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Vous pouvez également consulter le compte rendu intégral de cette séance.


Table des matières



« Le partage du travail : un outil pour le plein-emploi ? »

Mme Cathy Apourceau-Poly, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste

Mme Nadia Sollogoub

Mme Maryse Carrère

Mme Annie Le Houerou

M. Martin Lévrier

M. Daniel Chasseing

Mme Frédérique Puissat

Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Laurence Cohen

Mme Brigitte Devésa

Mme Michelle Meunier

M. Marc Laménie

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État chargé des retraites et de la santé au travail

Mme Cathy Apourceau-Poly, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste

Sûreté des installations nucléaires

M. Daniel Salmon, pour le groupe écologiste - solidarité et territoires

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État, chargée de la biodiversité

Mme Véronique Guillotin

M. Rémi Cardon

Mme Marie Evrard

M. Pierre Médevielle

Mme Martine Berthet

Mme Sophie Taillé-Polian

M. Fabien Gay

Mme Denise Saint-Pé

Mme Angèle Préville

Mme Christine Lavarde

M. Patrick Chauvet

M. Franck Montaugé

M. Stéphane Piednoir

Mme Agnès Canayer

Mme Marta de Cidrac

Mme Else Joseph

M. Guillaume Gontard, président du groupe écologiste - solidarité et territoires

Ordre du jour du lundi 10 janvier 2022




SÉANCE

du jeudi 6 janvier 2022

40e séance de la session ordinaire 2021-2022

présidence de Mme Pascale Gruny, vice-président

Secrétaires : Mme Corinne Imbert, M. Dominique Théophile.

La séance est ouverte à 10 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

« Le partage du travail : un outil pour le plein-emploi ? »

Mme le président.  - L'ordre du jour appelle le débat sur le thème : « Le partage du travail : un outil pour le plein-emploi ? », à la demande du groupe CRCE.

Je vous rappelle que la Conférence des présidents a décidé d'expérimenter une proposition du groupe de travail sur la modernisation des méthodes de travail du Sénat.

En application de cette proposition, le groupe CRCE disposera d'un temps de présentation de huit minutes ; le Gouvernement aura la faculté, s'il le juge nécessaire, de prendre la parole immédiatement après chaque orateur pour une durée de deux minutes ; l'orateur disposera alors à son tour du droit de répartie, pour une minute ; le temps de réponse du Gouvernement à l'issue du débat est limité à huit minutes ; le groupe auteur de la demande de débat disposera de cinq minutes pour le conclure.

Mme Cathy Apourceau-Poly, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste .  - La pandémie a entraîné une crise sociale et économique qui se traduit par une dégradation des conditions de travail et par des plans de licenciement. À Noyelles-sous-Lens, dans le Pas-de-Calais, 118 employés de France Loisirs ont reçu leur lettre de licenciement - quel cynisme ! - le 24 décembre au matin, avec accusé de réception le 31... Joyeux Noël et bonne année ! Idem pour les 350 métallos de la fonderie SAM de Decazeville, sous-traitant de Renault qui, lui, a reçu 5 milliards d'euros d'aides de l'État...

Parlons aussi des employés du leader de la chimie Arkema, en grève pour obtenir des augmentations de salaire alors que le groupe enregistre un bénéfice record de 2 milliards d'euros en 2021. La liste est longue...

La pandémie a creusé les inégalités entre les salariés et les entreprises du CAC 40, dont les profits atteignent 60 milliards d'euros au premier trimestre 2021. Malgré les aides publiques, ces entreprises ont licencié 60 000 salariés dans le monde, dont 15 000 en France.

Tout cela pose la question d'un meilleur partage du temps de travail. La durée du travail a toujours été au coeur de la lutte des classes, et la crise sanitaire a donné un nouveau sens au débat.

Certaines entreprises ont compris les aspirations des salariés. Depuis 2006, la société Design Bois expérimente la semaine de quatre jours. C'est un argument de recrutement. Depuis la pandémie, des PME commencent à y réfléchir : un quotidien économique y a consacré un article dans son édition du 10 décembre. Les chefs d'entreprise qui l'ont testée signalent une amélioration de la production des salariés.

La CGT prône une réduction du temps de travail à 32 heures par semaine sans perte de salaire. Il y a 800 millions d'heures supplémentaires effectuées par an, ce qui représente 500 000 ETP. Une telle mesure créerait des emplois, favoriserait l'égalité professionnelle femmes-hommes et l'articulation entre vie professionnelle et vie privée.

Les résistances du patronat sont relayées par le Président de la République qui prétend que les Français travailleraient moins. C'est faux : d'après Eurostat, le temps de travail hebdomadaire moyen est de 37,4 heures, contre 37,3 en Espagne, 37 en Italie, 35 en Allemagne et 30,4 aux Pays-Bas.

La réduction du temps de travail n'est pas l'ennemie des salaires ni de l'emploi. Les chiffres de l'Insee le montrent : les 35 heures ont porté la productivité horaire des salariés français au deuxième rang mondial, devant les États-Unis et l'Allemagne.

Pendant la crise sanitaire, la réduction du temps de travail a été la principale mesure de gestion de l'emploi, avec le chômage partiel. Le nombre d'heures travaillées a diminué d'un tiers au cours du premier confinement.

Il est donc temps d'engager la réflexion, pour que les salariés profitent davantage de leur vie de famille et de leur temps extraprofessionnel.

Nous proposons une meilleure répartition du travail disponible, au service du plein-emploi.

La retraite à 60 ans, après 37,5 annuités de cotisations, participe aussi à un partage du travail dans le temps. À quoi bon travailler plus longtemps, alors que des jeunes attendent un emploi ?

Partager le travail et les richesses est un enjeu fondamental pour l'épanouissement de notre société. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER)

Mme Nadia Sollogoub .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Je m'exprime au nom de M. Vanlerenberghe, empêché, dont je partage l'analyse.

En France, le temps de travail a diminué de moitié en 170 ans pour arriver à une base légale de 1 607 heures annuelles. Cette réduction a été rendue possible par une multiplication par trente de la productivité.

Les lois Robien et Aubry ont accéléré le processus. La loi Robien de 1996 a réduit le temps de travail dans les entreprises en difficulté pour sauver des emplois, la loi Aubry de 2000 a généralisé les 35 heures, avec des dérogations pour les PME, créant 100 à 300 000 emplois - les experts ne s'accordent pas. La mesure a surtout handicapé certains secteurs en augmentant le coût du travail.

Le rapport Boissonnat de 1995 annonçait un mouvement séculaire de réduction du temps de travail, mais plutôt sous la forme d'une durée variable et choisie. L'erreur a été de considérer la quantité de travail disponible comme un gâteau de taille fixe à partager, alors que l'enjeu est avant tout de faire grossir le gâteau par la croissance.

C'est ce qui s'est produit malgré la crise, avec une augmentation de 6,7 % du PIB en 2021. L'emploi est au plus haut depuis quinze ans.

Ne faut-il pas plutôt repenser l'organisation du travail, notamment dans les secteurs comme le BTP ou l'hôtellerie, qui manquent de personnel ? Ou dans l'artisanat - boucherie, boulangerie - où les horaires sont difficiles ?

Marc de Basquiat souligne que la notion de travail recouvre des activités multiformes, qui ne font pas toutes l'objet d'une rémunération - d'où l'idée d'un revenu universel de base, mais c'est un autre débat.

Il faut d'abord qualifier les jeunes. Les opérateurs de compétences (OPCO) et l'apprentissage font partie de la solution.

Le partage des richesses et des responsabilités dans l'entreprise sont à nouveau d'actualité, je m'en félicite.

Le travail doit permettre à chacun de trouver sa place dans la société. Vaste programme pour l'élection présidentielle ! (Applaudissements sur les travées des groupeUC et Les Républicains)

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État, chargé des retraites et de la santé au travail.  - La question de l'attractivité de certains métiers, notamment ceux qui rendent difficile l'organisation de la vie personnelle, est essentielle. Participation et intéressement sont une des solutions, mais pas la seule. Dans l'hôtellerie et les cafés notamment, l'organisation du temps de travail doit aussi être envisagée. Je sais, pour y avoir travaillé pendant mes études, combien les horaires peuvent y être contraignants.

Mme Nadia Sollogoub.  - Ce débat est malheureusement à contretemps. Les entreprises pleurent devant le manque de main-d'oeuvre. Il nous faut des bras !

Mme Maryse Carrère .  - En matière de réduction du temps de travail, notre pays s'est honoré des avancées sociales de 1936, 1982 et 2002. À la veille de l'élection présidentielle, je remercie le groupe CRCE pour ce débat, qui mérite d'être abordé sereinement. Faudrait-il travailler moins pour que plus travaillent ? Les 35 heures n'ont pas mis fin au chômage de masse. De plus, dans un contexte de flambée des prix, je ne suis pas sûre que les Français soient prêts à travailler moins.

Réduire le temps de travail ne suffit donc pas. Commençons par revaloriser les métiers manuels et l'apprentissage. Le taux de chômage des jeunes atteint 20 %, alors que des commerces ferment et que des emplois restent non pourvus... Oui, les métiers artisanaux sont difficiles, mais il faut mieux communiquer à leur propos.

