« Les oubliés du Ségur de la santé - Investissements liés au Ségur à l'hôpital »

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle le débat sur le thème : « Les oubliés du Ségur de la santé  -  Investissements liés au Ségur à l'hôpital », à la demande du groupe socialiste, écologiste et républicain.

Mme Annie Le Houerou, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain .  - Le personnel hospitalier est aujourd'hui confronté à une nouvelle vague épidémique. Dans ce contexte angoissé, nous saluons l'engagement de tous ceux qui prennent soin des malades et des plus fragiles.

Le 25 mars 2020, à Mulhouse, le Président de la République a annoncé un plan massif d'investissement et de revalorisation en faveur de l'hôpital.

Mais la santé, ce n'est pas seulement l'hôpital. Or le Ségur a été ciblé sur certaines catégories de personnels employés par l'hôpital stricto sensu. Les exclus, nombreux, ont ressenti un fort manque de considération.

Les professionnels du soin sont nombreux et divers : infirmiers, éducateurs, assistants sociaux, aides-soignants, agents administratifs, psychologues, puéricultrices, intervenants éducatifs, sages-femmes, ambulanciers et d'autres encore, travaillant dans des structures variées au service de publics qui le sont tout autant.

Au gré des sollicitations plus ou moins fortes de ces catégories, le Gouvernement a élargi le champ du Ségur par touches successives. Néanmoins, certaines catégories non soignantes des secteurs social et médicosocial ne sont toujours pas éligibles.

Ainsi, l'avenant 43 à la convention collective de l'aide à domicile n'est pas totalement satisfaisant : les agents des centres communaux et intercommunaux d'action sociale demeurent exclus des revalorisations, de même que les salariés du secteur privé. Par ailleurs, le coût des revalorisations n'est compensé par l'État qu'à 70 %, ce qui laisse un reste à charge trop élevé pour les départements.

En juillet dernier, la Fédération nationale des associations de directeurs d'établissements et services pour personnes âgées a signalé que les dotations pour 2020 étaient insuffisantes, ne couvrant qu'entre 50 et 70 % des besoins ; à la fin de l'année dernière, les financements complémentaires promis par le Gouvernement étaient toujours attendus. (Mme la ministre déléguée le conteste.)

Depuis plusieurs mois, le secteur médico-social alerte également sur ses graves difficultés de recrutement, pour partie liées aux disparités salariales consécutives au Ségur.

Nous saluons l'extension des revalorisations salariales du Ségur aux 20 000 professionnels du secteur du handicap.

Reste qu'il faudra plus de 90 000 infirmiers et plus de 200 000 aides-soignants dans les prochaines années pour accompagner le vieillissement de la population. Comment va-t-on faire face ?

Nous serons particulièrement attentifs à la Conférence des métiers de l'accompagnement social et médico-social, dont la tenue vient d'être reportée. Quand aura-t-elle lieu, et quelles orientations le Gouvernement proposera-t-il dans ce cadre ? Envisagez-vous l'élargissement des mesures du Ségur à tous les professionnels du soin ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE et du GEST)

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée, chargée de l'autonomie .  - La cinquième vague épidémique demande un effort massif à nos soignants. L'action menée par le Gouvernement pour les soutenir est d'une ampleur inédite.

Après plus de dix ans de sous-investissement dans les ressources humaines et les structures hospitalières, le Ségur de la Santé constitue le plus important plan de soutien à notre système de soin jamais mené par une majorité.

Le 25 mars 2020, à Mulhouse, le Président de la République a pris devant la Nation l'engagement de ce plan massif. Le Gouvernement a concrétisé cette ambition autour de quatre priorités : revaloriser les carrières, investir massivement, simplifier le quotidien des équipes et fédérer les acteurs sur les territoires.

Signés le 13 juillet suivant par le Premier ministre, les accords du Ségur prévoient une revalorisation de 8 milliards d'euros annuels, au bénéfice de 1,5 million de professionnels.

Dès décembre 2020, les personnels non médicaux et les sages-femmes de la fonction publique ont bénéficié d'une revalorisation minimale de 183 euros mensuels. Nous avons également revalorisé les grilles des personnels soignants, médicotechniques et de la rééducation.

Aides-soignants, infirmiers spécialisés ou non, cadres de santé, kinésithérapeutes, manipulateurs radio, ergothérapeutes, psychomotriciens : tous sont concernés, et d'autres encore.

Parlons concret : pour un infirmier de la fonction publique, le Ségur de la santé représente un complément de revenu de 290 euros nets en début de carrière, 335 euros nets après cinq ans et plus 530 euros nets en fin de carrière.

Les personnels médicaux ne sont pas en reste : nous avons fusionné leurs quatre premiers échelons et en avons créé trois nouveaux en fin de carrière. Nous avons mis en place des primes managériales pour les chefs de service et de pôle et revalorisé l'indemnité d'engagement de service public exclusif. Nous avons revalorisé les indemnités de stage des étudiants en santé et des internes pour accompagner les vocations.

S'agissant de l'avenir de notre système de santé, le Gouvernement a décidé, indépendamment du Ségur, de créer 16 000 places dans les formations sanitaires et sociales et de mettre un terme au numerus clausus.

Loin de l'idée selon laquelle il y aurait des oubliés du Ségur, nous répondons aux problématiques spécifiques des professions touchées par une perte d'attractivité. Sur ce fondement, nous avons méthodiquement étendu les revalorisations au-delà du périmètre initial.

Dès l'automne 2020, le Premier ministre a mandaté Michel Laforcade pour réfléchir sur les métiers de l'autonomie et négocier l'extension des revalorisations aux personnels paramédicaux liés aux Ehpad. Deux protocoles d'extension ont été signés dans ce cadre.

Depuis le 1er octobre 2021, tous les personnels non médicaux des structures sanitaires et médicosociales financées par l'assurance maladie perçoivent les 183 euros mensuels. Depuis le 1er janvier dernier, cette revalorisation bénéficie aussi à tous les personnels du handicap ou des soins à domicile.

J'insiste : nous avons adopté la compréhension la plus large possible de l'ambition initiale du Ségur.

Dans le même temps, nous travaillons à améliorer l'attractivité des métiers du social et à harmoniser le cadre conventionnel du secteur privé non lucratif. C'est le sens de la Conférence des métiers de l'accompagnement social et médico-social, qui réunira l'ensemble des financeurs ; retardée par le contexte sanitaire, elle se tiendra dans les prochaines semaines.

Parce que l'attractivité des métiers dépend aussi des conditions d'exercice, le Ségur de la santé investit massivement dans les structures, à hauteur de 19 milliards d'euros, ce qui correspond à la somme des plans Hôpital 2007 et Hôpital 2012 augmentée de 50 % du total... L'effort est plus important sous ce quinquennat que sous les trois précédents réunis !

Pour améliorer au plus vite le confort de travail, 1,5 milliard d'euros sont destinés aux investissements du quotidien. Les établissements les plus endettés bénéficieront d'une restauration de leurs capacités financières pour un coût de 6,5 milliards d'euros. Pour transformer notre système de santé dans les territoires, le Ségur prévoit 9 milliards d'euros pour le financement des projets structurants. Enfin, 2 milliards d'euros sont prévus pour le numérique en santé.

En mars dernier, le Premier ministre et le ministre de la santé ont présenté la stratégie nationale d'investissements en santé, assortie d'une forte dimension territoriale. Dans ce cadre, les ARS ont appliqué une méthode nouvelle, en négociant avec l'ensemble des acteurs et des élus concernés en un temps record et selon une logique non plus d'établissements, mais de territoires de santé.

Mon temps de parole étant épuisé, je poursuivrai mes explications en répondant aux orateurs.

Mme Laurence Cohen .  - Depuis le début de la crise sanitaire, les professionnels de la santé et du médico-social alertent sur les difficultés systémiques qu'ils rencontrent. Dès avant l'épidémie, ils remettaient en cause les choix politiques de restriction budgétaire opérés depuis plus de vingt ans.

Votre Gouvernement a été contraint à un Ségur. Mais le malaise persiste, et les démissions se multiplient.

Quant aux investissements, ils correspondent essentiellement à des reprises de dette et sont conditionnés à de nouvelles suppressions de postes.

Enfin, sur les 15 000 recrutements annoncés, la moitié correspond à des postes vacants...

Comment comptez-vous améliorer vraiment la formation et la reconnaissance des métiers ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - Le Ségur, ce sont 1,5 million de personnels revalorisés dès l'origine, puis 70 000 supplémentaires avec les accords Laforcade, 66 000 avec la deuxième salve d'extensions et 210 000 avec l'avenant 43. Au total, 1,8 million de personnes !

La sécurisation des environnements de travail passe par le soutien aux projets d'équipe, à travers notamment une prime d'engagement collectif, et au dialogue social.

Les ARS ont pour instruction de prioriser les recrutements les plus urgents : infirmiers diplômés d'État, notamment en pratique avancée ou en psychiatrie.

Mme Laurence Cohen.  - Si vous aviez tout bien fait, il n'y aurait pas un tel mécontentement... (Marques d'approbation à droite) Vous exigez toujours plus des soignants, mais sans les écouter ! (Mme la ministre déléguée s'exclame.)

La commission d'enquête sénatoriale en cours met en lumière un profond malaise. Allez-vous améliorer vraiment les conditions de travail des personnels ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE ; Mme Émilienne Poumirol applaudit également.)

Mme Élisabeth Doineau .  - Le deuxième pilier du Ségur prévoit 19 milliards d'euros d'investissement. C'est une somme très importante, mais rappelons que, dès la fin de 2019, 13 milliards d'euros étaient déjà annoncés. Cette enveloppe a simplement été requalifiée.

Comment cet investissement va-t-il se traduire sur les territoires ? De nombreuses questions se posent à cet égard.

Quels sont les priorités déterminées par le conseil national de l'investissement en santé, et comment l'ont-elles été ? Quel est le bilan des investissements courants ? Quel est l'échéancier pour la consommation des crédits ?

La situation des hôpitaux appelle une réponse urgente. La date de 2028 doit-elle laisser penser que le Gouvernement se ménage une réserve pour un prochain mandat ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - Il va de soi, madame la rapporteure générale, que je ne saurais répondre à autant de questions en deux minutes...

Nous avons déterminé des priorités nationales, et des enveloppes territorialisées ont été transmises aux ARS. Les besoins des Ehpad ont été évalués en concertation avec les élus. Partout, la coopération a été efficace.

C'est un véritable plan Marshall qui se met en place, sur trois ans. Une première enveloppe a été débloquée dès 2021. Les investissements consistent en reprise de dette hospitalière, mais aussi en financements pour les petits équipements ou le numérique.

Dans un bassin minier où il n'y avait plus de pneumologie, le secteur de Lens, tous les acteurs sont satisfaits de l'enveloppe, souvent promise mais jusqu'ici jamais accordée.

Mme Véronique Guillotin .  - J'ai écrit à Olivier Véran à la mi-décembre. Faute d'avoir obtenu une réponse - comme presque toujours quand nous sollicitons le Gouvernement -, je réitère ma question ce soir.

La situation dans le nord de la Lorraine suscite des inquiétudes sérieuses et durables. La stratégie Ségur en Grand-Est contient des nouvelles globalement rassurantes pour la Meurthe-et-Moselle, mais un hôpital, celui de Mont-Saint-Martin, privé mais assurant des missions de service public essentielles, est exclu.

La gestion des ressources humaines y est particulièrement complexe, compte tenu des conditions de travail et de rémunération bien plus favorables au Luxembourg voisin.

Pouvez-vous lever les inquiétudes des populations et des élus sur l'avenir de cet établissement ?

Par ailleurs, comment les 40 % de l'enveloppe non encore consommés vont-ils être gérés ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - L'établissement de Mont-Saint-Martin n'est nullement négligé. Au contraire, il fait l'objet d'une attention particulière de l'ARS et bénéficiera de tous les types d'aide possibles.

L'ARS lui a attribué 1,4 million d'euros pour l'investissement et 650 000 euros pour l'exploitation sur la période 2017-2019. Sans compter 2 millions d'euros pour la psychiatrie et 1 million d'euros d'aide exceptionnelle. Au total, 5 millions d'euros hors Ségur.

Dans le cadre du Ségur, cet établissement perçoit plus de 13 millions d'euros.

Dans le Grand-Est, 40 % seulement des fonds ont fait l'objet d'une annonce. Il reste 180 millions d'euros à répartir. Vous n'aurez pas longtemps à attendre pour connaître leur utilisation, et aucun établissement ne sera oublié.

M. Jean-Luc Fichet .  - Le 22 novembre dernier, j'ai reçu un collectif inédit d'employeurs et de syndicats de l'économie sociale et solidaire, demandant des revalorisations pour tous les personnels socio-éducatifs et administratifs.

Les inégalités salariales au sein d'une même équipe posent des problèmes de recrutement. Des structures ont déjà dû fermer.

La faiblesse des salaires est structurelle, les conditions de travail dégradées, la considération insuffisante.

Allez-vous rétablir une égalité de traitement en revalorisant tous les personnels ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - Je n'ai pas bien compris de quelle organisation vous parliez. L'aide à domicile a été revalorisée. Le secteur du handicap aussi est désormais inclus dans le champ du Ségur.

Nous avons établi un tarif national de référence pour que les salariés du secteur privé lucratif ne soient pas oubliés.

En ce qui concerne la fonction publique départementale et communale, il faudra une concertation avec les collectivités territoriales.

Nous n'excluons personne, mais nous allons vers des extensions progressives : nous avons commencé par la santé, puis élargi peu à peu. Toutes les catégories potentiellement revalorisables seront examinées.

M. Jean-Luc Fichet.  - Les conditions de travail sont mauvaises, les salaires bas. Il y a urgence à agir si nous ne voulons pas manquer de personnels compétents.

M. Dominique Théophile .  - Le directeur général du CHU de Guadeloupe et son adjoint ont été agressés sur leur lieu de travail. De telles violences sont inacceptables, surtout dans l'enceinte d'un hôpital.

Sur les 14 milliards d'euros du Ségur destinés à l'investissement, plus de 1 milliard d'euros iront aux outre-mer, en plus des financements déjà engagés.

En juillet 2020, M. Véran avait évoqué un Ségur spécifique aux outre-mer. L'idée n'est pas tombée dans l'oreille d'un sourd... Les hospitaliers ultramarins sont nombreux à réclamer une plus grande autonomie sanitaire, dont la refonte du coefficient géographique est la clé.

Nos collègues Arnaud et Karoutchi l'ont bien souligné dans un rapport : l'isolement géographique des outre-mer justifie un dimensionnement de l'offre de soins au moins équivalent à celui de l'Hexagone.

Un Ségur des outre-mer a-t-il des chances de voir le jour ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - Les violences dont vous avez parlé sont inacceptables. Nous devons présenter un front uni pour les condamner avec la plus grande fermeté.

Si le calendrier n'a pas permis un Ségur ad hoc, les outre-mer sont pleinement bénéficiaires des mesures du Ségur, en particulier des revalorisations.

Les départements et régions d'outre-mer (DROM) ont besoin d'investissements importants. Ils bénéficieront de 1 milliard d'euros en sus des opérations déjà engagées, à l'instar de la modernisation du CHU de Pointe-à-Pitre.

Le ministre travaille avec les ARS pour donner plus de souplesse aux outre-mer lorsque les dispositions métropolitaines ne sont pas adaptées.

La direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) travaille à une méthodologie robuste pour déterminer le coefficient géographique, en prévision du prochain PLFSS.

Nous restons mobilisés pour garantir un accès égal aux soins à tous les Français.

M. Franck Menonville .  - . Le 8 novembre dernier, le Gouvernement annonçait l'extension de la revalorisation de 183 euros mensuels à 20 000 personnes du secteur du handicap, un secteur touché par une pénurie.

Mais les annonces gouvernementales sont incomplètes : les éducateurs spécialisés, personnels administratifs et agents de sécurité sont exclus, alors qu'ils jouent un rôle essentiel auprès des personnes en situation de handicap. L'accompagnement de celles-ci ne se limite pas au soin !

Envisagez-vous d'étendre les revalorisations à l'ensemble des personnels du secteur médico-social ? À quelle échéance et avec quel accompagnement financier des départements ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - Dans le secteur du handicap, 20 000 personnes ont été revalorisées.

Pour les professionnels rémunérés par les départements, il faut d'autres mesures, à construire avec ces derniers. Nous avançons grâce à des concertations constantes -  je rencontre l'ensemble des présidents de département.

Le travail se poursuit pour inclure ces personnels dans la dynamique du Ségur, en remettant à plat les dispositifs avec les départements et les gestionnaires d'établissement. L'inspection générale des affaires sociales aussi travaille sur la question.

Mme Annie Delmont-Koropoulis .  - (M. Bruno Belin applaudit.) Les dates annoncées sont trop vagues, alors que les personnels attendent du concret.

Les personnels éducatifs participent aussi à l'accompagnement des personnes en situation de handicap ; ils ne doivent pas être oubliés.

Les praticiens hospitaliers en milieu de carrière se sentent oubliés, car les revalorisations ne concernent pas ceux embauchés avant 2020. Cette situation est très mal vécue, et il y a plusieurs milliers de recours individuels. Pas moins de 330 commissions médicales d'établissement ont adopté une motion demandant la généralisation de la nouvelle grille.

Allez-vous réexaminer ce dossier avec toute l'attention qu'il mérite ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - Cette situation est issue d'un accord entre les partenaires sociaux et la Fédération hospitalière, signé le 13 juillet dernier.

Les quatre premiers échelons ont été fusionnés pour encourager les nouveaux entrants et renforcer l'attractivité des métiers, pour un coût de 90 millions d'euros. Par ailleurs, des primes de chef de service et de chef de pôle ont été instaurées pour mieux reconnaître les fonctions managériales des médecins.

L'engagement du Gouvernement pour fidéliser les personnels non soignants à l'hôpital représente 500 millions d'euros.

Mme Annie Delmont-Koropoulis.  - Je le répète : il faut appliquer la nouvelle grille à tous.

Mme Raymonde Poncet Monge .  - Nous avons l'impression de poser les mêmes questions, mois après mois. Les réponses apportées ne sont pas systémiques, et il faut sans cesse combler les trous dans la raquette.

Il y a un double problème, de cohérence et de périmètre. Les revalorisations sont décidées suivant une logique de silo, qui ignore les interactions entre professionnels. Certains secteurs sont oubliés, comme la protection de l'enfance.

Une conférence des métiers est annoncée, une mission a été confiée à l'inspection générale des affaires sociales. Mais le Gouvernement compte-t-il remédier enfin aux disparités entre professionnels de la santé, au sens de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - Le travail social est une catégorie distincte de la santé, même si vous l'englobez dans la définition de l'OMS -  j'ai participé à son élaboration comme présidente du Haut Conseil du travail social.

Nous avons procédé à des extensions légitimes. Les professionnels de l'accompagnement social sont essentiels, mais relèvent des collectivités territoriales. Les départements sont les employeurs, il faut négocier avec eux : mission de l'inspection générale des affaires sociales et conférence des métiers de l'accompagnement, telles sont les prochaines étapes.

Dans mon département - je suis conseillère départementale -, nous travaillons déjà sur ces revalorisations, qui représentent un enjeu financier très important.

Mme Annick Jacquemet .  - Les départements sont très concernés par le Ségur. C'est ce que m'ont confirmé la présidente du conseil départemental et le directeur général des services du Doubs.

Les personnels socio-éducatifs, administratifs et techniques sont les victimes des disparités de rémunération au sein des équipes, qui suscitent des tensions. La cohérence salariale est essentielle : comment comptez-vous l'assurer ?

Une harmonisation entre public et privé est également nécessaire pour éviter les phénomènes de fuite entre filières.

Enfin, le bien-être au travail ne doit pas être oublié.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - D'extension en extension, nous avons fait bénéficier de plus en plus de personnels des revalorisations.

Les aides à domicile ont été revalorisées dès novembre dernier, pour les départements qui se sont engagés sur cette voie.

Pour les autres catégories, il faudra des négociations en concertation avec les départements. Le calendrier en sera déterminé avec eux.

Mme Émilienne Poumirol .  - Combien de professions négligées, que vous incluez au compte-gouttes... Je vous parlerai simplement des oublis du Ségur qui n'apporte qu'une réponse partielle et financière aux problèmes de la santé. Les professionnels sont écoeurés et la sécurité des patients est mise à mal par le manque de lits et de personnels, car les préoccupations financières priment sur la qualité des soins.

Pour boucher les trous, les hôpitaux ont recours à des intérimaires qui coûtent très cher, jusqu'à 3 000 euros pour une garde de 24 heures. Le plafonnement prévu n'est toujours pas mis en place...

Quand changerez-vous enfin de logique ? Il faut restaurer des carrières hospitalières solides. (Applaudissements sur les travées des groupeSER et CRCE)

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - Après deux ans de pandémie, la santé est bien la priorité du Gouvernement. Certes, tout ne va pas bien, mais admettez que du chemin a été parcouru (M. Julien Bargeton approuve) et que nous avons été plus loin que les gouvernements précédents.

Nous avons mis en place les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), car ce qui attire les professionnels, c'est l'exercice collectif.

Nous avons desserré puis supprimé le numerus clausus qui est à l'origine de notre pénurie de médecins. Cette année, 10 500 étudiants ont été admis en deuxième année : cela aura un effet sur le long terme.

Le numérique en santé n'est pas un gadget ; la pandémie l'a montré. Nous sommes passés de 10 000 à plus d'un million de téléconsultations en quelques semaines.

Enfin, nous avons rompu les frontières du corporatisme en mettant en place des protocoles de coopération entre professions de santé et en développant les pratiques avancées.

Mme Alexandra Borchio Fontimp .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La cinquième vague est bien là. Les Français se testent. Les contaminations s'envolent. Beaucoup craignent que cela devienne l'ordinaire.

Pourtant l'hôpital va encore plus mal qu'avant la pandémie, il se meurt un peu plus chaque jour. Les professionnels de santé sont épuisés et méprisés. À l'hôpital d'Antibes, les soignants ne cessent d'attirer mon attention sur l'insuffisante reconnaissance du travail de nuit.

Oui, le Ségur a été utile, mais la multiplication des plans blancs ne saurait masquer les défaillances de l'hôpital.

Alors qu'il est essentiel de réarmer les lits de réanimation, comment expliquez-vous que les décrets sur les carrières des professionnels concernés aient été retardés ?

L'hôpital public va mal, c'est une bombe à retardement.

Que comptez-vous faire pour éviter une saturation mortifère de nos hôpitaux à chaque pic épidémique ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - Voilà plutôt un réquisitoire qu'une question. Mais madame, l'hôpital a tenu et nous devrions tous nous en féliciter. Je tiens à en remercier les personnels.

Doublement des heures supplémentaires, doublement du temps de travail additionnel, mobilisation des libéraux... Nous avons permis la permanence des soins.

Je trouve assez fort, face aux revalorisations des salaires, face aux milliards d'euros pour l'investissement, face à la reprise de dette de l'hôpital, d'entendre un discours qui se borne à cibler les manques, sans le moindre signe d'espoir ou de réconfort à l'égard des personnels. Il y en a pourtant qui nous disent merci.

Pensez-vous que votre discours misérabiliste rendra les carrières plus attractives ? (On s'amuse sur les travées du groupe Les Républicains.)

Ce que nous avons fait, vous ne l'aviez pas fait auparavant. Et vous n'avez jamais subi une telle pandémie. (Protestations agacées sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Victoire Jasmin .  - Au nom de tous les élus de la Guadeloupe, j'apporte un soutien inconditionnel au directeur général du CHU de la Guadeloupe et à son adjoint, agressés hier soir. (Applaudissements)

Les nombreuses vagues en outre-mer ont mis en évidence les insuffisances structurelles de l'offre de soins. Les personnels qui n'ont pas bénéficié des revalorisations ont un sentiment d'injustice. Cela crée des situations de concurrence déloyale entre établissements et pose des problèmes de recrutement pour les employeurs privés, notamment les associations. Il en découle parfois des tensions entre salariés, voire des ruptures de prise en charge.

Comment rétablir une certaine équité salariale ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - Le Ségur a connu des évolutions successives de périmètre. Des mécanismes de péréquation ont été mis en place pour couvrir, au moins en partie et parfois intégralement, les besoins de financement supplémentaires. L'Ondam est au bon niveau, il s'agit ensuite d'une répartition entre établissements, en fonction des besoins.

Les établissements privés peuvent bénéficier d'investissements, mais pas de la reprise de dette. Le secteur public bénéficie des plus gros montants car il rassemble les plus gros établissements : c'est ainsi que le CHU de Pointe-à-Pitre a bénéficié de 600 millions d'euros, intégralement financés par l'État.

Une étude pour la création d'une faculté de médecine de plein exercice aux Antilles est en cours, car aujourd'hui les étudiants de médecine doivent tous venir en métropole pour suivre leur deuxième cycle. Nous sommes déterminés à faire aboutir ce projet.

M. Bruno Belin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La France est malade. Pour la soigner, votre gouvernement a fait un Ségur de la santé. Après des décennies de sous-investissement, certes, vous n'êtes pas responsable de la situation. Cependant, il y a des paquets d'oubliés, notamment dans le médico-social.

Où en est le grand projet de loi autonomie, annoncé au début du quinquennat ? Que comptez-vous faire sur les Ehpad ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - Le Ségur s'est adressé à tous ceux qu'on avait oubliés avant... il répare ces oublis.

Il y a 7 500 Ehpad en France, 15 000 établissements en tout, soit 600 000 places. Les directions nous le disent : elles n'ont plus de listes d'attente. Elles souffrent d'un manque de soignants et d'un manque d'investissements que nous sommes en train de réparer, grâce à 2,1 milliards d'euros.

Il y a des établissements qui me donnent envie de fuir quand je les visite. Seulement 20 % d'entre eux ont été rénovés au cours des quinze dernières années. Chambres doubles, une douche pour 25 résidents ... cela ne choquait personne jusqu'à présent. (Protestations houleuses sur les travées du groupe Les Républicains) Pour ma part, dès mon arrivée aux affaires, j'ai lancé une mission d'urgence sur le sujet des Ehpad.

Des établissements seront ouverts, d'autres seront modernisés. Il y va de la qualité de vie des résidents.

M. Bruno Belin.  - La météo d'hier n'intéresse personne. Vous faites preuve d'une totale imprévoyance sur le grand âge, alors que six millions de Français ont plus de 80 ans, dont 15 % seront dépendants. Aucune place n'est prévue, ni pour les personnes âgées, ni pour les personnes handicapées...

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - C'est complètement faux ! Il y en a 10 000 ! Avez-vous au moins lu le projet de loi de financement de la sécurité sociale ?

M. Bruno Belin.  - Gardez votre calme, madame la ministre, vous montrez votre position de faiblesse !

Votre gouvernement a instauré un forfait patient-urgences : je vous demande de ne pas l'appliquer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Madame la présidente, l'attitude de Mme la ministre n'est pas respectueuse de cette assemblée. (Mme la ministre s'indigne et proteste avec véhémence.)

Mme la présidente.  - Monsieur Belin, acte est donné de votre remarque (Mme la ministre redouble d'indignation). Madame la ministre, nous ne sommes pas aux questions au Gouvernement à l'Assemblée nationale. Revenons au débat.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - Je ne me laisserai pas insulter !

Mme Martine Berthet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le Ségur apporte des aides, mais combien manquent encore... La démarche n'est pas sans contradiction : les crédits d'investissement permettront des rénovations, mais ceux liés à la reprise de la dette interdisent aux établissements de recourir à la dette.

Le centre hospitalier de la Maurienne a besoin de 16,5 millions d'euros pour sa rénovation. Le Ségur lui attribue 14,9 millions et tous s'en félicitent ; mais une convention de réduction de l'endettement a été signée, interdisant à l'hôpital d'emprunter les 1,6 million d'euros nécessaires. D'un côté, on ouvre les vannes, de l'autre on serre la vis.

Quels assouplissements proposez-vous ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - L'agence régionale de santé (ARS) Auvergne-Rhône-Alpes ne semble pas avoir été saisie de cette difficulté du centre hospitalier de la vallée de la Maurienne. La logique du Ségur est de déconcentrer les enveloppes et les décisions.

Le centre hospitalier va recevoir 16,5 millions d'euros de l'ARS, dont 14,9 millions au titre du Ségur. Son unité de surveillance continue et son service de stérilisation centrale seront reconstruits, son bloc opératoire sera réhabilité. En outre, 5,7 millions d'euros lui seront accordés au titre de la restauration de sa capacité financière. Cette aide fait l'objet d'une contractualisation avec l'ARS, selon une trajectoire de désendettement, afin que l'établissement ne soit pas asphyxié par la dette. Nous voulons éviter toute course à l'endettement, dans une logique de soutenabilité. Mais tous les financements supplémentaires pour des projets prévus au moment de la contractualisation seront bien entendu possibles.

Mme Martine Berthet.  - Mais non, madame la ministre, la contractualisation établie avec l'ARS prévoit que l'hôpital ne pourra pas emprunter les 1,6 million d'euros qui lui manquent pour sa rénovation ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Laurent Somon .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) C'est l'alerte rouge pour les professions d'accompagnement des personnes vulnérables. Le Ségur - la revalorisation de la discorde - est le coup de trop pour ces professions en manque de personnels, victimes de décisions managériales vides de sens et de discriminations dans le cadre du Ségur. Comme le dit Edgar Morin, « à force de sacrifier l'essentiel pour l'urgence, on finit par oublier l'urgence de l'essentiel ».

À quoi bon continuer, alors qu'on nous empêche de bien faire notre travail : voilà ce qu'on entend. Ce travail était difficile, il devient absurde. Les jeunes quittent le métier au bout d'un an, voire pendant leur formation. Des services ferment faute de personnels. Tous sont épuisés, non reconnus : éducateurs spécialisés, assistants familiaux, accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH), auxiliaires de vie...

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - Mais ils dépendent des départements !

M. Laurent Somon.  - Ces secteurs ne sont-ils pas des investissements d'avenir ? Inclurez-vous dans le Ségur les 32 000 collaborateurs des prestataires de santé à domicile ? Quand enfin intégrerez-vous toutes les parties prenantes du parcours de soins et de prise en charge des personnes vulnérables ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - Ce secteur du social et du médico-social dépend des départements et des centres communaux d'action sociale (CCAS). Ce n'est pas à l'État d'en revaloriser les personnels, mais il peut apporter un appui, en concertation. C'est l'objet de la conférence sociale que nous avons annoncée.

Sur l'avenant 43, certains départements - toujours les mêmes - ont affirmé n'avoir pas été consultés. Cela n'a pas empêché les autres de revaloriser les auxiliaires de vie. L'État s'est engagé à compenser ces revalorisations, à hauteur de 75 % sur les trois derniers mois de 2021, à 50 % ensuite, de manière pérenne grâce à la création de la cinquième branche.

Nous devons recréer de l'attractivité. Grâce à l'apprentissage, à l'alternance, à l'insertion, des formations se sont remplies très vite - nous verrons si cela sera durable...

Nous devons aussi faire découvrir ces métiers. C'est pourquoi 10 000 jeunes du service civique interviennent désormais auprès des personnes âgées. Cela portera peut-être ses fruits...

M. Cyril Pellevat .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le manque de soignants en Haute-Savoie est criant. Les taux de vacance sont de 15 à 20 %, contre 5 % en moyenne ailleurs en France. Le Ségur n'est qu'une réponse imparfaite et insuffisante, car les salaires en Suisse sont trois à quatre fois plus élevés...

La charge de travail de ceux qui restent les conduit à l'épuisement. Les arrêts maladie se multiplient. Certains services d'urgence ferment le week-end. Mon département est l'un de ceux où la situation est la plus dégradée.

Voici quelques pistes à expérimenter : une prime de vie chère ; une réflexion avec la Suisse sur les besoins de formation de nos deux pays ; la réduction des charges sociales salariales pour permettre l'augmentation des salaires ; la réduction du coût du logement ; la non-prise en compte des apprentis dans les effectifs budgétaires.

Que comptez-vous faire ?

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée.  - Il est vrai que les pénuries sont significatives dans votre département. Une enquête récente estimait qu'entre 8 600 et 13 000 soignants français exerçaient dans le Genevois et le canton de Vaud, en provenance de la France entière.

Pour juguler la pénurie de personnel soignant, nous devons combiner la revalorisation salariale, mais aussi l'attractivité des parcours professionnels, avec une action diplomatique, dans le cadre de l'instance de dialogue franco-genevoise.

Mme Michelle Meunier, pour le groupe socialiste, écologique et républicain .  - « Ne pas soutenir le soin, c'est ruiner la solidarité qui fonde l'État de droit », écrit à raison la philosophe Cynthia Fleury. L'urgence sanitaire ne doit pas nous faire oublier la question des rémunérations et des carrières des personnels soignants. Les tensions dans les services médico-sociaux ne sont pas nouvelles, mais la crise a révélé la grande vulnérabilité de ces métiers. Les gestionnaires d'établissement parlent de point de rupture : combien risquent de raccrocher la blouse à l'issue de la pandémie ?

En dépit du Ségur, de la mission Laforcade, des annonces gouvernementales sur le grand âge, de la conférence des métiers prévue au 15 janvier, la patience s'amenuise.

Parmi ces essentiels, figurent des oubliés : animateurs dans les résidences autonomie, ambulanciers dans les SAMU...

L'embauche de « faisant fonction » pour compenser les difficultés du recrutement pose problème, car ils représentent jusqu'à 10 % des personnels et nivellent les professions par le bas, niant la spécificité de ces métiers. Quelle perspective pour les professionnels du soin en matière d'évolution de carrière, et quel message pour tous les diplômés et les rares jeunes qui se destinent à ces métiers ?

Les temps de réflexion sur la pratique professionnelle sont une piste pour renforcer l'attractivité de ces métiers. Ces temps, comptés comme temps de travail, sont supervisés. La société demande beaucoup à ces professionnels : ils pourront ainsi extérioriser les tensions, partager les moments de doute et de réussite. Voilà une solution. Nous pourrions aussi nous inspirer des moments de réflexion éthique proposés par Cynthia Fleury à l'hôpital, pour les professionnels et les patients. Pour compenser ces temps supplémentaires, des embauches seront nécessaires.

La désaffection des métiers du prendre soin n'est pas inéluctable. Des pistes existent, elles méritent toute notre attention. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

Les conclusions de la Conférence des présidents sont adoptées.

Prochaine séance demain, jeudi 6 janvier 2022, à 10 h 30.

La séance est levée à 23 h 5.

Pour la Directrice des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du jeudi 6 Janvier 2022

Séance publique

À 10 h 30

Présidence : Mme Pascale Gruny, vice-président

Secrétaires : M. Dominique Théophile - Mme Corinne Imbert

1. Débat sur le thème : « Le partage du travail : un outil pour le plein emploi ? » (demande du groupe CRCE)

2. Débat sur la sûreté des installations nucléaires (demande du GEST)