SÉANCE

du jeudi 17 juin 2021

110e séance de la session ordinaire 2020-2021

présidence de M. Pierre Laurent, vice-président

Secrétaires : Mme Eustache-Brinio, Mme Victoire Jasmin.

La séance est ouverte à 10 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Lutte contre le dérèglement climatique (Procédure accélérée - Suite)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

Discussion des articles (Suite)

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 19

M. le président.  - Amendement n°842, présenté par M. Gontard et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Après l'article 19

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre Ier du titre II du livre III du code de la santé publique est complété par un article L. 1321-5-... ainsi rédigé :

« Art. L. 1321-5-....  -  Le contrôle sanitaire de la qualité des eaux potables contrôle la présence des substances per- et polyfluoroalkylées dans les eaux destinées à la consommation humaine. Un décret du ministre chargé de la santé pris après avis de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail détermine les conditions d'échantillonnage. »

M. Joël Labbé.  - Les substances per- et polyfluoroalkyles (PFAS) ne font pas partie des paramètres soumis au contrôle sanitaire des eaux destinés à la consommation humaine (EDCH), alors que leur toxicité environnementale et sanitaire est avérée.

Les seules données nationales sont issues du rapport de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) de 2011. Depuis, la contamination par les PFAS continue. Faute de valeurs toxicologiques de référence, il faut mener des études généralisées.

M. le président.  - Amendement identique n°1738 rectifié, présenté par Mme Préville et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Angèle Préville.  - Les PFAS sont très toxiques, aussi bien pour l'environnement que pour la santé. Le dernier rapport de l'Anses remonte à dix ans...

Ces polluants s'accumulent dans l'environnement sans se dégrader. Or ils sont très utilisés dans les procédés industriels et dans les emballages de produits de grande consommation, mais aussi, par exemple, dans les vêtements de sport. Ils sont malheureusement détectables partout, jusque dans l'Arctique !

M. Pascal Martin, rapporteur de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.  - La recherche systématique des PFAS aurait un coût répercuté sur le prix de l'eau dont l'ampleur n'a pas été évaluée. Avis défavorable.

En revanche, j'émettrai un avis favorable aux amendements identiques nos1739 et 521 : il est nécessaire de mieux connaître ces substances pour lutter contre la pollution qu'elles entrainent.

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité.  - Les modalités de contrôle des EDCH sont définies dans le code de la santé publique. Les PFAS ne font pas partie des paramètres à contrôler, mais nous y apportons une vigilance accrue.

La directive Eau potable du 3 novembre 1998 prévoit leur surveillance ; elle a été déclinée dans le code de la santé publique. Sa refonte par la directive du 16 décembre 2020 sera transposée avant le 12 janvier 2023 ; je m'y engage. Votre préoccupation sera donc satisfaite. Retrait ou avis défavorable.

Mme Angèle Préville.  - Les pollutions des eaux, des sols et de l'air sont un impensé global. La chimie est omniprésente dans nos vies et cela nous préoccupe.

Faites que la réglementation change suffisamment vite ! Le rapport de l'Anses date d'il y a dix ans et les contrôles tardent. Pendant ce temps, la contamination continue et les polluants s'accumulent dans l'environnement et dans nos tissus.

M. Joël Labbé.  - Nous maintenons l'amendement mais remercions la ministre pour son engagement. L'amendement que défendra M. Salmon est le plus important à nos yeux.

Les amendements identiques nos842 et 1738 rectifié ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°521, présenté par M. Gontard et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Après l'article 19

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur la pollution des eaux et des sols par les substances per- et polyfluoroalkyles. Ce rapport propose notamment des solutions applicables pour la dépollution des eaux et des sols contaminés par des substances per- et polyfluoroalkyles. 

II.  -  Le Gouvernement fournit systématiquement un nouveau rapport sur ce sujet à chaque réévaluation à la baisse du seuil d'exposition tolérable aux substances per- et polyfluoroalkyles fourni par l'autorité administrative européenne compétente dans les douze mois qui suivent la réévaluation à la baisse dudit seuil.

M. Daniel Salmon.  - Les PFAS, très utilisés par l'industrie, persistent dans les eaux et les sols. Nous n'en avons hélas qu'une connaissance partielle.

Cet amendement demande au Gouvernement de remettre un rapport dans les douze mois, puis après chaque révision des seuils. Nous devons absolument mieux connaître ces poisons.

M. le président.  - Amendement identique n°1739, présenté par Mme Préville et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Mme Angèle Préville, rapporteur.  - Ce rapport serait utile pour améliorer nos connaissances sur les PFAS et limiter la pollution qu'ils génèrent. Ces substances, fréquemment utilisées par l'industrie, s'accumulent dans l'environnement et dans nos corps, au point d'avoir acquis le triste surnom de produits chimiques éternels.

Les PFAS imprègnent notre environnement, ont des effets néfastes sur notre organisme et sont difficilement traitables par les procédés traditionnels. Ils ont été massivement détectés dans les sols et les eaux, notamment dans les usines, les aéroports, les bases militaires ou les casernes de pompiers. Il est indispensable de les étudier davantage.

M. Pascal Martin, rapporteur.  - La dangerosité des PFAS a été largement prouvée. J'approuve la volonté d'établir un diagnostic précis : avis favorable.

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - L'Agence européenne des produits chimiques (ECHA) travaille, dans le cadre du règlement REACh, sur ces substances difficiles à capter, afin de mieux en mesurer la présence et en limiter l'usage. Nous suivons ses travaux avec intérêt.

Peu de techniques performantes et abordables sont disponibles. Un rapport pourrait nous éclairer, mais je crains qu'il ne soit difficile de fournir des données dans le délai demandé : sagesse.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques.  - Je voterai cet amendement : nous avons besoin de connaître ces produits, leurs dangers et les solutions de dépollution envisageables. Il faudra aussi trouver des alternatives pour les remplacer, afin de ne pas pénaliser l'économie.

Le Parlement peut aussi se saisir du sujet. Nous avons les moyens de mener ce type de travaux.

M. Daniel Salmon.  - Merci pour ces avis, ainsi que pour les propos de Mme Primas. Cet amendement ne fixe pas une limite, ce qui serait prématuré, mais vise à analyser un problème grave pour en connaître les tenants et aboutissants. C'est un premier pas vers des alternatives et des limites.

M. Joël Bigot.  - Le groupe SER votera cet amendement, qui participe de la prise de conscience sur la pollution des sols. Il faudra ensuite s'inscrire dans l'action.

Selon la commission d'enquête du Sénat sur la pollution des sols, six mille sites à l'abandon sont concernés en France. Il faut déterminer la nature des sols pollués pour les traiter en vue de les remobiliser.

Les amendements identiques nos521 et 1739 sont adoptés et deviennent un article additionnel.

M. le président.  - Amendement n°717 rectifié, présenté par Mmes Préville, Monier, Jasmin et Conway-Mouret.

Après l'article 19

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 79 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire est ainsi rédigé :

« Art. 79. - I.  -  Avant le 1er juillet 2022, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la mise en place de mécanismes permettant de réduire les rejets de fibres microplastiques issues du lavage du textile, en déterminant les objectifs à atteindre. Ce rapport s'attache en particulier à évaluer la pertinence technico-économique, environnementale et d'appropriation du consommateur, à lister les solutions internes ou externes envisageables pour les lave-linges neufs, ménagers ou professionnels, ainsi qu'à en déterminer leur degré de filtration.

« II.  -  Les lave-linge neufs sont dotés d'un dispositif visant à réduire la quantité de fibres microplastiques issues du lavage du textile.

« Au plus tard le 1er janvier 2025, un décret pris en concertation avec les filières industrielles concernées précise les modalités d'application du présent article. Ce décret définit notamment les conditions dans lesquelles le dispositif retenu remplit les objectifs de réduction de fibres microplastiques dans les eaux évacuées.

