Code de la justice pénale des mineurs (Procédure accélérée)

Mme le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, ratifiant l'ordonnance n°2019-950 du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs.

Discussion générale

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice .  - Je suis heureux, après nos échanges très riches en commission, de présenter ce texte à votre Haute Assemblée.

La loi pénale, tout particulièrement quand elle concerne les mineurs, suscite toujours des débats, parfois excessifs, toujours légitimes s'ils construisent un consensus visant à améliorer le sort de nos enfants et à protéger la société dans son ensemble.

Cette réforme attendue a fait l'objet d'une large concertation avec tous les acteurs de la justice des mineurs. Elle a été enrichie à l'Assemblée nationale et par votre commission des lois, dont je salue le travail constructif - Mme Canayer a très justement pointé des enjeux importants.

Cette réforme n'est en rien une construction hâtive mais le fruit de plus de dix ans de concertation, sous quatre gardes des Sceaux et presque autant de majorités. Le Sénat y a largement contribué, notamment grâce au rapport du sénateur Amiel sur les mineurs enfermés, rendu en 2018.

J'ai la certitude que cette réforme améliorera la prise en charge des mineurs délinquants tout en respectant les grands principes de l'ordonnance de 1945 : la primauté de l'éducatif ; l'atténuation de la peine ; la spécialisation des acteurs.

Ce texte consacre une justice des mineurs plus efficace et plus prévisible pour tous. La phase judiciaire éducative interviendra plus vite, dans un cadre procédural clarifié et simplifié. La suppression de la phase de mise en examen devant le juge des enfants assure enfin une réponse éducative rapide au plus près du passage à l'acte, gage essentiel de la réactivité et de l'efficacité de la justice des mineurs.

Une justice trop longue perd toutes ses vertus pédagogiques.

Le mineur est convoqué à une première audience de culpabilité dans un délai de dix jours à trois mois, contre dix-huit mois en moyenne aujourd'hui.

La seconde audience, six à neuf mois plus tard, clôt la période de mise à l'épreuve éducative. Celle-ci peut se poursuivre jusqu'aux 21 ans du jeune et peut s'articuler autour de modules d'insertion, de réparation, de placement, de santé.

Les professionnels de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) disposeront d'un cadre d'intervention clarifié.

L'effectivité de la réponse éducative réduit le recours à la détention provisoire qui concerne 80 % des cas - excusez du peu !

Les jugements en audience rapide seront donc exceptionnels, décidés par le juge en fonction de la gravité des faits et de la personnalité du mineur.

Les garde-fous sont nombreux et le juge peut toujours revenir au principe de la césure. Avec pour conséquence une meilleure prise en charge des victimes, qui seront mieux informées et associées.

La suppression par la commission de l'intervention du juge des libertés et de la détention (JLD) ne peut qu'affaiblir l'exigence d'impartialité qui doit s'appliquer aux mineurs comme aux majeurs. L'intervention de plusieurs juges pour enfants dans les petites juridictions poserait problème : il n'y en a parfois qu'un seul. Le Gouvernement vous proposera d'y revenir.

La commission des lois est revenue sur les compétences du tribunal de police pour les contraventions des quatre premières classes. Or les acteurs confirment que l'intervention du juge des enfants doit concerner exclusivement le suivi de long terme.

Je salue votre proposition de renforcer la force normative de la définition du « discernement ». Je souscris à l'objectif poursuivi. Je suggère d'intégrer les notions de « compréhension » et de « volonté », plus objectivables que la « maturité ».

L'entrée en vigueur de la réforme est liée aux moyens, mais aussi aux modifications apportées par le Parlement.

Le Gouvernement s'est employé à donner à toutes les parties prenantes des moyens convenables : 252 emplois nouveaux d'ici 2022, 86 éducateurs pour la justice de proximité et près de 72 magistrats recrutés en 2020 dont 24 juges pour enfants.

L'inspection générale de la justice a également été missionnée pour favoriser l'adaptation des pratiques professionnelles et apporter un appui déterminant aux juridictions les plus en difficulté.

Je tiens à saluer la mobilisation exceptionnelle des acteurs de terrain pour une appropriation de la réforme dans les meilleurs délais.

La pandémie n'a pas empêché une réduction des « stocks », si l'on me pardonne ce terme malheureux, grâce à des audiences supplémentaires et à la réorientation des dossiers les plus anciens.

La grande majorité des juridictions est prête à intégrer la nouvelle procédure : seule une dizaine d'entre elles est en difficulté, et bénéfice d'un appui renforcé.

À contexte sanitaire inchangé, seule l'intervention du JLD dans la procédure conduit à des adaptations informatiques et opérationnelles qui nécessiteront un temps supplémentaire de préparation. J'espère que nous trouverons un accord sur ce point. Dans un esprit de dialogue et de cohérence, le Gouvernement prend acte de la date de report d'entrée en vigueur adoptée par votre commission.

Cette réforme est une formidable occasion de montrer notre capacité à mieux protéger la société tout en prenant en compte la situation des mineurs. La justice n'est jamais aussi grande que quand elle se préoccupe du sort des plus petits. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Agnès Canayer, rapporteur de la commission des lois .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Cette réforme était attendue. L'ordonnance du 2 février 1945, 39 fois modifiée, a perdu de sa cohérence et de son efficacité. Elle ne permet plus de répondre aux enjeux de l'intérêt de l'enfant et à l'efficacité de la lutte contre la délinquance des mineurs : dix-huit mois, en moyenne, pour juger, avec une sanction qui arrive souvent après la majorité ; 80 % des mineurs emprisonnés le sont en détention provisoire. Les chiffres parlent d'eux-mêmes...

L'ordonnance du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs, dont nous examinons le projet de loi de ratification, répond à cet objectif de modernisation qui malheureusement a pris une route sinueuse.

Les innovations apportées par le nouveau code sont avant tout procédurales. Nous regrettons le manque d'ambition de la réforme, l'occasion manquée de créer un véritable code des mineurs pour l'enfance délinquante et l'enfance en danger.

L'enfant délinquant est trop souvent victime de carences éducatives, de parents absents, du manque de repères éducatifs. Valérie Boyer a proposé des amendements pour mieux responsabiliser les parents ; je m'en félicite.

Les grands principes fondamentaux de la justice pénale des mineurs définis par l'ordonnance de 1945 sont préservés : atténuation de la responsabilité en fonction de l'âge, primauté de l'éducatif sur le répressif, spécialisation des juridictions.

La spécialisation des magistrats qui interviennent auprès des mineurs est la base d'une justice familiarisée aux questions éducatives, indissociables de la répression des mineurs. C'est pourquoi la commission a souhaité appliquer ce principe dans son intégralité. Elle a supprimé le recours au tribunal de police pour les contraventions des quatre premières classes. Le juge des enfants doit avoir une vision globale de toutes les infractions commises par le mineur pour agir le plus tôt possible.

L'introduction par les députés du JLD pour statuer sur la détention provisoire des mineurs incarcérés nous paraît une atteinte inutile au principe de spécialisation des juridictions. Certes, ce dispositif vise à mieux répondre à l'injonction du Conseil constitutionnel relative à l'impartialité du juge. Cependant, la conciliation des principes d'impartialité et de spécialisation sera plus équilibrée si le contentieux de liberté et de la détention est confié à un autre juge des enfants que celui qui statuera sur la culpabilité. C'est le sens de l'amendement adopté en commission. La spécialisation des JLD ne sera que de façade car ils sont moins nombreux que les juges des enfants : dans les petites juridictions, l'habilitation de tous les JLD effacera le principe de spécialisation. En outre, les JLD seront accaparés par le contentieux de la dignité en prison au détriment du contentieux des mineurs délinquants

Concernant les principes cardinaux, l'ordonnance de 2019 fixe l'âge pivot de la présomption de discernement à 13 ans, ce qui répond à l'article 40 de la Convention internationale des droits de l'enfant, ratifiée par la France.

L'introduction de la présomption simple est plus protectrice du mineur et de sa victime. La question du discernement est centrale et ne dépend pas seulement de la date d'anniversaire. Nous l'avons vu dans la triste affaire de la petite Evaëlle. L'introduction de la présomption simple est protectrice et donne de la souplesse en fonction de la maturité réelle du mineur. La jurisprudence de la Cour de cassation est constante s'agissant des troubles psychologiques et neuropsychologiques.

La césure de la procédure devient la règle, l'audience unique, l'exception. Le mineur sera jugé selon la procédure de mise à l'épreuve éducative qui se déroulera en trois phases : une audience de culpabilité, une période de mise à l'épreuve éducative et une audience de sanction. Cette procédure est encadrée dans des délais courts : c'est une bonne chose, mais son efficacité dépendra des moyens dont disposeront les services, notamment la PJJ. La continuité et la cohérence éducative sont au coeur de la réforme.

Cette modernisation du code est une bonne réforme, voulue et attendue. C'est pourquoi nous ne comprenons pas la méthode employée, peu respectueuse du travail parlementaire et à marche forcée. Pourquoi une ordonnance ? Le parallélisme des formes avec 1945 ne vaut pas. Le Sénat a été saisi en trois jours d'une loi de rectification de 250 articles : pourquoi tant de précipitation ? La partie réglementaire est rédigée avant même l'examen de la partie législative. Nous n'étions plus à quelques mois près...

Notre commission a voulu décaler l'entrée en vigueur de cette réforme non pour l'enterrer mais parce que les juridictions ne sont pas prêtes : la crise sanitaire et la grève des avocats n'ont pas permis d'écouler les stocks. Les magistrats attendent les réformes, mais les greffiers et les éducateurs de la PJJ ne sont pas prêts. En outre, le logiciel Cassiopée n'est pas en service ; le logiciel Parcours de la PJJ ne le sera qu'en décembre 2021. Il est pourtant essentiel au suivi éducatif.

« Beaucoup vont trop vite et nulle part ; la direction est plus importante que la vitesse » : ce proverbe doit nous guider. En sagesse, nous proposons la ratification de cette ordonnance, dont nous proposons de décaler l'entrée en vigueur au 30 septembre 2021. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)

Question préalable

Mme le président. - Motion n°1 rectifiée, présentée par Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, ratifiant l'ordonnance n°2019-950 du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs (n°292, 2020-2021).

Mme Éliane Assassi .  - Ce projet de loi nous interroge. Son examen a été perturbé, non pas par la crise sanitaire, mais par le choix du Gouvernement de procéder par ordonnance, ce qui traduit son peu de respect du Parlement.

