lutte contre l'épidémie et autorisera-t-il les collectivités locales à le faire ?

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé .  - La circulation du virus suscite la mobilisation de nombreux acteurs dans différents champs. Nos connaissances restent parcellaires et toutes les pistes doivent être explorées.

Plusieurs projets, dont l'un intitulé Aubépine, utilisant les eaux usées de la seine dans le bassin parisien, pour déceler la présence de virus - celui de la gastro-entérite en l'occurrence.

Pour autant, un tel indicateur ne stopperait pas la diffusion du virus, mais ne serait qu'une information. Le contact tracing que nous mettons en place avec les professionnels de santé, libéraux, de l'assurance maladie et des ARS, puis demain, avec l'application StopCovid est une stratégie beaucoup plus efficace. Vous en débattrez bientôt.

M. Jean-Paul Prince.  - Il y a trois semaines, les relevés à Paris montraient la présence de cinq millions de génomes. Aujourd'hui, c'est nettement moins : le virus disparaît de plus en plus...

Second tour des élections municipales

Mme Laure Darcos .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Mes collègues Philippe Bas, Bruno Retailleau et Hervé Marseille viennent de déposer une proposition de loi pour organiser de façon irréprochable le second tour des élections municipales, intégrée à celle de Cédric Perrin, déposée il y a plusieurs semaines et adoptée ce matin même par la commission des lois.

Dans un contexte épidémique persistant, il faut en effet adapter les opérations de vote, et garantir aux électeurs, aux assesseurs et au personnel municipal une sécurité sanitaire irréprochable.

Faciliter le vote par procuration aidera la participation des personnes fragiles, âgées ou malades. Point de société démocratique sans vote citoyen. Le freiner ou le tronquer serait sacrilège, après l'abstention et les frustrations du premier tour. Vous devez permettre la participation du plus grand nombre d'électeurs en prenant une loi qui le permettra. Le ferez-vous avant le 15 juin ?

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur .  - Le décret de convocation des électeurs au second tour des municipales qui se tiendra le 28 juin était à l'ordre du jour du Conseil des ministres. Le scrutin concernera 16 millions d'électeurs, dans un peu moins de 5 000 communes.

Au moment où nous nous parlons, le ministre de l'Intérieur reçoit les chefs de parti. J'ai quitté cette réunion pour venir vous répondre et vais la rejoindre à l'issue de cette séance de questions. Nous discuterons ensuite avec les associations d'élus pour organiser les élections de manière irréprochable, sur les plans juridique et sanitaire. Plusieurs pistes sont à l'étude : procuration et port du masque, mais aussi aménagement des bureaux de vote notamment.

Vous souhaitez élargir le champ juridique des procurations. C'est à l'étude. Nous nous y attelons dans un esprit d'ouverture. Le principe qui s'applique est qu'on puisse vérifier l'identité et le consentement du mandant. C'est à l'aune de ce principe que nous trouverons des solutions, dans le cadre des discussions en cours.

Mme Laure Darcos.  - Il y a urgence. Les procurations sont essentielles. Permettre aux officiers de police judiciaire de tenir des permanences pour récolter des procurations nous aidera beaucoup. (« Très bien » et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Emplois aidés

Mme Annie Guillemot .  - Ma question s'adressait au ministre de la Ville... En 2017, il y avait plus de 400 000 contrats aidés ; actuellement, il n'y en a plus que 130 000 alors que plus de 15 % de la population est sous le seuil de pauvreté.

La remise en cause drastique et brutale des contrats aidés a signifié la mort de la vie associative, frappant surtout les quartiers les plus démunis alors même que d'autres besoins vitaux s'accroissaient : alimentation, logement, emploi, numérique...

Les emplois aidés sont essentiels notamment pour résoudre la fracture numérique. Ils permettaient de donner un avenir, une première insertion dans l'emploi aux jeunes des quartiers précaires. Face aux besoins, notamment dans les écoles, les collèges et les lycées, comment le Gouvernement compte-t-il réactiver ces contrats ? (Applaudissements sur les tracées du groupe SOCR)

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail .  - Depuis trois ans, nous menons une stratégie claire afin de permettre aux plus vulnérables de reprendre un emploi, dans un contexte de créations d'emplois. Nous devons l'adapter, évidemment, mais sans perdre de vue l'objectif : nul n'est inemployable et chacun doit pouvoir accéder à l'emploi.

Nous avons transformé les contrats aidés en parcours emploi-compétences pour qu'ils oeuvrent dans des associations en s'appuyant sur une situation de travail, une formation et un accompagnement social. Nous avons investi des sommes considérables : ainsi, 90 000 parcours sont prévus cette année.