« III.  -  Le II entre en vigueur trois ans après la publication du décret mentionné au second alinéa du II. »

Mme Angèle Préville.  - Afin de lutter contre la pollution aux microplastiques, un amendement à la la loi AGEC a introduit l'obligation d'équiper les lave-linges neufs d'un filtre à microfibres plastiques à compter du 1er janvier 2025.

Le règlement relatif aux exigences en matière d'écoconception n'a pas prévu d'obligation, faute de solution technique. La Commission européenne devra le réexaminer et, le cas échéant, présenter un projet de révision d'ici le 25 décembre 2025.

Le rapport de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) sur la pollution plastique de décembre 2020 a souligné les obstacles à la mise en place de filtres, notamment les difficultés d'entretien et de remplacement. Le consommateur pourrait rechigner à remplacer sa machine ou trouver des solutions de contournement.

Aussi, nous demandons la réalisation d'une étude préalable et la fixation d'un délai d'adaptation pour les fabricants.

M. le président.  - Amendement n°2143, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 19

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 79 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire est ainsi rédigé :

« Art. 79.  -  Afin de réduire la dispersion des microfibres plastiques dans l'environnement issues du lavage du linge, à compter du 1er janvier 2025, les lave-linges neufs domestiques ou professionnels sont dotés d'un filtre à microfibres plastiques ou de toute autre solution interne ou externe à la machine. Un décret précise les modalités d'application du présent article.

« Un rapport du Gouvernement à l'attention des parlementaires est rédigé en 2022 pour décrire, depuis la production du tissu jusqu'au lavage du linge, les connaissances sur les sources d'émission, les contraintes des filières et les mesures volontaires prises pour réduire les émissions de microfibres plastiques. »

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - Il faut élargir les dispositions de la loi AGEC à d'autres techniques que le filtre. L'amendement du Gouvernement est plus explicite sur les technologies alternatives et modifie la loi au lieu de renvoyer à un décret.

M. Pascal Martin, rapporteur.  - L'amendement n°717 rectifié est satisfait par l'amendement n°2143 du Gouvernement qui réécrit l'article 79 de la loi AGEC pour y inclure des solutions alternatives et auquel la commission est favorable : retrait ?

Mme Martine Filleul.  - Nous voterons d'autant plus volontiers l'amendement n° 2143 que nous avions proposé la même chose il y a deux ans lors les débats sur la loi AGEC... Je déplore le retard pris dans la prise de conscience de ce grave problème écologique.

L'amendement n°717 rectifié est retiré.

L'amendement n°2143 est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE 19 BIS A

M. le président.  - Amendement n°108 rectifié, présenté par MM. Mizzon et Bonneau, Mmes Sollogoub et Perrot, MM. Kern et Masson, Mme Vermeillet, M. Détraigne, Mme Chain-Larché, M. Cuypers, Mme Thomas, M. Bouchet, Mme Herzog, M. Canévet, Mme C. Fournier et MM. Bonnecarrère, Chauvet, Louault, Prince, Calvet, Cigolotti, S. Demilly et Cazabonne.

Supprimer cet article.

M. Michel Canévet.  - L'article L. 110-1 du code de l'environnement inclut déjà l'eau comme élément du patrimoine commun de la nation. Arrêtons les lois bavardes, soyons efficaces !

M. le président.  - Amendement identique n°243 rectifié bis, présenté par MM. Chasseing, Guerriau, Menonville, Decool et Lagourgue, Mme Mélot, MM. A. Marc, Capus et Wattebled, Mme Garriaud-Maylam, MM. Henno, Guérini et Grand, Mme Dumas et MM. Laménie et Hingray.

M. Joël Guerriau.  - Même argument : évitons une redondance source de confusion.

M. le président.  - Amendement identique n°909 rectifié bis, présenté par MM. Duplomb et J.M. Boyer, Mme Chauvin, M. Chatillon, Mme Puissat, M. Pointereau, Mmes Belrhiti et Delmont-Koropoulis, MM. Brisson, Klinger, Burgoa, Cardoux, Houpert, Anglars, de Legge et Vogel, Mme Richer, MM. J.M. Arnaud, Somon, Savary, Belin et Lefèvre, Mmes Dumont et Deromedi, M. Sido, Mme Micouleau, MM. Genet, Daubresse, Longuet et Courtial, Mmes Drexler et Lassarade, MM. Cadec et Panunzi, Mme Lopez, MM. Bascher, D. Laurent et Segouin, Mme Imbert, MM. Saury et H. Leroy, Mme Joseph et MM. Piednoir, Rietmann, Favreau, Allizard, Karoutchi et Bas.

M. René-Paul Savary.  - Je m'étonne que la commission soit défavorable à la suppression d'un article purement symbolique. C'est une affirmation solennelle, certes, mais la loi dit déjà que l'eau appartient à notre patrimoine commun. À trop en rajouter, nous allons créer des difficultés juridiques concernant les aquifères. Évitons une redondance.

M. le président.  - Amendement identique n°2108, présenté par Mme Schillinger et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Mme Patricia Schillinger.  - Défendu.

M. Pascal Martin, rapporteur.  - Il ne nous semble pas opportun de supprimer cette référence à l'importance de la qualité de l'eau. Sons et odeurs ont été intégrés au patrimoine national par la loi du 29 janvier 2021 visant à définir et protéger le patrimoine sensoriel des campagnes françaises. Pourquoi ne pas mentionner la qualité de l'eau ? Avis défavorable.

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - L'eau, qui fait pourtant l'objet d'un livre du code de l'environnement, est le seul élément absent de l'article L. 110-1. Au-delà du symbole, il est légitime de réparer cette lacune.

M. Ronan Dantec.  - M. Savary a été explicite sur ses motivations... Il est extrêmement important conserver l'article. La qualité de l'eau aussi appartient au patrimoine national. Or elle est mauvaise, ce qui crée des tensions dans la société, notamment en Bretagne, et un coût pour le consommateur. Nous devons être dans une logique de reconquête de la qualité de l'eau.

M. René-Paul Savary.  - Je partage ces arguments. Nous avons tous des efforts à faire, mais travaillons en bonne intelligence avec les agriculteurs, qui sont les premiers concernés, au lieu de leur imposer des contraintes supplémentaires, contreproductives. La prise de conscience du monde agricole est au rendez-vous.

Votre démarche symbolique et non pratique pourrait être source de contentieux.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission.  - L'eau fait partie à l'évidence de notre patrimoine commun. Il faut la préserver.

Simplement, l'article est déjà satisfait par le code de l'environnement. Évitons la redondance pour plus de clarté.

M. Stéphane Piednoir.  - Très bien !

M. Joël Labbé.  - Il s'agit ici de la qualité de l'eau. Le travail à réaliser collectivement est considérable, y compris dans l'intérêt du monde agricole. (Mme Sophie Primas approuve.)

M. Marc Laménie.  - J'ai cosigné l'amendement de suppression, mais, après réflexion, la qualité de l'eau étant un enjeu fondamental, je me rallie à la position du rapporteur et de la ministre. (Mme Marta de Cidrac, rapporteure, applaudit.)

M. Didier Mandelli.  - Il s'agit de la qualité de l'eau et nous sommes tous concernés, au-delà des agriculteurs. Je ne voterai pas les amendements. (Mme Marta de Cidrac, rapporteure, et M. Joël Bigot applaudissent.)

M. Jean-François Longeot, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.  - Comme Didier Mandelli, j'appuie la position du rapporteur. Supprimer l'article enverrait un bien mauvais signal, alors que nous sommes confrontés quotidiennement au problème de la qualité de l'eau.

Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique.  - Je suis d'accord avec les derniers orateurs. Nous devons oeuvrer tous ensemble pour améliorer la qualité de l'eau.

Les Assises de l'eau ont été très fructueuses. Un focus a été décidé sur le secteur agricole, même si l'industrie est également concernée. C'est le sens du Varenne de l'eau qui est en cours.

Les amendements identiques nos108 rectifié et 243 rectifié bis sont retirés.

Les amendements identiques nos909 rectifié bis et 2108 ne sont pas adoptés.