Monsieur le ministre, vous avez fait valoir que cette réforme est le fruit de dix années de travail et de quatre gardes des Sceaux. Alors, pourquoi aller si vite pour examiner ses 277 articles, sans même disposer d'une étude d'impact ?

Le Gouvernement met le Parlement dans une nasse pour faire adopter au plus vite le maximum de mesures. Ce que ce texte prône sur le fond - traiter un maximum d'affaires au plus vite et avec le moins de moyens possibles - se retrouve dans votre manière de faire.

L'ordonnance de 1945 s'explique par le contexte de reconstruction après la Seconde Guerre mondiale. Dans le contexte actuel de pandémie, il aurait fallu considérer la jeunesse comme un atout pour surmonter la crise. Mais il y a eu une ellipse temporelle : l'héritage de 1945 a été troqué pour celui des années 2000.

Dans sa décision du 29 août 2002 sur la loi Perben I, le Conseil constitutionnel a érigé la spécificité de la justice des mineurs au rang de principe fondamental : l'éducatif doit primer sur le répressif.

La professeur Nadia Beddiar montre comment le législateur a cédé au réflexe sécuritaire pour lutter contre une délinquance juvénile qui aurait augmenté. On observe une forte responsabilisation des mineurs et l'instauration d'un schéma répressif. La loi Perben I a créé les centres éducatifs fermés (CEF), la loi Sarkozy en 2003 de nouvelles incriminations, stigmatisant la jeunesse des quartiers.

Le Gouvernement crée aujourd'hui vingt nouveaux CEF. Avec la procédure de césure, il brouille les repères temporels.

On assiste à une lente et sûre démolition des grands principes de 1945 qui, s'ils n'étaient pas magiques, témoignaient de la prise de conscience collective de l'importance d'éduquer des jeunes en devenir. La question de la justice des mineurs ne doit pas se résumer au droit : elle est aussi philosophique, historique, sociologique.

Certes, les professionnels de la justice constatent une aggravation des actes commis par les mineurs primo-délinquants. Cette évolution n'est pas sans raison, comme le démontrait Martin Levrel, commissaire divisionnaire à Roubaix lors d'un colloque à l'Assemblée nationale. Avec internet, nous sommes passés de la dégradation de véhicules pour voler un autoradio à l'organisation de bandes comme au Mexique...

Cette réforme s'ancre dans une dérive répressive qui prétend soigner des maux profonds en ne s'attaquant qu'aux symptômes.

En arguant d'une délinquance juvénile qui aurait muté pour devenir plus violente, on supplante l'éducatif par le répressif. C'est un cercle vicieux. Après les enfants apaches sous la Monarchie de juillet, le nettoyage au karcher des quartiers populaires des années 2000, on vise désormais les mineurs non accompagnés (MNA) que certains souhaiteraient voir expulsés à la moindre infraction, mesure « malheureusement inconstitutionnelle » comme l'a dit en commission notre rapporteur. Mais ce sont des enfants comme les autres ! Nous leur devons l'application de notre justice, que cela plaise ou non.

C'est toute une vision de la société qui se dégage de ce texte. L'approche répressive a de tristes jours devant elle...

« La France n'est pas assez riche d'enfants pour qu'elle ait le droit de négliger tout ce qui peut en faire des êtres sains. » Ces premiers mots de l'ordonnance de 1945, élaborée par le Conseil national de la Résistance, continueront à nous guider. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)

M. Thani Mohamed Soilihi. - La présente motion ne me semble acceptable ni sur le fond ni sur la forme. Pourquoi écarter d'un revers de la main un débat que nous avons sollicité à plusieurs reprises auprès de divers ministres de la justice ? Il doit se tenir, conformément aux engagements pris. Nous voterons donc contre cette motion (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Ne nous privons pas de ce débat. Ce texte fondamental répond à des objectifs précis et propose de réformer et de moderniser la justice des mineurs.

Avis défavorable à cette question préalable.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Sans surprise, le Gouvernement est également défavorable.

Je tiens à corriger quelques inexactitudes : le budget de formation de la PJJ n'a pas diminué (Mme Éliane Assassi s'exclame.) ; les MNA sont des mineurs comme les autres et la réforme leur sera applicable. (Mme Éliane Assassi interrompt à nouveau le ministre.) Laissez-moi vous répondre, madame la sénatrice.

Il est faux de dire qu'il n'y aurait pas eu de discussions ni de consultations. L'histoire de ce texte a démarré en 2008 avec la commission Varinard, suivie en 2009 par un avant-projet de loi soumis à de nombreuses concertations, puis en 2010 par un projet de réforme porté par l'association française des magistrats de la jeunesse, etc. Il ne faut pas non plus oublier le travail de l'Assemblée nationale et de la commission des lois du Sénat.

Ce texte n'a pas vocation à détruire l'ordonnance de 1945.

Mme Éliane Assassi. - Mais si, mais si !

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - C'est une imposture de le prétendre ! Le but de ce texte est tout le contraire, il donne la primauté à l'éducatif.

Je vais vous donner deux raisons d'aimer ce texte, qui n'est pas le mien. Aucun délai dans la procédure actuelle ne vient enserrer la mise en examen : cela génère des stocks !

Un gamin qui a commis une infraction à 16 ans sera jugé à 22 ans : cela a-t-il un sens pour lui ? Entretemps, il a changé de vie... La justice ne tourne pas à vide pour elle-même : elle doit avoir un sens éducatif.

Avant d'être sénateur, député, magistrat ou garde des Sceaux, nous sommes parents : lorsqu'on doit punir, c'est tout de suite, pas un an après ! En moyenne, les procédures connaissent leur épilogue après dix-huit mois. Cela n'a aucun sens !

Il y a logiquement une forme de consensus sur ce texte, même si je crains de ne pas avoir convaincu. Comme je n'ai pas le goût de l'effort inutile, je vais m'asseoir. (Rires sur diverses travées et applaudissements sur les travées du RDPI)

La motion n'est pas adoptée.

La séance est suspendue à 20 h 5.

présidence de Mme Laurence Rossignol, vice-présidente

La séance reprend à 21 h 35.

Discussion générale (Suite)

Mme Cécile Cukierman .  - Je ne reviendrai pas sur le contexte, ni sur le mépris du Gouvernement envers le Parlement - mépris qui s'étend à l'ensemble des professionnels de la justice, qui ne se sentent pas prêts matériellement à travailler sous l'empire de ce nouveau code, après seulement un semblant de concertation.

Le groupe CRCE proposera au demeurant un recul d'un an de l'entrée en vigueur de la réforme, dont les délais sont intenables.

« Le répressif avec les gamins, cela ne marche pas », avez-vous dit, monsieur le garde des Sceaux. Mais cela ne marche pour personne ! Il faut d'abord un temps éducatif qui ne soit pas raccourci à l'excès, faute de moyens, car le temps est une composante essentielle de la personnalité des mineurs. L'éducatif ne peut être rapide.

L'audience unique, « tout en un », est prévue pour les mineurs récidivistes, alors que ce sont eux qui ont le plus besoin de l'éducatif dans la durée. On parie sur leur échec futur au vu de leur échec passé !

Sous une couche de vernis, vous rapprochez la justice des enfants de celle des adultes. Aucune avancée sur la présomption d'irresponsabilité pénale, puisqu'une présomption simple est prévue pour les moins de 13 ans ; c'est contraire à la Convention des droits de l'enfant. Des peines pourront être prononcées en cabinet à juge unique ; les garanties des droits de la défense sont insuffisantes ; les délais de la procédure de césure sont intenables.

L'amendement de la rapporteure supprimant la compétence du tribunal de police va dans le bon sens, de même que le report de l'entrée en vigueur, mais la commission n'a pas modifié l'orientation générale du texte : aller plus vite, à moindre coût, au détriment d'une jeunesse qui a d'autres difficultés que judiciaires. Ce n'est pas notre vision de la société.

La sentence finale a peu de sens pour des êtres en construction ; ce qui compte, c'est le chemin parcouru avec eux par les magistrats, les avocats, les éducateurs.

Le Sénat s'honorerait à modifier ce texte en profondeur. Notre groupe défendra ses amendements, mais ne saurait soutenir une telle réforme. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

Mme Dominique Vérien .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Robert Badinter disait : « Un mineur, c'est un être en devenir. L'objectif premier de la justice des mineurs, c'est de les intégrer ou de les réinsérer dans la société. » Oui, il fallait revoir et codifier l'ordonnance de 1945, modifiée une quarantaine de fois, difficile à appréhender et parfois incohérente avec le code pénal. Sur le plan formel, ce projet de loi est donc bienvenu.

Les trois grands principes de l'ordonnance de 1945 sont préservés : primauté de l'éducatif sur le répressif, spécialisation des juridictions pour les mineurs, atténuation de leur responsabilité pénale.

L'équilibre est délicat entre protection de la société et prise en compte de l'intérêt de l'enfant, citoyen en devenir. Gardons-nous des jugements hâtifs sur l'enfant ; il n'a pas la même compréhension, la même temporalité qu'un adulte. Six mois, un an, deux ans pour un adulte, c'est trois ans, cinq ans, dix ans pour un enfant.

Réduire les délais et créer une césure, c'est apporter une amélioration pour l'enfant jugé mais aussi pour la victime.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Bien sûr.

Mme Dominique Vérien. - Fin 2020, 80 % des mineurs détenus l'étaient en détention provisoire, contre un tiers des adultes. La prison n'est pas le meilleur lieu pour la réinsertion... Les six à neuf mois de suivi éducatif qui suivent la première audience doivent permettre au mineur d'intégrer sa culpabilité et de comprendre la portée de ses actes, pour éviter la réitération ; puis la seconde audience statue sur la sanction.

Accélérer les procédures est une bonne chose, mais les délais seront-ils tenus ? Depuis la loi du 27 mars 2012, la PJJ est tenue de prendre en charge les mineurs cinq jours après la décision judiciaire. Mais souvent, c'est seulement pour fixer un rendez-vous un mois après, faute de moyens...

Mme Carrère vous a interrogé sur le renforcement des moyens de la PJJ ; vous avez répondu qu'il n'y avait pas plus de mineurs - mais la PJJ aura toujours les mêmes difficultés à les prendre en charge dans un temps court !

Ne pensons pas que l'intendance suivra et donnons à la justice les moyens humains et matériels - informatiques aussi - de réussir cette réforme.

La commission a fourni quelques pistes pour mieux définir le discernement et éviter les disparités entre juridictions.