Pour réduire le chômage, il faut également réfléchir sur les implications du travail en matière de relations sociales et d'estime de soi. L'expérimentation « Territoires zéro chômeur de longue durée » lancée en 2016 montre que l'on peut ramener des populations vers l'emploi.

Pour autant, la population qui s'accroît, les progrès techniques et l'automatisation n'ont-ils pas fait disparaître la possibilité du plein-emploi ? Il convient de réfléchir aux moyens de garantir à tous un emploi ou une rémunération décente.

Le travail a évolué, le télétravail a bouleversé les habitudes. En Nouvelle-Zélande et en Islande, la semaine de quatre jours est expérimentée, avec des gains de productivité et un moindre absentéisme.

Il faut également aborder la place du salarié dans l'entreprise, via l'intéressement ou la participation. Le bien-être au travail doit aussi être pris en compte : notre collègue Stéphane Artano travaille sur la question.

En somme ce débat pose beaucoup de questions, auxquelles il y a beaucoup de réponses ; le temps de travail n'est pas la solution unique. (M. Marc Laménie applaudit.)

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État.  - Certains métiers moins attractifs font l'objet d'un travail de fond de la part du Gouvernement. Des générations entières de jeunes entrent en apprentissage : ils étaient 300 000 en 2017, 700 000 en 2021. C'est un mouvement de masse vers des métiers qui, dans l'inconscient collectif, avaient peu d'intérêt.

Les choses changent, notamment en faveur de ces métiers de bouche, que je connais bien. Les parents aussi le comprennent. Pour les miens, qui étaient des autodidactes, il fallait faire de longues études ; pour ma part, j'ai toujours dit à mes filles de choisir des métiers d'artisanat si c'était leur souhait.

Mme Annie Le Houerou .  - Six millions de personnes sont inscrites à Pôle Emploi, avec à la clé une fragilité financière, un sentiment d'inutilité et de relégation.

Le débat sur le partage du temps de travail est ancien. Depuis 1919, plusieurs lois de gauche ont réduit le temps de travail : 39 heures et cinquième semaine de congés payés en 1981, lois de 1998 et de 2000 pour les 35 heures. Selon la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), la loi Aubry aurait créé 350 000 emplois entre 1998 et 2022. L'équilibre entre temps de travail et temps personnel s'est trouvé amélioré.

Mais cette dynamique a été freinée depuis vingt ans, et les inégalités se sont accrues. La baisse du temps de travail est surtout liée, désormais, à des temps partiels subis, notamment par les femmes. Le Président de la République a dit que les Français travaillaient moins que les autres, ce qui est faux : en 2016, ils travaillaient 36,4 heures par semaine en moyenne - autant que les Britanniques, et plus que les Italiens, les Espagnols ou les Allemands, qui travaillaient 34,8 heures.

Le travail s'est en réalité intensifié dans de nombreux secteurs, et les burn-out explosent. La crise épidémique a fait émerger de nouvelles aspirations, dans le sens d'une plus grande liberté d'organisation. Les jeunes aiment le travail, mais ils veulent des compensations pour la pénibilité et les contraintes horaires.

Notre société doit s'adapter à ces aspirations : souplesse, préservation de la santé et du bien-être. C'est ainsi que nous redonnerons du sens au travail. En Espagne, 200 entreprises vont tester en 2022 la semaine de quatre jours sans baisse de salaire. En France, Emmanuel Macron et la droite proposent de reculer l'âge de la retraite, ce qui est à contre-courant.

Dès 2017, 300 000 personnes dont le travail répondait à quatre critères de pénibilité se sont vues privées du départ à la retraite anticipé. Or à 35 ans, un ouvrier peut espérer vivre jusqu'à 77,6 ans ; un cadre, jusqu'à 84 ans. Le recul du départ à la retraite est donc une double peine pour les salariés les plus exposés.

Le Gouvernement doit se saisir globalement de la question de l'organisation du temps de travail au long de la vie, via un accord national interprofessionnel et des négociations de branche. La réforme du temps de travail, l'intéressement, la prise en compte de la pénibilité sont les meilleurs moyens d'éviter des fins de carrière anticipées. (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur plusieurs travées du groupe CRCE)

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État.  - Les critères de pénibilité n'ont pas été supprimés mais transférés : il sera toujours possible pour les salariés concernés de partir à la retraite sur décision médicale.

Quant au temps de travail, il faut considérer le temps complet : sur ce critère, la France est, avec les pays scandinaves, le pays où l'on travaille le moins, avec 1 680 heures annuelles contre 1 830 à 1 850 pour nos voisins européens.

Mme Annie Le Houerou.  - La pénibilité n'est pas prise en compte comme il le faudrait. Il faut également repenser la répartition des richesses, alors que dans certaines entreprises la rémunération la plus élevée est 22 fois plus importante que la rémunération la plus faible.

M. Martin Lévrier .  - Le CRCE veut réduire le temps de travail pour augmenter le nombre de postes de travail, donner plus de temps aux salariés pour la vie familiale, sociale, culturelle, démocratique et mieux répartir les richesses. (On le confirme sur les travées du groupe CRCE.)

Les objectifs sont louables, mais les enseignements de la crise sont autres. À 8 %, le taux de chômage n'a jamais été aussi bas et le taux d'emploi est au plus haut. Le nombre d'emplois vacants a augmenté de 33% depuis la crise. En novembre 2021, on enregistrait 416 000 embauches en CDI, du jamais-vu depuis 2006. Le plein-emploi est à notre portée.

Ce n'est pas le fruit du hasard, mais de choix économiques forts : un droit du travail laissant toute leur place aux négociations de branche et d'entreprise, un assouplissement de l'organisation du travail avec le télétravail, un meilleur accompagnement des jeunes avec le plan « Un jeune, une solution » et le plan d'investissement dans les compétences, grâce auquel plus d'un million de personnes sont formées chaque année.

C'est cet ensemble de mesures qui nous a évité une crise de grande ampleur lors de la pandémie.

En 2018, la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel a levé les freins et les discriminations persistants, avec l'ambition que chacun se réalise dans la vie professionnelle. L'envolée du compte personnel de formation, avec plus de deux millions d'inscriptions en formation en 2021, contre 630 000 en 2019, en est la preuve.

L'épanouissement au travail n'est plus une utopie. Être reconnu par ses pairs ou sa hiérarchie en fait partie.

Libérer les énergies des salariés, donner plus de souplesse aux entreprises, encourager les négociations de terrain sont autant d'atouts pour réduire le chômage et créer de la richesse.

En revanche, la réduction du temps de travail a donné plus de temps libre aux salariés, mais a aussi pénalisé les plus bas salaires, obligés de recourir aux emplois précaires pour arrondir leurs fins de mois.

Supprimer quatre heures de travail dans une petite structure ne crée pas un emploi à temps plein. Être stressé parce que débordé ne participe pas à l'épanouissement au travail.

Il pourrait être utile de se rappeler que les femmes et les hommes ne sont pas des machines. Le travail ne doit pas être envisagé sous le seul angle du décompte des heures : je peux accomplir la même tâche en deux heures ou en une heure selon mon état de forme. Privilégions la liberté d'organiser son temps de travail.

Sortons de la binarité sur la durée du travail. Il reste de nombreuses pistes à explorer. (M. François Patriat applaudit.)

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État.  - Le travail permet l'épanouissement personnel, mais donne aussi les moyens de vivre. M. Lévrier l'a très bien dit : un temps de travail qui serait une donnée fixe qu'on pourrait découper en petits morceaux relève d'une vision macroéconomique statique. (M. Pascal Savoldelli proteste.) Or nous vivons dans un monde économique dynamique.

M. Daniel Chasseing .  - Merci au CRCE pour ce débat important. L'euro nous a permis, malgré nos déficits, de ne pas avoir à dévaluer notre monnaie. Cela explique notre facilité à vivre avec des déficits depuis vingt ans...

En 1983, Jacques Delors avait été contraint, pour éviter une lourde dévaluation, de prendre des mesures d'austérité. En 1998, le commerce extérieur français était excédentaire, celui de l'Allemagne en déficit. Aujourd'hui, les choses se sont inversées.

Pourquoi ? Cela tient aux évolutions opposées de la part de l'industrie dans le PIB, mais pas seulement. En Allemagne, l'ancien homme malade de l'Europe, le chancelier Schröder, en accord avec les syndicats, a choisi l'austérité en 2002, alors que nous nous autorisions une réduction du temps de travail, au détriment de la compétitivité de nos entreprises.

De plus, l'euro a stimulé le commerce intra-européen en facilitant les transactions, ce qui a rendu la compétitivité de plus en plus cruciale. L'emploi industriel pouvait désormais être transféré dans les zones les plus productives.

Dans une économie de marché, dans une zone monétaire unifiée, en cas de déficit structurel il faut agir sur les coûts de production.

La France est le pays où le temps de travail est le plus faible et les prélèvements obligatoires les plus élevés. De plus, il n'existe pas de salaire minimum homogène à l'échelle européenne, ce qui facilite les délocalisations industrielles vers les pays de l'Est. Mme Apourceau-Poly a parlé de Decazeville, je pourrais parler de la Corrèze...

