Création d'un pôle public du médicament et des produits médicaux

Discussion générale

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi portant création d'un pôle public du médicament et des produits médicaux, présentée par Mmes Laurence Cohen, Cathy Apourceau-Poly, Michelle Gréaume et plusieurs de leurs collègues.

Mme Cathy Apourceau-Poly, auteure de la proposition de loi .  - En juin, lors de sa visite à l'usine de vaccins Sanofi de Marcy-L'étoile, le Président de la République a indiqué que la politique du médicament devait constituer une priorité et annoncé 200 millions d'euros pour financer des infrastructures de production et de recherche et développement.

Jean Castex, dans son discours de politique générale, dénonçait un niveau de dépendance déraisonnable et inacceptable concernant les biens et les ressources stratégiques. Or les financements au bénéfice de l'industrie pharmaceutique se font sans contrepartie. Pire, les entreprises versent des milliards d'euros de dividendes à leurs actionnaires tout en licenciant et en menaçant de délocaliser ; elles font des profits sur la vie de millions de personnes. Cela est d'autant moins acceptable en période de pandémie !

La santé ne doit pas dépendre des choix financiers de grandes entreprises. Nous devons développer des capacités de production et de distribution de médicaments et de vaccins indépendantes du secteur privé. D'où notre proposition de loi, fruit de longues réflexions et de fructueux échanges. Après le scandale Vioxx de la firme Merck en 2006, François Autain et les membres du groupe communiste, républicain et citoyen (CRC) ont proposé la création d'un pôle public du médicament pour réguler et assurer les approvisionnements, fixer des règles plus respectueuses de la santé publique et garantir un équilibre entre l'État, les citoyens, les médecins et l'industrie pharmaceutique qui y seraient associés. Cette proposition de loi a été mise en débat et a, depuis, fait l'objet de discussions entre les acteurs concernés.

En 2020, 2 400 ruptures de médicaments ont été constatées. La pandémie a accéléré la démonstration de l'urgence d'extraire les médicaments de la loi du marché : la santé publique doit être considérée supérieure aux intérêts financiers. Le 1er avril dernier, j'ai interpellé le ministre de la Santé par une question d'actualité sur le manque de masques, de médicaments et de respirateurs et sur l'intérêt d'un pôle public pouvant réquisitionner les grands groupes pharmaceutiques. Sur le même sujet, Olivier Véran avait répondu à notre collègue Laurence Cohen que nous ne pouvions plus rester dépendants et que nous avions besoin d'une autonomie minima européenne.

Récemment, les pénuries de maques, de respirateurs, de médicaments anticancéreux et de vaccins contre la grippe ont renforcé notre conviction. Des acteurs politiques et associatifs de tous bords en sont venus à reprendre notre proposition. Le rapport de la mission d'information de 2018 de MM. Daudigny et Decool a repris notre proposition de production publique de certains médicaments essentiels. En juillet 2020, la députée Coralie Dubost a proposé la création d'un établissement pharmaceutique européen. L'UFC-Que Choisir, France Assos Santé, le Comité consultatif national d'éthique (CCNE), la Ligue contre le Cancer et l'Observatoire de la transparence du médicament sont également favorables à la création d'un pôle public de production et de distribution des médicaments essentiels.

Face aux pénuries persistantes et à la situation sanitaire, la souveraineté industrielle et sanitaire de la France est remise en question, tant que nous ne sommes pas capables de produire des produits essentiels. La France paie ses choix politiques de désindustrialisation et de délocalisation en Asie du Sud-Est. Il y a vingt ans, 80 % des principes actifs étaient produits en France, contre 20 % désormais.

Nous avons les capacités de nous réindustrialiser, mais il manque une volonté politique et des outils de pilotage publics. Lorsque le Gouvernement envisage de rapatrier la production de médicaments, il pense uniquement au paracétamol, alors que les besoins vont bien au-delà.

Sanofi évoque une relocalisation, non pas en France, mais en Europe de l'Est où le coût de la main d'oeuvre est moins élevé ! L'Europe libérale montant les peuples les uns contre les autres pose problème. Il faut, au contraire, une Europe solidaire. Une initiative citoyenne européenne a été lancée le 1er décembre par plusieurs associations pour un accès égal aux vaccins et traitements.

La filière du sang, de ses médicaments dérivés et du plasma est également menacée en France. La construction de la nouvelle usine près d'Arras devrait relever d'un pôle public du médicament.

La crise de la covid démontre l'urgence de sortir les médicaments et les vaccins du marché et de créer un pôle public du médicament, appuyé sur un observatoire citoyen et financé par une augmentation de la fiscalité des laboratoires pharmaceutiques. Ce texte va dans le sens du progrès ; je vous invite à le voter ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur quelques travées du groupe SER ; Mme Raymonde Poncet-Monge applaudit également.)

Mme Laurence Cohen, rapporteure de la commission des affaires sociales .  - Ce texte part d'un constat unanime : les choix de la politique du médicament ont fini par nous exposer encore plus aux pénuries.

Les riches auditions ont été suivies par les différents groupes politiques. La commission des affaires sociales du Sénat est pionnière en matière de lutte contre les tensions d'approvisionnement. Malgré l'absence d'adoption d'un texte de commission, un consensus s'est fait sur le constat et le remède : la puissance publique doit prendre le relais en cas de carence s'agissant d'un bien essentiel.

Que fait le Gouvernement ? Les mesures de stockage figurant dans la LFSS pour 2020 prévoient un stock de sécurité de quatre mois minimum de couverture nationale. Le Gouvernement l'a ramené à deux mois pour les médicaments d'intérêt thérapeutique majeur, cédant à la pression des industriels, qui craignaient des surcoûts.

En outre, aucun contrôle par l'Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé (ANSM) n'est prévu. En 2020, elle n'a pris qu'une seule sanction financière pour rupture de stock d'un montant inconnu, mais inférieur à 1 million d'euros.

La loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 a autorisé la réquisition de produits indispensables, comme le curare et d'autres médicaments de réanimation, mais le Gouvernement a préféré payer le prix fort en recourant directement aux producteurs. Les mesures existantes sont donc insuffisantes. De fait, l'ANSM a recensé 3 200 signalements de médicaments en tension en 2020, un niveau record.

L'obsession des industriels pour la rentabilité a des conséquences désastreuses pour les patients. Les médicaments anciens, peu chers, sont souvent indisponibles, car ils intéressent peu les Big Pharma. Les médecins doivent prescrire des alternatives, réduire la posologie ou retarder le traitement, ce qui entraîne des pertes de chances pour les patients. Cette situation est délétère et dangereuse.

La création d'un pôle public du médicament s'inscrit dans des exemples étrangers comme celui de la Fondation Oswaldo Cruz au Brésil, que j'ai eu la chance de visiter comme présidente du groupe interparlementaire d'amitié France-Brésil, qui produit, à la demande du ministère de la santé, des médicaments essentiels.