En matière de juge des libertés et de la détention, Paris n'est pas la France ; il y a plus de juges des enfants que de JLD ! (M. le garde des Sceaux le conteste.) Spécialiser un JLD sur la justice des mineurs risque de revenir à estampiller chaque JLD de cette spécialisation ; les juges des enfants, eux, préféraient qu'un autre juge des enfants statue de la liberté ou de la détention du mineur.

Monsieur le ministre, j'entends que vous voulez donner du temps à l'application de la réforme... à condition qu'on vous rende le JLD ! (M. le garde des Sceaux sourit.) Faites confiance aux juges, en leur donnant le temps de se préparer à cette réforme.

Le groupe de l'Union centriste votera ce texte en étant vigilant sur son application. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

Mme Laurence Harribey .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Monsieur le ministre, vous avez dit en audition : « Je ne connais pas de réforme qui ne suscite pas de larges oppositions. » On peut vous opposer le proverbe chinois : « Qui réforme, déforme. »

Que retenir de ce travail ? Un consensus sur la nécessité de la réforme, mais des blocages importants.

Le groupe SER souscrit au principe de restaurer de la cohérence d'un corpus législatif souvent modifié, et à la réaffirmation des trois grands principes de l'ordonnance de 1945, qui sont bien dans ce texte. Il souscrit aussi à la présomption d'irresponsabilité avant 13 ans, à l'accélération du jugement via une procédure en deux temps, et à la volonté de remettre la victime au centre.

Mais à y bien regarder, l'impératif de la prise en compte de la personnalité et du contexte de vie du mineur s'effacent devant la notion de trouble à l'ordre public, à sanctionner pénalement.

De « Pourquoi punir ? », on passe à « Comment punir ? ». De 2001 à 2008, huit textes, dont sept lois, ont été mis en oeuvre avec trois tendances : renforcement du volet répression, alignement sur la justice des adultes, renforcement des pouvoirs des parquets et de la police en lien avec les autorités politiques locales. Les chiffres sont éloquents : 93 % des affaires impliquant des mineurs connaissent une réponse pénale, contre 88 % pour les majeurs ; 82 % des mineurs incarcérés le sont en détention provisoire.

Nous avons d'abord une divergence sur la méthode des ordonnances ; ce code méritait mieux. Ensuite, le texte privilégie la répression au détriment du temps éducatif. Les délais inscrits dans le texte ne sont qu'indicatifs. L'article 12-13 de l'ordonnance de 1945 impose un délai de cinq jours ; s'il n'est pas tenu, c'est faute de moyens.

La place trop large laissée aux procédures d'exception conduira fatalement à un durcissement des mesures prononcées.

Autre insuffisance, les moyens qui déterminent la crédibilité de la réforme.

Troisième divergence, la faisabilité de la réforme en contexte de crise sanitaire, mise en doute par la quasi-totalité des acteurs. Dire que tout sera prêt à temps relève de la méthode Coué !

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Pas du tout !

Mme Laurence Harribey. - Le groupe SER aura donc trois points de vigilance : l'entrée en vigueur ; le caractère irréfragable de l'irresponsabilité pénale avant 13 ans, seule mesure en conformité avec les accords internationaux ; enfin, l'audience unique pour les réitérants, qui se confond avec la comparution immédiate et porte atteinte tant à la spécialisation des juridictions qu'à la primauté de l'éducatif.

Cette réforme est donc essentiellement procédurale et concentrée sur le volet pénal, alors qu'on aurait pu explorer la déjudiciarisation pour ce qui est des incivilités, et l'association des autorités locales à la réinsertion. Un mineur en conflit avec la loi doit être considéré avant tout comme un enfant à protéger.

Le groupe SER espère que ses amendements feront évoluer le texte dans le bon sens. (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. Pierre Médevielle .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP) L'ordonnance de 1945 a fait l'objet de près de quarante modifications. L'idée de discernement y est centrale, autant que l'impératif de remettre les mineurs dans le droit chemin.

Un principe a toujours guidé notre réponse pénale : favoriser les mesures éducatives, avec un objectif d'insertion ou de réinsertion. Nous nous retrouvons tous autour de cette philosophie.

Cette réforme est nécessaire, mais la mener par ordonnance, en procédure accélérée, contraint le débat parlementaire. La réforme doit cependant se faire, pour respecter nos engagements nationaux et rendre une justice plus efficace et plus juste.

Les mineurs ne sont pas des justiciables comme les autres ; ce qui justifie la spécialisation des juridictions, que la commission des lois a accrue.

Nous nous réjouissons que la phase de mise en examen soit supprimée, que la procédure satisfasse pleinement au principe d'impartialité, que les mineurs entendus en audition libre soient accompagnés d'un avocat, que le recours à la visioconférence pour les audiences concernant leur détention provisoire soit proscrit.

Les mineurs ont besoin d'une justice rapide. La réduction des délais est une bonne chose. Nous saluons aussi la simplification de la procédure et la décomposition en quatre modules des mesures éducatives, pour mieux s'adapter à la personnalité du mineur.

La commission des lois a reporté la date d'entrée en vigueur de cette réforme au 30 septembre 2021. Notre groupe soutiendra le projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)

Mme Esther Benbassa .  - « La France n'est pas assez riche de ses enfants pour en négliger un seul.» Gardons cette phrase du préambule de l'ordonnance de 1945 à l'esprit.

Comment douter de la philosophie initiale ? Une justice spécifique qui vise, au-delà de la sanction, à protéger les mineurs d'eux-mêmes et des pièges et embûches des sociétés modernes. Il s'agit d'une justice bâtisseuse et non punitive, pour des personnes en pleine construction.

Ce projet de réforme a été engagé par le Gouvernement en mars 2019 avec l'objectif affiché d'une justice des mineurs « plus lisible et efficace ». Il n'est pas atteint. Les syndicats de magistrats et les chefs de juridictions ont considéré que le délai d'entrée en vigueur était trop court mais vous avez accepté un report : dont acte.

Le rapprochement de la justice des mineurs de celle des majeurs est problématique. Nous demandons la suppression de l'article L. 121-7 qui prévoit une exception à l'excuse de minorité et de l'article L. 413-1 qui prévoit la possibilité d'une retenue par les officiers de police judiciaire d'un mineur de 10 à 13 ans pour une durée allant jusqu'à douze heures.

Le juge des enfants pourra déclarer un mineur de 13 ans responsable s'il a fait preuve de discernement : c'est inacceptable, juridiquement et moralement. La présomption d'irresponsabilité doit être irréfragable en deçà du seuil de 14 ans, retenu dans plusieurs pays. Notons que la France n'a jamais mis en oeuvre le seuil d'irresponsabilité pénale prévu par la Convention internationale des droits de l'enfant.

Enfin, nous refusons le bracelet électronique pour les mineurs. Plutôt que d'être coercitive, la justice a surtout besoin de moyens. (M. François Bonhomme s'exclame.)

Nous tenterons d'amender ce texte mais si nous n'y parvenons pas, nous voterons contre. (Applaudissements sur les travées du GEST)

M. Thani Mohamed Soilihi .  - « La question de l'enfance coupable est l'une des plus urgentes de l'époque », indiquait l'exposé des motifs de l'ordonnance de 1945. Cette phrase conserve son actualité : en la lisant, il m'arrive l'image de ces attaques de jeunes armés dans mon département de Mayotte, et du meurtre, ce week-end, de trois personnes dont deux jeunes de 14 et 16 ans.

La formule de « l'enfance traduite en justice », utilisée en 1945, condense les principaux axes de la réforme actuelle, fruit de dix années de travaux.

Près de quarante réformes successives ont rendu l'ordonnance de 1945 peu lisible. Pour conformer la France à ses engagements internationaux, le code introduit une présomption simple de non-discernement en dessous de 13 ans, ce qui permettra un débat sur le discernement du mineur ; il accélère la réponse pénale en supprimant la phase d'instruction préalable.

La nouvelle procédure de mise à l'épreuve éducative renforcera le sens de la réponse pénale pour tous les acteurs, tant le mineur que pour la victime qui bénéficiera d'une réparation plus rapide.

L'encadrement du recours à la détention provisoire du mineur et la mesure éducative judiciaire unique marquent bien la nécessité de la réponse pénale et du relèvement éducatif du mineur, qui sont un défi pour notre société.

Je salue le travail de la rapporteure. Vous avez maintenu la majorité des apports de l'Assemblée nationale tels que la référence à l'intérêt de l'enfant dès l'article préliminaire, le renforcement des garanties dans le cadre de l'audition libre, l'interdiction de la visioconférence pour le placement en détention provisoire ou encore la simplification du cumul des mesures éducatives et des peines. Certaines de ces modifications étaient portées par le garde des Sceaux.

Vous avez aussi enrichi le texte, par exemple en proposant une définition de la notion de discernement.

Les débats vont se poursuivre ce soir sur des points plus discutés comme la compétence du tribunal de police pour les contraventions des quatre premières classes ou la compétence du JLD pour le placement en détention provisoire avant l'audience de culpabilité.

Le groupe RDPI espère un accord entre les deux chambres et votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Maryse Carrère .  - Le groupe RDSE soutient notre collègue Annick Billon qui a fait l'objet d'un traitement injustifié et injustifiable dans les médias sur les réseaux sociaux. (Applaudissements sur la plupart des travées) Son texte, que nous avons tous voté, est une avancée juridique incontestable et les polémiques ne nous empêcheront pas de poursuivre avec elle notre travail de protection des enfants.

La tragédie de la petite Evaëlle, qui s'est suicidée à l'âge de 10 ans, ou le lynchage du jeune Yuriy résonnent en nous et montrent que l'enfance n'est pas toujours synonyme d'insouciance. Les victimes ont droit à une réparation. Mais il faut aussi éviter la récidive.

L'ordonnance du 2 février 1945 a posé des principes cardinaux incontestables. Mais la société a évolué : l'ordonnance doit aussi évoluer. L'instauration d'une césure, visant à raccourcir les délais entre le prononcé d'une peine et son application, est bienvenue. Beaucoup de jeunes sont sanctionnés après leur majorité...

Le sujet de la double audience devra s'accompagner de moyens. Je suis plus réservée sur l'audience unique qui pourrait concerner jusqu'à 20 % des dossiers et mettrait à mal le principe de spécialisation des juridictions.

La définition d'un âge du discernement est un exercice d'équilibriste. Le fixer à 13 ans nous permettra de remplir nos obligations à l'égard de la Convention internationale des droits de l'enfant.

Les centres éducatifs fermés (CEF) sont une solution mais ne peuvent être l'alpha et l'oméga de notre politique éducative.