Second volet, le plan d'investissement dans les compétences concernera 150 000 jeunes et 150 000 demandeurs d'emploi de longue durée ; or 16 % d'entre eux sont issus des quartiers de la politique de la ville, et autant de l'outre-mer ; et 8 % sont en situation de handicap. Nous avons contractualisé la moitié des contrats avec les régions.

Vous avez voté, dans le budget 2020, un milliard d'euros pour l'insertion par l'activité économique (IAE), afin de multiplier les chantiers d'insertion. Nous souhaitions porter de 24 à 36 mois les contrats d'insertion dans la loi d'urgence que vous adopterez demain.

Les emplois francs contre les discriminations dans les quartiers bénéficient à plus de 26 000 personnes dont 80 % sont en CDI. Ils ont été généralisés depuis le 1er janvier.

Mme Annie Guillemot.  - Ma question au ministre de la Ville portait sur les emplois aidés pour aider les élèves décrocheurs dans les quartiers défavorisés. Il y a urgence. Où est la vision globale qui fait la politique de la ville ? L'ancien maire de Bron que je suis et qui n'a jamais cumulé, vous le dit : il y a de la désespérance dans les quartiers. Répondrez-vous à l'appel des maires ? (« Très bien ! » et applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SOCR)

Financement participatif et prêts garantis par l'État

M. Pierre Médevielle .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Ma question concerne l'intégration des plateformes de financement participatif ou crowdlending dans le dispositif des prêts garantis par l'État aux entreprises.

Si, aujourd'hui, le Gouvernement s'appuie uniquement sur les banques pour injecter les 300 milliards d'euros de prêts garantis dans l'économie, beaucoup d'entreprises risquent de se retrouver prises dans un « effet de ciseaux » cruel entre les échéances à court terme et le manque de trésorerie pour redémarrer la machine économique post-confinement.

Les demandes seront plus nombreuses que les capacités de traitement des banques. Il faudra diversifier l'offre.

À ce stade, seuls les particuliers et les fonds européens d'investissements de long terme, dits « Eltif », peuvent souscrire des prêts émis par des plateformes dans le dispositif des prêts garantis par l'État (PGE). Les personnes morales en ont été exclues.

Dans la filière agroalimentaire, certains groupes de la grande distribution et des coopératives agricoles se sont portés volontaires pour ce type de financement auprès de certains de leurs partenaires habituels. L'intérêt de les intégrer paraît évident.

Pour éviter des faillites en cascade, il serait utile d'élargir le dispositif de la garantie de l'État aux entreprises qui financeraient une partie du prêt, via des plateformes, à des entreprises de leur filière qu'elles connaissent bien.

Est-il envisageable, comme en Italie, que les entreprises qui prêteraient à leurs partenaires, dans leur filière, puissent bénéficier de prêts garantis de l'État, au même titre que les banques, les fonds Eltif ou les particuliers ?

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances .  - Les prêts garantis de l'État constituent 78 milliards d'euros déjà accordés à plus de 400 000 entreprises. C'est un immense succès et nous pourrons monter jusqu'à 300 milliards d'euros d'encours.

Nous avons ajusté le dispositif en l'étendant aux plateformes de financement participatif. Vous avez raison, ce sera utile.

Nous l'avons amélioré en privilégiant certains secteurs, hôtelier et touristique notamment : les entreprises d'hôtellerie et de restauration pourront demander un nouveau prêt de trésorerie à hauteur de 80 % de leur chiffre d'affaires réalisé sur les trois meilleurs mois de l'année 2019, et remboursable un an plus tard. C'est une aide considérable.

Nous avons aussi augmenté la possibilité par l'État d'apporter des prêts directs via le fonds de développement économique et solidaire.

Les réponses sont diverses. Chaque entreprise doit pouvoir trouver une solution. Ainsi, le ministère accordera directement un prêt à une entreprise qui s'est vu refuser toutes ses demandes de prêt et qui semble saine, dont le dossier se trouve sur mon bureau.

Chaque entreprise doit trouver une réponse en termes de prêts et de trésorerie.

M. Pierre Médevielle.  - J'avais salué le vote au Sénat de l'amendement du Gouvernement dans la nuit du 22 avril autorisant les plateformes de financement participatif à participer à ce type de prêts.

Les entreprises qui prêtent à leur partenaire au sein de la filière agricole devraient pouvoir bénéficier de garanties au sein de la Banque européenne d'investissement (BEI).

M. le président. - Prochaine séance de questions d'actualité, le mercredi 3 juin, à 15 heures.

La séance est suspendue à 16 h 50.

présidence de M. Thani Mohamed Soilihi, vice-président

La séance reprend à 16 h 15.