Retrouvons notre souveraineté en maitrisant notre production ! Nous resterons, sinon, à la merci de Sanofi qui a fermé douze sites de production en dix ans et supprimé 5 000 emplois. Paul Hudson, son président-directeur général, vient d'annoncer qu'il supprimerait 400 emplois en France en 2021. C'est scandaleux !

Nous ne voulons pas faire table rase des circuits de production et de distribution existants, mais introduire un nouvel acteur complémentaire des industries pour les médicaments essentiels en tension. Si nous établissons en amont une liste des produits concernés et nous appuyons sur des acteurs publics et privés, cela est possible.

Certes, ce projet entraînerait, en l'état, quelques difficultés d'application du fait de la concurrence entre le pôle public du médicament et les agences sanitaires, mais elles pourront être levées par la navette parlementaire.

La proposition de loi vise aussi à lutter contre la défiance vis-à-vis des produits innovants et des vaccins qui se fonde sur l'opacité de la méthode de production, du financement de la recherche, de la négociation du prix parfois indécent et des démarches de pharmacovigilance.

L'opacité de la recherche, maintenue au prétexte de secret des affaires, pose problème : on ne connaît ni le montant du crédit d'impôt recherche (CIR) versé pour un projet, ni le prix de cession des brevets financés par un organisme public de recherche. L'article 38 de la LFSS pour 2021 est un pas en avant, mais insuffisant.

S'agissant des prix, il n'est pas admissible que l'urgence ou la détresse confère un pouvoir léonin aux grands laboratoires au détriment de la sécurité sociale. Novartis a ainsi demandé 2 millions d'euros par unité pour un médicament de thérapie génique contre une maladie rare touchant les enfants. Sans connaître le coût réel de production, l'assurance maladie est obligée de signer un chèque ! À côté du service médical rendu, il faut d'autres critères pour rationaliser le coût d'une innovation pour les finances publiques.

Après le scandale du Mediator, il fallait renforcer le contrôle des médicaments innovants. La pharmacovigilance s'est améliorée, mais elle demeure lacunaire s'agissant des dispositifs médicaux. Le rapport des députés Julien Borowczyk et Pierre Dharéville est éclairant.

L'article 4 de la proposition de loi créé un observatoire citoyen indépendant placé auprès de l'ANSM. N'attendons pas de nouvelles victimes ! Dotons-nous des instances nécessaires pour renforcer notre démocratie sanitaire.

Notre modèle social est chaque jour fissuré, fracturé. Nous portons la voix des oubliés, des blessés de la mondialisation et de la course au profit et défendons le dernier bien que nous pensions avoir préservé de la logique marchande : la santé.

Ce texte est un premier jalon. Débattez-le et enrichissez-le même si, à mon grand regret, la commission ne l'a pas adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur quelques travées du groupe SER)

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles .  - Ce sujet prend un sens particulier avec la crise de la covid-19, qui a confirmé les fragilités de la chaîne d'approvisionnement. Nous connaissons depuis plusieurs années des ruptures et des tensions.

Les chiffres sont là, avec la multiplication par vingt des tensions entre 2008 et 2018 ; désormais, 80 % des principes actifs sont fabriqués hors de l'Union européenne, notamment en Chine et en Inde, et 40 % des médicaments finis.

Ce ne doit cependant pas être une fatalité, mais un levier pour aller vers davantage d'autonomie au niveau européen. Faire de la France une Nation de production, telle est la volonté du Président de la République affichée le 16 juin dernier.

Les relocalisations et l'innovation garantiront l'autonomie européenne. La feuille de route « Pour mieux prévenir, informer les citoyens en matière de santé » a été publiée le 8 juillet 2019. Elle comprend vingt-huit actions pour quatre objectifs, dont le renforcement de la coopération européenne.

La stratégie pharmaceutique pour l'Europe, annoncée le 26 novembre dernier, renforcera la souveraineté sanitaire et les investissements dans la recherche, avec la création d'une autorité spécifique pour faire face aux situations d'urgence et l'établissement de règles identiques pour les acteurs.

Une partie de la réponse est européenne, mais nous avons pris des mesures au niveau national, notamment pour augmenter nos capacités de production et les diversifier.

Le plan de relance y contribue avec 100 milliards d'euros, dont 35 milliards d'euros pour l'industrie. Il se fonde sur quatre piliers : améliorer notre compétitivité, faire de la transition écologique un avantage comparatif, moderniser l'appareil de production, innover. Ainsi, 6 milliards d'euros seront investis dans les infrastructures médicamenteuses et 20 milliards d'euros dans la recherche et l'innovation.

Nous avons également pris des mesures réglementaires pour réduire la vulnérabilité des chaînes d'approvisionnement, dont une obligation de stockage dans la LFSS pour 2020. Le décret, après validation du Conseil d'État, a été notifié à la Commission européenne. Nous avons également renforcé les sanctions financières pouvant être prises par l'ANSM en cas d'infraction.

S'agissant de la proposition de loi, nous partageons certains de vos constats, comme la nécessité d'un programme public de production. Le point 20 de la feuille de route prévoit d'expertiser cette solution en cas de pénurie.

Vos propositions, hélas, ne prennent pas en compte l'existant. Santé publique France dispose de prérogatives en matière de distribution des produits de santé et peut réaliser des acquisitions groupées. Elle a ainsi organisé une régulation nationale pour deux hypnotiques et trois curares lors de la crise sanitaire.

La mobilisation des secteurs public et privé est essentielle. Un pôle public isolé du paysage industriel atteindrait une limite opérationnelle : quels médicaments seraient concernés ? Pour quels marchés et selon quel modèle économique ?

Une approche franco-française ne peut faire émerger un outil productif viable sur le long terme. Il faut une réflexion au niveau européen.

Merci d'avoir inscrit cette proposition de loi à votre ordre du jour pour débattre du sujet. La pandémie a constitué un déclic : parler de résilience européenne n'est plus un tabou. Nous devons porter des projets européens pour faire le poids et construire un écosystème complet. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI ; Mme Véronique Guillotin applaudit également.)

Mme Véronique Guillotin .  - Les pénuries de médicaments et de vaccins, que nous évoquons régulièrement, font l'objet d'un constat unanime dans cette assemblée. Les tensions ne cessent de croître : elles concernaient 404 médicaments en 2013 contre 2004 en 2020 !

Le rapport de nos collègues Yves Daudigny et Jean-Pierre Decool en témoigne. De ses trente propositions a été tirée une proposition de loi largement cosignée. Celle que nous examinons propose des solutions différentes. Nous remercions le groupe CRCE d'évoquer ce sujet grave : les tensions et les pénuries de médicaments occasionnent des pertes de chance pour le patient et de temps pour les professionnels de santé. Elles mobiliseraient ainsi seize équivalents temps plein (ETP) pour la seule Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP). Les traitements anti-cancéreux, les anesthésiants et le vaccin contre la grippe sont notamment concernés.