On peut écrire de bonnes lois mais si la pratique est défaillante, l'effort sera vain. Le RDSE est favorable à un report de l'entrée en vigueur comme le propose notre rapporteur. Il faudra davantage de magistrats et de greffiers... Le budget de la justice augmente certes de 8 % mais les budgets de formation sont en baisse, ce qui suscite des interrogations.

Le groupe RDSE, dans sa majorité, votera le texte (Applaudissements sur les travées du RDSE)

M. Philippe Bas .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Je lisais le texte original de présentation de l'ordonnance de 1945, signé du général de Gaulle : « La France n'est pas assez riche d'enfants pour qu'on en perde un seul. » Il est bon de garder cette inspiration dans une période si difficile. (Mme Éliane Assassi approuve.)

La délinquance des mineurs reste inquiétante. En 2018, 9 200 condamnations de mineurs pour des agressions étaient prononcées ; 110 pour homicides ou blessures involontaires ; 6 400 pour coups ou violences volontaires ; 23 000 condamnations pour atteintes aux biens, et 5 600 pour trafic de stupéfiants.

La part des mineurs dans la délinquance est passée de 22 % à 18 % des mis en cause mais elle demeure à un niveau beaucoup trop élevé.

Les principes de l'ordonnance de 1945 demeurent pertinents mais la pratique de la justice des mineurs n'est pas à la hauteur des ambitions de 1945.

De nouveaux outils sont apparus, comme les CEF créés par Dominique Perben, sous Jacques Chirac, qui sont un réel succès : seuls 10 % des mineurs qui y sont affectés seront finalement incarcérés.

L'insuffisance des places d'accueil est cependant réelle. La loi de programmation de 2018 prévoit la création de vingt centres mais seulement quatre ouvriront avant la fin du quinquennat.

Les travaux d'intérêt général (TIG) ont été interdits en 1983, réformés en 1994, mais n'apportent pas les résultats escomptés. Il y a treize mois d'attente entre le prononcé et l'exécution du travail... C'est beaucoup trop long !

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Certes !

M. Philippe Bas. - Tous gouvernements confondus, nous ne nous sommes pas donné les moyens de nos ambitions.

Les projets sont tardifs : il faut dix-neuf mois pour qu'une condamnation soit prononcée, le mineur est souvent devenu majeur... Certains sont sortis de la délinquance, d'autres sont devenus récidivistes ou sont en détention provisoire - leur nombre a augmenté de 40 % entre 2015 et 2019.

Révisée 39 fois, l'ordonnance de 1945 est devenue inaccessible aux magistrats, aux avocats - sauf aux meilleurs d'entre eux, évidemment, monsieur le ministre (Sourires) - aux délinquants et à leurs victimes. Une réforme était devenue indispensable.

Au-delà de la nécessaire codification, qui relève bien d'une ordonnance, il fallait réformer les règles de la justice des mineurs, dans le respect des principes de 1945, avec quelques améliorations. Ce sont des choix politiques essentiels, dont la Représentation nationale doit délibérer : c'est pourquoi nous refusons le principe de l'habilitation à légiférer par ordonnance pour la réforme.

Nous sommes d'accord avec la césure, avec la mise à l'épreuve éducative, avec la simplification des sanctions, avec le renforcement du rôle du juge pour enfant, avec la limitation de la détention provisoire.

Notre commission a cependant voulu trois types d'amélioration : la précision de la notion de discernement, la spécialisation des acteurs en renforçant le rôle du juge des enfants, qui devra statuer sur la détention provisoire, et enfin, monsieur le garde des Sceaux, le report de la mise en oeuvre de la réforme. Vous aurez trop de mal à respecter les délais que vous vous êtes assignés.

Il y a un effort de recrutement de magistrats, de greffiers, mais cela ne produira pas ses effets en quelques semaines.

Le groupe Les Républicains soutient le travail de la commission pour améliorer ce texte dont les principes nous paraissent conformes à ce que nous attendons de la justice des mineurs. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC)

La discussion générale est close.

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

Mme Esther Benbassa .  - L'article L. 311-2 du nouveau code de la justice des mineurs prévoit que le mineur sera accompagné par un adulte dans les audiences ; si ce n'est pas un représentant légal, il revient au procureur de la République de désigner un adulte approprié. Or il y a beaucoup de difficultés sur ce dernier point : personne ne veut tenir ce rôle, ni les administrateurs ad hoc, ni les éducateurs de la PJJ, ni les avocats.

Les mineurs isolés sont victimes de réseaux et de trafic d'êtres humains ; il faut mieux les accompagner. C'est le sens de la demande du rapporteur de l'Assemblée nationale, Jean Terlier.

Mme la présidente.  - Amendement n°3, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Supprimer cet article.

Mme Cécile Cukierman.  - Le groupe CRCE est défavorable au principe des habilitations, à plus forte raison sur un texte comme celui-ci. L'Assemblée nationale a dû extraire des parties de l'ordonnance pour pouvoir les amender.

En décembre, des magistrats rappelaient dans une tribune du Monde que l'enjeu était moins de changer la loi que de l'appliquer.

Ce texte est en débat depuis plusieurs années, mais pour autant la concertation n'a pas eu lieu.

Mme Agnès Canayer, rapporteur.  - La commission regrette elle aussi qu'il n'y ait pas de véritable code de l'enfance, et que l'on nous soumette seulement une loi de ratification.

Mais le texte est là, et c'est un bon texte, qui apporte une réponse plus rapide à la question des mineurs délinquants ; et il deviendra un excellent texte avec les apports de la commission.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Je me suis longuement expliqué sur ce point ; sans surprise, avis défavorable.

Mme Laurence Harribey.  - Le groupe SER veut un débat, même s'il estime que le texte n'est ni bon ni très bon ; aussi ne voterons-nous pas cet amendement.

L'amendement n°3 n'est pas adopté.

L'article premier est adopté.

ARTICLE ADDITIONNEL après l'article premier

Mme la présidente.  - Amendement n°4 rectifié, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article préliminaire du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n°2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Un enfant ou un adolescent s'entend de tout être humain, âgé de moins de dix-huit ans. »

Mme Cécile Cukierman.  - Le groupe CRCE préfère le terme d'enfant à celui de mineur. Nous le définissons, car le choix des mots est important. Un mineur n'est pas un mini-majeur, mais un enfant avec des droits particuliers et qui mérite une protection. Tout enfant en conflit avec la loi est un enfant en danger.

Mme Agnès Canayer, rapporteur.  - La justice pénale des mineurs doit être une justice humaine ; mais la notion de mineur est clairement définie à l'article 388 du code civil. Retrait ou avis défavorable.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux.  - Il y a une définition juridique du mineur, pas de l'enfant ou de l'adolescent. Avis défavorable.

L'amendement n°4 rectifié n'est pas adopté.

ARTICLE PREMIER BIS A

Mme la présidente. - Amendement n°5, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Remplacer la date :

30 septembre 2021

par la date :

31 mars 2022

Mme Cécile Cukierman. - Monsieur le garde des Sceaux, les parlementaires ne sont pas seuls à vous le dire : le système judiciaire n'est pas en mesure d'appliquer ce texte au 31 mars. Une année supplémentaire ne sera pas de trop. L'année 2020 a vu l'engorgement de nombreuses juridictions, avec la mobilisation des avocats, puis le confinement et la crise sanitaire. Il faut un an pour revenir à la normale.

Mme la présidente. - Amendement identique n°49, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

M. Jean-Pierre Sueur. - C'est parce que nous voulons que la réforme réussisse, malgré nos critiques, que nous proposons un report d'un an.

Mme Carrère alertait, dans son avis au nom de la commission des lois sur le budget 2020 de la PJJ, sur le risque général d'une mise en oeuvre formelle et non pratique de la réforme.

Les représentants des magistrats, avocats, éducateurs spécialisés, des services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP), de la PJJ, nous disent tous qu'il faut du temps.

Le recours à l'ordonnance, la procédure accélérée - généralisée pour tous les textes sauf le projet de loi bioéthique - la parution anticipée des textes réglementaires, tout cela relève de la précipitation. Nous défendons une réforme efficace.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - La commission des lois a adopté un report de six mois ; un an, cela démobiliserait les acteurs. Avis défavorable.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Madame Cukierman, n'obtenant pas la suppression, vous essayer le dilatoire...

Le Gouvernement n'a pas préparé cette réforme pour qu'elle ne marche pas. Accordez-nous au moins le crédit de la cohérence !

Ce n'est pas la direction des affaires criminelles et des grâces (DACG) mais la direction de la PJJ qui a porté la réforme, expertisée par l'inspection générale de la justice. Celle-ci a évalué le niveau de préparation des juridictions. Dix juridictions sont en fragilité ; nous avons apporté les moyens nécessaires. J'avais donc la certitude que la réforme pouvait être mise en oeuvre dans les délais. Mais ensuite, le texte a évolué, avec l'intervention du JLD. Cela a introduit un délai supplémentaire.

C'est la raison pour laquelle je ne m'oppose pas à un report de la date - cela ne traduit aucune impréparation. Encore faut-il qu'il ne nous amène pas aux calendes grecques. Par conséquent, avis défavorable aux deux amendements.

Mme Cécile Cukierman. - Je ne suis pas marchande de tapis mais sénatrice, monsieur le garde des Sceaux. Mon engagement politique détermine les amendements que je porte, à l'exclusion de toute autre considération.

Le groupe CRCE est opposé au recours de plus en plus systématique aux ordonnances par les gouvernements successifs. D'où notre amendement de suppression de l'article premier.

Les élus échangent, auditionnent, téléphonent, reçoivent des courriers ; ils s'appuient sur des collectifs, des associations, des groupements professionnels, des syndicats. Vous savez tout comme moi qu'il y a un débat sur la faisabilité, sur les retards informatiques, les engagements. Nous payons aussi le retard pris en matière de moyens.

Cet article n'est donc pas lié aux précédents. Pas plus que les suivants à celui-ci.

Les amendements identiques nos5 et 49 ne sont pas adoptés.

L'article premier bis A est adopté, de même que l'article premier bis.

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article premier bis

Mme la présidente. - Amendement n°24 rectifié, présenté par Mme Harribey et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l'article préliminaire du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n°2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, les mots : « rechercher leur relèvement éducatif et moral » sont remplacés par les mots : « garantir le droit à l'éducation ».

Mme Laurence Harribey. - Le principe fondamental de la primauté de l'éducatif est réaffirmé ; aussi, pourquoi conserver le terme de « relèvement », qui renvoie à des notions quelque peu obsolètes et n'est pas suffisamment explicite ?