Il faut plus de cotisants pour financer la protection sociale, tout en nous assurant que les cotisations et les impôts de production ne soient pas plus élevés que chez nos voisins. Voilà la vraie Europe sociale.

Avant de mieux répartir les richesses, commençons par en créer davantage. Intéressement, participation des salariés à la gouvernance, meilleur salaire pour les apprentis sont des pistes.

Les 32 heures hebdomadaires sans diminution de salaire sont une proposition généreuse, mais qui entraînerait, dans une économie de marché et une zone monétaire unifiée, un déclin de l'emploi, une perte de recettes sociales et un recul de notre industrie, surtout pour les PME.

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État.  - M. Chasseing, qui a abordé ce débat à travers un prisme économique européen, a raison : plus on a d'emplois, donc de cotisants, mieux notre système social se porte.

Je viens des Hauts-de-France, où l'industrie est importante : je sais qu'on peut la reconstruire. Elle permet des parcours professionnels, des métiers à haute valeur ajoutée : l'industrie 4.0, ce sera des emplois plus qualitatifs avec des conditions de travail bien meilleures qu'il y a trente ans !

Territoires d'industrie, France Relance, baisse de 20 milliards d'euros des impôts de production : le Gouvernement est très actif dans ce domaine.

M. Daniel Chasseing.  - La proposition de réduction du temps de travail est généreuse mais pour créer de l'emploi, il faut des entreprises compétitives dans la zone euro. En outre, notre système social et d'assurance chômage a besoin de cotisants pour revenir à l'équilibre.

Mme Frédérique Puissat .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Merci au groupe CRCE d'avoir mis ce sujet d'actualité à l'ordre du jour. Le marché du travail a été à l'épreuve de la crise.

La Convention citoyenne pour le climat a proposé, elle, une réduction du temps de travail à 28 heures - on peut toujours faire moins que moins ! Le Medef, quant à lui, considère qu'il faut remettre en cause certains jours fériés et travailler plus pour accompagner la relance.

La question est complexe, périlleuse.

Sur un marché concurrentiel, il faut avoir une vision européenne. Les pays quasiment au plein-emploi - Allemagne, Royaume-Uni, Pays-Bas, Pologne et Norvège - sont ceux qui travaillent le plus.

En France, les salariés à temps plein travaillent en moyenne 1 682 heures, la durée de travail la plus faible de l'Union européenne, avec la Suède. L'âge moyen de départ à la retraite est de 62,5 ans pour les femmes et de 62,9 ans pour les hommes, ce qui fait de la France l'un des pays où la durée totale de travail est la plus faible.

Le bilan des lois Aubry 1 et 2 est contrasté. Éric Heyer, économiste keynésien, estime que les 35 heures auraient créé entre 300 000 et 400 000 emplois, quand Nicolas Bouzou, économiste libéral, juge que ce sont les mesures d'accompagnement et d'allègement de charges qui ont créé ces emplois. Tous considèrent que la mesure a dégradé les finances publiques.

M. Stéphane Piednoir.  - Très bien !

Mme Frédérique Puissat.  - Selon l'Institut Montaigne, un retour aux 39 heures permettrait d'économiser 7 milliards d'euros par an.

Aujourd'hui, la moitié des salariés à temps plein travaillent plus que 35 heures - signe qu'elles sont obsolètes.

Il est fondamental d'associer le secteur public à la réforme. En 2015, Albéric de Montgolfier estimait à 21 milliards d'euros sur dix ans le coût des 35 heures dans la fonction publique de l'État et dans la fonction publique hospitalière, du fait de l'embauche de 50 000 agents supplémentaires. La soutenabilité des finances publiques, impactées par la crise sanitaire, doit être vue dans le temps long.

Enfin, la productivité doit entrer en ligne de compte. La digitalisation, la plateformisation ont transformé le travail. Or les 35 heures sont un cadre rigide. Réjouissons-nous qu'elles aient rapidement été accompagnées d'une baisse des cotisations et d'une hausse des heures supplémentaires, pour permettre à nos entreprises de s'adapter à un marché concurrentiel et changeant tout en créant des emplois.

Je crois, pour ma part, que plus on travaille, plus il y a de travail.

Assouplissons la réglementation ; privilégions le dialogue social au sein des entreprises : un cadre flexible est nécessaire à leur performance, voire à leur survie ; transformons notre modèle managérial pour augmenter l'appétence de chacun pour son poste.

L'équation est simple : si nous n'allongeons pas notre temps de travail par une réforme des retraites, nous appauvrirons les retraités ou creuserons les déficits.

La campagne présidentielle à venir permettra à chacun de faire des choix éclairés. (M. Fabien Gay ironise.) Notre groupe fera comme toujours le choix de la responsabilité. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Stéphane Piednoir.  - Excellent !

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État.  - Merci pour votre analyse sur le poids d'une réduction du temps de travail sur les finances publiques.

Le sujet de l'organisation du travail est central. Vous êtes favorable, comme moi, à des solutions déterminées au plus près de la réalité. C'est tout le sens des ordonnances de 2017 modifiant le code du travail, dont j'étais rapporteur à l'Assemblée nationale. En effet, les réalités des entreprises varient selon les territoires, selon les secteurs d'activité.

Le débat sur la réduction du temps de travail avait plus de sens face à un chômage endémique à 10 %. Aujourd'hui, alors que, grâce à l'action du Gouvernement, le taux de chômage est à 7 % et qu'un million d'emplois ont été créés sous ce quinquennat, nous devons plutôt chercher à répondre à la dynamique économique. Nous cherchons désormais des volontaires pour pourvoir les postes offerts.

Mme Sophie Taillé-Polian .  - Oui, le partage du travail est un outil pour le plein-emploi, mais aussi pour la transition écologique, le partage des richesses et pour une société heureuse, qui produit selon ses besoins et non pour le profit de quelques-uns.

À l'âge de la retraite, 25 % des plus pauvres sont déjà morts. L'espérance de vie des ouvriers à 35 ans est de 77 ans ; celle des cadres de 84 ans. Cette inégalité est insupportable.

Le partage du travail est aussi un outil de justice sociale car il permet une désintensification du travail protectrice pour la santé ; il accompagne la robotisation.

Le temps n'est plus aux directives strictes venues d'en haut, d'application uniforme. Le partage du travail doit se faire au profit des salariés, à l'échelle de la semaine, de l'année, de la vie, avec un abaissement de l'âge de la retraite, des années libérées pour se former.

Les progrès de la technologie, de l'éducation, de nos infrastructures publiques ont permis aux entreprises de gagner en productivité. La réduction du temps de travail est une manière d'en faire profiter les salariés.

Or le temps de travail effectif tend à augmenter, tandis que les salaires stagnent. Qui peut encore croire au « travailler plus pour gagner plus », alors que des cadres en quasi-burn-out côtoient des précaires qui peinent à aligner suffisamment d'heures par semaine pour survivre ? Le sacrifice des travailleurs qu'on presse comme des éponges sur l'autel de la croissance ne peut plus durer.

Les écologistes veulent « travailler mieux pour gagner mieux ». Une meilleure répartition des richesses produites permettrait à chacun de vivre mieux, dans le respect des ressources de notre planète.

Partageons le temps de travail, créons des emplois pour ceux qui n'en ont pas, permettons à ceux qui travaillent trop de profiter de la vie !

Permettons également à ceux qui ont commencé à travailler jeune et qui ont un métier pénible de partir plus tôt à la retraite.

Il est l'heure de reprendre le chemin du progrès social ! (Mmes Michelle Meunier et Marie-Pierre Monier applaudissent.)

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État.  - Ce n'est pas incompatible : on peut à la fois gagner plus et mieux !

Je suis partisan du partage de la valeur ajoutée. La loi Pacte a développé l'intéressement des salariés, notamment dans les PME, et le Gouvernement porte des mesures en faveur du pouvoir d'achat des salariés, à commencer par la prime Macron.

N'ayons pas une lecture binaire. Le gagnant-gagnant est possible : les salariés ont intérêt au développement de l'entreprise, qui a intérêt à ce que ses salariés soient épanouis !

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Vous ne m'avez pas écoutée. Il faut partager les gains de productivité. Or votre politique a conduit à une augmentation des taux de marge des entreprises et de dividendes, et à une explosion de la pénibilité et de la précarité du travail. Nos options ne sont pas les mêmes.

Mme Laurence Cohen .  - Notre groupe a souhaité poser la question des conditions de vie et de travail des salariés, de plus en plus nombreux à aspirer à une meilleure qualité de travail. La sociologue Dominique Méda a rappelé qu'il y va aussi d'un meilleur partage des tâches domestiques entre hommes et femmes.

Les inégalités liées au temps augmentent entre les femmes et les hommes. Lors du passage aux 35 heures, le temps domestique a augmenté de douze minutes par jour pour les hommes. Cette amélioration, certes modeste, doit être notée.

Une réduction à 32 heures permettrait à de nombreuses femmes subissant un temps partiel imposé d'accéder à un temps plein. Selon l'Insee, la différence de temps de travail entre femmes et hommes explique les écarts de salaires et de retraites. Les pensions des femmes sont 40 % inférieures à celles des hommes.

Les temps partiels imposés et les exonérations de cotisations sociales agissent comme des trappes à bas salaire. Il faut garantir un minimum de 24 heures par semaine pour mettre fin aux contrats précaires qui renforcent les inégalités.

La réduction du temps de travail doit s'accompagner d'un rétablissement des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), mais aussi de nouveaux droits d'intervention pour les salariés, comme le droit de véto.

Certaines entreprises, comme Bosch à Vénissieux ou Welcome to the jungle dans le Var, expérimentent les 32 heures - ce n'est pas une lubie de notre groupe ou des syndicats ! L'Espagne expérimente la semaine de quatre jours avec maintien des salaires dans 200 entreprises ; le mouvement « Four Day Week » fait campagne en Nouvelle-Zélande, en Grande-Bretagne, aux États-Unis, en Irlande.

La réduction du temps de travail est un projet politique global, qui repense la place de l'individu dans l'entreprise et dans la cité. Elle a également un effet bénéfique sur les conditions de vie, sur la santé, sur l'environnement, sur l'égalité entre les sexes.

La durée moyenne hebdomadaire du travail en France est parmi les plus élevée d'Europe, tandis que notre productivité est supérieure de vingt points à la moyenne européenne. Partageons-la, pour plus de progrès social ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE ; M. Marc Laménie applaudit également.)

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État.  - La loi fixe déjà un minimum de 24 heures hebdomadaires, mais des dispositions conventionnelles peuvent y déroger, dans un sens ou dans l'autre.

Mme Laurence Cohen.  - En 2017, la fondation Concorde indiquait que l'égalité salariale rapporterait 62 milliards d'euros à l'économie et créerait 26 000 emplois par an. Chiche !

Mme Michelle Meunier.  - Très bien !

Mme Brigitte Devésa .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Je remercie à mon tour le groupe CRCE pour ce débat.

Votre proposition implique de faire le bilan de l'action du Gouvernement. La politique de l'emploi en France est un échec. Le chômage structurel se stabilise à un niveau trop haut. Certes, 8 %, c'est mieux qu'avant la crise, mais c'est encore insuffisant. Le plein-emploi dans notre pays correspond à un chômage structurel de 7 %, contre 4 % chez nos voisins.

Tout a été tenté pourtant, disait François Mitterrand en 1993. Sauf ce qui marche, répondaient ses détracteurs... (Sourires)

Certains prônent les 32 heures, mais elles ne seront pas plus efficaces que les 35 heures.

Notre niveau de chômage structurel est, en effet, trop élevé. L'hystérèse du chômage se définit par une croissance faible et des chômeurs qui perdent peu à peu leur savoir-faire. La tertiarisation de l'économie y contribue largement, qui plonge la France dans l'apathie économique les chômeurs dans l'enfer des oubliés. Des générations, des familles entières vivent dans le chômage, avec des conséquences néfastes sur le statut social et l'estime de soi.

Pourtant, de nombreux secteurs cherchent à recruter !

Il faut planifier en fonction des nouveaux besoins, revaloriser les formations vers de nouveaux métiers et désengorger le tertiaire au profit d'une nouvelle industrie verte.

Nous devons réfléchir aussi au statut du travail lui-même, qui ne se résume pas à l'emploi. (Applaudissements sur les travées du groupe UC)

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État.  - Comme beaucoup de Français, j'ai attendu pendant trente ans la martingale magique pour faire baisser le chômage... C'est pour cela que je me suis engagé dans ce Gouvernement, et je suis fier des résultats constatés. D'autant que plus de 50 % des emplois créés sous le quinquennat sont des CDI.

Mme Brigitte Devésa.  - Le plein-emploi s'éloigne de plus en plus ! Vous n'avez pas suffisamment engagé le marché du travail vers une nouvelle économie.

Mme Michelle Meunier .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Confinement et vagues successives ont conduit à nous interroger sur la vie d'après. Que reste-t-il de ces envies de vivre et travailler autrement ? L'approche économique confond souvent emploi et travail.

Qu'est-ce que le plein-emploi ? Doit-on le vouloir à tout prix ? Quid du temps partiel subi et du travail précaire, partiel, pénible, souvent réservé aux femmes ?

Un travail à la mesure de chacun est possible. C'est l'objectif du dispositif « Territoires zéro chômeur de longue durée » auquel participe la Loire-Atlantique. Le territoire de Pont-Château a été labellisé l'an dernier, d'autres suivent. Partant du principe que nul n'est inemployable, des entreprises à but d'emploi embauchent des personnes durablement éloignées de l'emploi dans des secteurs où l'offre n'est pas assurée localement - en l'espèce, la réutilisation de bois et les services à la personne.

Le pays d'Ancenis détient un taux d'emploi record, mais il s'agit d'un trompe-l'oeil : un chômage résiduel persiste du fait des difficultés de mobilité ou de l'inadéquation entre l'offre et la demande.

Donnons plus d'éthique à la notion de plein-emploi, en développant la démarche « Territoires zéro chômeur de longue durée ». De nombreux territoires peuvent encore être labellisés. Qu'attend votre Gouvernement ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE)

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État.  - Le Gouvernement n'attend pas, il agit.

Nous étendons cette expérimentation à de nouveaux territoires. Je partage votre vision sur le rôle émancipateur du travail, même si, je le reconnais, tous les emplois ne sont pas toujours passionnants. Nous soutenons l'insertion.

Mme Michelle Meunier.  - Merci pour votre réponse. Des territoires sont prêts à entrer dans cette démarche, à condition d'être accompagnés financièrement. Au-delà du gain financier, le travail apporte une meilleure estime de soi.

M. Marc Laménie .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Le sujet est important et je remercie le groupe CRCE pour ce débat. Je le rejoins sur certaines valeurs liées au travail et à l'emploi.

Mme Apourceau-Poly a évoqué les difficultés du Pas-de-Calais ; la situation est également sinistrée dans les Ardennes, et la vallée de la Meuse a perdu de nombreux emplois dans le textile et la métallurgie. C'est un combat permanent !

La crise sanitaire a mis en évidence le sujet du bien-être au travail. Le télétravail ne règle pas tout...

Je rends hommage à l'engagement des chefs d'entreprise qui se battent pour soutenir l'emploi, dans l'industrie comme dans l'artisanat.

Je rends aussi hommage à nos trois fonctions publiques. Dans la fonction publique hospitalière, les soignants sont en première ligne et souffrent tout particulièrement.

La crise sanitaire, la sécurité mais aussi l'emploi sont au coeur des préoccupations des Français.

Dans de nombreux métiers, les salaires sont peu élevés. Je pense notamment aux aides à domicile, qui méritent tout notre respect et notre reconnaissance.

La complexité du code du travail est dénoncée par de nombreux chefs d'entreprise.

L'équilibre des finances publiques doit également retenir notre attention.

La formation des jeunes est essentielle : l'école doit tisser des liens avec les entreprises, favoriser les stages, et l'apprentissage est une clé pour encourager l'emploi.

S'agissant du temps de travail, le sujet est complexe, mais il faut soutenir l'emploi sous toutes ses formes. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains ; Mme Céline Brulin applaudit également.)

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État chargé des retraites et de la santé au travail .  - (M. Martin Lévrier applaudit.) Mme Apourceau-Poly et moi ne partageons pas, à l'évidence, les mêmes positions politiques.

La diminution du temps de travail ne nous permettra pas de réduire le chômage. Les solutions sont diverses, au plus près du terrain et du tissu économique. Votre vision économique, madame Apourceau - Poly, est statique. On ne peut pas raisonner « toutes choses égales par ailleurs » en se contentant de toucher un paramètre : dans notre monde, tout bouge, il faut sans cesse s'adapter et évoluer.

La réduction du temps de travail, comme l'a dit M. Chasseing, a un coût. Comment compenser ? Par des aides massives de l'État, ou des modérations salariales - c'est un euphémisme. Non, ce n'est pas la solution, ni pour les salariés ni pour la collectivité.

Regardons les chiffres, de manière objective. Nous sommes parmi les pays qui travaillent le moins, avec la Suède.

Harmonie entre vie professionnelle et personnelle, voilà un thème important. Il est particulièrement nécessaire d'y travailler dans certains secteurs, comme l'hôtellerie-restauration. L'action des partenaires sociaux et du Gouvernement a permis de mieux prendre en compte la santé au travail, grâce au vote de la loi du 2 août dernier et au déploiement du quatrième plan Santé au travail.

Il faut avant tout augmenter l'offre d'emplois. C'est cela qui permet d'en améliorer la qualité.

Vous êtes peu nombreux à mettre en avant les succès du Gouvernement. Pourtant, 15 milliards d'euros ont été investis pour mieux former les demandeurs d'emploi. Nous avons renforcé cette politique avec le contrat d'engagement jeune et les Territoires zéro chômeur de longue durée.

Je remercie le groupe CRCE d'avoir organisé ce débat. (Mme Michelle Meunier et M. Daniel Chasseing applaudissent)

Mme Cathy Apourceau-Poly, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste .  - Ce débat ne fut pas caricatural, je vous en remercie tous : chacun a pu défendre sa vision de la société. Monsieur le ministre, je ne partage pas votre point de vue, mais vous remercie d'avoir répondu à chacun.

La majorité sénatoriale souhaite augmenter le temps de travail. Madame Devésa, nous parlons bien du partage d'un gâteau, mais les 6 millions de nos concitoyens sans emploi n'ont pas leur part. Le glaçage est monopolisé par une poignée de personnes. Certes il faudrait augmenter la taille du gâteau, mais surtout en changer la recette !

Certains vantent les bons chiffres de l'emploi, mais l'emploi industriel est en baisse depuis 2019 ; pendant la crise sanitaire, 200 000 personnes ont été radiées des listes de Pôle Emploi ; le taux de chômage des jeunes est de 20 % ; des territoires sont sinistrés comme l'a bien montré Marc Laménie ...

Les travailleurs à temps partiel veulent aussi travailler plus, il faut les accompagner. Le temps de loisirs disponible est encore une source d'inégalités sociales.

L'OCDE estime que la durée hebdomadaire d'un temps plein est de 40,2 heures en France, contre 40,4 heures pour la moyenne des pays développés. Nous sommes dans les clous !

Réduire le temps de travail permettrait à tous d'arriver à la retraite en bonne santé. Les inégalités d'espérance de vie entre cadre et ouvrier sont inacceptables.

Une meilleure répartition du travail permettrait à tous de travailler mieux, de préserver l'environnement et d'encourager l'égalité entre les femmes et les hommes.

Que la campagne électorale permette de débattre projets contre projets. Merci à tous ! (Applaudissements à gauche ; M. Marc Laménie et Mme Agnès Canayer applaudissent également.)

Mme le président.  - Merci à tous pour ce débat. Cette expérimentation semble tout à fait concluante. Monsieur le ministre, je vous remercie de vous y être prêté de bonne grâce.

La séance est suspendue quelques instants.

Sûreté des installations nucléaires

Mme le président.  - L'ordre du jour appelle le débat sur la sûreté des installations nucléaires, à la demande du groupe écologiste - solidarité et territoires.

M. Daniel Salmon, pour le groupe écologiste - solidarité et territoires .  - (Applaudissements sur les travées du GEST) Contrairement à ce que d'aucuns prétendent, le nucléaire n'est pas la solution magique pour lutter contre le réchauffement climatique tout en garantissant notre souveraineté énergétique.

L'actualité de cette semaine, concernant la centrale souvent citée du Tricastin, en apporte la preuve. Les accusations ne viennent pas d'une association antinucléaire mais d'un cadre d'EDF, qui dénonce des faits graves, mettant en lumière de sérieux dysfonctionnements ainsi qu'un vrai problème de transparence et de contrôle.

Le coût du nucléaire est faramineux, les EPR sont un fiasco économique, nous sommes dépendants d'importations d'uranium... Mais au-delà, c'est la sûreté qui est en jeu. Les incidents sont de plus en plus nombreux : tirons-en les leçons.

Fukushima a montré qu'un haut niveau de sécurité n'est jamais acquis. L'impossible est devenu possible, selon les mots mêmes d'Angela Merkel.

De nouvelles prescriptions ont été édictées depuis dix ans, mais la lenteur d'EDF à les mettre en oeuvre suscite l'effroi. L'échéance est prévue pour 2034 ! Aucun réacteur n'est à niveau.

Trop de missions sont déléguées à des sous-traitants, comme l'ont montré la Cour des comptes et la commission d'enquête parlementaire de 2018, entraînant une perte des compétences chez les exploitants.

Pour lancer un chantier colossal de plusieurs EPR, les pouvoirs publics doivent disposer de garanties indépendantes sur la capacité d'EDF et de ses sous-traitants à le mener à bien.

Ni le débit des fleuves, ni les inondations, ni les retraits littoraux ne sont anticipés... Or le dérèglement climatique rend aujourd'hui l'improbable possible. Quatre réacteurs sur dix sont à l'arrêt en cas de canicule ; qu'en sera-t-il lorsque la température aura augmenté de deux degrés ?

Allez-vous demander aux opérateurs si leurs installations sont résilientes en cas de catastrophes multifactorielles ou d'épisodes climatiques extrêmes, comme le suggérait le rapport parlementaire de Barbara Pompili ? Mi-décembre, dix-sept réacteurs étaient à l'arrêt. Leur maintenance a été fortement perturbée par les confinements successifs.

La question des déchets dont la radioactivité se prolonge des milliers d'années doit aussi être débattue. Aucune solution n'est prévue, sinon un enfouissement sans contrôle posteriori, en espérant que tout se passe bien... Combien de temps cette solution sera-t-elle encore acceptable ?

Enfin, le parc a vieilli. Il est prolongé alors qu'il était prévu pour quarante ans. (M. Stéphane Piednoir le conteste.) Pas moins de 100 milliards d'euros, voilà la somme à débourser. Il faut un état des lieux indépendant et transparent, réacteur par réacteur.

Le Président de la République a annoncé - de manière très démocratique... - la création de nouveaux réacteurs.

Mais un problème structurel se pose, car c'est à EDF de déclarer les incidents à l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Comme si Spanghero était chargé de signaler ses lasagnes au cheval ! L'omerta est la règle. Que comptez-vous faire pour améliorer le contrôle des centrales par l'ASN ? Comment allez-vous protéger les lanceurs d'alerte dans l'industrie nucléaire ?

L'acceptabilité des risques ne doit pas relever des seuls experts, les citoyens aussi doivent se prononcer sur la question. (Applaudissements sur les travées du GEST)

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État, chargée de la biodiversité .  - Ce débat est essentiel, car à l'heure de la décarbonation de notre énergie, le nucléaire joue un rôle de premier plan. C'est aussi un sujet d'actualité, car nous sommes à la veille de décisions importantes : la prolongation des réacteurs nucléaires au-delà de quarante ans, la création de nouveaux réacteurs annoncée par le Président de la République et l'investissement dans les compétences.

C'est un travail au long cours, afin de trouver l'équilibre juste entre l'indispensable part de nucléaire et le développement massif des énergies renouvelables. Nous avons déployé des moyens en conséquence, notamment 470 millions d'euros dans le cadre du plan de relance.

Des décisions courageuses doivent être prises pour assurer cette sécurité. Nous le faisons quand nous arrêtons des centrales en période hivernale.

Députée, j'ai participé à la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur la sûreté nucléaire. J'ai également siégé au conseil d'administration de l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra).

Il n'y a pas de solution magique : il faut avant tout trouver un cadre et des équilibres. Le dérèglement climatique a changé notre vision.

Les principes qui nous guident sont la responsabilité première de l'exploitant, l'indépendance de l'ASN - laquelle a vu ses effectifs augmentés de 56 ETP - et le rôle d'encadrement du Gouvernement. Sachez que notre système de sécurité est régulièrement évalué par nos pairs étrangers.

En juin 2018, l'Assemblée nationale a publié un rapport sur la sécurité des installations nucléaires dont la moitié des préconisations sont déjà appliquées, et un tiers est en cours de mise en oeuvre. Gestion plus innovante des déchets, résilience des installations aux événements climatiques exceptionnels, approvisionnement en eau, maintien des compétences : autant de questions que nous examinons de près.

Le parc vieillit, d'où la question du prolongement des réacteurs anciens au-delà de quarante ou cinquante ans. Un réexamen est assuré tous les dix ans. La participation du public a été renforcée avec l'élargissement du champ des enquêtes publiques ; la première est en cours pour la centrale du Tricastin. C'est essentiel pour créer la confiance.

Pour le nouveau nucléaire, une organisation industrielle rénovée permettra de répondre aux exigences de sécurité. Les retards observés en Finlande, en Grande-Bretagne, en Chine seront source d'enseignement. EDF et Framatome ont mis en place des plans structurants.

Mme le président.  - Veuillez conclure.

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - Des travaux sont en cours sur les compétences à entretenir, le Gouvernement est pleinement investi.

Mme Véronique Guillotin .  - Les plans particuliers d'intervention (PPI) prévoient notamment la distribution gratuite de pastilles d'iode en cas d'incident nucléaire. Il y a deux ans, le Sénat a adopté un de mes amendements, hélas non repris, étendant le périmètre à toutes les communes membres d'une intercommunalité touchée, au-delà des vingt kilomètres en vigueur.

Villerupt, ma commune, est à cinq kilomètres d'une ville luxembourgeoise qui bénéficie de la distribution gratuite de pastilles d'iode, alors que les villeruptiens n'en bénéficient pas : ce n'est pas cohérent.

Peut-on envisager une remise à niveau de nos PPI au niveau européen ? Ou à tout le moins l'inclusion de toutes les communes de l'EPCI ?

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - Le rayon de distribution est passé de dix à vingt kilomètres en 2019. Cela permet de protéger en urgence les populations. Cette distance s'apprécie au niveau de la commune et non de l'intercommunalité. Elle est également utilisée pour d'autres dispositifs de gestion de crise. Au-delà des communes concernées, la distribution peut aussi être organisée au niveau départemental. Nous avons plusieurs heures pour intervenir, car la cinétique de diffusion de la radioactivité est lente.

Le rayon de vingt kilomètres est retenu par la plupart des régulateurs dans de nombreux pays.

Mme Véronique Guillotin.  - Le Luxembourg et la Belgique vont bien au-delà de vingt kilomètres ! Ouvrons le débat pour plus de cohérence à l'échelle européenne.

M. Rémi Cardon .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) Le 12 octobre dernier, le Président de la République affirmait vouloir investir dans des technologies de rupture. Le 9 novembre, il annonçait la construction de nouveaux réacteurs.

Je me réjouis que le Parlement se saisisse de ce dossier et espère que tout n'est pas déjà décidé.

Vous devez être dans le secret des dieux... Quel mix énergétique pour la France ? Quelle place pour le nucléaire ? Comment anticipons-nous les tensions sur les capacités de production d'énergie ? Quel scénario de Réseau de transport d'électricité (RTE) avez-vous retenu ?

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - Notre mix énergétique, dans un contexte d'augmentation de la consommation d'électricité et de poursuite d'un objectif de baisse des émissions nécessaire, demande un développement volontariste des énergies renouvelables, mais cela ne peut avoir lieu de manière réaliste sans nucléaire.

Des précisions seront annoncées très prochainement sur le calendrier de construction de nouvelles centrales. Le dépôt des dossiers pour les EPR 2 - dont la construction sera améliorée par rapport à la première génération - pourrait avoir lieu en 2023, pour une mise en service en 2035-2037.

D'autres modèles, comme les petits réacteurs modulaires (SMR), sont attendus à horizon 2030.

M. Rémi Cardon.  - Votre réponse toute en prudence sur le mode du « en même temps » montre bien que les choses ne sont pas très claires.

Développer le nucléaire, c'est augmenter les risques. L'énergie issue de la fission nucléaire n'est pas une énergie comme les autres ; elle présente de nombreux risques.

Mme Marie Evrard .  - La sûreté des installations nucléaires est un sujet particulièrement important.

L'audition du président de l'ASN en avril dernier nous avait permis de sortir des idées reçues ; nous l'avions d'ailleurs applaudi. Hélas, certains veulent, à des fins politiciennes, caricaturer et susciter les peurs.

L'arrêt temporaire d'un réacteur, c'est la vie normale du parc. Nous devrions tous saluer le haut niveau d'exigence de l'ASN en matière de sécurité et la rigueur de la filière.

Le plan France 2030 annoncé par le Président de la République est une réponse adéquate aux enjeux de long terme.

Alors que les visites décennales doivent se multiplier d'ici à 2025, qu'a-t-il été prévu pour sécuriser l'approvisionnement énergétique dans les prochaines années ?

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - Cette question est essentielle. Nous sommes pleinement mobilisés.

Pour cet hiver, le Gouvernement a pris des mesures. RTE s'apprête à exploiter le réseau de manière dégradée en cas de besoin, avec un arrêt de certains outils industriels et des écogestes auxquels les citoyens se préparent tous. EDF va également mener un audit afin d'optimiser l'arrêt des réacteurs.

De nouveaux moyens de production - éoliennes, EPR de Flamanville notamment - doivent aussi nous permettre de faire face.

M. Pierre Médevielle .  - Le nucléaire sera plus que jamais indispensable demain, avec l'explosion de la demande d'électricité par l'industrie, les transports, l'agriculture ou le numérique. Pour y répondre, notre mix doit être proportionné entre les énergies renouvelables et un nucléaire sécurisé, indispensable.

Dans ce secteur, l'innovation est cruciale. Les SMR sont intéressants au regard de la sécurité, même si leur coût semble encore prohibitif. Alors que la France avance sur les SMR, la régulation suit-elle ? Doit-elle évoluer pour tenir compte des particularités de ces petites installations ?

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - La filière travaille sur des projets de nouveaux réacteurs, de type SMR ; EDF est le chef de file de ces réflexions.

La phase d'avant-projet sommaire précisera la conception comme le modèle économique. Elle sera suivie d'un arrêté d'autorisation, pris sur avis de l'ASN, sans doute en 2028. Les développements se poursuivront ensuite en vue de la construction d'un démonstrateur à horizon de 2030.

La compacité de ces nouveaux réacteurs présente des avantages de sécurité : la quantité de matière fissile est réduite, la taille des composants limitée, le nombre de personnes à évacuer en cas d'incident plus faible.

Ces réacteurs devront respecter des objectifs de sûreté au moins aussi exigeants que les installations actuelles.

Le cadre actuel permet de poursuivre sereinement ces réflexions.

M. Pierre Médevielle.  - Il est heureux que nous avancions dans cette direction. Si nous voulons éviter les difficultés qui attendent l'Allemagne, il est impérieux d'accélérer les investissements ! (M. Daniel Chasseing applaudit.)

Mme Martine Berthet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) L'énergie nucléaire est un atout considérable pour atteindre la neutralité carbone en 2050 comme pour garantir notre souveraineté énergétique. (Protestations sur les travées du GEST) La hausse actuelle des coûts de l'énergie le confirme.

Du fait de la crise sanitaire, EDF a dû revoir son programme d'arrêt du parc par tranches. Le décalage des opérations de maintenance qui en est résulté risque d'affecter la production, alors que nous devons faire face aux pics hivernaux.

Un calendrier de rattrapage est-il prévu et les besoins en compétences sont-ils pris en compte ?

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - La filière fait face à de lourds enjeux -  grand carénage, gestion des déchets, nouveaux réacteurs  - , dans un cadre de sécurité et de coût contraint. Les compétences doivent être adaptées, l'organisation industrielle aussi.

À court terme, Barbara Pompili a demandé à EDF d'assurer l'approvisionnement et de renforcer la disponibilité du parc. Un audit général et indépendant sera réalisé cette année sur la sûreté et la disponibilité du parc.

Les besoins en compétences sont identifiés, par exemple en tuyauterie, soudure ou chaudronnerie. Le plan de relance prévoit 30 millions d'euros pour le renforcement des compétences et la création d'une Université des métiers du nucléaire.

Mme Sophie Taillé-Polian .  - Les fuites d'éléments radioactifs sont une menace pour la santé et pour l'environnement.

À Tricastin, une fuite de tritium s'est traduite par des niveaux de radioactivité 14 000 fois supérieurs aux seuils naturels ! Officiellement, tout va très bien... De tels niveaux n'ont aucune conséquence sanitaire, vraiment ? Même EDF n'exclut pas que la nappe phréatique ait été touchée. On parle pudiquement de marquage des eaux, mais il s'agit bien d'une pollution !

À Tricastin toujours, le mois dernier, EDF a dû signaler la défaillance d'instruments de mesure pendant plusieurs heures. Sans parler de l'alerte lancée par un ancien salarié dénonçant la culture du silence.

Cette centrale, une des plus vieilles de France, est dangereusement dysfonctionnelle. Qu'attendez-vous pour demander des comptes à EDF et procéder à des contrôles en profondeur ? (Applaudissements sur les travées du GEST)

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - L'ASN, autorité indépendante, a estimé l'année dernière que les performances globales de Tricastin rejoignent celles des autres centrales,...

M. Guy Benarroche.  - Globalement...

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - ... tout en observant des fragilités persistantes.

Le 15 décembre dernier, EDF a déclaré un événement significatif pour l'environnement, lié à une détection de tritium dans les eaux internes de la centrale. Après investigation, elle a identifié un débordement dans un réservoir d'effluents radioactifs liquides. Cet écart a été classé au niveau zéro, la pollution étant circonscrite à l'enceinte du site.

Les sujets soulevés par le lanceur d'alerte doivent être traités factuellement et avec les précautions d'usage. Je rappelle que la direction d'EDF a opposé un démenti formel aux faits allégués. Ce plaignant a été débouté des quatre actions judiciaires et administratives qu'il a intentées. L'inspection du travail de l'ASN a conclu à l'absence de harcèlement et de volonté de dissimulation.

Mme le président.  - Madame la secrétaire d'État, veillez à respecter votre temps de parole.

Mme Sophie Taillé-Polian.  - Le système actuel d'autocontrôle ne fonctionne pas, Tricastin le prouve. Continuer à construire des centrales est irresponsable ! (Applaudissements sur les travées du GEST)

M. Fabien Gay .  - Le mois dernier, les centrales de Chooz, dans les Ardennes, et de Civaux, dans la Vienne, ont été arrêtées pour des vérifications. Ces décisions ont entraîné un défaut de production de l'ordre de 1 térawattheure, mais elles étaient nécessaires.

Nous avons besoin du nucléaire dans notre mix pour lutter contre le réchauffement climatique. Mais des questions se posent dans le débat citoyen : utilisation de l'atome pour l'armement, gestion des déchets, notamment.

Il faut des installations sûres et une information transparente. L'indispensable effort de maintenance préventive suppose des investissements massifs. Or les gouvernements successifs ont laissé se perdre de nombreuses compétences en mettant à mal le modèle intégré d'EDF et en ouvrant la voie à la sous-traitance à outrance.

Nous devons être à la hauteur des exigences de sécurité de nos concitoyens. Quels sont les investissements prévus pour la maintenance ? Allez-vous revenir sur votre intention de démanteler EDF ? Quel est le retour d'expérience sur le recours à la sous-traitance ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE)

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - EDF doit évoluer mais nous pensons, comme vous, qu'il faut maintenir un cadre de régulation pour le nucléaire comme l'hydroélectricité.

Le Gouvernement a demandé au PDG d'EDF de formuler des propositions sur l'organisation du groupe. Nous souhaitons une entreprise intégrée et publique.

Nous nous sommes engagés aussi sur une nouvelle régulation du parc qui protège le consommateur des hausses de prix et en assure le financement. Le consommateur doit pouvoir compter sur les prix stables et maîtrisés que le nucléaire permet, et EDF exploiter son parc de façon performante, en toute sûreté.

Le projet de réorganisation d'EDF, qui prévoit l'exploitation des centrales par une entité publique, fait l'objet d'échanges avec la Commission européenne. Des progrès substantiels ont été réalisés. La protection des consommateurs et le maintien de l'outil industriel sont les deux principes essentiels qui nous guident.

Mme Céline Brulin.  - Et sur la sous-traitance ?

Mme Denise Saint-Pé .  - Il y a peu, la filière nucléaire était exsangue. Mais l'exécutif a fini par surmonter ses atermoiements, devant l'urgence climatique. (Exclamations sur les travées du GEST) Je me réjouis des progrès réalisés, mais ils restent insuffisants.

Des investissements colossaux sont nécessaires pour mener à bien des projets comme ceux de La Hague et de Bure ou encore le grand carénage, un chantier titanesque.

Dans ce contexte, la labellisation verte de la filière par la Commission européenne tombe à point nommé. Les garanties demandées, notamment en termes de gestion des déchets et de démantèlement des installations en fin de vie, vous paraissent-elles proportionnées ?

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - Il va sans dire que nous accueillons favorablement l'inclusion du nucléaire dans la taxonomie européenne, sur le fondement d'une analyse scientifique indépendante. Le rôle clé du nucléaire pour la décarbonation de nos économies est ainsi reconnu.

Nous devons respecter nos objectifs climatiques tout en garantissant la sécurité des approvisionnements et l'indépendance énergétique à l'échelle européenne. Le nucléaire est une condition de la réussite de la transition écologique, avec les énergies renouvelables.

Nous transmettrons à la Commission européenne des observations techniques dans le cadre de la procédure de consultation. Le projet d'acte délégué fixe des conditions, ce qui est normal ; nous sommes en train d'analyser ces exigences en détail.

Je rappelle que le cadre en matière de gestion des déchets est déjà très exigeant, s'agissant notamment de la responsabilité du producteur. Une mission globale est confiée à l'Andra dans ce domaine. Des projets de stockage comme Cigéo sont bien avancés.

Il faut désormais finaliser ce texte, avec une métrique commune des activités reconnues comme vertes. Les acteurs auront ainsi la visibilité nécessaire à la mise en oeuvre de la taxonomie.

Mme Angèle Préville .  - Cinquante ans de fonctionnement d'une centrale nucléaire, c'est de l'électricité pour deux générations, mais des déchets sur les épaules de 40 000 générations...

On ne le dira jamais assez : la meilleure énergie est celle qu'on ne consomme pas ! Nous devons réduire notre consommation, alimentée par des gadgets numériques gourmands en énergie, et revoir nos usages.

D'autant que nos centrales nucléaires vieillissent, et que rien ne dit que leur durée de vie sera prolongée jusqu'à soixante ans. Quatre de nos réacteurs les plus puissants sont à l'arrêt. Au total, dix-sept réacteurs ne fonctionnent pas en plein coeur de l'hiver !

Dans ce contexte, le risque est que la sûreté devienne la variable d'ajustement. L'ASN doit rehausser le niveau de sécurité au fil des visites décennales et à l'aune des retours d'expérience des catastrophes passées - car nous ne sommes à l'abri de rien. Allez-vous lancer cette dynamique ? (Applaudissements sur les travées du GEST)

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - Notre mix énergétique évolue, notre parc aussi. Sans cesse, nous devons adapter les conditions de sécurité afin de garantir la confiance de nos concitoyens. Cette réflexion doit être apaisée et scientifiquement éclairée.

Il n'y a pas de solution miracle pour la gestion des déchets, mais plusieurs options technologiques.

Le Gouvernement soutient le secteur à travers un effort sans précédent de 1 milliard d'euros, pour les technologies comme pour les compétences.

Débattons sereinement du point d'équilibre responsable, dans la transparence, en dépassant les oppositions stériles entre pro et anti nucléaire.

Mme Angèle Préville.  - Je le répète : la sûreté ne doit pas être sacrifiée ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; M. Daniel Salmon applaudit également.)

Mme Christine Lavarde .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Ce mois-ci, nos capacités nucléaires sont à leur plus faible niveau historique. Quelle leçon en tirez-vous ? Allons-nous devoir arbitrer entre la sûreté du parc et la sécurité de l'approvisionnement?

Vous parlez du futur éolien en mer, mais nous avons besoin de moyens pilotables. Vous avez passé sous silence le projet de décret augmentant temporairement les capacités des centrales à charbon : ce recul n'est évidemment pas une solution durable.

Alors que plusieurs de nos voisins européens s'apprêtent à fermer des capacités pilotables, quelles réponses à long terme proposez-vous ?

M. Daniel Salmon.  - Le 100 % renouvelable ! C'est possible !

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - Je n'ai pas abordé tous les aspects de notre mix, car ce débat porte sur la sûreté nucléaire.

Ces débats sont légitimes et se poursuivront au cours des prochaines années. Le Parlement y sera largement associé. Les scénarios de RTE et les audits en cours éclaireront la réflexion.

Nous déployons des moyens très importants pour les compétences et l'innovation, afin de faire évoluer notre mix et notre outil industriel de production électrique.

Mme Christine Lavarde.  - Je faisais simplement observer que vous n'aviez pas traité de certains sujets, peut-être plus difficiles.

La question de l'équilibre délicat entre sûreté du parc et sécurité de l'approvisionnement se pose depuis de nombreuses années. Le Gouvernement a tardé à y répondre, alors que mettre en place de nouvelles capacités de production prendra du temps.

M. Patrick Chauvet .  - Le nucléaire est une source d'énergie essentielle, non carbonée et pilotable. Nous ne pouvons nous en passer. (On le conteste sur les travées du GEST.)

La sûreté doit être la clé de voûte de nos décisions. Elle est la condition de la confiance des citoyens.

Le cadre français, fondé sur l'expertise de l'ASN, est très protecteur. Nous soutenons évidemment vos efforts pour l'inclusion du nucléaire dans la taxonomie verte européenne, mais il faut aussi une harmonisation des règles de sécurité au niveau européen, y compris pour exporter plus facilement de nouveaux types de centrales.

Comment comptez-vous favoriser la convergence vers une réglementation commune de la sûreté en Europe ?

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - L'harmonisation des règles de sûreté est en effet indispensable, au niveau européen comme au niveau international.

L'ASN et l'IRSN participent aux échanges internationaux en la matière. La législation européenne intègre déjà un corpus de règles, et les exigences seront renforcées par les textes à venir.

Les autorités de contrôle travaillent également entre elles au rapprochement de leurs standards.

M. Patrick Chauvet.  - Prenons garde que la sûreté ne devienne pas un enjeu de compétitivité pour la filière !

M. Franck Montaugé .  - Parce que le risque zéro n'existe pas, nous devons prévoir des dispositifs de protection des populations en cas d'accident, en particulier la distribution de pastilles d'iode stable pour lutter contre les problèmes thyroïdiens.

Le périmètre des PPI ne dépasse pas vingt kilomètres, alors que, nous le savons bien, de vastes territoires peuvent être rapidement exposés à la radioactivité.

La question écrite que j'ai posée à cet égard est sans réponse depuis dix-huit mois. Comment comptez-vous agir pour nous éviter de revivre les errements que nous avons connus au printemps 2020 avec les masques et l'oxygène ?

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - Le préfet a la charge des PPI. Une mise à l'abri est prévue en cas d'accident à cinétique rapide, sur alerte directe de l'exploitant. Les mesures relèvent de l'autorité préfectorale, avec l'appui de l'ASN, pour les accidents à cinétique plus lente.

Une cellule interministérielle de crise assure la conduite opérationnelle en cas d'accident majeur. Nous organisons des exercices tous les quatre ans au niveau local pour garantir une réactivité optimale. Les 18 et 19 mai derniers, un exercice de grande ampleur a été mené à tous les échelons d'intervention.

M. Franck Montaugé.  - Votre réponse n'est pas rassurante. Il n'y a pas sur les territoires de simulations opérationnelles suffisantes, impliquant les populations. L'État doit prendre à bras-le-corps ce sujet. L'acceptabilité du nucléaire en dépend.

M. Stéphane Piednoir .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Nous déplorons régulièrement le succès des fausses informations qui inondent les réseaux sociaux. Mais il y a pire encore : les fausses théories qui finissent par s'ancrer dans l'imaginaire collectif.

Ainsi de l'idée, visant à discréditer la filière nucléaire, selon laquelle les réacteurs auraient une durée de vie de quarante ans. Certains orateurs précédents n'ont pas manqué de l'invoquer.

L'ASN le dit clairement : les installations nucléaires n'ont pas de durée de vie légalement définie. Il faut donc en finir avec celle légende écolo-urbaine !

Le Gouvernement peut-il contribuer à la rigueur et à la sincérité du débat en confirmant qu'il n'y a pas d'obsolescence programmée des réacteurs ?

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - L'autorisation d'exploitation, délivrée sans limitation de durée, est réexaminée tous les dix ans. Récemment, une nouvelle dizaine d'années a été accordée par l'ASN aux plus gros réacteurs. Des visites de contrôle régulières sont menées, comme à Tricastin.

Aucune décision n'a été prise pour les décennies suivantes. La sûreté ne se décrète pas : elle se mesure et se vérifie.

Mme Agnès Canayer .  - Nous sommes le pays le plus nucléarisé au monde. En Seine-Maritime, il y a déjà deux centrales, en attendant le nouvel EPR.

Cette richesse énergétique s'accompagne d'un besoin de sûreté. À cet égard, EDF s'est dotée d'équipes de surveillance des centrales, formées aux situations d'urgence.

La prévention, en revanche, reste perfectible. La population doit être davantage impliquée dans les exercices. Les élus eux-mêmes sont très peu informés. Les distributions de pastilles d'iode arrivent rarement jusqu'aux habitants.

Comptez-vous mieux impliquer élus et populations pour améliorer la culture du risque nucléaire ? Allez-vous modifier le statut de médicament des pastilles d'iode pour qu'elles puissent être distribuées efficacement en dehors des pharmacies ?

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - En amont des crises et au-delà du périmètre des PPI, nous devons pouvoir agir rapidement avec les ressources nécessaires. Les élus et les populations doivent donc être impliqués. Les exercices sont essentiels à cet égard.

Les commissions locales d'information (CLI) se réunissent plusieurs fois par an. Elles sont l'occasion de présenter un bilan de sûreté aux élus.

Mme Agnès Canayer.  - Ces commissions sont un lieu d'échanges, mais insuffisant pour créer une véritable culture du risque. L'incident de Lubrizol l'a montré : la culture du risque ne se décrète pas, elle se construit avec toutes les populations ! (Mme Sophie Taillé-Polian applaudit.)

Mme Marta de Cidrac .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) La filière nucléaire française est une filière d'excellence, mais elle a été trop longtemps délaissée. Résultat : nous souffrons d'un déficit de compétences et de qualifications.

La formation est essentielle pour la sûreté. Un effort massif et continu s'impose dans ce domaine, s'agissant notamment de la formation initiale, y compris à la gestion des déchets.

Comment comptez-vous rendre plus attractifs les formations et les métiers du nucléaire ?

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - Quelle que soit notre vision sur le nucléaire, ces compétences sont en effet essentielles pour l'exploitation, l'éventuelle prolongation ou la construction de centrales. Nous devons les entretenir.

Les EPR britannique, finlandais et chinois nous offrent des retours d'expérience très utiles. Dès 2020, EDF et Framatome se sont dotés de plans en ce sens, en identifiant des besoins en tuyauterie, soudage, chaudronnerie, essais et contrôles notamment. Le plan de relance prévoit 30 millions d'euros pour aider la filière dans ce domaine. Nous allons également créer une université des métiers du nucléaire.

Un audit global des compétences est prévu en 2022, dans la perspective de la programmation des constructions, de la poursuite du grand carénage et de la multiplication des chantiers de gestion.

Mme Marta de Cidrac.  - La France ne dispose plus des compétences qui faisaient sa fierté par le passé. L'expérience de Flamanville le montre. Cette filière d'excellence a été abandonnée, et les volte-face du Président de la République ont fait du tort à son attractivité. Les conséquences sont immédiates : nous avons frôlé plusieurs fois le blackout partiel.

Mme le président.  - Il faut conclure.

Mme Marta de Cidrac.  - Ne jouons plus à pile ou face sur de tels sujets.

Mme Else Joseph .  - Le nucléaire reste et doit rester une énergie d'avenir. En matière de sûreté, la rigueur a toujours été de mise dans notre pays, et aucun accident majeur n'a été déploré, en dépit des prédictions apocalyptiques.

Avec la mise à l'arrêt de certaines centrales, la question de la sécurité reste d'actualité, comme à Chooz, dans les Ardennes. Cela inclut la gestion des déchets, pour la sécurité des générations futures. Nous devons garantir aussi bien la transparence que le secret des installations. Comment assurer la sécurité pour maintenir la confiance de l'opinion dans le nucléaire ?

Enfin, la France ne peut perdre ses savoir-faire en la matière. Pourquoi ne pas relancer le programme Astrid ? Nos besoins en électricité vont augmenter. La sécurité doit être complète : c'est la contrepartie de l'efficacité. Madame la ministre, nous voulons une nouvelle stratégie pour le nucléaire.

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État.  - Vous avez bien souligné les enjeux. La réflexion se poursuit dans un contexte de réchauffement climatique et de hausse des besoins en électricité.

Nous avons ainsi proposé le lancement de nouveaux chantiers, en nous appuyant sur les scénarios de RTE. La question des compétences est essentielle, à la fois pour l'entretien des centrales, leur démantèlement éventuel ou la gestion des déchets.

À l'autre bout de la chaîne, il faut tenir compte des enjeux éthiques, entre nos responsabilités face au réchauffement climatique et ce que nous laisserons aux générations futures.

Je remercie encore les sénateurs d'avoir proposé ce débat. Nous devons suivre les recommandations des scientifiques pour trouver les meilleurs équilibres.

M. Guillaume Gontard, président du groupe écologiste - solidarité et territoires .  - Je me félicite aussi de la tenue de ce débat, qui a permis quelques éclaircissements, malgré les zones d'ombre qui persistent.

Dans un parc vieillissant, les problèmes de maintenance se multiplient, voire les fuites, comme au Tricastin. Au mois de décembre, dix-sept réacteurs sur cinquante-six se sont trouvés à l'arrêt simultanément. RTE le dit, jamais le parc n'a aussi mal fonctionné.

Le ministre a donc dû demander un audit. En cas d'attentat du type 11 septembre ou de chute accidentelle d'avion, la capacité de résistance des centrales n'est pas garantie.

Or l'opacité est totale. Une forme de secret est justifiée pour protéger les installations des actions malveillantes, mais même l'autorité de contrôle qu'est l'ASN est tributaire des informations transmises par EDF, comme l'a montré le lanceur d'alerte du Tricastin.

Je vous renvoie à l'excellent rapport de la députée Barbara Pompili, qui préconise un renforcement des moyens d'action du gendarme du nucléaire et une diversification de l'expertise. Il est temps de le mettre en oeuvre. Il est également crucial de protéger les lanceurs d'alerte.

Que l'on plaide, comme le GEST, pour une sortie du nucléaire ou que l'on prône une relance, nous vivrons encore longtemps avec l'atome. La question de la sécurité, par conséquent, nous concerne tous. C'est l'activité industrielle la plus dangereuse qui soit, concentrée en France dans des proportions uniques au monde.

Pourquoi, dans ces conditions, les tenants du nucléaire ne plaident-ils pas pour un renforcement drastique des règles de sécurité, afin de rassurer la population ? Aujourd'hui, le coût de production n'intègre pas les exigences de sécurité du XXIe siècle. Un nucléaire plus sûr, c'est un nucléaire plus cher.

La PPE 2023-2028 fixe l'objectif d'une réduction à 50 % de la part du nucléaire dans notre mix énergétique. La fermeture de douze réacteurs réglera la question des plus vieilles installations, mais le choix des réacteurs à fermer doit faire l'objet d'un débat public.

De manière générale, l'avenir de notre mix énergétique et la construction de nouvelles installations doivent relever d'une décision démocratique. La Commission nationale du débat public et sa présidente, Chantal Jouanno, demandent un débat transparent.

L'atome ne peut demeurer la chasse gardée d'experts endogames comme c'est le cas depuis le début du programme nucléaire français, créant une omerta mortifère et facteur de risque. Conformément aux recommandations du rapport Pompili, nous souhaitons donc la création d'une délégation parlementaire à la sûreté nucléaire.

La part des énergies renouvelables doit, dans tous les cas, augmenter de manière drastique d'ici à 2030, pour approvisionner le pays et respecter nos engagements. Cela réclame planification et encadrement.

Ni vert, ni propre, ni bon marché, ni sans danger, le nucléaire mérite une véritable réflexion. (Applaudissements sur les travées du GEST ; Mme Angèle Préville applaudit également.)

Prochaine séance, lundi 10 janvier 2022, à 17 heures.

La séance est levée à 13 h 45.

Pour la Directrice des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du lundi 10 janvier 2022

Séance publique

À 17 heures et le soir

Présidence : Mme Pascale Gruny, vice-président M. Roger Karoutchi, vice-président

Secrétaires : M. Jean-Claude Tissot - Mme Marie Mercier

1. Proposition de loi relative à la circulation et au retour des biens culturels appartenant aux collections publiques, présentée par Mme Catherine Morin-Desailly, MM. Max Brisson, Pierre Ouzoulias et plusieurs de leurs collègues (texte de la commission, n°303, 2021-2022) (demande de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication)

2. Proposition de loi visant à limiter l'engrillagement des espaces naturels et à protéger la propriété privée, présentée par M. Jean-Noël Cardoux et plusieurs de ses collègues (texte de la commission, n°314, 2021-2022) (demande du groupe Les Républicains)