Les industriels peinent à répondre aux fluctuations de la demande et les solutions qu'ils proposent ne sont pas satisfaisantes. S'agissant de produits stratégiques, cela relève de notre souveraineté. Nous dépendons depuis trop longtemps de fabricants étrangers, en particulier l'Inde et la Chine, et nous nous en trouvons fragilisés. Cela a ainsi affaibli notre réponse au début de la crise sanitaire.

Il ne faut cependant pas laisser penser que rien n'a été fait. Des actions ont été entreprises : plan de prévention et de gestion des ruptures de stock en 2016, possibilité de remplacer un médicament par un autre pour les pharmaciens en 2019, feuille de route pour la période 2019-2022, dont nous attendons d'ailleurs l'évaluation annuelle, notamment.

Face à l'aggravation de la situation, le Gouvernement a présenté un plan d'action en juin dernier pour relocaliser la production. Il faut aller dans ce sens, mais les tensions ayant des origines multifactorielles, elles ne sauraient être réglées par une seule solution.

La proposition de loi en élabore cinq. Nous souscrivons au renforcement de la transparence et de la démocratie sanitaire, mais pas à la création d'un pôle public de production du médicament assis sur une taxe sur les industries pharmaceutiques. Cela pourrait les inciter à délocaliser encore plus !

Surtout, il manque au texte une dimension européenne indispensable : nous ne pouvons agir seuls. La Commission européenne a lancé une commande groupée de vaccins contre la covid, première étape vers l'Europe de la santé que nous appelons de nos voeux. Il aura fallu une crise sans précédent, mais les citoyens réclament désormais des résultats.

Il faut agir, mais nous doutons de l'efficacité de la proposition de loi. Avec quelques collègues, je voterai contre, mais une majorité du groupe s'abstiendra pour marquer l'importance du sujet. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et INDEP ; MmNadia Sollogoub applaudit également.)

Mme Nadia Sollogoub .  - « Tant qu'on a essayé de combattre la peste avec des mots latins, elle a tranquillement dévoré l'humanité », écrivait Barjavel.

Avec le développement des pénuries, accéder à un traitement n'est plus une évidence. La nature ayant horreur du vide, nous voyons des marchés parallèles se constituer ; cela est délétère.

Nous avons participé, en 2018, à la mission d'information présidée par Yves Daudigny sur le sujet. Agnès Buzin a présenté, en juillet 2019, une feuille de route comprenant vingt-huit actions. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous informer sur son application ?

Les tensions d'approvisionnement augmentent, avec des effets pénalisants pour les patients comme pour les professionnels de santé. Elles créent des situations inacceptables, anxiogènes et chronophages !

L'article premier de la proposition de loi instaure un programme public de production pour les médicaments en rupture d'approvisionnement. Un décret du 28 septembre 2012 la définit comme l'incapacité, pour une pharmacie, de délivrer un médicament pendant soixante-douze heures. Elle peut être due à une rupture dans le stock ou dans la chaîne de distribution, dont chaque maillon dépend du précédent. La pénurie peut durer plusieurs semaines, voire plusieurs mois, et la stratégie à mettre en oeuvre varie en fonction de la situation.

Les outils de transparence sont effectivement améliorables ; ils font l'objet des articles 2 et 4.

La feuille de route précitée a élargi la plateforme de signalement des ruptures d'approvisionnement à toute la chaîne de distribution. De fait, les causes en sont nombreuses et multifactorielles. L'absence de la matière première en représente 17 %, mais elles peuvent aussi être dues à un problème dans une usine, à l'éclatement des étapes de fabrication entre différents sites, à une production en flux tendu ou au développement des marchés émergents. La libre circulation des biens et l'évolution du marché du médicament, comme la recherche d'une rentabilité à tout prix, peuvent également être évoquées.

La loi du 29 décembre 2011 a renforcé les obligations des acteurs : l'industriel exploitant doit déclarer à l'ANSM les ruptures de stock et envisager des solutions ; le grossiste-répartiteur doit respecter ses obligations de service public sur son territoire et le pharmacien doit faire une déclaration à l'ANSM et envisager des solutions avec le grossiste.

Le noeud du problème est que la substance de guérison est un produit commercial soumis à la loi du marché. Vous proposez de l'en sortir : est-ce possible ? Est-ce surtout la bonne solution ?

En 2018, dans le cadre des travaux de la mission dite Daudigny-Decool, vous souhaitiez déjà la création d'un pôle public du médicament. Auditionnée, une des sous-directrices de la direction des soins vous avez répondu que l'État gagnerait plutôt à renforcer sa capacité à réguler.

Je ne partage pas vos conclusions. Comment assurer un accès suffisant aux matières premières ? L'État peut-il assumer le risque financier d'une production à perte ? Quid de la logistique et du stockage ? Enfin, la taxation de l'industrie pharmaceutique prévue à l'article 5 est contraire à une dynamique de relocalisation. Votre objectif est louable, mais votre texte ne permettra pas de lutter efficacement contre les pénuries.

Il serait préférable de réformer la politique de prix du médicament et d'améliorer l'accès aux médicaments innovants. Pourquoi ne pas constituer des stocks suffisants, sans pour autant initier une tendance mondiale qui assécherait les ressources ? Les laboratoires négligents en matière d'approvisionnement doivent aussi être davantage sanctionnés.

La réflexion doit se poursuivre et les effets du plan de gestion des pénuries initiés par la loi de 2016 et de la feuille de route doivent être évalués.

Le groupe Union Centriste votera contre ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDSE et INDEP)

Mme Émilienne Poumirol .  - La pandémie a fait ressortir dans le débat public les difficultés et la faiblesse de la France et de l'Europe dans le domaine du médicament et l'échec de la stratégie de rationalisation des laboratoires pharmaceutiques. Cette situation n'est pas nouvelle. Merci au groupe CRCE de poser le débat.

Nous partageons les constats de Laurence Cohen et ses collègues, dont la nécessité d'une solution publique de production. Pas moins de 40 % des médicaments commercialisés en Europe et 80 % de leurs principes actifs proviennent de pays tiers.

Les politiques ultralibérales démontrent leurs effets néfastes. Encore marginales dans les années 2000, les pénuries se multiplient : l'ANSM envisage le chiffre de 2 400 en 2020, contre quarante-quatre en 2008 !

Le sujet a marqué l'examen de la LFSS pour 2021. Notre groupe a fait des propositions fortes, comme l'obligation de stocks de quatre mois pour les médicaments d'intérêt thérapeutique majeur, votée par le Sénat, mais supprimée, hélas, par l'Assemblée nationale.

Il existe également un défaut de transparence. Les sommes investies par l'État dans la recherche ne sont jamais rendues publiques, ni prises en compte dans la négociation du prix du médicament. Nous payons deux fois la facture : par le CIR et les investissements publics dans la recherche et par l'assurance-maladie après la commercialisation. Tout est à revoir. Le Comité économique des produits de santé (CEPS) n'a pas connaissance du montant des investissements publics ; cela pose un véritable problème de transparence.