L'article 19 bis A est adopté.

ARTICLES ADDITIONNELS après l'article 19 bis A

M. le président.  - Amendement n°112 rectifié, présenté par Mmes Sollogoub et Jacquemet, M. Détraigne, Mme Saint-Pé, MM. Houpert, Cardoux, Prince, Menonville et Decool, Mme Gosselin, MM. Cigolotti et Canévet et Mme Garriaud-Maylam.

Après l'article 19 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l'article L. 211-1 du code de l'environnement est ainsi modifié :

1° À la première phrase du premier alinéa, après les mots : « cette gestion », sont insérés les mots : « , d'intérêt général, » ;

2° Au 1°, après les mots : « des sites et des zones humides », sont insérés les mots : « d'origine naturelle ou humaine » ;

3° Le 7° est complété par les mots : « , en veillant à ce que cette action augmente et non diminue la ressource en eau disponible, et respecte les milieux aquatiques et humides, y compris d'origine humaine ».

Mme Denise Saint-Pé.  - Cet amendement précise que l'origine humaine d'un milieu aquatique ou humide ne fait pas obstacle à sa protection et à sa bonne gestion.

La restauration de continuité écologique ne doit pas diminuer la ressource locale en eau ni détruire des milieux d'intérêt d'origine humaine.

Trop de gestionnaires de l'eau considèrent qu'un milieu naturel aquatique ou humide est forcément sauvage. Or la nature a évolué depuis des millénaires avec les activités humaines : les lacs, les étangs, les plans d'eau, les retenues, les biefs, les canaux font aussi partie des écosystèmes et rendent de nombreux services. Certains chantiers de restauration de la continuité écologique ont conduit à des décisions regrettables.

M. le président.  - Amendement n°968 rectifié bis, présenté par MM. Segouin, Cuypers, Longuet, Klinger et Rojouan, Mme Bellurot, MM. Cardoux et Saury, Mme Deromedi, MM. Burgoa et B. Fournier, Mmes Belrhiti et Lassarade, MM. de Legge et Anglars, Mmes Garriaud-Maylam et Canayer, MM. de Nicolaÿ et Brisson, Mme Gruny, MM. J.M. Boyer et Duplomb, Mme Pluchet, M. Savin, Mme Gosselin, MM. Houpert et H. Leroy et Mme Dumont.

Après l'article 19 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 1° du I de l'article L. 211-1 du code de l'environnement est ainsi modifié :

1° Apre?s le mot : « entend », sont inse?re?s les mots : « par e?cosyste?me aquatique tous les milieux en eau de manie?re re?gulie?re, incluant ceux cre?e?s par l'activite? humaine dont les services rendus a? la socie?te? et a? l'environnement doivent e?tre e?value?s et pre?serve?s, et » ;

2° Apre?s le mot : « non », sont inse?re?s les mots : « , d'origine naturelle ou humaine ».

M. Pierre Cuypers.  - Les retenues, plans d'eau, lacs, étangs, canaux et biefs apportent des services écosystémiques indispensables : préservation de l'eau a? l'étiage, régulation de crue, dépollution locale par épuration, réservoir de biodiversité?, puits carbone, agrément paysager, énergie bas carbone, alimentation des nappes et zones humides.

Or ces écosystèmes d'origine humaine de petite taille sont mal protégés, contrairement aux plus grands. Ils sont détruits sans aucune étude d'impact, car leur utilité? écologique est ignorée et le droit mal interprété. Cet amendement étend expressément la protection de la loi a? ces milieux.

M. le président.  - Amendement n°969 rectifié bis, présenté par MM. Segouin, Cuypers, Longuet, Klinger et Rojouan, Mme Bellurot, MM. Cardoux et Saury, Mme Deromedi, MM. Burgoa et B. Fournier, Mmes Belrhiti et Lassarade, MM. de Legge et Anglars, Mmes Garriaud-Maylam et Canayer, MM. de Nicolaÿ et Brisson, Mme Gruny, MM. J.M. Boyer et Duplomb, Mme Pluchet, M. Savin, Mme Gosselin, MM. Houpert et H. Leroy et Mme Dumont.

Après l'article 19 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l'article L. 211-1 du code de l'environnement est ainsi modifié :

1° au 1°, apre?s les mots : « zone humide », sont insére?s les mots : « , que ceux-ci soient d'origine naturelle ou humaine » ;

2° Le même 1° est comple?te? par les mots : « , les e?cosyste?mes aquatiques ou zones humides d'origine humaine e?tant les mares, e?tangs, retenues, lacs, canaux, biefs » ;

3° Le 7° est comple?te? par les mots : « , en respectant les e?cosyste?mes aquatiques et zones humides d'origine humaine tels que de?finis dans le 1° ».

M. Pierre Cuypers.  - Cet amendement de M. Segouin poursuit le même objectif.

M. Pascal Martin, rapporteur.  - La gestion équilibrée de la ressource en eau est évidemment d'intérêt général. Mais préciser que les sites et zones humides peuvent être naturels ou d'origine humaine ne présente guère d'intérêt et risque de complexifier la mise en oeuvre des actions de restauration de continuité écologique. Du reste, le code de l'environnement ne fait pas de distinction entre les milieux. Avis défavorable à l'amendement n°11 rectifié.

Certains milieux d'origine humaine sont devenus naturels après leur abandon ; d'autres nécessitent un entretien pour jouer leur rôle. La distinction n'est pas aisée et pourrait conduire à des oublis. Avis défavorable aux amendements nos968 rectifié bis et 969 rectifié bis.

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - L'article L. 211-1 du code de l'environnement vise tous les écosystèmes humides, sans distinction sur leur origine, anthropique ou non.

J'entends l'inquiétude sur la préservation du geste humain - certains marais gérés par l'homme sont exceptionnels - mais la richesse de l'écosystème doit primer sur son origine. Sur ce point, vos préoccupations sont satisfaites. Avis défavorable aux trois amendements.

M. Ronan Dantec.  - L'amendement n°112 rectifié me pose problème. Les auteurs sont-ils bien contre les bassines ? Ces retenues d'eau artificielles induisent un gaspillage énorme : elles ne répondent ni à l'objectif de disponibilité de l'eau, ni à celui de la protection de l'environnement. Si telle est l'intention, je voterai l'amendement. Certains grands milieux humides créés par l'homme, comme la Brière, sont de grands réservoirs de biodiversité.

Mme Denise Saint-Pé.  - Cet amendement ne s'oppose nullement à la notion de bassines.

M. Ronan Dantec.  - C'est pourtant ce qui est écrit...

L'amendement n°112 rectifié n'est pas adopté, non plus que les amendements nos968 rectifié bis et 969 rectifié bis.

M. le président.  - Amendement n°52 rectifié, présenté par Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Burgoa et Charon, Mmes Demas, Deromedi, Dumont et Garriaud-Maylam, MM. Genet et Meurant, Mme Raimond-Pavero et MM. Rojouan, Saury et H. Leroy.

Après l'article 19 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 7° du I de l'article L. 211-1 du code de l'environnement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° La sauvegarde des aires protégées préservant les écosystèmes aquatiques d'eau douce en facilitant leur création ou leur extension. »

M. Bruno Rojouan.  - Les aires protégées ne représentent que 23,5 % du territoire. Si le Gouvernement ambitionne de les porter à 30 % dès 2022, le projet de loi ne fait qu'effleurer le sujet des écosystèmes aquatiques d'eau douce. Plus un espace est protégé, plus la biodiversité sera restaurée. Il faut faciliter la création et l'extension d'aires protégées pour les écosystèmes aquatiques, afin de les connecter davantage entre eux et d'atteindre ainsi nos objectifs de protection de la biodiversité.

M. Pascal Martin, rapporteur.  - Nous entendons simplifier la gestion de l'eau. N'ajoutons pas un objectif supplémentaire aux sept qui existent déjà. Le code de l'environnement prévoit déjà la préservation des écosystèmes aquatiques, des sites et des zones humides. Avis défavorable.