Mme la présidente. - Amendement n°63 rectifié, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.

Après l'article 1er bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l'article préliminaire du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n°2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, les mots : « rechercher leur relèvement éducatif et moral par des mesures » sont remplacés par les mots : « recourir prioritairement à des mesures éducatives ».

Mme Esther Benbassa. - Selon des études, la délinquance juvénile n'a pas augmenté depuis quinze ans. Pourtant, le nombre d'enfants privés de liberté n'a jamais été aussi élevé en France que depuis ces deux dernières années. Plutôt que d'être rendue plus coercitive, la justice des mineurs doit revenir à son sens initial : une justice spécifique qui comprend et traite des situations particulières de délinquance juvénile plutôt que de chercher systématiquement à réprimer.

Cet amendement consacre dans l'article préliminaire la primauté du recours aux mesures éducatives.

L'ordonnance de 1945 ne saurait être réformée sans retour à une certaine bienveillance, ont écrit une cinquantaine de spécialistes dans une tribune au Monde du 12 février 2019.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - J'estime au contraire que la formule de « relèvement éducatif et moral » est porteuse d'avenir.

Celle que vous proposez est quelque peu réductrice : accompagner les jeunes, c'est leur apprendre le respect des règles de la vie en société... (M. François Bonhomme s'exclame.) Avis défavorable à l'amendement n°63 rectifié. Avis défavorable également à l'amendement n°24 rectifié. Le relèvement éducatif et moral des mineurs est le but de la justice pénale des mineurs, les mesures éducatives sont le moyen pour atteindre ce but. Il me semble, madame Benbassa, que vous confondez les deux.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Avis défavorable pour les mêmes raisons. Le droit à l'éducation est redondant car déjà garanti aux enfants. Le relèvement éducatif et moral, quand bien même il vous paraît obsolète, porte plus de sens : c'est le but des mesures éducatives et parfois des mesures punitives.

Les amendements nos24 rectifié et 63 rectifié ne sont pas adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°47 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 11-1 du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n°2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le parquet, eu égard aux faits et à la personnalité du jeune, prend les mesures d'assistance éducative qui s'imposent ou s'assure auprès des autorités territoriales qu'un suivi social est mis en place. »

M. Jean-Pierre Sueur. - Cet amendement s'inscrit pleinement dans l'esprit, la lettre et le fond de l'article 40 de la Convention internationale des droits de l'enfant dont la France est signataire, qui déjudiciarise autant que faire se peut les réponses à l'enfant en conflit avec la loi.

La Convention internationale des droits de l'enfant exige qu'un seuil d'âge soit adopté par les États en deçà duquel un enfant ne peut être tenu pour délinquant ; le droit français jusqu'ici se contente de renvoyer aux grands principes du droit pénal qui reposent sur la notion de discernement, généralement estimé à 7 ou 8 ans.

L'ordonnance du 19 septembre 2019 précise qu?avant 13 ans, un enfant ne peut être tenu pour délinquant, faute de discernement ; c'est une avancée réelle, mais elle ouvre la possibilité au parquet d'apporter sous contrôle du juge la preuve contraire. Il ne s'agit que d'une présomption relative. La France ne répond toujours ni aux attentes du Comité des experts de l'ONU ni aux exigences de la Convention internationale des droits de l'enfant.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. Inscrire la primauté de l'éducatif est redondant.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Même avis

L'amendement n°47 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement n°25 rectifié est retiré.

ARTICLE PREMIER TER A

Mme la présidente.  - Amendement n°62 rectifié, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.

Au début

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  Le second alinéa de l'article L. 11-1 du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n°2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est ainsi rédigé :

« Les mineurs de moins de quatorze ans ne sont pas responsables pénalement des actes qu'ils ont pu commettre. Ils ne peuvent faire l'objet que de mesures d'assistance éducative. »

Mme Esther Benbassa. - Cet amendement instaure une présomption irréfragable d'irresponsabilité pénale pour les mineurs de moins de 14 ans au lieu d'une présomption simple de non-discernement des enfants de moins de 13 ans.

La France demeure en contradiction avec la Convention internationale des droits de l'enfant. Il convient de tenir compte de la maturité émotionnelle, mentale et intellectuelle de l'enfant, dont la personnalité est en construction.

Nous proposons donc de retenir le seuil de 14 ans, déjà appliqué dans plusieurs pays européens, comme l'Espagne, l'Allemagne et l'Italie.

Mme la présidente.  - Amendement n°6, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Au début

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

....  -  La première phrase du second alinéa de l'article L. 11-1 du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n°2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est supprimée.

Mme Cécile Cukierman. - Nous proposons de renforcer la présomption simple par une présomption irréfragable car chacun a le droit à un procès équitable : l'enfant doit pouvoir participer à son propre procès. Cela a été rappelé clairement en 2018 par Jacques Toubon, alors Défenseur des droits. Pour qu'un enfant bénéficie d'un procès équitable, il doit avoir pleinement la capacité de comprendre son procès. Or en dessous d'un certain âge, l'enfant comprend difficilement la procédure. Claire Hédon, qui a succédé à Jacques Toubon, souligne que la notion de responsabilité continue de reposer sur celle de discernement, qui n'est pas définie clairement. Elle laisse place à une grande diversité de pratiques et demeure floue, alors qu'elle est centrale.

Mme la présidente.  - Amendement n°50 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Au début

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

....- La première phrase du second alinéa de l'article L. 11-1 du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n°2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est ainsi rédigée : « Les mineurs de moins de treize ans ne sont pas responsables pénalement des actes qu'ils ont pu commettre. »

M. Jean-Pierre Sueur. - La Convention internationale des droits de l'enfant demande à chaque État partie de fixer un âge minimum en dessous duquel un mineur ne peut être poursuivi pénalement. Or la rédaction actuelle de l'ordonnance ne permet pas de répondre à cette exigence car la présomption d'irresponsabilité pénale pour les mineurs de moins de 13 ans est simple et non pas irréfragable.

Le comité des droits de l'enfant de Genève a été très clair : il ne peut y avoir de poursuites pénales mais seulement des mesures éducatives, qui ne sont pas cosmétiques mais réelles.

Par ailleurs, prévoir une irresponsabilité pénale pour les mineurs de moins de 13 ans ne signifie pas une absence de réponse.

Enfin à partir de 13 ans, la responsabilité pénale doit être présumée et liée à la capacité de discernement qu'il appartient au magistrat de déterminer.

Mme la présidente.  - Amendement n°51 rectifié, présenté par Mme V. Boyer.

Au début

Insérer deux paragraphes ainsi rédigés :

....  -  Le second alinéa de l'article L. 11-1 du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n°2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est ainsi modifié :

1° À la seconde phrase, les mots : « d'au moins treize » sont remplacés par les mots : « de treize à seize » ;

2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Les mineurs de seize à dix-huit ans sont pénalement responsables. »

....  -  Au premier alinéa de l'article 122-8 du code pénal, les mots : « capables de discernement » sont remplacés par les mots : « âgés de dix à seize ans capables de discernement et ceux âgés de seize à dix-huit ans ».

Mme Valérie Boyer. - Il s'agit de répondre à la question des mineurs ultra-violents et de « l'ensauvagement de la société », terme employé par le ministre de l'Intérieur et parfois contesté. Les mineurs qui ont frappé Marin, ce jeune homme qui avait courageusement pris la défense d'un couple qui s'embrassait, jusqu'à lui causer un handicap permanent, avaient été interpellés dix-huit fois...

Cet amendement instaure un âge minimum de la responsabilité pénale des mineurs à partir de 16 ans, tout en conservant l'exigence morale du discernement en deçà.

En effet, le code de la justice pénale des mineurs prévoit une présomption de responsabilité pénale à partir de 13 ans et une présomption d'irresponsabilité en deçà, afin de rapprocher le droit français des règles de droit international.

Cet amendement complète le dispositif en rendant systématiquement responsables les mineurs de 16 à 18 ans, tout en maintenant une présomption de responsabilité pour les mineurs de 13 à 16 ans.

Mme la présidente. - Amendement n°52 rectifié ter, présenté par Mmes V. Boyer, Deroche et Belrhiti, M. Bouchet, Mme Dumont, MM. Cadec et Panunzi, Mme Dumas, MM. Bascher et B. Fournier, Mme F. Gerbaud, M. Klinger, Mme de Cidrac et MM. Belin, Brisson, Bonhomme, Le Rudulier et Boré.

Au début

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

....- Le second alinéa de l'article L. 11-1 du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n°2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est ainsi modifié :

1° À la seconde phrase, les mots : « d'au moins treize » sont remplacés par les mots : « de treize à seize » ;

2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Les mineurs âgés de seize à dix-huit ans sont capables de discernement et pénalement responsables. »

Mme Valérie Boyer. - Amendement de repli.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Ces amendements posent la question de l'âge pivot, qui ne fait pas consensus, et qui va de 8 à 18 ans selon les pays de l'Union européenne.

L'âge de 13 ans est reconnu dans le droit positif français. Cela paraît cohérent avec le développement de l'enfant.

La présomption simple permet de faire confiance aux juges. Les juges des enfants pourront adapter la réponse pénale.

Il ne faut pas légiférer en fonction de situations précises mais s'agissant d'Evaëlle, les jeunes avaient moins de 13 ans - la question du discernement est très clairement posée. Avis défavorable aux amendements nos62 rectifié, 6 et 50 rectifié.

La création de trois seuils ne me semble pas une mesure de simplification. Faisons confiance au juge. Aujourd'hui, celui-ci peut renverser l'excuse de minorité. Avis défavorable aux amendements nos51 rectifié ter et 52 rectifié ter.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Même avis. Le mineur de 13 ans ne peut pas faire l'objet d'une mesure coercitive. Faisons confiance au juge des enfants : nous souhaitons une réponse judiciaire adaptée en fonction de l'âge et du discernement. Dans quelques instants, je défendrai un amendement pour mieux définir celui-ci, en m'appuyant sur la jurisprudence de la Cour de cassation.

Les amendements nos62 rectifié, 6 et 50 rectifié ne sont pas adoptés.

Les amendements nos51rectifié ter et 52 rectifié ter sont retirés.

Mme la présidente. - Amendement n°27, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Les mineurs sont capables de discernement lorsqu'ils ont voulu et compris l'acte. »

Mme Laurence Harribey. - Cette définition du discernement reprend l'arrêt Laboube de 1956 de la Cour de cassation.