Les gouvernements qui se sont succédé n'ont fait que de la gestion de crise, au lieu de renforcer la souveraineté et la démocratie sanitaires. La covid n'a pas fait exception : ni les patients, ni les élus locaux, ni les professionnels de santé, ni les associations n'ont été véritablement associés à la gestion de la crise. Il faudra davantage de démocratie sanitaire dans le cadre de la campagne de vaccination. Nous soutenons donc la création d'un observatoire citoyen des prix du médicament, et défendrons un amendement sur ce sujet.

La France ne peut agir seule contre les Big Pharma. L'Union européenne est en train de renforcer sa politique à travers le centre européen de prévention et de contrôle des maladies, auquel des moyens de surveillance renforcés sont attribués, et, alors que l'Agence européenne du médicament n'a qu'une compétence d'appui, en passant des commandes groupées de vaccins. Le 11 novembre, la Commission européenne a annoncé la création de deux institutions de veille sanitaire. Elle lancera aussi prochainement sa stratégie pour sortir de la dépendance en matière de médicaments. En 2023, sera enfin créée une nouvelle instance chargée des risques sanitaires.

La France doit retrouver sa souveraineté sanitaire et faire passer les citoyens avant les industriels. Le groupe SER partage les constats du groupe CRCE d'une reprise en main nécessaire par les pouvoirs publics.

Cela doit-il passer par la création d'un pôle public du médicament ? L'idée est intéressante, mais, dans un secteur déjà complexe, mieux vaut ne pas ajouter une nouvelle structure administrative.

L'Agence générale des équipements et produits de santé (AGEPS) et la pharmacie centrale des armées peuvent produire des médicaments ; la seconde avait ainsi fabriqué 77 millions de comprimés de Tamiflu en 2009. La licence d'office permet de contraindre le détenteur d'un brevet de le laisser exploiter en cas de menace sur la santé publique. Il faut, en revanche, une volonté politique pour appuyer sur ces leviers, ainsi qu'une meilleure coordination entre les acteurs.

Nous devons construire une solution avec les parlementaires européens. L'Europe, en effet, représente la bonne échelle pour les relocalisations. Les industriels ont fait le calcul de leur coût - 15 % à 20 %. Cela leur semble envisageable, en contrepartie de mesures fiscales favorables.

Ce serait une source d'emplois et de richesse pour nos territoires, comme le moyen de renforcer notre souveraineté et notre indépendance.

Nous partageons la même ambition : ce qui semblait utopique jadis devient réalisable ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; MmCathy Apourceau-Poly applaudit également.)

Mme Christine Bonfanti-Dossat .  - Le temps des tempêtes est propice à la révélation des carences et des failles. Ainsi en est-il de la covid.

Qui aurait pensé que nous manquerions de paracétamol ? Nous en connaissons les causes, mais il faut toujours une prise de conscience douloureuse.

L'indisponibilité des médicaments, désormais chronique, concerne tous les traitements et tous les vaccins. La forte augmentation de la demande mondiale a entraîné une concurrence délétère et des difficultés d'approvisionnement. Durant des années, nous avons perdu notre souveraineté sanitaire avec la délocalisation des chaînes de production à l'autre bout du monde. Comment entendre sans frémir Paul Hudson déclarer que Sanofi servirait les États-Unis en premier en cas de découverte d'un vaccin ?

Madame la rapporteure, votre proposition de loi a le mérite de poser le problème de la souveraineté sanitaire, sur laquelle nous devons changer de paradigme idéologique. Il faut relocaliser notre industrie pharmaceutique, renforcer la transparence s'agissant de la gestion des stocks, revoir la tarification et la distribution de certains produits.

Pour faire face aux pénuries, vous proposez la création d'un pôle public du médicament. Nous pensons que la politique des gouvernements successifs de réduire, depuis huit ans, le prix des médicaments n'incite pas les industriels à produire en France et à nous servir prioritairement. L'idée d'un pôle public du médicament apparaît séduisante, mais elle doit être accompagnée d'un financement et d'une organisation opérationnels.

Les différences de prix pèsent sur les stratégies d'allocation des stocks. Nous avons déjà un arsenal législatif pour contrer les pénuries en intervenant sur la gestion des stocks. Monsieur le ministre, qu'en est-il de la volonté du Gouvernement de le mobiliser ?

L'État doit développer une stratégie pour une production de proximité. Nous pourrions envisager un accord-cadre incitatif entre l'État et les industriels et prévoir des contreparties. Le pôle public du médicament pourrait alors se concentrer sur les médicaments de niche, en mobilisant l'AGEPS et la pharmacie centrale des armées.

En revanche, il me semble difficile de rendre une entreprise entièrement responsable du cycle de production et de commercialisation d'un produit. De même, la réquisition des industries pharmaceutiques apparaît contre-productive.

La crise a renversé la table de certains clichés : la souveraineté n'est plus un gros mot, même dans les chapelles du nouveau monde !

Votre texte étant bien intentionné, mais non abouti : nous ne pouvons pas le soutenir. Mieux vaudrait apprendre de nos échecs dans la gestion de la crise actuelle.

Il me semble qu'un pôle public doit avoir une taille suffisante pour se fournir en principes actifs à l'international. Il faudrait aussi que l'État ait les moyens de construire des usines, pour plusieurs centaines de millions d'euros, et qu'il réussisse à produire à des coûts compétitifs.

Cette proposition de loi a le mérite de poser la question de la souveraineté sanitaire, mais la réponse est insatisfaisante. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Jean-Pierre Decool .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) Récemment, je lisais un article du Monde sur un campus de 45 hectares abritant 5 200 salariés près de Bombay en Inde, fabriquant 60 millions de doses de vaccin anti-Covid par mois - assez pour vacciner 25 à 30 millions de personnes. Le vaccin est issu de l'université d'Oxford et d'AstraZeneca et les doses - qui ne nous sont pas destinées - sont stockées en attente d'autorisation...

Cela illustre le décrochage de l'industrie française et européenne. Les unités de fabrication sont presque devenues un monopole de l'Asie. Et 40 % des médicaments finis, 80 % des substances actives sont produits en dehors de l'Union.

En 1970, la France comptait 420 entreprises de médicaments. En 2017, elle n'avait plus que 138 sites de production de médicaments et 92 sites de production de principes actifs - contre plusieurs milliers pour l'Inde ou la Chine. Nous perdons notre indépendance sanitaire - peut-être l'avons-nous déjà perdue.

Selon l'article 5 de la Constitution, le Président de la République est le garant de notre indépendance nationale. Or la situation est gravissime et il convient de recenser nos outils existants pour trouver des solutions rapides, probablement au niveau européen.

La pharmacie centrale des armées fabrique des médicaments et détient des AMM ; elle a su préserver sa souveraineté sur la production ; elle pourrait répondre à des besoins de santé publique moyennant un assouplissement réglementaire.