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - Nul ne doute de notre attachement aux aires protégées - elles font l'objet d'un plan d'action - mais le rapporteur a raison. Pour la clarté de la loi, avis défavorable.

M. René-Paul Savary.  - J'ai utilisé précédemment le même argument pour dénoncer les redondances... Étant cohérent, je ne voterai donc pas l'amendement.

L'amendement n°52 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°51 rectifié, présenté par Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Burgoa et Charon, Mmes Demas, Deromedi, Dumont, Garnier et Garriaud-Maylam, MM. Genet, Meurant et Pellevat, Mme Raimond-Pavero et MM. Rojouan, Saury et H. Leroy.

Après l'article 19 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Le chapitre préliminaire du titre II du livre Ier du code de l'environnement est complété par un article L. 120-... ainsi rédigé :

« Art. L. 120-....  -  I.  -  Les citoyens sont des acteurs de la lutte contre le dérèglement climatique, ils participent à la protection de l'environnement notamment via des initiatives individuelles ou collectives.

« À titre expérimental, à compter de l'entrée en vigueur de la loi n°      du        portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets et pour une durée de trois ans, les départements organisent, au minimum une fois par mois, des opérations de nettoyage des lieux pouvant faire l'objet de dégradations liées à l'activité humaine.

« Au regard des circonstances locales, un arrêté conjoint des ministres chargés de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et de la transition écologique dresse la liste des départements autorisés à participer à cette expérimentation.

« Les citoyens volontaires font connaître leur souhait de participer à cette activité auprès de leur département. Sur cette base, le département établit une liste afin de procéder mensuellement au tirage au sort des citoyens mobilisés.

« II.  -  Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article. »

M. Bruno Rojouan.  - Le citoyen est un acteur clé dans la protection de l'environnement. Chacun a le devoir d'adapter ses comportements pour s'inscrire dans une démarche respectueuse de notre trésor commun : notre planète.

Les initiatives individuelles et collectives sont nombreuses. Les opérations de collecte de mégots en milieu urbain ou de nettoyage des littoraux se multiplient, mais sont loin d'être suffisantes : chaque année, les Français jettent environ 81 000 tonnes de déchets dans la nature.

M. Pascal Martin, rapporteur.  - Rien n'empêche les collectivités territoriales d'organiser de telles opérations. En Seine-Maritime, elles sont fréquentes. Faisons leur confiance, sans imposer de nouvelles contraintes ni contrevenir au principe de libre administration des collectivités territoriales : avis défavorable.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission.  - Très bien !

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - Je suis du même avis. En outre, le bloc communal est principalement compétent en matière de gestion des déchets, alors que l'amendement vise les départements : avis défavorable.

M. Daniel Gremillet.  - Nous prenons le problème à l'envers. Ce n'est pas une affaire de procédure, mais d'éducation. Il n'y a jamais eu autant de déchets, dans une société qui se dit préoccupée par l'environnement. Nous créons des obligations face à l'absence de comportements normaux. Revenons à l'essentiel : éduquer plutôt que légiférer ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

L'amendement n°51 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°53 rectifié, présenté par Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Brisson, Burgoa et Charon, Mmes Demas, Deromedi, Dumont et Garriaud-Maylam, MM. Genet, Houpert, Meurant et Pellevat, Mme Raimond-Pavero et MM. Rietmann, Rojouan, Saury, Savin et H. Leroy.

Après l'article 19 bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  À titre expérimental, pour une durée de trois ans à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi, les collectivités territoriales de métropole et d'outre-mer possédant sur leur territoire des exutoires destinés aux eaux usées procèdent à l'installation d'un filet de collecte de déchets.

II.  -  Au regard des circonstances locales, un arrêté conjoint des ministres chargés de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et de la transition écologique dresse la liste des collectivités territoriales autorisées à participer à cette expérimentation.

III.  -  Un décret en Conseil d'État détermine les conditions d'application du présent article.

IV.  -  Au plus tard neuf mois avant le terme de l'expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport détaillant l'efficacité du dispositif et mesurant l'opportunité de le généraliser.

M. Bruno Rojouan.  - La France a signé l'Engagement des dirigeants pour la Nature en septembre 2020. Dans cette logique, cet amendement propose l'installation à grande échelle de filets de collecte de déchets ou anti-déchets. La ville de Cannes expérimente d'ores et déjà ce dispositif.

M. Pascal Martin, rapporteur.  - Plusieurs collectivités ont déjà installé des filets anti-déchets, efficaces pour éviter que des macro-déchets n'aillent dans les rivières ou en mer. Mais prévoir une expérimentation ne paraît pas très utile : sagesse.

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - Réduire la pollution en mer par les macrodéchets est important, mais les collectivités territoriales et les syndicats d'eau font déjà preuve de volontarisme en la matière. Nul n'est empêché d'agir : avis défavorable.

M. Daniel Salmon.  - En matière de déchets, il faut marcher sur deux jambes : l'éducation, mais aussi la lutte contre le tout-jetable. La loi doit éviter la production de déchets jetables.

L'amendement n°53 rectifié n'est pas adopté.

ARTICLE 19 BIS B (Supprimé)

M. le président.  - Amendement n°1084, présenté par M. Dantec et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Au 1° du I de l'article L. 211-1 du code de l'environnement, après les mots : « zones humides », sont insérés les mots : « et leur restauration ».

M. Ronan Dantec.  - L'article 19 bis B ajoutait aux objectifs de la gestion équilibrée et durable de l'eau, la restauration des milieux aquatiques.

Les zones humides sont des lieux de stockage de CO2. Les tourbières représentent seulement 3 % du territoire mais captent 30 % du carbone. Or la France compte 100 000 hectares de tourbières dégradées. Il faut restaurer ces milieux et valoriser économiquement les services rendus par la nature. Les compensations aériennes, par exemple, pourraient être fléchées vers les tourbières - je vois que le rapporteur Tabarot hoche la tête.

Le Conseil d'État recommandant d'éviter les énumérations, cet amendement est plus général que l'article voté par l'Assemblée nationale.

M. le président.  - Amendement n°812, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après le 7° du I de l'article L. 211-1 du code de l'environnement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° La restauration des milieux aquatiques, notamment des tourbières, mangroves, ripisylves et herbiers marins, qui rendent des services écosystémiques d'importance significative, tels que la séquestration de carbone. »

M. Gérard Lahellec.  - Cet article, supprimé en commission, vise la restauration des écosystèmes aquatiques qui rendent des services écologiques d'importance pour lutter contre le changement climatique.

M. Pascal Martin, rapporteur.  - La préservation des zones humides repose déjà sur trois assises législatives : les articles L211-1 et L211-1-1 du code de l'environnement et l'article 19 du présent projet de loi qui modifie l'article L210-1 du même code. Il n'est pas nécessaire de multiplier des dispositions similaires dans le code, au risque d'affaiblir la lisibilité du droit : avis défavorable.

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - L'objectif est bien de restaurer les zones humides - tourbières, mangroves et autres - qui jouent un rôle important dans la lutte contre le changement climatique.

Avis favorable à l'amendement n°1084, qui propose une solution de compromis. Retrait de l'amendement n°812 à son profit.

L'amendement n°812 est retiré.

M. Ronan Dantec.  - L'article L211-1 est l'article socle du code de l'environnement. Sans rendre la loi bavarde, rééquilibrons le code en y intégrant la restauration des zones humides.

L'amendement n°1084 n'est pas adopté.

L'article 19 bis B demeure supprimé

ARTICLE 19 BIS C

M. Stéphane Demilly .  - Cet article continue de susciter beaucoup d'émotion. Je salue le compromis proposé par notre rapporteur, Pascal Martin.

Il est essentiel de préserver le patrimoine hydraulique des moulins : ils produisent de l'électricité et font incontestablement partie du patrimoine culturel.

La restauration de la continuité écologique ne concerne que 11 % des cours d'eau, ceux classés en liste 2.