Les mineurs doivent également être en mesure de comprendre la procédure applicable et ses enjeux.

Mme la présidente. - Amendement n°71 rectifié, présenté par M. Mohamed Soilihi et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Alinéa 2

Remplacer les mots :

dont la maturite? lui permet de comprendre l'acte qui lui est reproche? et sa porte?e

par les mots :

qui a compris et voulu son acte et qui est apte a? comprendre le sens de la proce?dure pe?nale dont il fait l'objet

M. Thani Mohamed Soilihi. - La rapporteure a utilement introduit une définition du discernement. La jurisprudence de 1956 s'appuie sur la compréhension de l'acte et la volonté de le commettre. L'amendement intègre une référence expresse à la volonté du mineur et à sa compréhension de la procédure pénale.

Mme la présidente. - Amendement identique n°75, présenté par le Gouvernement.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Cet amendement précise la définition du discernement. Le Gouvernement a choisi de recopier servilement un arrêt de la Cour de cassation du 13 décembre 1956, qui fait référence depuis lors. Il faut que le mineur ait compris et voulu son acte, et qu'il soit apte à comprendre le sens de la procédure pénale dont il fait l'objet.

Ce volet est extrêmement important car si la réponse pédagogique de la justice n'est pas comprise, elle n'a aucun sens et tourne à vide.

Cette définition est plus précise que la notion de maturité, dont on a beaucoup parlé dans cet hémicycle ces derniers jours.

Mme la présidente. - Amendement n°70, présenté par M. Mohamed Soilihi et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Alinéa 2

1° Après les mots :

lui permet de

insérer les mots :

vouloir et

2° Supprimer les mots :

et sa portée

M. Thani Mohamed Soilihi. - Défendu.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Nous tenons à introduire dans le code de la justice pénale des mineurs une définition du discernement, pierre angulaire de la responsabilité du mineur. La commission des lois avait bâti une définition autour de la notion - certes peu juridique - de maturité.

L'arrêt Laboube fait bien évidemment référence. Mais il nous paraît important que le jeune comprenne la sanction, plus même que la procédure. Avis défavorable à l'amendement n°27 car il manque la notion d'aptitude à comprendre. Avis favorable aux amendements identiques nos71 rectifié et 75.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Avis favorable à l'amendement n°71 rectifié. Avis défavorable aux amendements nos27 et 70.

Mme Laurence Harribey. - Le nôtre n'est pas incomplet : il comporte bien la notion de compréhension.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Il s'agit de l'aptitude à comprendre le sens de la procédure et pas seulement des actes commis : les amendements nos71 rectifié et 75 sont donc plus complets.

L'amendement n°27 est retiré.

Les amendements identiques nos71 rectifié et 75 sont adoptés.

L'amendement n°70 est retiré.

L'article premier ter A, modifié, est adopté.

ARTICLE PREMIER TER B

Mme la présidente. - Amendement n°74, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Nous arrivons à la compétence du tribunal de police pour statuer sur les contraventions des quatre premières classes s'agissant des mineurs.

Je connais la position de la commission des lois mais ne désespère pas de vous convaincre.

Ces contraventions de faible gravité ne nécessitent ni l'intervention d'un magistrat spécialisé, ni la mise en place d'un suivi éducatif prolongé. Il s'agit le plus souvent de délits routiers, un défaut de port du casque par exemple. Ce ne sont pas les premiers signes d'une délinquance naissante.

La commission des lois s'inquiète de l'engorgement des tribunaux pour enfants, or les mineurs représentent 2,5 % des justiciables jugés par les tribunaux de police : c'est 5 000 personnes.

Je demande avec insistance que le Sénat réfléchisse à deux fois avant d'attribuer tout ce contentieux aux juges pour enfants qui n'en ont pas besoin...

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Les arguments de cette plaidoirie en faveur du tribunal de police sont contestables. Nous tenons à la cohérence de la spécialisation de la justice des mineurs. Les quatre premières classes sont souvent des infractions routières, mais pas seulement. Il y a aussi des violences, prémices d'une délinquance probable.

Le juge des enfants doit pouvoir, dès la plus petite infraction, mettre en place des actions éducatives pour éviter que le jeune n'entre dans une spirale, et avoir une vision globale.

Nous entendons que cela pourrait déstabiliser l'organisation, mais le report de la réforme laisse aux juridictions le temps de s'y préparer. Avis défavorable.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Il ne s'agissait pas d'une plaidoirie pour le tribunal de police mais pour le juge des enfants.

La plupart des contraventions sont forfaitisées et payées par les parents. Vous souhaitez que la justice des enfants fonctionne bien. Il n'est pas utile de surcharger le tribunal pour enfants avec ces 5 000 dossiers supplémentaires.

La protection des mineurs est assortie de toutes les garanties au tribunal de police, avec notamment l'intervention de l'avocat.

L'amendement n°74 n'est pas adopté.

Mme la présidente. - Amendement n°68 rectifié, présenté par M. Mohamed Soilihi et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Rédiger ainsi cet article :

À la première phrase du premier alinéa de l'article L. 121-7 du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n°2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, les mots : «, le tribunal de police » sont supprimés.

M. Thani Mohamed Soilihi. - Je suis conscient que la commission a tranché mais j'insiste, avec cet amendement de repli qui rétablit la compétence du tribunal de police, en se limitant, à la différence de celui du Gouvernement, au cadre de l'ordonnance de 1945. La charge de travail du juge des enfants est un réel problème.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable par cohérence.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Quand il s'agit de violences, madame le rapporteur, les parquets utilisent le passage devant le tribunal de police comme alternative aux poursuites, j'avais négligé de le préciser... Retrait ?

L'amendement n°68 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente. - Amendement n°10, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 5

Rédiger ainsi cet alinéa :

4° L'article L. 121-7 est abrogé ;

Mme Cécile Cukierman. - En droit, il y a des règles qui fixent des repères et des seuils qui donnent toute leur force aux procédures. Celui de 18 ans a fondé une justice spécifique pour les mineurs.

Oui, monsieur le garde des Sceaux, des jeunes de 17 ans ont plus de discernement que certains jeunes de 21 ans ; mais nous sommes attachés au seuil et ne pouvons accepter l'exception de minorité pour les plus de 16 ans, durcissement qui, souvent, aggrave la situation de jeunes en perdition.

L'enfermement fait décrocher de la vie en société et rend la réinsertion plus difficile. Faisons le pari d'en faire des citoyens de demain.

Mme la présidente. - Amendement identique n°33, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

M. Jérôme Durain. - Cet amendement supprime l'article permettant d'écarter l'excuse de minorité et la diminution de moitié de la peine encourue, en cohérence avec la présomption irréfragable de non-discernement en dessous de 13 ans.

L'article L. 121-7 du code pénal des mineurs prévoit que le tribunal pour enfants et la cour d'assises des mineurs peuvent décider qu'il n'y a pas lieu de faire application des règles d'atténuation des peines. Or il ne saurait y avoir d'exception à l'excuse de minorité.

Si le quantum des peines est divisé par deux, les sanctions demeurent très sévères. Comment justifier qu'un jeune puisse être tenu psychologiquement pour majeur avant ses 18 ans pour être condamné à trente ans d'emprisonnement mais soit incapable de demander son émancipation ?

Cet article L. 121-7 revient à traiter des enfants de plus de 16 ans comme des adultes. Ce n'est pas acceptable.

Le Défenseur des droits recommande que l'excuse de minorité s'applique à tout mineur de 13 à 18 ans, sans exception. La Convention internationale des droits de l'enfant établit clairement qu'un enfant est une personne de moins de 18 ans et qu'il a droit à une justice spécifique.

Mme la présidente. - Amendement identique n°61 rectifié, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.

Mme Esther Benbassa. - Défendu.

Mme la présidente. - Amendement n°58 rectifié ter, présenté par Mmes V. Boyer, Deroche et Belrhiti, M. Bouchet, Mme Dumont, MM. Cadec et Panunzi, Mme Dumas, M. Bascher, Mme Garnier, M. B. Fournier, Mme F. Gerbaud, M. Klinger, Mme de Cidrac et MM. Belin, Brisson, Bonhomme, Le Rudulier et Boré.

Après l'alinéa 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

...° Le même premier alinéa de l'article L. 121-7 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les mots : « peuvent, à titre exceptionnel et compte tenu des circonstances de l'espèce et de la personnalité du mineur ainsi que de sa situation, décider qu'il n'y a pas lieu de faire » sont remplacés par les mots : « ne font pas » ;

b) La seconde phrase est ainsi rédigée : « Toutefois, la juridiction peut ne pas faire application de cette disposition en considération des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur ou des garanties d'insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci. » ;

Mme Valérie Boyer. - Le rôle de la justice est de protéger la société. Que fera-t-on pour réinsérer la personne qui a donné des coups de marteau sur le crâne du jeune Yuriy ?

Je propose d'inverser la logique de l'article L. 121-7 qui prévoit l'exception de minorité : si le mineur est âgé de plus de 16 ans, le tribunal aura la possibilité de ne pas faire valoir l'exception.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable aux trois amendements identiques. Laissons au juge la possibilité de prononcer des peines plus sévères pour des actes particulièrement violents ou sordides, en levant l'excuse de minorité.

Avis défavorable à l'amendement n°58 rectifié ; il n'est pas utile d'aligner le droit des mineurs de 16 à 18 ans sur celui des majeurs. Le mineur reste mineur jusqu'à 18 ans.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - L'exception à l'excuse de minorité est utilisée entre neuf et dix-sept fois par an par les cours d'assises.

Distinguer le mineur du majeur est un principe fondamental. Madame Boyer, s'appuyer sur une affaire en cours est extrêmement dangereux. À cet instant, seuls les enquêteurs et la justice en connaissent les détails. On ne saurait se saisir d'un fait divers qui nous émeut pour abandonner des principes fondamentaux. Un mineur de 16 ans qui commet un acte grave reste un mineur de 16 ans, que vous le vouliez ou non. Avis défavorable à tous les amendements.

Les amendements identiques nos10, 33 et 61 rectifié ne sont pas adoptés, non plus que l'amendement n°58 rectifié.

Mme la présidente. - Amendement n°76, présenté par Mme Canayer, au nom de la commission.

Alinéas 14 et 15

Rédiger ainsi ces alinéas :

a) Au premier alinéa, les mots : « le tribunal de police, » sont supprimés ;

b) Au deuxième alinéa, les mots : « du tribunal de police ou » sont supprimés ;

L'amendement rédactionnel n°76, accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article premier ter B, modifié, est adopté.