Tout cela, nous l'avons découvert en 2018, au cours de la mission d'information sur les produits de santé. Avec Yves Daudigny, je préconisais un programme public d'approvisionnement - la proposition n°8 est reprise au mot près à l'article premier de cette proposition de loi. Mais pourquoi, alors, le groupe CRCE a-t-il été le seul à ne pas approuver le rapport ? (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe UC ; marques d'agacement sur les travées du groupe CRCE)

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Ça marchait mieux avant...

M. Jean-Pierre Decool.  - Vous ne serez donc pas surpris que, préférant renforcer les outils publics existants, je ne vote pas cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur plusieurs travées du groupe UC)

Mme Raymonde Poncet Monge .  - Alors que la crise sanitaire se poursuit, que la commission d'enquête sur la gestion de la crise présentera son rapport demain, il faut tirer au plus vite les enseignements de cet épisode.

Des millions de masques ont manqué durant des semaines faute de stocks stratégiques et la puissance publique n'a pas su s'en procurer en urgence. En Auvergne-Rhône-Alpes, les équipements de protection individuels ont manqué ; des associations, palliant les carences des services déconcentrés, ont dû livrer du gel hydroalcoolique en lien avec l'Union régionale des pharmacies.

Les déprogrammations d'opérations chirurgicales s'expliquent aussi par la pénurie de médicaments en réanimation, avec des conséquences encore plus graves. Le système de santé français a été sous tension, et s'est avéré bien vulnérable.

Le Sénat alerte depuis des années sur les ruptures d'approvisionnement. En 2020 près de 3 200 médicaments auront été en rupture, que ce soit pour le cancer, la maladie de Parkinson ou la grippe saisonnière, contre 404 en 2013 ; un Français sur quatre en a souffert ; 74 % des professionnels de santé ont déclaré avoir été exposés à des pénuries et 45 % d'entre eux considèrent que cela a dégradé la survie à cinq ans de leurs patients, d'où des pertes de chance.

Un pôle public restaurerait la souveraineté sanitaire de la France ; il serait conforme à une recommandation du Parlement européen. Il en existe au Brésil, en Inde, en Suisse, mais aussi aux États-Unis.

Nous pourrions améliorer également la démocratie sanitaire comme nous y encouragent les associations.

Entendons l'urgence. La crise climatique va amplifier les crises sanitaires. Il est temps, avec un sens collectif des responsabilités, d'anticiper, car la fonte du permafrost, les pesticides annoncent les maladies et pandémies à venir.

Le pôle public du médicament est une première réponse à l'échelon national, assurant une régulation de la continuité des approvisionnements, en complément de la relocalisation des productions. Le GEST votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE ; Mme la rapporteure applaudit également.)

M. Martin Lévrier .  - Oui, la pénurie de médicaments est une réalité ; près d'un Français sur quatre s'est vu refuser la délivrance d'un traitement pour cause de pénurie.

Les ruptures et tensions ont été multipliées par quatre sur les six dernières années.

Les professionnels de santé, prescripteurs et pharmaciens ont trouvé des solutions : la consommation de curares et d'hypnotiques a augmenté de 2 000 % en quinze jours, au plus fort de la crise sanitaire.

La commission n'a pas adopté la proposition de loi que nous examinons, qui crée un pôle public du médicament et un observatoire citoyen ; et qui, pour les financer, augmente de 0,17 à 1 % la taxe sur le chiffre d'affaires des entreprises pharmaceutiques.

Dès 2012 puis en 2016, de nouvelles obligations ont été imposées aux professionnels de la distribution et de la fabrication. Cela n'a pas suffi. En juillet 2019, Mme Buzyn a présenté une feuille de route pour promouvoir la transparence de l'information et restaurer la confiance, lutter contre les pénuries de médicaments, renforcer la coopération nationale et européenne et créer un comité de pilotage stratégique.

L'article 47 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 oblige les industriels du médicament à disposer de stocks pour quatre mois, et à acheminer des alternatives thérapeutiques en cas de rupture sur les médicaments d'intérêt majeur ; et ce, sous peine de sanctions financières.

En juin 2020, le rapport de Jacques Biot a recommandé de renforcer la recherche française en solutions thérapeutiques, augmenter les capacités de production sur notre territoire, et construire une résilience à l'échelle européenne.

Chez moi à Limay, l'entreprise Seqens, spécialisée dans la pharmacie de synthèse, a bénéficié du soutien de l'État pour investir en France et pour minimiser les risques de rupture de la chaîne logistique sur ses médicaments qui interviennent dans la prise en charge des patients de la covid-19. Le Gouvernement est à pied d'oeuvre dans nos territoires !

Il a aussi instauré un comité de pilotage interministériel, à quoi il faut ajouter la base de données européenne unique sur les dispositifs mis sur le marché.

Augmenter la fiscalité sur les entreprises pharmaceutiques nuirait à leur compétitivité et irait à l'encontre des besoins de relocalisation.

Le groupe RDPI votera contre la proposition de loi.

M. Fabien Gay.  - Vous nous surprenez.

M. Jérémy Bacchi .  - La France, au premier rang de la production pharmaceutique européenne en 2008, est aujourd'hui quatrième. Il reste encore une soixantaine d'usines de principes actifs, comme chez moi à Septèmes-les-Vallons.

Les marchés financiers et les industriels décident du coût des médicaments, donc de l'accès des populations à ces produits. Heureusement, depuis 1945, la sécurité sociale prend en charge le remboursement. Mais quand l'approvisionnement en principes actifs est interrompu, la puissance publique est démunie.

Cette perte de maîtrise publique est un casse-tête pour les patients, qui vont à la pharmacie la boule au ventre...

Sanofi reçoit 150 millions d'euros d'aides publiques par an ; et pourtant, elle licencie. Elle a supprimé 3 000 postes de chercheurs en dix ans tandis qu'elle verse la moitié de ses bénéfices à ses actionnaires.

Les scandales du Mediator et de la Dépakine ont entraîné une suspicion à l'égard des médicaments ; la recherche effrénée de profit a entamé la confiance dans les vaccins. Cette proposition de loi n'est pas une utopie : il faut simplement la volonté et les moyens financiers.

La pharmacie centrale des armées et celle des hôpitaux doivent être renforcées. Or on affaiblit les structures hospitalières. L'hôpital Sainte-Marguerite à Marseille a fermé sa pharmacie, après ses urgences et son service de réanimation. On démantèle l'hôpital et la concurrence entre les cliniques privées et le public fait fuir le personnel de santé.

Les industriels du médicament ont tout intérêt à voir disparaître les pharmacies centrales, pour imposer leurs tarifs.

On a vu de grands progrès thérapeutiques : les thérapies ciblées et les immunothérapies ont révolutionné le pronostic de certaines affections, mais certains traitements coûtent jusqu'à 80 000 euros par an... Où est la justification ? Pour les industriels, c'est le reflet du coût de la recherche et développement ; mais ils investissent dans celle-ci 15 % de leur chiffre d'affaires, contre 30 % dans la communication.

Nous augmentons la contribution de l'industrie pharmaceutique de 0,17 % à 1 % mais Pfizer a réalisé 377 milliards d'euros de profits en dix ans ; une taxe de 1 % sur cette somme n'est pas excessive. Ce n'est qu'un juste retour sur les bénéfices réalisés grâce à l'argent public du crédit d'impôt recherche.

Le groupe CRCE vous invite à voter ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE ; Mmes Raymonde Poncet Monge et Emilienne Poumirol applaudissent également.)

Mme Corinne Imbert .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme la présidente de la commission applaudit également.) Je partage pleinement les propos de Christine Bonfanti-Dossat.

Les ruptures de stocks sont un problème récurrent qui suscite l'agacement des professionnels de santé et l'incompréhension des patients.

Le rapport demandé par le Premier ministre à Jacques Biot, rendu public le 18 juin dernier, n'a pas été un appel décisif dans la lutte contre les pénuries. Les causes de celles-ci sont diverses : demande plus importante à l'échelle mondiale, quotas imposés aux industriels... Il serait présomptueux de prétendre les résoudre à l'échelle nationale.

Le Sénat a voté un amendement dans le PLFSS 2021 tenant compte du lieu de fabrication dans le prix de remboursement d'un médicament ; l'Assemblée nationale hélas ne l'a pas maintenu.

Relocaliser implique des coûts importants notamment de rapatriement des activités chimiques. Il me semble préférable d'optimiser la capacité des sites existants.

Les entreprises de répartition pharmaceutique assurent très bien leurs responsabilités en matière de distribution ; elles l'ont montré avec la distribution des masques de l'État au début de la crise.

Depuis 35 ans, tous les gouvernements réduisent dans les LFSS les crédits alloués au médicament -  ces derniers représentaient 50 % des économies au titre de l'Ondam l'an dernier. Le médicament et l'hôpital sont les variables d'ajustement !

Depuis juin, vous saviez que nous manquerions de doses de vaccin contre la grippe. Pourquoi ne pas avoir anticipé ? Plus jamais ça, monsieur le ministre.

Un pôle public du médicament n'est pas la réponse. Un programme public pour les médicaments en arrêt de production est facile à envisager, mais les ruptures d'approvisionnement sont plus difficiles à anticiper. Il y a les déclarations des laboratoires, mais comment ce pôle public prendrait-il la main ? La taxe proposée dans le texte suffirait-elle à fiancer le pôle public ?

Il n'y a pas d'un côté la planification vertueuse d'État, de l'autre le tout libéral. L'équilibre est à la frontière entre les fonctions régulatrices de l'État et le jeu de la concurrence. Les solutions proposées dans la proposition de loi, bien qu'intéressantes en théorie, posent des difficultés de mise en oeuvre concrètes.

Je crois savoir que des travaux se tiendront entre l'État et l'ordre des pharmaciens afin d'améliorer le système d'information sur les pénuries et de tensions, qui restent un vrai sujet de préoccupation. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État.  - Je m'excuse auprès de M. Decool car j'ai omis de préciser que cette feuille de route ministérielle était inspirée du rapport Daudigny-Decool de 2018.

Une évaluation sera présentée début 2021, madame Guillotin. Quant à l'état des lieux sur les 28 actions, il sera présenté le trimestre prochain, mais je puis vous dire, madame Sollogoub, que nous avons bien avancé, notamment les actions au niveau européen. Nous voulons sanctionner le non-respect des obligations et accélérer le développement des marchés conjoints européens.

Madame Poumirol, un amendement sur les contributions publiques à la recherche a été adopté dans le PLF pour 2021. Nous serons attentifs à ses effets.

Madame Bonfanti-Dossat, un accord-cadre est en négociation avec les industries de santé. Le décret prévu à l'article 48 de la LFSS pour 2020 a été transmis au Conseil d'État.

Monsieur Bacchi, votre taxation risque de décourager la relocalisation. (Marques d'ironie sur les travées du groupe CRCE)

Je considère, madame Imbert, que le bilan de la campagne vaccinale contre la grippe saisonnière a été plutôt un succès car nous avons vacciné plus de monde que l'an dernier : les 12 millions de doses ont été diffusées en deux mois au lieu de quatre l'an dernier et nous avons commandé 2,4 millions de doses supplémentaires, désormais disponibles en officines.

Je salue l'action des pharmacies. Pour l'an prochain, il faudra rapprocher les commandes des officines de la population cible, nous passerons le message aux industriels.

Mme Laurence Cohen, rapporteure.  - Prêtons attention aux mots de la proposition de loi. Il ne s'agit pas que le pôle public fabrique tous les médicaments et les distribue !

Mais nous sommes tous d'accord ici pour reconnaître qu'il y a des choses qui ne vont pas et que les mesures du Gouvernement ne vont pas assez loin.

Certaines ruptures sont volontaires car ces médicaments ne sont pas rentables.

Sanofi a décidé d'arrêter la commercialisation de l'Immucyst, ce vaccin BCG utilisé comme antinéoplasique, ce qui a privé nombre de patients d'un traitement qui leur aurait évité une ablation de la vessie. Qu'a-t-on fait contre ce laboratoire ? Rien !

Notre pôle public est un outil parmi d'autres pour retrouver notre maîtrise et notre souveraineté.

Mme Sollogoub se demande si cela ne coûtera pas trop cher à l'État. Certes, cela va coûter de l'argent...

Mme la présidente.  - J'aimerais clore la discussion générale.

Mme Laurence Cohen, rapporteure.  - Notre article 5 répond à la question du financement. Et l'État pourra retirer le CIR aux entreprises qui n'auraient pas joué le jeu.

La discussion générale est close.

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

Mme Marie-Noëlle Lienemann .  - Cela fait des années que la situation se dégrade. Il y a un blocage idéologique de nos collègues Les Républicains ou des plus libéraux de notre assemblée. Pour eux, les interventions publiques ne sont jamais positives. Mais les Français ne comprennent plus vos discours sur l'État stratège quand ils constatent chaque jour l'impuissance publique...

Depuis longtemps, alors que les entreprises du médicament délocalisaient, je demandais des mesures : on me traitait de quasi-bolchévique. Or le bilan est aujourd'hui très négatif.

Après nos questions écrites et orales pendant deux ans, Mme Buzyn nous a expliqué en 2019 qu'elle allait mieux coordonner ; mais c'est la pagaille générale car il manque une architecture publique, un monopole pour coordonner, réguler, rendre les prix transparents et les moduler, et enfin, veiller à la production locale des médicaments essentiels.

Aux États-Unis, des établissements publics existent à l'échelle d'un ou de plusieurs États, créés avec les hôpitaux pour produire des médicaments.

Mme Éliane Assassi .  - Notre proposition de loi n'est pas liée à la crise de la covid-19 : cela fait très longtemps que nous y travaillons. Je me souviens que nous l'avions évoquée lors de la fermeture par Sanofi de son site de Romainville.