La restauration de la continuité écologique des cours d'eau est nécessaire et évitera une hausse de la température de l'eau. Certaines espèces piscicoles sont en train de disparaître, comme l'anguille dans mon département.

Abandonnons les postures et soyons pragmatiques.

M. Jean-Pierre Sueur .  - J'ai souvent évoqué les moulins dans cet hémicycle. Je vous ai dit, madame la ministre, toute la beauté et tout l'intérêt du patrimoine historique que représentent les dizaines de milliers de moulins le long de nos rivières. Je pense à la Cléry et ses trente moulins, atouts patrimoniaux et touristiques majeurs.

Or les propriétaires reçoivent des papiers comminatoires de la préfecture. Élus, nous favorisons le dialogue entre services et propriétaires. Puis, quelques mois plus tard, arrivent de nouvelles considérations dirimantes...

L'Assemblée nationale a proposé une solution évitant la destruction de ce patrimoine tout en préservant la continuité écologique. Je salue ce travail et souhaite que nous le poursuivions. Culture et nature ne doivent pas être opposées !

M. Jean-Pierre Moga .  - La position de mon groupe est claire : nous refusons une continuité écologique qui détruirait systématiquement les retenues et les moulins. Les parties prenantes doivent pouvoir dialoguer de façon constructive. Trois à cinq mille retenues d'eau ont été détruites, en particulier des moulins. L'excellent rapport de Guillaume Chevrollier défendait pourtant une position plus apaisée, tout comme la rapporteure Laurence Muller-Bronn lors de l'examen de la proposition de loi Hydroélectricité. (On le confirme sur les travées du groupe Les Républicains.)

Cet article, introduit à l'Assemblée nationale par 29 amendements identiques, exclut la destruction des ouvrages hydrauliques. Je salue le travail de Pascal Martin qui propose une solution d'équilibre : la destruction des ouvrages ne doit pas être un principe, mais doit rester possible lorsque le propriétaire le souhaite. Une conciliation permettrait de réunir les acteurs en cas de désaccord. J'espère que le bon sens l'emportera. (M. Jean-François Longeot, président de la commission, applaudit.)

Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique .  - Nous devons concilier continuité écologique des cours d'eau et préservation de ce magnifique patrimoine dont nous sommes fiers. Cette ligne de crête n'est pas facile à trouver.

Des problèmes ont été rencontrés sur divers territoires, d'où cet article voté par l'Assemblée nationale, qui empêche de réaliser des travaux pour la restauration de la continuité écologique, y compris lorsque le propriétaire est d'accord.

La rédaction élaborée par votre commission est bien plus équilibrée : elle permet de conserver les ouvrages tout en rendant possible des travaux en cas d'accord des acteurs concernés. C'est un point d'équilibre qui fait honneur au débat parlementaire. Rajouter une médiation pourrait également être intéressant.

M. Jean-Pierre Corbisez .  - Avec Daniel Gremillet, nous avions reçu France Hydroélectricité. Madame la ministre, le bon sens prévaudra si le ministère surmonte la querelle entre développement durable et défense de la faune et de la flore !

J'habite entre un moulin et une écluse. J'ai voulu installer un petit ouvrage d'hydroélectricité. L'ingénieur travaux a validé mon dossier mais il m'a dit qu'il fallait voir avec sa collègue faune-flore. Elle m'a demandé de procéder à de nombreuses études et les services n'ont toujours pas répondu, cinq ans après. La solution, c'est le préfet. En tant que patron des services de la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), il peut signer ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; MM. Jean-Claude Requier et Stéphane Demilly applaudissent également.)

L'amendement n°329 rectifié n'est pas défendu.

M. le président.  - Amendement n°510 rectifié bis, présenté par MM. Chevrollier, Favreau et Piednoir, Mme Muller-Bronn, M. de Nicolaÿ et Mmes Deroche et Doineau.

Rédiger ainsi cet article :

Le 2° du I de l'article L. 214-17 du code de l'environnement est ainsi modifié :

1° La seconde phrase est complétée par les mots : « , sans que puisse être remis en cause son usage actuel ou potentiel, en particulier aux fins de production d'énergie » ;

2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « S'agissant plus particulièrement des moulins à eau, l'entretien, la gestion et l'équipement des ouvrages de retenue sont les seules modalités prévues pour l'accomplissement des obligations relatives au franchissement par les poissons migrateurs et au transport suffisant des sédiments, à l'exclusion de toute autre, notamment de celles portant sur la destruction de ces ouvrages. »

M. Guillaume Chevrollier.  - Nous partageons tous la volonté de restaurer la continuité écologique de l'eau. Mais sur le terrain, les incompréhensions sont nombreuses : la destruction des ouvrages est souvent préférée à l'aménagement.

Cet amendement rétablit la rédaction de l'article 19 bis C résultant des travaux de l'Assemblée nationale. Il est soutenu par des acteurs de terrain.

La rédaction proposée par la commission est pertinente s'agissant de la médiation et des aides des agences de l'eau pour la suppression volontaire des seuils, mais celle de l'Assemblée nationale offre un degré de protection supérieur pour les propriétaires de ces ouvrages. Un vote conforme est donc préférable.

Respectons le triptyque : gestion, entretien, équipement.

M. le président.  - Amendement n°1418, présenté par Mme M. Filleul et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Rédiger ainsi cet article :

Le 2° du I de l'article L. 214-17 du code de l'environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cas où les solutions de mise en conformité des ouvrages, dont l'arasement, ont pour incidence de porter une atteinte grave à l'intérêt patrimonial de ces derniers ou à supprimer des capacités de production hydroélectrique que souhaiteraient préserver le propriétaire, ou ne seraient pas acceptées par les propriétaires, un argumentaire devra être présenté par l'administration instructrice. En cas de conflit persistant entre le propriétaire et les services instructeurs, une procédure de conciliation est engagée, pilotée par un référent territorial nommé par le représentant de de l'État dans le département au sein des services de l'État. En cas d'échec de la procédure de médiation territoriale, le comité national de l'eau sera mandaté pour proposer des solutions consensuelles. Un décret précisera le contenu de l'argumentaire, les modalités de recours à la procédure de conciliation territoriale et nationale, les missions du référent, les missions et la composition de la commission d'expertise qui sera constituée pour accompagner le comité national de l'eau. »

Mme Martine Filleul.  - Décidément, ce sujet aura donné beaucoup de grain à moudre à notre assemblée... (Sourires)

Le groupe SER ne veut pas remettre en cause la restauration de la continuité écologique des cours d'eau. La directive Eau de 2000 visait le bon état écologique les deux-tiers des masses d'eau en 2015 ; seuls 44 % on atteint ce seuil, du fait de rivières trop artificialisées, de pollutions agricoles et de prélèvements trop importants.

Tous les moulins ne sont pas menacés de destruction. Recherchons un équilibre entre environnement et développement de la petite hydroélectricité.

Cet amendement promeut la conciliation et le dialogue en cas de conflit. Il a été travaillé avec l'Association nationale des élus de bassin. Toute solution de mise en conformité conduisant à la suppression des capacités de production hydroélectrique ou portant atteinte à l'intérêt patrimonial devra être accompagnée d'un argumentaire de l'administration. En cas de conflit, une procédure de conciliation sera engagée. En cas d'échec de celle-ci, le Comité national de l'eau sera mandaté pour présenter des solutions consensuelles.

M. le président  - J'invite chacun à respecter son temps de parole.

M. Pascal Martin, rapporteur.  - Je salue le rapport de M. Guillaume Chevrollier et le travail de Mme Laurence Muller-Bronn sur la proposition de loi de M. Daniel Gremillet relative à la petite hydroélectricité.

Ce sujet a fait l'objet de débats passionnés à l'Assemblée nationale. Nous sommes sensibles à la question des moulins à eau.

L'article voté à l'Assemblée nationale, que rétablit l'amendement n°510 rectifié bis, est juridiquement plus fragile que la rédaction de la commission. Certains s'inquiètent toutefois d'une éventuelle suppression de l'article en CMP... Je m'en remets donc à la sagesse du Sénat. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Françoise Gatel.  - Bravo !

M. Pascal Martin, rapporteur.  - Les prescriptions administratives en matière d'aménagement d'ouvrages hydrauliques provoquent de nombreuses tensions. L'amendement n°1418, qui propose une conciliation, est satisfait par la rédaction de la commission. Retrait ou avis défavorable.

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - Le débat a été riche. Les cas particuliers qui nous remontent sont étudiés. Je remercie la commission du Sénat, qui propose une rédaction de compromis. Les médiations sont nécessaires, chacun en convient. En votant l'amendement de M. Chevrollier, on se priverait de cet outil. Or il faut pouvoir intervenir sur les ouvrages sans propriétaire ou lorsque les propriétaires le souhaitent. Mon amendement n°2144 organise des médiations locales et nationales. Je demande donc à M. Chevrollier de retirer son amendement.

Sur l'amendement n°1418, demande de retrait au profit de l'amendement n° 2144.

M. Ronan Dantec.  - J'avais cru comprendre que le Sénat avait fait oeuvre utile et que le Gouvernement avait entendu le message. Si un compromis a été trouvé, pourquoi y revenir ? Restons-en au dispositif de la commission, fruit d'un travail collectif. Je retire mon amendement n°1872.

La restauration des continuités est une priorité européenne, avec des enjeux écologiques. Je le vois en Loire-Atlantique : pour éviter le développement des cyanobactéries, il faut limiter les intrants et faire circuler l'eau.

L'amendement n°1872 est retiré.

M. Daniel Gremillet.  - Nous avons tous une histoire de vie dans nos territoires. Un ruisseau prend sa source à un kilomètre de mon village : la Bouillante. Je suis pêcheur, dans tous les sens du terme... (On se récrie sur les travées du groupe Les Républicains) Et j'ai toujours attrapé des truites en amont ou en aval du moulin et de la turbine.

La vie d'un cours d'eau est complexe. Nous ne venons pas de nulle part : nos anciens ont permis la préservation de la richesse aquatique. Je voterai l'amendement de M. Chevrollier et je remercie le rapporteur pour son avis de sagesse car il faut sortir de l'impasse dans laquelle nous sommes depuis si longtemps. Il n'y aura pas d'innovation sans investissement.

Je serai content que mon amendement devienne sans objet si celui de M. Chevrollier est adopté car il n'y aura alors plus de conflits. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Françoise Gatel applaudit également.)

Mme Nathalie Goulet.  - La pratique parlementaire nous a prouvé qu'il vaut mieux tenir que courir. Ce sujet est très prégnant dans l'Orne, où nous avons de nombreux ouvrages et moulins.

La motivation des associations est forte. Je me réjouis de cette solution équitable. Quand il y a une médiation, il y a un risque. En outre, la position des administrations varie d'un territoire à l'autre.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission.  - Voilà des années que nous attendions cette disposition pour les moulins. La rédaction de la commission met la médiation au centre du dispositif, mais l'amendement de M. Chevrollier offre plus de garanties. Nous serons ainsi certains d'avoir avancé et d'avoir une base juridique ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur diverses travées du groupe UC)

Mme Barbara Pompili, ministre.  - Aujourd'hui même, les bacheliers planchent en philosophie sur le sujet : « la technique nous libère-t-elle de la nature ? » Je pense à ma fille, dont j'attends l'appel... (Sourires)

Le dispositif de l'Assemblée nationale ne prévoit aucun moyen de réagir en cas de régression environnementale avérée. Divers députés de tous bords m'ont dit qu'ils comptaient sur le Sénat pour améliorer la rédaction de l'article.

Mme Sophie Primas, présidente de la commission.  - Inscrivez à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale la proposition de loi de Daniel Gremillet !

Mme Barbara Pompili, ministre.  - Votre commission a trouvé un bon équilibre. Il ne pourra plus y avoir d'arasement de seuils sans l'accord du propriétaire, comme vous le souhaitez.

Sans médiation, les conflits perdureront et les recours se multiplieront.

Je vous invite à confirmer l'équilibre trouvé en commission. Faisons preuve d'intelligence collective.

Le Gouvernement s'engage à ne pas supprimer cet article en CMP. Si celle-ci échoue, nous défendrons cette position en nouvelle lecture. Vous ne prenez donc aucun risque en votant le dispositif de la commission. Attention aux régressions environnementales !

M. Daniel Salmon.  - J'entends les explications de Mme la ministre. Malgré les intérêts contradictoires, des convergences peuvent être trouvées dans un souci d'apaisement. Ce que fait le dispositif de la commission. L'adoption de l'amendement de M. Chevrollier braquerait les associations et conduirait à des recours au niveau européen.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Je suis étonné que vous preniez un engagement au nom de la CMP, madame la ministre. Je suis confus de devoir rappeler que le Gouvernement n'y siège pas...

M. Jean-François Longeot, président de la commission.  - Je remercie Ronan Dantec d'avoir retiré son amendement.

Tel que rédigé par la commission, l'article 19 bis C est parvenu à un compromis. Conservons ce dispositif sage, dont nous avons beaucoup discuté, au lieu de figer les choses. (Mme la ministre approuve.)

Monsieur Sueur, je ne sais pas ce qui se passera en CMP, mais sachez que je saurai y rappeler les propos de Mme la ministre.

M. Marc Laménie.  - Au nom de la défense du petit patrimoine, j'aurais volontiers soutenu l'amendement de M. Chevrollier bien que je ne sois pas spécialiste des moulins. Ma passion, ce sont les petites lignes ferroviaires et les petites gares...

Mais je suivrai l'avis de la commission, en remerciant Mme la ministre pour son engagement.

M. Jean-François Longeot, président de la commission.  - Je demande une courte suspension de séance.

La séance est suspendue quelques instants.

M. Didier Mandelli.  - Il m'incombe de tenter d'éclairer la position de la commission et de la majorité sénatoriale sur ce sujet sensible. Nous vous demandons de voter l'amendement de Guillaume Chevrollier.

Je remercie les ministres pour l'engagement ferme qu'elles ont pris, mais nous souhaitons que, pour régler ces questions, la proposition de loi de Daniel Gremillet soit inscrite à l'ordre du jour. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mmes Françoise Gatel et Nathalie Goulet applaudissent également.)

Nous saluons néanmoins les efforts du rapporteur.

L'amendement n°510 rectifié bis est adopté.

L'article 19 bis C, ainsi rédigé, est adopté.

(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du groupe UC)

Les amendements nos1418, 2144, 1851 et 967 rectifié bis n'ont plus d'objet.

ARTICLE 19 BIS D

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques .  - La Convention citoyenne sur le climat a formulé de nombreuses propositions sur la forêt mais peu ont été retenues par le Gouvernement.

La forêt française, l'une des plus grandes et plus diversifiées d'Europe, absorbe 11 % de nos émissions de GES, filtre l'eau et l'air, rafraîchit les températures, abrite un réservoir de biodiversité. Le bois est en outre un matériau de substitution, renouvelable, au bilan carbone faible.

Ces dernières années, la forêt a subi de plein fouet les effets du changement climatique : sécheresses, prolifération de parasites et insectes ravageurs, risque incendie croissant.

La réponse passe par plus de pragmatisme local et de multifonctionnalité, concept de gestion forestière qui privilégie la conciliation des enjeux environnementaux, sociaux et économiques.

Grâce aux chartes forestières, des progrès ont été faits. Prélever du bois pour construire tout en séquestrant du carbone, préserver le stockage du carbone dans les sols et la biodiversité, accueillir les promeneurs dans les forêts publiques et privées, tels sont les fondements de gestion multifonctionnelle.

La commission des affaires économiques a enrichi les trois articles introduits à l'Assemblée nationale et en a adopté d'autres pour développer le label bas carbone en forêt, étendre le paiement pour services environnementaux à la forêt, préserver la qualité des sols forestiers, prendre en compte le risque incendie en permettant aux maires d'imposer des obligations de débroussaillement ou encore tenter de maîtriser l'exportation massive de bois d'oeuvre.

Ainsi amendé, l'article 19 bis D adapte le code forestier pour répondre aux défis.

M. René-Paul Savary.  - Très bien !

Mme Kristina Pluchet .  - Si la forêt doit s'adapter au dérèglement climatique, elle est aussi une solution pour lutter contre celui-ci. Il est impératif de renforcer sa place et de sécuriser sa bonne gestion pour optimiser ses atouts.

D'où l'intérêt d'une reconnaissance officielle des services écosystémiques, via une certification, pour favoriser une sylviculture à couvert continu, à l'inverse d'une exploitation forestière monoculture de masse. Les performances écosystémiques de la sylviculture mélangée ne sont plus à démontrer : une forêt en futaie irrégulière stocke six à huit fois plus de carbone.

Le Bundestag a récemment missionné les ministères de l'agriculture et de l'environnement pour étudier une rémunération des services rendus par la forêt. Il faut accroître au maximum la capacité de photosynthèse.

Envisageons une rémunération de ces services, contrepartie de la bonne gestion des forêts privées et publiques. Labellisons, développons et rémunérons ces pratiques vertueuses.

M. Jérémy Bacchi .  - La forêt était la grande absente du projet de loi initial. Il est heureux que le travail parlementaire ait permis d'y remédier.

La forêt capte 20 % des émissions de CO2, rend gratuitement des services inestimables et ne reçoit rien en échange. Pire, devenue valeur refuge, elle est acquise par des spéculateurs sans scrupule qui investissent dans des résineux type Douglas.

La Convention citoyenne sur le climat a au contraire appelé à privilégier une gestion sans destruction du couvert forestier, à minimiser la replantation de résineux, à veiller au mélange des variétés, à interdire les coupes rases et surtout à pérenniser l'Office national des forêts (ONF). Saigné à blanc, il a perdu 38 % de ses effectifs, alors que ses agents sont précieux pour la filière et conseillent propriétaires et collectivités territoriales. Renoncez à votre politique de démantèlement de ce service public essentiel, mesdames les ministres !

M. René-Paul Savary .  - Je remercie Mme Loisier pour son engagement en faveur de la forêt publique et privée. Dans la lignée de l'orateur précédent, je défends les agents des centres régionaux de la propriété forestière (CRPF). Les propriétaires ont besoin de conseils pour faire évoluer leurs pratiques.

D'où l'importance de conserver l'article 19 bis EA, introduit par le Sénat, qui prolonge les codes de bonnes pratiques sylvicoles. Les organismes ont besoin de soutien. Il faut trouver des maîtres d'ouvrage et d'oeuvre pour réfléchir par massif forestier. Maintenez cet article à l'Assemblée nationale, madame la ministre !

La forêt est morcelée. Il existe certes un droit de préférence mais quand on vend plusieurs parcelles, il y a souvent plus de dix voisins ! Il se résume à un droit de publicité.

En cas de vente de parcelle de bois avec quelques mètres carrés de pré, la parcelle est mixte et le droit de préférence ne s'applique pas. Revenons dessus. (M. Louis-Jean de Nicolaÿ approuve.)

M. le président.  - Amendement n°1878, présenté par M. Labbé et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

I.  -  Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...) Au 1°, après le mot : « forêts », sont insérés les mots : « en tant que milieu naturel et puits de carbone » ;

II.  -  Alinéa 6

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

...° L'article L. 112-2 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « à l'équilibre biologique » sont remplacés par les mots : « au maintien, et le cas échéant à la restauration, d'un bon état de conservation des forêts en tant que milieu naturel et puits de carbone » ;

b) À la fin du second alinéa, les mots : « sage gestion économique » sont remplacés par les mots : « gestion durable et multifonctionnelle garantissant la préservation de la biodiversité ainsi que de l'environnement et permettant de lutter contre le dérèglement climatique ».

III.  -  Alinéa 9

Compléter cet alinéa par les mots :

notamment les propriétaires privés, les entreprises, les associations de protection de l'environnement et les citoyens

IV.  -  Alinéa 11

Remplacer les mots :

matière d'essences,

par les mots :

favorisant le mélange d'essences à l'échelle de la parcelle,

V.  -  Alinéa 12

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

e) Après le 4°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...°  À la promotion de la régénération naturelle, à la limitation du recours aux plantations en excluant, au plus tard au premier janvier 2023, toute plantation en plein d'une seule essence et au développement d'une gestion forestière à couvert continu ; »

VI.  -  Alinéa 14

1° Après le mot :

oeuvre

insérer le mot :

massif

2° Compléter cet alinéa par les mots :

, notamment par la structuration de filières industrielles adaptées, et à l'empêchement de l'enrésinement des forêts aux niveaux national et local

VII.  -  Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

...° Le premier alinéa de l'article L. 121-6 est complété par les mots : « , ainsi qu'à la démonstration des bénéfices apportés pour la réalisation des objectifs prévus à l'article L. 121-1 ».

M. Joël Labbé.  - Cet amendement intègre les objectifs de lutte contre le dérèglement climatique, de renforcement de la résilience de la forêt et de préservation de la biodiversité en rééquilibrant les articles de principe du code forestier et de la politique forestière nationale.

L'article, vidé de sa substance à l'Assemblée nationale, est insuffisant. L'introduction, en commission, de la notion de gestion multifonctionnelle est une avancée, mais il faut aller plus loin.

Les plantations de résineux et les coupes rases fragilisent la forêt face au changement climatique. Sècheresse, tempêtes, insectes : les crises se multiplient, sans qu'il n'y ait de réorientation de la politique forestière. La tendance à l'industrialisation de la forêt, le remplacement de feuillus par des résineux nuisent à sa résilience.

C'est pourquoi nous précisons que la politique forestière favorise les pratiques maintenant un couvert forestier continu et une diversité d'essences à l'échelle de la parcelle, via l'interdiction des plantations monospécifiques en 2023 et la limitation des forêts de résineux

M. le président.  - Amendement n°1419 rectifié, présenté par Mme M. Filleul et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...) Le début du 5° est ainsi rédigé : « Le rôle de puits de carbone par... (le reste sans changement) » ;

Mme Martine Filleul.  - Les forêts, en tant que milieu naturel et puits de carbone, doivent être reconnues d'intérêt général. Elles sont le deuxième plus grand puits de carbone de la planète après les océans. Elles captent du CO2 durant toute leur croissance, et stockent le carbone sur le long terme. Le bois peut également être substitué à des matériaux plus énergivores.

Ce sont toutefois des milieux vulnérables, fragilisées par les effets du changement climatique. Le Haut Conseil pour le climat (HCC), en avril 2020, proposait de consacrer plus de moyens à la consolidation de ces puits.

M. le président.  - Amendement n°2110, présenté par MM. Rambaud, Marchand et Lévrier et Mmes Schillinger et Havet.

I.  -  Après l'alinéa 9

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

 ...) Le 1° est complété par les mots : « en prenant en compte la problématique du changement climatique afin de favoriser la résilience des forêts en mobilisant l'ensemble des techniques sylvicoles notamment la diversification des essences, la migration assistée ou la régénération naturelle quand elles sont appropriées » ;

II.  -  Alinéas 11 et 12

Supprimer ces alinéas.

III.  -  Alinéa 14

Après le mot :

provenant

insérer le mot :

notamment

Mme Nadège Havet.  - Il s'agit d'améliorer la rédaction de l'article L121-1 du code forestier après les modifications apportées à l'Assemblée nationale.

La résilience des forêts face au changement climatique est un objectif majeur du Gouvernement, porté également par le plan de relance. La promotion du bois d'oeuvre issue de feuillus est à prioriser, sans exclure la valorisation des résineux.

M. le président.  - Amendement n°816 rectifié, présenté par M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Alinéa 11

Remplacer les mots :

matière d'essences

par les mots :

favorisant le mélange d'essences à l'échelle de la parcelle

II.  -  Alinéa 12 

Remplacer les mots :

migration assistée des essences ou à la régénération naturelle

par les mots :

régénération naturelle si elle est possible et, en cas d'impossibilité, à la migration assistée de gènes ou d'essences de zones plus chaudes et plus sèches

M. Gérard Lahellec.  - L'article 19 bis D n'explicite pas suffisamment l'importance fondamentale du mélange des essences, notamment pour stocker le carbone, comme l'a expliqué M. Labbé. Cela permet la régénérescence naturelle des forêts. Attention au risque de monoculture des essences qui poussent le plus vite.

M. le président.  - Amendement n°1879, présenté par M. Labbé et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Alinéa 11

Remplacer les mots :

en matière d'essences

par les mots :

en favorisant le mélange d'essences à l'échelle de la parcelle

M. Joël Labbé.  - Les experts de l'INRA préconisent d'atténuer le risque biotique en favorisant le mélange d'essences, qui améliore la stabilité des arbres face au vent et leur résilience à la sécheresse. Or 84 % des plantations sont monospécifiques ; dix essences seulement totalisent 92 % des plants, dont plus de 80 % de résineux.

Cet amendement reprend une proposition de la Convention citoyenne pour le climat.

M. le président.  - Amendement n°1880, présenté par M. Labbé et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Alinéa 12

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

e) Après le 4°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° À la promotion de la régénération naturelle, à la limitation du recours aux plantations en excluant, au plus tard au premier janvier 2023, toute plantation en plein d'une seule essence et au développement d'une gestion forestière à couvert continu ; »

M. Joël Labbé.  - La migration assistée des essences n'est pas forcément une réponse adaptée ; elle est d'ailleurs peu mise en pratique. Cet amendement préconise la régénération naturelle pour capitaliser sur les modifications génétiques naturelles qui permettent l'adaptation climatique, y compris pour sélectionner de nouvelles essences. Les pratiques de plantations de migration devraient intervenir seulement en complément ou si la régénération naturelle est impossible.

Cette solution répond aux attentes sociétales en faveur d'une gestion forestière respectueuse des paysages. En outre, elle présente un intérêt économique et climatique car elle renforce la résilience et la durabilité.

M. le président.  - Amendement n°1420, présenté par Mme M. Filleul et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'alinéa 12

Insérer un deux alinéas ainsi rédigés :

...) Après le 4°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° À la promotion de la régénération naturelle, à la limitation du recours aux plantations en excluant toute plantation en plein d'une seule essence et au développement d'une gestion forestière à couvert continu ;

Mme Martine Filleul.  - Seuls 18 % des écosystèmes forestiers remarquables sont dans un bon état de conservation. La France s'était pourtant engagée à mettre fin à l'érosion de la biodiversité en forêt avant 2010... Plutôt que de miser sur la diversification et la résilience, la tendance est à la monoculture : 84 % des nouvelles plantations sont monospécifiques. Des forêts diversifiées en bonne santé sont converties par coupes rases - un pari risqué, car ces monocultures sont plus sensibles au changement climatique.

M. le président.  - Amendement n°1421, présenté par Mme M. Filleul et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 14

Compléter cet alinéa par les mots :

, notamment par la structuration de filières industrielles adaptées, et à l'empêchement de l'enrésinement des forêts aux niveaux national et local

Mme Martine Filleul.  - L'utilisation de bois d'oeuvre provenant de feuillus doit être raisonnée et son extraction gérée durablement. Réduire le puits de carbone et la biodiversité est un pari risqué. Nous déplorons les coupes rases de forêts qualifiées de pauvres. La promotion de bois d'oeuvre issu de feuillus passe par la structuration de filières industrielles et la limitation de l'enrésinement des forêts.

M. le président.  - Amendement n°1422, présenté par Mme M. Filleul et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

...° Le premier alinéa de l'article L. 121-6 est complété par les mots : « , ainsi qu'à la démonstration des bénéfices apportés pour la réalisation des objectifs prévus à l'article L. 121-1 ».

Mme Martine Filleul.  - Nos forêts, y compris ultramarines, constituent un atout majeur. L'homme a façonné la forêt selon ses besoins ; elle s'est adaptée, faisant preuve de résilience, mais on constate toutefois les dommages déjà subis, notamment dans l'Est de la France. Saura-t-elle faire face au changement climatique ?

Les forêts doivent à la fois contribuer à l'atténuation du changement climatique tout en s'y adaptant.

Cet amendement conditionne l'attribution des aides publiques à la démonstration des bénéfices apportés pour la réalisation des objectifs de notre politique forestière.

Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteure pour avis.  - Avis favorable à l'amendement n°1419 rectifié qui apporte des précisions utiles. Avis favorable à l'amendement n°2110.

Avis défavorable à l'amendement n°816 rectifié, car la migration assistée des essences est une technique essentielle face à un changement climatique très rapide.

Le mélange d'essences à l'échelle de la parcelle n'est pas réaliste : avis défavorable à l'amendement n°1879. Nous voulons une forêt mosaïque à l'échelle du massif.

Avis défavorable aux amendements nos1880, 1420 et 1421, qui interdisent la plantation en plein d'une seule essence. C'est excessif et inadapté aux besoins de la multifonctionnalité.

La gestion forestière se fait d'abord in situ : faisons confiance aux forestiers sur le terrain. (Mme la secrétaire d'État approuve.)

L'amendement n°1422 sur la conditionnalité des aides publiques est satisfait par les documents de gestion durable, sur lesquels il convient d'être vigilant : retrait ou avis défavorable.

Avis défavorable à l'amendement n°1878, qui résume l'ensemble de ces propositions.

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - Je salue la volonté du Sénat d'enrichir le texte sur la question de la forêt, qui est un levier essentiel d'atténuation du dérèglement climatique et un réservoir de biodiversité. Les services environnementaux et socio-économiques qu'elle rend - pour le bien-être, la bioéconomie, les paysages - doivent être sécurisés et amplifiés. Le Gouvernement défend des orientations fortes et équilibrées en la matière, que je porterai prochainement avec Julien Denormandie.

L'amendement n°1878 est un best of des propositions des autres amendements. Oui à la diversification et au mélange d'essences, à la régénération naturelle, mais à définir à l'échelle locale, dans les schémas régionaux de de gestion sylvicole et dans les documents cadre de gestion forestière.

Avis favorable à l'amendement n°1419 rectifié, qui reprend le vocabulaire de la SNBC, ainsi qu'à l'amendement n°2110, qui fait écho aux moyens mobilisés dans le plan France relance.

Avis défavorable aux autres amendements : je vous rejoins sur le fond, mais il est préférable de mettre en cohérence les documents cadre plutôt que de fixer des critères prédéfinis au niveau national.

M. René-Paul Savary.  - La foret, c'est le temps long : les vieux forestiers vous diront qu'il faut cent ans quand on plante, trois cents ans pour la régénération naturelle. Vous investissez pour la génération suivante.

La forêt incite aussi à l'humilité, car la situation varie selon les massifs. L'épicéa est attaqué par la scolyte, le sapin par le gui, le douglas, par le cerf !

Les forestiers ont intégré la nécessité de futaies irrégulières. Laissons-leur la marge de manoeuvre et le temps nécessaire pour y arriver, pour organiser la formation et la transformation - encore faut-il savoir travailler les feuillus que l'on plantera au milieu de résineux...

Le Sénat a fait oeuvre utile, nous avançons dans la bonne direction. (M. Marc Laménie applaudit.)

M. Joël Labbé.  - Sur le temps long, nous avons pris du retard. Il est urgent de donner de nouvelles orientations. Nous sommes tous pour une forêt mosaïque. Le mélange des essences à l'échelle de la parcelle est gage d'équilibre.

Le Sénat aura enrichi le texte, c'est une fierté. Je salue le travail du groupe d'étude Forêt et filière bois.

M. le président.  - En raison des demandes de scrutin public, il est raisonnable de suspendre la séance. (Marques d'approbation sur le banc de la commission)