ARTICLE PREMIER TER (Supprimé)

Mme la présidente. - Amendement n°72, présenté par le Gouvernement.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n°2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est ainsi modifié :

1° Après le 3° de l'article L. 12-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 3° bis Le juge des libertés et de la détention chargé spécialement des affaires concernant les mineurs ; »

2° L'article L. 423-9 est ainsi modifié :

a) À la fin du premier alinéa, les mots : « le juge des enfants afin qu'il soit statué sur ses réquisitions tendant » sont supprimés ;

b) Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 1° Le juge des enfants afin qu'il soit statué sur ses réquisitions tendant : » ;

c) Au début du 1°, la mention : « 1° » est remplacée par la mention : « a) » ;

d) Au début du 2°, la mention : « 2° » est remplacée par la mention : « b) » ;

e) Au début du 3°, la mention : « 3° » est remplacée par la mention : « c) » ;

f) Le 4° est ainsi modifié :

- au début, la mention : « 4° » est remplacée par la mention : « 2° » ;

- la première phrase est ainsi rédigée : « Le juge des libertés et de la détention, pour le mineur âgé d'au moins seize ans et lorsque le tribunal pour enfants est saisi aux fins d'audience unique en application du troisième alinéa de l'article L. 423-4, afin qu'il soit statué sur ses réquisitions tendant au placement en détention provisoire du mineur jusqu'à l'audience, dans les conditions prévues aux articles L. 334-1 à L. 334-5. » ;

g) Après le même 4°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le procureur de la République avise sans délai le juge des enfants afin qu'il puisse communiquer au juge des libertés et de la détention tout élément utile sur la personnalité du mineur et, le cas échéant, accomplir les diligences prévues à l'article L. 423-10. » ;

h) Le sixième alinéa est ainsi modifié :

- à la première phrase, après les mots : « juge des enfants », sont insérés les mots : « ou le juge des libertés et de la détention » ;

- à la dernière phrase, les mots : « Le juge des enfants » sont remplacés par le mot : « Il » et les mots : « parents du mineur, ses » sont supprimés ;

i) À l'avant-dernier alinéa, les références : « 1° et 2° » sont remplacées par les références : « a) et b) du 1° » ;

j) Le dernier alinéa est complété par les mots : « et du juge des libertés et de la détention » ;

3° À l'article L. 423-10, après la référence : « L. 423-9 », sont insérés les mots : « ou avisé de la saisine du juge des libertés et de la détention aux mêmes fins » ;

4° L'article L. 423-11 est ainsi rédigé :

« Art. L. 423-11. - Le juge des enfants est compétent, jusqu'à la comparution du mineur devant la juridiction, pour statuer sur la mainlevée ou la modification des mesures d'investigation, éducative judiciaire provisoire et de sûreté, d'office, à la demande du mineur ou de son avocat, ou sur réquisitions du procureur de la République conformément aux dispositions des titres II et III du livre III.

« Lorsqu'il constate que le mineur n'a pas respecté les obligations du contrôle judiciaire ou de l'assignation à résidence avec surveillance électronique, le juge des enfants peut, si les conditions prévues aux articles L. 334-4 ou L. 334-5 sont réunies, communiquer le dossier au procureur de la République aux fins de réquisitions et saisir le juge des libertés et de la détention aux fins de révocation de la mesure de contrôle judiciaire ou d'assignation à résidence avec surveillance électronique et de placement du mineur en détention provisoire.

« Le mineur placé en détention provisoire ou son avocat peut, à tout moment, demander sa mise en liberté. La demande est adressée au juge des libertés et de la détention, qui communique immédiatement le dossier au procureur de la République aux fins de réquisitions et demande au juge des enfants tout élément utile sur la personnalité et l'évolution de la situation du mineur. Le juge des libertés et de la détention statue dans les cinq jours suivant la communication au procureur de la République dans les conditions prévues par aux troisième et avant dernier alinéas de l'article 148 du code de procédure pénale. »

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - La commission a supprimé l'intervention du JLD avant l'audience de culpabilité, tout en prévoyant que le juge pour enfants ayant mis le mineur en détention ne puisse le juger par la suite.

C'est une fausse bonne idée, qui méconnaît le principe de spécialisation et est inapplicable dans les plus petites juridictions où il y a un seul juge des enfants.

D'où cet amendement de rétablissement, qui garantit l'impartialité du juge des enfants tout en sauvegardant le principe de spécialisation.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Les magistrats que nous avons auditionnés ont soulevé des difficultés de recours au JLD. Ici, il faut concilier les principes d'impartialité et de spécialisation.

L'intervention du JLD a lieu avant l'audience de culpabilité ; après, le suivi de la détention des mineurs est assuré par le juge des enfants.

Là où il y a peu de juges des enfants, il y a aussi peu de JLD. Par conséquent, il faudra habiliter tous les JLD pour ce type d'affaires, ce qui diluera le principe de spécialisation. Nous proposons dans ce cas que le président du tribunal judiciaire puisse désigner un autre magistrat ayant une appétence particulière sur les questions éducatives.

Notre solution nous semble plus respectueuse des principes de spécialisation et d'impartialité. Avis défavorable.

L'amendement n°72 n'est pas adopté.

L'article premier ter demeure supprimé.

L'article 2 est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 2

Mme la présidente. - Amendement n°7, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre II du titre préliminaire du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n°2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est complété par un article L. 12-... ainsi rédigé :

« Art. L. 12-....  -  Par dérogation à l'article 706-71 du code de procédure pénale, les mineurs ne peuvent pas faire l'objet de l'utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle tout au long de la procédure. »

Mme Cécile Cukierman. - Notre groupe est opposé à ce que l'outil numérique devienne la norme, a fortiori pour les mineurs. Le caractère éducatif pour le mineur, c'est aussi de fréquenter les lieux, de rencontrer les magistrats. La crise sanitaire ne doit pas devenir le prétexte de la généralisation du numérique.

Mme la présidente. - Amendement n°60 rectifié, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre II du titre préliminaire du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n°2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est complété par un article L. 12-... ainsi rédigé :

« Art. L. 12-....  -  Par dérogation à l'article 706-71 du code de procédure pénale, les enfants ne peuvent pas faire l'objet de l'utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle tout au long de la procédure. »

Mme Esther Benbassa. - Cet amendement interdit l'utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle tout au long de la procédure lorsqu'un mineur est en cause. Des dysfonctionnements informatiques peuvent nuire à la qualité des débats. De plus, la dématérialisation ne permet pas pleinement d'assurer la confidentialité des échanges entre les parties et leurs avocats. Enfin, la solennité des audiences est fortement réduite lors des procédures par écrans interposés.

L'utilisation de ces moyens va à l'encontre de l'intérêt supérieur des enfants.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Nous sommes tous las des visioconférences, mais elles ont leur utilité, même au-delà de la crise sanitaire. La communication audiovisuelle permet de simplifier certaines procédures mais elle ne doit pas devenir exclusive.

Avis défavorable aux deux amendements.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Avis défavorable.

L'amendement n°7 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°60 rectifié.

ARTICLE 3

Mme la présidente. - Amendement n°8, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'alinéa 1

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

...° L'article L. 111-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, le mot : « mineur » est remplacé par les mots : « enfant ou un adolescent » ;

b) Avant le 1°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

«...° La remise à parents ; »

Mme Cécile Cukierman. - Cet amendement réintroduit la mesure de remise aux parents, acteurs fondamentaux de la justice des mineurs.

C'est la mesure la moins répressive, qui permet d'établir un état des lieux et de rechercher de nouvelles réponses. La place du jeune et des parents est une question de grande actualité.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Il est vrai que la responsabilisation des parents est un enjeu important. La remise a une portée pratique mais une dimension symbolique importante. Avis plutôt favorable.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Je me suis déjà prononcé sur le fait de remplacer le terme de mineur par celui d'enfant.

Et puisque nous parlons de lisibilité et de simplification, allez expliquer à un mineur que le juge va le remettre à ses parents... La formule est totalement obsolète. Avis défavorable.

Mme Cécile Cukierman. - Je ne cherche pas à simplifier la justice des mineurs mais à la rendre plus efficace. La notion d'obsolescence ne doit pas non plus nous occuper.

La remise aux parents, ce n'est pas que du symbole. La mesure permet d'identifier certains problèmes. La supprimer, fut-elle obsolète, désuète ou réac, c'est sortir les parents du système et envoyer un mauvais signal.

L'amendement n°8 est adopté.

Mme la présidente. - Amendement n°26 rectifié, présenté par M. Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

I. - Alinéas 7 à 9

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

b) Les 5° à 9° sont abrogés ;

II. - Alinéa 12

Supprimer cet alinéa.

M. Thierry Cozic. - Cet amendement maintient la distinction entre éducatif et répressif en supprimant les modules coercitifs de la mesure éducative.

La relation éducative repose par essence sur un lien de confiance, lien qui est par principe distendu dans le cadre d'une mesure coercitive. A contrario, les mesures coercitives perdront de leur solennité si leur contenu peut être prononcé à l'identique, sans sanction, dans le cadre d'une mesure éducative.

Il convient donc de supprimer les interdictions et les obligations qui ont été prévues dans le cadre de ces mesures afin de privilégier un véritable accompagnement éducatif.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. Il y a l'interdiction de paraître, d'entrer en contact avec la victime, la confiscation de l'objet qui a servi à commettre l'infraction... Ces interdictions ont leur utilité et il n'y a pas lieu de les retirer de la mesure éducative.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - J'ajoute l'interdiction de paraître sur la voie publique entre 22 heures et 6 heures, particulièrement utile pour l'éducation d'un adolescent. Avis défavorable.

L'amendement n°26 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente. - Amendement n°54 rectifié bis, présenté par Mmes V. Boyer, Deroche et Belrhiti, M. Bouchet, Mme Dumont, MM. Cadec et Panunzi, Mme Dumas, MM. Bascher et B. Fournier, Mme F. Gerbaud, M. Klinger, Mme de Cidrac et MM. Belin, Brisson, Bonhomme, Le Rudulier et Boré.

Après l'alinéa 14

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° Au premier alinéa de l'article L. 112-4, la référence : « L. 112-9 » est remplacée par la référence : « L. 112-8 » ;

...° L'article L. 112-8 devient l'article L. 112-9 et l'article L. 112-9 devient l'article L. 112-8 ;

Mme Valérie Boyer. - Amendement rédactionnel.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Demande de retrait car il n'est pas tout à fait rédactionnel.

L'amendement n°54 rectifié bis est retiré.