Cela pose la question de la souveraineté mais aussi de la coordination internationale. La crise a provoqué un repli nationaliste au sein même de l'Union européenne, notamment pour l'accès aux doses de vaccin. Mais il y a eu des coopérations : les hôpitaux allemands ont accueilli des patients français, des médecins cubains sont arrivés en Italie.

Le vaccin devrait être un bien public mondial et être vendu à prix coutant : c'est ce qu'a dit notre Président de la République. Mais pour cela, il faut une solidarité internationale. Le décalage est grand, quand on apprend le refus du G20 d'imposer un partage des droits de la propriété intellectuelle sur les formules.

Notre proposition de pôle public s'inscrit dans une dynamique de coordination internationale. Cette complémentarité entre national et international fait l'objet de notre article premier.

Mme Laurence Cohen, rapporteure .  - Je tiens à rassurer mon collègue Jean-Pierre Decool. J'avais participé à la mission et j'avais défendu l'idée d'un pôle public. Une première étape était de s'appuyer sur l'Agence générale des équipements et des produits de santé (Ageps) et la pharmacie centrale des armées : une très bonne proposition, en toute modestie !

Pourquoi n'ai-je pas voté le rapport ? Parce qu'il contenait trop de cadeaux aux grands groupes pharmaceutiques ; et pas assez de sanctions.

À la demande du groupe CRCE, l'article premier est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°43 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 267
Pour l'adoption   27
Contre 240

Le Sénat n'a pas adopté.

ARTICLE 2

Mme Marie-Noëlle Lienemann .  - Il faudrait agir au niveau européen pour redonner de la force à notre industrie. Mais si l'on attend une décision européenne, les délocalisations vont se poursuivre. On voit aussi des flux intra-européens : des entreprises françaises qui bénéficié du CIR transfèrent leurs laboratoires à Francfort... Vive l'Europe !

La solidarité européenne dépend de la pression dans chaque pays. La solidarité a ses limites. Lorsque l'Italie a manqué de respirateurs, l'Allemagne a fermé ses frontières et interdit l'exportation de ces machines, préférant les garder, au cas où.

Pour que la solidarité fonctionne, il faut que les pays soient dans un relatif équilibre, et non que certains soient hyperdépendants.

Un pôle public serait un interlocuteur pour permettre à l'Europe d'évoluer dans ses pratiques. Voyez Ébola ! Une directive prévoyait un achat groupé de vaccins, dispositif jamais utilisé jusqu'à la crise de la covid-19.

Si la France dispose d'un outil efficace, les choses progresseront mieux au niveau européen.

À la demande du groupe CRCE, l'article 2 est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente. - Voici le résultat du scrutin n°44 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 267
Pour l'adoption 27
Contre 240

Le Sénat n'a pas adopté.

L'article 3 n'est pas adopté.

ARTICLE 4

Mme Michelle Meunier .  - La gestion de la pandémie a mis en évidence le recul de la place des usagers et usagères du système de santé. Cet article 4 crée un Observatoire citoyen qui leur accordera enfin la place qui leur est due.

L'opacité fait naître la défiance. Nous avons intérêt à associer les personnes et les associations sont prêtes à participer. Ce serait un pas dans la direction de la démocratie sanitaire.

Le groupe SER y est favorable.

Mme Marie-Noëlle Lienemann .  - Il ne s'agit pas de confier le pouvoir à la technocratie. C'est pourquoi un observatoire complète le pôle public. Les usagers attendent que leurs avis soient entendus et aient des effets. L'Observatoire constatera, mais le pôle public pourra agir et peser sur les événements.

Mme la présidente.  - Amendement n°1, présenté par Mme Poumirol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

I.  -  Alinéa 3

Après le mot :

citoyen

insérer les mots :

des médicaments, des vaccins et

II.  -  Alinéa 4, première phrase

Après le mot :

citoyen

insérer les mots :

des médicaments, des vaccins et

Mme Émilienne Poumirol.  - Le groupe SER partage totalement l'objectif de renforcement de la démocratie sanitaire via la création d'un observatoire citoyen des dispositifs médicaux.

Nous souhaitons élargir son champ afin que ses missions concernent également les médicaments et les vaccins, pour répondre à l'exigence de rééquilibrage dans l'accès à l'information des pouvoirs publics et du grand public concernant le marché des médicaments, des vaccins et dispositifs médicaux.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°2, présenté par Mme Cohen.

Mme Laurence Cohen, rapporteure.  - C'est un amendement de cohérence avec notre proposition de loi. La démocratie sanitaire doit être robuste et décisionnelle.

Je regrette que la commission ait choisi de ne pas soutenir ces deux amendements.

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État.  - Les principes de transparence et de participation des citoyens sont fondamentaux. Ils sont déjà mis en place ou en passe de l'être.

Le rapport de l'ANSM comporte des éléments sur la vigilance. Des données agrégées et anonymisées sont en ligne dans le cadre de la politique d'open data de l'agence.

Depuis juillet 2019, des représentants des patients et d'usagers du système de santé siègent dans les différents conseils de l'ANSM. L'agence auditionne les parties prenantes régulièrement. Il n'est pas nécessaire de créer une instance spécifique. Avis défavorable.

M. Olivier Henno.  - Le groupe UC ne votera pas ces amendements. Il n'y a pas lieu de multiplier tous ces organismes mais de les animer et de les faire vivre. La démocratie, c'est la lisibilité.

Or notre pays souffre d'une suradministration et d'une sous-politisation. La prolifération de ces organismes participe de cette confusion.

Mme Laurence Cohen, rapporteure.  - Je siège à l'ANSM, qui joue un rôle très important, et qui se voit confier des missions de plus en plus nombreuses, avec des moyens de plus en plus restreints....

Mais sa mission n'est pas celle d'un observatoire citoyen, composé de personnes extérieures assurant la transparence.

Si tout était parfait, il n'y aurait pas eu le scandale du Mediator, ou ceux sur la formation des prix. Réfléchissons différemment !

L'observatoire de la transparence du médicament a fait un travail colossal sur cette transparence. Mais vous préférez nous dire : « Dormez, bonnes gens, tout va bien ! »

M. Pascal Savoldelli.  - Quand on a le même amendement, chers collègues du SER, il est correct de le retirer au profit de celui de l'auteur de la proposition de loi, même si vous avez voté contre l'article premier... (M. Bernard Jomier proteste ; murmures à droite)

Les amendements identiques nos1 et 2 ne sont pas adoptés.

L'article 4 n'est pas adopté.

ARTICLE 5

Mme Marie-Noëlle Lienemann .  - Payer un pôle public du médicament par une contribution sur le chiffre d'affaires des grandes entreprises du médicament poserait problème. Mais les choix de localisation ne sont pas seulement liés aux taxes.

Le journal Le Revenu conseille d'investir dans Sanofi, l'entreprise française qui dégagera le plus de dividendes. L'année dernière, elle avait déjà enregistré 7 % d'augmentation des dividendes....

Réguler l'économie, c'est aussi prélever des richesses indûment perçues pour les distribuer aux sous-traitants PME. Or Sanofi ne traite pas bien ses sous-traitants. Je préfère des médicaments un petit peu plus coûteux mais fabriqués en France à des médicaments moins chers, de mauvaise qualité, réalisés en dehors de l'hexagone, surtout s'il s'agit de génériques, dont le taux de retours est particulièrement élevé.

Le mode de financement proposé pour le pôle public du médicament permet une planification souple à la française. Donnons-nous en les moyens.

M. Pierre Laurent .  - Une nouvelle fois, nous gâchons une occasion de prendre une décision essentielle et de réagir efficacement.

Nous avons mis beaucoup de fonds publics pour sécuriser l'achat de vaccins : 1,5 milliard de doses achetées !

Clément Beaune a confirmé que l'essentiel des vaccins sera produit en Europe.

À cause de la pandémie, nous voulons sécuriser l'accès aux vaccins. C'est une urgence à laquelle aucun gouvernement ne peut se soustraire. Continuons ainsi avec la création du pôle public du médicament au lieu de tout recommencer à zéro !

Changeons de logique : souvenons-nous de la déclaration du directeur France de Sanofi, groupe soi-disant français : « Ceux qui paient auront le vaccin. » C'est ainsi qu'ils pensent, tout le temps ! Tout le monde a dû le recadrer. Soit nous laissons ces gens-là faire la loi, soit nous réagissons et nous devrons le faire tôt ou tard, sinon nous allons au-devant de catastrophes sanitaires, qui seront le prix à payer pour les rendements des groupes pharmaceutiques. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et GEST)

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - Pourquoi ne pas voter, tous ensemble, la création d'un pôle public du médicament, demandé par quarante organisations ?

Gilead Sciences marche dans les pas de Sanofi : ce laboratoire américain vend un traitement pour 28 700 euros alors qu'il est produit pour quelques centaines d'euros seulement : le Sovaldi, traitant l'hépatite C.

Il ne faut pas gâcher l'argent public. Un pôle public du médicament, en apportant de la transparence, éviterait de tels scandales, véritable hold-up au détriment de l'État français.

Mme Émilienne Poumirol.  - Nous ne partageons pas la position de la majorité sénatoriale, mais le constat de pénurie. Je regrette que nous n'ayons pas plus avancé sur ce texte. La création d'une solution publique de production pour les médicaments en tension est nécessaire, mais pas pour ajouter un étage administratif supplémentaire à un système déjà complexe.

Nous pouvons démultiplier nos capacités de production. Il faut plus de volonté politique pour sanctionner et non créer un système administratif encore plus compliqué.

L'État pourrait conventionner avec les sites de productions présents en France pour produire des médicaments en tension, et s'appuyer sur l'AP-HP et la pharmacie centrale des armées. Il manque aussi une volonté européenne.

M. Bernard Jomier.  - Sur le principe, nous sommes favorables à un pôle public du médicament. Nous ne sommes pas là pour faire des déclarations mais pour écrire la loi - le texte qui nous est proposé ne nous paraît pas opérant. Il faut donc accepter qu'il soit amendé et les propos que j'ai entendus tout à l'heure sont une première dans cet hémicycle...

M. Pascal Savoldelli.  - Vous aviez rigoureusement le même amendement !

M. Bernard Jomier.  - Et alors ? (Murmures à droite)

Nous avons déposé trois amendements ; la volonté de ne pas y travailler empêche d'améliorer le texte. Le Gouvernement a été dilettante dans la gestion démocratique de la covid-19. La Conférence nationale de santé n'a jamais été sollicitée. L'instance existante au sein de l'ANSM pour la transparence du médicament n'est pas une instance de démocratie sanitaire. La majorité sénatoriale aurait pu améliorer le texte pour progresser sur la démocratie sanitaire. Nous regrettons l'absence de ce petit pas en avant.

M. René-Paul Savary.  - Merci, madame Cohen, d'avoir posé ce débat. Il faut mieux définir la stratégie du médicament. Nous voulons une stratégie publique et non un pôle public du médicament.

Le PLFSS accorde 30 milliards d'euros au médicament, mais c'est la ligne budgétaire qui prend un coup régulièrement. À force de rogner les prix et de développer les génériques, nous avons asséché des laboratoires qui délocalisent. Rouvrons les discussions avec les laboratoires, tenons nos engagements et ne laissons pas les mains trop libres au Comité économique des produits de santé !

Faisons des propositions dans le cadre européen. L'innovation part, faute de fonds propres suffisants. On achète cher des médicaments conçus en France mais fabriqués ailleurs !

M. Pierre Laurent.  - Il faut voter le texte !

M. René-Paul Savary.  - Le groupe Les Républicains ne votera pas ce texte mais continuera de faire des propositions. (Quelques applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Michelle Gréaume.  - La pénurie des médicaments est un problème majeur qui ne cessera de s'amplifier si l'on ne fait rien, multiplié par 30 en vingt ans. Les pénuries se multiplient. Médicaments et produits de santé sont soumis aux logiques de l'offre. Pour réduire le coût de la main-d'oeuvre, les groupes ont délocalisé leur production : nous dépendons maintenant à 80 % de la Chine et de l'Inde ! Et le Gouvernement a refusé de réquisitionner les sites de production fermés et disposant de toute l'infrastructure de production, comme ceux de Sanofi à Romainville ou de Famar à Lyon.

Mme Laurence Cohen, rapporteure.  - Je regrette que notre proposition de loi n'ait pas abouti. Au moins, nous avons débattu... Je regrette la timidité de mes collègues ne se saisissant pas de cet outil public, au service de l'intérêt commun. Nous ne voulons pas remplacer ce qui fonctionne, y compris dans le privé.

Notre proposition est simple : l'article premier crée un pôle public du médicament ; l'article 2 instaure un Conseil national du médicament pour le piloter ; l'article 3 sur les réquisitions a fait sursauter de stupeur certains, mais c'est déjà une prérogative du Premier ministre ; l'article 4 élargit l'Observatoire citoyen pour une vraie démocratie sanitaire ; l'article 5 taxe de 1 %, seulement, les grands labos, ce qui rapporterait 260 millions d'euros. Nous sommes soutenus, entre autres, par l'UFC-Que Choisir, la Ligue nationale contre le cancer, la CGT...

J'espère que nous nous reverrons bientôt. Nous voulons que cette proposition de loi puisse être amendée avec le concours de toutes les sensibilités politiques ; le refus ne vient pas du groupe CRCE.

L'article 5 est mis aux voix par scrutin public à la demande du groupe CRCE.

Mme la présidente.  - Voici le résultat du scrutin n°45 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 279
Pour l'adoption   27
Contre 252

Le Sénat n'a pas adopté.

En conséquence, la proposition de loi n'est pas adoptée.

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales.  - Je remercie le groupe CRCE de sa constance. Merci, monsieur le ministre, de votre présence pour remplacer le ministre de la Santé. (Exclamations) Relançons l'émission « Perdu de vue » pour retrouver le ministre au Sénat ! (Rires et applaudissements au centre et à droite)