Mme la présidente. - Amendement n°23, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéas 18 et 19

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

a) Les mots : « en fixe la durée qui ne peut excéder un an » sont remplacés par les mots : « pour une durée de six mois renouvelable » ;

Mme Cécile Cukierman. - Nous ne sommes pas opposés à ce que l'on puisse aller jusqu'à un an, mais il faut un bilan intermédiaire à l'issue des six premiers mois. C'est l'avenir du mineur qui est en jeu.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Il faut de la durée pour une mesure éducative de long terme. Avis défavorable.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Même avis défavorable.

L'amendement n°23 n'est pas adopté.

Mme la présidente. - Amendement n°2, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéas 25 et 26

Supprimer ces alinéas.

Mme Cécile Cukierman. - Il n'y a pas lieu de confier un pouvoir de police aux professionnels de la PJJ et au secteur associatif habilité. Le lien de confiance nécessaire pour mener à bien une mesure éducative pourrait être remis en cause.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable, car ce contrôle visuel est parfois nécessaire dans les CEF.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - On est vraiment dans la posture, le dogme ! Les éducateurs de CEF ne pourraient pas surveiller les gamins, alors qu'on trouve des couteaux dans ces centres ? C'est une demande des éducateurs eux-mêmes pour assurer leur sécurité et celle des autres gamins. Je suis totalement défavorable !

Mme Cécile Cukierman. - Conservons un débat respectueux. Le débat existe, y compris parmi le personnel. Vous caricaturez les propos et balayez d'un revers de manche les remarques des organisations syndicales ! Non, nous ne sommes pas pour le laxisme. Je ne vous accuse pas d'être dans une posture dogmatique quand vous donnez un avis défavorable à tous nos amendements...

L'amendement n°2 n'est pas adopté.

L'article 3, modifié, est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 3

Mme la présidente. - Amendement n°53 rectifié bis, présenté par Mmes V. Boyer, Deroche et Belrhiti, M. Bouchet, Mme Dumont, MM. Cadec et Panunzi, Mme Dumas, M. Bascher, Mme Garnier, M. B. Fournier, Mme F. Gerbaud, M. Klinger, Mme de Cidrac et M. Belin.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La première phrase du premier alinéa de l'article L. 112-2 du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est complétée par les mots : « mais également de la gravité des faits qui lui sont reprochés et du trouble à l'ordre public qui en est résulté ».

Mme Valérie Boyer. - Le code de justice pénale des mineurs définit la mesure éducative judiciaire comme « un accompagnement individualisé construit à partir d'une évaluation de la situation personnelle, familiale, sanitaire et sociale du mineur ». Mais elle doit également tenir compte des faits qui lui sont reprochés et du trouble à l'ordre public qui en est résulté.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Les mesures éducatives sont centrées autour du jeune et de son environnement ; ce sont les sanctions qui prennent en compte la gravité des faits. Retrait ou avis défavorable.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Même avis ; il faut distinguer l'éducatif du répressif.

L'amendement n°53 rectifié bis n'est pas adopté.

Mme la présidente. - Amendement n°28, présenté par Mme Harribey et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 113-8 du code la justice des mineurs, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est insérée une section ainsi rédigée :

« Section...

« Des centres éducatifs renforcés

« Art. L. 113-9. - Les centres éducatifs renforcés sont des établissements publics ou des établissements privés habilités dans des conditions prévues par décret en Conseil d'État. Ils ont vocation à prendre en charge des mineurs délinquants multirécidivistes en grande difficulté ou en voie de marginalisation ayant souvent derrière eux un passé institutionnel déjà lourd. Ils se caractérisent par des programmes d'activités intensifs pendant des sessions de trois à six mois selon les projets et un encadrement éducatif permanent. Ils visent à créer une rupture dans les conditions de vie du mineur et à préparer les conditions de sa réinsertion. »

M. Jean-Yves Leconte. - Seuls les CEF sont mentionnés dans le code de justice pénale des mineurs. Or les centres éducatifs renforcés (CER) existent également. Il conviendrait de les y introduire.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Il y a un problème d'imputation. Les CER sont complémentaires des CEF ; ils ne présentent pas les mêmes contraintes pour le jeune. Avis défavorable.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Même avis.

L'amendement n°28 n'est pas adopté.

Mme la présidente. - Amendement n°31, présenté par Mme Harribey et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article L. 241-1 du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est complété par les mots : « et aux établissements du secteur associatif habilité ».

Mme Laurence Harribey. - Il convient d'intégrer dans le code la référence aux établissements du secteur associatif habilité (SAH) qui est chargé de la mise en oeuvre des mesures décidées par le juge.

L'article L. 241-1 ne mentionne que les établissements de la PJJ. Or sur 52 CEF, 34 sont associatifs et quinze des vingt nouveaux CEF prévus seront associatifs.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis favorable, cela peut être opportun de les mentionner dans le texte.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Les établissements du SAH sont mentionnés dans le livre I. Cet ajout n'est pas nécessaire. Avis défavorable.

L'amendement n°31 est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE 3 BIS

Mme Esther Benbassa . - Il y a une semaine, j'ai visité le CEF de Savigny-sur-Orge, l'un des 51 CEF de France. Les jeunes y bénéficient d'un accompagnement privilégié et de programmes novateurs. C'est une alternative positive aux établissements pénitentiaires.

En revanche, dans certains autres centres, on constate des dysfonctionnements, des abus, des violences... C'est le cas de celui des Chutes-Lavie, à Marseille, fermé après l'ouverture d'une enquête judiciaire pour agression sexuelle sur mineure.

L'efficacité des CEF est en outre loin d'être démontrée au regard de leur coût. Ils souffrent de difficultés de gouvernance et la sortie des jeunes est parfois critiquable. Mme Carrère, dans son rapport du 19 novembre 2020, estimait qu'ils constituent la forme la plus onéreuse de placement et ne sauraient obérer le développement d'autres types d'accueil en milieu ouvert.

L'article 3 bis est adopté.

ARTICLE 4

L'amendement n°69 rectifié est retiré.

Mme la présidente. - Amendement n°9, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

... ° L'article L. 121-4 est abrogé ;

Mme Cécile Cukierman. - Nous nous opposons à la suppression de la collégialité dans la justice des mineurs. Un enfant ne doit être condamné que par une formation collégiale.

Mme la présidente. - Amendement identique n°32, présenté par Mme Harribey et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

M. Thierry Cozic. - Il faut supprimer la possibilité d'une audience en cabinet : le recul de la collégialité nous semble dangereux.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. La possibilité de prononcer des peines en chambre de conseil est une bonne mesure, garante de la rapidité de la sanction. En outre, les peines qui pourront être prononcées sont très limitées.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Même avis. Le juge des enfants peut toujours renvoyer vers le tribunal pour les situations les plus complexes. Un juge seul peut parfois être moins inquiétant pour le jeune, et nouer une relation privilégiée avec l'enfant.

Les amendements identiques nos9 et 32 ne sont pas adoptés.

Mme la présidente. - Amendement n°11, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

a) Après les mots : « mineurs âgés », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « d'au moins seize ans au moment de la date de commission de l'infraction. » ;

Mme Cécile Cukierman. - En principe, les travaux d'intérêt général (TIG) ne peuvent être mis en oeuvre avant 16 ans, mais cet article permet à un juge de prononcer un TIG pour une infraction commise par un jeune lorsqu'il avait moins de 16 ans. Cela remet en cause la légalité des peines et l'égalité entre les jeunes. Pour la même infraction, en fonction de l'engorgement du tribunal, un enfant sera jugé avant ou après ses 16 ans.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. Les TIG sont une bonne mesure, il convient d'encourager leur utilisation.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Avis défavorable car ces TIG sont des alternatives à l'incarcération.

Mme Cécile Cukierman. - Peut-être n'ai-je pas été assez claire : il ne s'agit pas ici de nous prononcer sur l'utilité des TIG - deux communes de mon département vont en accueillir - mais de la question de l'âge auquel on est condamné... Cela ne pose-t-il pas un problème d'égalité ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Le recours aux TIG pâtit d'une méconnaissance par les magistrats et les avocats. En outre, les délais sont trop longs. Votre amendement réduirait encore le recours aux TIG.

L'amendement n°11 n'est pas adopté.

Mme la présidente. - Amendement n°64 rectifié, présenté par Mme Benbassa, MM. Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.

Alinéa 16

Rédiger ainsi cet alinéa :

6° L'article L. 122-6 est abrogé ;

Mme Esther Benbassa. - La peine de détention à domicile avec surveillance électronique n'est pas adaptée aux enfants et aux adolescents.

Sa normalisation est une violation du principe de primauté de l'éducatif. N'oublions pas que la justice des mineurs et une justice spécifique : ne traitons pas les mineurs comme des délinquants majeurs.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - L'un des enjeux de cette réforme est de lutter contre la détention, notamment la détention provisoire. Le bracelet électronique constitue une alternative plus protectrice pour le jeune. Cette détention à domicile est encadrée et assortie d'une mesure éducative. Avis défavorable.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Comment peut-on être contre cette peine alternative à l'emprisonnement ? Elle permet au jeune condamné de rester à la maison, auprès de ses proches, et de poursuivre sa scolarité, sa formation et son suivi éducatif. Avis défavorable.

M. Jean-Yves Leconte. - Il s'agit d'enfants, soumis à l'autorité parentale. Or le bracelet remet en cause la crédibilité de cette autorité parentale. Il faut voter cet amendement.

L'amendement n°64 rectifié n'est pas adopté.

Mme la présidente. - Amendement n°12, présenté par Mme Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'alinéa 16

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° L'article L. 123-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Cette peine d'emprisonnement ne peut être prononcée à l'unique condition que celle-ci soit assortie d'une mesure éducative confiée à la protection judiciaire de la jeunesse. » ;

Mme Cécile Cukierman. - Sans angélisme, reconnaissons qu'une peine d'emprisonnement doit parfois être prononcée à l'encontre d'un mineur. Elle doit alors être assortie d'une mesure éducative, dans la perspective de la sortie et d'une pleine et entière réinsertion.

Mme Agnès Canayer, rapporteur. - Avis défavorable. L'article L. 121-4 du code de la justice pénale des mineurs prévoit déjà l'intervention continue de la PJJ et de l'Éducation nationale, puisque la scolarité est obligatoire jusqu'à 16 ans.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. - Même avis.

L'amendement n°12 est retiré.

L'article 4 est adopté.

Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 27 janvier 2021, à 15 heures.

La séance est levée à minuit trente.

Pour la Directrice des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication