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Table des matières



Questions orales

Devenir des conseillers numériques

Mme Monique de Marco

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications

Égalité des droits des élus d'arrondissement

Mme Marie-Arlette Carlotti

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications

Suppression de la CVAE aux départements et aux communes

M. Rémi Cardon

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications

Soutien aux collectivités face à la hausse des coûts

M. Jean-Marc Todeschini

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications

Imposition des Français travaillant en Belgique

M. Jean-Pierre Decool

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications

Avenir du projet de Cité du théâtre à Paris

Mme Catherine Dumas

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Autorisations d'urbanisme pour l'installation de panneaux photovoltaïques

Mme Chantal Deseyne

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Budget alloué au réseau diplomatique et consulaire

Mme Hélène Conway-Mouret

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Accessibilité au patrimoine sportif français et mondial

Mme Sylvie Robert

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Prise en charge des nouveau-nés placés

Mme Florence Lassarade

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance

Site d'Oyonnax de l'INSA

M. Patrick Chaize

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance

Prise en compte des travaux d'utilité collective pour la retraite

Mme Monique Lubin

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance

Manque de places en instituts médicaux éducatifs

Mme Vivette Lopez

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Assistantes maternelles impayées

M. Henri Cabanel

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Niveaux de dioxines autour de l'incinérateur d'Ivry-Paris XIII

Mme Catherine Procaccia

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Extension du Nutri-score aux fruits et légumes frais

Mme Françoise Férat

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Dépistage du diabète

Mme Anne Ventalon

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Dépistage du saturnisme - Metaleurop Nord

Mme Sabine Van Heghe

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Évolution du zonage des chirurgiens-dentistes

M. Olivier Rietmann

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Stages obligatoires en milieu rural pour les étudiants en médecine

M. Bruno Belin

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Réseaux de soins fermés

M. Jean-Michel Arnaud

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Création d'un CHU en Moselle

Mme Christine Herzog

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Désertification médicale

M. Hervé Maurey

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Production électrique en Guyane

M. Georges Patient

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie

Zéro artificialisation nette

M. Jean-Pierre Corbisez

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie

Indemnisation des élus pour leurs déplacements

M. Frédéric Marchand

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie

Plan Avenir montagnes

Mme Viviane Artigalas

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie

Défense des terres agricoles de Gonesse et Saclay

M. Jacques Fernique

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie

Bornes de recharge électrique

M. Jean-Claude Tissot

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie

Ligne ferroviaire Le Havre-Marseille

Mme Céline Brulin

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie

Rétablissement de la « Palombe bleue »

M. Max Brisson

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie

Augmentation des prix de l'énergie

M. Stéphane Demilly

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie

Codes postaux et communes nouvelles

M. Daniel Gueret

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales

Détournement du droit de préemption urbain

M. Jean-Raymond Hugonet

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales

Collectivités face à l'inflation

Mme Cathy Apourceau-Poly

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales

Mode d'emploi des procurations dématérialisées

M. Yves Détraigne

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales

Travailleurs sans-papiers de Chronopost à Alfortville

Mme Laurence Cohen

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales

Sortie du moratoire sur les machines à voter

M. Michel Savin

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales

Pouvoirs du maire

M. Jean-Marie Mizzon

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales

Renouvellement de titres d'identité

M. Édouard Courtial

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales

Certification environnementale des exploitations agricoles

M. Alain Milon

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Difficultés des producteurs de lait bio

M. Didier Rambaud

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Conséquences de l'été 2022 sur les récoltes de pommes de terre

M. Antoine Lefèvre

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Conséquences de la loi ÉGalim dans la restauration scolaire et collective

Mme Else Joseph

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Décès d'anciens sénateurs

Salut à une délégation sénatoriale roumaine

Fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (Procédure accélérée)

Discussion générale

M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l'enseignement et de la formation professionnels

Salut à une délégation sénatoriale ivoirienne

Fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (Procédure accélérée - Suite)

Discussion générale (Suite)

Mme Frédérique Puissat, rapporteur de la commission des affaires sociales

M. Olivier Henno, rapporteur de la commission des affaires sociales

Question préalable

Mme Cathy Apourceau-Poly

Discussion générale (Suite)

Mme Laurence Cohen

M. Jean-Marie Vanlerenberghe

Mme Maryse Carrère

Mme Pascale Gruny

Mme Colette Mélot

Mme Raymonde Poncet Monge

M. Martin Lévrier

Mme Monique Lubin

Mme Annick Jacquemet

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

M. Philippe Mouiller

M. Yan Chantrel

Mme Esther Benbassa

Mme Monique Lubin

M. Olivier Dussopt, ministre

APRÈS L'ARTICLE PREMIER

ARTICLE PREMIER BIS AA

Salut à une délégation sénatoriale philippine

Fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

APRÈS L'ARTICLE PREMIER BIS AA

ARTICLE PREMIER BIS AB

ARTICLE PREMIER BIS A

APRÈS L'ARTICLE PREMIER BIS A

ARTICLE 2

Modification de l'ordre du jour

Fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 2 (Suite)

APRÈS L'ARTICLE 2

ARTICLE 2 BIS

ARTICLE 2 TER

ARTICLE 3

Mme Monique Lubin

APRÈS L'ARTICLE 3

ARTICLE 4

Mme Patricia Schillinger

APRÈS L'ARTICLE 4

ARTICLE 5

APRÈS L'ARTICLE 5

INTITULÉ DU PROJET DE LOI

Interventions sur l'ensemble

Mme Cathy Apourceau-Poly

Mme Monique Lubin

M. Daniel Chasseing

Mme Raymonde Poncet Monge

M. Philippe Mouiller

Mme Nadège Havet

Mme Annick Jacquemet

Questions orales

Devenir des conseillers numériques

Mme Monique de Marco

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications

Égalité des droits des élus d'arrondissement

Mme Marie-Arlette Carlotti

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications

Suppression de la CVAE aux départements et aux communes

M. Rémi Cardon

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications

Soutien aux collectivités face à la hausse des coûts

M. Jean-Marc Todeschini

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications

Imposition des Français travaillant en Belgique

M. Jean-Pierre Decool

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications

Avenir du projet de Cité du théâtre à Paris

Mme Catherine Dumas

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Autorisations d'urbanisme pour l'installation de panneaux photovoltaïques

Mme Chantal Deseyne

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Budget alloué au réseau diplomatique et consulaire

Mme Hélène Conway-Mouret

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Accessibilité au patrimoine sportif français et mondial

Mme Sylvie Robert

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture

Prise en charge des nouveau-nés placés

Mme Florence Lassarade

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance

Site d'Oyonnax de l'INSA

M. Patrick Chaize

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance

Prise en compte des travaux d'utilité collective pour la retraite

Mme Monique Lubin

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance

Manque de places en instituts médicaux éducatifs

Mme Vivette Lopez

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Assistantes maternelles impayées

M. Henri Cabanel

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Niveaux de dioxines autour de l'incinérateur d'Ivry-Paris XIII

Mme Catherine Procaccia

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Extension du Nutri-score aux fruits et légumes frais

Mme Françoise Férat

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Dépistage du diabète

Mme Anne Ventalon

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Dépistage du saturnisme - Metaleurop Nord

Mme Sabine Van Heghe

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Évolution du zonage des chirurgiens-dentistes

M. Olivier Rietmann

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Stages obligatoires en milieu rural pour les étudiants en médecine

M. Bruno Belin

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Réseaux de soins fermés

M. Jean-Michel Arnaud

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Création d'un CHU en Moselle

Mme Christine Herzog

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Désertification médicale

M. Hervé Maurey

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées

Production électrique en Guyane

M. Georges Patient

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie

Zéro artificialisation nette

M. Jean-Pierre Corbisez

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie

Indemnisation des élus pour leurs déplacements

M. Frédéric Marchand

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie

Plan Avenir montagnes

Mme Viviane Artigalas

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie

Défense des terres agricoles de Gonesse et Saclay

M. Jacques Fernique

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie

Bornes de recharge électrique

M. Jean-Claude Tissot

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie

Ligne ferroviaire Le Havre-Marseille

Mme Céline Brulin

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie

Rétablissement de la « Palombe bleue »

M. Max Brisson

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie

Augmentation des prix de l'énergie

M. Stéphane Demilly

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie

Codes postaux et communes nouvelles

M. Daniel Gueret

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales

Détournement du droit de préemption urbain

M. Jean-Raymond Hugonet

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales

Collectivités face à l'inflation

Mme Cathy Apourceau-Poly

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales

Mode d'emploi des procurations dématérialisées

M. Yves Détraigne

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales

Travailleurs sans-papiers de Chronopost à Alfortville

Mme Laurence Cohen

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales

Sortie du moratoire sur les machines à voter

M. Michel Savin

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales

Pouvoirs du maire

M. Jean-Marie Mizzon

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales

Renouvellement de titres d'identité

M. Édouard Courtial

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales

Certification environnementale des exploitations agricoles

M. Alain Milon

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Difficultés des producteurs de lait bio

M. Didier Rambaud

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Conséquences de l'été 2022 sur les récoltes de pommes de terre

M. Antoine Lefèvre

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Conséquences de la loi ÉGalim dans la restauration scolaire et collective

Mme Else Joseph

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Décès d'anciens sénateurs

Salut à une délégation sénatoriale roumaine

Fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (Procédure accélérée)

Discussion générale

M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l'enseignement et de la formation professionnels

Salut à une délégation sénatoriale ivoirienne

Fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (Procédure accélérée - Suite)

Discussion générale (Suite)

Mme Frédérique Puissat, rapporteur de la commission des affaires sociales

M. Olivier Henno, rapporteur de la commission des affaires sociales

Question préalable

Mme Cathy Apourceau-Poly

Discussion générale (Suite)

Mme Laurence Cohen

M. Jean-Marie Vanlerenberghe

Mme Maryse Carrère

Mme Pascale Gruny

Mme Colette Mélot

Mme Raymonde Poncet Monge

M. Martin Lévrier

Mme Monique Lubin

Mme Annick Jacquemet

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

M. Philippe Mouiller

M. Yan Chantrel

Mme Esther Benbassa

Mme Monique Lubin

M. Olivier Dussopt, ministre

APRÈS L'ARTICLE PREMIER

ARTICLE PREMIER BIS AA

Salut à une délégation sénatoriale philippine

Fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

APRÈS L'ARTICLE PREMIER BIS AA

ARTICLE PREMIER BIS AB

ARTICLE PREMIER BIS A

APRÈS L'ARTICLE PREMIER BIS A

ARTICLE 2

Ordre du jour du mercredi 26 octobre 2022




SÉANCE

du mardi 25 octobre 2022

10e séance de la session ordinaire 2022-2023

présidence de Mme Nathalie Delattre, vice-présidente

Secrétaires : Mme Jacqueline Eustache-Brinio, M. Loïc Hervé.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions orales

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle quarante-quatre questions orales.

Devenir des conseillers numériques

Mme Monique de Marco .  - La dématérialisation des services publics s'accélère alors que le confinement a aggravé la fracture numérique, avec treize millions de Français en difficulté.

Début 2021, le Gouvernement a créé les conseillers numériques, contrats de projet de dix-huit à vingt-quatre mois subventionnés au niveau du Smic. Les quatre mille conseillers annoncés devaient procéder, auprès de trois mille collectivités et associations, à huit cent mille accompagnements, à domicile si nécessaire. Or les besoins s'accroissent.

Cependant, la formation n'est pas toujours adaptée, le salaire est minimal et les conditions sont précaires. Ni les collectivités ni les associations ne pourront les renouveler. Nous ne retrouvons pas de trace dans le projet de loi de finances (PLF) des 75 millions d'euros annoncés, alors que 250 millions d'euros avaient été engagés pour amorcer le dispositif.

Comment l'État entend-il le pérenniser ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications .  - Le Gouvernement s'est engagé, avec la Première ministre, à ce que l'État poursuive la médiation numérique dans les années à venir. Après la relance, nous souhaitons réunir une ambition collective face à l'enjeu social des fragilités numériques.

Je suis optimiste après l'échange avec les parties prenantes sur les conseillers numériques : toutes sont concernées par leur montée en charge et l'organisation de leur action territoriale. Pour 2023, 44 millions d'euros s'ajoutent aux sommes déjà provisionnées, pour un total de 75 millions d'euros. En outre, nous accompagnerons les collectivités dans leur recherche de fonds complémentaires.

Les modalités seront concertées dans les prochaines semaines, comme nous l'avons annoncé à Lens le 29 septembre. Les contrats arrivant à échéance au printemps seront renouvelés dans les mêmes conditions.

La formation, obligatoire et diplômante, était insuffisante : il faut la renforcer. Le ministère du travail travaille à un plan de développement de l'emploi et des compétences entre l'État et les organismes partenaires.

Mme Monique de Marco.  - Je vous remercie pour ces engagements.

Égalité des droits des élus d'arrondissement

Mme Marie-Arlette Carlotti .  - Si les élus d'arrondissement de Paris et de Marseille ont les mêmes devoirs que tous les élus municipaux de France, ils n'ont pas les mêmes droits, notamment pour les frais de garde, le détachement, la formation ou encore l'accompagnement et l'aide technique pour les élus en situation de handicap.

Nous avions souligné, à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances rectificatif (PLFR) pour 2022, le besoin d'aligner leur régime sur celui des conseillers de Paris, de Lyon et de Marseille. Le ministre Bruno Le Maire s'était engagé à le faire à l'occasion du PLF pour 2023 : qu'en est-il ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications .  - Certains avantages des élus communaux, comme la majoration de leur indemnité et celle de la durée des crédits, ne sont accordés que dans certains cas : chefs-lieux, communes sinistrées, stations de tourisme, communes dont la population a augmenté à la suite de travaux publics d'intérêt national, communes percevant la dotation de solidarité urbaine ou la dotation d'aménagement des communes d'outre-mer. Les élus d'arrondissement n'y sont pas forcément éligibles.

Il y a en outre des difficultés opérationnelles. Ainsi, l'allocation différentielle de fin de mandat (ADFM) est financée par les cotisations des collectivités concernées. Or les arrondissements ne sont pas une collectivité distincte de la commune et ne cotisent donc pas.

Mme Marie-Arlette Carlotti.  - Les élus de Paris, de Lyon et de Marseille devraient être traités de la même manière car ils sont élus de la même manière. Réexaminez notre proposition à cette heure où ils ont particulièrement besoin d'être soutenus.

Suppression de la CVAE aux départements et aux communes

M. Rémi Cardon .  - Après la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) aux régions, pour 7,2 milliards d'euros par an, le Gouvernement a annoncé celle de la fraction aux communes et aux intercommunalités, pour 7 milliards d'euros, compensée par un nouveau transfert de recettes de TVA. Après la suppression de la taxe d'habitation et de la cotisation foncière des entreprises (CFE), vous recentralisez les recettes des collectivités selon une philosophie néolibérale.

Les élus des collectivités ne sont-ils pas aptes à gérer leurs finances ? La CVAE servait pourtant à l'exercice de leurs compétences : social, transport, éducation. Alors que le déficit public atteint des sommets, l'État supportera-t-il durablement la compensation de la CVAE ? Celle-ci ne sera-t-elle pas déconnectée de la réalité des territoires ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications .  - La CVAE sera totalement supprimée pour soutenir l'activité économique et la reconquête industrielle, dans le prolongement de l'allégement des impôts de production. La moitié sera supprimée dès 2023, et la totalité en 2024. Dès le 1er janvier 2023, les pertes seront compensées par l'affectation d'une fraction de la TVA, recette pérenne qui suit la dynamique de l'inflation.

Nous avons élargi la période de référence de la compensation pour tenir compte du dynamisme des recettes de la CVAE pour 2023 : elle sera donc basée sur la moyenne quadriennale 2020-2023. En outre, la dynamique de la fraction de TVA tiendra compte, via un fonds national d'attractivité économique des territoires, du dynamisme économique local : voilà qui répond à votre préoccupation sur la déconnexion.

En concertation avec l'association des départements de France (ADF), ceux-ci n'ont pas intégré le dispositif. Chacun bénéficiera du dynamisme de sa fraction de TVA, sur le modèle des régions.

Les pertes de recettes des régions seront compensées par une dotation égale aux montants perçus en 2022.

M. Rémi Cardon.  - Vous mettez les collectivités sous tutelle financière alors que ce sont les impôts des ménages qui compenseront la suppression des impôts de production.

Soutien aux collectivités face à la hausse des coûts

M. Jean-Marc Todeschini .  - La loi de finances rectificative (LFR) pour 2022 prévoit des critères cumulatifs au dispositif de soutien voté par les parlementaires : l'épargne brute à la fin 2021 doit être inférieure à 22 % des recettes de fonctionnement, et elle doit avoir baissé de plus de 25 % en 2022. Ce couperet exclut de nombreuses collectivités du dispositif.

Des collectivités à la gestion imprudente seront aidées alors que d'autres, bien gérées mais aux faibles recettes, ne le seront pas, alors que le renchérissement du point d'indice et des prix, particulièrement de l'énergie et de l'alimentation, grèveront leur budget.

Quelles sont les solutions pour que les collectivités à faible potentiel fiscal, notamment les plus modestes, ne soient pas traitées inéquitablement ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications .  - Au 31 décembre 2021, 24 000 collectivités satisfaisaient le premier critère de l'article 14 de la LFR du 16 août 2022. Cet article impose trois seuils : fragilité financière, situation financière dégradée, épargne brute inférieure à 22 % des recettes et un potentiel financier inférieur au double de la moyenne de la strate démographique.

Cela permet de concentrer le soutien de l'État. Un saupoudrage ne serait pas à l'avantage des collectivités les plus fragiles.

Enfin, le potentiel financier appréhende justement la richesse relative du territoire, car il comprend la dotation globale de fonctionnement (DGF) en plus du potentiel fiscal. Ce dernier critère est d'ailleurs contesté en raison de la suppression de la taxe d'imposition, c'est pourquoi le comité des finances locales travaille à redéfinir ses paramètres.

M. Jean-Marc Todeschini.  - Je ne suis pas satisfait après les annonces du ministre du budget en faveur des entreprises. La dépendance des communes les plus modestes aux dotations de l'État est totale, alors que Rémi Cardon a évoqué la perte de la CVAE. Vous allez tuer les collectivités qui représentent pourtant les trois quarts de l'investissement public.

Imposition des Français travaillant en Belgique

M. Jean-Pierre Decool .  - L'article 10 de la convention du 10 mars 1964 entre la France et la Belgique prévoit que les revenus de la fonction publique sont imposables par l'État payeur, à l'exception des personnes possédant la nationalité de leur pays de résidence sans avoir la nationalité de celui où elles travaillent : celles-ci sont alors imposées par l'État de résidence. Ainsi, une personne résidant en France sans la nationalité belge aura sa rémunération de la fonction publique belge imposée en France.

Cela protège les résidents français d'une imposition belge 20 à 30 fois supérieure. Cependant, la nouvelle convention de 2021, signée pour prévenir la double imposition, revient sur cette disposition. Les frontaliers sont inquiets alors que la question du pouvoir d'achat ne peut être éludée : des centaines de familles sont concernées.

Entendez-vous exclure de la convention le personnel public embauché avant sa ratification ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications .  - La convention du 9 novembre 2021 remplace celle de 1964 et comporte des avancées favorables à la France tout en préservant le régime des frontaliers prévu au protocole additionnel de 1964. Les rémunérations publiques sont imposées par l'État qui les verse : c'est logique, car elles sont financées par ses ressources.

Cela est conforme au modèle de l'OCDE et courant dans notre réseau conventionnel. C'est pourquoi les personnes travaillant en Belgique pour des entités belges y seront taxées même si elles résident en France - la réciproque est d'ailleurs vraie. Ainsi, seuls les résidents français, de nationalité française, percevant un traitement belge et exerçant en Belgique, voient leur situation évoluer. Il y a certes un différentiel d'imposition sur le revenu, mais le Gouvernement belge a récemment proposé des évolutions favorables.

M. Jean-Pierre Decool.  - Depuis 1964, les Français se sentent protégés. Les craintes des familles transfrontalières sont légitimes : prêtez-leur votre attention bienveillante.

Avenir du projet de Cité du théâtre à Paris

Mme Catherine Dumas .  - Lancé en octobre 2016, le projet de Cité du théâtre dans le 17e arrondissement de Paris, qui s'inscrit dans le cadre de la réhabilitation des ateliers Berthier, tarde à se mettre en place. Le Conservatoire national supérieur d'art dramatique (CNASD), le Théâtre national de l'Odéon et la Comédie française disposeront d'espaces de représentation, de stockage, de répétition et d'accueil du public, en cohérence avec leurs ambitions artistiques municipales, nationales et internationales.

En avril 2021, le conseil de Paris adoptait à l'unanimité une résolution visant à créer un groupement d'intérêt public (GIP) regroupant ces trois institutions. Ce projet va-t-il enfin se concrétiser ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture .  - Françoise Nyssen a confirmé le bien-fondé de ce projet en 2017. Un GIP rassemblant les trois institutions que vous avez citées a été créé et des études ont été menées. Toutefois, le coût total - hors foncier - est estimé à 141 millions d'euros dans l'avant-projet sommaire, contre 86 millions en 2016, soit un dépassement de 55 millions d'euros. Un expert indépendant, missionné en vue de revenir à l'épure initiale, a proposé quatre scénarios.

Le Gouvernement prendra prochainement des décisions tenant compte de l'avis des institutions concernées et des moyens financiers disponibles. Nous examinerons également la valeur foncière des ateliers Berthier, en lien avec les services de la Ville de Paris.

Je vous remercie pour votre mobilisation en faveur de ce projet emblématique.

Mme Catherine Dumas.  - Je salue la présence en tribune du maire du 17e arrondissement, Geoffroy Boulard. Je l'associe à mes remerciements. Je forme le voeu que ce projet culturel essentiel pour Paris voie le jour en 2023.

Autorisations d'urbanisme pour l'installation de panneaux photovoltaïques

Mme Chantal Deseyne .  - Certaines communes rencontrent des difficultés lors de l'examen des autorisations d'urbanisme pour l'installation de panneaux photovoltaïques dans les zones classées. La commune d'Aunay-sous-Auneau a adapté son plan local d'urbanisme afin de tenir compte des objectifs de développement durable. Or elle fait partie d'une zone classée au titre des monuments historiques : les autorisations d'urbanisme y sont soumises à l'avis de l'architecte des bâtiments de France (ABF). Or ce dernier refuse systématiquement tous les projets d'installation de panneaux photovoltaïques orientés sud, ce qui entrave le développement des énergies renouvelables.

Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour mieux encadrer l'avis des ABF ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture .  - Concilier protection de l'environnement et protection du patrimoine est au coeur de la mission des ABF. Il s'agit d'éviter une trop grande disparité dans l'installation de panneaux photovoltaïques.

La France compte 6 % de sites protégés et les refus des ABF sont très rares. En 2021, sur 12 800 demandes portant sur la création de ces équipements, seules 2 300 ont reçu un premier avis défavorable. Certaines ont pu aboutir en suivant les recommandations émises par l'ABF. Deux déclarations préalables ont été déposées en 2021 et 2022 sur le territoire d'Aunay-sous-Auneau : dans les deux cas, l'ABF a donné son accord en le soumettant à des prescriptions.

Le dialogue fait émerger des solutions équilibrées pour le développement des énergies renouvelables et la protection du patrimoine. En lien avec le ministère de la transition écologique, une instruction ministérielle sera prochainement publiée à ce sujet.

Mme Chantal Deseyne.  - Concilions intérêts patrimoniaux et écologiques et favorisons l'adoption de prescriptions visant à promouvoir les énergies renouvelables.

Budget alloué au réseau diplomatique et consulaire

Mme Hélène Conway-Mouret .  - Notre réseau consulaire a perdu plus de 30 % de son personnel en vingt ans. Le programme 151 a contribué pour plus d'un tiers à l'effort de maîtrise des effectifs assigné au ministère par le dispositif « Action Publique 2022 ». La création de cent ETP dans le PLF 2023 est une bonne nouvelle.

Partout à l'étranger, la charge de travail des agents consulaires s'accroît. Malgré leurs efforts, les délais d'attente s'élèvent à plusieurs mois. Des officines privées bloquent les créneaux de rendez-vous pour mieux les revendre ensuite. Parfois, nos compatriotes se retrouvent dans l'incapacité de joindre leur consulat, même en cas d'urgence. Or l'externalisation des appels en provenance de treize pays entraîne de nouvelles dépenses : les économies prévues sont-elles bien au rendez-vous ?

Nous avons la chance de disposer de l'un des plus grands réseaux consulaires au monde. Des états généraux de la diplomatie s'ouvriront prochainement. Les créations de postes prévues en 2023 sont-elles le signe d'un effort dans la durée et d'une transformation structurelle ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture .  - Les services consulaires font en effet face à une forte demande, liée à un effet de rattrapage depuis la crise sanitaire. Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères poursuit sa modernisation : envoi postal sécurisé des passeports à domicile, création d'une nouvelle plateforme de prise de rendez-vous et installation à Paris d'un nouveau centre de soutien spécialisé. Le ministère veille à ce que cette modernisation ne se fasse pas au détriment de l'accueil physique dans les consulats.

La dotation du programme 151 - hors titre 2 - s'établit à 141,1 millions d'euros en crédits de paiement. Hors l'organisation des élections, elle progresse de 12,6 millions d'euros par rapport à 2022.

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Je suis un peu déçue par cette réponse. Le Gouvernement devrait renforcer les moyens humains plutôt que de créer des task force. Les personnels sont en souffrance.

Accessibilité au patrimoine sportif français et mondial

Mme Sylvie Robert .  - En mai dernier, l'un des quarts de finale du tournoi de tennis de Roland-Garros était diffusé uniquement via une plateforme payante. Cette dernière a finalement accepté de libérer l'accès, moyennant la récupération des données des utilisateurs. Quelque 20 % des Français n'ayant pas accès à internet n'ont pas pu regarder cet événement, de même que nos concitoyens souffrant d'illectronisme. Nous assistons à la privatisation des événements sportifs de grande ampleur.

Or le patrimoine sportif ne peut devenir l'apanage des personnes ayant les moyens de souscrire des abonnements payants. Recherchons un meilleur équilibre entre la viabilité du modèle économique et l'accessibilité du plus grand nombre au sport.

Le Gouvernement est-il favorable à l'élargissement du décret du 22 décembre 2004 définissant une liste des événements sportifs d'importance majeure pouvant être regardés gratuitement ? L'accessibilité à de tels événements pourrait-elle constituer un motif de saisie en urgence de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture .  - Je vous remercie pour votre engagement en faveur des bibliothèques.

Le décret du 22 décembre 2004 recense vingt-et-un événements sportifs majeurs accessibles gratuitement à la télévision. Le Gouvernement est favorable à l'élargissement de cette liste, la plus longue de tous les pays de l'Union européenne, aux jeux Paralympiques et aux compétitions féminines. La liste actualisée sera prochainement adressée à la Commission européenne, qui la valide en dernier ressort.

Je rappelle que les droits audiovisuels représentent une part importante des ressources des acteurs du sport français, depuis la création de la taxe Buffet. Le Gouvernement veille au maintien d'un juste équilibre.

La situation ne s'est pas dégradée ces dernières années : dans son analyse du 25 juillet 2022, l'Arcom indique que le poids des contenus sportifs diffusés gratuitement est passé de 4,2 % à 5,4 % entre 2012 et 2019, soit une hausse de 1,2 %.

Prise en charge des nouveau-nés placés

Mme Florence Lassarade .  - La prise en charge des nouveau-nés placés se dégrade fortement. En raison d'un manque de personnel dans les pouponnières, ceux-ci sont confiés aux services de la protection de l'enfance. Ces nourrissons souffrent d'hospitalisme, une forme de dépression survenant en cas de manque d'affection et lors d'un long séjour à l'hôpital. Le psychanalyste René Spitz a identifié ce trouble dès 1946 : ces enfants dépérissent progressivement, avec des conséquences funestes pour leur développement et leur vie d'adulte.

Les professionnels de la petite enfance, qui font face à une crise de recrutement, à une augmentation du nombre de mesures de placement et à une diminution du nombre de familles d'accueil, tirent la sonnette d'alarme. Quels moyens humains et financiers le Gouvernement compte-t-il débloquer en urgence pour répondre à ces situations inhumaines ?

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance .  - La protection des enfants les plus fragiles est au coeur de ma mission. Entre 2015 et 2020, les services ont dû faire face à une augmentation de 35 000 enfants placés. Le département de la Gironde a connu une évolution similaire.

Difficile de répondre à cette question, faute de statistiques nationales sur le nombre d'enfants en pouponnière. Je travaille avec les acteurs de la protection de l'enfance au sein du groupement d'intérêt public (GIP) « Enfance protégée » en vue d'élaborer un référentiel commun et d'améliorer la prise en charge de ces enfants.

Je rappelle que la protection de l'enfance est une compétence décentralisée : la situation varie fortement d'un département à l'autre. Toutefois, l'État doit être présent aux côtés des collectivités territoriales, en matière de recrutement notamment.

Il ne s'agit pas uniquement d'une question de moyens : les revalorisations salariales du Ségur de la santé ont été étendues aux acteurs de la protection de l'enfance. Nous faisons face également à une crise de sens : l'État sera aux côtés des départements et des professionnels pour assurer la protection de nos enfants.

Mme Florence Lassarade.  - Il est primordial que ces enfants puissent mener une vie normale.

Site d'Oyonnax de l'INSA

M. Patrick Chaize .  - La Plastics Vallée autour d'Oyonnax est un territoire d'industries, avec plus de 600 entreprises et près de 10 000 emplois. Mais pour rester compétitif, former de nouvelles forces vives et préparer les chefs d'entreprise de demain, il faut de nouveaux talents. C'est pourquoi la formation d'ingénieurs est cruciale.

La présence d'un site de l'Institut national des sciences appliquées (Insa) de Lyon sur le territoire oyonnaxien est un atout. Or l'Insa souhaite faire évoluer le cycle d'ingénieur de la plasturgie, ce qui risque de faire diminuer le nombre d'étudiants de moitié.

Que comptez-vous faire pour que la formation « ingénierie durable des polymères et composites » soit rapidement proposée aux étudiants ?

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance .  - Le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche accompagne les opérateurs dans la définition d'une offre de formation adaptée aux besoins du territoire. Le projet de l'Insa a été élaboré en partant des besoins des entreprises, notamment avec Polyvia, le syndicat professionnel de la plasturgie.

Les étudiants d'Oyonnax attendent des formations plus diversifiées. En adaptant son offre de formation aux besoins des étudiants et des entreprises, l'Insa envoie un message fort. Le ministère l'accompagnera pour répondre toujours mieux aux besoins du territoire.

M. Patrick Chaize.  - Sur le terrain, les choses se passent autrement. On est passé de 80 à seulement 35 étudiants ! Que Mme Retailleau vienne le constater sur place. Nous avons tout pour développer une formation de qualité, adaptée aux besoins des entreprises.

Prise en compte des travaux d'utilité collective pour la retraite

Mme Monique Lubin .  - Entre 1985 et 1990, environ 350 000 personnes ont travaillé dans le cadre des contrats aidés « travaux d'utilité collective » (TUC). Mais alors qu'ils préparent leur retraite, il leur manque des trimestres de cotisation. On les renvoie au décret du 19 mars 2014 et à la loi du 21 août 2003, mais ces textes ne répondent pas à leur problème. Ils ont pourtant rempli des missions de service public. Pourquoi ne pas se mettre autour de la table pour discuter de la validation de ces périodes de travail ?

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance .  - Entre 1984 et 1990, ces personnes avaient le statut de stagiaires de la formation professionnelle. Leur couverture sociale était assurée par l'État, avec des cotisations calculées sur des assiettes et selon des taux forfaitaires. Cela explique que toutes les périodes travaillées n'aient pu être validées au titre de la retraite. Pour valider un trimestre, il fallait l'équivalent de 200 heures de travail au Smic, un seuil porté à 150 heures au 1er janvier 2014. Toutefois, la loi de 2003 a ouvert une faculté de rachat de trimestres. Mais pour aller plus loin, il faudrait une évolution législative. Olivier Dussopt abordera probablement cette question dans le cadre des travaux qu'il a engagés avec les partenaires sociaux autour de la réforme des retraites.

Manque de places en instituts médicaux éducatifs

Mme Vivette Lopez .  - Le manque criant de places en instituts médicaux éducatifs (IME) a des conséquences sur la vie des familles comme sur le personnel enseignant. Les dossiers administratifs sont très lourds et ne débouchent parfois sur rien, faute de place. Le Gard ne compte que 656 places ; or 250 enfants sont en attente et aucune ouverture d'établissement n'est annoncée. Ces enfants à besoins spécifiques sont alors scolarisés en milieu scolaire inclusif, voire en milieu ordinaire ou dans des dispositifs particuliers.

Le Gouvernement s'était pourtant engagé à créer des centres spécialisés pour ne laisser aucun enfant au bord du chemin. Que comptez-vous faire ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - Nous faisons évoluer notre organisation pédagogique pour mieux accueillir ces enfants en milieu ordinaire, comme le font déjà certains pays européens. Mais de nombreux enfants sont encore sans solution et je mesure la difficulté pour les familles.

Des structures spécifiques ont été développées pour les accueillir au sein de l'Éducation nationale - unités d'enseignement autisme, dispositifs d'autorégulation, Itep, Ulis, etc. Nous créons régulièrement de nouvelles places dans les établissements médico-sociaux -  300 places enfants en 2023 et plus de 1 000 places adultes qui libéreront ainsi des places pour les enfants.

Le sens de l'histoire, c'est l'inclusion. Nous devons rapprocher l'Éducation nationale et le médico-social. La prochaine conférence nationale du handicap tracera l'acte II de l'école et de l'université inclusive.

Mme Vivette Lopez.  - Agissez ! C'est urgent.

Assistantes maternelles impayées

M. Henri Cabanel .  - Alors même que le tribunal leur a donné raison, les assistantes maternelles qui cherchent à récupérer des salaires impayés auprès de leur employeur se trouvent démunies. En effet, la prestation d'accueil du jeune enfant (Paje) perçue par l'employeur est insaisissable en vertu du code de la sécurité sociale. Des centaines d'assistantes maternelles sont sans solution.

Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il pour garantir le salaire des assistantes maternelles et trouver une solution pour celles qui n'ont pas été payées ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - Cette question relève du droit du travail. Mais le ministère a été alerté plusieurs fois ces dernières semaines et a donc pris contact avec l'Ufnafaam pour établir un état des lieux. L'absence de versement effectif du salaire n'ouvre pas droit à la Paje : autrement, c'est une fraude qui donne lieu à récupération des sommes indûment versées.

Depuis mai 2019, le service optionnel et gratuit Pajemploi+ permet de verser la rémunération due directement sur le compte bancaire du salarié et de prélever dans le même temps la somme restant à charge de l'employeur sur le compte de ce dernier. Cela simplifie et sécurise les démarches. Pourtant, les représentants des assistantes maternelles ne réclament pas unanimement la systématisation de Pajemploi+. Ils nous ont également fait remonter des cas d'assistantes maternelles privées de revenus en raison d'une suspension d'agrément à titre conservatoire. C'est pourquoi le comité de filière petite enfance a prévu d'étudier la création d'un fonds de garantie des salaires.

M. Henri Cabanel.  - Si les employeurs ont fraudé, la CAF doit pouvoir récupérer ces sommes pour les verser aux assistantes maternelles. Elles ont besoin du soutien du Gouvernement.

Niveaux de dioxines autour de l'incinérateur d'Ivry-Paris XIII

Mme Catherine Procaccia .  - Une étude d'un collectif écologique a révélé des concentrations de dioxines anormalement élevées près de l'incinérateur d'Ivry-Paris XIII, le plus grand d'Europe, avec près de 730 000 tonnes d'ordures brulées par an.

En février, l'agence régionale de santé (ARS) a donc recommandé aux habitants des communes proches de ne pas consommer les oeufs de poules élevées en plein air. Elle a aussi commandé une expertise toxicologique. L'usine affirme pourtant respecter strictement les normes et subit des contrôles réguliers.

N'ayant pas reçu de réponse en début d'année, je vous pose à nouveau la question : dans quels délais les résultats de l'étude diligentée par l'ARS seront-ils connus ? Quelles mesures concrètes allez-vous prendre pour protéger les habitants de Paris et du Val-de-Marne ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - La surveillance des émissions des incinérateurs relève de la direction régionale et interdépartementale de l'environnement, de l'aménagement et des transports (Drieat) d'Île-de-France. Une étude de Toxiwatch portant sur les oeufs a mis en évidence un dépassement des seuils de toxines autorisés, d'où la recommandation prise par l'ARS à titre conservatoire et prudentiel. Mais aucun lien de causalité n'a été mis en évidence. En outre, l'étude de Toxiwatch souffre de défauts méthodologiques. Enfin, des études de l'Anses et de Santé Publique France montrent que résider à proximité d'un incinérateur ne modifie pas les niveaux d'imprégnation aux dioxines - sauf à consommer des animaux élevés dans une zone polluée.

Une étude supplémentaire a donc été commandée par l'ARS, avec des résultats attendus pour le premier semestre 2023.

Mme Catherine Procaccia.  - La recommandation sur les oeufs est donc maintenue. Or vous avez eu connaissance de premiers résultats dès juillet, qui n'ont fait l'objet d'aucune communication. La population est inquiète. Vous auriez pu annoncer plus tôt que la méthodologie de la première étude était sujette à caution.

Extension du Nutri-score aux fruits et légumes frais

Mme Françoise Férat .  - Le Nutri-score a été créé par Santé publique France afin d'orienter les choix des consommateurs vers des aliments de meilleure qualité nutritionnelle. Les bénéfices pour la santé de la consommation régulière de fruits et légumes sont largement démontrés : elle joue un rôle positif dans la prévention des infarctus, de l'hypertension artérielle et de nombreux cancers.

Or nous sommes loin d'atteindre l'objectif de cinq fruits et légumes par jour. Le Nutri-score étant un étiquetage reconnu et apprécié des Français, peut-on l'étendre aux fruits et légumes frais, classés très majoritairement en A ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - Le Nutri-score bénéficie d'un fort soutien des consommateurs -  94 % d'entre eux y sont favorables. Début 2022, 875 industriels s'étaient déjà engagés dans cette démarche.

Le quatrième Programme national nutrition santé (PNNS) prévoit d'étendre, sur la base du volontariat, le Nutri-score à la restauration hors foyer et aux denrées non pré-emballées, dont les fruits et légumes frais. Le consommateur doit disposer d'une information simple, claire et transparente dans les rayons de produits bruts. L'affichage du Nutri-score encouragera la consommation des fruits et légumes frais, bénéfiques pour la santé. Par ailleurs, nous renouvelons les recommandations générales nutritionnelles visant à encourager la consommation d'au moins cinq fruits et légumes par jour.

Mme Françoise Férat.  - Merci pour cette réponse rassurante. Ce projet ne coûtera rien aux finances publiques ni aux entreprises. Le logo Nutri-score est incitatif et de nature à favoriser la filière des fruits et légumes.

Dépistage du diabète

Mme Anne Ventalon .  - En France, le diabète provoque 30 000 décès chaque année et l'épidémie s'accélère : 3,5 millions de Français, soit 5,3 % de la population, sont traités ; 400 nouveaux cas sont déclarés chaque jour et entre 500 000 et 800 000 personnes seraient porteuses sans le savoir.

Les campagnes de prévention et de dépistage menées par les associations, notamment en direction des jeunes, sont indispensables. Or le manque d'infirmiers bénévoles autorisés à réaliser des dextros, c'est-à-dire des prélèvements capillaires, les conduit à restreindre leurs actions, ce qui retarde le dépistage. Si les agences régionales de santé (ARS) pouvaient accorder des dérogations, les bénévoles pourraient dépister massivement, de manière autonome. Envisagez-vous d'aménager le droit en vigueur ou d'autoriser les ARS à y déroger ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - En France, la prévalence du diabète est estimée à plus de 5,3 % de la population. C'est un enjeu majeur de santé publique. Le diabète de type 2 évolue souvent en silence, car la glycémie augmente très progressivement. Aussi, un dépistage ciblé est recommandé tous les trois ans chez les personnes de plus de 45 ans considérées comme à risque.

La mesure de la glycémie peut s'effectuer à domicile, avec des appareils de diagnostic rapide, ou dans un laboratoire, où la mesure et plus fiable. Le maillage territorial des laboratoires permet un accès simple au dépistage tandis que les pharmaciens d'officine sont autorisés depuis 2016 à réaliser des tests capillaires.

Si le Gouvernement n'entend pas mobiliser de nouveaux acteurs, il renforce sa stratégie de prévention du diabète, notamment au travers des rendez-vous prévention aux âges clés de la vie, qui seront pris en charge à 100 % dès 2022-2023.

Dépistage du saturnisme - Metaleurop Nord

Mme Sabine Van Heghe .  - Le scandale de la gestion par l'État des terres polluées par Metaleurop débouche sur une crise sanitaire. Depuis la fermeture de l'usine en 2003, aucune campagne systématique de dépistage du saturnisme infantile n'y a été menée.

En juin 2022, l'État a enfin engagé une campagne sur le périmètre du programme d'intérêt général (PIG) à Courcelles-lès-Lens, Évin-Malmaison, Dourges et Leforest. Or à ce jour, seuls 1 200 enfants, soit 12 % de la population cible, ont été testés. Huit sont atteints de saturnisme et 68 doivent être surveillés. Les enfants sont contaminés depuis les jardins et pelouses des maisons particulières dans les zones 1 et 2 du PIG, mais la pollution semble aussi atteindre une troisième zone de 400 hectares autour de l'ancienne usine. Cette zone, pourtant identifiée comme polluée par l'Ademe, n'est soumise à aucune information particulière. Les constructions y sont libres et la santé des enfants exposée.

Quand l'État prendra-t-il la mesure de préjudice écologique, en prenant enfin en charge le décaissement et le remplacement des sols pollués ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - Dès la fin des années 1990, de nombreuses actions ont été menées sur ce territoire, où le dépistage est en permanence accessible. La nouvelle campagne, engagée le 15 juin dernier, a fait l'objet d'une large information et se poursuivra jusqu'au 7 novembre, avec une prise en charge à 100 % pour les moins de 18 ans et les femmes enceintes. Au 10 octobre, le taux de participation, trop faible, était de 15 %. Chaque dépistage positif fait l'objet d'une déclaration obligatoire, qui déclenche une investigation environnementale pour traiter les sources et limiter l'exposition des familles. Le Gouvernement incite la population au dépistage.

Mme Sabine Van Heghe.  - Vous n'avez pas vraiment répondu à la question. La situation n'a que trop duré. C'est à l'État, qui a laissé cette usine polluer, de réparer le préjudice !

Évolution du zonage des chirurgiens-dentistes

M. Olivier Rietmann .  - La répartition des chirurgiens-dentistes sur l'ensemble du territoire est inégale. Comme l'a souligné l'observatoire national de la démographie des professions de santé (ONDPS), la Haute-Saône est pénalisée.

Alors que la densité moyenne en Europe est de 74 chirurgiens-dentistes pour 100 000 habitants, elle n'est que de 63 en France. Douze départements français, dont la Haute-Saône, présentent une densité inférieure à quarante. Dans les bassins luxovien, luron et jusséen, elle n'atteint pas la moitié de la densité nationale. Pour paraphraser le Président de la République, cette situation n'est pas acceptable. Elle le sera d'autant moins que la demande de soins augmente, en particulier avec l'essor de la prévention de la santé bucco-dentaire.

Quand l'actualisation du zonage des chirurgiens-dentistes, retardée à plusieurs reprises, aura-t-elle lieu ? Dans l'attente, autorisez-vous l'ARS Bourgogne-Franche-Comté à actualiser la carte des zones d'accompagnement régional, comme l'a fait l'ARS Bretagne ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - En attendant les prochaines négociations conventionnelles et afin de favoriser l'installation des chirurgiens-dentistes là où les besoins sont les plus importants, l'ARS Bretagne a choisi de compléter la cartographie actuellement opposable par un ciblage de nouveaux territoires.

En Bourgogne-Franche-Comté, ce choix n'a pas été fait afin de ne pas brouiller les informations données aux professionnels, dans l'hypothèse où les zones identifiées par l'ARS seraient différentes de celles qui sont identifiées dans le cadre de la révision nationale. Dans l'attente de cette révision, l'ARS Bourgogne-Franche-Comté accepte néanmoins d'accompagner les nouvelles installations et de prendre en charge les demandes d'aide exceptionnelles, dès lors qu'un besoin se révèle justifié.

Stages obligatoires en milieu rural pour les étudiants en médecine

M. Bruno Belin .  - Le problème des déserts médicaux interroge tous les élus. Si le Sénat a adopté la semaine dernière une proposition de loi en la matière sur l'initiative du président Retailleau, ses effets ne se produiront que dans quelques années.

Pourtant, il existe des outils législatifs. Je pense à la loi du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé, dont on attend toujours le décret d'application promis par le Gouvernement pour le mois d'avril.

Ma question est simple : quand le décret d'application permettant les stages d'internes en milieu rural sera-t-il signé, conformément à la loi du 24 juillet 2019 ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - Cette mesure est d'application immédiate. La maquette de formation du diplôme d'études spécialisées de médecine générale a été adaptée et les étudiants en phase d'approfondissement peuvent dès à présent accomplir ces stages en soins primaires en autonomie supervisée.

La loi du 24 juillet 2019 prévoit que priorité soit donnée aux zones sous-denses, en fonction de l'offre de stages dans chaque région. Par une instruction ministérielle du 24 février 2022, le Gouvernement a initié une politique incitative de recrutement de maîtres de stages en zones sous-dense, en rappelant notamment que ces stages doivent être une opportunité pour les étudiants de découvrir l'exercice ambulatoire.

Nous souhaitons accroître de 7,7 % le nombre de maîtres de stage universitaires formés d'ici à 2024. Ces dispositions sont intégrées au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, au travers de l'incitation à effectuer, en priorité dans les territoires sous-denses, une nouvelle quatrième année de consolidation en fin d'internat de médecine générale.

M. Bruno Belin.  - Je ne doute pas de votre bonne volonté, mais les choses ne vont pas assez vite. J'en profite pour vous lancer un SOS, car il y a une autre urgence : partout nous manquons de places pour accueillir les personnes en situation de handicap ou de dépendance.

Réseaux de soins fermés

M. Jean-Michel Arnaud .  - Les réseaux de soins, qui mettent en relation les assurés avec les professionnels de santé, se sont développés dans les années 2000 avec le lancement de plateformes de gestion pour le compte d'organismes complémentaires d'assurance santé.

La loi du 27 janvier 2014 les autorise à pratiquer des remboursements différenciés en fonction des praticiens consultés, notamment en optique et en odontologie. Un rapport de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) de 2017 estime que cette législation, trop générale, a favorisé la concurrence et déséquilibré la relation entre les plateformes et les professionnels de santé. C'est un facteur d'iniquité pour les contribuables et d'injustice pour les professionnels.

Le 100 % Santé a fortement réduit l'utilité des réseaux de soins, qui participent à une forme d'américanisation de notre système de sécurité sociale. Le Gouvernement a-t-il l'intention de mieux encadrer leur pratique, voire de les supprimer ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - Les réseaux de santé permettent de modérer les tarifs de soins. Le rapport de l'Igas de juin 2017 a observé des écarts de prix notables entre les soins en réseau et hors réseaux, notamment dans l'optique. Ils modèrent également la progression des primes d'assurance complémentaire. Depuis le 100 % Santé, il ne peut plus y avoir de remboursement différencié.

Le Conseil constitutionnel a estimé que les conditions d'adhésion par les professionnels aux réseaux de santé ne portaient pas atteinte à la liberté d'entreprendre : ils sont libres d'y adhérer et de s'en retirer à tout moment. De plus, selon l'Igas, les réseaux accroissent la lisibilité pour l'assuré dans des secteurs comme l'optique où l'offre est très abondante.

Dans ces conditions, le fonctionnement actuel des réseaux ne semble donc pas devoir être réformé, mais le Gouvernement demeurera vigilant et prendra des mesures si cela s'avère nécessaire.

M. Jean-Michel Arnaud.  - Souvent, la préparation à l'accompagnement de l'usager se fait chez l'opticien, qui voit ensuite le client lui échapper à cause des différences tarifaires avec les réseaux. Ce n'est pas normal.

Création d'un CHU en Moselle

Mme Christine Herzog .  - La Moselle est en voie de désertification médicale : aucun centre hospitalier universitaire (CHU), malgré son million d'habitants. La Meurthe-et-Moselle, avec ses 731 000 habitants, en a un, à Nancy. Il y a 126 médecins pour 100 000 habitants en Moselle, contre 164 en Meurthe-et-Moselle.

Qui plus est, l'ARS Grand-Est, basée à Nancy, a fermé 174 lits en 2020, en pleine crise covid, et l'Allemagne n'a pas manqué de nous en faire le reproche. Le Président de la République, sur mon initiative, a dû intervenir pour que Berlin assouplisse, à la mi-mai 2021, les contraintes inhumaines imposées à nos travailleurs frontaliers, comme la réalisation d'un test toutes les 48 heures.

Madame la ministre, il est urgent de créer un CHU - sans quoi la quatrième année d'internat en pratique ambulatoire restera lettre morte dans le département. Sa création à Metz-Thionville est demandée par les soignants, les élus et les patients.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - Le CHR Metz-Thionville et le CHRU de Nancy ont entamé depuis plusieurs années un rapprochement pour permettre l'universitarisation du premier. Dès 2009, une communauté hospitalière de territoire (CHT) était créée. Deux conventions d'association ont été signées en 2011 et 2014, puis une troisième en 2019, à laquelle l'ARS Grand-Est était associée.

L'objectif est de dessiner les contours d'un grand ensemble hospitalo-universitaire, avec cinq services retenus pour élaborer un projet médico-universitaire. L'hématologie, l'odontologie, la pharmacologie et les urgences ont d'ores et déjà été sélectionnées. En revanche, il n'y a pas encore d'accord sur les orientations et objectifs. Une mission conjointe de l'Igas et de l'inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche sera lancée en novembre ; elle proposera des orientations sur l'universitarisation.

Désertification médicale

M. Hervé Maurey .  - Depuis quinze ans, je plaide pour une véritable régulation de l'installation des médecins, comme cela se fait dans d'autres pays et en France pour les professionnels de santé. Les mesures incitatives prises depuis deux décennies ne suffisent plus.

Après un quinquennat de déni, le candidat Emmanuel Macron s'est finalement prononcé, le 17 mars dernier, pour le conventionnement sélectif. L'engagement figure à la page 9 de son programme. Or depuis l'élection, il n'en est plus question.

Le Président de la République a-t-il renoncé à mettre en oeuvre son engagement ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - L'accès aux soins est une priorité forte de ce gouvernement. Dès 2017, le plan d'accès aux soins a mis en place des mesures comme le soutien aux stages ambulatoires, le développement des maisons de santé pluridisciplinaires ou la création des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS).

En attendant que les effets de la suppression du numerus clausus se fassent sentir, il convient de libérer du temps médical et d'augmenter l'attractivité des territoires, avec la facilitation des consultations avancées ou la télémédecine. Le plan Ma Santé 2022 a permis la création de quatre mille postes d'assistants médicaux, et le Ségur a renforcé l'exercice coordonné et la télé-santé. Le volet santé du Conseil national de la refondation (CNR) réunira autour d'une même table professionnels, patients et élus de chaque bassin de santé.

En parallèle, la cible du nombre d'assistants médicaux a été portée à dix mille à l'horizon 2025 ; les CPTS devront couvrir tout le territoire d'ici à 2023 et se mobiliser prioritairement sur l'accès au médecin traitant. Le PLFSS pour 2023 prévoit enfin des mesures ambitieuses comme l'incitation à effectuer l'année de consolidation en médecine générale en priorité dans les territoires sous-denses.

M. Hervé Maurey.  - La question était simple : le Gouvernement mettra-t-il en place l'engagement du conventionnement sélectif ? Vous n'avez pas répondu, ce qui vaut renoncement...

Production électrique en Guyane

M. Georges Patient .  - Le taux de disponibilité électrique est catastrophique en Guyane. En cause, la vétusté, le sous-dimensionnement du réseau, mais surtout des langueurs administratives qui freinent le remplacement des unités de production.

Début octobre, la commune de Maripasoula a subi plusieurs jours de blackout total lors de la panne simultanée de ses quatre générateurs. Pourtant, deux nouvelles unités de production électrique étaient inscrites dans la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) de 2017. La centrale photovoltaïque était attendue pour 2021. Sera-t-elle prête en 2023 ?

La centrale thermique de Dégrad des Cannes, qui fournit 40 % de la production électrique du territoire et continue de fonctionner grâce à une dérogation qui prend fin en 2023, doit être remplacée par la centrale du Larivot, dont le chantier est à l'arrêt. Que va-t-il se passer en 2024 ? Il faudra aller très vite dans le développement des énergies renouvelables en Guyane pour sortir de l'insécurité énergétique...

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie .  - La centrale de Dégrad des Cannes sera remplacée par une centrale au bioliquide. Le 11 octobre dernier, la cour administrative d'appel de Bordeaux a ouvert la voie à une reprise des travaux pour une mise en service fin 2026. La centrale de Dégrad des Cannes sera prolongér jusqu'à cette date. Aujourd'hui, l'essentiel de la production est assuré par le barrage de Petit-Saut ; priorité est donnée à des unités de production utilisant le photovoltaïque et la biomasse.

Malheureusement, le projet de centre électrique de l'Ouest guyanais (CEOG) a pris du retard. Dans les communes de l'intérieur, la production est assurée par les centrales vieillissantes, même si un projet a été lancé à Saint-Georges. À Maripasoula, les avaries de plusieurs moteurs ont perturbé la production. Une centrale photovoltaïque devrait entrer en service en 2024.

La PPE est en cours de révision : des groupes de travail se sont réunis en mai pour fixer les orientations sur l'autonomie énergétique. La production sera entièrement renouvelable en 2030.

Mme la présidente.  - Je salue le conseil municipal des enfants de Lesneven, dans le Finistère, présent en tribune.

Zéro artificialisation nette

M. Jean-Pierre Corbisez .  - Le dispositif « Zéro artificialisation nette » (ZAN) inquiète les élus locaux. Ils soulignent l'articulation complexe entre cet impératif et les engagements d'une commune dotée d'un programme Anru, les difficultés des communes rurales à obtenir des friches à reconquérir, et, pour les communes littorales, la nécessité de prendre en compte le phénomène du recul du trait de côte dans le calcul.

Il convient que l'application de l'obligation tienne compte des efforts déjà consentis, exclue du périmètre du ZAN les projets d'intérêts national comme le canal Seine-Nord et s'accompagne de mécanismes de solidarité à l'échelle nationale ou régionale.

Quelles mesures le Gouvernement met-il en oeuvre pour corriger les impacts du ZAN ?

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie .  - La Première ministre a confirmé, dans son discours de Vichy, l'objectif du ZAN en 2050 et, à l'horizon 2031, de la réduction de moitié de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers.

Les échéances de la loi Climat et résilience ont déjà été reportées de six mois : les schémas de cohérence territoriale (Scot) ont jusqu'au 22 octobre pour faire des propositions aux régions ; celles-ci ont jusqu'au 22 février 2024 pour élaborer leurs schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet).

Le Gouvernement est à l'écoute des élus et du Parlement : des concertations sont en cours pour anticiper la transformation. La trajectoire de réduction prendra en compte de nouveaux critères pour s'adapter aux singularités des territoires, et les élus seront accompagnés dans leurs efforts de renaturation. Le Fonds Friches, doté de 750 millions d'euros, et le Fonds d'accélération de la transition écologique, avec plus de 2 milliards d'euros, financeront l'adaptation des territoires au changement climatique en soutenant les projets de renaturation.

M. Jean-Pierre Corbisez.  - La proposition de loi de Jacques Mézard, intégrée à la loi 3DS, prévoyait, pour les communes rurales, une simplification de la procédure d'expropriation des biens en état d'abandon, qui permettait de réduire de vingt à dix ans les délais de récupération. Malheureusement, il n'y a pas de ligne budgétaire spécifique...

Indemnisation des élus pour leurs déplacements

M. Frédéric Marchand .  - Je relaie l'interpellation de Luc Waymel, ancien président de l'association des maires ruraux du Nord, sur les déplacements des élus représentant leurs pairs au sein des commissions départementales convoquées par le préfet.

De la commission chargée de la coopération intercommunale à celle compétente en matière d'aménagement commercial, ces structures sont nécessaires à nos territoires et à notre démocratie. Or les maires des communes modestes ou éloignées du chef-lieu hésitent à s'y impliquer en raison du temps nécessaire et du coût des trajets. Résultat : supposées représenter l'ensemble du département, ces commissions réunissent surtout des élus géographiquement proches du chef-lieu - c'est le cas dans le Nord comme ailleurs.

Il serait utile que l'État rembourse les frais de déplacement des élus qui, dans le cadre de ces commissions, n'agissent pas pour le compte de leur commune, mais de leurs pairs. Les commissions assureraient ainsi une représentation équitable du territoire départemental. S'il était imputé sur la dotation globale de fonctionnement, ce défraiement serait neutre pour l'État.

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie .  - Le Gouvernement n'ignore pas les difficultés des élus locaux, qui consacrent leur temps et leurs compétences au service de leur territoire.

Leur rôle au sein des commissions départementales convoquées par le préfet est central : ils y assurent la représentation des collectivités du département dans différents champs des politiques publiques.

Le décret du 3 juillet 2006 prévoit la prise en charge de ces frais en cas de participation à un organisme consultatif. L'article 2 vise les organismes dont les frais de fonctionnement sont payés sur fonds publics, ce qui inclut les commissions départementales. Les élus qui y participent sont donc éligibles au remboursement de leurs frais de transport, sur la même base forfaitaire que celle applicable aux fonctionnaires civils de l'État.

Le Gouvernement attache une importance particulière au bon fonctionnement de ces instances, qui concourent au travail commun entre l'État et les territoires.

Plan Avenir montagnes

Mme Viviane Artigalas .  - Le plan Avenir montagnes (PAM) est le premier plan majeur pour les territoires de montagne depuis quarante ans. Son volet investissement alloue 331 millions d'euros aux massifs français pour soutenir l'adaptation de leur économie aux mutations du tourisme et leur transition écologique. Pour les seules Pyrénées, 54 millions d'euros sont mobilisés.

Toutefois, les élus s'inquiètent de la bonne adéquation des investissements aux besoins.

Par ailleurs, les crédits du plan ne courent que jusqu'à la fin de l'année. Il faudrait, à tout le moins, étendre les capacités de programmation à 2023, afin d'accompagner de nouveaux projets de transition touristique. Il conviendrait en outre de prolonger de deux ans la période d'appui du volet ingénierie du PAM.

Pouvez-vous confirmer le maintien de ce dispositif ?

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie .  - Le PAM, lancé par le Premier ministre le 27 mai 2021, est bien avancé : les 150 millions d'euros d'investissements financés par l'État seront engagés en totalité d'ici à la fin de l'année ; en deux ans, près de 440 projets portés par les territoires auront été accompagnés.

Dans le cadre du volet ingénierie, trois enveloppes sont prévues. La première mobilise 10 millions d'euros de l'État et 6 millions d'euros de la Banque des territoires pour accompagner 62 territoires vers un modèle touristique durable et résilient. La deuxième affecte 10 millions d'euros à la mobilité du premier et du dernier kilomètre dans les territoires de montagne : une seconde vague de lauréats sera prochainement désignée. Dans le cadre de la troisième, 5 millions d'euros sont mobilisés par la Banque des territoires et Atout France pour la rénovation de l'immobilier de loisir dans 25 stations lauréates.

Dominique Faure, secrétaire d'État chargée de la ruralité, entamera prochainement une tournée des massifs pour déterminer avec les acteurs les besoins en matière d'ingénierie et d'investissements pour les deux années à venir. En outre, une concertation nationale sera lancée sur d'autres thématiques.

Mme Viviane Artigalas.  - Le PAM a été salué par tous les élus de la montagne. Il est important de poursuivre le travail engagé au-delà des échéances initialement annoncées. Les territoires de montagne en ont besoin.

Défense des terres agricoles de Gonesse et Saclay

M. Jacques Fernique .  - La réalisation des derniers tronçons des lignes 17 Nord et 18 Ouest du Grand Paris Express (GPE) et de la gare Triangle de Gonesse paraît, à première vue, vertueuse. Toutefois, ces projets ne répondent pas aux besoins des habitants actuels : ils ne trouveraient leur justification que dans le cas d'une urbanisation massive de terres agricoles.

Présentée comme un nouvel axe majeur pour le nord de Paris, la ligne 17 a été initialement lancée dans le cadre du pharaonique projet EuropaCity. L'abandon de celui-ci, bienvenu, aurait dû entraîner l'arrêt des travaux au-delà de la gare du Bourget-Aéroport. Ce projet ne bénéficiera en rien aux habitants des communes alentour, trop éloignées ; sa rentabilité est sujette à caution.

L'aéroport Roissy-Charles de Gaulle constitue une barrière à l'urbanisation : son franchissement au nord mettrait en péril les terres agricoles seine-et-marnaises et picardes, parmi les plus riches d'Europe.

Où est la volonté de freiner l'étalement urbain ? En 2018, la Cour des comptes a demandé une modification du périmètre et du calendrier du projet, mais la Société du Grand Paris, à la fois juge et partie, n'a jamais revu sa copie...

Le Gouvernement est-il prêt à envisager un moratoire et le lancement d'une étude d'impact indépendante ?

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie .  - La ligne 17 Nord du Grand Paris Express est destinée à favoriser le développement des territoires entre Paris et Roissy.

L'abandon du projet d'EuropaCity ne remet pas en cause la création de la gare Triangle de Gonesse, à proximité de la zone d'activités de Paris Nord ; seule gare du GPE dans le Val-d'Oise, elle facilitera l'accès des habitants du département aux bassins d'emplois. Les projets autour de cette gare ont évolué pour réduire les emprises : ils servent un développement économique centré sur la transition agroécologique et l'agriculture urbaine - je pense à Agoralim, que vous soutenez.

Le Conseil d'État vient de confirmer l'autorisation de création et d'exploitation de la ligne 17, dont les travaux sont déjà bien avancés.

Quant à la ligne 18 Ouest, elle constitue la colonne vertébrale en matière de transports du projet scientifique, technologique et urbain porté par l'établissement public d'aménagement Paris-Saclay. Sa remise en cause porterait atteinte aux synergies engagées autour de cette opération d'intérêt national.

Le GPE contribuera à désenclaver des territoires peu ou mal desservis, au bénéfice des Franciliens et du développement régional.

Bornes de recharge électrique

M. Jean-Claude Tissot .  - La décarbonation de nos modes de déplacement implique de nombreuses évolutions. En particulier, l'aménagement de nos territoires doit prendre en compte l'électrification des véhicules.

L'article 118 de la loi Climat et résilience prévoit que les parcs de stationnement de plus de vingt places doivent être équipés d'au moins un point de recharge électrique. Mais cette disposition, qui en complète d'autres issues de la loi d'orientation des mobilités (LOM), laisse place à différentes interprétations. Plusieurs collectivités de mon département, inquiètes, m'ont interpellé, dont la communauté de communes de Charlieu-Belmont.

Pouvez-vous préciser les obligations incombant aux collectivités territoriales, ainsi que le calendrier de leur entrée en vigueur ? Tous les parkings publics de plus de vingt places, jouxtant ou non un bâtiment public, sont-ils concernés ? Ce dispositif ne s'applique-t-il qu'aux projets à venir ? Les parkings libres sont-ils soumis aux mêmes obligations que les parkings payants ? La répartition des bornes sur différents parkings peut-elle être menée à l'échelle intercommunale ?

Comme souvent, l'État fait supporter le poids de ses annonces par les budgets locaux, déjà fort contraints. Le Gouvernement s'engage-t-il à accompagner les collectivités, par exemple à travers le fonds vert ?

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie .  - Pour atteindre la neutralité carbone en 2050, l'État engage résolument la transition vers les véhicules électriques.

La LOM donne la possibilité aux EPCI, autorités organisatrices de la mobilité et de la distribution d'électricité, de réaliser des schémas directeurs des infrastructures de recharge, afin d'assurer la coordination de l'offre entre maîtres d'ouvrage publics et privés et son adaptation aux besoins. La loi Climat et résilience a rendu ce schéma obligatoire dans les zones à faibles émissions mobilité.

Pour accompagner les collectivités, l'État a publié un guide méthodologique et met à leur disposition de nombreuses informations en open data. La Banque des territoires pourra être sollicitée lorsque l'élaboration d'un schéma directeur s'appuiera sur un prestataire externe.

En outre, la LOM prévoit que, jusqu'à la fin 2025, le raccordement au réseau public des infrastructures de recharge inscrites dans un schéma directeur peut être pris en charge jusqu'à 75 %. Un arrêté ministériel précisera prochainement les modalités d'application.

Enfin, la LOM instaure l'obligation d'équiper d'un point de recharge par tranche de vingt places, dès 2025, les parkings de tous les bâtiments non résidentiels, privés ou publics. La loi Climat et résilience soumet les collectivités territoriales à une obligation similaire pour les parcs de stationnement en délégation de service public, en régie ou gérés par un marché public.

En soutien au déploiement de ces infrastructures, le programme Advenir a été abondé de 200 millions d'euros et prolongé jusqu'en 2025. En outre, dans le cadre de France 2030, le Gouvernement a annoncé 300 millions d'euros pour des appels à projets de stations de recharge à haute puissance.

Ligne ferroviaire Le Havre-Marseille

Mme Céline Brulin .  - Alors que la nouvelle ligne Paris-Normandie se fait attendre, le seul TGV normand est menacé. En effet, la SNCF entend inverser les horaires de la ligne qui relie Le Havre, Rouen, Lyon et Marseille : le TGV partirait du Havre en milieu d'après-midi, et non plus le matin.

Cette décision est un non-sens. Elle aurait des conséquences pour les correspondances, notamment celles de Caen, Dieppe et Cherbourg. Elle fait l'unanimité contre elle, ainsi qu'en témoigne l'adresse commune de tous les parlementaires de Seine-Maritime au directeur général de la SNCF.

La SNCF ne cherche-t-elle pas à rendre cette desserte moins attractive pour mieux justifier sa suppression  dans quelque temps ?

L'État, dont la compétence est circonscrite aux trains d'équilibre du territoire, ne saurait se désintéresser des dessertes TGV - surtout dans une région qui a déjà perdu la ligne Le Havre-Strasbourg. Comment le Gouvernement compte-t-il agir au côté des élus pour contraindre la SNCF à garantir des horaires adaptés sur la ligne Le Havre-Marseille ?

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie .  - Le Gouvernement veille à ce que l'offre de transport ferroviaire réponde aux besoins de mobilité dans les territoires.

La loi de 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire prévoit l'information obligatoire de l'État et des collectivités territoriales par les entreprises opérant des services librement organisés en cas de modification de ceux-ci.

Dans ce cadre, la SNCF a annoncé un repositionnement horaire de la liaison TGV entre Marseille et Le Havre à partir de décembre prochain. L'objectif est double : optimiser la production, en particulier la gestion de la maintenance, et améliorer le remplissage des trains, afin de redonner une dynamique à cette ligne qui peine encore à trouver son public.

J'entends les interrogations des élus et des usagers. Le Gouvernement invite la SNCF à faire preuve de plus de pédagogie pour dissiper, je l'espère, les inquiétudes. En tout état de cause, il sera utile que la SNCF dresse un bilan et en partage les résultats avec les élus.

Plus largement, le développement de nouvelles lignes transversales relève avant tout de choix stratégiques de la SNCF et des entreprises ferroviaires. En ce qui concerne les lignes susceptibles d'être conventionnées par l'État, l'étude de 2021 sur les perspectives en matière de trains d'équilibre du territoire n'a pas identifié de potentiel suffisant au départ de la Normandie.

Mme Céline Brulin.  - Choisir des horaires que les usagers rejettent, ce n'est pas la meilleure façon de redynamiser la ligne ! La pédagogie ne suffira pas. Cette ligne est utile pour relier deux grands ports, il faut travailler à la rendre attractive et, d'abord, exiger que les horaires demeurent en l'état.

Rétablissement de la « Palombe bleue »

M. Max Brisson .  - Les trains de nuit sont plus écologiques et moins coûteux que l'avion ou le TGV. Le Gouvernement les a rétablis sur les lignes Paris-Nice et Paris-Tarbes via Limoges et Toulouse. C'est là que le bât blesse : la SNCF a abandonné le tracé initial qui, à partir de Dax, reliait en deux rames Bayonne, Hendaye, Irun d'une part et Pau, Lourdes, Tarbes d'autre part. Pau, Bayonne et Hendaye ne sont desservies que l'été. Cette augmentation du temps de transport avait provoqué en 2011 une baisse de la fréquentation et la suppression de la ligne. Le sud des Landes et les Pyrénées-Atlantiques ne sont pas que des territoires touristiques, ce sont aussi des pôles économiques dynamiques. Quelles sont les raisons de ce choix ? Comptez-vous rétablir une liaison régulière suivant l'axe historique ?

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie .  - Les trains de nuit, écologiques et sociaux, ont un avenir, comme en témoigne l'étude transmise au Parlement en mai 2021. Paris-Nice et Paris-Tarbes ont été ouvertes en 2021 et Aurillac devrait être desservie en décembre 2023 ; 130 millions d'euros sont investis dans la rénovation du matériel et des installations de service, dont 100 millions d'euros de France Relance.

Des décisions doivent être prochainement prises, dans la perspective de l'ouverture à la concurrence d'ici quelques années. Actuellement, la nécessaire régénération de l'infrastructure ne permet pas des horaires optimaux et limite la desserte à Tarbes et Lourdes en dehors de l'été, mais à partir de 2024, le train de nuit desservira quotidiennement Dax, Bayonne, Orthez et Pau, en plus de Lourdes et de Tarbes.

M. Max Brisson.  - Si j'ai bien compris, en 2024, vous respecterez la promesse du président Macron, qui avait déclaré avoir souvent pris la Palombe bleue.

Augmentation des prix de l'énergie

M. Stéphane Demilly .  - L'augmentation des prix de l'énergie est la première source d'inquiétude de nos concitoyens.

Ceux qui ont installé des poêles et chaudières à bois, encouragés par des primes environnementales, ne pourront peut-être pas acheter de granulés cet hiver, soit à cause de l'inflation exponentielle du prix, soit parce qu'ils n'en trouveront tout simplement pas. Qu'envisagez-vous pour ces 850 000 foyers ?

Autre alerte, concernant les endiviers, confrontés à des hausses des coûts de l'énergie jusqu'à 800 % ! Ils sont clairement en péril, mais le dispositif d'aide ne permet pas de répondre aux spécificités de chaque filière. Qu'envisagez-vous pour ce secteur économique très important pour les Hauts-de-France ?

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie .  - La constitution de stocks prudentiels de granulés a pu conduire à des ruptures de stocks temporaires, mais producteurs et distributeurs travaillent à assurer l'approvisionnement cet hiver. Le ministère de la transition énergétique a aussi mis en place des mesures telles que l'appel à projets BCIAT (bois chaleur industrie agriculture et tertiaire), par lequel l'Ademe a contribué au financement de quatorze chaufferies, pour une production annuelle de granulés de 850 000 tonnes.

Après un chèque énergie exceptionnel de 100 euros pour 5,8 millions de ménages en décembre 2021, un nouveau chèque, de 100 ou 200 euros selon les ressources, sera attribué à 12 millions de ménages en fin d'année.

Le Gouvernement ne laisse pas tomber des entreprises : il déposera un amendement au projet de loi de finances prévoyant un mécanisme de garantie dont les modalités vont être précisées.

Codes postaux et communes nouvelles

M. Daniel Gueret .  - La Poste refuse d'attribuer un code postal unique aux communes nouvelles, malgré les demandes des élus locaux. Outre les erreurs d'adressage, cela empêche les communes de répondre aux demandes de certification d'adresses, les sites internet de l'État et de La Poste étant en contradiction.

La Poste ne pourrait-elle pas fixer un code postal unique, la mention de la commune déléguée pouvant apparaître comme lieu-dit afin d'éviter la problématique des homonymies de voies ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales .  - C'est pour limiter les difficultés liées à l'adressage dans les communes nouvelles que les anciens codes postaux ont été maintenus.

L'attribution des codes postaux dépend exclusivement de La Poste : à chaque bureau distributeur est associé un code postal distinct. Les communes qui comptent plusieurs bureaux distributeurs ont donc plusieurs codes postaux, qu'il s'agisse de communes nouvelles, de grandes communes ou de communes à aspérités géographiques.

L'harmonisation des codes postaux, possible en théorie s'il n'y a qu'un seul centre de tri, conduit parfois à des perturbations dans l'organisation du tri postal.

L'impossibilité de voir une adresse reconnue sur des plateformes internet tient à la non mise à jour de la base adresse nationale (BAN). Après insertion des adresses dans la BAN, La Poste se charge de leur fiabilisation. Or seules 8 000 communes ont procédé à une telle certification. Je vous invite donc à encourager les maires à actualiser les adresses de leur commune.

M. Daniel Gueret.  - Il est du devoir de La Poste d'accompagner les réformes territoriales. Le code postal est un vrai problème pour les maires concernés.

Détournement du droit de préemption urbain

M. Jean-Raymond Hugonet .  - Les constructions illégales sont un véritable fléau pour nos communes, alimentant le sentiment qu'il y a deux poids, deux mesures. Dans l'Essonne, plus de 60 % des communes sont confrontées au détournement du droit de préemption urbain par le biais de la signature d'un bail emphytéotique. Les malfaisants font usage d'une faille juridique révélée par une décision du 11 mai 2000 de la Cour de cassation, selon laquelle le droit de préemption urbain s'applique à des mutations de propriété, mais non à des mutations de jouissance.

La signature d'un bail emphytéotique, qui peut durer 99 ans, permet de devenir quasi propriétaire à moindre prix : sitôt le terrain loué, des constructions bafouant les règles d'urbanisme sortent de terre, au nez et à la barbe des riverains et du maire, qui ne peut que porter plainte. Des centaines de procédures interminables et sans effet sont en cours. Il est urgent d'agir ; quelles mesures prévoyez-vous ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales .  - Le 11 mai 2000, la Cour de cassation a jugé que le bail à construction et le bail emphytéotique n'étaient pas soumis au droit de préemption urbain - ce qui dispense les propriétaires de déclaration d'intention d'aliéner - sauf si le contrat prévoit le transfert de la propriété du bien loué en fin de bail.

Cette décision est transposable au droit de préemption en espaces naturels sensibles, où les règles en matière de construction et d'aménagement, de coupe d'arbres ou de stationnement de caravanes sont très restrictives ; le maire ou l'EPCI peuvent refuser une autorisation.

C'est donc au notaire de déterminer si le bail est soumis au droit de préemption. Il est recommandé à la profession la plus grande vigilance sur ce point.

M. Jean-Raymond Hugonet.  - Nous connaissons ces règles par coeur. Le maire de Longpont-sur-Orge, Alain Lamour, pourrait témoigner du fossé qui les sépare de ce qui se passe en réalité. Il est urgent que nous nous saisissions du sujet.

Mme la présidente.  - Je salue la présence en tribune des enfants de la commune de Vimy.

Collectivités face à l'inflation

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - Avec une pensée particulière pour les habitants de Bihucourt, Hendecourt-lès-Cagnicourt, Bucquoy, Ervillers et Mory et toutes les victimes de la tornade de ce dimanche - certains ont tout perdu - je salue les maires, élus, pompiers, gendarmes et les agents d'Enedis, sur le pont depuis dimanche soir.

Le 14 octobre dernier, nous avons organisé dans le Pas-de-Calais un rassemblement de plusieurs dizaines d'élus confrontés à l'explosion des dépenses. Des projets d'investissement sont remis en cause au vu des prix qui flambent ; les maires doivent choisir quel service ils suspendent et les centres communaux d'action sociale doivent protéger les populations. Le bouclier tarifaire ne s'appliquera pas à toutes les communes ; la hausse de la dotation globale de fonctionnement (DGF) de 320 millions d'euros est insuffisante. Nous demandons une indexation sur l'inflation, soit 770 millions d'euros, et une extension du bouclier tarifaire à toutes les communes sans distinction de taille.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales .  - Je partage vos propos sur les communes dévastées par la tornade.

Conscient des effets de l'inflation sur les finances des collectivités territoriales, le Gouvernement a pris des mesures : bouclier tarifaire limitant à 4 % en 2022 et à 15 % en 2023 la hausse des dépenses d'électricité des communes de moins de dix agents et dont les recettes sont inférieures à 2 millions d'euros - soit près de 28 000 communes ; filet de sécurité pour accompagner budgétairement les communes et leurs groupements, pour 430 millions d'euros - que le Gouvernement propose de reconduire en 2023 ; augmentation - inédite depuis treize ans - de la DGF de 320 millions d'euros, qui profite à plus de 90 % des communes. Le Gouvernement est aux côtés des collectivités.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Quelles garanties les maires ont-ils pour 2023 ? Y aura-t-il des reprises de DGF en cas de trop-perçu ? Il faut de la visibilité.

Mme la présidente.  - Je salue le conseil municipal des jeunes de Saint-Julien-les-Villas, venu à l'invitation de Mme Évelyne Perrot, sénatrice de l'Aube.

Mode d'emploi des procurations dématérialisées

M. Yves Détraigne .  - Depuis le dépôt de cette question orale, le ministre de l'intérieur a répondu au courrier que je lui avais également adressé sur le sujet... N'y voyez pas une forme de harcèlement, mais plutôt la volonté d'obtenir une réponse, mes trois questions écrites et mon courrier précédents étant restés sans suite.

Pourtant, la question est simple : jusqu'à quel moment une municipalité doit-elle prendre en compte une procuration de vote dématérialisée ?

La circulaire du 24 mai 2022 estime qu'on ne peut refuser une procuration au motif qu'elle est tardive et recommande  « dans la mesure du possible » aux mairies de tenir une permanence. Cela ne peut pas satisfaire les élus municipaux : soit le ministère ordonne de tenir une permanence et en fixe les horaires, soit il impose un délai clair pour en finir avec les procurations de dernière minute.

Le ministre convient des difficultés techniques et pratiques engendrées par la dématérialisation des procurations et précise qu'il faudrait fixer, en concertation avec les associations d'élus, une date limite pour leur établissement. Quand le cadre juridique sera-t-il mis en adéquation avec la réalité des contraintes des communes ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales .  - À ce jour, aucune disposition du code électoral n'impose de date limite pour établir une procuration de vote, qui peut, en théorie, être établie le jour même du scrutin. Mais les procurations tardives risquent de ne pas pouvoir être prises en compte par les communes, du fait des délais d'acheminement postaux.

L'introduction des procurations dématérialisées - plébiscitées, puisqu'elles représentent 69 % des 3,7 millions de procurations établies en 2022 - amplifie ces difficultés, en donnant aux électeurs un faux sentiment d'immédiateté.

Depuis le 1er janvier 2022, la gestion centralisée des procurations dans le Répertoire électoral unique allège la charge des communes mais implique que celles-ci réalisent des contrôles de validité avec un poste informatique.

Il a donc été recommandé aux communes de mettre en place, dans la mesure du possible, des permanences le jour du scrutin pour vérifier les procurations tardives. J'ai conscience des difficultés.

À l'issue du bilan des élections législatives et présidentielles, nous examinerons avec les associations d'élus les modalités d'introduction d'une date limite pour l'établissement des procurations.

Travailleurs sans-papiers de Chronopost à Alfortville

Mme Laurence Cohen .  - Les travailleurs sans-papiers de l'agence Chronopost d'Alfortville, intérimaires employés essentiellement sur des postes de tri et de manutention, sont en grève depuis décembre 2021 - une des plus longues grèves dans ce secteur. Ils se mobilisent, aux côtés d'organisations syndicales et d'élus, pour obtenir leur régularisation et faire respecter leurs droits.

Malgré plusieurs demandes, la direction du groupe La Poste, dont Chronopost est une filiale, refuse de remplir le formulaire Cerfa de régularisation. De plus, il semblerait qu'il y ait un contournement organisé et volontaire de la circulaire Valls.

Comme lors du conflit précédent de 2019, La Poste, société à capitaux publics à 100 %, dont 34 % détenus par l'État, ne reconnaît pas ses responsabilités d'employeur et se réfugie derrière ses sous-traitants. Quand l'État va-t-il prendre ses responsabilités en régularisant au plus vite ces salariés qui constituent une main-d'oeuvre corvéable à merci et en mettant fin au scandale de la sous-traitance en cascade, au non-respect du code du travail, à l'exploitation des travailleurs les plus précaires ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales .  - Ces salariés font grève en réaction à des conditions de travail qu'ils estiment difficiles et à une mobilisation jugée insuffisante de leur employeur pour entreprendre les démarches nécessaires à leur régularisation.

Si les dépôts groupés de demandes de régularisation sont une pratique courante dans le cas de conflits sociaux, la décision d'admettre à titre exceptionnel un individu au séjour relève du préfet du département de résidence de chacun des étrangers, qui statue individuellement sur chaque demande. Le droit au séjour est un droit individuel. La régularisation prend en compte le niveau d'intégration dans la société française et l'adhésion aux valeurs de la République, et ne peut intervenir si l'étranger constitue une menace à l'ordre public. La procédure d'admission à titre exceptionnel nécessite de transmettre à la préfecture compétente plusieurs documents pour chaque salarié concerné, dont un Cerfa complété et signé par l'employeur.

Les préfets de la région Île-de-France, sensibilisés, examineront les demandes transmises selon ces orientations.

C'est à la justice, éclairée par les constats de l'Inspection du travail et les investigations qu'elle est susceptible de diligenter, qu'il appartient d'apprécier et de qualifier cette situation complexe au regard du code du travail et de déterminer les responsabilités.

Mme Laurence Cohen.  - Je connaissais le mode d'emploi de la régularisation. Ces travailleurs sont exploités par La Poste et par les sous-traitants ; vous le savez, et l'État le sait. Quelle meilleure intégration que de travailler comme ils le font ? Respectons leur parole. Ils sont obligés de décharger des camions selon une cadence infernale. Durant la crise du covid, ils ont continué à travailler ; le chiffre d'activité de La Poste a augmenté de plus de 45 % sans que cela ruisselle sur les salariés. Arrêtons l'hypocrisie ! Ils doivent être régularisés, comme l'ont été les travailleurs de l'agence RSI à la suite d'une lutte. Arrêtons la sous-traitance en cascade, véritable scandale. La responsabilité de l'État est engagée. J'espère que vous allez enfin entendre la voix de ces travailleurs. En 2022, on ne peut les considérer comme des esclaves sans aucun droit.

Sortie du moratoire sur les machines à voter

M. Michel Savin .  - En 2008, la France a instauré un moratoire sur l'utilisation des machines à voter. L'homologation de nouveaux modèles est donc interdite. Les quelques communes autorisées à les utiliser sont donc empêchées de renouveler leurs machines, les producteurs ayant cessé d'en fabriquer, faute de débouchés. C'est un problème quand il faut ouvrir un nouveau bureau de vote.

En octobre 2018, le rapport de la commission des lois du Sénat sur le vote électronique préconisait de mettre fin au moratoire. Où en est l'étude demandée, il y a dix-huit mois, par le ministre de l'intérieur à l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi) sur le sujet ? Que répondez-vous aux communes qui utilisent des machines à voter et qui doivent équiper de nouveaux bureaux de vote ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales .  - Les machines à voter sont prévues en droit français depuis 1969 et des modèles électroniques sont autorisés depuis 2003. Toutefois, le périmètre des communes autorisées à en être équipées, ainsi qu'à acquérir de nouveaux modèles, est gelé depuis le moratoire de 2008.

Les services du ministère de l'intérieur ont réexaminé avec l'Anssi le cadre applicable et les évolutions techniques requises en vue d'une éventuelle levée du moratoire. Le Gouvernement a remis au Parlement, le 17 décembre 2021, un rapport qui comprend un bilan de l'exemple belge, une analyse de risques et des études techniques. La levée du statu quo est subordonnée à des modifications substantielles des modèles autorisés et de leur processus d'homologation. Cela inclurait notamment l'impression d'un bulletin papier pour rendre le vote par machine vérifiable et auditable.

M. Michel Savin.  - Les communes en difficulté attendent une réponse claire. Soit elles peuvent maintenir des machines à voter, et doivent pouvoir acquérir des machines adaptables, soit on supprime les machines à voter. On ne peut pas, dans une même commune, avoir des machines à voter dans certains bureaux de vote et pas dans d'autres.

M. Yves Détraigne.  - Très bien !

Pouvoirs du maire

M. Jean-Marie Mizzon .  - Dans notre République, nul n'est censé ignorer la loi. Selon l'article 16 du code de procédure pénale, le maire est officier de police judiciaire ; il peut constater des infractions et requérir le concours des forces de l'ordre.

Or le mépris de cette règle -  qui est déjà en soi un délit  - remet gravement en cause la légitimité des élus à intervenir lorsqu'ils constatent des violations du droit.

À titre d'exemple, le maire de Thimonville, en Moselle, est confronté à de multiples manquements à la loi de la part d'un adolescent de 16 ans. Il est d'abord intervenu directement, sans succès, puis a signalé les faits à la gendarmerie, qui a dressé un procès-verbal, sans effet. Il faudrait des sanctions plus sévères. Ces comportements ne devraient-ils pas faire systématiquement l'objet de poursuites pénales ? L'exemplarité des peines encourues rappellerait utilement les prérogatives de maire.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales .  - Le Gouvernement s'attache à apporter une réponse pénale efficace, dans le cadre d'une action coordonnée entre les élus et l'autorité judiciaire. Nous consolidons les moyens juridiques et matériels à disposition des maires pour faire appliquer leurs décisions.

Ainsi, la loi Engagement et proximité du 27 décembre 2019 a renforcé l'autorité et l'efficacité des mesures de police du maire, avec de nouvelles possibilités de sanction administrative sous la forme d'amendes d'un montant maximal de 500 euros, après mise en demeure et astreinte, en cas de méconnaissance des arrêtés de police, lorsque les actes portent atteinte à la sécurité des personnes et présentent un caractère répétitif ou continu.

En outre, le procureur de la République est tenu d'informer le maire sur les suites judiciaires des infractions signalées et des plaintes déposées qui concernent sa commune ou lui-même.

La circulaire de politique pénale du garde des sceaux du 20 septembre 2022 a réaffirmé la nécessité d'un renforcement des relations entre les parquets et les maires, afin de développer une justice de proximité favorisant la révélation des infractions et des réponses individualisées et graduées pour réparer le préjudice et éviter les récidives.

M. Jean-Marie Mizzon.  - Le constat est partagé, mais rien ne change. De nombreux maires sont découragés. La justice est trop lente : quand bien même on donnerait de nouveaux moyens à la police et à la gendarmerie, on n'avancera pas si l'on ne renforce pas les moyens de la justice. Transmettez mon message à qui de droit.

Renouvellement de titres d'identité

M. Édouard Courtial .  - Madame la ministre, élue de l'Oise, vous connaissez le sentiment d'abandon des territoires ruraux.

Il faut attendre des mois et faire des kilomètres pour déposer une demande de renouvellement ou de délivrance de carte d'identité ou de passeport. L'engorgement conjoncturel lié à la crise sanitaire n'explique pas tout. La réforme de 2017 visait à mieux sécuriser les titres, mais on observe, une fois encore, une rupture d'égalité manifeste au détriment des ruraux.

Le 4 mai dernier, le Gouvernement a lancé un plan d'urgence. La loi de finances rectificative (LFR) a également prévu des mesures de soutien financier aux communes. Mais les 31 communes de l'Oise disposant des terminaux nécessaires ne peuvent absorber le flux.

Les maires aspirent à un allégement des normes, à plus de visibilité, à un meilleur fonctionnement des intercommunalités, à une amélioration de leur statut.

Les ruraux ont le sentiment d'être des citoyens de seconde zone. Certes, les maisons France Services sont un progrès - mais il faut amplifier le dispositif. Je sais pouvoirs compter, comme les habitants du Beauvaisis, sur votre volontarisme. (M. Jérôme Bascher applaudit.)

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales .  - Dès 2018, l'État a revalorisé la dotation pour les titres sécurisés. En 2022, le ministère de l'intérieur a décidé d'un plan d'urgence pour accélérer le déploiement de nouveaux dispositifs de recueil et réduire les délais anormalement longs, avec une enveloppe de 14 millions d'euros dans la LFR. La dotation a été augmentée et rendue plus incitative, avec une prime de 4 000 euros supplémentaires pour tout nouveau dispositif installé.

Une trentaine de centres temporaires d'accueil équipés de cinq à dix dispositifs de recueil ont été installés, ce qui correspond à 221 stations de recueil supplémentaires.

De nouveaux dispositifs de recueil sont déployés dans les espaces France Services. Le réseau a ainsi été augmenté de manière pérenne de 10 %.

Dans le cadre du plan d'action pour réduire les délais, il est prévu de déployer 500 nouveaux dispositifs, notamment dans les départements dont le taux d'équipement est inférieur à la moyenne.

Le Gouvernement veille à garantir un service de proximité de qualité sur l'ensemble du territoire. Des annonces seront faites prochainement afin d'accélérer ces procédures qui ne devraient pas dépasser trois semaines à un mois.

Certification environnementale des exploitations agricoles

M. Alain Milon .  - Après dix ans d'existence, il faut faire évoluer les critères de certification environnementale des exploitations agricoles engagées dans des pratiques particulièrement respectueuses de l'environnement pour améliorer la crédibilité du référentiel et maintenir l'attractivité de la certification.

Or, l'évolution du référentiel proposée ne répond pas aux attentes, bien au contraire.

La viticulture AOC représente aujourd'hui la majorité des exploitations certifiées haute valeur environnementale (HVE). Or la révision proposée entraînerait une perte de certification pour nombre de viticulteurs et donnerait un coup d'arrêt au développement de la filière.

Un moratoire permettrait d'intégrer certaines propositions de la filière viticole AOC et d'atteindre les objectifs poursuivis sans pénaliser les exploitants.

Comment faire en sorte que le nouveau référencement ne pénalise pas les exploitations engagées dans cette démarche ou qui souhaitent s'y inscrire ?

Mme la présidente.  - Merci pour cette question sur une filière qui m'est particulièrement chère.

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - La HVE connaît un grand succès, notamment dans la viticulture, avec plus de 25 000 exploitations.

Il fallait faire évoluer le référentiel pour en faire une voie d'accès à l'écorégime des aides de la PAC, en se concentrant sur les aspects environnementaux. La proposition de révision qui ressort de la concertation renforce le niveau d'exigence global du référentiel. Le niveau de la nouvelle conditionnalité est une donnée d'entrée du processus de révision, il n'en est pas la cible.

S'agissant du calendrier, la date d'entrée en vigueur, initialement prévue au 1er octobre 2023, a été décalée au 1er janvier 2024 pour les nouveaux entrants. Les exploitations déjà certifiées pourront aller au bout de leur cycle de trois ans, et prolonger la durée de validité de leur certificat jusqu'à fin 2024.

Je suis prêt à discuter avec la filière pour étudier des solutions pratiques afin de lever les freins à l'entrée dans le dispositif, car nous avons besoin de développer la HVE.

M. Alain Milon.  - Merci, nous acceptons votre invitation à travailler ensemble.

Difficultés des producteurs de lait bio

M. Didier Rambaud .  - Depuis plusieurs mois, les producteurs de lait bio pâtissent d'une baisse de la consommation des produits bio ainsi que d'un déséquilibre des marchés.

Actuellement, le prix du lait est faible, parfois même en dessous du prix conventionnel. Cette conjoncture, aggravée par le manque de fourrage qui résulte de la sécheresse de l'été 2022, pourrait les contraindre à vendre une partie du cheptel ou à baisser la production.

Dans l'Isère, sur les zones de production du Saint-Marcellin et du Saint-Félicien, les producteurs ont jusqu'ici réussi à maintenir le prix du lait bio, mais les laiteries refusent toute hausse, en arguant de l'augmentation des charges. Dans le même temps, les producteurs constatent avec stupeur que la grande distribution ou les fromageries augmentent les prix !

Face à ce constat, la filière réclame des mesures de soutien : permission de sortir du bio sans pénalités, report des annuités d'emprunt, fixation du prix de base du lait au niveau national par l'interprofession, soutien à l'achat de fourrage et accompagnement des exploitations les plus fragiles.

Quelles mesures envisagez-vous pour soutenir la filière du lait bio ?

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - En effet, nos producteurs de lait bio souffrent.

Nous agissons tout d'abord dans le cadre des négociations commerciales, réunions hebdomadaires qui sont l'occasion de mettre les transformateurs et la grande distribution devant leurs responsabilités, notamment pour ce qui est de la répercussion des hausses de charges.

Un certain nombre de distributeurs se sont dits prêts à s'engager pour une revalorisation du prix du lait ; il faut désormais en faire autant dans la transformation.

Pour les producteurs touchés par la sécheresse, j'ai annoncé l'accélération du dispositif de calamité sécheresse, des aides pour les transformateurs les plus énergo-intensifs, un dispositif, notifié à Bruxelles, qui vise à mieux tenir compte des réalités agricoles.

On ne fera pas l'économie d'une réflexion globale sur le bio : après une croissance à deux chiffres, on a atteint un palier, voire une baisse de la consommation. Il faut travailler avec l'ensemble de la filière pour mieux identifier le bio, le mettre en valeur et accompagner les producteurs afin d'éviter la décapitalisation.

Conséquences de l'été 2022 sur les récoltes de pommes de terre

M. Antoine Lefèvre .  - Après les viticulteurs, c'est au tour des producteurs de pommes de terre de tirer la sonnette d'alarme sur les conséquences désastreuses de la sécheresse de l'été sur leur prochaine récolte. Le rendement moyen va baisser de 20 % en raison des effets de la chaleur - plus encore pour les producteurs dépourvus de système d'irrigation.

En ajoutant l'inflation des coûts de production et l'explosion des tarifs de l'énergie, la superficie totale cultivée risque de connaître une baisse sans précédent en 2023.

L'union nationale des producteurs de pommes de terre demande un dispositif de sauvegarde sous la forme d'un prêt garanti par l'État, engagé sur les seules surfaces plantées en 2023 et remboursable en fin de campagne.

Une hausse des aides couplées à hauteur de 500 euros par hectare sauverait de la faillite nombre de petits producteurs pris à la gorge.

La loi du 2 mars 2022 sur l'assurance récolte, qui doit beaucoup au Sénat, ne prendra effet qu'à compter de janvier 2023 - quatre mois trop tard pour couvrir les pertes de l'été 2022. Quels instruments transitoires pour compenser les pertes des producteurs de pommes de terre ?

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - Encore une filière touchée par les aléas climatiques...

J'ai rencontré les organisations de producteurs de pommes de terre ; les nouvelles sont moins mauvaises qu'on pouvait initialement le craindre. Il faut s'attendre à une baisse de rendement de 9 % par rapport à 2021, de 6,5 % par rapport à la moyenne quinquennale.

Au vu de la récolte, il y aura un nouvel examen de l'éligibilité au dispositif d'indemnisation au titre de la sécheresse.

J'ai étudié la possibilité d'un prêt garanti par l'État avec les services de Bercy : nous l'écartons, car les aléas climatiques ne sont pas du même ordre que le Covid ou la crise ukrainienne. En revanche, j'ai demandé que l'on expertise la piste d'un recours au PEC résilience, doté d'une enveloppe de 150 millions d'euros. Nous travaillons également à des réponses à l'effet ciseau provoqué par la hausse des coûts énergétiques. Un régime d'aide à la réfrigération est en cours de notification.

Vous l'avez dit, la vraie réponse à long terme est la réforme de l'assurance récolte, et je salue le travail réalisé au Sénat pour mettre en place un dispositif robuste, en un temps record.

Enfin, il nous faut travailler sur le sujet crucial de l'accès à l'eau : c'est la clé de la résilience.

M. Antoine Lefèvre.  - Les mesures d'urgence dans la période Covid avaient permis à bien des agriculteurs de maintenir la tête hors de l'eau. Encore un petit effort !

Conséquences de la loi ÉGalim dans la restauration scolaire et collective

Mme Else Joseph .  - La loi ÉGalim du 30 octobre 2018 a imposé, dans la restauration scolaire et collective, un menu végétarien par semaine ainsi qu'un approvisionnement à 50 % en denrées alimentaires dites durables.

Or ces prescriptions se heurtent aux habitudes socioculturelles des habitants, attachés à la consommation de viande et peu familiers de l'alimentation « bio ». Le repas végétarien devrait relever de l'incitation plutôt que de l'obligation. De fait, l'introduction des menus végétariens se traduit par une augmentation des déchets et, partant, du gaspillage alimentaire.

En outre, faute d'offre locale en bio suffisante - c'est le cas dans mon département des Ardennes - l'approvisionnement se fait auprès de grossistes dont les produits sont importés. Un paradoxe, alors que l'on prétend relocaliser les approvisionnements !

Enfin, le coût supérieur des produits bios ou durables peut conduire les syndicats intercommunaux à augmenter les tarifs, au détriment des familles et des finances des collectivités locales.

Envisagez-vous des adaptations locales à ces prescriptions pour soulager nos collectivités ?

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - Votre question me permet de faire le point sur ce sujet. Ayant moi-même été maire et président de communauté de communes, je comprends vos préoccupations.

La loi ÉGalim vise à améliorer la qualité des repas avec un taux d'approvisionnement de 50 % de produits durables et de qualité, dont 20 % de produits issus de l'agriculture biologique.

Les recettes végétariennes sont nombreuses et variées ; je pense aux oeufs, aux produits laitiers, pour rendre plus appétissants des ingrédients auxquels les enfants sont peut-être moins habitués, mais qu'ils ne laisseront pas sur le côté de l'assiette !

Il nous faut travailler globalement sur le sujet du gaspillage alimentaire dans la restauration scolaire. J'ai visité un lycée agricole qui a obtenu d'excellents résultats en la matière.

Quant aux difficultés d'approvisionnement local, c'est un peu la poule et l'oeuf, si j'ose dire : ces mesures servent aussi à encourager le développement des filières de qualité. À cet égard, les projets alimentaires territoriaux peuvent être un outil pour coordonner la demande vis-à-vis des syndicats intercommunaux ou des collectivités qui exercent la compétence, et préciser un cahier des charges pour les agriculteurs. Je salue les nombreuses initiatives locales en la matière.

Enfin, le plan de relance finance des mécanismes de soutien aux collectivités locales pour qu'elles investissent dans la restauration de proximité. Nous poursuivons le travail pour mettre en adéquation l'offre et la demande.

Mme Else Joseph.  - Merci. Nous partageons tous l'objectif, mais il faut travailler ensemble pour changer les mentalités et les façons de travailler dans les collectivités.

La séance est suspendue à 12 h 50.

présidence de M. Alain Richard, vice-président

La séance reprend à 14 h 30.

Décès d'anciens sénateurs

M. le président.  - J'ai le regret de vous faire part du décès de nos anciens collègues, Claude Saunier, qui fut sénateur des Côtes-du-Nord puis des Côtes-d'Armor de 1989 à 2008 et d'Henri Le Breton, qui fut sénateur du Morbihan de 1981 à 2001.

Salut à une délégation sénatoriale roumaine

M. le président.  - Au nom du Sénat, je souhaite la bienvenue dans notre hémicycle à M. Angel Tîlvar, président de la commission des affaires européennes du Sénat roumain ; M. Robert Marius Cazanciuc, vice-président du Sénat roumain ; Mme Anca Dragu, présidente de la commission des droits de l'homme, de l'égalité des chances, des cultes et des minorités du Sénat roumain, et ancienne présidente du Sénat ; M. Vlad-Mircea Pufu, secrétaire de la commission des affaires européennes du Sénat roumain.

La venue de la commission des affaires européennes du Sénat roumain s'inscrit dans un agenda dense entre nos deux Chambres puisqu'il y a exactement une semaine, le Président Larcher recevait la Présidente du Sénat de Roumanie, Mme Gorghiu.

Une réunion commune entre les deux commissions des affaires européennes est prévue tout à l'heure pour débattre d'enjeux majeurs : la guerre en Ukraine, la crise énergétique, les progrès de la Roumanie vers son entrée dans l'espace Schengen, sans oublier naturellement la coopération bilatérale entre la Roumanie et la France, qui s'inscrit dans le cadre de l'amitié ancienne qui lie nos deux pays depuis l'émergence de la Roumanie comme État au XIXe siècle.

Je me félicite que les commissions des affaires européennes de nos deux chambres entretiennent ainsi un dialogue régulier qui contribue à nourrir cette amitié.

Je souhaite à nos collègues roumains un séjour fructueux en France. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que les membres du Gouvernement, se lèvent et applaudissent.)

Fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant mesures d'urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi.

Discussion générale

M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Voici notre premier texte relatif au plein emploi, ce ne sera sans doute pas le dernier.

La France n'a plus connu le plein emploi depuis 45 ans. Une partie du chemin est déjà accomplie, avec la création d'1,7 million d'emplois en cinq ans, dont la moitié - 830 000 - depuis mars 2020, ce que nul n'aurait imaginé au début de la période covid.

La décentralisation de la négociation collective, le compte personnel de formation (CPF), le plan d'investissement dans les compétences (PIC) et le développement de l'apprentissage ont favorisé ces créations, sans se faire au détriment des salariés et des entreprises. Loin des fausses oppositions, l'emploi et les compétences deviennent une composante de la compétitivité.

Le projet de loi est resserré sur les mesures les plus urgentes et les plus importantes. Notre taux de chômage reste deux fois plus élevé que celui de nos voisins, alors même que 60 % des entreprises ont des difficultés à recruter et que 30 % des entreprises industrielles réduisent leur activité faute de main-d'oeuvre.

Il faut donc poursuivre nos efforts pour libérer le travail. Ma première idée est que le plein emploi passe par la création d'une envie, d'un goût du travail. Il faut donner le goût de l'artisanat, de l'industrie, du bâtiment dès l'école. C'est un axe de notre action avec ma collègue Carole Grandjean. Ces secteurs sont porteurs, en phase avec le progrès technologique, mais leur image s'est dégradée.

Ma deuxième idée est l'emploi pour tous : attaquons tous les freins périphériques à l'emploi pour les plus fragiles, dont la garde d'enfants et la mobilité. C'est le chantier de France Travail et du PIE qui doit passer à une nouvelle échelle. Nous devons aussi accompagner de façon plus intensive les bénéficiaires des minima sociaux. L'État n'est pas quitte de son devoir de solidarité par le seul versement de la prestation : il a aussi le devoir de donner une véritable chance de retrouver un travail. La formation professionnelle doit se transformer pour faire face aux enjeux de transition numérique, écologique et démographique. Enfin, ce projet de loi donne une première impulsion en matière de validation des acquis de l'expérience (VAE), Mme Grandjean y reviendra.

Troisièmement, le plein emploi passe par de meilleures conditions de travail : nous avons d'importantes marges de progrès. Les entreprises devront mieux faire évoluer les métiers et accompagner leurs salariés. Nous les accompagnerons pour cela.

Le texte apporte des réponses, dont la première concerne l'assurance chômage, bâtie au fil du temps par les partenaires sociaux au service de la mobilité et de la protection des actifs. Elle reste au coeur de notre modèle de sécurité sociale et professionnelle. Il faut garantir son caractère protecteur et universel - nous l'avons d'ailleurs élargie à certaines démissions et aux travailleurs indépendants -, mais elle doit être mise au service d'un retour rapide et durable à l'emploi.

Une première réforme a eu lieu en 2019, pour répondre à l'explosion en vingt ans des contrats courts, tout en répondant au déficit structurel de l'assurance chômage - 2,9 milliards d'euros par an en moyenne entre 2009 et 2019. Un nouveau mode de calcul des allocations garantit qu'il est plus rémunérateur de travailler. Et depuis le 1er septembre 2022, 6 000 entreprises ont subi un malus et 12 000 un bonus.

La commission a réécrit l'article 2. Mais permettez-moi de rappeler que les contrats courts coûtent plus de 2 milliards d'euros par an à l'assurance chômage. Il était juste d'en faire payer une partie aux entreprises qui en sont responsables. Les sept secteurs concernés doivent modifier leur approche : le CDI intérimaire ou le groupement d'employeurs sont des alternatives.

Le décret du 28 juillet 2019 définit les règles de l'assurance chômage, faute d'accord des partenaires sociaux. Son échéance au 1er novembre justifie l'urgence de ce texte : nous entendons prolonger les règles en vigueur jusqu'au 31 décembre 2023. Les partenaires sociaux devront se saisir de ces questions.

Les règles doivent aussi être plus réactives face à la conjoncture. Il y a quinze ans, quand le chômage dépassait les 10 %, 55 % des demandeurs d'emploi étaient indemnisables, contre 61 % en 2019 alors que le taux de chômage n'était plus que de 8 %. C'est le contraire qu'il faudrait faire. Notre régime d'assurance chômage est construit pour faire face à un chômage de masse et non pas pour un retour rapide à l'emploi, comme en témoigne sa générosité. (M. François Patriat approuve.) Nous discutons de la contracyclicité avec les partenaires sociaux.

Nous n'ouvrons cependant pas de consultation sur le montant des indemnisations, déjà modifié par la réforme de 2019.

M. Michel Savin.  - Cela ne sert à rien !

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Le système doit devenir plus incitatif, sans toutefois devenir aussi strict que dans d'autres pays. Je rappelle que la durée d'indemnisation est de douze mois en Allemagne.

Le taux de conversion - rapport entre la période de calcul des droits et la durée d'indemnisation - est de 1 en France, contre 0,5 en Allemagne, en Italie et en Irlande et même 0,4 aux Pays-Bas, en Espagne et au Portugal. Nous travaillons donc à la modulation des règles d'indemnisation en fonction de l'état du marché du travail : nos discussions avec les partenaires sociaux aboutiront dans six à huit semaines.

Enfin, la négociation interprofessionnelle s'ouvrira sur la gouvernance de l'assurance chômage, avec la recherche d'un accord national interprofessionnel majoritaire. C'est pourquoi nous limitons l'application du projet de loi à quatorze mois, soit au 31 décembre 2023.

D'autres dispositions concernent la définition du collège électoral des élections professionnelles, la ratification d'ordonnances ainsi que la formation professionnelle.

Je remercie les membres de la commission des affaires sociales, au premier rang desquels les rapporteurs, qui ont enrichi le texte.

M. Michel Savin.  - Très bien.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Je suis plus réservé sur le déplafonnement de la durée maximale des contrats intérimaires ou sur vos restrictions au système de bonus-malus.

M. Michel Savin.  - Dommage !

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Nous aurons l'occasion d'y revenir lors de la discussion des articles. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur plusieurs travées du groupe UC ; M. André Guiol applaudit également.)

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l'enseignement et de la formation professionnels .  - La validation des acquis de l'expérience s'inscrit dans notre mission de développement des compétences pour le plein emploi. Beaucoup de nos concitoyens connaissent ce concept qui reste cependant peu utilisé dans les parcours professionnels.

La VAE doit redevenir un outil au service de tous les actifs et s'adapter aux expériences de chacun, y compris associatives, syndicales et familiales.

L'article 4 fonde ainsi une VAE de nouvelle génération. Trop longue, trop administrative, inadaptée, un parcours du combattant : nous avons tous entendu ces critiques. Seuls 30 000 parcours ont été réalisés l'an dernier, deux fois moins qu'il y a dix ans. Et pour cause : la durée moyenne d'un parcours est de dix-huit mois, avec moult statuts, financeurs, certificateurs, référentiels... La VAE est pourtant un appui efficace dans un parcours d'emploi.

Cela justifie notre approche universaliste : nous visons 100 000 parcours avant la fin du quinquennat.

En premier lieu, pour ceux qui interrompent leur carrière afin de prendre soin d'un proche, nous voulons reconnaître sur le marché du travail les compétences d'aidance ainsi acquises.

Votre commission des affaires sociales fixe le principe d'un accès universel à la VAE : l'approche est séduisante, mais on risque de mal identifier certains publics. Certaines associations d'aidants s'inquiètent aussi d'une approche trop adéquationniste : je les rassure, tous les proches aidants pourront obtenir des certifications relevant d'autres secteurs.

Les rapporteurs ont confirmé l'importance de la simplification : le principe de VAE est fixé dans la loi, sa mise en oeuvre fera l'objet de textes réglementaires.

La VAE doit maximiser les chances de succès des candidats aux certifications. Ainsi, nous proposons le doublement du congé VAE pour les salariés.

M. François Bonhomme.  - Quelle audace !

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée.  - La durée des parcours est aussi un facteur réussite : il n'est pas acceptable d'attendre huit mois pour un jury. C'est pourquoi nous simplifions l'organisation et la composition des jurys.

Ce texte fera entrer la VAE dans la modernité. Nous voulons créer un service public national de la VAE, pour optimiser les parcours et les chances de réussite. C'est pourquoi nous allons créer un espace de coordination qui combine les expertises des acteurs, pour redorer le blason de la VAE. Cela suppose une gouvernance agile et adaptable, dans le cadre d'un groupement d'intérêt public.

Je salue l'engagement des régions qui auront leur rôle à jouer.

Le texte assoit ce service public avec un espace numérique dédié comme point d'entrée unique pour les usagers.

La VAE inversée rend concomitantes l'acquisition de l'emploi et de la formation, d'une part, et la validation des compétences d'autre part. Cela fera de ces périodes un tremplin vers la certification et l'emploi durable, notamment dans les métiers en tension.

Nous avons l'occasion de donner un nouveau souffle à la VAE : c'est un progrès social et un bond culturel pour notre pays. Je compte sur vous pour faire du droit à la reconnaissance des compétences un droit réel et tangible. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du RDSE)

Salut à une délégation sénatoriale ivoirienne

M. le président.  - J'ai le plaisir de saluer la présence, dans la tribune d'honneur, d'une délégation du Sénat de Côte d'Ivoire conduite par son président, Son Excellence M. Jeannot Ahoussou - Kouadio, qui s'est entretenu avec le Président du Sénat hier soir.

La délégation est accompagnée par notre collègue André Reichardt, président du groupe d'amitié France-Afrique de l'Ouest. Je tiens à souligner la grande qualité de nos relations interparlementaires.

La Côte d'Ivoire a fait le choix du bicamérisme dans sa Constitution de 2016, ce dont nous nous félicitons. En février 2020, le Président Larcher avait participé, avec plusieurs de nos collègues, au premier forum du Sénat ivoirien avec les collectivités territoriales, à Yamoussoukro. Nos deux Sénats sont engagés dans une coopération étroite, portant notamment sur l'évaluation des politiques publiques et la qualité des travaux législatifs.

Au-delà, je veux saluer l'action du Président Ouattara pour faire de la Côte d'Ivoire un pôle de stabilité, dans un environnement régional troublé, et ses efforts pour renouer le dialogue politique. Cette voie n'est pas nécessairement la plus facile. Mais elle est la plus prometteuse.

Nos deux pays sont par ailleurs engagés dans un partenariat étroit qui porte ses fruits dans tous les domaines, singulièrement en matière de sécurité et de défense, pour mieux combattre le terrorisme : nous mesurons l'ampleur des mesures prises par les autorités ivoiriennes pour protéger les Ivoiriens de ce fléau.

Permettez-moi de souhaiter à Son Excellence M. Jeannot Ahoussou-Kouadio et à sa délégation la plus cordiale bienvenue au Sénat français. (Mmes et MM. les sénateurs et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)

Fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (Procédure accélérée - Suite)

Discussion générale (Suite)

Mme Frédérique Puissat, rapporteur de la commission des affaires sociales .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) L'ambition de ce texte est plus limitée que son intitulé ne le suggère : il proroge simplement le régime actuel de l'assurance chômage.

Il soulève cependant des questions cruciales sur ce régime, signant l'échec de la gouvernance issue de la loi de 2018. Les règles du décret de carence du 26 février 2019 ne seront plus applicables à compter du 1er novembre, or rien n'a été prévu pour la suite. L'article premier autorise donc le Gouvernement à prendre par décret les mesures nécessaires jusqu'au 31 décembre 2023 et à prolonger le bonus-malus jusqu'au 31 août 2024.

Ces mesures dérogatoires ne devraient être applicables que pour une durée proportionnée aux nécessités de l'urgence. C'est pourquoi la commission, attachée à la gestion paritaire de l'assurance chômage, a avancé la date limite d'application au 31 août 2023.

Cette période devra être mise à profit pour engager des concertations afin de faire évoluer la gouvernance de l'assurance chômage et de tirer les leçons de l'échec de la réforme de 2018.

La commission a prévu d'abroger les dispositions du code du travail relatives à la procédure de négociation des accords relatifs au régime d'assurance chômage sur la base de la lettre de cadrage.

Elle a également défini une procédure transitoire faisant intervenir le Gouvernement par le biais d'un document d'orientation en vue de la négociation d'un accord. Elle a aussi renforcé le cadre de l'indemnisation : le droit à l'allocation ne doit pas être ouvert à un candidat ayant refusé trois propositions de CDI à l'issue d'un CDD. De plus, les droits doivent être modulés en fonction d'indicateurs conjoncturels.

À l'article 2, la commission est allée beaucoup plus loin sur le bonus-malus qui ne cible pas suffisamment les contrats courts : les CDD ne représentent que 2 % des fins de contrats prises en compte. D'où un recentrage sur les CDD inférieurs à un mois - à l'exclusion des CDD de remplacement d'un salarié absent. De plus, nous avons limité la modulation du taux à plus ou moins 0,5 point.

La commission a approuvé l'article premier bis A : le salarié en abandon de poste est présumé avoir démissionné.

Elle a également adopté l'article 2 bis sur l'expérimentation des CDD « multi-remplacements » et inséré un article 2 ter qui supprime la durée maximale de 36 mois pour les CDI intérimaires.

Enfin, la commission a adopté un amendement de Philippe Bas prévoyant une procédure plus équitable pour les collectivités territoriales devant indemniser un ancien agent au chômage.

En résumé, nous avons souhaité rendre l'initiative aux partenaires sociaux, dans un dispositif plus juste et plus adapté pour les entreprises. Moyennant cela, nous vous proposerons d'adopter ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP, ainsi que sur quelques travées du groupe UC)

M. Olivier Henno, rapporteur de la commission des affaires sociales .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Je remercie la présidente et la rapporteure. Ce texte développe la VAE, troisième voie d'obtention d'une certification aux côtés de la formation initiale et de la formation continue. Elle renforce l'employabilité, favorise la progression de carrière et répond aux besoins du marché du travail.

Trop complexe, peu connue, insuffisamment valorisée, la VAE est peu sollicitée - mal aimée, comme aurait dit Claude François.

« J'ai besoin qu'on m'aime, dit la VAE, mais personne ne me comprend ». Essayons de la comprendre, en prenant par exemple en compte, à l'article 4, le parcours des proches aidants et en renforçant l'accompagnement des candidats.

Les apports du texte sont les bienvenus. Il instaure un service public de la VAE pour accompagner tous les demandeurs. C'est un groupement d'intérêt public (GIP) qui le mettra en oeuvre au niveau national, promouvant la VAE et concourant à l'harmonisation des pratiques.

La commission a supprimé la longue liste des catégories de personnes et types d'activités éligibles - énumération signifie risque d'oubli - et a posé le principe que la VAE est ouverte à toute activité en lien avec la certification visée.

Nous avons souhaité que le GIP soit présidé par un président de conseil régional. Les acteurs de l'accompagnement devront être soutenus, y compris financièrement.

Nous avons approuvé l'article 3 qui tire les conséquences d'une décision du Conseil constitutionnel.

L'article 5 ratifie vingt-et-une ordonnances. Voilà qui est rare, au vu du faible taux de ratification au cours du précédent quinquennat. Mais sur ces vingt-et-une ordonnances, quatorze ne sont déjà plus en vigueur et une a été annulée par le Conseil d'État... La commission a donc réduit la liste des ratifications aux six ordonnances restant en vigueur.

Je vous invite à adopter le projet de loi issu de nos travaux. (Applaudissements sur les travées des groupeUC et Les Républicains, ainsi que sur le banc des commissions)

Question préalable

M. le Président.  - Motion n°73, présentée par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, portant mesures d'urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (n° 62, 2022-2023).

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - Alors que le Gouvernement a dégainé le 49.3 à l'Assemblée nationale sur le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale, ce texte l'habilite à fixer seul les conditions d'indemnisation des personnes privées d'emploi. C'est un refus du paritarisme, un passage en force qui marque une nouvelle étape de l'étatisation de l'assurance chômage, pour mieux servir les intérêts du patronat. La prochaine étape sera la disparition de l'Unédic et de Pôle emploi dans France Travail.

Alors que nous entamons l'examen de ce texte, le Gouvernement a déjà lancé les concertations pour moduler l'indemnité de chômage : quel mépris du Parlement ! C'est d'autant plus inacceptable que la modulation consiste à allonger la période d'ouverture des droits - privant 200 000 personnes d'indemnisation. Voilà 2 milliards d'euros économisés sur le dos des jeunes ! L'ensemble des organisations syndicales de salariés ont signifié leur opposition - même l'Union des entreprises de proximité a émis des doutes sur la corrélation entre contracyclicité et capacité à recruter.

Les difficultés proviennent en réalité du manque d'anticipation et d'investissement dans la formation professionnelle. Nous manquons de techniciens, d'artisans parce que les salaires sont trop faibles et les conditions de travail difficiles, mais aussi parce que, depuis des années, les gouvernements successifs ont cassé l'enseignement professionnel.

Penser que réduire les droits incite à la reprise du travail relève d'une vision archaïque. Le 14 juillet dernier, le Président de la République a présenté l'assurance chômage comme un obstacle au bon fonctionnement du marché du travail.

L'émancipation des individus par le travail n'est pas possible dans la société capitaliste. La dégradation des conditions de travail, la faiblesse des salaires, les comportements toxiques des DRH conduisent à une perte de sens - celle que ne supportent plus les infirmières à l'hôpital, par exemple. Il faut une participation aux décisions, une réduction du temps de travail à 32 heures et une augmentation massive des salaires.

Et cessons d'opposer les travailleurs et les privés d'emploi, qui sont les variables d'ajustement du marché du travail, sans possibilité de choisir librement un emploi. Quatre chômeurs sur dix sont indemnisés et la moitié d'entre eux vivent sous le seuil de pauvreté. Avec la réforme de 2019, un million d'allocataires ont perdu 155 euros par mois et 450 000 personnes ont été exclues de toute allocation.

Les radiations administratives ont progressé de 40 % en un an.

Avec ce texte, le Gouvernement reprend la main sur l'Unédic, géré par les partenaires sociaux depuis 1958. Plutôt que de s'engager à reprendre les 15 milliards d'euros de dette de l'Unédic créée par l'activité partielle pendant la crise sanitaire, il veut, par décret, transformer l'assurance chômage en simple filet de secours minimal. C'est un déni de solidarité, la transformation d'une assurance collective en épargne individualisée.

Ce processus de dénaturation de l'assurance chômage est à l'oeuvre depuis la substitution, en 2018, de la CSG aux cotisations salariales et l'encadrement des négociations par le Gouvernement. Bientôt, le chômage ne sera plus qu'un risque individuel.

Renouons avec la logique de solidarité salariale. Entre 1992 et 2001, la dégressivité des allocations chômage n'a pas fait progresser l'emploi. De même, la réforme du régime des intermittents n'a pas fait augmenter le nombre de CDI. Les chômeurs n'ont pas le choix de leur emploi ; la réduction des allocations ne fera que les contraindre à accepter des contrats encore plus précaires.

Je dénonce en particulier la suppression de l'indemnisation chômage pour les salariés qui abandonnent leur poste. C'est un recul considérable, le phénomène n'étant ni chiffré ni évalué. Nos juridictions prud'homales sont incapables de répondre dans un délai d'un mois à une demande des salariés. L'abandon de poste est avant tout une porte de sortie en cas de conflit avec l'employeur. Vous allez entraîner une explosion des arrêts maladie.

Nous portons un projet alternatif de sécurisation de l'emploi et de la formation. Le groupe CRCE rejette ce projet de loi qui s'attaque aux droits des salariés et à la gouvernance paritaire de l'assurance chômage. Nous vous invitons à voter cette motion. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et du GEST ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. Olivier Henno, rapporteur.  - Je suis défavorable par principe aux questions préalables, qui s'apparentent à un refus du débat. C'est une forme de négation de ce que nous sommes. (Mmes Éliane Assassi et Marie-Noëlle Lienemann applaudissent.)

Ce texte est nécessaire pour des raisons juridiques, afin de prolonger les règles de l'assurance chômage, mais aussi politiques : les questions de la VAE, des contrats courts, de la gouvernance doivent être débattues.

Même si le match s'annonce délicat, il faut le jouer. Avis défavorable. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains)

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Avis défavorable, sans surprise.

J'entends l'opposition à ce texte, mais pas tous vos arguments. France Travail ne fera pas disparaître Pôle emploi. Vous présentez comme acté que la modulation aboutira à porter de six à huit mois la durée de cotisation donnant droit à indemnisation : ce n'est pas exact. Cette réforme n'a pas non plus pour objectif de faire baisser le montant des indemnités : depuis 2019, nous maintenons le taux de remplacement dans la moyenne européenne, à 57 %. Enfin, vous évoquez une augmentation de 50 % des radiations administratives en 2022 ; en réalité, l'augmentation est de 14 % sur la période janvier-août 2022 par rapport à la même période de 2019. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Laurence Rossignol.  - Le plus souvent, le groupe SER s'abstient sur les questions préalables.

Mme Éliane Assassi.  - Vous votez contre, parfois !

Mme Laurence Rossignol.  - Plus rarement. En l'espèce, j'ai trouvé notre collègue très convaincante. De quoi allons-nous débattre ? Des chômeurs, qui le seraient parce qu'ils le veulent bien ? De réduire leur indemnisation pour les remettre dans l'emploi ? Nos chances d'améliorer ce texte sont à peu près nulles, tant les convergences entre le Gouvernement et la majorité sénatoriale sont fortes.

C'est la mise en oeuvre, en somme, de la formule présidentielle selon laquelle il suffirait de traverser la rue pour trouver un travail. Le groupe SER votera cette motion. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et du GEST ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. Daniel Chasseing.  - Je ne vois rien de péjoratif pour les salariés dans ce texte. Les règles en vigueur doivent être prorogées au-delà du 1er novembre. Les offres d'emploi sont nombreuses de nos jours : trois propositions de CDI après un CDD, c'est raisonnable. Le bonus-malus est amélioré.

Pour moi, un abandon de poste, très pénalisant pour l'entreprise, ne doit pas être indemnisé comme un licenciement ou une rupture conventionnelle. Le salarié a des droits, mais aussi des devoirs.

Enfin, la VAE doit être valorisée, notamment pour les emplois à domicile et en Ehpad. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Au motif de prolonger un délai de carence, ce projet de loi est un affront au débat parlementaire et au paritarisme.

M. Philippe Mouiller.  - Carrément !

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Cette réforme antisociale n'a pas été évaluée. On nous demande de la prolonger pour permettre au Gouvernement de légiférer par décret lorsque les négociations auront échoué. Car comment accepter ce décalque du régime canadien qui a multiplié les radiations ? (Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit.)

On fantasme sur la figure d'un chômeur qui profiterait de l'indemnisation, en omettant la nécessaire réflexion sur le fonctionnement du marché du travail.

Le GEST votera la question préalable. (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées des groupes SER et CRCE ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. Philippe Mouiller.  - Nous rencontrons régulièrement des entreprises, surtout des PME, qui n'arrivent pas à recruter, se développer, s'implanter. Le nombre d'emplois non pourvus est en augmentation. Cette réforme va dans le bon sens, mais elle ne suffit pas ; il faudra travailler sur l'accompagnement.

Nous portons sur ce texte un regard plutôt bienveillant, d'autant que la commission a veillé à conforter le paritarisme - à cet égard, nous ne partageons pas l'approche du Gouvernement.

Pour ces raisons, nous voterons contre la motion tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

À la demande du groupe CRCE, la motion n°73 est mise aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°11 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l'adoption   92
Contre 252

Le Sénat n'a pas adopté.

Discussion générale (Suite)

Mme Laurence Cohen .  - Nous dénonçons la philosophie de ce projet de loi : les chômeuses et les chômeurs ne voudraient pas traverser la rue pour trouver un emploi. Un tiers d'entre eux ne font pas valoir leurs droits, mais vous les considérez comme des fainéants et des profiteurs... Pourtant, le chômage est source de souffrance, de mal-être et de perte de confiance en soi.

L'assurance chômage est un droit. Ce n'est pas en modulant les indemnités que vous trouverez des couvreurs, des électriciens ou des aides à domicile. Il faut investir dans la formation, augmenter les salaires et améliorer les conditions de travail.

Moduler les indemnités selon la conjoncture et le territoire entraînerait fractures géographiques et disparités de droits. Ce serait une remise en cause du principe d'égalité.

Le Gouvernement peut remercier la droite de cet hémicycle, jamais avare d'un recul social : comme l'explique un récent article du journal Les Échos, la majorité sénatoriale a sauvé la réforme en votant la modulation des indemnités sur une base contracyclique.

Ce recul s'ajoute au vote de l'Assemblée nationale sur la présomption de démission en cas d'abandon de poste. En l'absence de statistiques en la matière, cette disposition est totalement inadaptée.

La droite sénatoriale souhaite en outre priver d'indemnité la personne qui refuserait trois CDI : il faudrait donc accepter n'importe quel emploi, quels que soient les conditions de travail, le trajet et le salaire ? Elle encourage aussi le recours à l'intérim, qui pèse lourd dans le financement du système et aggrave la précarité. Quant au malus, elle l'a quasiment annulé.

Nous défendons un autre projet, reposant sur de nouveaux financements : lutte effective contre la précarité, service public unifié de l'emploi et de la formation professionnelle, sécurité sociale professionnelle pour les privés d'emploi.

Ce projet est aux antipodes du texte soutenu par le Gouvernement et la majorité sénatoriale, que nous rejetterons. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur des travées du groupe SER ; Mme Raymonde Poncet Monge applaudit également.)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Je félicite les rapporteurs pour leur excellent travail.

Nous connaissons tous près de chez nous un patron qui embauche, mais ne trouve pas de personnel. Nous entendons tous les cancans contre le beau-frère de la copine du voisin, qui profite du chômage ou du RSA et gagne plus que ceux qui travaillent. Ces faits existent, sans doute. Mais pensez-vous que la vendeuse de chez Camaïeu qui perd son travail pourra, demain, être serveuse chez Raoul, le restoroute ? C'est une question de profil bien sûr, de salaire peut-être, mais aussi de conditions de travail, de transport et de garde d'enfants.

Comme vous, monsieur le ministre, je pense que le plein emploi est atteignable. Le travail est un droit constitutionnel : l'État doit donner à chacun les moyens d'y accéder. Mais quel chantier...

Ce texte répond à l'urgence normative du régime d'assurance chômage plus qu'à l'urgence du plein emploi. Le vrai chantier à engager, c'est la gouvernance de l'assurance chômage. Car, sans réforme profonde, le paritarisme aura vécu - celui qui vous le dit y est particulièrement attaché, comme l'ensemble de son groupe.

J'ai confiance dans la capacité des partenaires sociaux à s'illustrer ailleurs que sur les dépôts pétroliers et dans la rue. Il faut trouver des solutions pour équilibrer les comptes, sans quoi l'État prendra la main, et il sera difficile de s'en étonner.

Pour atteindre le plein emploi, nous devons changer de paradigme. À l'égard de France Travail, nos attentes, simples, sont celles des chômeurs eux-mêmes : un guichet unique et un parcours personnalisé comportant, si nécessaire, une formation. Il faut cesser de fonctionner en vase clos. Les exemples de réussite à cet égard sont nombreux : la maison de l'emploi, de l'entreprise et de la formation de Vitré me paraît le plus abouti.

L'UC votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains ; Mme Colette Mélot applaudit également.)

Mme Maryse Carrère .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Françoise Giroud disait : « Le chômage est comme une marée noire qui recouvre l'herbe verte, là où elle a poussé ».

Atteindre le plein emploi est l'objectif de tous les gouvernements. Malgré tous les efforts, le chômage se maintient à 7,4 %.

Nous connaissons les effets délétères du chômage. Vécu comme un échec, il peut être un vrai traumatisme.

Ce projet de loi est une première étape. Je salue le travail des maisons de l'emploi, dispositif d'insertion professionnelle parmi les plus efficaces. Nous espérons qu'elles seront financées dans le projet de loi de finances pour 2023.

Une mesure de ce texte cristallise les tensions : la prolongation des règles d'assurance chômage fixées en 2019. Les sénateurs du RDSE sont partagés sur cette question. Nous regrettons de devoir légiférer dans l'urgence, mais, si nous ne faisons rien, des millions de chômeurs ne pourront être indemnisés.

Certains craignent la signature d'un chèque en blanc au Gouvernement, ce que le Conseil d'État confirme : aucune limite n'est fixée aux mesures qui pourront être prises par décret. Le RDSE défendra des amendements visant à redonner toute sa place au dialogue social.

Nous regrettons la mesure, introduite en commission, consistant à supprimer l'indemnité en cas de refus répété d'un CDI. Cette mesure n'a pas sa place dans un texte d'urgence et remettrait en cause un droit de manière dangereuse.

Nous regrettons, enfin, de ne pouvoir traiter du dispositif Territoire zéro chômeur, nos amendements à cet égard ayant été jugés irrecevables au titre de l'article 45.

Le groupe RDSE se félicite en revanche de la réforme de la VAE. Trop complexe, ce dispositif ne s'est pas imposé dans le paysage de la formation professionnelle, alors qu'il constitue un formidable outil.

Nous réservons notre vote en fonction du sort de nos amendements. (Applaudissements sur les travées du RDSE)

Mme Pascale Gruny .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Une fois n'est pas coutume, ce projet de loi répond à une véritable urgence : prolonger les règles qui arriveront à échéance le 1er novembre -  demain  - , afin d'éviter un arrêt soudain du versement des prestations.

Mais ce texte va au-delà : le Gouvernement pourra définir les nouvelles règles de l'assurance chômage par décret, sans limites même indirectes. Ce blanc-seing demandé aux parlementaires reflète l'ascendant pris par l'État sur la gestion de l'assurance chômage. Le paritarisme continue ainsi de reculer.

La loi du 5 septembre 2018 a modifié les règles de négociation de l'assurance chômage, en permettant au Gouvernement de fixer une lettre de cadrage étroitement définie. L'échec, prévisible, des négociations menées l'année suivante a abouti à un décret. Cette fois, le Gouvernement ne se soucie pas d'engager une négociation et précise d'emblée qu'il définira les règles par décret.

Nous savons que le décret consistera à moduler les conditions d'indemnisation en fonction du marché du travail, conformément à l'engagement du Président de la République. De modulation, il n'est pourtant point question dans le texte. Le Gouvernement pourra la prévoir ultérieurement ou non, et il décidera seul.

Je salue le travail de nos rapporteurs. À l'article premier, ils ont introduit la question de la gouvernance de l'assurance chômage afin de rétablir le rôle actif des partenaires sociaux. Il faut revenir aux fondamentaux, c'est-à-dire à l'esprit de la loi Larcher. Le Gouvernement devra engager une véritable concertation, par le biais d'un document d'orientation et non d'une lettre de cadrage.

Ensuite, la commission a avancé le délai accordé au 31 août 2023. Une situation exceptionnelle ne saurait durer plus longtemps que nécessaire.

Puisque la modulation est souhaitée par le Gouvernement, nous l'avons inscrite en toutes lettres dans le texte. Nous considérons comme légitime l'objectif de s'attaquer aux difficultés de recrutement : d'après le ministère du travail, 60 % des entreprises y sont confrontées, et un tiers réduisent même leur activité de ce fait.

Les conditions d'indemnisation jouent un rôle important dans la reprise d'emploi. Même après le durcissement de 2019, rappelons que les conditions d'indemnisation en France demeurent parmi les plus favorables de l'OCDE.

Faute d'étude d'impact, nous doutons cependant de la faisabilité de cette modulation. Quels seront les indicateurs retenus, la fréquence des réévaluations ? Pouvons-nous appliquer les mêmes règles dans ma région des Hauts-de-France, durement touchée, et ailleurs ? D'un territoire à l'autre, le taux de chômage peut varier du simple au double. Il serait préférable de faire l'analyse par bassin d'emploi, voire, dans certaines villes, par quartier.

La question s'est posée à l'Assemblée nationale de restreindre les droits à indemnisation à la suite de refus répétés de CDI après plusieurs CDD. La commission a opté pour la suppression des droits après trois refus. À titre personnel, je soutiendrai l'amendement de MM. Duplomb et Retailleau qui supprime l'indemnisation dès le premier CDI refusé. Dans un même esprit de justice, la commission a complété les dispositions sur l'abandon de poste pour sécuriser son assimilation à une démission.

Sur les contrats courts, la commission a supprimé le plafond de 36 mois. Notre sentiment sur le bonus-malus n'a pas changé : il s'agit d'un frein à l'emploi, qui ignore les impératifs de flexibilité auxquels sont soumis certains employeurs.

Enfin, en matière de VAE, nous avons dépassé l'approche par statut pour donner un nouvel élan à ce dispositif insuffisamment utilisé.

Le chômage a certes baissé, mais il reste supérieur à la moyenne européenne. Ce projet de loi permettra de résoudre un certain nombre de difficultés et de réaffirmer notre attachement au paritarisme. Sous réserve du maintien des dispositions qui l'enrichissent, le groupe Les Républicains le votera. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Colette Mélot .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; M. Arnaud de Belenet applaudit également.) Le Président de la République a mis au coeur de son projet l'ambition forte d'atteindre le plein emploi en 2027.

Cet objectif peut nous rassembler. Le plein emploi, c'est permettre à chaque jeune de trouver sa place dans la société, valoriser le travail, la création et les compétences, récompenser l'effort. C'est aussi financer la protection sociale.

Comme souvent en politique, c'est moins l'objectif qui fait débat que les moyens de l'atteindre.

Il y a cinq ans, on se demandait comment lutter contre le chômage de masse. Désormais, nous entrevoyons l'espoir de le vaincre pour de bon. Il faudra pour cela des mesures courageuses, comme celles qui ont été prises ces cinq dernières années.

Ce projet de loi réforme l'assurance chômage pour garantir son équilibre et son équité. Les réformes du précédent quinquennat ont été engagées en conjoncture favorable, mais elles ont permis de tenir bon par gros temps.

Le taux de chômage reste de l'ordre de 7 %, à mi-chemin entre les 10 % de 2017 et les 4 % visés en 2027. Le marché du travail est tendu, ce qui profite au pouvoir de négociation des travailleurs. Dans ce contexte, l'assurance chômage se porte plutôt bien : elle pourrait dégager un excédent de 13 milliards d'euros sur 2022-2024. Cette amélioration doit nous encourager à faire bouger les lignes.

Il faut valoriser le travail et protéger les demandeurs d'emploi : sur ce sujet, nous trouverons des terrains d'entente.

La notification à Pôle emploi de tout refus de CDI au terme d'un CDD a été intégrée dans le sens de nos propositions en commission. Par ailleurs, on ne peut octroyer d'allocation à un salarié qui abandonne son poste : c'est une question d'éthique.

S'agissant de la VAE, nous soutenons la création d'un nouveau service public, pourvu qu'elle se fasse à moyens constants.

Le dialogue social, c'est le compromis : rien de nouveau sous le soleil... Le groupe INDEP est favorable à ce texte, tout en restant attaché au paritarisme et aux réformes. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; M. Arnaud de Belenet applaudit également.)

Mme Raymonde Poncet Monge .  - (Applaudissements sur les travées du GEST ; Mme Monique Lubin applaudit également.) Ce texte est le premier acte d'un vaste plan antisocial, placé sous l'égide du « travailler plus pour gagner plus » ressuscité.

Mme Borne l'a annoncé : il faudra travailler plus et plus longtemps, atteindre le plein emploi avec un chômage à 5 % pour se conformer aux exigences de la rigueur budgétaire et du programme de stabilité. Une fois de plus, la doxa néolibérale guide le Gouvernement dans sa politique de stigmatisation des chômeurs.

En 2003 déjà, François Fillon jugeait inacceptables les 300 000 emplois non pourvus, faux paradoxe fréquemment cité sans analyse sérieuse.

En réalité, seules 5 à 6 % des offres d'emploi ne sont pas pourvues. Dans la plupart des cas, au reste, des candidatures se sont manifestées, rejetées par l'employeur. Et les trois quarts des recruteurs admettent que les conditions de travail associées à ces offres peuvent être décourageantes...

Selon la Dares, les difficultés d'embauche sont liées aux conditions de travail et aux salaires insuffisants : les résultats sont similaires dans tous les pays de l'OCDE. Les chômeurs non indemnisés refusent tout autant les offres que les autres.

Votre premier objectif, c'est de réduire les droits pour faire des économies ! Il faudrait, bien au contraire, se pencher sur le problème structurel de la qualité des emplois.

Après avoir affaibli la capacité de négociation des salariés avec les ordonnances Macron, vous visez un plein emploi répressif. Les études sur le système d'indemnisation mis en place au Canada montrent que la baisse des indemnités pousse les chômeurs à accepter des emplois de moindre qualité sous peine de radiation.

Vous prétendez défendre la valeur travail, mais l'avenir est au partage du travail. Marx le disait déjà (M. Laurent Burgoa s'exclame) : la condition essentielle de l'épanouissement, c'est la réduction de la journée de travail. Les récentes vagues de démissions révèlent le besoin de passer des bullshit jobs décrits par David Graeber à des emplois épanouissants, tournés vers l'utilité environnementale et sociale.

Votre modèle productiviste explose toutes les limites de la biosphère, alors qu'il faut de toute urgence ralentir. Reprenons la marche vers la réduction du temps de travail pour respecter les limites planétaires.

Le GEST votera contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du GEST et du groupe CRCE, ainsi que sur de nombreuses travées du groupe SER)

M. Martin Lévrier .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Le plein emploi n'est pas une utopie : notre taux de chômage a baissé de 2,2 points depuis l'arrivée du président Macron à l'Élysée. (On ironise sur de nombreuses travées à droite et à gauche.) Preuve que la politique menée porte ses fruits.

Plus de la moitié des embauches se font en CDI, contre 30 % en 2019, et 62 % des entreprises les plus exposées aux contrats courts bénéficieront cette année d'un bonus.

Cela étant, la France compte encore 7,3 % de chômeurs : c'est trop. C'est pourquoi le plein emploi pour 2027 est au coeur de notre feuille de route. Ce projet de loi marque une première étape en prolongeant les règles de 2019, entrées en vigueur il y a moins d'un an à cause du covid et dont les effets ne peuvent donc pas encore être évalués.

La concertation avec les partenaires sociaux pour la modulation des règles est un engagement du Président de la République : il faut des règles incitatives à la reprise d'activité quand les conditions sont favorables et, inversement, plus protectrices quand l'économie va mal.

Partenaires sociaux et État partagent le souhait de modifier la gouvernance. L'État a repris la main avec le décret de carence, qui expirera le 1er novembre. Ce texte s'impose donc à nous pour des raisons calendaires.

Il s'agit aussi de poser les premiers jalons d'une réforme de la VAE, pour la rendre plus attractive et plus accessible. Nous voulons en faire un instrument simple au service de tous les actifs. Quoiqu'efficace pour développer l'employabilité, notamment des personnes les plus éloignées de l'emploi, elle reste sous-utilisée : 30 000 parcours l'année dernière, contre deux fois plus il y a dix ans.

Le texte ouvre la VAE aux proches aidants, qui pourront obtenir des certifications pour des métiers en forte tension comme les auxiliaires de vie et les aide-soignants. La majorité sénatoriale ouvre des pistes en proposant d'élargir la cible, mais c'est sans soute prématuré.

Notre groupe soutient ce texte, mais s'interroge sur certaines propositions des rapporteurs, s'agissant notamment du déplafonnement de l'intérim et de la modification des paramètres du bonus-malus. Nous proposerons aussi de revenir sur la suspension de l'allocation de chômage après trois CDI refusés. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Monique Lubin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Esther Benbassa applaudit également.) Nous nous émouvons souvent de l'insuffisance des études d'impact sur les textes gouvernementaux et de l'accumulation de réformes ignorant le travail parlementaire autant que le nécessaire temps d'évaluation.

Ce projet de loi ne fait pas exception. Il reflète les idées hâtives que, malheureusement, le Gouvernement et la droite sénatoriale ont en partage : les demandeurs d'emploi devraient être plus violemment incités à reprendre le travail, car l'assurance chômage, trop favorable, les inciterait à s'enfoncer dans la paresse et la fraude.

Une récente étude de Mathieu Grégoire et Claire Vivès, publiée par l'Institut de recherches économiques et sociales (Ires), bat ces idées en brèche. En matière d'indemnisation, ce sont bien les salariés en emploi discontinu qui subissent des pertes : ils ont perdu 50 % entre 1979 et 2019.

La réforme du premier quinquennat a fait évoluer l'assurance chômage vers une logique de compte d'épargne, fondée sur le salaire journalier plutôt que sur le salaire mensuel. Résultat : les plus exposés au chômage, qui étaient auparavant les mieux indemnisés, sont aujourd'hui les moins bien protégés.

Le taux de remplacement, souvent mis en avant, renvoie non aux chômeurs indemnisés, mais aux chômeurs indemnisables, ce qui est tout différent. Alors que nous avons 5,7 millions de personnes dans les catégories A, B et C, seules 49,5 % sont couvertes : c'est le taux le plus bas de notre histoire. On nous fait miroiter, de manière insincère, un système plus généreux qu'il ne l'est.

C'est pourquoi nous nous opposons à l'article premier, qui donnera au Gouvernement toute latitude pour modifier les règles sans consulter le Parlement ni les partenaires sociaux. Bruno Palier rappelle le rôle historique des coalitions d'intérêts : à la Libération, la demande des syndicats a rencontré la volonté de Pierre Laroque de constituer des corps intermédiaires. Une logique assurantielle a été promue, selon le principe : si vous payez, vous gérez. Les dépenses sociales ne devaient pas être soumises à la contrainte budgétaire en étant financées par l'impôt. Votre texte détricote ce principe, avec une désocialisation à marche forcée et le passage de la négociation à la concertation, qui ne laisse plus aux partenaires sociaux qu'un strapontin, voire un siège éjectable.

La restriction de l'accès à l'assurance chômage traduit l'accord profond entre le Gouvernement et la supposée opposition de droite.

Rien ne documente une pratique abusive de l'abandon de poste : ceux qui y recourent doivent pouvoir le faire pour préserver leur santé physique ou psychique.

Quant à l'amendement de la commission des affaires sociales visant à priver un demandeur d'emploi de ses indemnités, sur une base nébuleuse, faut-il seulement le commenter ? On retirerait ses indemnités à un demandeur d'emploi refusant trois propositions de CDI en douze mois. Quelles études montrent l'aspect critique de ce problème ?

On nous propose d'inscrire la contracyclicité dans le code du travail. En réalité, vous tentez d'instaurer une réquisition banalisée des travailleurs.

L'accès des proches aidants à la professionnalisation nous inspire aussi des réserves, dont Mme Meunier reparlera.

Il ne peut y avoir de valeur travail sans travail de valeur. Robert Castel rappelle que le salarié n'a gagné sa prééminence qu'avec l'émergence d'un État social. Le Gouvernement maltraite les salariés et fait taire leurs représentants à coup de 49.3.

Il faut refaire société : le Gouvernement prend ce besoin à rebours. Nous voterons contre un projet de loi qui tourne le dos à notre démocratie sociale ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et du GEST ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

Mme Annick Jacquemet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le droit du travail est un domaine des plus complexes. Nous devons faire évoluer le droit pour rester au plus près du fait social, tout en préservant les acquis passés.

Je salue le travail de nos rapporteurs, qui ont cherché à préserver les équilibres du texte. La prolongation des règles d'indemnisation laissera aux partenaires sociaux le temps de trouver un accord. Le texte prolonge aussi le bonus-malus, précisé par la commission : ce dispositif dissuade la généralisation des contrats précaires et récompense les entreprises vertueuses. La transmission des listes des anciens employés améliorera la transparence.

Le groupe UC se félicitait de l'article élargissant la VAE au secteur médico-social ; la commission l'a encore amélioré en créant un groupement d'intérêt public qui favorisera l'information.

La navette a enrichi le texte. Ainsi, si certains abandons de poste sont justifiés, un fort dévoiement du principe est observé. Il n'est pas souhaitable qu'un salarié licencié après abandon soit dans une situation plus favorable qu'un démissionnaire. Cependant, sans la soupape de sécurité votée en commission, le texte aurait pu aboutir à des situations dramatiques.

Le groupe UC votera le projet de loi, même si son titre est plus ambitieux que son contenu. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur le banc des commissions)

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Je remercie les orateurs, en particulier ceux qui ont souligné les progrès apportés par ce texte.

Plus largement, nous devrons traiter aussi de la formation initiale, de l'apprentissage, de l'accompagnement des publics les plus éloignés de l'emploi, de l'emploi des seniors ou encore des conditions de travail ; nous aurons d'autres occasions d'en débattre.

Quatre thèmes vont structurer nos échanges. D'abord le paritarisme, avec un amendement du Gouvernement rétablissant la rédaction votée par l'Assemblée nationale. La commission a modifié, à l'article premier, la durée d'application du texte et prévu l'organisation d'un dialogue social autour de la gouvernance, mais je pense que nous pouvons parvenir à un consensus. Nous n'avons pas pu ouvrir les négociations interprofessionnelles au moment de l'élection présidentielle, ce qui nous contraint aujourd'hui à proroger les règles existantes.

Je me suis engagé à ouvrir une négociation sur le paritarisme. Des quatre scénarios envisagés, un seul ne recueille pas notre assentiment : l'étatisation de l'assurance chômage.

Deuxième sujet de débat, l'abandon de poste. Madame Cohen, vous soulignez à juste titre que ce phénomène ne peut pas être mesuré en tant que tel - mais il se reflète dans l'évolution des licenciements pour faute grave. Ceux-ci ne connaissent pas d'évolution majeure concernant les CDI, mais ils doublent pour les CDD. On peut penser que cela correspond à une vague d'abandons de poste, notamment dans les cafés et restaurants. Quand l'abandon de poste n'est pas justifié par une mise en danger, c'est une rupture unilatérale d'un engagement contractuel qui peut s'apparenter à une démission et doit être traité comme tel.

Troisième sujet, le bonus-malus. Nous proposons l'horizon du 31 décembre 2024, pour respecter les cycles triennaux d'observation introduits par la loi de 2019.

Enfin, j'ai les plus grandes réserves sur l'amendement voté par la commission mettant fin à l'indemnisation après trois refus de CDI - et fortiori sur celui qui propose d'y mettre fin dès le premier refus. Lorsqu'un salarié engagé à durée déterminée est allé au bout de son engagement contractuel, il n'y a aucune raison de le sanctionner. Le code du travail prévoit déjà, en outre, qu'en cas de proposition d'un CDI dans les mêmes termes que le CDD, l'employeur peut ne pas verser la prime de précarité.

Nous reviendrons aussi sur la VAE au moment de l'examen de l'article 4, avec ma collègue Carole Grandjean, qui a dû s'absenter pour assister aux questions d'actualité au Gouvernement à l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

M. Philippe Mouiller .  - L'expérimentation des territoires zéro chômeur de longue durée fonctionne bien. La loi du 14 décembre 2020 a permis à de nombreuses collectivités territoriales d'y adhérer. Seul un décret en Conseil d'État peut habiliter de nouveaux territoires. Pourquoi ne pas modifier la loi pour aller au-delà des cinquante nouveaux territoires prévus initialement ? Un amendement dans ce sens a été jugé irrecevable. Qu'en pensez-vous, monsieur le ministre ?

M. Yan Chantrel .  - Il y a un problème de méthode, qui en dit long sur la pratique politique du Gouvernement. Vous détricotez l'assurance chômage en disant vous inspirer du Canada, mais vous n'avez consulté personne dans ce pays, ni le Gouvernement ni les syndicats - pour ces derniers, je ne vous jetterai pas la pierre, vous ne le faites pas en France non plus...

Je suis justement de retour d'un déplacement au Canada, où j'ai pu échanger avec les personnes directement concernées. Elles font état d'une précarisation accrue et m'ont remis un livre sur le mouvement Action chômage de Montréal. (L'orateur brandit le livre en question.) Je vous le remettrai. Il montre les conséquences des politiques néolibérales.

Vous devriez plutôt vous inspirer de la semaine des quatre jours, mise en place dans certaines provinces... Mais de cela, curieusement, vous ne parlez pas. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et du GEST ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

Mme Esther Benbassa .  - Vous dites que vous vous souciez des actuels bénéficiaires, mais l'urgence, quand elle résulte de votre incapacité de concertation, n'impose nullement qu'on vous laisse les mains libres. Les organisations syndicales et patronales n'ont visiblement pas leur mot à dire ; vous devriez pourtant les écouter davantage : selon elles, les tensions sur le marché du travail s'expliquent d'abord par de trop faibles rémunérations, des conditions de travail dégradées et un manque de qualifications. Encore une fois, vous répondez hors sujet ! Selon Pôle emploi, 92 % des demandeurs cherchent activement un travail et un quart ne font pas valoir leurs droits à l'indemnisation. Nous voulons des possibilités pratiques, non des constatations théoriques. (Quelques applaudissements sur les travées du GEST et des groupes SER et CRCE)

Mme Monique Lubin .  - Pourquoi avoir attendu le dernier moment pour relancer la négociation ? Les concertations avec les partenaires sociaux se font dans un cadre très rigide. Vous nous demandez en réalité un blanc-seing. Nous ne pouvons donner au Gouvernement la possibilité d'ériger des règles d'assurance chômage dont nous n'aurions pas pu travailler le cadre.

Pour justifier la réforme à marche forcée, on prétend que le financement de l'Unédic est en danger. Or ses comptes seront excédentaires jusqu'en 2024, alors même qu'elle doit en grande partie financer Pôle emploi...

Je fais partie de ceux qui avaient présenté un amendement sur les territoires zéro chômeur. Pourquoi a-t-il été déclaré irrecevable ? Qu'envisagez-vous à ce sujet ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE ; Mme Raymonde Poncet-Monge applaudit également.)

M. Olivier Dussopt, ministre .  - Si nous avions parfaitement respecté le calendrier des négociations, il aurait fallu les ouvrir au moment de l'élection présidentielle. Vous nous auriez alors reproché notre manque de légitimité... (Protestations sur les travées du groupe SER)

Voilà ce qui motive le calendrier que nous retenons. Vous l'avez souligné, madame Lubin, les résultats de l'Unédic sont bons - grâce à notre réforme de 2019 ! Je ne m'attendais pas à un tel satisfecit de votre part ! (Sourires)

Mme Benbassa est partie, mais nous recherchons des solutions concrètes. La rapporteure propose de mieux sécuriser le dispositif relatif à l'abandon de poste, pour protéger les salariés exposés à des risques de maltraitance ou de harcèlement : nous y sommes favorables.

Je n'ai pas à me prononcer sur la recevabilité des amendements, que ce soit à l'Assemblée nationale ou au Sénat. Le projet de loi pour 2023 porte de 33 à 44 millions d'euros le budget de l'expérimentation des territoires zéro chômeur. Tous les territoires participant à l'expérimentation n'ont pas encore été labellisés : nous en sommes à une quarantaine sur les cinquante à identifier. La loi de décembre 2020 prévoit une évaluation de l'expérimentation : France Stratégie s'y attellera en 2023.

M. le président.  - Amendement n°12 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

Mme Monique Lubin.  - La réforme de l'assurance chômage s'est faite contre les partenaires sociaux. L'étude d'impact de l'Unédic n'est pas de nature à apaiser les relations entre les partenaires sociaux et le Gouvernement : l'allocation journalière aurait baissé de 17 % en moyenne, pour 1,15 million d'allocataires.

La réforme de l'indemnisation a touché les territoires les plus défavorisés : plus de 30 000 personnes à la Réunion, 33 000 en Seine-Saint-Denis, plus de 50 000 dans le Nord, dont à chaque fois une bonne part de jeunes de moins de 25 ans. Elle est budgétairement inutile, puisque l'Unédic est excédentaire.

M. le président.  - Amendement identique n°46, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Laurence Cohen.  - La réforme de 2019 a fait perdre 155 euros par mois en moyenne à plus d'un million de personnes et exclu 450 000 personnes du bénéfice de l'allocation chômage. L'article premier confère les pleins pouvoirs à l'État jusqu'au 31 décembre 2023. C'est une véritable reprise en main par l'État d'une compétence réservée aux organisations syndicales et patronales depuis 1958. Le Gouvernement se donne même la possibilité de modifier les critères d'indemnisation, et de moduler l'indemnité en fonction de la conjoncture.

Toutes les organisations, y compris l'association patronale des entreprises de proximité, rejettent cette OPA de l'État. Chers collègues de la droite de l'hémicycle, vous qui souhaitez être attentifs aux besoins des entrepreneurs, écoutez-les !

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - L'article premier a deux objectifs : donner une base légale à l'indemnisation à compter du 1er novembre et autoriser temporairement par décret le Gouvernement à fixer les règles en dérogeant à la gouvernance prévue par le code du travail.

La commission a accepté cette prorogation des règles fixées en 2019, mais a aussi redonné la main aux partenaires sociaux. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Monsieur le ministre, vous avez été interpellé plusieurs fois sur l'expérimentation territoire zéro chômeur, mais vous n'avez pas réellement répondu.

Cet article valide la réforme de 2019. Vous faites systématiquement pression sur les salariés et les chômeurs, mais dès qu'il s'agit des employeurs, vous êtes mou du genou !

Vous prétendez que cette réforme fait reculer les CDD de courte durée. Or les CDD d'un mois ont augmenté de 5 % en un an, et les CDD d'un jour explosent à nouveau dans l'hôtellerie-restauration.

Cessez de parler des droits et des devoirs, lorsque les devoirs des chefs d'entreprise sont à ce point ignorés. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe SER et du GEST)

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Le nombre de CDI a lui aussi augmenté depuis 2019, mais de 50 %... C'est l'écart entre la croissance des embauches en CDD et en CDI qui compte. On peut s'en féliciter.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Mais des CDD d'un jour !

Les amendements identiques nos12 rectifié et 46 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°94, présenté par le Gouvernement.

Rédiger ainsi cet article :

Par dérogation aux articles L. 5422-20 à L. 5422-24 et L. 5524-3 du code du travail, un décret en Conseil d'État, pris après concertation avec les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel, détermine, à compter du 1er novembre 2022, les mesures d'application des dispositions législatives relatives à l'assurance chômage mentionnées au premier alinéa de l'article L. 5422-20 du même code. Ces mesures sont applicables jusqu'à une date fixée par décret, et au plus tard jusqu'au 31 décembre 2023, et peuvent faire l'objet de dispositions d'adaptation en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Toutefois, les mesures d'application des deuxième à avant-dernier alinéas de l'article L. 5422-12 dudit code peuvent recevoir application jusqu'au 31 août 2024. Le décret en Conseil d'État mentionné au premier alinéa du présent article précise notamment les périodes de mise en oeuvre de la modulation du taux de contribution des employeurs concernés ainsi que les périodes au cours desquelles est constaté le nombre de fins de contrat de travail et de contrat de mise à disposition pris en compte pour le calcul du taux modulé.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Cet amendement revient au délai d'application de la loi jusqu'au 31 décembre 2023, le temps de mettre en place France Travail et de permettre à la négociation sur la gouvernance de l'assurance chômage d'aboutir. C'est pourquoi nous ne souhaitons pas faire évoluer la date butoir du décret et proposons de revenir à la rédaction de l'Assemblée nationale.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Depuis soixante ans, l'assurance chômage est gérée par les partenaires sociaux, ce qui permet de dépasser les antagonismes et de donner du poids à la démocratie sociale.

On s'interroge souvent sur les différences entre le Gouvernement et la majorité sénatoriale. Vous vous dites favorable à la gestion paritaire. Or vous souhaitez appliquer la loi de 2018, qui corsète la négociation à travers la lettre de cadrage - un échec immédiat, à tel point que vous avez renoncé à l'utiliser - et supprime la part sociale de la cotisation salariale, ce qui réduit le poids des partenaires sociaux au sein de l'Unédic.

Notre dispositif transitoire est très simple et leur redonne la main. Voilà la différence : vous dites, nous faisons. Avis défavorable.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Lors de ma présentation de notre motion, j'ai cité les pistes du Gouvernement sur les critères d'indemnisation du chômage. Vous avez exclu les reports d'indemnisation - encore heureux -, mais vous avez proposé de moduler les conditions d'accès. Le Monde cite ainsi le document de concertation qui envisage bien une modification du seuil d'éligibilité. Le Gouvernement pourrait passer de 6 mois travaillés sur les 18 derniers mois à 8 sur les 24 derniers mois, ce qui générerait 2 milliards d'économies. Nous voterons contre cet amendement.

L'amendement n°94 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°85, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

I.  -  Alinéa 1

Supprimer cet alinéa.

II.  -  Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Après le mot : « celui-ci », la fin du dernier alinéa de l'article L. 5422-20 est ainsi rédigée : « de nouvelles négociations entre les organisations représentatives d'employeurs et de salariés sont organisées. Lorsque la validité des mesures d'application ainsi déterminées expire sans qu'un nouvel accord n'ait été conclu dans les conditions prévues au premier alinéa, les mesures d'application du dernier accord relatif à l'assurance chômage conclu dans ces conditions s'appliquent jusqu'à ce qu'un nouvel accord soit conclu entre les organisations représentatives d'employeurs et de salariés. Les partenaires sociaux proposent au Gouvernement des mesures pour que le changement n'entraîne ni de baisse de l'indemnisation ni de diminution de la durée des droits ouverts pour les assurés. » ;

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Entre 2019 et 2021, la réforme de l'assurance chômage a été menée de force, contre l'avis des organisations syndicales. Le Gouvernement a imposé les règles du jeu et les conclusions de la négociation. Tout cela est permis par le décret de carence de 2018. Ni le Parlement ni les organisations syndicales n'ont plus voix au chapitre. Nous refusons ce 49.3 permanent.

Cet amendement supprime donc la possibilité de légiférer par décret en cas d'absence d'accord entre le Gouvernement et les partenaires sociaux. On reviendrait automatiquement à la dernière convention conclue, le temps que la négociation aboutisse. Le risque de vide juridique est ainsi écarté.

Emmanuel Macron réclamait récemment de nouvelles méthodes plus respectueuses de la démocratie... C'est le moment de passer aux actes ! (Mmes Marie-Noëlle Lienemann et Émilienne Poumirol applaudissent.)

M. le président.  - Amendement n°18 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

I.  -  Alinéa 1

Supprimer cet alinéa.

II.  -  Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Le dernier alinéa de l'article L. 5422-20 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Lorsque la validité des mesures d'application ainsi déterminées expire sans qu'un nouvel accord n'ait été conclu dans les conditions prévues au premier alinéa, les mesures d'application du dernier accord relatif à l'assurance chômage conclu dans ces conditions s'appliquent jusqu'à ce qu'un nouvel accord soit conclu entre les organisations représentatives d'employeurs et de salariés. Les partenaires sociaux proposent au Gouvernement des mesures pour que le changement n'entraîne ni de baisse de l'indemnisation, ni de diminution de la durée des droits ouverts pour les assurés. » ;

M. Yan Chantrel.  - Avec cet amendement, c'est la dernière convention conclue par les partenaires sociaux qui s'appliquerait lorsque le régime de carence aujourd'hui utilisé par le Gouvernement expirera. Cela évite le risque de vide juridique.

En l'espèce, cela permettrait de revenir sur les 6,5 milliards d'euros économisés sur le dos des chômeurs.

M. le président.  - Amendement n°76 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Fialaire et Gold, Mmes Guillotin et Pantel et MM. Requier et Roux.

I.  -  Alinéa 1

Supprimer cet alinéa.

II.  -  Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Le dernier alinéa de l'article L. 5422-20 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque la validité des mesures d'application ainsi déterminées expire sans qu'un nouvel accord n'ait été conclu dans les conditions prévues au premier alinéa, les mesures d'application du dernier accord relatif à l'assurance chômage conclu dans ces conditions s'appliquent jusqu'à ce qu'un nouvel accord soit conclu entre les organisations représentatives d'employeurs et de salariés. » ;

Mme Maryse Carrère.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°84, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Alinéa 1

Supprimer cet alinéa.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - L'article premier met le pied dans la porte pour ouvrir la voie à une dérive sociale au long cours.

Le Conseil d'État rappelle que le projet de loi ne comporte aucune limitation quant à la portée ou à l'objet du futur décret. Vous nous invitez à signer un chèque en blanc, malgré une étude d'impact de l'Unédic qui note que plus d'un million de personnes ont vu leurs indemnités baisser et que les saisonniers et les travailleurs qui enchaînent les contrats courts ont été pénalisés.

Vous préparez la refonte antisociale de l'assurance chômage sur le modèle canadien, avec les effets déplorables que l'on sait. 

La prise en tenaille entre une réforme inefficace et le chèque en blanc d'une deuxième réforme n'est pas acceptable. En conséquence, nous proposons la suppression de cet alinéa.

M. le président.  - Amendement n°86, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

I.  -  Alinéa 1

Rédiger ainsi cet alinéa :

I.  -  Par dérogation aux articles L. 5422-20 à L. 5422-24 et L. 5524-3 du code du travail, les mesures d'application des dispositions législatives relatives à l'assurance chômage mentionnées au premier alinéa de l'article L. 5422-20 du même code ne peuvent être déterminées par décret en Conseil d'État qu'après la négociation des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel ainsi que des associations représentatives de demandeurs d'emploi et de salariés enchaînant des contrats courts.

II.  -  Alinéas 11 à 13

Supprimer ces alinéas.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - La réforme de 2019 s'est faite contre les partenaires sociaux. Alors que l'évaluation de ses conséquences n'est prévue que pour 2024, on note une augmentation des chômeurs des catégories B, C, D et E. L'effet serait contre-productif, avec un accroissement de la tension sur le marché de l'emploi et le basculement de nombreuses personnes dans la pauvreté.

Même sous l'angle de la réduction des emplois vacants, la réforme semble un échec, puisqu'ils sont passés de 264 000 à 362 000 selon la Dares. La territorialisation, sur le modèle canadien, est également inacceptable.

Avec cet amendement, nous rétablissons l'obligation d'une négociation avec les partenaires sociaux, incluant les représentants des chômeurs et précaires qu'une démocratie vivante devrait intégrer comme parties prenantes.

M. le président.  - Amendement n°77 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Fialaire et Gold, Mmes Guillotin et Pantel et MM. Requier et Roux.

Alinéa 1

1° Première phrase

Après le mot :

État

rédiger ainsi la fin de la phrase : 

proroge, à compter du 1er novembre 2022, les mesures d'application, actuellement en vigueur, des dispositions législatives relatives à l'assurance chômage mentionnées au premier alinéa de l'article L. 5422-20 du même code.

2° Seconde phrase

Après la date :

31 août 2023

supprimer la fin de la phrase.

M. Éric Gold.  - En attendant la conclusion d'un accord des partenaires sociaux sur l'assurance chômage, cet amendement de repli proroge les mesures en vigueur.

M. le président.  - Amendement n°19 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 1, première phrase

1° Remplacer les mots :

, pris après concertation avec les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel, détermine

par les mots :

peut proroger

2° Après le mot :

application

insérer les mots :

en vigueur

M. Yan Chantrel.  - Cet amendement de repli rétablit la compétence des partenaires sociaux pour la période de carence, que le Gouvernement a lui-même laissée filer, en ne respectant pas les délais.

Les rapporteurs n'ont pas réduit la période pendant laquelle le Gouvernement pourra définir les règles relatives à l'assurance chômage. Nous refusons ce chèque en blanc qui piétine le paritarisme et le Parlement. La réforme du précédent quinquennat a été la première depuis 1971 réalisée contre l'avis des partenaires sociaux. Nous entendons leur redonner la main, y compris pendant la période transitoire.

M. le président.  - Amendement n°20 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 1, première phrase

Après le mot :

après 

insérer les mots : 

transmission au Parlement et aux partenaires sociaux du rapport prévu à l'article L. 5422-25 du même code et après

Mme Monique Lubin.  - La loi du 5 septembre 2018 prévoyait la remise d'un rapport sur la situation financière - il n'en a rien été. Les nouvelles règles doivent être établies sur le fondement d'analyses chiffrées. Appauvrir les chômeurs ne fait qu'accroître les difficultés.

Ce projet de loi réactive les vieux stéréotypes sur le chômeur qui ne veut pas travailler. Ce faisant, il ouvre la voie à des mesures encore plus régressives de la part de la majorité sénatoriale.

M. le président.  - Amendement n°47, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 1, première phrase, alinéa 11 et alinéa 12, première phrase

Remplacer le mot :

concertation

par le mot :

négociation

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - La droite sénatoriale se pose en défenseure du paritarisme, mais prévoit une simple concertation des partenaires sociaux, qui n'est qu'une mascarade : on échange des propositions et à la fin, le Gouvernement décide. Ce dernier invoque l'urgence, mais c'est lui qui n'a envoyé la lettre de cadrage que le 29 juin !

Ce n'est pas le mode de fonctionnement plus horizontal souhaité par le Président de la République. Le Gouvernement se comporte comme un banquier qui viendrait à notre domicile nous fixer les règles d'utilisation des radiateurs.

M. le président.  - Amendement n°21 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 1, première phrase

Remplacer le mot : 

concertation

par le mot :

négociation

Mme Émilienne Poumirol.  - Cet amendement vise à remettre la négociation, et non une concertation dénuée de sens, au centre de notre démocratie sociale. Le paritarisme et le dialogue social supposent un cadre d'échanges reconnu. Telle est la philosophie qui a présidé à la mise en place de l'assurance chômage. Les rapporteurs ont fait un premier pas en ce sens en supprimant la lettre de cadrage.

Nous exigeons une négociation, y compris pendant la période de carence à venir.

M. le président.  - Amendement identique n°90, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Le Gouvernement entend faire de la concertation le principe qui guide la décision publique. Or c'est la négociation qui garantit le paritarisme et la protection de chacun.

En s'autorisant à prendre par décret de nouvelles règles sans concertation, le Gouvernement peut outrepasser tant les oppositions à sa lettre de cadrage que demain à son document de support de la concertation...

Rousseau rappelle dans le Contrat social que « Le peuple, soumis aux lois, en doit être l'auteur ».

La prise en compte par des procédures démocratiques des intérêts des travailleurs est primordiale pour la mise en oeuvre de mesures protectrices. La négociation avec les partenaires sociaux doit avoir lieu.

M. le président.  - Amendement n°22 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 1, première phrase

Après le mot :

interprofessionnel 

insérer les mots :

et la transmission au Parlement par le Gouvernement d'un rapport réalisé conjointement par le Conseil d'analyse économique, le Conseil d'orientation pour l'emploi et le Commissariat général à la stratégie et à la prospective, évaluant les impacts et l'efficacité de la réforme de l'assurance chômage menée entre 2018 et 2021

Mme Monique Lubin.  - Cet amendement de repli vise à insister sur la nécessité d'une évaluation objective et exhaustive de la réforme.

M. le président.  - Amendement n°93, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Alinéa 1, après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Les mesures d'application déterminées par ce décret ne peuvent avoir pour effet d'entraîner une différence de traitement des travailleurs remplissant les critères prévus à l'article L. 5422-1 du même code sur la base de leur lieu de résidence ou de travail.

Dans son support de concertation, le ministère de travail envisage une régionalisation sur l'exemple du régime canadien établi en 1977.

Aggravé par une augmentation de la durée d'affiliation et une baisse de la durée d'allocation, celui-ci n'a eu pour effet que de faire chuter le nombre de personnes éligibles à l'assurance chômage, de 87 % en 1989 à 42 % en 1997. L'iniquité de la régionalisation est vertement critiquée au Canada.

En France, le nombre d'emplois doit être rapporté au nombre de demandeurs d'emploi. Rien ne devrait justifier une inégalité de traitement entre les régions - cela ne devrait pas même être à l'étude !

Cet amendement exclut la possibilité d'inclure la régionalisation par décision unilatérale.

M. le président.  - Amendement n°50, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 1, seconde phrase

Remplacer la date :

31 août

par la date :

1er février

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Cet amendement de repli ramène la fin de validité du décret du 31 août au 1er février. La prise de contrôle par l'État n'est pas une petite décision. Le modèle social issu de l'après-guerre est détricoté petit à petit dans ses fondements. La démocratie sociale était la réponse française à la nécessité d'associer davantage les travailleurs aux décisions qui les concernent. Cela change, si l'État reprend la main. Philosophiquement, l'indemnisation est un droit lié à la mutualisation des cotisations, pas une aide sociale.

Mme Émilienne Poumirol.  - Exactement !

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Cela ne relève pas de l'assistance, offerte au titre de la solidarité nationale.

À force de petites réformes, on finit par trouver illégitime ce qui est un droit et on fait reculer l'idée même que se font les salariés de leur reconnaissance par la société française. (Mmes Émilienne Poumirol et Angèle Préville applaudissent.)

M. le président.  - Amendement n°7 rectifié, présenté par M. Capus, Mme Mélot, MM. Chasseing, Grand, Guerriau et Lagourgue, Mme Paoli-Gagin et MM. Verzelen et Wattebled.

Alinéa 1, seconde phrase

Remplacer le mot :

août

par le mot :

décembre

Mme Colette Mélot.  - Nous proposons un compromis : l'allongement du délai prévu par le Gouvernement vise à mieux prendre en compte les effets de ces règles. Il est judicieux de conserver un délai suffisamment long pour collecter les données et prendre des décisions éclairées le moment venu.

M. le président.  - Amendement n°23 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Les mesures d'application prises par décret en Conseil d'État en application du premier alinéa ne peuvent conduire à réduire les recettes générées par la majoration du taux de contribution de chaque employeur prévue au 1° de l'article L. 5422-12 dudit code ou à augmenter la perte de recettes générées par la minoration du taux de contribution de chaque employeur prévue au 1° du même article.

Mme Monique Lubin.  - Cet amendement de repli introduit une clause de sécurité selon laquelle le chèque en blanc accordé au Gouvernement ne saurait avoir pour effet une réduction du bonus-malus concernant le recours aux contrats précaires.

M. le président.  - Amendement n°108, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Les dispositions prévues au premier alinéa du présent article ne concernent pas les salariés et contrats de travail mentionnés au a du 1° de l'article L. 1242-2 dudit code. Les concernant, le décret en Conseil d'État est pris après négociation avec les organisations professionnelles et syndicales les représentant.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Depuis la dernière réforme de l'assurance chômage, on constate des effets négatifs sur les saisonniers. Si l'allongement de 4 à 6 mois de la durée minimale d'affiliation a déjà réduit leurs droits, le support de concertation poursuit cette fuite en avant.

Le calcul à la baisse du salaire journalier de référence diminue également l'attractivité du secteur, comme en témoigne la pénurie observée cet été. Alors que les dures conditions de travail ne sont guère prises en compte dans la rémunération, cette réforme est une double peine. Avec cet amendement, les négociations devront tenir compte de la spécificité de ces travailleurs.

M. le président.  - Amendement n°67, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Le dernier alinéa de l'article L. 5422-20 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Lorsque la validité des mesures d'application ainsi déterminées expire sans qu'un nouvel accord n'ait été conclu dans les conditions prévues au premier alinéa, les mesures d'application du dernier accord relatif à l'assurance chômage conclu dans ces conditions s'appliquent jusqu'à ce qu'un nouvel accord soit conclu entre les organisations représentatives d'employeurs et de salariés. Les partenaires sociaux proposent au Gouvernement des mesures pour que le changement n'entraîne ni de baisse de l'indemnisation, ni de diminution de la durée des droits ouverts pour les assurés. » ;

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Le fonctionnement actuel de l'assurance chômage permet au Gouvernement de se passer des organisations syndicales et patronales : si les négociations achoppent, le Gouvernement peut appliquer les réformes que le patronat lui souffle à l'oreille. C'est l'aboutissement de la loi sur la liberté de choisir son avenir professionnel, à laquelle nous nous sommes opposés en 2018.

Ce projet de loi transfère directement la gestion de l'assurance chômage à l'Unédic. Notre amendement propose de revenir automatiquement à la dernière convention lorsque le régime de carence expire : cela empêchera le Gouvernement de jouer la montre.

M. le président.  - Amendement n°49, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Après l'alinéa 3

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° L'article L. 5422-1 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« ....  -  Le régime d'assurance chômage est fondé sur le principe de solidarité face au risque de privation d'emploi. Il assure la continuité du salaire d'activité et garantit un niveau de vie satisfaisant aux travailleurs privés d'emploi. » ;

II.  -  Alinéas 11 à 13

Supprimer ces alinéas.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Selon Jean-Pascal Higelé, maître de conférences en sociologie de l'université de Lorraine, la réforme de l'assurance chômage est un déni de solidarité. Notre amendement inscrit dans la loi le caractère assurantiel de l'assurance chômage et sa vocation à sécuriser le revenu des travailleuses et travailleurs.

Des taux différents selon les entreprises ou les secteurs risqueraient de délégitimer toute solidarité : les titulaires d'emplois stables refuseraient de payer pour les plus précaires et le chômage deviendrait un risque individuel. Il faut renouer avec la logique de solidarité salariale interprofessionnelle.

M. le président.  - Amendement n°87, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Alinéas 11 à 13

Supprimer ces alinéas.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - L'article premier modifié par la commission présente une avancée pour le paritarisme au milieu d'un vaste projet antisocial : la suppression de la lettre de cadrage instaurée en 2018, qui permettait au Gouvernement de faire échouer les négociations et d'agir par voie réglementaire.

Pourtant, l'article instaure à la place un document d'orientation dont les objectifs sont flous. Il arrive au demeurant bien tard puisque le Gouvernement a déjà envoyé sa lettre de cadrage, à laquelle il ressemble fort... Nous proposons donc de supprimer ces alinéas.

M. le président.  - Amendement n°48, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 12, après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Le document d'orientation ne peut avoir pour effet d'entraîner une différence de traitement des travailleuses et des travailleurs remplissant les critères prévus à l'article L. 5422-1 du même code sur la base de leur lieu de résidence ou de travail.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Nous refusons la modulation des conditions d'indemnisation selon les territoires. Où va-t-on s'arrêter ? Au sein des régions, les situations pourraient également être jugées hétérogènes : il y a plus de chômeurs en Seine-Saint-Denis qu'au centre de Paris !

Au moment où nous avons besoin au contraire d'une République solide, où les citoyens se sentent traités à égalité, cette mesure est inacceptable, injuste et inefficace. Nous ferions mieux de réfléchir à des politiques d'aménagement du territoire adaptées.

M. le président.  - Amendement n°8 rectifié, présenté par M. Capus, Mme Mélot, MM. Chasseing, Grand, Guerriau et Lagourgue, Mme Paoli-Gagin et MM. Verzelen et Wattebled.

Alinéa 13

Compléter cet alinéa par les mots :

et garantir l'équilibre financier du régime

M. Jean-Louis Lagourgue.  - Le retour à une gestion paritaire du régime a le mérite de mettre les partenaires sociaux en situation de responsabilité. Concrètement, cela se matérialise par le retour à un document d'orientation remplaçant la lettre de cadrage.

Mais cela ne répond pas à l'impératif de maintenir l'équilibre du régime, dont dépend l'avenir du paritarisme de gestion. Cet amendement précise que les éléments de diagnostic, les objectifs poursuivis et les principales options possibles présentées dans le document d'orientation doivent également viser à garantir l'équilibre financier du régime.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Les amendements nos85, 18 rectifié, 76 rectifié et 67 tendent à ce qu'un accord continue d'être applicable jusqu'à ce qu'un nouvel accord soit conclu. L'amendement n°85 supprime en plus le décret de carence. Ces amendements rendraient la procédure inopérante. Nous risquons un blocage de la gouvernance et l'impossibilité de fixer les règles par décret de carence en cas d'échec des négociations. Cela pénaliserait l'indemnisation des demandeurs d'emploi. Avis défavorable.

L'amendement n°84 supprime le premier alinéa, or un décret est nécessaire pour sécuriser les droits dès le mois de novembre : avis défavorable.

Les amendements nos77 rectifié et 19 rectifié prévoient que le décret ne puisse prolonger que les règles en vigueur. Pour autant, de nouvelles règles comme la contracyclicité sont nécessaires : avis défavorable.

L'amendement n°20 rectifié impose que le décret soit pris après transmission du rapport aux partenaires sociaux : c'est déjà prévu dans le code du travail ; retrait ou avis défavorable.

Avis défavorable aux amendements identiques nos21 rectifié et 90, ainsi qu'aux amendements nos86, 47 et 108, qui prévoient le terme de négociation plutôt que concertation, car la négociation conduit à un accord.

L'amendement n°22 rectifié prévoit la transmission d'un rapport avant la prise du décret. Ce n'est pas nécessaire, car les effets de la réforme ne sont pas encore pleinement connus. Le document de concertation est plus adapté : avis défavorable.

L'amendement n°93 exclut la possibilité pour le décret de prendre des mesures différenciées selon le lieu de travail ou de résidence. La contracyclicité des règles d'indemnisation est souhaitable : avis défavorable.

La commission a déjà avancé du 31 décembre au 31 août la date de fin de validité du décret : le 1er février serait trop prématuré. Avis défavorable à l'amendement n°50.

A contrario, l'amendement n°7 rectifié rétablit le 31 décembre : nous ne souhaitons pas nous écarter de la gestion paritaire pour une durée excessive. Avis défavorable.

L'amendement n°23 rectifié exclut la possibilité pour le décret de fixer des règles sur le bonus-malus : il est actuellement neutre financièrement et la commission entend le recentrer sur les contrats courts. Il ne semble donc pas nécessaire : avis défavorable.

L'amendement n°49, qui inscrit notamment des dispositions déclaratoires, semble inopérant, car trop général. Avis défavorable.

Avis défavorable à l'amendement n°87 contraire à la position de la commission.

La précision apportée par l'amendement n°48 n'est pas souhaitable : le document d'orientation ne doit pas contraindre la négociation.

Enfin l'amendement n°8 rectifié précise utilement le contenu du document d'orientation sur l'équilibre financier. Avis favorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Nos avis sont les mêmes à une exception près : avis défavorable à l'amendement n°8 rectifié, qui va plus loin que la commission.

Concernant le choix de la contracyclicité entre concertation et négociation, l'avis du Conseil d'État du 5 septembre encourage le Gouvernement, en application du préambule de la Constitution de 1946, à organiser une concertation des partenaires sociaux tout en nous dispensant de la négociation. Le but est d'aboutir avant la fin 2022 pour que la contracyclicité intervienne dès début 2023.

La réforme de l'assurance chômage a été définie en 2019, mais appliquée de fait à partir du second semestre 2021 en raison du covid : c'est pourquoi il y a peu d'études et nous demandons sa prorogation de quatorze mois. La Dares a déjà mis en place des procédures d'évaluation pour 2023.

Je conviens, madame Lienemann, que le préambule de 1946 prévoit la consultation des salariés sur les conditions de travail, mais ce n'est pas le cas pour l'assurance chômage, puisque son cadre n'a été fixé qu'en 1958.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - L'esprit est le même !

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Je le dis par esprit de précision et non de contradiction. Madame Lubin, monsieur Chantrel, ce n'est pas la première fois que les règles de l'assurance chômage sont fixées par décret : ce fut déjà le cas en novembre 2000.

Madame Poncet Monge, dans le secteur de l'hôtellerie-restauration, plus fort pourvoyeur d'emplois saisonniers, à l'été 2022 il y avait 5 % d'emplois saisonniers de plus qu'en 2019 : nous sommes loin de la grande désertion.

L'amendement n°85 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos18 rectifié, 76 rectifié, 84 et 86.

M. Daniel Chasseing.  - L'amendement n°77 rectifié reprend l'article premier qui indique que le Gouvernement organise une concertation des partenaires sociaux. Je ne vois pas en quoi cet amendement remet en cause le travail de la commission : je le voterai.

L'amendement n°77 rectifié n'est pas adopté, non plus que les amendements nos19 rectifié, 20 rectifié et 47, non plus que les amendements identiques nos21 rectifié et 90, non plus que les amendements nos22 rectifié, 93, 50, 7 rectifié, 23 rectifié, 108, 67, 49, 87 et 48.

L'amendement n°8 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°51, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Au premier alinéa de l'article L. 5422-20, les mots : « des articles de la présente section, » sont supprimés ;

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - La réforme de 2019 a entraîné une baisse de 17 % de l'allocation chômage pour 1,15 million d'allocataires et jusqu'à 40 % pour 400 000 d'entre eux en modifiant le calcul du salaire journalier de référence.

Les allocations chômage prennent désormais en compte les jours non travaillés : elles ne sont donc plus liées au salaire. Selon le ministre du travail, entre 25 % et 42 % des privés d'emploi ne font pas valoir leurs droits, ce qui est accentué par le durcissement des règles d'indemnisation.

Jusqu'alors, un jour travaillé ouvrait droit à un jour d'indemnisation. Le projet du Gouvernement remet cela en cause. C'est pourquoi, par cet amendement, nous proposons l'abrogation de la réforme de 2019.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Nous avons fait le choix de proroger le délai de carence. Mais sans évoquer le fond, il y a aussi un problème d'imputation : votre amendement ne répond pas à son objet. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°51 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°52 rectifié, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 7

Rédiger ainsi cet alinéa :

5° L'article L. 5422-25 du code du travail est abrogé ;

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Cet amendement revient sur une disposition de la loi Avenir professionnel de 2018, qui imposait des mesures d'économies sur l'assurance chômage en cas d'écarts significatifs entre la trajectoire financière du régime d'assurance chômage et la trajectoire financière prévue par l'accord. Nous sommes en situation de déresponsabilisation des partenaires sociaux, avec la puissance publique comme gendarme.

Or, face aux sujets difficiles supposant un compromis, les partenaires peuvent se dispenser d'assumer le nécessaire compromis, car l'État tranchera.

M. le président.  - Amendement identique n°88, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Le Première ministre avait demandé aux partenaires de négocier des mesures d'économies en raison du déficit de l'Unédic, mais celui-ci a été creusé par le désengagement progressif de l'État et une participation plus importante au financement de Pôle emploi - qui représente 11 % de ses recettes. La contribution de l'Unédic dépasse désormais celle de l'État...

La santé financière de l'Unédic n'est pas un critère pertinent de négociation des accords, et on ne peut se passer de l'analyse des causes du déficit. Nous proposons de supprimer ces dispositions de rationnement budgétaire, prétexte à de nouveaux décrets pris contre l'avis des partenaires sociaux.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Tout en partageant certains de vos propos - il y aurait du ménage à faire sur ce qui relève du budget de l'Unédic  et sur le paritarisme -, une gestion paritaire ne supprime pas le droit de regard de l'État. Il faut conserver une règle d'or, l'État est le garant de l'équilibre financier. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

Les amendements identiques nos52 rectifié et 88 ne sont pas adoptés.

L'article premier, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE PREMIER

M. le président.  - Amendement n°13 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 5332-1 du code du travail, il est inséré un article L. 5332-1-... ainsi rédigé :

« Art. L. 5332-1-.... - Tout employeur de droit privé a obligation de transmettre ses offres d'emploi à l'institution publique mentionnée à l'article L. 5312-1. »

Mme Monique Lubin.  - Pôle emploi n'est destinataire que de 15 % des offres d'emploi : nous voulons rétablir l'obligation de diffusion de l'intégralité des offres par ce canal. C'est d'autant plus nécessaire depuis la réforme de 2019 qui rend possible la radiation en cas de refus d'offre considérée comme « raisonnable ». Ainsi on radie sur un motif de refus d'offre alors qu'une faible part des offres sont diffusées sur le site...

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Oui, l'obligation existait auparavant. Cependant, depuis sont apparues les plateformes de recherche d'emploi, comme leboncoin. Pôle emploi ne nous a pas attendus pour récupérer les offres sur celles-ci ; en Isère, pas moins de 100 plateformes sont ainsi agrégées par Pôle emploi, ce qui offre un panel déjà satisfaisant. L'amendement est péremptoire et inopérant : avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°13 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°24 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 5422-1 du code du travail est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« ....  -  Le régime d'assurance chômage est fondé sur le principe de solidarité face au risque de privation d'emploi. Il assure la continuité du salaire d'activité et garantit un niveau de vie satisfaisant aux travailleurs privés d'emploi. »

M. Yan Chantrel.  - L'amendement inscrit dans la loi les objectifs de l'assurance chômage, pour contrer la dérive insidieuse orchestrée par le Gouvernement qui en modifie la nature par décret. Nous inscrivons donc son caractère assurantiel dans la loi.

M. le président.  - Amendement n°25 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 5422-1 du code du travail est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« ....  -  Le régime d'assurance chômage est fondé sur le principe de solidarité face au risque de privation d'emploi. Il verse un revenu de remplacement du salaire et garantit un niveau de vie satisfaisant aux travailleurs privés d'emploi. »

Mme Émilienne Poumirol.  - Défendu.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Ces amendements très proches me semblent assez vagues et généraux, sans portée réelle. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°24 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°25 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°2 rectifié, présenté par M. Paccaud, Mme Drexler, MM. Belin et Charon, Mme Imbert, MM. Tabarot et Saury, Mme Dumont, MM. Chasseing, Favreau, Meurant et Burgoa, Mme Estrosi Sassone, MM. Frassa, Regnard, Cadec, Panunzi et Bazin, Mme Garriaud-Maylam, M. Guerriau, Mme Eustache-Brinio, MM. Savary, Sautarel et Chatillon, Mme Perrot, MM. Hingray, Pointereau, Houpert, Chaize et Reichardt, Mme Borchio Fontimp et M. Laménie.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 2 du chapitre VI du titre II du livre IV de la cinquième partie du code du travail est complétée par un article L. 5426-... ainsi rédigé :

« Art. L. 5426-....  -  Le revenu de remplacement est supprimé de moitié par Pôle emploi dans le cas où le demandeur d'emploi refuse, sans motif légitime, une offre raisonnable d'emploi mentionnée à l'article L. 5411-6-2.

« La radiation de la liste des demandeurs d'emploi telle que mentionnée au L. 5412-1 ne peut être consécutive à la suppression partielle du revenu de remplacement telle que mentionnée au premier alinéa.

« Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'exécution du présent article. »

M. Olivier Paccaud.  - La Déclaration universelle des droits de l'homme (DUDH) de 1948 proclame le droit au travail. Si le plein emploi est l'objectif du Gouvernement, de nombreuses personnes restent encore trop loin de l'emploi. Le projet personnalisé d'accès à l'emploi a été créé il y a quelques années, avec l'offre raisonnable d'emploi, fondée sur les critères de proximité géographique, de salaire et de nature de l'emploi.

Actuellement, la radiation peut être prononcée dès deux offres raisonnables d'emploi refusées. Se pose le cas d'une seule offre refusée sans motif valable : nous entendons inciter le demandeur d'emploi à revenir à l'emploi en réduisant de moitié son indemnité dans un tel cas, sans stigmatiser.

L'offre raisonnable, c'est le demandeur qui la définit : étonnant de refuser ce qu'on veut... De plus, comme l'a évoqué Philippe Mouiller, il y a des besoins importants de main-d'oeuvre : répondons aux attentes des chefs d'entreprise. (M. Vincent Segouin approuve.)

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Le problème de l'offre raisonnable d'emploi se pose : la loi de 2007, défendue par Catherine Procaccia, pose ce qui semble être du bon sens, mais en réalité cela ne fonctionne pas. Nous sommes passés de trois à deux refus, mais que nous disent les statistiques ? En 2016, les refus d'offres raisonnables d'emploi ne représentaient que 0,02 % des motifs de radiation... Dans la Somme, Laurent Somon a constaté qu'il n'y avait que sept refus d'offre sur 2 383 radiations. Les absences aux rendez-vous sont de loin un motif plus fréquent de radiation.

Nous avons maintenu une demande de rapport de l'Assemblée nationale, à l'article 6, sur les offres raisonnables d'emploi, pour examiner les raisons de ce mauvais fonctionnement. Retrait, sinon avis défavorable en l'attente de plus d'éléments.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - La rapporteure l'a dit, la radiation pour refus d'une deuxième offre est marginale : quelques dizaines par an, car la définition de l'offre raisonnable est difficile à établir. Je m'associe à la demande de retrait et renvoie également à l'article 6.

Mme Monique Lubin.  - Qu'est-ce qu'une offre raisonnable d'emploi ? Qui en fixe les critères ? Nous avons tous reçu des témoignages de chômeurs à propos d'offres inacceptables qui leur ont été soumises : un emploi à mi-temps à 100 km du domicile par exemple. Mais certains considèrent que lorsqu'on n'a pas d'emploi, on doit accepter toute offre. Je partage l'avis du ministre -  une fois n'est pas coutume... Attendons de voir le prochain rapport, mais il ne mettra sûrement pas fin à la subjectivité dans ce domaine.

M. André Reichardt.  - J'ai cosigné cet amendement. C'est une offre raisonnable de vote, frappée au coin du bon sens. Cela ne marche pas, nous disent la rapporteure et le ministre. Mais l'amendement le signale clairement : l'offre raisonnable a fait l'objet d'un accord sur une liste de critères dans le projet personnalisé d'accès à l'emploi du chômeur. Il est temps de prendre des mesures contre les revirements de personnes qui acceptent des critères pour les refuser ensuite. Si le chômeur a indiqué au préalable ce qu'il souhaite, qu'il l'accepte !

Mme Nadège Havet.  - Cela existe déjà. Le conseiller Pôle emploi peut suspendre les allocations pendant quinze jours pour défaut de recherche d'emploi.

M. Thierry Meignen.  - Il ne le fait pas !

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Au lieu de nous focaliser sur les chômeurs et sur une infime minorité de tricheurs, penchons-nous sur les sujets prioritaires : le refus de la négociation de branche au profit de la négociation d'entreprise, par exemple. Si nous étions revenus aux branches, nous aurions certainement un meilleur rapport au travail. (Mme Raymonde Poncet Monge applaudit.)

M. Olivier Paccaud.  - Je m'associe à la demande de rapport. Peut-être faut-il clarifier les choses, peut-être les conseillers n'agissent-ils pas partout de la même façon. Mais il y a beaucoup de cas où la recherche d'emploi a véritablement été co-construite. Mettons les personnes face à leurs responsabilités : il y a des droits et des devoirs.

Madame Lienemann, vous parlez de chasse au chômeur feignant. Permettez-moi, avec quelque malice, de vous dire que je suis du côté de votre candidat, Fabien Roussel, qui se dit du côté de la France du travail et non de la France des allocations... (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains)

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Nous aussi nous approuvons les propos de Fabien Roussel. (Exclamations amusées à droite) Celui-ci ne met aucunement en cause le droit à l'indemnisation. Nous défendons le travail, mais également les victimes du chômage ainsi stigmatisées, qui ont cotisé et ont donc droit à ces allocations. (Marques d'ironie à droite)

L'amendement n°2 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°14 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 5426-8-1 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La répétition des sommes versées par erreur n'exclut pas que le demandeur d'emploi soit fondé à réclamer la réparation du préjudice qui a pu lui être causé par la faute de celui qui les lui a versées. »

Mme Monique Lubin.  - Le 30 mai 2000, la Cour de cassation a estimé que la caractérisation de la négligence fautive de l'organisme chargé de servir les allocations donnait droit au demandeur d'emploi obligé de rembourser les sommes indûment perçues de solliciter réparation. Le Défenseur des droits est toujours saisi de dossiers dans lesquels Pôle emploi a refusé de verser cette réparation. Cet amendement y pourvoit et propose de fixer cette jurisprudence dans la loi.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Il n'est pas utile d'inscrire cette jurisprudence dans le code du travail : le principe de la responsabilité civile est de toute façon inscrit dans la loi. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°14 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°31 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre VI du titre II du livre IV de la cinquième partie du code du travail est complété par une section ... et quatre articles ainsi rédigés :

« Section ...

« Garanties procédurales suite à une décision concernant le demandeur d'emploi

« Art. L. 5426-10.  -  La personne inscrite ou qui demande son inscription sur la liste mentionnée à l'article L. 5411-1 du code du travail peut contester toute décision individuelle la concernant prise par une institution mentionnée à l'article L. 5311-2, notamment toute mesure à caractère de sanction et toute décision en rapport avec les allocations, aides ainsi que toute autre prestation versées par Pôle emploi pour son propre compte, pour le compte de l'organisme chargé de la gestion du régime d'assurance chômage mentionné à l'article L. 5427-1, pour le compte de l'État ou des employeurs mentionnés à l'article L. 5424-1, au choix concomitamment devant le juge compétent et par la procédure de médiation mentionnée à l'article R. 2123-10 du code de la justice administrative.

« Art. L. 5426-11.  -  Le juge judiciaire est compétent des recours formulés contre les décisions individuelles au sens de l'article L. 5426-10.

« Art. L. 5426-12.  -  Les recours formulés contre les décisions individuelles au sens de l'article L. 5426-10 sont suspensifs.

« Art. L. 5426-13.  -  Les décisions individuelles prises à l'encontre des dispositions des articles L. 5426-10 à L. 5426-12 sont nulles et non avenues. »

Mme Monique Lubin.  - Il arrive souvent que le demandeur se trouve dépourvu face à une décision prise à son encontre, d'autant que le recours n'est pas suspensif. Il faut donc introduire des droits procéduraux basiques, dont la possibilité d'aller devant le juge et le médiateur en même temps, le caractère suspensif du recours ou la nullité des décisions ne respectant pas ces garanties. Ces garanties seraient de nature à favoriser un meilleur traitement administratif des demandeurs d'emploi, à réduire leur anxiété administrative et à améliorer leur insertion professionnelle et sociale.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Nous connaissons tous des demandeurs d'emploi en difficulté. Néanmoins, il y a déjà des garanties procédurales, des médiations et des recours en justice possibles. N'alourdissons pas inutilement le processus. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°31 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°15 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 verse automatiquement à son bénéficiaire le différentiel des allocations, aides ainsi que de toute autre prestation indûment minorées versées pour son propre compte, pour le compte de l'État, du fonds de solidarité prévu à l'article L. 5423-24 ou des employeurs mentionnés à l'article L. 5424-1.

L'action en versement de l'allocation d'assurance indûment minorée se prescrit par trois ans.

Mme Monique Lubin.  - Cet amendement instaure un versement automatique des moins-perçus aux allocataires, selon un dispositif miroir de celui appliqué pour les trop-perçus.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Préciser que les allocations doivent être versées est une lapalissade... L'amendement oblige aussi Pôle emploi à anticiper ses propres erreurs : c'est peu opérant. Retrait ou avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis. Dans la pratique, le versement par Pôle emploi est bien automatique, y compris lorsqu'une pièce manquante est versée au dossier.

L'amendement n°15 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°26 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Il est constitué un Conseil non permanent d'orientation de l'assurance chômage. Ce Conseil est indépendant. Il a pour objectif de récolter des données sur l'assurance chômage, le public qu'elle indemnise, ses recettes, ses dépenses, ses perspectives financières, de produire des préconisations améliorant l'assurance chômage. Il fournit un rapport annuel appuyé sur des données publiques de manière à éclairer le débat public.

II.  -  Ce Conseil est composé majoritairement de représentants des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel. Il est également composé de dix députés et dix sénateurs désignés respectivement par le Président de l'Assemblée nationale et le Président du Sénat, issus de chaque groupe parlementaire, de manière à assurer une représentation équilibrée des groupes politiques. Les ministères en charge de la production des données mentionnées au I du présent article sont également représentés. Un décret pris après l'avis de l'union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce précise la composition du Conseil.

III.  -  Pour mener à bien les missions mentionnées au I du présent article, le Conseil peut mener toutes auditions qu'il juge utiles. Tous les renseignements et documents d'ordre financier et administratif qu'il demande, y compris tout rapport établi par les organismes et services chargés du contrôle de l'administration, réserve faite des sujets à caractère secret concernant la défense nationale et la sécurité extérieure de l'État et du respect du secret de l'instruction et du secret médical, doivent lui être fournis.

IV.  -  Le Conseil est dépourvu de la personnalité juridique.

V.  -  Les membres du Conseil ne perçoivent aucune forme de rémunération distincte.

VI.  -  Le Conseil ne dispose d'aucun moyen public de fonctionnement.

Mme Monique Lubin.  - Cet amendement crée un Conseil d'orientation de l'assurance chômage. Le débat public est biaisé par le manque de données, ce qui conduit à envisager des propositions -  comme la dégressivité de l'allocation  - que la recherche économique estime inefficaces pour inciter le demandeur d'emploi à trouver un emploi.

Ce conseil d'orientation, inspiré du conseil d'orientation des retraites, éclairerait le débat par un rapport annuel.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Le recueil et le traitement des données sont déjà assurés par la Dares et l'Unédic. De plus, les négociations ont vocation à se tenir dans un cadre paritaire, sachant que le Parlement en est informé. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Une telle instance peut être utile, notamment sur les perspectives financières de l'Unédic. Mais avis défavorable, parce que cela relève de la négociation entre les partenaires sociaux prévue pour le premier semestre 2023.

Mme Monique Lubin.  - Mon amendement est une idée intéressante, je le maintiens.

L'amendement n°26 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°81 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac, Cabanel, Fialaire et Gold, Mmes Guillotin et Pantel et MM. Requier et Roux.

Après l' article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport présentant les mesures qui permettraient de lutter contre le non-recours aux droits en matière d' assurance chômage.

M. Éric Gold.  - La loi du 5 septembre 2018 prévoit un rapport sur les conséquences du non-recours à l'assurance chômage. Ce rapport, réalisé par la Dares, estime le non-recours de 25 à 42 %, soit entre 390 000 et 690 000 personnes, essentiellement des salariés en contrat court. Il faudrait que le Gouvernement propose des pistes d'amélioration.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - L'étude de la Dares, qui nous a été communiquée in extremis, est intéressante. Nous manquons de données sur l'assurance chômage.

Nous avons néanmoins déjà maintenu deux rapports dans ce texte. Avis défavorable à ce rapport supplémentaire ; mais, monsieur le ministre, donnez-nous davantage de chiffres.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Le rapport sur le non-recours transmis au Parlement avec retard, le 29 septembre, est une vraie base de travail. Derrière le non-recours, il y a parfois un choix, par exemple du demandeur qui vient d'achever un CDD et sait qu'il va en commencer un autre ; de plus, le taux de non-recours est à peu près le même que pour d'autres prestations. Retrait ?

L'amendement n°81 rectifié est retiré.

ARTICLE PREMIER BIS AA

M. le président.  - Amendement n°33 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

M. Yan Chantrel.  - La logique de culpabilisation des chômeurs est délétère, de même que le principe de contracyclicité qui fait varier l'indemnité en fonction de la conjoncture. C'est pourquoi nous souhaitons supprimer cet article.

M. le président.  - Amendement identique n°70, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - La contracyclicité est injuste. Vous nous avez vanté la précarité ; au nom de quoi imposerions-nous au salarié d'accepter un CDI plutôt qu'un CDD ?

Monsieur le ministre, vous avez évoqué une augmentation de CDI de 40 % entre 2021 et 2022, mais il y avait la pandémie en 2021... Par rapport à février 2020, ce qui est plus juste, l'augmentation n'est que de 12 %.

M. le président.  - Amendement identique n°79 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac, Cabanel, Fialaire, Gold et Guiol, Mme Pantel et M. Roux.

M. Éric Gold.  - Cet article ne prévoit pas de garde-fous pour vérifier si le refus du salarié est justifié ou non.

M. le président.  - Amendement identique n°103, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Quel florilège de propositions pour contraindre les chômeurs à retourner au travail ! Mais la vague récente de démissions met en évidence une aspiration à un emploi de qualité. Cet article s'inscrit dans le soupçon permanent ; le demandeur d'emploi, addict aux prestations, allergique au travail, refuserait les offres d'emploi et vivrait aux dépens des travailleurs... Ce récit, essentiellement idéologique, progresse à force d'être martelé. Cela n'en fait pas une vérité.

Selon l'OFCE, 8 % des allocataires de l'assurance chômage ne rechercheraient pas vraiment d'emploi. Or ils sont déjà rattrapés par les contrôles et les radiations. Selon l'Unédic, sept allocataires sur dix sont indemnisés pendant moins d'un an. Cet article n'est qu'un affichage politique et idéologique. (Marques d'agacement à droite) C'est nous qui devrions être agacés !

Cet article n'ajoute rien, sinon de rendre les chômeurs responsables de leur situation.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Nous avons déjà discuté de la contracyclicité du montant des allocations. Quant à la radiation pour refus répété d'offre de CDI, je vous renvoie à l'essence même du droit à l'allocation chômage : elle est réservée aux travailleurs aptes au travail qui recherchent un emploi, et dont la privation d'emploi est involontaire.

Un salarié qui refuse un CDI au terme d'un CDD peut déjà se voir privé de prime de précarité. Quand on refuse un CDI, est-on en privation d'emploi involontaire ? Non, c'est un choix de vie.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio et M. Laurent Burgoa.  - Exactement !

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Ce n'est pas à nous de stigmatiser la préférence des CDD sur les CDI ; mais on ne peut pas faire financer ces choix de vie par le système assurantiel. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) C'est ce qui motive notre avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Cet article a deux objets très distincts : inscrire le principe de contracyclicité, auquel le Gouvernement est favorable, et supprimer l'allocation d'aide au retour à l'emploi (ARE) en cas de refus à trois reprises d'un CDI à la fin d'un CDD, ce à quoi nous sommes défavorables. Avis défavorable à l'amendement, car nous souhaitons conserver le premier élément.

Mme Monique Lubin.  - J'aimerais savoir sur quelles statistiques vous vous appuyez...

M. Laurent Burgoa.  - La réalité !

Mme Monique Lubin.  - La réalité, vous la voyez depuis votre siège ? (M. Vincent Segouin se récrie.) J'ai parfois l'impression d'être dans une autre enceinte que le Sénat...

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Où ça ?

Mme Monique Lubin.  - Combien de demandeurs d'emploi refusent un CDI après trois CDD ? Nous ne pouvons inscrire dans le marbre des impressions ou des ouï-dire.

Prenez un demandeur d'emploi dont l'entreprise a fermé. Des gens qui ont cinquante ans, trente ans de carrière et qui, au bout de quelques mois, ne retrouvent pas un emploi correspondant à leur emploi précédent, prennent un emploi moins bien rémunéré, moins intéressant. Ils sont en droit de refuser le CDI qu'on va leur proposer, car ils aimeraient retrouver les conditions d'avant. Qui sommes-nous pour mettre en difficulté des gens dont nous ne connaissons pas la vie ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. André Reichardt.  - Madame la rapporteure, vous reprochiez tout à l'heure à M. Paccaud de formuler une proposition inopérante sur l'offre raisonnable d'emploi. Pouvez-vous certifier que votre proposition sera plus efficace ? Cela me paraît être une usine à gaz également.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Rappelons que cette personne s'est vu proposer trois fois un CDD, et que les contrats courts coûtent beaucoup plus cher à l'assurance chômage ! Je propose qu'on oblige les employeurs à proposer trois fois un CDI.

Les amendements identiques nos33 rectifié, 70, 79 rectifié et 103 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°62, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Rédiger ainsi cet article :

Le code du travail est ainsi modifié :

1° L'article L. 1242-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 1242-2.  -  Le contrat de travail ne peut être conclu pour une durée déterminée que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire et seulement dans les cas suivants :

« 1° Remplacement d'un salarié en cas d'absence ou de suspension de son contrat de travail et pour pourvoir directement le poste de travail du salarié absent ;

« 2° Accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise. Au titre de ce motif, le nombre de salariés occupés en contrat de travail à durée déterminée ne peut excéder 10 % de l'effectif moyen occupé au cours de l'année civile précédente dans les entreprises d'au moins onze salariés. Le nombre obtenu est arrondi à l'unité supérieure. En cas de dépassement de ce taux, les contrats de travail excédentaires et par ordre d'ancienneté dans l'entreprise sont réputés être conclus pour une durée indéterminée ;

« 3° Emplois à caractère saisonnier de courte durée définis par décret ou pour lesquels dans certains secteurs d'activité définis par décret, il est d'usage constant et établi de recourir à des emplois temporaires en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ;

« 4° Remplacement d'un chef d'entreprise temporairement absent ;

« 5° Réalisation d'un contrat d'apprentissage. » ;

2° Les articles L. 1242-3 et L. 1242-4 sont abrogés.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Cet amendement encadre au contraire les CDD afin qu'ils cessent d'être utilisés comme une variable d'ajustement par les entreprises. Il est ainsi prévu de limiter les CDD à 10 % de l'effectif global des entreprises d'au moins onze salariés.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Cet amendement, qui réécrit les dispositions du code du travail relatives aux contrats courts, nous paraît excessivement rigide. De surcroît, il priverait de base juridique certains contrats aidés. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°62 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°95, présenté par le Gouvernement.

Alinéas  2, 3, 5 et 6

Supprimer ces alinéas.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - L'amendement supprime la procédure de notification à Pôle emploi de la proposition de CDI, introduite en commission.

Je rejoins les propos d'André Reichardt : le dispositif, qui supposerait un croisement des systèmes d'information, peinerait à être opérationnel, sauf à alourdir considérablement les procédures, y compris en matière de suivi pour Pôle emploi. Imaginez qu'un demandeur d'emploi refuse trois CDI dans trois départements différents...

Au-delà des difficultés pratiques, cette disposition pose un problème de principe. Je considère que lorsqu'un salarié va au bout de son engagement en CDD, il n'y a pas lieu de le sanctionner.

Il en va autrement de l'abandon de poste, qui est une rupture unilatérale du contrat de travail. Ne pas poursuivre à l'issue d'un CDD alors qu'on a rempli toutes ses obligations contractuelles n'est pas une faute à sanctionner.

Nous devons travailler sur l'ARE et sur les possibilités de sanction en cas de refus d'une offre raisonnable d'emploi - je vous renvoie à l'article 6 que nous avons déjà évoqué.

M. le président.  - Amendement identique n°111 rectifié, présenté par MM. Lévrier et Iacovelli, Mme Havet, MM. Bargeton et Buis, Mme Cazebonne, MM. Dagbert et Dennemont, Mme Duranton, MM. Haye, Lemoyne, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, M. Rambaud, Mme Schillinger, M. Théophile, Mme Dumont, M. Cadic, Mme Ract-Madoux et MM. Verzelen, Calvet et Guerriau.

M. Martin Lévrier.  - Mettons-nous du côté de l'employeur : notifier quoi et comment à Pôle emploi ? Faut-il notifier la raison du refus, communiquer toutes les pièces ou simplement informer ?

Ensuite, il y a beaucoup de bonnes raisons qui peuvent conduire un salarié en CDD à refuser un CDI. On complexifie inutilement le code du travail.

Enfin, vers qui se tourner en cas de contestation ?

Revenir au plein emploi suppose de fluidifier. On met en place une usine à gaz parce qu'on s'imagine que les personnes qui refusent un CDI n'ont qu'une idée en tête : profiter de vacances.

M. le président.  - Amendement n°9 rectifié, présenté par M. Capus, Mme Mélot, MM. Chasseing, Grand, Guerriau et Lagourgue, Mme Paoli-Gagin et MM. Verzelen et Wattebled.

Alinéa 3

Après le mot :

équivalente

insérer les mots :

pour une durée de travail équivalente

M. Daniel Chasseing.  - Le critère de rémunération équivalente doit s'entendre pour une durée de travail équivalente.

M. le président.  - Amendement n°45, présenté par Mme Jacquemet.

I.  -  Alinéa 3

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette procédure n'est pas applicable aux contrats saisonniers mentionnés au 3° de l'article L. 1242-2.

II.  -  Alinéa 6

Remplacer les mots :

à trois reprises, au cours des douze mois précédents, une proposition

par les mots :

, au cours d'une période déterminée par les accords relatifs à l'assurance chômage mentionnés à l'article L. 5422-20, un nombre, fixé par les mêmes accords, de propositions

Mme Annick Jacquemet.  - Le principe posé par la commission est opportun, je l'ai soutenu. Cependant, nous ne disposons pas des statistiques relatives à la durée moyenne des CDD ni du nombre moyen de CDD par salarié sur douze mois. Pourquoi trois refus ?

Cet amendement confie à la prochaine convention d'assurance chômage le soin de déterminer les critères.

M. le président.  - Amendement n°110 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Fialaire et Gold, Mmes Guillotin et Pantel et MM. Requier et Roux.

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette procédure n'est pas applicable aux contrats saisonniers mentionnés au 3° de l'article L. 1242-2.

M. Éric Gold.  - Pour ne pas pénaliser les travailleurs saisonniers, cet amendement les exclut du dispositif.

M. le président.  - Amendement n°65, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéas 4 à 8

Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés : 

...° Après le premier alinéa du I de l'article L. 2312-26, il est inséré un alinéa rédigé :

« Les modalités de recours aux contrats de travail à durée déterminée et aux salariés des entreprises de travail temporaire font l'objet d'une consultation annuelle du comité social et économique et d'un avis conforme. Les contrats ne peuvent être conclus que s'ils respectent les modalités de recours ayant reçu l'avis conforme du comité, qui peut saisir l'inspecteur du travail. »

Mme Laurence Cohen.  - L'avis conforme du comité social et économique doit être requis pour prévenir le développement de contrats atypiques et précaires au sein de l'entreprise.

M. le président.  - Amendement n°83, présenté par MM. Duplomb et Retailleau.

Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Si la privation d'emploi résulte du refus d'une proposition de contrat de travail à durée indéterminée dans les conditions prévues à l'article L. 1243-11-1, le bénéfice de l'allocation d'assurance ne peut pas être ouvert au demandeur d'emploi au titre du 1° du présent I. » ;

M. Laurent Duplomb.  - Je propose de passer de trois CDI refusés à un seul. Nombre de chefs d'entreprise nous alertent sur le nombre d'offres d'emploi non pourvues. Le CDI est la meilleure option de retour à l'emploi : revenons aux vraies valeurs du travail.

Le sens de l'histoire est d'accepter un CDI à l'issue d'un CDD.

M. André Reichardt.  - C'est simple !

Salut à une délégation sénatoriale philippine

M. le président.  - En votre nom, j'ai le plaisir de saluer la présence, dans la tribune d'honneur, d'une délégation du Sénat des Philippines, conduite par son président, M. Juan Miguel Fernandez Zubiri.

Cette délégation a été reçue par le groupe d'amitié France-Asie du Sud-Est, présidé par notre collègue Mathieu Darnaud. La délégation est en France jusqu'au 28 octobre, pour un déplacement axé sur les thématiques de la sécurité alimentaire, de l'énergie nucléaire et de la défense.

Elle a visité hier la centrale de Flamanville et les chantiers de Naval Group. Elle sera reçue ce soir par le Président Gérard Larcher et le vice-président Roger Karoutchi.

Nous espérons que les excellents rapports entre nos deux Sénats s'intensifieront et seront au coeur de l'épanouissement des relations entre nos pays. Les Philippines sont pour la France un partenaire privilégié dans l'Indopacifique, avec lequel nous avons vocation à développer de nouveaux projets de coopération.

Permettez-moi de souhaiter, en votre nom à tous, à nos homologues du Sénat philippin, la plus cordiale bienvenue, ainsi qu'un excellent et fructueux séjour. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le ministre, se lèvent et applaudissent.)

Fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Qui sommes-nous pour considérer que nous devons refuser l'allocation de retour à l'emploi au terme d'un CDD en cas de refus d'un CDI, demande Mme Lubin ? Nous sommes des gens qui savons lire : on peut bénéficier de l'aide au retour à l'emploi lorsqu'on est privé d'emploi de façon involontaire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. le ministre juge notre mesure difficile à mettre en pratique. Peut-être, mais si vous en tirez argument pour ne rien faire, vous ne servez pas à grand-chose ! Quand il y a une volonté, le volet opérationnel est un détail. (Mme Catherine Deroche, présidente de la commission, approuve.) Avis défavorable aux amendements nos95 et 111 rectifié.

La précision apportée par l'amendement n°9 rectifié est utile : avis favorable.

Sur l'amendement n°45, avis défavorable sur le principe, car nous avons choisi d'inscrire le nombre dans la loi. De plus, le travail saisonnier n'est pas à traiter de manière différenciée.

Avis défavorable également à l'amendement n°110 rectifié.

Le comité social et économique est consulté sur la politique sociale de l'entreprise, mais il n'est pas compétent en matière de politique de recrutement. Avis défavorable à l'amendement n°65.

Vous aurez déduit de mes propos que nous sommes favorables à l'amendement n°83 rectifié. (Marques de satisfaction sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Le code du travail prévoit déjà que lorsqu'un employeur propose un CDI aux mêmes conditions que le CDD, et que celui-ci est refusé, le salarié peut être privé du bénéfice de la prime de précarité. Il n'y a pas lieu de le sanctionner davantage. L'amendement n°83 rectifié divise par trois le nombre de refus : j'y suis triplement défavorable.

Avis défavorable aux amendements nos45 et 65. Sagesse sur les amendements nos9 rectifié et 110 rectifié, qui seraient utiles si le dispositif devait être maintenu dans la navette.

Mme Monique Lubin.  - Savoir lire ne suffit pas à expliquer ce qui peut justifier le refus d'un CDI !

Puisque nous sommes lancés dans une course à l'échalote, supprimons toutes les allocations chômage et l'Unédic. Tout le monde retrouvera un emploi dès demain ! (M. Yan Chantrel applaudit.)

Mme Catherine Procaccia.  - Tout en nuance...

Mme Nadège Havet.  - Imaginons un demandeur d'emploi qui doit commencer en septembre une formation à un métier en tension. En attendant cette date, il enchaîne les CDD « alimentaires ». Si on lui propose entre-temps trois CDI, il n'aura plus de droits, ou bien il devra renoncer à sa formation.

Par ailleurs, quid des demandeurs d'emploi ne déclarant comme offre raisonnable que des CDD ?

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Je voterai en faveur des amendements nos95 et 111. Quand on pousse le raisonnement, on en vient à refuser les indemnités dès le premier CDD si le salarié refuse le CDI derrière. Mais pourquoi l'employeur n'a-t-il pas proposé d'emblée un CDI ? (Exclamations à droite)

M. André Reichardt.  - C'est comme ça !

Mme Raymonde Poncet Monge.  - J'ai été employeur, je ne proposais que des CDI. Multiplier les CDD revient à contourner la période d'essai.

Que la prime de précarité ne soit pas payée s'il y a un CDI en fin de CDD, soit, mais cette précarité a bien été subie pendant la durée du CDD !

Nous voyons ici toute l'absurdité de cette proposition.

M. Philippe Mouiller.  - Dans ma région, on voit dans toutes les zones industrielles des panneaux indiquant qu'on cherche du personnel. (M. Laurent Duplomb renchérit.)

J'ai accompagné un jeune réfugié qui a rapidement obtenu, avec six autres compagnons, un CDD. Il a été le seul à accepter le CDI - et a eu le sentiment de s'être fait avoir, quand il a vu que les autres préféraient toucher le chômage avant de reprendre un CDD, facile à trouver dans ce territoire ! (M. Laurent Duplomb renchérit ; protestations à gauche.)

Le vrai sujet est la mobilisation de tous les acteurs pour que les entreprises et les salariés s'y retrouvent. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains)

M. Martin Lévrier.  - J'ai été témoin d'exemples similaires, mais l'inverse existe aussi. Des employeurs proposent des CDI à des salariés en CDD pour diminuer leur salaire, ou pour s'en débarrasser plus facilement, car il est très compliqué de mettre un terme à un CDD... Ne complexifions pas un système qui fonctionne plutôt bien.

Nous traitons de petits aléas dans une loi globale. Ce n'est pas une bonne idée.

Les amendements identiques nos95 et 111 rectifié ne sont pas adoptés.

L'amendement n°9 rectifié est adopté.

L'amendement n°45 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos110 rectifié et 65.

M. André Reichardt.  - J'ai fait part de mon scepticisme tout à l'heure sur la proposition de la commission, que M. le ministre a qualifiée à raison d'usine à gaz. Nous allons rencontrer les mêmes difficultés que pour l'offre raisonnable d'emploi.

La seule option possible, pour donner de l'efficacité au dispositif, est l'amendement de M. Duplomb. Si l'on veut diminuer les tensions sur le marché de l'emploi, ayons le courage politique de refuser l'allocation dès le premier CDI décliné.

Mme Jocelyne Guidez.  - La disposition a des effets de bord. Quid d'un couple dont l'un est au chômage et l'autre va bientôt être muté ? Le chômeur devra refuser les offres en CDD, car il ne pourra accepter de CDI derrière. Or qui dit absence d'allocations chômage dit RSA, à la charge des départements. L'article 40 ne devrait-il pas s'appliquer ?

Enfin, comment refuser des droits à une personne qui a cotisé ? Notre groupe ne votera pas l'amendement : la position de la commission est équilibrée.

M. Laurent Duplomb.  - Je ne comprends pas le débat. Nous avons 7 % de chômeurs et les entreprises cherchent des salariés. Celui qui refuse un CDI après un CDD ne touchera pas le chômage, mais rien ne l'empêche de prendre un autre emploi dans une autre entreprise !

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Exact !

M. Laurent Duplomb.  - Quand comprendrons-nous que pour redistribuer, il faut créer de la valeur ? Comment faire s'il n'y a plus personne dans les entreprises ? Puiser dans la dette ? Nous sommes déjà à 3 000 milliards d'euros !

Si on n'incite personne à travailler, tout le monde jouera au sport national qui consiste à toucher le chômage après un CDD. (« Très bien ! » à droite ; murmures à gauche)

À l'issue d'une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°83 rectifié, mis aux voix par assis et debout, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°10 rectifié, présenté par M. Capus, Mme Mélot, MM. Chasseing, Grand, Guerriau et Lagourgue, Mme Paoli-Gagin et MM. Verzelen et Wattebled.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

...° Le premier alinéa de l'article L. 5422-25 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ces mesures peuvent notamment correspondre aux modulations prévues à l'article L. 5422-2-2. »

Mme Colette Mélot.  - La commission a prévu la possibilité de moduler les conditions d'activité pour l'ouverture des droits, mais ne précise pas comment ces modulations peuvent être opérées, ni par qui.

Nous précisons que le document transmis par le Gouvernement au Parlement et aux partenaires sociaux peut faire apparaître des mesures de modulation, qui s'envisagent sur un rythme annuel pour épouser les évolutions du marché du travail, tout en sécurisant les assurés.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Pour être efficace, la modulation en fonction d'indicateurs conjoncturels doit être automatique. Même si nous partageons le souci d'améliorer les finances de l'Unédic, le mécanisme contracyclique n'est pas adapté. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°10 rectifié est retiré.

À la demande du groupe CRCE, l'article premier bis AA, modifié, est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°12 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 320
Pour l'adoption 215
Contre 105

Le Sénat a adopté.

APRÈS L'ARTICLE PREMIER BIS AA

M. le président.  - Amendement n°11 rectifié quater, présenté par MM. Duplomb et Retailleau, Mme Micouleau, MM. J.M. Boyer et Bascher, Mmes Eustache-Brinio et Chauvin, M. Cigolotti, Mme Pluchet, MM. Bacci et Cambon, Mme Berthet, MM. Chatillon et Bonnus, Mme Belrhiti, MM. D. Laurent et Paccaud, Mmes Procaccia et Férat, MM. Panunzi, Wattebled, Savin et Anglars, Mme Canayer, M. H. Leroy, Mmes Dumas, Bonfanti-Dossat et Gruny, MM. Somon, Bouchet, Belin, Chasseing, Gremillet, Mouiller, Sol, Pointereau, Laménie, Klinger, E. Blanc et Tabarot, Mme Joseph, MM. Saury et Cadec, Mme Loisier et MM. J.P. Vogel, Brisson, Joyandet, Regnard, Reichardt, de Legge, Bonhomme, Frassa et Cuypers.

Après l'article 1er bis AA 

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code du travail est ainsi modifié :

1° Après l'article L. 1251-33, il est inséré un article L. 1251-33-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 1251-33-1.  -  Lorsque, à l'issue d'une mission, l'entreprise utilisatrice propose au salarié de conclure un contrat à durée indéterminée pour occuper le même emploi, ou un emploi similaire, sans changement du lieu de travail, elle notifie cette proposition par écrit au salarié et transmet cette notification à Pôle emploi. » ;

2° Le I de l'article L. 5422-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Si la privation d'emploi résulte du refus d'une proposition de contrat de travail à durée indéterminée dans les conditions prévues à l'article L. 1251-33-1, le bénéfice de l'allocation d'assurance ne peut pas être ouvert au demandeur d'emploi au titre du 1° du présent I. »

M. Laurent Duplomb.  - Même chose que l'amendement n°83 rectifié, mais pour les intérimaires. Sur le terrain, des entreprises m'indiquent que des intérimaires refusent des CDI pour bénéficier du chômage après avoir rechargé leurs droits. L'intérimaire n'est pas obligé de prendre le CDI : je propose de lui laisser le choix de prendre le CDI ou de rester intérimaire, mais en aucun cas de toucher le chômage. (M. André Reichardt applaudit.)

M. Vincent Segouin.  - Très bien !

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - La commission reste dans la même logique : peut-on considérer qu'un intérimaire qui refuse un CDI est privé de façon involontaire d'emploi ? Non. Avis favorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Avis défavorable pour les mêmes raisons que pour l'amendement n°83 rectifié. Si votre amendement était adopté, le traitement des intérimaires serait plus sévère que celui des salariés en CDD. (On se récrie à droite.)

M. Daniel Chasseing.  - On parle d'une personne qui fait un choix de vie, l'intérim. Si elle cesse de travailler alors qu'on lui a proposé un CDI, refuser des indemnités me semble légitime.

Il n'est pas question ici de précarité ou de fragilité, mais d'un choix de vie. Il est respectable - mais ne justifie en rien de toucher le chômage.

M. Vincent Segouin.  - Bravo !

M. René-Paul Savary.  - Monsieur le ministre, vous visez le plein emploi : il faut bien inciter les gens à travailler. Je comprends le choix de ces personnes : en tant que médecin, je voyais des jeunes enchaînant les intérims et refusant les CDI. Cependant, notre société ne peut plus se le permettre. Je suis toujours préoccupé par la question des retraites et je me dis qu'un jour, il faudra payer la note.

L'amendement de M. Duplomb rend service en incitant à changer de modèle.

Mme Jocelyne Guidez.  - Au risque de vous étonner, je voterai cet amendement. Il y a un vrai problème avec l'intérim, notamment dans le médico-social : des personnes renoncent à des CDI pour l'intérim alors qu'on manque de personnel.

M. Laurent Duplomb.  - Monsieur le ministre, ne pas régler le problème de l'intérim ouvre la possibilité à toutes les infirmières des hôpitaux publics de démissionner et d'y revenir comme intérimaires, avec des droits supplémentaires, tout en bénéficiant de droits au chômage au bout de six mois. Quelle image ! Ce sera la gangrène de tous les systèmes. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Monique Lubin.  - Vous évoquez une situation très particulière. (On se récrie à droite.)

M. Laurent Duplomb.  - Il y en a des dizaines !

Mme Monique Lubin.  - Vous allez pénaliser tous les intérimaires pour quelques personnes qui ont fait ce choix, et qui d'ailleurs sollicitent peu Pôle emploi.

Vous mentionnez les soignants, mais il y a un autre problème, qui est celui de l'autoentrepreneuriat. Beaucoup de personnes se placent sous ce statut et font gonfler les budgets des hôpitaux. Un coiffeur m'a indiqué qu'une salariée en CDD a refusé un CDI, préférant proposer ses services comme autoentrepreneuse à des employeurs qui n'ont d'autre choix que de la recruter faute de main-d'oeuvre : on dévoie le système de l'autoentrepreneuriat tout en présentant un miroir aux alouettes à ceux qui s'y engagent.

Prenons ce sujet à bras-le-corps plutôt que de pénaliser tous les demandeurs d'emploi. Je ne sais pas quelle mouche vous a piqués, mais je vous trouve très durs. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE)

M. Olivier Dussopt, ministre.  - J'entends vos arguments sur l'intérim dans le milieu médical, mais c'est un cas très particulier.

Il y a aussi des salariés intérimaires qui travaillent dans des conditions très difficiles, qui ne sont rendues acceptables que par la prime de précarité et la durée limitée du contrat, et certaines entreprises ne trouvent pas à recruter sous un autre statut.

Ne nous appuyons pas sur le seul exemple du domaine médical pour adopter un amendement aussi sévère.

M. Vincent Segouin.  - Je ne comprends pas vos arguments, monsieur le ministre. L'exemple des infirmières est criant ! Nous n'empêchons personne d'enchaîner les intérims.

Vous dites viser le plein emploi, mais vous bottez en touche.

Je connais des entreprises agricoles qui ne peuvent embaucher en CDI les saisonniers qu'elles ont employés, car ces derniers préfèrent bénéficier du chômage sur les revenus perçus l'été, augmentés des heures supplémentaires ! L'ancien ministre du budget que vous êtes sait ce que cela coûte ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

L'amendement n°11 rectifié quater est adopté et devient un article additionnel.

(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

ARTICLE PREMIER BIS AB

M. le président.  - Amendement n°97, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Si le problème de l'indemnisation des agents de la fonction publique territoriale démissionnaires est réel, la rédaction de l'article premier bis AB nous pose une difficulté : les centres de gestion, qui seraient consultés après la démission, n'ont pas de légitimité pour apprécier l'éligibilité de la personne à l'allocation chômage.

Vous poursuivez un objectif louable d'harmonisation des droits des salariés et des agents publics démissionnaires, mais de façon inopérante. Il faut mener ce chantier. Je remercie le sénateur Philippe Bas d'avoir soulevé ce sujet : je m'engage à y travailler avec le ministre de la fonction publique.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - La liste des chantiers à traiter est longue. Les collectivités territoriales emploient 90 % d'agents publics et s'assurent pour les 10 % de contractuels. Or de plus en plus de fonctionnaires démissionnent puis, après une expérience dans le privé, demandent l'allocation de retour à l'emploi : celui qui a le plus longtemps été employeur sera souvent la collectivité. Des années après la démission, c'est elle qui devra verser l'allocation. Les maires que nous rencontrons sont furieux.

C'est en général le directeur régional de Pôle emploi qui apprécie cette situation atypique, non la commission mixte où les collectivités territoriales ne sont pas représentées. Philippe Bas, avec cet article, propose simplement que cette appréciation soit réalisée par les pairs des maires, à travers le centre de gestion. Nous n'avons pas trouvé d'autre solution. Retrait ou avis défavorable. (« Très bien ! » sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Le sujet mérite d'être traité, mais le dispositif que vous proposez ne serait pas opérationnel. Heureusement, la question concerne peu de personnes.

Mme Catherine Di Folco.  - Je comprends le problème soulevé par Philippe Bas, mais je comprends également la position de M. le ministre : comment les centres de gestion vont-ils gérer des personnes qui ne relèvent plus de la fonction publique territoriale ?

Pour traiter cette question, votons l'amendement.

Peut-être faudrait-il que les commissions qui statuent comportent des représentants des collectivités ?

M. Olivier Dussopt, ministre.  - La proposition de Mme Di Folco se heurte au fait que ces instances sont paritaires et ne comprennent presque jamais de représentants des collectivités.

Je me devais de vous répondre, car votre réflexion rappelle d'anciens débats sur les centres de gestion...

L'amendement n°97 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°109 rectifié, présenté par MM. Levi, Bonnecarrère, Decool, Reichardt, Kern, Cadec, Brisson, Canévet et Laugier, Mmes Ract-Madoux, Férat et Dumont, MM. Lafon, Hingray, C. Vial, Lefèvre et Chatillon, Mme Jacquemet, MM. J.M. Arnaud et Détraigne, Mme Billon et MM. Guerriau, Cigolotti, H. Leroy, Menonville et Bonhomme.

Alinéa 3

Remplacer (deux fois) le mot :

trois

par le mot :

deux

M. Pierre-Antoine Levi.  - Afin de nous aligner sur le régime classique du contentieux administratif, il serait plus opportun de faire passer les délais de saisine et de réponse de trois à deux mois.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Le délai de deux mois est le délai de principe de recours administratif : avis favorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Avis défavorable par cohérence.

L'amendement n°109 rectifié est adopté.

L'article premier bis AB, modifié, est adopté.

ARTICLE PREMIER BIS A

M. le président.  - Amendement n°16, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

Mme Monique Lubin.  - Nous sommes opposés au durcissement qui consiste à considérer comme démissionnaire tout salarié présumé fautif d'un abandon de poste.

Les données manquent pour légiférer. La charge de la preuve incomberait au salarié devant les prud'hommes, ce qui rend la procédure difficilement opérante. Cette mesure emporte en réalité plus de risque juridique pour l'employeur qu'elle ne le sécurise.

Certes, un abandon de poste pose des problèmes à l'entreprise. C'est pourquoi j'ai consulté des avocats en droit du travail : or aucune statistique ne confirme que les abandons de poste sont en augmentation, contrairement à ce que prétend notre rapporteure.

Quid d'un salarié face à un employeur qui refuserait de le payer ? Cela s'est vu. Attention à ne pas graver dans le marbre des dispositions qui pénaliseront un grand nombre salariés quand quelques-uns seulement tirent sur la corde.

M. le président.  - Amendement identique n°68, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Laurence Cohen.  - Les députés LR, LREM et RN ont voté cet article pour écarter de l'assurance chômage tous ceux qui n'ont pourtant d'autre choix que d'abandonner leur poste.

L'abandon de poste est souvent le dernier recours pour se protéger d'un employeur brutal, de conditions de travail dangereuses ou de harcèlement. Il est parfois même négocié entre l'employeur qui refuse de signer une rupture conventionnelle et le salarié qui ne veut pas démissionner.

L'amendement ne prend pas en compte la réalité de la justice prud'homale : même en référé, un salarié n'aura pas de réponse dans le délai d'un mois. En supprimant l'indemnisation chômage, vous conduirez les salariés à devoir rester en poste, en situation de conflit, ou à déposer des arrêts-maladie, qui déporteront le problème vers l'assurance maladie.

M. le président.  - Amendement identique n°104, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Cette disposition trouve sa raison d'être dans le dispositif du bonus-malus, pour soustraire les abandons de poste du taux de séparation. Cet article, ajouté à la va-vite pour des raisons opportunistes, est contradictoire avec la jurisprudence selon laquelle une démission ne se présume pas et avec la convention 158 de l'OIT. Les raisons des abandons de poste sont multiples : conditions de travail dégradées, refus de rupture conventionnelle -  pourtant utiles aux employeurs pour masquer des licenciements... -, etc.

L'annonce de l'ouverture des droits au chômage aux démissionnaires a entrainé une vraie désillusion. Une solution non délétère serait d'élargir les motifs légitimes de démission ouvrant droit au chômage.

Résolvons le problème des secteurs sous tension et à très faible attractivité plutôt que de contraindre des salariés à les rejoindre ou à rester à leur poste.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Nous n'avons fait que sécuriser ce dispositif introduit par l'Assemblée nationale.

Il est vrai, madame Lubin, que nous disposons de très peu de chiffres sur ce phénomène.

Nous parlons d'un salarié qui abandonne son poste et ne le reprend pas après mise en demeure par son employeur. Resteront des motifs d'absence justifiée ou légitime : droit de retrait, droit de grève, raisons de santé notamment, qui ne sont pas des abandons de poste.

Aujourd'hui, l'abandon ne figure pas dans le code du travail. Cette situation est mieux traitée que la démission, alors que la démarche n'est guère élégante : on « plante » son employeur et ses collègues. Avis défavorable.

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission.  - Très bien.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Cette sécurisation du dispositif par la commission est bienvenue. Avis défavorable.

Les amendements identiques nos16 rectifié, 68 et 104 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°27 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 2, première phrase

1° Après le mot :

après

insérer les mots  :

que l'employeur a démontré son absence de faute au sens du présent code et après

2° Après le mot :

employeur

insérer les mots :

et après une procédure contradictoire entre l'employeur, le salarié et le conseil des prud'hommes, 

Mme Monique Lubin.  - Nous proposons que l'employeur ait à démontrer qu'il n'a pas commis de faute envers le salarié. Je le redis : l'article risque d'introduire plus de risques juridiques pour l'employeur.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Avis défavorable. La présomption de démission est une présomption simple. Lorsque l'absence résulte d'une faute de l'employeur, la jurisprudence n'assimile pas la situation à une démission.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°27 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°114, présenté par Mme Puissat, au nom de la commission.

Alinéa 2, première phrase

Remplacer la première occurrence du mot :

ou

par le mot :

et

L'amendement rédactionnel n°114, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par MM. Pellevat, Calvet et Tabarot, Mme M. Mercier, M. Chasseing, Mme Lassarade, MM. Charon et Burgoa, Mme Demas, MM. Cambon, Guerriau et Sol, Mme Goy-Chavent, MM. Laménie, Longeot et Anglars et Mmes Joseph, Borchio Fontimp et Jacquemet.

Alinéa 2

Après le mot :

démissionné

insérer les mots :

et avoir rompu abusivement son contrat au sens des articles L. 1237-2 et L. 1243-3

Mme Florence Lassarade.  - Défendu.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Cet amendement qui assimile l'abandon de poste à une rupture abusive du contrat de travail va trop loin dans l'autre sens : avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°4 n'est pas adopté.

L'article premier bis A, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE PREMIER BIS A

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié ter, présenté par Mme Noël, MM. Pellevat, D. Laurent et Chatillon, Mmes Jacques et Joseph, MM. Frassa et Bouchet, Mmes Dumont, Muller-Bronn, Drexler et Bonfanti-Dossat, MM. H. Leroy, Cuypers et Houpert et Mme Borchio Fontimp.

Après l'article 1er bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  En application des dispositions de l'article 1er bis A de la présente loi, les sommes provisionnées afin de répondre au passif social des entreprises font l'objet d'une déduction fiscale.

Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'exécution du présent article.

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

Mme Sylviane Noël.  - Défendu.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - L'amendement est déjà satisfait par le code général des impôts : avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°1 rectifié ter n'est pas adopté.

ARTICLE 2

M. le président.  - Amendement n°17 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

Mme Monique Lubin.  - Cet article permet la communication aux employeurs des données personnelles à l'origine du malus. Des effets pervers ont été observés aux États-Unis lors de la mise en place d'un mécanisme similaire. Les employeurs pourraient demander aux salariés de ne pas s'inscrire à Pôle emploi et leur promettre une réembauche afin de minimiser le montant du malus.

De plus, nous souhaitons revenir sur les minorations introduites par les rapporteurs : le dispositif doit être renforcé, et non allégé.

M. le président.  - Amendement identique n°72, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Le Gouvernement a fait du tapage publicitaire autour du bonus-malus. Les contrats courts ont pourtant été encouragés en 2017 à l'occasion de l'examen des lois travail. Nous ne comprenons pas que l'on octroie un bonus pour récompenser le simple respect des règles : c'est comme si nous félicitions les entreprises de ne pas avoir recours au travail dissimulé.

Les entreprises bénéficient déjà d'exonérations massives de cotisations sur ces contrats courts. En quarante ans, la part des cotisations dans le financement de la sécurité sociale est passée de 90 à 38 %...

Le dispositif de bonus-malus est restrictif : sur un million d'entreprises, seulement 18 000 ont été concernées, dont 6 000 par un malus. Mais c'est déjà trop pour la majorité sénatoriale qui veut limiter la majoration à plus ou moins 0,5 %. Au final, c'est peanuts.

Nous demandons la suppression de cet article.

M. le président.  - Amendement identique n°105, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - La portée du bonus-malus a été restreinte par la commission des affaires sociales : il perd tout effet dissuasif. Pourtant, il ne concerne que des entreprises dont le taux de séparation est supérieur à la médiane de sept secteurs au taux particulièrement élevé...

L'article limite en outre le calcul du malus aux seuls CDD de moins d'un mois ; un CDD de six mois étant réputé durable...

Le dispositif est dévitalisé alors que la réforme durcit l'accès à l'assurance chômage pour les demandeurs d'emploi.

Notre amendement supprime donc l'article 2 afin de rendre au malus un semblant de pertinence.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - L'article 2 vise à éclairer les entreprises concernées sur les données prises en compte. On aurait pu le prévoir dès 2018 ! Le peanuts, madame Apourceau-Poly, c'est parfois 150 000 euros : ce n'est pas rien, surtout quand vous payez à l'aveugle ! Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Nous sommes favorables au maintien de l'article 2 dans sa rédaction initiale sans pour autant approuver les restrictions apportées par la commission.

M. le président.  - De peanuts au bonus-malus, je me demande ce qu'il advient du respect de la Constitution qui prévoit que la langue de la République est le français... (Sourires)

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Je vous demande pardon, monsieur le président.

M. Martin Lévrier.  - Sorry ! (Sourires)

Les amendements identiques nos17 rectifié, 72 et 105 ne sont pas adoptés.

La séance est suspendue à 19 h 55.

présidence de Mme Pascale Gruny, vice-président

La séance reprend à 21 h 30.

Modification de l'ordre du jour

Mme le président.  - Par lettre en date de ce jour, le Gouvernement demande d'avancer l'examen des quatre conventions internationales en procédure simplifiée et du projet autorisant la ratification du traité entre la République française et la République italienne pour une coopération bilatérale renforcée, initialement prévu jeudi 27 octobre matin, au mercredi 26 octobre après-midi à l'issue de la suite du projet de loi portant mesures d'urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi.

Si nous terminons l'examen de ce texte dès ce soir - ce qui semble possible - les conventions internationales seraient discutées à l'issue des questions d'actualité au Gouvernement. Par conséquent, nous ne siégerions pas jeudi.

Acte est donné de cette demande.

En conséquence, nous pourrions avancer le délai limite d'inscription des orateurs dans la discussion générale au mercredi 26 octobre à 12 heures.

Il en est ainsi décidé.

Fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

ARTICLE 2 (Suite)

Mme le président.  - Amendement n°53, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Rédiger ainsi cet article :

Par dérogation au montant de droit commun, le montant de la cotisation employeur au régime d'assurance chômage pour les contrats à durée déterminée mentionnés au titre IV du livre II de la première partie du code du travail, est fixé selon les principes suivants :

  -   12,4 % pour les contrats de moins d'un mois ;

  -   10,4 % pour les contrats d'une durée comprise entre un et deux mois ;

  -   8,4 % pour les contrats d'une durée comprise entre deux et six mois.

 

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - À défaut de pouvoir supprimer l'article 2, nous proposons un amendement de repli afin de lutter contre la précarité croissante. Les contrats précaires ont augmenté de 65 % depuis 2000 et la Dares relève une progression de 14 % des CDD d'un jour par rapport à 2019. Le bonus-malus est un gadget : récompenser une entreprise qui applique la loi est une ineptie.

Nous marchons sur la tête, alors que le malus est régi par des critères conçus pour ne pas contrarier le Medef. Cet amendement rend le malus plus dissuasif en augmentant son taux et en le modulant selon la durée des contrats.

Mme le président.  - Amendement n°30 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Rédiger ainsi cet article :

L'article L. 5422-12 du code du travail est complété par huit alinéas ainsi rédigés :

« Pour les entreprises dont le chiffre d'affaires annuel excède 1 500 millions d'euros ou dont le total de bilan excède 2 000 millions d'euros, le taux de contribution peut être majoré en cas de non-respect des contreparties climatiques et sociales suivantes :

« 1° La publication, au plus tard le 1er juillet de chaque année, et à partir du 1er janvier 2023, d'un « rapport climat » qui :

« a) Intègre le bilan des émissions directes et indirectes de gaz à effet de serre de l'entreprise, en amont et en aval de leurs activités ;

« b) Élabore une stratégie de réduction des émissions des gaz à effet de serre dans les conditions définies au B, qui ne doit pas prendre en compte les émissions évitées et compensées. Elle fixe des objectifs annuels de réduction des émissions de gaz à effet sur un horizon de dix ans, notamment en précisant les plans d'investissements nécessaires pour les atteindre. Ce rapport s'appuie sur les informations fournies dans le cadre des obligations de l'article L. 225-102-1 du code de commerce et de l'article L. 229-25 du code de l'environnement.

« Le ministre chargé de l'environnement définit, en concertation avec le Haut conseil pour le climat, la trajectoire minimale de réduction des émissions de gaz à effet de serre à mettre en oeuvre par lesdites entreprises, en fonction du secteur d'activité et en conformité avec les budgets carbones fixés par la stratégie nationale bas-carbone.

« Les détails de la méthodologie sont fixés par décret ;

« 2° L'obligation de ne pas délocaliser et de ne pas transférer volontairement à l'étranger une partie ou de la totalité des activités de l'entreprise entraînant d'une diminution du nombre d'emplois en France, que ce soit au travers de filiales appartenant à la même entreprise ou par l'intermédiaire de sous-traitant auprès d'entreprises non affiliées ;

« 3° L'obligation d'atteindre, avant le 1er janvier 2023, un index d'égalité entre les femmes et les hommes prévu par l'article L. 1142-8 du code du travail à un niveau inférieur à 75 points. »

Mme Monique Lubin.  - Pour accélérer la transition écologique et sociale des entreprises, nous proposons un malus touchant les multinationales, en fonction de leur respect des objectifs de transition écologique et d'égalité salariale entre les femmes et les hommes.

Mme le président.  - Amendement n°29 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Rédiger ainsi cet article :

Au deuxième alinéa de l'article L. 5422-12 du code du travail, les mots : « minoré ou » sont supprimés.

Mme Monique Lubin.  - L'amendement supprime le bonus, pour ne conserver que le malus. Un juste recours aux contrats courts est un comportement normal qui ne doit pas -  encore - alléger les recettes de notre sécurité sociale. Pour être incitatif, le malus doit être plus large et son taux doit être plus élevé.

Mme le président.  - Amendement identique n°57, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Le bonus abaisse les cotisations patronales et réduit donc les recettes de la sécurité sociale, alors que la réduction Fillon touche déjà les salaires jusqu'à 1,6 Smic. Les entreprises sont déjà des assistées de la sécurité sociale.

Un bonus n'est pas acceptable : seul un malus fera évoluer les comportements. En outre, le Gouvernement a allégé la fiscalité des contrats courts en supprimant la surcotisation de 0,5 point, sauf pour les intermittents du spectacle et les dockers ; il a mis en place un forfait de 10 euros par CDD d'usage début 2020, supprimant ce dispositif sept mois plus tard : derrière les discours, les volontés sont absentes !

Nous proposons de porter le malus à deux points de cotisation chômage minimum.

Mme le président.  - Amendement identique n°89 rectifié, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Pour faire passer la baisse des droits des travailleurs, le Gouvernement a présenté un mécanisme de bonus-malus tout en commençant par en différer l'application d'un an. Pas question de solliciter les employeurs pour équilibrer les comptes : le malus est compensé par le bonus. Or celui-ci est accordé si le taux de séparation est inférieur à la médiane des secteurs au plus fort taux, 1,5 fois supérieur aux autres...

Ce système illogique récompense les moins mauvais élèves des sept secteurs qui génèrent 37 % des séparations. N'ayons pas la main qui tremble : le malus suffit.

Mme le président.  - Amendement n°56, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Rédiger ainsi cet article :

L'article L. 5422-12 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé : 

« La majoration du taux de contribution ne peut être inférieure à deux points. »

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Défendu.

Mme le président.  - Amendement n°32 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Rédiger ainsi cet article :

I. - Le 1° de l'article L. 5422-12 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les recettes générées par la majoration prévue au présent 1° sont supérieures ou égales à 1,5 fois la perte de recettes occasionnée par la minoration prévue au présent 1°. »

II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

Mme Monique Lubin.  - Avec cet amendement, les recettes du bonus-malus dépasseraient 50 % des dépenses. Seule une entreprise concernée sur trois voit actuellement ses cotisations augmenter alors que l'idée initiale était bien de désinciter les entreprises à recourir aux contrats courts et donc de récolter des recettes importantes.

Mme le président.  - Amendement n°96, présenté par le Gouvernement.

Rédiger ainsi cet article :

I.  -  L'article L. 5422-12 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les données nécessaires à la détermination de la variable mentionnée au 1°, y compris celles relatives aux personnes concernées par les fins de contrat prises en compte qui sont inscrites sur la liste des demandeurs d'emploi, peuvent être communiquées à l'employeur par les organismes chargés du recouvrement des contributions d'assurance chômage, dans des conditions prévues par décret. »

II.  -  Le I est applicable aux taux notifiés aux employeurs pour les périodes courant à compter du 1er septembre 2022.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - L'amendement rétablit la rédaction de l'Assemblée, conforme au principe d'équilibre, avec un malus égal au bonus, sans perte de recettes. Si plus d'entreprises bénéficient du bonus, c'est parce qu'elles sont plus petites que celles affectées par le malus.

Nous voulons aussi revenir à l'amplitude de -1 et +0,5.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Avis défavorable à l'amendement n°53, bien trop prohibitif. L'amendement n°30 rectifié supprime des apports de la commission sur le bonus-malus et fixe des critères sans impact sur l'assurance chômage, tout en étant redondant avec des sanctions déjà prévues par le code du travail : avis défavorable.

Je suis convaincue que le bonus-malus est biaisé, même s'il s'équilibre. Mme Poncet Monge l'a dit, des sociétés de secteurs non vertueux paient moins grâce à leur appartenance même à ce secteur. Cela étant, nous ne voulons pas supprimer le bonus : avis défavorable aux amendements identiques nos29 rectifié, 57 et 89 rectifié.

Avis défavorable à l'amendement n°32 rectifié qui prévoit un malus supérieur au bonus.

Monsieur le ministre, le Sénat a fait le choix de réécrire un dispositif déjà en application depuis septembre - le texte de loi censé éclairer les chefs d'entreprise est en retard. Le bonus-malus a-t-il un sens pour l'emploi ? Non. La ministre Pénicaud disait ne pas vouloir des contrats d'un jour, mais le bonus-malus frappe à 90 % l'intérim. On voudrait lui faire la peau qu'on ne s'y prendrait pas autrement !

Pensez-vous que les chefs d'entreprise souhaitent des contrats courts, alors que les contrats longs permettent l'intégration dans l'entreprise ? Nous pensons que non, et que ceux qui les multiplient n'ont pas le choix.

Cela dit, la « permittence » est un enjeu, y compris dans la fonction publique, que ce soit dans les hôpitaux, l'éducation nationale ou les Ehpad ; balayons aussi devant notre porte. C'est pourquoi nous faisons le choix, avec Olivier Henno, de ne pas supprimer le bonus-malus mais de le ramener à sa juste proportion, en excluant l'intérim et les fins de CDI. Avis défavorable à votre amendement n°96.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - C'est dommage.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Enfin, avis défavorable à l'amendement n°56.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Avis défavorable à tous les amendements autres que celui du Gouvernement.

L'amendement n°53 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°30 rectifié, les amendements identiques nos29 rectifié, 57 et 89 rectifié, et les amendements nos56, 32 rectifié et 96.

Mme le président.  - Amendement n°80 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Fialaire et Gold, Mmes Guillotin et Pantel et MM. Requier et Roux.

Alinéa 8

1° Supprimer les mots : 

, y compris celles relatives aux personnes concernées par les fins de contrats prises en compte qui sont inscrites sur la liste des demandeurs d'emploi,

2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée : 

Ces données sont transmises de manière à respecter l'anonymat des personnes concernées par les fins de contrats.

Mme Maryse Carrère.  - Nous autorisons les Urssaf à ne communiquer que les données nécessaires au calcul du bonus-malus et non les données personnelles.

Mme le président.  - Amendement n°28 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 8

Supprimer les mots :

, y compris celles relatives aux personnes concernées par les fins de contrat prises en compte qui sont inscrites sur la liste des demandeurs d'emploi,

Mme Monique Lubin.  - Cet amendement de repli est similaire.

Mme le président.  - Amendement identique n°54, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Céline Brulin.  - Défendu.

Mme le président.  - Amendement n°55, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 8

Supprimer les mots :

qui sont inscrites sur la liste des demandeurs d'emploi

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Défendu également.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Avis défavorable à ces quatre amendements. L'article 2 a pour but d'éclairer les chefs d'entreprise, qui n'ont pour le moment reçu qu'un courrier les informant de leur éligibilité au bonus-malus, et le cas échéant un autre leur notifiant un malus - jusqu'à 150 000 euros tout de même pour certaines entreprises de l'Isère -, sans savoir pour qui et pourquoi ils paient. Supprimer la liste des personnes concernées ne va pas dans le sens d'une meilleure information.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Avis défavorable pour les mêmes raisons.

L'amendement n°80 rectifié n'est pas adopté, non plus que les amendements identiques nos28 rectifié et 54, et l'amendement n°55.

L'article 2 est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 2

Mme le président.  - Amendement n°92, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  L'article L. 5422-12 du code travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le taux de contribution de chaque employeur peut être minoré en fonction de l'index d'égalité entre les femmes et les hommes prévu à l'article L. 1142-8 si celui-ci est supérieur à 85 points. »

II.  -  La perte de recettes résultant pour le régime d'assurance chômage du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Si le taux de chômage des femmes est presque égal à celui des hommes, les femmes sont plus touchées par le sous-emploi, le temps partiel et le halo du chômage. En 2019, 7,8 % des femmes actives étaient sous-employées contre 3,1 % pour les hommes ; 28,4 % des femmes actives travaillaient à temps partiel et les femmes avaient une rémunération moyenne inférieure de 28,5 % à celle des hommes. Emmanuel Macron avait fait de l'égalité femmes-hommes la grande cause du quinquennat. Nous proposons, pour plus d'équité, de conditionner le bonus au respect de l'indice d'égalité femmes-hommes prévu par le code du travail.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - La modulation des contributions à l'assurance chômage n'est pas le bon outil pour promouvoir l'égalité femmes-hommes. En outre, des sanctions existent déjà. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°92 n'est pas adopté.

ARTICLE 2 BIS

Mme le président.  - Amendement n°64, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Supprimer cet article.

Mme Céline Brulin.  - L'expérimentation que prolonge cet article - le remplacement de plusieurs salariés absents par un CDD ou un contrat de mission - est boudée par les patrons. C'est une boîte de Pandore alors que les entreprises peuvent conclure deux CDD à temps partiel pour remplacer un poste vacant. N'aggravons pas encore la précarité.

Mme le président.  - Amendement identique n°106, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Les CDD multiremplacements avaient été créés par la loi Avenir professionnel de 2018, hors de toute négociation. Leur retour est justifié, là encore, par la volonté de réduire le taux de séparation.

L'expérimentation n'avait pas été évaluée, alors que cela devrait être un préalable. Même si le contrat est plus long, il reste précaire, à l'encontre de la volonté affichée par le Gouvernement. Il reste pénalisant pour conclure un bail ou un emprunt et il est source de stress. Supprimons cet article.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Nous avons rendu cet article ajouté à l'Assemblée nationale plus efficient. Nous parlons de 11 secteurs en tension : médico-social, sanitaire et propreté notamment.

Ce dispositif est-il boudé ? Je ne sais pas, car il n'a pas pu être appliqué tout de suite, faute de décrets d'application, puis à cause du covid. L'expérimentation n'aura donc duré qu'un an.

Madame Poncet Monge, il faut effectivement une évaluation ; nous la prévoyons après deux ans d'expérimentation. L'objectif reste de lutter contre la « permittence » et de réduire les coûts de gestion pour les entreprises tout en favorisant l'intégration. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Avis défavorable pour les mêmes raisons. Si le dispositif n'a pas été reconduit, ce fut plus par inadvertance que par volonté d'y mettre fin.

Le multiremplacement permet d'assurer les continuités tout en limitant les ruptures.

Les amendements identiques nos64 et 106 ne sont pas adoptés.

L'article 2 bis est adopté.

ARTICLE 2 TER

Mme le président.  - Amendement n°36 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

Mme Monique Lubin.  - L'échéance est inscrite dans la définition même de l'intérim, la durée des missions étant de dix-huit mois maximum ou trente-six mois pour les CDI intérimaires ; mais la commission a supprimé ce dernier plafond.

En quoi un travail de trois, cinq ou dix ans peut-il couvrir une absence ou un accroissement temporaire d'activité ? Notre amendement revient sur cette aberration : une mission temporaire non bornée dans le temps.

Mme le président.  - Amendement identique n°71, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Défendu.

Mme le président.  - Amendement identique n°98, présenté par le Gouvernement.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Défendu.

Mme le président.  - Amendement identique n°107, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Cette mesure légitime en réalité une forme de contrat aux droits réduits qui pourrait concurrencer les CDI et devenir une nouvelle norme.

La durée moyenne des CDI intérim est de huit mois ; 84 % des sorties se font par démission.

Cet article valide un état de fait sans questionner les effets sur les salariés et propose d'allonger arbitrairement la durée. La commission ne propose aucun amendement visant à mieux protéger les travailleurs, mais multiplie ceux qui arrangent les employeurs...

Un tel dispositif n'a pas sa place dans ce projet de loi ; il doit être supprimé.

Mme le président.  - Amendement identique n°113 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Fialaire et Gold, Mmes Guillotin et Pantel et MM. Requier et Roux.

Mme Maryse Carrère.  - Un tel article n'a pas sa place ici et devrait faire l'objet d'une concertation avec les partenaires sociaux.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Le CDI d'intérim (CDII) est plutôt vertueux : il est à durée indéterminée, il garantit une rémunération mensuelle minimale même en l'absence d'activité. Le relèvement de sa durée ne change rien au fait qu'il doit être réalisé dans les mêmes conditions que l'intérim, et ne peut donc se substituer à un CDI.

Nous pouvons aller plus loin pour augmenter le nombre de CDI, qui sont pour nous vertueux.

Il n'y a que 6 % de CDII aujourd'hui ; les entreprises d'intérim souhaitent faire passer ce taux à 20 %. Avis défavorable.

Les amendements identiques nos36 rectifié, 71, 98, 107 et 113 rectifié ne sont pas adoptés.

Mme le président.  - Amendement n°63, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Rédiger ainsi cet article :

L'article L. 1251-6 du code du travail est ainsi rédigé :

« Art. L. 1251-6.  -  Un utilisateur ne peut faire appel à un salarié temporaire que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire et seulement dans les cas suivants :

« 1° Remplacement d'un salarié en cas d'absence ou de suspension de son contrat de travail et pour pourvoir directement le poste de travail du salarié absent ;

« 2° Accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise. Au titre de ce motif, le nombre de salariés temporaires ne peut excéder 10 % de l'effectif occupé en moyenne au cours de l'année civile précédente dans les entreprises d'au moins onze salariés. Ce nombre obtenu est arrondi à l'unité supérieure. En cas de dépassement de ce taux, les contrats de travail excédentaires et par ordre d'ancienneté dans l'entreprise sont réputés être conclus pour une durée indéterminée avec l'entreprise utilisatrice. »

Mme Céline Brulin.  - L'intérim ne devrait servir qu'à couvrir une absence ou une hausse temporaire de l'activité de l'entreprise. Un usage accru révèle des besoins structurels dans les entreprises qu'elles devraient satisfaire par des recrutements. Nous proposons de limiter le nombre de personnes en intérim à 10 % de l'effectif total dans les entreprises d'au moins onze salariés.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Cela interdirait l'activité professionnelle de 695 000 équivalents temps plein... L'intérim -  plutôt en baisse récemment  - sert à pourvoir à des remplacements ou s'inscrit dans une logique de flexibilité. Il est pour nous plutôt vertueux. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°63 n'est pas adopté.

L'article 2 ter est adopté.

ARTICLE 3

Mme Monique Lubin .  - Jean-Pierre Sueur étant absent, je vous fais part de son étonnement d'avoir vu déclaré irrecevable au titre de l'article 45 l'un de ses amendements relatif aux accords d'entreprise en cas de liquidation judiciaire. L'article 3 du projet de loi modifie pourtant un article du code du travail sur les élections au CSE.

Il s'agissait de réparer l'injustice faite aux salariés de l'usine Proma à Gien dans le Loiret et à tous les salariés qui pourraient se retrouver dans la même situation. À cause du délai de dix-huit mois, les salariés n'ont pas pu toucher la prime supralégale de licenciement. Il serait utile de modifier cette disposition du code du travail.

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission.  - Je rappelle que l'irrecevabilité au titre de l'article 45 est définie par la commission sur avis des rapporteurs. En l'espèce, il était relatif non pas au régime de l'assurance chômage, mais à l'association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés, sujets qui se trouvent dans des parties différentes du code du travail...

C'est donc à ce titre et sans préjuger du contenu que cet amendement a été jugé comme dépourvu de lien, même indirect avec le texte en question.

L'article 3 est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 3

Mme le président.  - Amendement n°3 rectifié bis, présenté par Mmes Procaccia, F. Gerbaud et Micouleau et MM. Burgoa et Milon.

Après l'article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans les branches regroupant des établissements mentionnés aux articles L. 442-5 du code de l'éducation et L. 813-8 du code rural et de la pêche maritime, les suffrages des personnels enseignants liés par un contrat de droit public à l'État, qui les rémunère directement, et qui ne sont pas liés à l'établissement par un contrat de travail, sont recueillis dans des urnes distinctes pour les élections des membres du comité social et économique de ces établissements.

Dans ces branches, la représentativité des organisations syndicales prévue à l'article L. 2122-5 du code du travail est établie sur le fondement des suffrages exprimés par les personnels soumis aux stipulations conventionnelles.

Par dérogation aux deux premiers alinéas du présent article et dans l'attente de la mesure de l'audience prévue au même article L. 2122-5 effectuée dans les conditions prévues à ces mêmes alinéas, le ministre chargé du travail fixe, par arrêté, la liste et le poids des organisations syndicales reconnues représentatives dans ces branches sur le fondement des suffrages exprimés lors de la dernière mesure de l'audience quadriennale.

Mme Catherine Procaccia.  - Cet amendement technique résout une difficulté rencontrée par les branches de l'enseignement privé non lucratif et de l'enseignement agricole privé : le Conseil d'État a annulé l'arrêté fixant la liste des organisations syndicales représentatives en raison du statut dual des salariés et des maîtres.

Il est proposé de mettre en place des urnes séparées et un régime provisoire.

M. Olivier Henno, rapporteur.  - Cet amendement est technique mais pertinent. Un vide juridique existe dans ce domaine. Avis favorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Le Conseil d'État a considéré que la représentativité ne prenait en compte que les salariés de droit privé. Le double système de vote que vous proposez devrait favoriser la reprise du dialogue. Avis favorable.

Laissant la place à ma collègue Carole Grandjean, je vous remercie pour nos échanges d'aujourd'hui.

M. Alain Richard.  - Très bien !

L'amendement n°3 rectifié bis est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE 4

Mme Patricia Schillinger .  - Cet article reconnaît les proches aidants. Nous traversons des situations de vie qui nous obligent à faire un pas de côté, un pas vers l'autre. Ce don pour l'autre ne doit pas signifier se perdre, perdre ses projets, son temps, son avenir professionnel. C'est tout l'objet de la VAE.

Être là pour les autres est une preuve d'amour sans attente de retour, je le sais d'expérience. Mais notre rôle est de proposer à tous ceux qui vivent ces situations des solutions pour l'avenir. Leur vie professionnelle doit pouvoir reprendre sereinement.

Mme le président.  - Amendement n°59, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 21

Supprimer cet alinéa.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - La notion de bloc de compétences introduite par la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel est définie comme un ensemble homogène et cohérent de compétences contribuant à l'exercice autonome d'une activité professionnelle et pouvant être évalué et validé. Sur le papier, c'est beau.

Le Gouvernement a vanté la VAE, des démarches moins longues et plus accessibles. Pourtant, cela nous interroge sur le sens de la formation professionnelle.

Dans son rapport de 2017, le Centre d'études et de recherches sur les qualifications (Cereq) craignait que la construction de blocs n'amplifie le flou des compétences, des savoirs et des individus. Nous redoutons une balkanisation du système de certification, remettant en cause la qualité et le caractère national des diplômes.

M. Olivier Henno, rapporteur.  - C'est l'essence même de la VAE que de créer des passerelles entre les certifications. La VAE est une troisième voie entre le diplôme et la formation continue. La loi de 2018 visait à apporter de la fluidité et permettre l'acquisition de blocs de compétences au travers de la VAE. Avis défavorable.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée.  - Je rejoins le rapporteur. Comment donner de la fluidité à ces parcours, compléter le bagage déjà acquis par le salarié et accompagner ces personnes ? La fluidité dans la reconnaissance des compétences est essentielle. Avis défavorable.

L'amendement n°59 n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°75 rectifié, présenté par Mmes M. Vogel et Poncet Monge, MM. Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Alinéa 24

Après le mot :

salarié

insérer les mots :

et prend notamment en compte les besoins particuliers des Français de l'étranger

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Les parcours de VAE sont particulièrement longs et complexes pour les Français de l'étranger. Dans les faits, très peu de dossiers aboutissent à une certification : une dizaine sur plusieurs centaines. Les organismes sont plus sévères quand il s'agit d'une expérience obtenue à l'étranger.

Cet amendement inclut les spécificités des Français de l'étranger dans les critères de la commission paritaire interprofessionnelle chargée du financement des VAE.

M. Olivier Henno, rapporteur.  - Bonne question que celle de la VAE pour les Français résidant à l'étranger. Toutefois, la réponse n'est pas pertinente. La solution doit être trouvée dans le GIP, car toutes les VAE sont concernées. Avis défavorable.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée.  - L'intention est louable, mais tous nos compatriotes sont concernés par l'extension de la VAE. Votre amendement risquerait de limiter le champ ouvert aux Français de l'étranger au financement de projets de transition professionnelle par les commissions paritaires interprofessionnelles. Retrait sinon avis défavorable.

L'amendement n°75 rectifié n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°101, présenté par le Gouvernement.

I.  -  Alinéa 31, seconde phrase

Supprimer les mots :

, en tenant compte des besoins en qualifications selon les territoires,

II.  -  Alinéa 32

Supprimer les mots :

l'institution mentionnée à l'article L. 6123-5 et l'association mentionnée à l'article L. 5214-1

III.  -  Alinéa 33

Supprimer cet alinéa.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée.  - Le Gouvernement propose de créer un service public de la VAE afin de mieux prendre en compte les parcours de chacun. Je désapprouve les ajouts de la commission des affaires sociales.

Nous regrettons la complexité actuelle ; la liste des acteurs figurant de droit dans la liste du GIP ne peut être démesurément élargie. Nous l'avons restreinte aux seuls acteurs compétents en matière de VAE, pour mobiliser les plus impliqués. N'alourdissons pas la gestion de la VAE.

Il faut certes associer les régions, mais confier la présidence du GIP à un président de conseil régional reviendrait à préempter le mode de fonctionnement tout en imposant une participation financière supplémentaire.

Le Gouvernement propose de rétablir la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale.

Mme le président.  - Amendement n°74, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 31, seconde phrase

Supprimer les mots :

, en tenant compte des besoins en qualifications selon les territoires,

Mme Céline Brulin.  - Le service public de la VAE ne doit pas se limiter aux besoins en qualification des territoires. Cette formulation est trop restrictive.

M. Olivier Henno, rapporteur.  - Je remarque que des amendements du Gouvernement et du groupe CRCE vont dans le même sens. (Sourires)

La commission n'a pas souhaité marquer des différences territoriales, mais simplement s'adapter aux besoins des territoires.

L'association des régions de France (ARF) a donné son accord sur la présidence régionale.

Enfin, avec l'élargissement des participants au GIP -  notamment à l'Agefiph et à France compétences - nous incluons tous les acteurs nécessaires au développement de la VAE. Avis défavorable.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée.  - Sagesse.

L'amendement n°101 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°74.

Mme le président.  - Amendement n°58, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 32

Supprimer les mots :

ou privées

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - En raison de l'argument « adéquationniste » de cette réforme de la VAE, nous réservons le statut de membre de droit du GIP aux seules personnes morales publiques.

M. Olivier Henno, rapporteur.  - Les personnes morales de droit privé ne sont pas le diable (M. Laurent Burgoa acquiesce) et les personnes morales de droit public ne sont pas parées de toutes les vertus... Votre amendement aboutirait à ce que les opérateurs locaux de compétences ne puissent siéger au sein du GIP. Avis défavorable.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée.  - Même avis.

L'amendement n°58 n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°37 rectifié, présenté par Mme Meunier et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 41

Remplacer cet alinéa par cinq alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 6412-3.  -  La validation des acquis de l'expérience est prononcée par un jury dont les membres sont désignés par le président de l'université ou le chef de l'établissement d'enseignement supérieur en fonction de la nature de la validation demandée. Pour la validation des acquis de l'expérience, ce jury comprend, outre les enseignants-chercheurs qui en constituent la majorité, des personnes compétentes pour apprécier la nature des acquis, notamment professionnels, dont la validation est sollicitée. Les jurys sont composés de façon à concourir à une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes.

« Le jury se prononce au vu d'un dossier constitué par le candidat, à l'issue d'un entretien avec ce dernier et, le cas échéant, d'une mise en situation professionnelle réelle ou reconstituée, lorsque cette procédure est prévue par l'autorité qui délivre la certification.

« Le jury peut attribuer la totalité de la certification. À défaut, il se prononce sur l'étendue de la validation et, en cas de validation partielle, sur la nature des connaissances et aptitudes devant faire l'objet d'un contrôle complémentaire. Les parties de certification obtenues sont acquises définitivement. Ces parties de certifications permettent des dispenses d'épreuve si le règlement fixé par l'autorité administrative, l'établissement ou l'organisme qui délivre la certification prévoit des équivalences totales ou partielles.

« La validation produit les mêmes effets que le succès à l'épreuve ou aux épreuves de contrôle des connaissances et des aptitudes qu'elle remplace.

« Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application du présent article. » ;

Mme Michelle Meunier.  - En première lecture, l'Assemblée nationale a modifié l'organisation de la VAE, transférée du code de l'éducation vers le code du travail dans un prétendu souci de simplification, renvoyant les modalités de composition du jury de VAE au pouvoir réglementaire.

Pourtant, nous risquons d'éloigner ces jurys du monde universitaire. Le champ de l'enseignement supérieur et de la recherche, dont les moyens se sont étiolés, n'est pas responsable des retards pris et ne saurait être dépossédé de sa mission.

Les établissements d'enseignement supérieur et de recherche doivent rester majoritaires dans la composition des jurys.

Mme le président.  - Amendement n°60, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 41

Remplacer les mots :

dont la

par les mots :

. Les membres de ce jury doivent justifier d'au moins quatre ans d'exercice dans une activité relevant de la certification visée par le candidat. La

Mme Céline Brulin.  - Notre amendement prévoit que les membres du jury doivent justifier d'une expérience d'au moins quatre ans.

M. Olivier Henno, rapporteur.  - La VAE ne fonctionnait pas bien ; nous ne pouvions pas ne rien changer. Le changement de code vient opérer des changements nécessaires pour favoriser les évolutions dans la pratique tout en mobilisant les ministères certificateurs.

Je le redis, il faut introduire de la fluidité dans la VAE, et dans notre pays en général.

Quant aux jurys, il n'y en a pas assez. Les contraintes que vous proposez figent les choses. Avis défavorable aux deux amendements.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée.  - L'étape du jury est un goulot d'étranglement et l'article du code du travail sur les élections au CSE est l'une des raisons du dysfonctionnement des VAE. Il explique notamment la longueur des délais, jusqu'à 18 mois dont 8 mois pour la composition du jury.

L'article tel qu'il est rédigé est un levier de souplesse. Avis défavorable.

Mme Michelle Meunier.  - Fluidifier ne signifie pas procéder n'importe comment. Conserver ces dispositions dans le code de l'éducation donnerait une garantie sur les titres obtenus et non une certification au rabais délivrée parce que l'employeur en a besoin.

L'amendement n°37 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°60.

Mme le président.  - Amendement n°82 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Fialaire et Gold, Mmes Guillotin et Pantel et MM. Requier et Roux.

Alinéa 43

Remplacer le mot :

quarante-huit

par le mot :

soixante-douze

Mme Maryse Carrère.  - L'Assemblée nationale a allongé le congé de VAE de 24 à 48 heures : nous proposons 72 heures, pour donner aux candidats un peu plus de temps pour préparer l'épreuve de validation.

M. Olivier Henno, rapporteur.  - Si le congé était un frein à la VAE, nous ne verrions pas de difficulté à votre amendement. Les 48 heures suffisent. Le problème est celui de l'accompagnement. Avis défavorable.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée.  - Même avis.

L'amendement n°82 rectifié n'est pas adopté.

L'article 4 est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 4

Mme le président.  - Amendement n°100, présenté par le Gouvernement.

Après l'article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Afin de favoriser l'accès à la certification et l'insertion professionnelle dans les secteurs rencontrant des difficultés particulières de recrutement, à titre expérimental, pour une durée de trois ans à compter d'une date fixée par décret, et au plus tard le 1er mars 2023, les contrats de professionnalisation conclus par les employeurs de droit privé peuvent associer des actions en vue de la validation des acquis de l'expérience. 

Pour cette expérimentation, il peut être dérogé aux dispositions des articles L. 6314-1, L. 6325-1, L. 6325-2, L. 6325-11, L. 6325-13 et L. 6332-14 du code du travail.

Les modalités de mise en oeuvre de cette expérimentation, notamment les qualifications ou blocs de certifications professionnelles pouvant faire l'objet des mesures mise en oeuvre dans le cadre de la validation des acquis de l'expérience, sont déterminées par décret.

Au plus tard six mois suivant son terme, le Gouvernement présente au Parlement un rapport d'évaluation de cette expérimentation.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée.  - Les acteurs de l'accompagnement de la VAE et les employeurs de certains secteurs, dont la santé ou les transports, veulent une expérimentation sur la VAE inversée, rendant concomitantes l'acquisition de compétences par l'emploi et la formation et leur reconnaissance.

Alors que la VAE de droit commun suppose que la compétence est acquise au préalable, cette expérimentation permettra une montée en compétence progressive, un accompagnement du début à la fin et un dossier de validation de compétences acquises in itere. Le jury sanctionnera ces compétences.

Nous voulons tester des parcours sans couture, individualisés, vers un emploi durable dans les secteurs en tension, pour les personnes ne voulant ou ne pouvant s'engager dans un parcours classique.

Le contrat de professionnalisation offre de la sécurité, permet de financer les frais pédagogiques et garantit un salaire.

Le parcours doit s'adapter au bénéficiaire, pas le contraire. La VAE inversée est prometteuse, je compte sur vous pour l'expérimenter.

M. Olivier Henno, rapporteur.  - L'expérimentation est intéressante, même si j'ai un doute sur le terme de VAE inversée, mais après tout, quand on aime le gâteau aux pommes, on aime la tarte tatin ! (Rires et applaudissements) Avis favorable.

L'amendement n°100 est adopté et devient un article additionnel.

ARTICLE 5

Mme le président.  - Amendement n°38 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

Mme Monique Lubin.  - Nous contestons le recours systématique aux ordonnances. L'essence du Parlement est d'être un lieu de débats et d'échanges, non une simple chambre d'enregistrement.

Mme le président.  - Amendement identique n°61, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - La commission a supprimé des ratifications d'ordonnances qui ne sont plus en vigueur. Nous supprimons également les six ordonnances restantes : le domaine législatif est réservé au Parlement, et les ordonnances prises durant la crise sanitaire remettent en cause les droits fondamentaux au repos et aux congés.

M. Olivier Henno, rapporteur.  - S'il n'est pas pertinent de ratifier des ordonnances non opérantes, il faut ratifier celles qui produisent leurs effets. Avis défavorable.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée.  - Même avis.

Les amendements identiques nos38 rectifié et 61 ne sont pas adoptés.

Mme le président.  - Amendement n°99, présenté par le Gouvernement.

Rédiger ainsi cet article :

Sont ratifiées :

1° L'ordonnance n° 2020-322 du 25 mars 2020 adaptant temporairement les conditions et modalités d'attribution de l'indemnité complémentaire prévue à l'article L. 1226-1 du code du travail et modifiant, à titre exceptionnel, les dates limites et les modalités de versement des sommes versées au titre de l'intéressement et de la participation ;

2° L'ordonnance n° 2020-323 du 25 mars 2020 portant mesures d'urgence en matière de congés payés, de durée du travail et de jours de repos ;

3° L'ordonnance n° 2020-324 du 25 mars 2020 portant mesures d'urgence en matière de revenus de remplacement mentionnés à l'article L. 5421-2 du code du travail ;

4° L'ordonnance n° 2020-346 du 27 mars 2020 portant mesures d'urgence en matière d'activité partielle ;

5° L'ordonnance n° 2020-386 du 1er avril 2020 adaptant les conditions d'exercice des missions des services de santé au travail à l'urgence sanitaire et modifiant le régime des demandes préalables d'autorisation d'activité partielle ;

6° L'ordonnance n° 2020-388 du 1er avril 2020 relative au report du scrutin de mesure de l'audience syndicale auprès des salariés des entreprises de moins de onze salariés et à la prorogation des mandats des conseillers prud'hommes et membres des commissions paritaires régionales interprofessionnelles ;

7° L'ordonnance n° 2020-389 du 1er avril 2020 portant mesures d'urgence relatives aux instances représentatives du personnel ;

8° L'ordonnance n° 2020-770 du 24 juin 2020 relative à l'adaptation du taux horaire de l'allocation d'activité partielle ;

9° L'ordonnance n° 2020-1255 du 14 octobre 2020 relative à l'adaptation de l'allocation et de l'indemnité d'activité partielle ;

10° L'ordonnance n° 2020-1441 du 25 novembre 2020 portant adaptation des règles relatives aux réunions des instances représentatives du personnel ;

11° L'ordonnance n° 2020-1442 du 25 novembre 2020 rétablissant des mesures d'urgence en matière de revenus de remplacement mentionnés à l'article L. 5421-2 du code du travail ;

12° L'ordonnance n° 2020-1502 du 2 décembre 2020 adaptant les conditions d'exercice des missions des services de santé au travail à l'urgence sanitaire ;

13° L'ordonnance n° 2020-1597 du 16 décembre 2020 portant mesures d'urgence en matière de congés payés et de jours de repos, de renouvellement de certains contrats et de prêt de main-d'oeuvre ;

14° L'ordonnance n° 2020-1639 du 21 décembre 2020 portant mesures d'urgence en matière d'activité partielle ;

15° L'ordonnance n° 2021-135 du 10 février 2021 portant diverses mesures d'urgence dans les domaines du travail et de l'emploi ;

16° L'ordonnance n° 2021-136 du 10 février 2021 portant adaptation des mesures d'urgence en matière d'activité partielle ;

17° L'ordonnance n° 2021-797 du 23 juin 2021 relative au recouvrement, à l'affectation et au contrôle des contributions des employeurs au titre du financement de la formation professionnelle et de l'apprentissage ;

18° L'ordonnance n° 2021-1013 du 31 juillet 2021 modifiant l'ordonnance n° 2020-324 du 25 mars 2020 portant mesures d'urgence en matière de revenus de remplacement mentionnés à l'article L. 5421-2 du code du travail ;

19° L'ordonnance n° 2021-1214 du 22 septembre 2021 portant adaptation de mesures d'urgence en matière d'activité partielle ;

20° L'ordonnance n° 2022-543 du 13 avril 2022 portant adaptation des dispositions relatives à l'activité réduite pour le maintien en emploi.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée.  - L'amendement rétablit la liste des ordonnances prévues par le texte initial. La suppression des ordonnances votée par la commission rend caducs des textes ayant eu un impact sur des millions de personnes et des outils ayant permis de gérer la situation de la crise sanitaire.

Une différence toutefois : nous ne retenons pas l'ordonnance du 2 mai 2020 adaptant temporairement les délais applicables pour la consultation et l'information du CSE, devenue sans objet avec la décision du Conseil d'Etat du 19 mai 2021.

M. Olivier Henno, rapporteur.  - Par cohérence, avis défavorable. Nous ne sommes pas dupes sur vos motivations statistiques... Nous ne voyons pas la nécessité de ratifier des ordonnances caduques. (Sourires et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Alain Richard.  - Un bref avis juridique : la non-ratification de ces ordonnances qui ont porté un effet juridique et qui n'en ont plus, n'a pas d'effet rétroactif sur les effets de ces ordonnances lorsqu'elles étaient en vigueur. Le débat est esthétique. Le Sénat, en retirant ces ordonnances de la liste, ne prononce pas d'annulation.

L'amendement n°99 n'est pas adopté.

L'article 5 est adopté.

APRÈS L'ARTICLE 5

Mme le président.  - Amendement n°39 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport relatif aux effets de la réforme de l'assurance chômage pour les jeunes.

Mme Monique Lubin.  - Nous demandons un rapport sur les effets de la réforme de l'assurance chômage sur les jeunes, qui souffrent tout particulièrement des effets de la réforme de 2018 et dont le taux de chômage reste très haut : 17,4 % en juillet 2022 selon l'OCDE.

Prenons une jeune femme de 23 ans ayant occupé un emploi saisonnier pendant un mois, suivi de six mois de chômage puis d'un CDD d'un an : Pôle emploi prendra en compte sa période d'inactivité, diminuant mécaniquement ses allocations. On précarisera encore davantage les plus fragiles.

M. Olivier Henno, rapporteur.  - Conformément à la jurisprudence du Sénat sur les demandes de rapport, avis défavorable.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée.  - Avis défavorable.

L'amendement n°39 rectifié n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°91, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de quatre mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport annuel sur l'impact de la réforme de l'assurance chômage sur l'évolution des salaires en France.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - L'économiste Yann Algan démontre que la réduction des indemnités chômage présente des externalités négatives en matière de retour à l'emploi et de maintien de la masse salariale, car des indemnisations généreuses incitent à rejeter des offres de piètre qualité.

La méta-analyse de la Dares conclut que le durcissement pousse à accepter des offres ne répondant pas aux aspirations des demandeurs d'emploi, avec un impact négatif sur le pouvoir de négociation des salariés en place.

Il faut obtenir des données solides sur les externalités négatives de la réforme de 2019. D'où cette demande de rapport.

M. Olivier Henno, rapporteur.  - Avis défavorable.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée.  - Des travaux d'évaluation sont engagés depuis le printemps : les résultats seront communiqués d'ici à fin 2024. Nous apporterons des éléments statistiques, qualitatifs et quantitatifs. Demande de retrait ou avis défavorable.

L'amendement n°91 n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°40 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, trois mois après la promulgation de la présente loi, un rapport exposant l'impact sur les demandeurs d'emploi de la possibilité de rendre dégressive l'allocation d'assurance chômage au sens de l'article L. 5422-3 du code du travail.

Ce rapport évalue notamment l'efficacité économique, budgétaire et sociale de la possibilité mentionnée au premier alinéa.

Ce rapport peut faire l'objet d'un débat en commission permanente ou en séance publique.

 

Mme Monique Lubin.  - Nous demandons un rapport sur l'efficacité de la dégressivité de l'allocation chômage. Je connais déjà votre réponse, mais nos amendements sont l'occasion de soulever ces questions. Nous avons plusieurs fois déploré durant nos débats le manque de documentation.

M. Olivier Henno, rapporteur.  - Nous ne sommes pas défavorables à l'évaluation des politiques publiques, loin de là, mais ce n'est pas le rôle de la législation que de demander ces rapports. Avis défavorable.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée.  - Même avis.

L'amendement n°40 rectifié n'est pas adopté.

Mme le président.  - Amendement n°41 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, trois mois après la promulgation de la présente loi, un rapport faisant des propositions pour rendre l'assurance chômage universelle, dotée de financements propres, négociée uniquement par les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d'employeurs représentatives.

Ce rapport fait notamment des propositions pour ouvrir l'assurance chômage aux travailleurs des plateformes numériques et élargir son accès aux travailleurs démissionnaires et aux travailleurs indépendants.

Ce rapport peut faire l'objet d'un débat en commission permanente ou en séance publique.

Mme Monique Lubin.  - Nous proposons d'imaginer l'assurance chômage idéale : négociée par les partenaires sociaux, sur un mécanisme assurantiel, dotée de financements propres, ouverte à ceux qui en sont exclus. À défaut de rapport, nous proposons la tenue d'un débat.

M. Olivier Henno, rapporteur.  - Avis défavorable, là encore.

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée.  - Même avis.

L'amendement n°41 rectifié n'est pas adopté.

L'article 6 est adopté.

L'article 7 est adopté.

INTITULÉ DU PROJET DE LOI

Mme le président.  - Amendement n°69, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Rédiger ainsi cet intitulé : 

Modulation et réduction des droits à l'assurance chômage

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Défendu.

Mme le président.  - Amendement n°42 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Remplacer les mots : 

mesures d'urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi

par les mots : 

dispositions dérogatoires relatives au régime d'assurance-chômage 

Mme Monique Lubin.  - En forme de clin d'oeil, nous proposons que l'intitulé reflète le chèque en blanc que demande le Gouvernement pour réformer l'assurance chômage - après une simple concertation des partenaires sociaux et sans obligation de résultat ni garde-fou.

M. Olivier Henno, rapporteur.  - Avis défavorable. Ne refaisons pas le match ! (Sourires)

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée.  - Même avis.

L'amendement n°69 n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°42 rectifié.

Interventions sur l'ensemble

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - Quel bilan tirer de nos débats ? Les salariés ont beaucoup perdu, le Gouvernement prend les rênes de l'assurance chômage, il va moduler les règles d'indemnisation, sans négociation, selon les territoires et la conjoncture.

Les allocations chômage seront supprimées après trois refus de CDI et les abandons de poste seront présumés être des démissions. Les intérimaires refusant un CDI perdront leurs droits.

En revanche, les entreprises ont largement gagné avec notamment le multiremplacement en CDD et la révision du bonus-malus. La majorité sénatoriale a marqué le texte de son empreinte - qui est celle des intérêts du patronat. Le groupe CRCE votera contre.

Mme Monique Lubin .  - Le débat a été l'occasion d'exprimer des points de vue bien différents. Le groupe SER était déjà en désaccord avec la réforme de 2019, nous le restons aujourd'hui.

La majorité sénatoriale a durci le texte. Ce soir, nous avons entendu des propos qui nous ont fait frémir, faisant passer les demandeurs d'emploi pour une engeance qui refuserait tout emploi et serait la cause des difficultés des entreprises en mal de salariés.

Pourquoi tant de postes restent-ils à pourvoir ? C'est avant tout une question de formation, d'attractivité des métiers et de rémunération. Nous voterons contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)

M. Daniel Chasseing .  - Je félicite les rapporteurs pour leur travail. La France a l'un des meilleurs systèmes d'indemnisation d'Europe : il faut le conserver et l'améliorer.

Le plein emploi améliorera le financement de la sécurité sociale. La prise en main par le Gouvernement, prévue par l'article premier, est limitée par les apports de la commission, qui remet les partenaires sociaux dans le jeu.

Il n'y aura pas d'indemnisation chômage si un salarié en CDD a refusé trois CDI, ou si un intérimaire refuse un CDI. L'abandon de poste est assimilé à une démission : c'était attendu.

Enfin, je salue le développement et la facilitation de la VAE et l'accompagnement envisagé. Le service public de la VAE est très important pour le développement de l'emploi, notamment dans le secteur médico-social.

Mme Raymonde Poncet Monge .  - Le débat a reflété le décalage abyssal entre la réalité de la situation de millions de demandeurs d'emploi et les discours tenus ici sur eux et, comme toujours, sans eux.

La feuille de route du Gouvernement est claire. Les mêmes pistes sont mâtinées d'un nouveau paramètre dit contracyclique.

Rien, en revanche, sur la qualité des emplois proposés dans les secteurs en tension, sur la rémunération, les conditions de travail, le manque d'attractivité et de sens...

La pression sur les entreprises qui abusent des contrats courts est un simulacre.

Nous nous orientons vers un plein emploi répressif, sur fond d'invisibilisation des chômeurs. Le texte ressort plus dur qu'il n'était arrivé, c'est une belle performance. Le modèle canadien émergera par décret, sans consultation du Parlement.

Pour toutes ces raisons, le groupe GEST votera contre ce projet de loi.

M. Philippe Mouiller .  - C'est un texte profondément remanié par le Sénat que nous adopterons ce soir.

Nous avons affirmé notre attachement au paritarisme et inscrit dans le texte le principe de modulation envisagé par le Gouvernement. Nous avons recentré le bonus-malus sur les cas de permittence.

Notre Haute Assemblée a insufflé au présent texte une plus grande ambition. Equilibré, il répond aux besoins des demandeurs d'emploi comme des entreprises.

J'ai une pensée particulière pour nos rapporteurs, dont je salue le brillant travail. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Nadège Havet .  - Nos débats ont été riches. Ils ont mis en lumière nos avis divergents sur les refus de CDI après plusieurs CDD ou sur l'intérim. Je salue toutefois les avancées à l'article premier et à l'article 4, sur la VAE.

Mon expérience personnelle à Pôle emploi m'a montré l'importance de l'écoute. Soyons nous aussi à l'écoute en avançant ensemble à l'occasion de la CMP. Le groupe RDPI votera majoritairement ce texte. (M. Bernard Buis applaudit.)

Mme Annick Jacquemet .  - Je remercie les rapporteurs pour leur bon sens. Le groupe UC votera ce texte, qui comporte des avancées pour les entreprises qui ont du mal à recruter. Je pense aussi au secteur médico-social. Permettez-moi un mot pour tous les bénévoles qui travaillent dans les associations et qui verront, avec les dispositions du texte sur la VAE, leur engagement reconnu. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains et sur le banc des commissions)

Le projet de loi, modifié, est adopté.

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission.  - Je remercie les ministres pour leur présence et leur écoute. Je félicite à mon tour nos deux rapporteurs, qui ont réussi l'exploit de défendre un texte précis et n'ont éludé aucune question de nos collègues. J'espère que nous travaillerons souvent dans un esprit aussi constructif ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC ; Mme Véronique Guillotin applaudit également.)

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée.  - Je remercie la présidence, la présidente de la commission, les commissaires aux affaires sociales et tous les intervenants pour leur contribution. Je remercie tout particulièrement les deux rapporteurs, qui ont su faire progresser ce texte dans le respect et le dialogue. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du RDSE et sur quelques travées du groupe Les Républicains).

Prochaine séance demain, mercredi 26 octobre 2022, à 15 heures.

La séance levée est à 23 h 10.

Mardi 25 octobre 2022

Bas sommaire

Sommaire

Questions orales1

Devenir des conseillers numériques2

Mme Monique de Marco2

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications2

Égalité des droits des élus d'arrondissement2

Mme Marie-Arlette Carlotti2

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications2

Suppression de la CVAE aux départements et aux communes2

M. Rémi Cardon2

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications2

Soutien aux collectivités face à la hausse des coûts2

M. Jean-Marc Todeschini2

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications2

Imposition des Français travaillant en Belgique2

M. Jean-Pierre Decool2

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications2

Avenir du projet de Cité du théâtre à Paris2

Mme Catherine Dumas2

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture2

Autorisations d'urbanisme pour l'installation de panneaux photovoltaïques2

Mme Chantal Deseyne2

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture2

Budget alloué au réseau diplomatique et consulaire2

Mme Hélène Conway-Mouret2

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture2

Accessibilité au patrimoine sportif français et mondial2

Mme Sylvie Robert2

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture2

Prise en charge des nouveau-nés placés2

Mme Florence Lassarade2

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance2

Site d'Oyonnax de l'INSA2

M. Patrick Chaize2

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance2

Prise en compte des travaux d'utilité collective pour la retraite2

Mme Monique Lubin2

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance2

Manque de places en instituts médicaux éducatifs2

Mme Vivette Lopez2

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées2

Assistantes maternelles impayées2

M. Henri Cabanel2

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées2

Niveaux de dioxines autour de l'incinérateur d'Ivry-Paris XIII2

Mme Catherine Procaccia2

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées2

Extension du Nutri-score aux fruits et légumes frais2

Mme Françoise Férat2

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées2

Dépistage du diabète2

Mme Anne Ventalon2

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées2

Dépistage du saturnisme - Metaleurop Nord2

Mme Sabine Van Heghe2

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées2

Évolution du zonage des chirurgiens-dentistes2

M. Olivier Rietmann2

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées2

Stages obligatoires en milieu rural pour les étudiants en médecine2

M. Bruno Belin2

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées2

Réseaux de soins fermés2

M. Jean-Michel Arnaud2

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées2

Création d'un CHU en Moselle2

Mme Christine Herzog2

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées2

Désertification médicale2

M. Hervé Maurey2

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées2

Production électrique en Guyane2

M. Georges Patient2

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie2

Zéro artificialisation nette2

M. Jean-Pierre Corbisez2

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie2

Indemnisation des élus pour leurs déplacements2

M. Frédéric Marchand2

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie2

Plan Avenir montagnes2

Mme Viviane Artigalas2

Défense des terres agricoles de Gonesse et Saclay2

M. Jacques Fernique2

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie2

Bornes de recharge électrique2

M. Jean-Claude Tissot2

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie2

Ligne ferroviaire Le Havre-Marseille2

Mme Céline Brulin2

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie2

Rétablissement de la « Palombe bleue »2

M. Max Brisson2

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie2

Augmentation des prix de l'énergie2

M. Stéphane Demilly2

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie2

Codes postaux et communes nouvelles2

M. Daniel Gueret2

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales2

Détournement du droit de préemption urbain2

M. Jean-Raymond Hugonet2

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales2

Collectivités face à l'inflation2

Mme Cathy Apourceau-Poly2

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales2

Mode d'emploi des procurations dématérialisées2

M. Yves Détraigne2

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales2

Travailleurs sans-papiers de Chronopost à Alfortville2

Mme Laurence Cohen2

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales2

Sortie du moratoire sur les machines à voter2

M. Michel Savin2

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales2

Pouvoirs du maire2

M. Jean-Marie Mizzon2

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales2

Renouvellement de titres d'identité2

M. Édouard Courtial2

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales2

Certification environnementale des exploitations agricoles2

M. Alain Milon2

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire2

Difficultés des producteurs de lait bio2

M. Didier Rambaud2

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire2

Conséquences de l'été 2022 sur les récoltes de pommes de terre2

M. Antoine Lefèvre2

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire2

Conséquences de la loi ÉGalim dans la restauration scolaire et collective2

Mme Else Joseph2

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire2

Décès d'anciens sénateurs2

Salut à une délégation sénatoriale roumaine2

Fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (Procédure accélérée)2

Discussion générale2

M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion2

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l'enseignement et de la formation professionnels2

Salut à une délégation sénatoriale ivoirienne2

Fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (Procédure accélérée - Suite)2

Discussion générale (Suite)2

Mme Frédérique Puissat, rapporteur de la commission des affaires sociales2

M. Olivier Henno, rapporteur de la commission des affaires sociales2

Question préalable2

Mme Cathy Apourceau-Poly2

Discussion générale (Suite)2

Mme Laurence Cohen2

M. Jean-Marie Vanlerenberghe2

Mme Maryse Carrère2

Mme Pascale Gruny2

Mme Colette Mélot2

Mme Raymonde Poncet Monge2

M. Martin Lévrier2

Mme Monique Lubin2

Mme Annick Jacquemet2

Discussion des articles2

ARTICLE PREMIER2

M. Philippe Mouiller2

M. Yan Chantrel2

Mme Esther Benbassa2

Mme Monique Lubin2

M. Olivier Dussopt, ministre2

APRÈS L'ARTICLE PREMIER2

ARTICLE PREMIER BIS AA2

Salut à une délégation sénatoriale philippine2

Fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (Procédure accélérée - Suite)2

Discussion des articles (Suite)2

APRÈS L'ARTICLE PREMIER BIS AA2

ARTICLE PREMIER BIS AB2

ARTICLE PREMIER BIS A2

APRÈS L'ARTICLE PREMIER BIS A2

ARTICLE 22

SÉANCE

du mardi 25 octobre 2022

10e séance de la session ordinaire 2022-2023

présidence de Mme Nathalie Delattre, vice-présidente

Secrétaires : Mme Jacqueline Eustache-Brinio, M. Loïc Hervé.

La séance est ouverte à 9 h 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Questions orales

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle quarante-quatre questions orales.

Devenir des conseillers numériques

Mme Monique de Marco .  - La dématérialisation des services publics s'accélère alors que le confinement a aggravé la fracture numérique, avec treize millions de Français en difficulté.

Début 2021, le Gouvernement a créé les conseillers numériques, contrats de projet de dix-huit à vingt-quatre mois subventionnés au niveau du Smic. Les quatre mille conseillers annoncés devaient procéder, auprès de trois mille collectivités et associations, à huit cent mille accompagnements, à domicile si nécessaire. Or les besoins s'accroissent.

Cependant, la formation n'est pas toujours adaptée, le salaire est minimal et les conditions sont précaires. Ni les collectivités ni les associations ne pourront les renouveler. Nous ne retrouvons pas de trace dans le projet de loi de finances (PLF) des 75 millions d'euros annoncés, alors que 250 millions d'euros avaient été engagés pour amorcer le dispositif.

Comment l'État entend-il le pérenniser ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications .  - Le Gouvernement s'est engagé, avec la Première ministre, à ce que l'État poursuive la médiation numérique dans les années à venir. Après la relance, nous souhaitons réunir une ambition collective face à l'enjeu social des fragilités numériques.

Je suis optimiste après l'échange avec les parties prenantes sur les conseillers numériques : toutes sont concernées par leur montée en charge et l'organisation de leur action territoriale. Pour 2023, 44 millions d'euros s'ajoutent aux sommes déjà provisionnées, pour un total de 75 millions d'euros. En outre, nous accompagnerons les collectivités dans leur recherche de fonds complémentaires.

Les modalités seront concertées dans les prochaines semaines, comme nous l'avons annoncé à Lens le 29 septembre. Les contrats arrivant à échéance au printemps seront renouvelés dans les mêmes conditions.

La formation, obligatoire et diplômante, était insuffisante : il faut la renforcer. Le ministère du travail travaille à un plan de développement de l'emploi et des compétences entre l'État et les organismes partenaires.

Mme Monique de Marco.  - Je vous remercie pour ces engagements.

Égalité des droits des élus d'arrondissement

Mme Marie-Arlette Carlotti .  - Si les élus d'arrondissement de Paris et de Marseille ont les mêmes devoirs que tous les élus municipaux de France, ils n'ont pas les mêmes droits, notamment pour les frais de garde, le détachement, la formation ou encore l'accompagnement et l'aide technique pour les élus en situation de handicap.

Nous avions souligné, à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances rectificatif (PLFR) pour 2022, le besoin d'aligner leur régime sur celui des conseillers de Paris, de Lyon et de Marseille. Le ministre Bruno Le Maire s'était engagé à le faire à l'occasion du PLF pour 2023 : qu'en est-il ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications .  - Certains avantages des élus communaux, comme la majoration de leur indemnité et celle de la durée des crédits, ne sont accordés que dans certains cas : chefs-lieux, communes sinistrées, stations de tourisme, communes dont la population a augmenté à la suite de travaux publics d'intérêt national, communes percevant la dotation de solidarité urbaine ou la dotation d'aménagement des communes d'outre-mer. Les élus d'arrondissement n'y sont pas forcément éligibles.

Il y a en outre des difficultés opérationnelles. Ainsi, l'allocation différentielle de fin de mandat (ADFM) est financée par les cotisations des collectivités concernées. Or les arrondissements ne sont pas une collectivité distincte de la commune et ne cotisent donc pas.

Mme Marie-Arlette Carlotti.  - Les élus de Paris, de Lyon et de Marseille devraient être traités de la même manière car ils sont élus de la même manière. Réexaminez notre proposition à cette heure où ils ont particulièrement besoin d'être soutenus.

Suppression de la CVAE aux départements et aux communes

M. Rémi Cardon .  - Après la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) aux régions, pour 7,2 milliards d'euros par an, le Gouvernement a annoncé celle de la fraction aux communes et aux intercommunalités, pour 7 milliards d'euros, compensée par un nouveau transfert de recettes de TVA. Après la suppression de la taxe d'habitation et de la cotisation foncière des entreprises (CFE), vous recentralisez les recettes des collectivités selon une philosophie néolibérale.

Les élus des collectivités ne sont-ils pas aptes à gérer leurs finances ? La CVAE servait pourtant à l'exercice de leurs compétences : social, transport, éducation. Alors que le déficit public atteint des sommets, l'État supportera-t-il durablement la compensation de la CVAE ? Celle-ci ne sera-t-elle pas déconnectée de la réalité des territoires ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications .  - La CVAE sera totalement supprimée pour soutenir l'activité économique et la reconquête industrielle, dans le prolongement de l'allégement des impôts de production. La moitié sera supprimée dès 2023, et la totalité en 2024. Dès le 1er janvier 2023, les pertes seront compensées par l'affectation d'une fraction de la TVA, recette pérenne qui suit la dynamique de l'inflation.

Nous avons élargi la période de référence de la compensation pour tenir compte du dynamisme des recettes de la CVAE pour 2023 : elle sera donc basée sur la moyenne quadriennale 2020-2023. En outre, la dynamique de la fraction de TVA tiendra compte, via un fonds national d'attractivité économique des territoires, du dynamisme économique local : voilà qui répond à votre préoccupation sur la déconnexion.

En concertation avec l'association des départements de France (ADF), ceux-ci n'ont pas intégré le dispositif. Chacun bénéficiera du dynamisme de sa fraction de TVA, sur le modèle des régions.

Les pertes de recettes des régions seront compensées par une dotation égale aux montants perçus en 2022.

M. Rémi Cardon.  - Vous mettez les collectivités sous tutelle financière alors que ce sont les impôts des ménages qui compenseront la suppression des impôts de production.

Soutien aux collectivités face à la hausse des coûts

M. Jean-Marc Todeschini .  - La loi de finances rectificative (LFR) pour 2022 prévoit des critères cumulatifs au dispositif de soutien voté par les parlementaires : l'épargne brute à la fin 2021 doit être inférieure à 22 % des recettes de fonctionnement, et elle doit avoir baissé de plus de 25 % en 2022. Ce couperet exclut de nombreuses collectivités du dispositif.

Des collectivités à la gestion imprudente seront aidées alors que d'autres, bien gérées mais aux faibles recettes, ne le seront pas, alors que le renchérissement du point d'indice et des prix, particulièrement de l'énergie et de l'alimentation, grèveront leur budget.

Quelles sont les solutions pour que les collectivités à faible potentiel fiscal, notamment les plus modestes, ne soient pas traitées inéquitablement ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications .  - Au 31 décembre 2021, 24 000 collectivités satisfaisaient le premier critère de l'article 14 de la LFR du 16 août 2022. Cet article impose trois seuils : fragilité financière, situation financière dégradée, épargne brute inférieure à 22 % des recettes et un potentiel financier inférieur au double de la moyenne de la strate démographique.

Cela permet de concentrer le soutien de l'État. Un saupoudrage ne serait pas à l'avantage des collectivités les plus fragiles.

Enfin, le potentiel financier appréhende justement la richesse relative du territoire, car il comprend la dotation globale de fonctionnement (DGF) en plus du potentiel fiscal. Ce dernier critère est d'ailleurs contesté en raison de la suppression de la taxe d'imposition, c'est pourquoi le comité des finances locales travaille à redéfinir ses paramètres.

M. Jean-Marc Todeschini.  - Je ne suis pas satisfait après les annonces du ministre du budget en faveur des entreprises. La dépendance des communes les plus modestes aux dotations de l'État est totale, alors que Rémi Cardon a évoqué la perte de la CVAE. Vous allez tuer les collectivités qui représentent pourtant les trois quarts de l'investissement public.

Imposition des Français travaillant en Belgique

M. Jean-Pierre Decool .  - L'article 10 de la convention du 10 mars 1964 entre la France et la Belgique prévoit que les revenus de la fonction publique sont imposables par l'État payeur, à l'exception des personnes possédant la nationalité de leur pays de résidence sans avoir la nationalité de celui où elles travaillent : celles-ci sont alors imposées par l'État de résidence. Ainsi, une personne résidant en France sans la nationalité belge aura sa rémunération de la fonction publique belge imposée en France.

Cela protège les résidents français d'une imposition belge 20 à 30 fois supérieure. Cependant, la nouvelle convention de 2021, signée pour prévenir la double imposition, revient sur cette disposition. Les frontaliers sont inquiets alors que la question du pouvoir d'achat ne peut être éludée : des centaines de familles sont concernées.

Entendez-vous exclure de la convention le personnel public embauché avant sa ratification ?

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications .  - La convention du 9 novembre 2021 remplace celle de 1964 et comporte des avancées favorables à la France tout en préservant le régime des frontaliers prévu au protocole additionnel de 1964. Les rémunérations publiques sont imposées par l'État qui les verse : c'est logique, car elles sont financées par ses ressources.

Cela est conforme au modèle de l'OCDE et courant dans notre réseau conventionnel. C'est pourquoi les personnes travaillant en Belgique pour des entités belges y seront taxées même si elles résident en France - la réciproque est d'ailleurs vraie. Ainsi, seuls les résidents français, de nationalité française, percevant un traitement belge et exerçant en Belgique, voient leur situation évoluer. Il y a certes un différentiel d'imposition sur le revenu, mais le Gouvernement belge a récemment proposé des évolutions favorables.

M. Jean-Pierre Decool.  - Depuis 1964, les Français se sentent protégés. Les craintes des familles transfrontalières sont légitimes : prêtez-leur votre attention bienveillante.

Avenir du projet de Cité du théâtre à Paris

Mme Catherine Dumas .  - Lancé en octobre 2016, le projet de Cité du théâtre dans le 17e arrondissement de Paris, qui s'inscrit dans le cadre de la réhabilitation des ateliers Berthier, tarde à se mettre en place. Le Conservatoire national supérieur d'art dramatique (CNASD), le Théâtre national de l'Odéon et la Comédie française disposeront d'espaces de représentation, de stockage, de répétition et d'accueil du public, en cohérence avec leurs ambitions artistiques municipales, nationales et internationales.

En avril 2021, le conseil de Paris adoptait à l'unanimité une résolution visant à créer un groupement d'intérêt public (GIP) regroupant ces trois institutions. Ce projet va-t-il enfin se concrétiser ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture .  - Françoise Nyssen a confirmé le bien-fondé de ce projet en 2017. Un GIP rassemblant les trois institutions que vous avez citées a été créé et des études ont été menées. Toutefois, le coût total - hors foncier - est estimé à 141 millions d'euros dans l'avant-projet sommaire, contre 86 millions en 2016, soit un dépassement de 55 millions d'euros. Un expert indépendant, missionné en vue de revenir à l'épure initiale, a proposé quatre scénarios.

Le Gouvernement prendra prochainement des décisions tenant compte de l'avis des institutions concernées et des moyens financiers disponibles. Nous examinerons également la valeur foncière des ateliers Berthier, en lien avec les services de la Ville de Paris.

Je vous remercie pour votre mobilisation en faveur de ce projet emblématique.

Mme Catherine Dumas.  - Je salue la présence en tribune du maire du 17e arrondissement, Geoffroy Boulard. Je l'associe à mes remerciements. Je forme le voeu que ce projet culturel essentiel pour Paris voie le jour en 2023.

Autorisations d'urbanisme pour l'installation de panneaux photovoltaïques

Mme Chantal Deseyne .  - Certaines communes rencontrent des difficultés lors de l'examen des autorisations d'urbanisme pour l'installation de panneaux photovoltaïques dans les zones classées. La commune d'Aunay-sous-Auneau a adapté son plan local d'urbanisme afin de tenir compte des objectifs de développement durable. Or elle fait partie d'une zone classée au titre des monuments historiques : les autorisations d'urbanisme y sont soumises à l'avis de l'architecte des bâtiments de France (ABF). Or ce dernier refuse systématiquement tous les projets d'installation de panneaux photovoltaïques orientés sud, ce qui entrave le développement des énergies renouvelables.

Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour mieux encadrer l'avis des ABF ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture .  - Concilier protection de l'environnement et protection du patrimoine est au coeur de la mission des ABF. Il s'agit d'éviter une trop grande disparité dans l'installation de panneaux photovoltaïques.

La France compte 6 % de sites protégés et les refus des ABF sont très rares. En 2021, sur 12 800 demandes portant sur la création de ces équipements, seules 2 300 ont reçu un premier avis défavorable. Certaines ont pu aboutir en suivant les recommandations émises par l'ABF. Deux déclarations préalables ont été déposées en 2021 et 2022 sur le territoire d'Aunay-sous-Auneau : dans les deux cas, l'ABF a donné son accord en le soumettant à des prescriptions.

Le dialogue fait émerger des solutions équilibrées pour le développement des énergies renouvelables et la protection du patrimoine. En lien avec le ministère de la transition écologique, une instruction ministérielle sera prochainement publiée à ce sujet.

Mme Chantal Deseyne.  - Concilions intérêts patrimoniaux et écologiques et favorisons l'adoption de prescriptions visant à promouvoir les énergies renouvelables.

Budget alloué au réseau diplomatique et consulaire

Mme Hélène Conway-Mouret .  - Notre réseau consulaire a perdu plus de 30 % de son personnel en vingt ans. Le programme 151 a contribué pour plus d'un tiers à l'effort de maîtrise des effectifs assigné au ministère par le dispositif « Action Publique 2022 ». La création de cent ETP dans le PLF 2023 est une bonne nouvelle.

Partout à l'étranger, la charge de travail des agents consulaires s'accroît. Malgré leurs efforts, les délais d'attente s'élèvent à plusieurs mois. Des officines privées bloquent les créneaux de rendez-vous pour mieux les revendre ensuite. Parfois, nos compatriotes se retrouvent dans l'incapacité de joindre leur consulat, même en cas d'urgence. Or l'externalisation des appels en provenance de treize pays entraîne de nouvelles dépenses : les économies prévues sont-elles bien au rendez-vous ?

Nous avons la chance de disposer de l'un des plus grands réseaux consulaires au monde. Des états généraux de la diplomatie s'ouvriront prochainement. Les créations de postes prévues en 2023 sont-elles le signe d'un effort dans la durée et d'une transformation structurelle ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture .  - Les services consulaires font en effet face à une forte demande, liée à un effet de rattrapage depuis la crise sanitaire. Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères poursuit sa modernisation : envoi postal sécurisé des passeports à domicile, création d'une nouvelle plateforme de prise de rendez-vous et installation à Paris d'un nouveau centre de soutien spécialisé. Le ministère veille à ce que cette modernisation ne se fasse pas au détriment de l'accueil physique dans les consulats.

La dotation du programme 151 - hors titre 2 - s'établit à 141,1 millions d'euros en crédits de paiement. Hors l'organisation des élections, elle progresse de 12,6 millions d'euros par rapport à 2022.

Mme Hélène Conway-Mouret.  - Je suis un peu déçue par cette réponse. Le Gouvernement devrait renforcer les moyens humains plutôt que de créer des task force. Les personnels sont en souffrance.

Accessibilité au patrimoine sportif français et mondial

Mme Sylvie Robert .  - En mai dernier, l'un des quarts de finale du tournoi de tennis de Roland-Garros était diffusé uniquement via une plateforme payante. Cette dernière a finalement accepté de libérer l'accès, moyennant la récupération des données des utilisateurs. Quelque 20 % des Français n'ayant pas accès à internet n'ont pas pu regarder cet événement, de même que nos concitoyens souffrant d'illectronisme. Nous assistons à la privatisation des événements sportifs de grande ampleur.

Or le patrimoine sportif ne peut devenir l'apanage des personnes ayant les moyens de souscrire des abonnements payants. Recherchons un meilleur équilibre entre la viabilité du modèle économique et l'accessibilité du plus grand nombre au sport.

Le Gouvernement est-il favorable à l'élargissement du décret du 22 décembre 2004 définissant une liste des événements sportifs d'importance majeure pouvant être regardés gratuitement ? L'accessibilité à de tels événements pourrait-elle constituer un motif de saisie en urgence de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) ?

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture .  - Je vous remercie pour votre engagement en faveur des bibliothèques.

Le décret du 22 décembre 2004 recense vingt-et-un événements sportifs majeurs accessibles gratuitement à la télévision. Le Gouvernement est favorable à l'élargissement de cette liste, la plus longue de tous les pays de l'Union européenne, aux jeux Paralympiques et aux compétitions féminines. La liste actualisée sera prochainement adressée à la Commission européenne, qui la valide en dernier ressort.

Je rappelle que les droits audiovisuels représentent une part importante des ressources des acteurs du sport français, depuis la création de la taxe Buffet. Le Gouvernement veille au maintien d'un juste équilibre.

La situation ne s'est pas dégradée ces dernières années : dans son analyse du 25 juillet 2022, l'Arcom indique que le poids des contenus sportifs diffusés gratuitement est passé de 4,2 % à 5,4 % entre 2012 et 2019, soit une hausse de 1,2 %.

Prise en charge des nouveau-nés placés

Mme Florence Lassarade .  - La prise en charge des nouveau-nés placés se dégrade fortement. En raison d'un manque de personnel dans les pouponnières, ceux-ci sont confiés aux services de la protection de l'enfance. Ces nourrissons souffrent d'hospitalisme, une forme de dépression survenant en cas de manque d'affection et lors d'un long séjour à l'hôpital. Le psychanalyste René Spitz a identifié ce trouble dès 1946 : ces enfants dépérissent progressivement, avec des conséquences funestes pour leur développement et leur vie d'adulte.

Les professionnels de la petite enfance, qui font face à une crise de recrutement, à une augmentation du nombre de mesures de placement et à une diminution du nombre de familles d'accueil, tirent la sonnette d'alarme. Quels moyens humains et financiers le Gouvernement compte-t-il débloquer en urgence pour répondre à ces situations inhumaines ?

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance .  - La protection des enfants les plus fragiles est au coeur de ma mission. Entre 2015 et 2020, les services ont dû faire face à une augmentation de 35 000 enfants placés. Le département de la Gironde a connu une évolution similaire.

Difficile de répondre à cette question, faute de statistiques nationales sur le nombre d'enfants en pouponnière. Je travaille avec les acteurs de la protection de l'enfance au sein du groupement d'intérêt public (GIP) « Enfance protégée » en vue d'élaborer un référentiel commun et d'améliorer la prise en charge de ces enfants.

Je rappelle que la protection de l'enfance est une compétence décentralisée : la situation varie fortement d'un département à l'autre. Toutefois, l'État doit être présent aux côtés des collectivités territoriales, en matière de recrutement notamment.

Il ne s'agit pas uniquement d'une question de moyens : les revalorisations salariales du Ségur de la santé ont été étendues aux acteurs de la protection de l'enfance. Nous faisons face également à une crise de sens : l'État sera aux côtés des départements et des professionnels pour assurer la protection de nos enfants.

Mme Florence Lassarade.  - Il est primordial que ces enfants puissent mener une vie normale.

Site d'Oyonnax de l'INSA

M. Patrick Chaize .  - La Plastics Vallée autour d'Oyonnax est un territoire d'industries, avec plus de 600 entreprises et près de 10 000 emplois. Mais pour rester compétitif, former de nouvelles forces vives et préparer les chefs d'entreprise de demain, il faut de nouveaux talents. C'est pourquoi la formation d'ingénieurs est cruciale.

La présence d'un site de l'Institut national des sciences appliquées (Insa) de Lyon sur le territoire oyonnaxien est un atout. Or l'Insa souhaite faire évoluer le cycle d'ingénieur de la plasturgie, ce qui risque de faire diminuer le nombre d'étudiants de moitié.

Que comptez-vous faire pour que la formation « ingénierie durable des polymères et composites » soit rapidement proposée aux étudiants ?

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance .  - Le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche accompagne les opérateurs dans la définition d'une offre de formation adaptée aux besoins du territoire. Le projet de l'Insa a été élaboré en partant des besoins des entreprises, notamment avec Polyvia, le syndicat professionnel de la plasturgie.

Les étudiants d'Oyonnax attendent des formations plus diversifiées. En adaptant son offre de formation aux besoins des étudiants et des entreprises, l'Insa envoie un message fort. Le ministère l'accompagnera pour répondre toujours mieux aux besoins du territoire.

M. Patrick Chaize.  - Sur le terrain, les choses se passent autrement. On est passé de 80 à seulement 35 étudiants ! Que Mme Retailleau vienne le constater sur place. Nous avons tout pour développer une formation de qualité, adaptée aux besoins des entreprises.

Prise en compte des travaux d'utilité collective pour la retraite

Mme Monique Lubin .  - Entre 1985 et 1990, environ 350 000 personnes ont travaillé dans le cadre des contrats aidés « travaux d'utilité collective » (TUC). Mais alors qu'ils préparent leur retraite, il leur manque des trimestres de cotisation. On les renvoie au décret du 19 mars 2014 et à la loi du 21 août 2003, mais ces textes ne répondent pas à leur problème. Ils ont pourtant rempli des missions de service public. Pourquoi ne pas se mettre autour de la table pour discuter de la validation de ces périodes de travail ?

Mme Charlotte Caubel, secrétaire d'État chargée de l'enfance .  - Entre 1984 et 1990, ces personnes avaient le statut de stagiaires de la formation professionnelle. Leur couverture sociale était assurée par l'État, avec des cotisations calculées sur des assiettes et selon des taux forfaitaires. Cela explique que toutes les périodes travaillées n'aient pu être validées au titre de la retraite. Pour valider un trimestre, il fallait l'équivalent de 200 heures de travail au Smic, un seuil porté à 150 heures au 1er janvier 2014. Toutefois, la loi de 2003 a ouvert une faculté de rachat de trimestres. Mais pour aller plus loin, il faudrait une évolution législative. Olivier Dussopt abordera probablement cette question dans le cadre des travaux qu'il a engagés avec les partenaires sociaux autour de la réforme des retraites.

Manque de places en instituts médicaux éducatifs

Mme Vivette Lopez .  - Le manque criant de places en instituts médicaux éducatifs (IME) a des conséquences sur la vie des familles comme sur le personnel enseignant. Les dossiers administratifs sont très lourds et ne débouchent parfois sur rien, faute de place. Le Gard ne compte que 656 places ; or 250 enfants sont en attente et aucune ouverture d'établissement n'est annoncée. Ces enfants à besoins spécifiques sont alors scolarisés en milieu scolaire inclusif, voire en milieu ordinaire ou dans des dispositifs particuliers.

Le Gouvernement s'était pourtant engagé à créer des centres spécialisés pour ne laisser aucun enfant au bord du chemin. Que comptez-vous faire ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - Nous faisons évoluer notre organisation pédagogique pour mieux accueillir ces enfants en milieu ordinaire, comme le font déjà certains pays européens. Mais de nombreux enfants sont encore sans solution et je mesure la difficulté pour les familles.

Des structures spécifiques ont été développées pour les accueillir au sein de l'Éducation nationale - unités d'enseignement autisme, dispositifs d'autorégulation, Itep, Ulis, etc. Nous créons régulièrement de nouvelles places dans les établissements médico-sociaux -  300 places enfants en 2023 et plus de 1 000 places adultes qui libéreront ainsi des places pour les enfants.

Le sens de l'histoire, c'est l'inclusion. Nous devons rapprocher l'Éducation nationale et le médico-social. La prochaine conférence nationale du handicap tracera l'acte II de l'école et de l'université inclusive.

Mme Vivette Lopez.  - Agissez ! C'est urgent.

Assistantes maternelles impayées

M. Henri Cabanel .  - Alors même que le tribunal leur a donné raison, les assistantes maternelles qui cherchent à récupérer des salaires impayés auprès de leur employeur se trouvent démunies. En effet, la prestation d'accueil du jeune enfant (Paje) perçue par l'employeur est insaisissable en vertu du code de la sécurité sociale. Des centaines d'assistantes maternelles sont sans solution.

Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il pour garantir le salaire des assistantes maternelles et trouver une solution pour celles qui n'ont pas été payées ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - Cette question relève du droit du travail. Mais le ministère a été alerté plusieurs fois ces dernières semaines et a donc pris contact avec l'Ufnafaam pour établir un état des lieux. L'absence de versement effectif du salaire n'ouvre pas droit à la Paje : autrement, c'est une fraude qui donne lieu à récupération des sommes indûment versées.

Depuis mai 2019, le service optionnel et gratuit Pajemploi+ permet de verser la rémunération due directement sur le compte bancaire du salarié et de prélever dans le même temps la somme restant à charge de l'employeur sur le compte de ce dernier. Cela simplifie et sécurise les démarches. Pourtant, les représentants des assistantes maternelles ne réclament pas unanimement la systématisation de Pajemploi+. Ils nous ont également fait remonter des cas d'assistantes maternelles privées de revenus en raison d'une suspension d'agrément à titre conservatoire. C'est pourquoi le comité de filière petite enfance a prévu d'étudier la création d'un fonds de garantie des salaires.

M. Henri Cabanel.  - Si les employeurs ont fraudé, la CAF doit pouvoir récupérer ces sommes pour les verser aux assistantes maternelles. Elles ont besoin du soutien du Gouvernement.

Niveaux de dioxines autour de l'incinérateur d'Ivry-Paris XIII

Mme Catherine Procaccia .  - Une étude d'un collectif écologique a révélé des concentrations de dioxines anormalement élevées près de l'incinérateur d'Ivry-Paris XIII, le plus grand d'Europe, avec près de 730 000 tonnes d'ordures brulées par an.

En février, l'agence régionale de santé (ARS) a donc recommandé aux habitants des communes proches de ne pas consommer les oeufs de poules élevées en plein air. Elle a aussi commandé une expertise toxicologique. L'usine affirme pourtant respecter strictement les normes et subit des contrôles réguliers.

N'ayant pas reçu de réponse en début d'année, je vous pose à nouveau la question : dans quels délais les résultats de l'étude diligentée par l'ARS seront-ils connus ? Quelles mesures concrètes allez-vous prendre pour protéger les habitants de Paris et du Val-de-Marne ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - La surveillance des émissions des incinérateurs relève de la direction régionale et interdépartementale de l'environnement, de l'aménagement et des transports (Drieat) d'Île-de-France. Une étude de Toxiwatch portant sur les oeufs a mis en évidence un dépassement des seuils de toxines autorisés, d'où la recommandation prise par l'ARS à titre conservatoire et prudentiel. Mais aucun lien de causalité n'a été mis en évidence. En outre, l'étude de Toxiwatch souffre de défauts méthodologiques. Enfin, des études de l'Anses et de Santé Publique France montrent que résider à proximité d'un incinérateur ne modifie pas les niveaux d'imprégnation aux dioxines - sauf à consommer des animaux élevés dans une zone polluée.

Une étude supplémentaire a donc été commandée par l'ARS, avec des résultats attendus pour le premier semestre 2023.

Mme Catherine Procaccia.  - La recommandation sur les oeufs est donc maintenue. Or vous avez eu connaissance de premiers résultats dès juillet, qui n'ont fait l'objet d'aucune communication. La population est inquiète. Vous auriez pu annoncer plus tôt que la méthodologie de la première étude était sujette à caution.

Extension du Nutri-score aux fruits et légumes frais

Mme Françoise Férat .  - Le Nutri-score a été créé par Santé publique France afin d'orienter les choix des consommateurs vers des aliments de meilleure qualité nutritionnelle. Les bénéfices pour la santé de la consommation régulière de fruits et légumes sont largement démontrés : elle joue un rôle positif dans la prévention des infarctus, de l'hypertension artérielle et de nombreux cancers.

Or nous sommes loin d'atteindre l'objectif de cinq fruits et légumes par jour. Le Nutri-score étant un étiquetage reconnu et apprécié des Français, peut-on l'étendre aux fruits et légumes frais, classés très majoritairement en A ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - Le Nutri-score bénéficie d'un fort soutien des consommateurs -  94 % d'entre eux y sont favorables. Début 2022, 875 industriels s'étaient déjà engagés dans cette démarche.

Le quatrième Programme national nutrition santé (PNNS) prévoit d'étendre, sur la base du volontariat, le Nutri-score à la restauration hors foyer et aux denrées non pré-emballées, dont les fruits et légumes frais. Le consommateur doit disposer d'une information simple, claire et transparente dans les rayons de produits bruts. L'affichage du Nutri-score encouragera la consommation des fruits et légumes frais, bénéfiques pour la santé. Par ailleurs, nous renouvelons les recommandations générales nutritionnelles visant à encourager la consommation d'au moins cinq fruits et légumes par jour.

Mme Françoise Férat.  - Merci pour cette réponse rassurante. Ce projet ne coûtera rien aux finances publiques ni aux entreprises. Le logo Nutri-score est incitatif et de nature à favoriser la filière des fruits et légumes.

Dépistage du diabète

Mme Anne Ventalon .  - En France, le diabète provoque 30 000 décès chaque année et l'épidémie s'accélère : 3,5 millions de Français, soit 5,3 % de la population, sont traités ; 400 nouveaux cas sont déclarés chaque jour et entre 500 000 et 800 000 personnes seraient porteuses sans le savoir.

Les campagnes de prévention et de dépistage menées par les associations, notamment en direction des jeunes, sont indispensables. Or le manque d'infirmiers bénévoles autorisés à réaliser des dextros, c'est-à-dire des prélèvements capillaires, les conduit à restreindre leurs actions, ce qui retarde le dépistage. Si les agences régionales de santé (ARS) pouvaient accorder des dérogations, les bénévoles pourraient dépister massivement, de manière autonome. Envisagez-vous d'aménager le droit en vigueur ou d'autoriser les ARS à y déroger ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - En France, la prévalence du diabète est estimée à plus de 5,3 % de la population. C'est un enjeu majeur de santé publique. Le diabète de type 2 évolue souvent en silence, car la glycémie augmente très progressivement. Aussi, un dépistage ciblé est recommandé tous les trois ans chez les personnes de plus de 45 ans considérées comme à risque.

La mesure de la glycémie peut s'effectuer à domicile, avec des appareils de diagnostic rapide, ou dans un laboratoire, où la mesure et plus fiable. Le maillage territorial des laboratoires permet un accès simple au dépistage tandis que les pharmaciens d'officine sont autorisés depuis 2016 à réaliser des tests capillaires.

Si le Gouvernement n'entend pas mobiliser de nouveaux acteurs, il renforce sa stratégie de prévention du diabète, notamment au travers des rendez-vous prévention aux âges clés de la vie, qui seront pris en charge à 100 % dès 2022-2023.

Dépistage du saturnisme - Metaleurop Nord

Mme Sabine Van Heghe .  - Le scandale de la gestion par l'État des terres polluées par Metaleurop débouche sur une crise sanitaire. Depuis la fermeture de l'usine en 2003, aucune campagne systématique de dépistage du saturnisme infantile n'y a été menée.

En juin 2022, l'État a enfin engagé une campagne sur le périmètre du programme d'intérêt général (PIG) à Courcelles-lès-Lens, Évin-Malmaison, Dourges et Leforest. Or à ce jour, seuls 1 200 enfants, soit 12 % de la population cible, ont été testés. Huit sont atteints de saturnisme et 68 doivent être surveillés. Les enfants sont contaminés depuis les jardins et pelouses des maisons particulières dans les zones 1 et 2 du PIG, mais la pollution semble aussi atteindre une troisième zone de 400 hectares autour de l'ancienne usine. Cette zone, pourtant identifiée comme polluée par l'Ademe, n'est soumise à aucune information particulière. Les constructions y sont libres et la santé des enfants exposée.

Quand l'État prendra-t-il la mesure de préjudice écologique, en prenant enfin en charge le décaissement et le remplacement des sols pollués ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - Dès la fin des années 1990, de nombreuses actions ont été menées sur ce territoire, où le dépistage est en permanence accessible. La nouvelle campagne, engagée le 15 juin dernier, a fait l'objet d'une large information et se poursuivra jusqu'au 7 novembre, avec une prise en charge à 100 % pour les moins de 18 ans et les femmes enceintes. Au 10 octobre, le taux de participation, trop faible, était de 15 %. Chaque dépistage positif fait l'objet d'une déclaration obligatoire, qui déclenche une investigation environnementale pour traiter les sources et limiter l'exposition des familles. Le Gouvernement incite la population au dépistage.

Mme Sabine Van Heghe.  - Vous n'avez pas vraiment répondu à la question. La situation n'a que trop duré. C'est à l'État, qui a laissé cette usine polluer, de réparer le préjudice !

Évolution du zonage des chirurgiens-dentistes

M. Olivier Rietmann .  - La répartition des chirurgiens-dentistes sur l'ensemble du territoire est inégale. Comme l'a souligné l'observatoire national de la démographie des professions de santé (ONDPS), la Haute-Saône est pénalisée.

Alors que la densité moyenne en Europe est de 74 chirurgiens-dentistes pour 100 000 habitants, elle n'est que de 63 en France. Douze départements français, dont la Haute-Saône, présentent une densité inférieure à quarante. Dans les bassins luxovien, luron et jusséen, elle n'atteint pas la moitié de la densité nationale. Pour paraphraser le Président de la République, cette situation n'est pas acceptable. Elle le sera d'autant moins que la demande de soins augmente, en particulier avec l'essor de la prévention de la santé bucco-dentaire.

Quand l'actualisation du zonage des chirurgiens-dentistes, retardée à plusieurs reprises, aura-t-elle lieu ? Dans l'attente, autorisez-vous l'ARS Bourgogne-Franche-Comté à actualiser la carte des zones d'accompagnement régional, comme l'a fait l'ARS Bretagne ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - En attendant les prochaines négociations conventionnelles et afin de favoriser l'installation des chirurgiens-dentistes là où les besoins sont les plus importants, l'ARS Bretagne a choisi de compléter la cartographie actuellement opposable par un ciblage de nouveaux territoires.

En Bourgogne-Franche-Comté, ce choix n'a pas été fait afin de ne pas brouiller les informations données aux professionnels, dans l'hypothèse où les zones identifiées par l'ARS seraient différentes de celles qui sont identifiées dans le cadre de la révision nationale. Dans l'attente de cette révision, l'ARS Bourgogne-Franche-Comté accepte néanmoins d'accompagner les nouvelles installations et de prendre en charge les demandes d'aide exceptionnelles, dès lors qu'un besoin se révèle justifié.

Stages obligatoires en milieu rural pour les étudiants en médecine

M. Bruno Belin .  - Le problème des déserts médicaux interroge tous les élus. Si le Sénat a adopté la semaine dernière une proposition de loi en la matière sur l'initiative du président Retailleau, ses effets ne se produiront que dans quelques années.

Pourtant, il existe des outils législatifs. Je pense à la loi du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé, dont on attend toujours le décret d'application promis par le Gouvernement pour le mois d'avril.

Ma question est simple : quand le décret d'application permettant les stages d'internes en milieu rural sera-t-il signé, conformément à la loi du 24 juillet 2019 ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - Cette mesure est d'application immédiate. La maquette de formation du diplôme d'études spécialisées de médecine générale a été adaptée et les étudiants en phase d'approfondissement peuvent dès à présent accomplir ces stages en soins primaires en autonomie supervisée.

La loi du 24 juillet 2019 prévoit que priorité soit donnée aux zones sous-denses, en fonction de l'offre de stages dans chaque région. Par une instruction ministérielle du 24 février 2022, le Gouvernement a initié une politique incitative de recrutement de maîtres de stages en zones sous-dense, en rappelant notamment que ces stages doivent être une opportunité pour les étudiants de découvrir l'exercice ambulatoire.

Nous souhaitons accroître de 7,7 % le nombre de maîtres de stage universitaires formés d'ici à 2024. Ces dispositions sont intégrées au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, au travers de l'incitation à effectuer, en priorité dans les territoires sous-denses, une nouvelle quatrième année de consolidation en fin d'internat de médecine générale.

M. Bruno Belin.  - Je ne doute pas de votre bonne volonté, mais les choses ne vont pas assez vite. J'en profite pour vous lancer un SOS, car il y a une autre urgence : partout nous manquons de places pour accueillir les personnes en situation de handicap ou de dépendance.

Réseaux de soins fermés

M. Jean-Michel Arnaud .  - Les réseaux de soins, qui mettent en relation les assurés avec les professionnels de santé, se sont développés dans les années 2000 avec le lancement de plateformes de gestion pour le compte d'organismes complémentaires d'assurance santé.

La loi du 27 janvier 2014 les autorise à pratiquer des remboursements différenciés en fonction des praticiens consultés, notamment en optique et en odontologie. Un rapport de l'inspection générale des affaires sociales (Igas) de 2017 estime que cette législation, trop générale, a favorisé la concurrence et déséquilibré la relation entre les plateformes et les professionnels de santé. C'est un facteur d'iniquité pour les contribuables et d'injustice pour les professionnels.

Le 100 % Santé a fortement réduit l'utilité des réseaux de soins, qui participent à une forme d'américanisation de notre système de sécurité sociale. Le Gouvernement a-t-il l'intention de mieux encadrer leur pratique, voire de les supprimer ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - Les réseaux de santé permettent de modérer les tarifs de soins. Le rapport de l'Igas de juin 2017 a observé des écarts de prix notables entre les soins en réseau et hors réseaux, notamment dans l'optique. Ils modèrent également la progression des primes d'assurance complémentaire. Depuis le 100 % Santé, il ne peut plus y avoir de remboursement différencié.

Le Conseil constitutionnel a estimé que les conditions d'adhésion par les professionnels aux réseaux de santé ne portaient pas atteinte à la liberté d'entreprendre : ils sont libres d'y adhérer et de s'en retirer à tout moment. De plus, selon l'Igas, les réseaux accroissent la lisibilité pour l'assuré dans des secteurs comme l'optique où l'offre est très abondante.

Dans ces conditions, le fonctionnement actuel des réseaux ne semble donc pas devoir être réformé, mais le Gouvernement demeurera vigilant et prendra des mesures si cela s'avère nécessaire.

M. Jean-Michel Arnaud.  - Souvent, la préparation à l'accompagnement de l'usager se fait chez l'opticien, qui voit ensuite le client lui échapper à cause des différences tarifaires avec les réseaux. Ce n'est pas normal.

Création d'un CHU en Moselle

Mme Christine Herzog .  - La Moselle est en voie de désertification médicale : aucun centre hospitalier universitaire (CHU), malgré son million d'habitants. La Meurthe-et-Moselle, avec ses 731 000 habitants, en a un, à Nancy. Il y a 126 médecins pour 100 000 habitants en Moselle, contre 164 en Meurthe-et-Moselle.

Qui plus est, l'ARS Grand-Est, basée à Nancy, a fermé 174 lits en 2020, en pleine crise covid, et l'Allemagne n'a pas manqué de nous en faire le reproche. Le Président de la République, sur mon initiative, a dû intervenir pour que Berlin assouplisse, à la mi-mai 2021, les contraintes inhumaines imposées à nos travailleurs frontaliers, comme la réalisation d'un test toutes les 48 heures.

Madame la ministre, il est urgent de créer un CHU - sans quoi la quatrième année d'internat en pratique ambulatoire restera lettre morte dans le département. Sa création à Metz-Thionville est demandée par les soignants, les élus et les patients.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - Le CHR Metz-Thionville et le CHRU de Nancy ont entamé depuis plusieurs années un rapprochement pour permettre l'universitarisation du premier. Dès 2009, une communauté hospitalière de territoire (CHT) était créée. Deux conventions d'association ont été signées en 2011 et 2014, puis une troisième en 2019, à laquelle l'ARS Grand-Est était associée.

L'objectif est de dessiner les contours d'un grand ensemble hospitalo-universitaire, avec cinq services retenus pour élaborer un projet médico-universitaire. L'hématologie, l'odontologie, la pharmacologie et les urgences ont d'ores et déjà été sélectionnées. En revanche, il n'y a pas encore d'accord sur les orientations et objectifs. Une mission conjointe de l'Igas et de l'inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche sera lancée en novembre ; elle proposera des orientations sur l'universitarisation.

Désertification médicale

M. Hervé Maurey .  - Depuis quinze ans, je plaide pour une véritable régulation de l'installation des médecins, comme cela se fait dans d'autres pays et en France pour les professionnels de santé. Les mesures incitatives prises depuis deux décennies ne suffisent plus.

Après un quinquennat de déni, le candidat Emmanuel Macron s'est finalement prononcé, le 17 mars dernier, pour le conventionnement sélectif. L'engagement figure à la page 9 de son programme. Or depuis l'élection, il n'en est plus question.

Le Président de la République a-t-il renoncé à mettre en oeuvre son engagement ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées .  - L'accès aux soins est une priorité forte de ce gouvernement. Dès 2017, le plan d'accès aux soins a mis en place des mesures comme le soutien aux stages ambulatoires, le développement des maisons de santé pluridisciplinaires ou la création des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS).

En attendant que les effets de la suppression du numerus clausus se fassent sentir, il convient de libérer du temps médical et d'augmenter l'attractivité des territoires, avec la facilitation des consultations avancées ou la télémédecine. Le plan Ma Santé 2022 a permis la création de quatre mille postes d'assistants médicaux, et le Ségur a renforcé l'exercice coordonné et la télé-santé. Le volet santé du Conseil national de la refondation (CNR) réunira autour d'une même table professionnels, patients et élus de chaque bassin de santé.

En parallèle, la cible du nombre d'assistants médicaux a été portée à dix mille à l'horizon 2025 ; les CPTS devront couvrir tout le territoire d'ici à 2023 et se mobiliser prioritairement sur l'accès au médecin traitant. Le PLFSS pour 2023 prévoit enfin des mesures ambitieuses comme l'incitation à effectuer l'année de consolidation en médecine générale en priorité dans les territoires sous-denses.

M. Hervé Maurey.  - La question était simple : le Gouvernement mettra-t-il en place l'engagement du conventionnement sélectif ? Vous n'avez pas répondu, ce qui vaut renoncement...

Production électrique en Guyane

M. Georges Patient .  - Le taux de disponibilité électrique est catastrophique en Guyane. En cause, la vétusté, le sous-dimensionnement du réseau, mais surtout des langueurs administratives qui freinent le remplacement des unités de production.

Début octobre, la commune de Maripasoula a subi plusieurs jours de blackout total lors de la panne simultanée de ses quatre générateurs. Pourtant, deux nouvelles unités de production électrique étaient inscrites dans la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) de 2017. La centrale photovoltaïque était attendue pour 2021. Sera-t-elle prête en 2023 ?

La centrale thermique de Dégrad des Cannes, qui fournit 40 % de la production électrique du territoire et continue de fonctionner grâce à une dérogation qui prend fin en 2023, doit être remplacée par la centrale du Larivot, dont le chantier est à l'arrêt. Que va-t-il se passer en 2024 ? Il faudra aller très vite dans le développement des énergies renouvelables en Guyane pour sortir de l'insécurité énergétique...

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie .  - La centrale de Dégrad des Cannes sera remplacée par une centrale au bioliquide. Le 11 octobre dernier, la cour administrative d'appel de Bordeaux a ouvert la voie à une reprise des travaux pour une mise en service fin 2026. La centrale de Dégrad des Cannes sera prolongér jusqu'à cette date. Aujourd'hui, l'essentiel de la production est assuré par le barrage de Petit-Saut ; priorité est donnée à des unités de production utilisant le photovoltaïque et la biomasse.

Malheureusement, le projet de centre électrique de l'Ouest guyanais (CEOG) a pris du retard. Dans les communes de l'intérieur, la production est assurée par les centrales vieillissantes, même si un projet a été lancé à Saint-Georges. À Maripasoula, les avaries de plusieurs moteurs ont perturbé la production. Une centrale photovoltaïque devrait entrer en service en 2024.

La PPE est en cours de révision : des groupes de travail se sont réunis en mai pour fixer les orientations sur l'autonomie énergétique. La production sera entièrement renouvelable en 2030.

Mme la présidente.  - Je salue le conseil municipal des enfants de Lesneven, dans le Finistère, présent en tribune.

Zéro artificialisation nette

M. Jean-Pierre Corbisez .  - Le dispositif « Zéro artificialisation nette » (ZAN) inquiète les élus locaux. Ils soulignent l'articulation complexe entre cet impératif et les engagements d'une commune dotée d'un programme Anru, les difficultés des communes rurales à obtenir des friches à reconquérir, et, pour les communes littorales, la nécessité de prendre en compte le phénomène du recul du trait de côte dans le calcul.

Il convient que l'application de l'obligation tienne compte des efforts déjà consentis, exclue du périmètre du ZAN les projets d'intérêts national comme le canal Seine-Nord et s'accompagne de mécanismes de solidarité à l'échelle nationale ou régionale.

Quelles mesures le Gouvernement met-il en oeuvre pour corriger les impacts du ZAN ?

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie .  - La Première ministre a confirmé, dans son discours de Vichy, l'objectif du ZAN en 2050 et, à l'horizon 2031, de la réduction de moitié de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers.

Les échéances de la loi Climat et résilience ont déjà été reportées de six mois : les schémas de cohérence territoriale (Scot) ont jusqu'au 22 octobre pour faire des propositions aux régions ; celles-ci ont jusqu'au 22 février 2024 pour élaborer leurs schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet).

Le Gouvernement est à l'écoute des élus et du Parlement : des concertations sont en cours pour anticiper la transformation. La trajectoire de réduction prendra en compte de nouveaux critères pour s'adapter aux singularités des territoires, et les élus seront accompagnés dans leurs efforts de renaturation. Le Fonds Friches, doté de 750 millions d'euros, et le Fonds d'accélération de la transition écologique, avec plus de 2 milliards d'euros, financeront l'adaptation des territoires au changement climatique en soutenant les projets de renaturation.

M. Jean-Pierre Corbisez.  - La proposition de loi de Jacques Mézard, intégrée à la loi 3DS, prévoyait, pour les communes rurales, une simplification de la procédure d'expropriation des biens en état d'abandon, qui permettait de réduire de vingt à dix ans les délais de récupération. Malheureusement, il n'y a pas de ligne budgétaire spécifique...

Indemnisation des élus pour leurs déplacements

M. Frédéric Marchand .  - Je relaie l'interpellation de Luc Waymel, ancien président de l'association des maires ruraux du Nord, sur les déplacements des élus représentant leurs pairs au sein des commissions départementales convoquées par le préfet.

De la commission chargée de la coopération intercommunale à celle compétente en matière d'aménagement commercial, ces structures sont nécessaires à nos territoires et à notre démocratie. Or les maires des communes modestes ou éloignées du chef-lieu hésitent à s'y impliquer en raison du temps nécessaire et du coût des trajets. Résultat : supposées représenter l'ensemble du département, ces commissions réunissent surtout des élus géographiquement proches du chef-lieu - c'est le cas dans le Nord comme ailleurs.

Il serait utile que l'État rembourse les frais de déplacement des élus qui, dans le cadre de ces commissions, n'agissent pas pour le compte de leur commune, mais de leurs pairs. Les commissions assureraient ainsi une représentation équitable du territoire départemental. S'il était imputé sur la dotation globale de fonctionnement, ce défraiement serait neutre pour l'État.

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie .  - Le Gouvernement n'ignore pas les difficultés des élus locaux, qui consacrent leur temps et leurs compétences au service de leur territoire.

Leur rôle au sein des commissions départementales convoquées par le préfet est central : ils y assurent la représentation des collectivités du département dans différents champs des politiques publiques.

Le décret du 3 juillet 2006 prévoit la prise en charge de ces frais en cas de participation à un organisme consultatif. L'article 2 vise les organismes dont les frais de fonctionnement sont payés sur fonds publics, ce qui inclut les commissions départementales. Les élus qui y participent sont donc éligibles au remboursement de leurs frais de transport, sur la même base forfaitaire que celle applicable aux fonctionnaires civils de l'État.

Le Gouvernement attache une importance particulière au bon fonctionnement de ces instances, qui concourent au travail commun entre l'État et les territoires.

Plan Avenir montagnes

Mme Viviane Artigalas .  - Le plan Avenir montagnes (PAM) est le premier plan majeur pour les territoires de montagne depuis quarante ans. Son volet investissement alloue 331 millions d'euros aux massifs français pour soutenir l'adaptation de leur économie aux mutations du tourisme et leur transition écologique. Pour les seules Pyrénées, 54 millions d'euros sont mobilisés.

Toutefois, les élus s'inquiètent de la bonne adéquation des investissements aux besoins.

Par ailleurs, les crédits du plan ne courent que jusqu'à la fin de l'année. Il faudrait, à tout le moins, étendre les capacités de programmation à 2023, afin d'accompagner de nouveaux projets de transition touristique. Il conviendrait en outre de prolonger de deux ans la période d'appui du volet ingénierie du PAM.

Pouvez-vous confirmer le maintien de ce dispositif ?

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie .  - Le PAM, lancé par le Premier ministre le 27 mai 2021, est bien avancé : les 150 millions d'euros d'investissements financés par l'État seront engagés en totalité d'ici à la fin de l'année ; en deux ans, près de 440 projets portés par les territoires auront été accompagnés.

Dans le cadre du volet ingénierie, trois enveloppes sont prévues. La première mobilise 10 millions d'euros de l'État et 6 millions d'euros de la Banque des territoires pour accompagner 62 territoires vers un modèle touristique durable et résilient. La deuxième affecte 10 millions d'euros à la mobilité du premier et du dernier kilomètre dans les territoires de montagne : une seconde vague de lauréats sera prochainement désignée. Dans le cadre de la troisième, 5 millions d'euros sont mobilisés par la Banque des territoires et Atout France pour la rénovation de l'immobilier de loisir dans 25 stations lauréates.

Dominique Faure, secrétaire d'État chargée de la ruralité, entamera prochainement une tournée des massifs pour déterminer avec les acteurs les besoins en matière d'ingénierie et d'investissements pour les deux années à venir. En outre, une concertation nationale sera lancée sur d'autres thématiques.

Mme Viviane Artigalas.  - Le PAM a été salué par tous les élus de la montagne. Il est important de poursuivre le travail engagé au-delà des échéances initialement annoncées. Les territoires de montagne en ont besoin.

Défense des terres agricoles de Gonesse et Saclay

M. Jacques Fernique .  - La réalisation des derniers tronçons des lignes 17 Nord et 18 Ouest du Grand Paris Express (GPE) et de la gare Triangle de Gonesse paraît, à première vue, vertueuse. Toutefois, ces projets ne répondent pas aux besoins des habitants actuels : ils ne trouveraient leur justification que dans le cas d'une urbanisation massive de terres agricoles.

Présentée comme un nouvel axe majeur pour le nord de Paris, la ligne 17 a été initialement lancée dans le cadre du pharaonique projet EuropaCity. L'abandon de celui-ci, bienvenu, aurait dû entraîner l'arrêt des travaux au-delà de la gare du Bourget-Aéroport. Ce projet ne bénéficiera en rien aux habitants des communes alentour, trop éloignées ; sa rentabilité est sujette à caution.

L'aéroport Roissy-Charles de Gaulle constitue une barrière à l'urbanisation : son franchissement au nord mettrait en péril les terres agricoles seine-et-marnaises et picardes, parmi les plus riches d'Europe.

Où est la volonté de freiner l'étalement urbain ? En 2018, la Cour des comptes a demandé une modification du périmètre et du calendrier du projet, mais la Société du Grand Paris, à la fois juge et partie, n'a jamais revu sa copie...

Le Gouvernement est-il prêt à envisager un moratoire et le lancement d'une étude d'impact indépendante ?

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie .  - La ligne 17 Nord du Grand Paris Express est destinée à favoriser le développement des territoires entre Paris et Roissy.

L'abandon du projet d'EuropaCity ne remet pas en cause la création de la gare Triangle de Gonesse, à proximité de la zone d'activités de Paris Nord ; seule gare du GPE dans le Val-d'Oise, elle facilitera l'accès des habitants du département aux bassins d'emplois. Les projets autour de cette gare ont évolué pour réduire les emprises : ils servent un développement économique centré sur la transition agroécologique et l'agriculture urbaine - je pense à Agoralim, que vous soutenez.

Le Conseil d'État vient de confirmer l'autorisation de création et d'exploitation de la ligne 17, dont les travaux sont déjà bien avancés.

Quant à la ligne 18 Ouest, elle constitue la colonne vertébrale en matière de transports du projet scientifique, technologique et urbain porté par l'établissement public d'aménagement Paris-Saclay. Sa remise en cause porterait atteinte aux synergies engagées autour de cette opération d'intérêt national.

Le GPE contribuera à désenclaver des territoires peu ou mal desservis, au bénéfice des Franciliens et du développement régional.

Bornes de recharge électrique

M. Jean-Claude Tissot .  - La décarbonation de nos modes de déplacement implique de nombreuses évolutions. En particulier, l'aménagement de nos territoires doit prendre en compte l'électrification des véhicules.

L'article 118 de la loi Climat et résilience prévoit que les parcs de stationnement de plus de vingt places doivent être équipés d'au moins un point de recharge électrique. Mais cette disposition, qui en complète d'autres issues de la loi d'orientation des mobilités (LOM), laisse place à différentes interprétations. Plusieurs collectivités de mon département, inquiètes, m'ont interpellé, dont la communauté de communes de Charlieu-Belmont.

Pouvez-vous préciser les obligations incombant aux collectivités territoriales, ainsi que le calendrier de leur entrée en vigueur ? Tous les parkings publics de plus de vingt places, jouxtant ou non un bâtiment public, sont-ils concernés ? Ce dispositif ne s'applique-t-il qu'aux projets à venir ? Les parkings libres sont-ils soumis aux mêmes obligations que les parkings payants ? La répartition des bornes sur différents parkings peut-elle être menée à l'échelle intercommunale ?

Comme souvent, l'État fait supporter le poids de ses annonces par les budgets locaux, déjà fort contraints. Le Gouvernement s'engage-t-il à accompagner les collectivités, par exemple à travers le fonds vert ?

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie .  - Pour atteindre la neutralité carbone en 2050, l'État engage résolument la transition vers les véhicules électriques.

La LOM donne la possibilité aux EPCI, autorités organisatrices de la mobilité et de la distribution d'électricité, de réaliser des schémas directeurs des infrastructures de recharge, afin d'assurer la coordination de l'offre entre maîtres d'ouvrage publics et privés et son adaptation aux besoins. La loi Climat et résilience a rendu ce schéma obligatoire dans les zones à faibles émissions mobilité.

Pour accompagner les collectivités, l'État a publié un guide méthodologique et met à leur disposition de nombreuses informations en open data. La Banque des territoires pourra être sollicitée lorsque l'élaboration d'un schéma directeur s'appuiera sur un prestataire externe.

En outre, la LOM prévoit que, jusqu'à la fin 2025, le raccordement au réseau public des infrastructures de recharge inscrites dans un schéma directeur peut être pris en charge jusqu'à 75 %. Un arrêté ministériel précisera prochainement les modalités d'application.

Enfin, la LOM instaure l'obligation d'équiper d'un point de recharge par tranche de vingt places, dès 2025, les parkings de tous les bâtiments non résidentiels, privés ou publics. La loi Climat et résilience soumet les collectivités territoriales à une obligation similaire pour les parcs de stationnement en délégation de service public, en régie ou gérés par un marché public.

En soutien au déploiement de ces infrastructures, le programme Advenir a été abondé de 200 millions d'euros et prolongé jusqu'en 2025. En outre, dans le cadre de France 2030, le Gouvernement a annoncé 300 millions d'euros pour des appels à projets de stations de recharge à haute puissance.

Ligne ferroviaire Le Havre-Marseille

Mme Céline Brulin .  - Alors que la nouvelle ligne Paris-Normandie se fait attendre, le seul TGV normand est menacé. En effet, la SNCF entend inverser les horaires de la ligne qui relie Le Havre, Rouen, Lyon et Marseille : le TGV partirait du Havre en milieu d'après-midi, et non plus le matin.

Cette décision est un non-sens. Elle aurait des conséquences pour les correspondances, notamment celles de Caen, Dieppe et Cherbourg. Elle fait l'unanimité contre elle, ainsi qu'en témoigne l'adresse commune de tous les parlementaires de Seine-Maritime au directeur général de la SNCF.

La SNCF ne cherche-t-elle pas à rendre cette desserte moins attractive pour mieux justifier sa suppression  dans quelque temps ?

L'État, dont la compétence est circonscrite aux trains d'équilibre du territoire, ne saurait se désintéresser des dessertes TGV - surtout dans une région qui a déjà perdu la ligne Le Havre-Strasbourg. Comment le Gouvernement compte-t-il agir au côté des élus pour contraindre la SNCF à garantir des horaires adaptés sur la ligne Le Havre-Marseille ?

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie .  - Le Gouvernement veille à ce que l'offre de transport ferroviaire réponde aux besoins de mobilité dans les territoires.

La loi de 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire prévoit l'information obligatoire de l'État et des collectivités territoriales par les entreprises opérant des services librement organisés en cas de modification de ceux-ci.

Dans ce cadre, la SNCF a annoncé un repositionnement horaire de la liaison TGV entre Marseille et Le Havre à partir de décembre prochain. L'objectif est double : optimiser la production, en particulier la gestion de la maintenance, et améliorer le remplissage des trains, afin de redonner une dynamique à cette ligne qui peine encore à trouver son public.

J'entends les interrogations des élus et des usagers. Le Gouvernement invite la SNCF à faire preuve de plus de pédagogie pour dissiper, je l'espère, les inquiétudes. En tout état de cause, il sera utile que la SNCF dresse un bilan et en partage les résultats avec les élus.

Plus largement, le développement de nouvelles lignes transversales relève avant tout de choix stratégiques de la SNCF et des entreprises ferroviaires. En ce qui concerne les lignes susceptibles d'être conventionnées par l'État, l'étude de 2021 sur les perspectives en matière de trains d'équilibre du territoire n'a pas identifié de potentiel suffisant au départ de la Normandie.

Mme Céline Brulin.  - Choisir des horaires que les usagers rejettent, ce n'est pas la meilleure façon de redynamiser la ligne ! La pédagogie ne suffira pas. Cette ligne est utile pour relier deux grands ports, il faut travailler à la rendre attractive et, d'abord, exiger que les horaires demeurent en l'état.

Rétablissement de la « Palombe bleue »

M. Max Brisson .  - Les trains de nuit sont plus écologiques et moins coûteux que l'avion ou le TGV. Le Gouvernement les a rétablis sur les lignes Paris-Nice et Paris-Tarbes via Limoges et Toulouse. C'est là que le bât blesse : la SNCF a abandonné le tracé initial qui, à partir de Dax, reliait en deux rames Bayonne, Hendaye, Irun d'une part et Pau, Lourdes, Tarbes d'autre part. Pau, Bayonne et Hendaye ne sont desservies que l'été. Cette augmentation du temps de transport avait provoqué en 2011 une baisse de la fréquentation et la suppression de la ligne. Le sud des Landes et les Pyrénées-Atlantiques ne sont pas que des territoires touristiques, ce sont aussi des pôles économiques dynamiques. Quelles sont les raisons de ce choix ? Comptez-vous rétablir une liaison régulière suivant l'axe historique ?

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie .  - Les trains de nuit, écologiques et sociaux, ont un avenir, comme en témoigne l'étude transmise au Parlement en mai 2021. Paris-Nice et Paris-Tarbes ont été ouvertes en 2021 et Aurillac devrait être desservie en décembre 2023 ; 130 millions d'euros sont investis dans la rénovation du matériel et des installations de service, dont 100 millions d'euros de France Relance.

Des décisions doivent être prochainement prises, dans la perspective de l'ouverture à la concurrence d'ici quelques années. Actuellement, la nécessaire régénération de l'infrastructure ne permet pas des horaires optimaux et limite la desserte à Tarbes et Lourdes en dehors de l'été, mais à partir de 2024, le train de nuit desservira quotidiennement Dax, Bayonne, Orthez et Pau, en plus de Lourdes et de Tarbes.

M. Max Brisson.  - Si j'ai bien compris, en 2024, vous respecterez la promesse du président Macron, qui avait déclaré avoir souvent pris la Palombe bleue.

Augmentation des prix de l'énergie

M. Stéphane Demilly .  - L'augmentation des prix de l'énergie est la première source d'inquiétude de nos concitoyens.

Ceux qui ont installé des poêles et chaudières à bois, encouragés par des primes environnementales, ne pourront peut-être pas acheter de granulés cet hiver, soit à cause de l'inflation exponentielle du prix, soit parce qu'ils n'en trouveront tout simplement pas. Qu'envisagez-vous pour ces 850 000 foyers ?

Autre alerte, concernant les endiviers, confrontés à des hausses des coûts de l'énergie jusqu'à 800 % ! Ils sont clairement en péril, mais le dispositif d'aide ne permet pas de répondre aux spécificités de chaque filière. Qu'envisagez-vous pour ce secteur économique très important pour les Hauts-de-France ?

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État chargée de l'écologie .  - La constitution de stocks prudentiels de granulés a pu conduire à des ruptures de stocks temporaires, mais producteurs et distributeurs travaillent à assurer l'approvisionnement cet hiver. Le ministère de la transition énergétique a aussi mis en place des mesures telles que l'appel à projets BCIAT (bois chaleur industrie agriculture et tertiaire), par lequel l'Ademe a contribué au financement de quatorze chaufferies, pour une production annuelle de granulés de 850 000 tonnes.

Après un chèque énergie exceptionnel de 100 euros pour 5,8 millions de ménages en décembre 2021, un nouveau chèque, de 100 ou 200 euros selon les ressources, sera attribué à 12 millions de ménages en fin d'année.

Le Gouvernement ne laisse pas tomber des entreprises : il déposera un amendement au projet de loi de finances prévoyant un mécanisme de garantie dont les modalités vont être précisées.

Codes postaux et communes nouvelles

M. Daniel Gueret .  - La Poste refuse d'attribuer un code postal unique aux communes nouvelles, malgré les demandes des élus locaux. Outre les erreurs d'adressage, cela empêche les communes de répondre aux demandes de certification d'adresses, les sites internet de l'État et de La Poste étant en contradiction.

La Poste ne pourrait-elle pas fixer un code postal unique, la mention de la commune déléguée pouvant apparaître comme lieu-dit afin d'éviter la problématique des homonymies de voies ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales .  - C'est pour limiter les difficultés liées à l'adressage dans les communes nouvelles que les anciens codes postaux ont été maintenus.

L'attribution des codes postaux dépend exclusivement de La Poste : à chaque bureau distributeur est associé un code postal distinct. Les communes qui comptent plusieurs bureaux distributeurs ont donc plusieurs codes postaux, qu'il s'agisse de communes nouvelles, de grandes communes ou de communes à aspérités géographiques.

L'harmonisation des codes postaux, possible en théorie s'il n'y a qu'un seul centre de tri, conduit parfois à des perturbations dans l'organisation du tri postal.

L'impossibilité de voir une adresse reconnue sur des plateformes internet tient à la non mise à jour de la base adresse nationale (BAN). Après insertion des adresses dans la BAN, La Poste se charge de leur fiabilisation. Or seules 8 000 communes ont procédé à une telle certification. Je vous invite donc à encourager les maires à actualiser les adresses de leur commune.

M. Daniel Gueret.  - Il est du devoir de La Poste d'accompagner les réformes territoriales. Le code postal est un vrai problème pour les maires concernés.

Détournement du droit de préemption urbain

M. Jean-Raymond Hugonet .  - Les constructions illégales sont un véritable fléau pour nos communes, alimentant le sentiment qu'il y a deux poids, deux mesures. Dans l'Essonne, plus de 60 % des communes sont confrontées au détournement du droit de préemption urbain par le biais de la signature d'un bail emphytéotique. Les malfaisants font usage d'une faille juridique révélée par une décision du 11 mai 2000 de la Cour de cassation, selon laquelle le droit de préemption urbain s'applique à des mutations de propriété, mais non à des mutations de jouissance.

La signature d'un bail emphytéotique, qui peut durer 99 ans, permet de devenir quasi propriétaire à moindre prix : sitôt le terrain loué, des constructions bafouant les règles d'urbanisme sortent de terre, au nez et à la barbe des riverains et du maire, qui ne peut que porter plainte. Des centaines de procédures interminables et sans effet sont en cours. Il est urgent d'agir ; quelles mesures prévoyez-vous ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales .  - Le 11 mai 2000, la Cour de cassation a jugé que le bail à construction et le bail emphytéotique n'étaient pas soumis au droit de préemption urbain - ce qui dispense les propriétaires de déclaration d'intention d'aliéner - sauf si le contrat prévoit le transfert de la propriété du bien loué en fin de bail.

Cette décision est transposable au droit de préemption en espaces naturels sensibles, où les règles en matière de construction et d'aménagement, de coupe d'arbres ou de stationnement de caravanes sont très restrictives ; le maire ou l'EPCI peuvent refuser une autorisation.

C'est donc au notaire de déterminer si le bail est soumis au droit de préemption. Il est recommandé à la profession la plus grande vigilance sur ce point.

M. Jean-Raymond Hugonet.  - Nous connaissons ces règles par coeur. Le maire de Longpont-sur-Orge, Alain Lamour, pourrait témoigner du fossé qui les sépare de ce qui se passe en réalité. Il est urgent que nous nous saisissions du sujet.

Mme la présidente.  - Je salue la présence en tribune des enfants de la commune de Vimy.

Collectivités face à l'inflation

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - Avec une pensée particulière pour les habitants de Bihucourt, Hendecourt-lès-Cagnicourt, Bucquoy, Ervillers et Mory et toutes les victimes de la tornade de ce dimanche - certains ont tout perdu - je salue les maires, élus, pompiers, gendarmes et les agents d'Enedis, sur le pont depuis dimanche soir.

Le 14 octobre dernier, nous avons organisé dans le Pas-de-Calais un rassemblement de plusieurs dizaines d'élus confrontés à l'explosion des dépenses. Des projets d'investissement sont remis en cause au vu des prix qui flambent ; les maires doivent choisir quel service ils suspendent et les centres communaux d'action sociale doivent protéger les populations. Le bouclier tarifaire ne s'appliquera pas à toutes les communes ; la hausse de la dotation globale de fonctionnement (DGF) de 320 millions d'euros est insuffisante. Nous demandons une indexation sur l'inflation, soit 770 millions d'euros, et une extension du bouclier tarifaire à toutes les communes sans distinction de taille.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales .  - Je partage vos propos sur les communes dévastées par la tornade.

Conscient des effets de l'inflation sur les finances des collectivités territoriales, le Gouvernement a pris des mesures : bouclier tarifaire limitant à 4 % en 2022 et à 15 % en 2023 la hausse des dépenses d'électricité des communes de moins de dix agents et dont les recettes sont inférieures à 2 millions d'euros - soit près de 28 000 communes ; filet de sécurité pour accompagner budgétairement les communes et leurs groupements, pour 430 millions d'euros - que le Gouvernement propose de reconduire en 2023 ; augmentation - inédite depuis treize ans - de la DGF de 320 millions d'euros, qui profite à plus de 90 % des communes. Le Gouvernement est aux côtés des collectivités.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Quelles garanties les maires ont-ils pour 2023 ? Y aura-t-il des reprises de DGF en cas de trop-perçu ? Il faut de la visibilité.

Mme la présidente.  - Je salue le conseil municipal des jeunes de Saint-Julien-les-Villas, venu à l'invitation de Mme Évelyne Perrot, sénatrice de l'Aube.

Mode d'emploi des procurations dématérialisées

M. Yves Détraigne .  - Depuis le dépôt de cette question orale, le ministre de l'intérieur a répondu au courrier que je lui avais également adressé sur le sujet... N'y voyez pas une forme de harcèlement, mais plutôt la volonté d'obtenir une réponse, mes trois questions écrites et mon courrier précédents étant restés sans suite.

Pourtant, la question est simple : jusqu'à quel moment une municipalité doit-elle prendre en compte une procuration de vote dématérialisée ?

La circulaire du 24 mai 2022 estime qu'on ne peut refuser une procuration au motif qu'elle est tardive et recommande  « dans la mesure du possible » aux mairies de tenir une permanence. Cela ne peut pas satisfaire les élus municipaux : soit le ministère ordonne de tenir une permanence et en fixe les horaires, soit il impose un délai clair pour en finir avec les procurations de dernière minute.

Le ministre convient des difficultés techniques et pratiques engendrées par la dématérialisation des procurations et précise qu'il faudrait fixer, en concertation avec les associations d'élus, une date limite pour leur établissement. Quand le cadre juridique sera-t-il mis en adéquation avec la réalité des contraintes des communes ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales .  - À ce jour, aucune disposition du code électoral n'impose de date limite pour établir une procuration de vote, qui peut, en théorie, être établie le jour même du scrutin. Mais les procurations tardives risquent de ne pas pouvoir être prises en compte par les communes, du fait des délais d'acheminement postaux.

L'introduction des procurations dématérialisées - plébiscitées, puisqu'elles représentent 69 % des 3,7 millions de procurations établies en 2022 - amplifie ces difficultés, en donnant aux électeurs un faux sentiment d'immédiateté.

Depuis le 1er janvier 2022, la gestion centralisée des procurations dans le Répertoire électoral unique allège la charge des communes mais implique que celles-ci réalisent des contrôles de validité avec un poste informatique.

Il a donc été recommandé aux communes de mettre en place, dans la mesure du possible, des permanences le jour du scrutin pour vérifier les procurations tardives. J'ai conscience des difficultés.

À l'issue du bilan des élections législatives et présidentielles, nous examinerons avec les associations d'élus les modalités d'introduction d'une date limite pour l'établissement des procurations.

Travailleurs sans-papiers de Chronopost à Alfortville

Mme Laurence Cohen .  - Les travailleurs sans-papiers de l'agence Chronopost d'Alfortville, intérimaires employés essentiellement sur des postes de tri et de manutention, sont en grève depuis décembre 2021 - une des plus longues grèves dans ce secteur. Ils se mobilisent, aux côtés d'organisations syndicales et d'élus, pour obtenir leur régularisation et faire respecter leurs droits.

Malgré plusieurs demandes, la direction du groupe La Poste, dont Chronopost est une filiale, refuse de remplir le formulaire Cerfa de régularisation. De plus, il semblerait qu'il y ait un contournement organisé et volontaire de la circulaire Valls.

Comme lors du conflit précédent de 2019, La Poste, société à capitaux publics à 100 %, dont 34 % détenus par l'État, ne reconnaît pas ses responsabilités d'employeur et se réfugie derrière ses sous-traitants. Quand l'État va-t-il prendre ses responsabilités en régularisant au plus vite ces salariés qui constituent une main-d'oeuvre corvéable à merci et en mettant fin au scandale de la sous-traitance en cascade, au non-respect du code du travail, à l'exploitation des travailleurs les plus précaires ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales .  - Ces salariés font grève en réaction à des conditions de travail qu'ils estiment difficiles et à une mobilisation jugée insuffisante de leur employeur pour entreprendre les démarches nécessaires à leur régularisation.

Si les dépôts groupés de demandes de régularisation sont une pratique courante dans le cas de conflits sociaux, la décision d'admettre à titre exceptionnel un individu au séjour relève du préfet du département de résidence de chacun des étrangers, qui statue individuellement sur chaque demande. Le droit au séjour est un droit individuel. La régularisation prend en compte le niveau d'intégration dans la société française et l'adhésion aux valeurs de la République, et ne peut intervenir si l'étranger constitue une menace à l'ordre public. La procédure d'admission à titre exceptionnel nécessite de transmettre à la préfecture compétente plusieurs documents pour chaque salarié concerné, dont un Cerfa complété et signé par l'employeur.

Les préfets de la région Île-de-France, sensibilisés, examineront les demandes transmises selon ces orientations.

C'est à la justice, éclairée par les constats de l'Inspection du travail et les investigations qu'elle est susceptible de diligenter, qu'il appartient d'apprécier et de qualifier cette situation complexe au regard du code du travail et de déterminer les responsabilités.

Mme Laurence Cohen.  - Je connaissais le mode d'emploi de la régularisation. Ces travailleurs sont exploités par La Poste et par les sous-traitants ; vous le savez, et l'État le sait. Quelle meilleure intégration que de travailler comme ils le font ? Respectons leur parole. Ils sont obligés de décharger des camions selon une cadence infernale. Durant la crise du covid, ils ont continué à travailler ; le chiffre d'activité de La Poste a augmenté de plus de 45 % sans que cela ruisselle sur les salariés. Arrêtons l'hypocrisie ! Ils doivent être régularisés, comme l'ont été les travailleurs de l'agence RSI à la suite d'une lutte. Arrêtons la sous-traitance en cascade, véritable scandale. La responsabilité de l'État est engagée. J'espère que vous allez enfin entendre la voix de ces travailleurs. En 2022, on ne peut les considérer comme des esclaves sans aucun droit.

Sortie du moratoire sur les machines à voter

M. Michel Savin .  - En 2008, la France a instauré un moratoire sur l'utilisation des machines à voter. L'homologation de nouveaux modèles est donc interdite. Les quelques communes autorisées à les utiliser sont donc empêchées de renouveler leurs machines, les producteurs ayant cessé d'en fabriquer, faute de débouchés. C'est un problème quand il faut ouvrir un nouveau bureau de vote.

En octobre 2018, le rapport de la commission des lois du Sénat sur le vote électronique préconisait de mettre fin au moratoire. Où en est l'étude demandée, il y a dix-huit mois, par le ministre de l'intérieur à l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi) sur le sujet ? Que répondez-vous aux communes qui utilisent des machines à voter et qui doivent équiper de nouveaux bureaux de vote ?

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales .  - Les machines à voter sont prévues en droit français depuis 1969 et des modèles électroniques sont autorisés depuis 2003. Toutefois, le périmètre des communes autorisées à en être équipées, ainsi qu'à acquérir de nouveaux modèles, est gelé depuis le moratoire de 2008.

Les services du ministère de l'intérieur ont réexaminé avec l'Anssi le cadre applicable et les évolutions techniques requises en vue d'une éventuelle levée du moratoire. Le Gouvernement a remis au Parlement, le 17 décembre 2021, un rapport qui comprend un bilan de l'exemple belge, une analyse de risques et des études techniques. La levée du statu quo est subordonnée à des modifications substantielles des modèles autorisés et de leur processus d'homologation. Cela inclurait notamment l'impression d'un bulletin papier pour rendre le vote par machine vérifiable et auditable.

M. Michel Savin.  - Les communes en difficulté attendent une réponse claire. Soit elles peuvent maintenir des machines à voter, et doivent pouvoir acquérir des machines adaptables, soit on supprime les machines à voter. On ne peut pas, dans une même commune, avoir des machines à voter dans certains bureaux de vote et pas dans d'autres.

M. Yves Détraigne.  - Très bien !

Pouvoirs du maire

M. Jean-Marie Mizzon .  - Dans notre République, nul n'est censé ignorer la loi. Selon l'article 16 du code de procédure pénale, le maire est officier de police judiciaire ; il peut constater des infractions et requérir le concours des forces de l'ordre.

Or le mépris de cette règle -  qui est déjà en soi un délit  - remet gravement en cause la légitimité des élus à intervenir lorsqu'ils constatent des violations du droit.

À titre d'exemple, le maire de Thimonville, en Moselle, est confronté à de multiples manquements à la loi de la part d'un adolescent de 16 ans. Il est d'abord intervenu directement, sans succès, puis a signalé les faits à la gendarmerie, qui a dressé un procès-verbal, sans effet. Il faudrait des sanctions plus sévères. Ces comportements ne devraient-ils pas faire systématiquement l'objet de poursuites pénales ? L'exemplarité des peines encourues rappellerait utilement les prérogatives de maire.

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales .  - Le Gouvernement s'attache à apporter une réponse pénale efficace, dans le cadre d'une action coordonnée entre les élus et l'autorité judiciaire. Nous consolidons les moyens juridiques et matériels à disposition des maires pour faire appliquer leurs décisions.

Ainsi, la loi Engagement et proximité du 27 décembre 2019 a renforcé l'autorité et l'efficacité des mesures de police du maire, avec de nouvelles possibilités de sanction administrative sous la forme d'amendes d'un montant maximal de 500 euros, après mise en demeure et astreinte, en cas de méconnaissance des arrêtés de police, lorsque les actes portent atteinte à la sécurité des personnes et présentent un caractère répétitif ou continu.

En outre, le procureur de la République est tenu d'informer le maire sur les suites judiciaires des infractions signalées et des plaintes déposées qui concernent sa commune ou lui-même.

La circulaire de politique pénale du garde des sceaux du 20 septembre 2022 a réaffirmé la nécessité d'un renforcement des relations entre les parquets et les maires, afin de développer une justice de proximité favorisant la révélation des infractions et des réponses individualisées et graduées pour réparer le préjudice et éviter les récidives.

M. Jean-Marie Mizzon.  - Le constat est partagé, mais rien ne change. De nombreux maires sont découragés. La justice est trop lente : quand bien même on donnerait de nouveaux moyens à la police et à la gendarmerie, on n'avancera pas si l'on ne renforce pas les moyens de la justice. Transmettez mon message à qui de droit.

Renouvellement de titres d'identité

M. Édouard Courtial .  - Madame la ministre, élue de l'Oise, vous connaissez le sentiment d'abandon des territoires ruraux.

Il faut attendre des mois et faire des kilomètres pour déposer une demande de renouvellement ou de délivrance de carte d'identité ou de passeport. L'engorgement conjoncturel lié à la crise sanitaire n'explique pas tout. La réforme de 2017 visait à mieux sécuriser les titres, mais on observe, une fois encore, une rupture d'égalité manifeste au détriment des ruraux.

Le 4 mai dernier, le Gouvernement a lancé un plan d'urgence. La loi de finances rectificative (LFR) a également prévu des mesures de soutien financier aux communes. Mais les 31 communes de l'Oise disposant des terminaux nécessaires ne peuvent absorber le flux.

Les maires aspirent à un allégement des normes, à plus de visibilité, à un meilleur fonctionnement des intercommunalités, à une amélioration de leur statut.

Les ruraux ont le sentiment d'être des citoyens de seconde zone. Certes, les maisons France Services sont un progrès - mais il faut amplifier le dispositif. Je sais pouvoirs compter, comme les habitants du Beauvaisis, sur votre volontarisme. (M. Jérôme Bascher applaudit.)

Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales .  - Dès 2018, l'État a revalorisé la dotation pour les titres sécurisés. En 2022, le ministère de l'intérieur a décidé d'un plan d'urgence pour accélérer le déploiement de nouveaux dispositifs de recueil et réduire les délais anormalement longs, avec une enveloppe de 14 millions d'euros dans la LFR. La dotation a été augmentée et rendue plus incitative, avec une prime de 4 000 euros supplémentaires pour tout nouveau dispositif installé.

Une trentaine de centres temporaires d'accueil équipés de cinq à dix dispositifs de recueil ont été installés, ce qui correspond à 221 stations de recueil supplémentaires.

De nouveaux dispositifs de recueil sont déployés dans les espaces France Services. Le réseau a ainsi été augmenté de manière pérenne de 10 %.

Dans le cadre du plan d'action pour réduire les délais, il est prévu de déployer 500 nouveaux dispositifs, notamment dans les départements dont le taux d'équipement est inférieur à la moyenne.

Le Gouvernement veille à garantir un service de proximité de qualité sur l'ensemble du territoire. Des annonces seront faites prochainement afin d'accélérer ces procédures qui ne devraient pas dépasser trois semaines à un mois.

Certification environnementale des exploitations agricoles

M. Alain Milon .  - Après dix ans d'existence, il faut faire évoluer les critères de certification environnementale des exploitations agricoles engagées dans des pratiques particulièrement respectueuses de l'environnement pour améliorer la crédibilité du référentiel et maintenir l'attractivité de la certification.

Or, l'évolution du référentiel proposée ne répond pas aux attentes, bien au contraire.

La viticulture AOC représente aujourd'hui la majorité des exploitations certifiées haute valeur environnementale (HVE). Or la révision proposée entraînerait une perte de certification pour nombre de viticulteurs et donnerait un coup d'arrêt au développement de la filière.

Un moratoire permettrait d'intégrer certaines propositions de la filière viticole AOC et d'atteindre les objectifs poursuivis sans pénaliser les exploitants.

Comment faire en sorte que le nouveau référencement ne pénalise pas les exploitations engagées dans cette démarche ou qui souhaitent s'y inscrire ?

Mme la présidente.  - Merci pour cette question sur une filière qui m'est particulièrement chère.

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - La HVE connaît un grand succès, notamment dans la viticulture, avec plus de 25 000 exploitations.

Il fallait faire évoluer le référentiel pour en faire une voie d'accès à l'écorégime des aides de la PAC, en se concentrant sur les aspects environnementaux. La proposition de révision qui ressort de la concertation renforce le niveau d'exigence global du référentiel. Le niveau de la nouvelle conditionnalité est une donnée d'entrée du processus de révision, il n'en est pas la cible.

S'agissant du calendrier, la date d'entrée en vigueur, initialement prévue au 1er octobre 2023, a été décalée au 1er janvier 2024 pour les nouveaux entrants. Les exploitations déjà certifiées pourront aller au bout de leur cycle de trois ans, et prolonger la durée de validité de leur certificat jusqu'à fin 2024.

Je suis prêt à discuter avec la filière pour étudier des solutions pratiques afin de lever les freins à l'entrée dans le dispositif, car nous avons besoin de développer la HVE.

M. Alain Milon.  - Merci, nous acceptons votre invitation à travailler ensemble.

Difficultés des producteurs de lait bio

M. Didier Rambaud .  - Depuis plusieurs mois, les producteurs de lait bio pâtissent d'une baisse de la consommation des produits bio ainsi que d'un déséquilibre des marchés.

Actuellement, le prix du lait est faible, parfois même en dessous du prix conventionnel. Cette conjoncture, aggravée par le manque de fourrage qui résulte de la sécheresse de l'été 2022, pourrait les contraindre à vendre une partie du cheptel ou à baisser la production.

Dans l'Isère, sur les zones de production du Saint-Marcellin et du Saint-Félicien, les producteurs ont jusqu'ici réussi à maintenir le prix du lait bio, mais les laiteries refusent toute hausse, en arguant de l'augmentation des charges. Dans le même temps, les producteurs constatent avec stupeur que la grande distribution ou les fromageries augmentent les prix !

Face à ce constat, la filière réclame des mesures de soutien : permission de sortir du bio sans pénalités, report des annuités d'emprunt, fixation du prix de base du lait au niveau national par l'interprofession, soutien à l'achat de fourrage et accompagnement des exploitations les plus fragiles.

Quelles mesures envisagez-vous pour soutenir la filière du lait bio ?

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - En effet, nos producteurs de lait bio souffrent.

Nous agissons tout d'abord dans le cadre des négociations commerciales, réunions hebdomadaires qui sont l'occasion de mettre les transformateurs et la grande distribution devant leurs responsabilités, notamment pour ce qui est de la répercussion des hausses de charges.

Un certain nombre de distributeurs se sont dits prêts à s'engager pour une revalorisation du prix du lait ; il faut désormais en faire autant dans la transformation.

Pour les producteurs touchés par la sécheresse, j'ai annoncé l'accélération du dispositif de calamité sécheresse, des aides pour les transformateurs les plus énergo-intensifs, un dispositif, notifié à Bruxelles, qui vise à mieux tenir compte des réalités agricoles.

On ne fera pas l'économie d'une réflexion globale sur le bio : après une croissance à deux chiffres, on a atteint un palier, voire une baisse de la consommation. Il faut travailler avec l'ensemble de la filière pour mieux identifier le bio, le mettre en valeur et accompagner les producteurs afin d'éviter la décapitalisation.

Conséquences de l'été 2022 sur les récoltes de pommes de terre

M. Antoine Lefèvre .  - Après les viticulteurs, c'est au tour des producteurs de pommes de terre de tirer la sonnette d'alarme sur les conséquences désastreuses de la sécheresse de l'été sur leur prochaine récolte. Le rendement moyen va baisser de 20 % en raison des effets de la chaleur - plus encore pour les producteurs dépourvus de système d'irrigation.

En ajoutant l'inflation des coûts de production et l'explosion des tarifs de l'énergie, la superficie totale cultivée risque de connaître une baisse sans précédent en 2023.

L'union nationale des producteurs de pommes de terre demande un dispositif de sauvegarde sous la forme d'un prêt garanti par l'État, engagé sur les seules surfaces plantées en 2023 et remboursable en fin de campagne.

Une hausse des aides couplées à hauteur de 500 euros par hectare sauverait de la faillite nombre de petits producteurs pris à la gorge.

La loi du 2 mars 2022 sur l'assurance récolte, qui doit beaucoup au Sénat, ne prendra effet qu'à compter de janvier 2023 - quatre mois trop tard pour couvrir les pertes de l'été 2022. Quels instruments transitoires pour compenser les pertes des producteurs de pommes de terre ?

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - Encore une filière touchée par les aléas climatiques...

J'ai rencontré les organisations de producteurs de pommes de terre ; les nouvelles sont moins mauvaises qu'on pouvait initialement le craindre. Il faut s'attendre à une baisse de rendement de 9 % par rapport à 2021, de 6,5 % par rapport à la moyenne quinquennale.

Au vu de la récolte, il y aura un nouvel examen de l'éligibilité au dispositif d'indemnisation au titre de la sécheresse.

J'ai étudié la possibilité d'un prêt garanti par l'État avec les services de Bercy : nous l'écartons, car les aléas climatiques ne sont pas du même ordre que le Covid ou la crise ukrainienne. En revanche, j'ai demandé que l'on expertise la piste d'un recours au PEC résilience, doté d'une enveloppe de 150 millions d'euros. Nous travaillons également à des réponses à l'effet ciseau provoqué par la hausse des coûts énergétiques. Un régime d'aide à la réfrigération est en cours de notification.

Vous l'avez dit, la vraie réponse à long terme est la réforme de l'assurance récolte, et je salue le travail réalisé au Sénat pour mettre en place un dispositif robuste, en un temps record.

Enfin, il nous faut travailler sur le sujet crucial de l'accès à l'eau : c'est la clé de la résilience.

M. Antoine Lefèvre.  - Les mesures d'urgence dans la période Covid avaient permis à bien des agriculteurs de maintenir la tête hors de l'eau. Encore un petit effort !

Conséquences de la loi ÉGalim dans la restauration scolaire et collective

Mme Else Joseph .  - La loi ÉGalim du 30 octobre 2018 a imposé, dans la restauration scolaire et collective, un menu végétarien par semaine ainsi qu'un approvisionnement à 50 % en denrées alimentaires dites durables.

Or ces prescriptions se heurtent aux habitudes socioculturelles des habitants, attachés à la consommation de viande et peu familiers de l'alimentation « bio ». Le repas végétarien devrait relever de l'incitation plutôt que de l'obligation. De fait, l'introduction des menus végétariens se traduit par une augmentation des déchets et, partant, du gaspillage alimentaire.

En outre, faute d'offre locale en bio suffisante - c'est le cas dans mon département des Ardennes - l'approvisionnement se fait auprès de grossistes dont les produits sont importés. Un paradoxe, alors que l'on prétend relocaliser les approvisionnements !

Enfin, le coût supérieur des produits bios ou durables peut conduire les syndicats intercommunaux à augmenter les tarifs, au détriment des familles et des finances des collectivités locales.

Envisagez-vous des adaptations locales à ces prescriptions pour soulager nos collectivités ?

M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire .  - Votre question me permet de faire le point sur ce sujet. Ayant moi-même été maire et président de communauté de communes, je comprends vos préoccupations.

La loi ÉGalim vise à améliorer la qualité des repas avec un taux d'approvisionnement de 50 % de produits durables et de qualité, dont 20 % de produits issus de l'agriculture biologique.

Les recettes végétariennes sont nombreuses et variées ; je pense aux oeufs, aux produits laitiers, pour rendre plus appétissants des ingrédients auxquels les enfants sont peut-être moins habitués, mais qu'ils ne laisseront pas sur le côté de l'assiette !

Il nous faut travailler globalement sur le sujet du gaspillage alimentaire dans la restauration scolaire. J'ai visité un lycée agricole qui a obtenu d'excellents résultats en la matière.

Quant aux difficultés d'approvisionnement local, c'est un peu la poule et l'oeuf, si j'ose dire : ces mesures servent aussi à encourager le développement des filières de qualité. À cet égard, les projets alimentaires territoriaux peuvent être un outil pour coordonner la demande vis-à-vis des syndicats intercommunaux ou des collectivités qui exercent la compétence, et préciser un cahier des charges pour les agriculteurs. Je salue les nombreuses initiatives locales en la matière.

Enfin, le plan de relance finance des mécanismes de soutien aux collectivités locales pour qu'elles investissent dans la restauration de proximité. Nous poursuivons le travail pour mettre en adéquation l'offre et la demande.

Mme Else Joseph.  - Merci. Nous partageons tous l'objectif, mais il faut travailler ensemble pour changer les mentalités et les façons de travailler dans les collectivités.

La séance est suspendue à 12 h 50.

présidence de M. Alain Richard, vice-président

La séance reprend à 14 h 30.

Décès d'anciens sénateurs

M. le président.  - J'ai le regret de vous faire part du décès de nos anciens collègues, Claude Saunier, qui fut sénateur des Côtes-du-Nord puis des Côtes-d'Armor de 1989 à 2008 et d'Henri Le Breton, qui fut sénateur du Morbihan de 1981 à 2001.

Salut à une délégation sénatoriale roumaine

M. le président.  - Au nom du Sénat, je souhaite la bienvenue dans notre hémicycle à M. Angel Tîlv?r, président de la commission des affaires européennes du Sénat roumain ; M. Robert Marius Cazanciuc, vice-président du Sénat roumain ; Mme Anca Dragu, présidente de la commission des droits de l'homme, de l'égalité des chances, des cultes et des minorités du Sénat roumain, et ancienne présidente du Sénat ; M. Vlad-Mircea Pufu, secrétaire de la commission des affaires européennes du Sénat roumain.

La venue de la commission des affaires européennes du Sénat roumain s'inscrit dans un agenda dense entre nos deux Chambres puisqu'il y a exactement une semaine, le Président Larcher recevait la Présidente du Sénat de Roumanie, Mme Gorghiu.

Une réunion commune entre les deux commissions des affaires européennes est prévue tout à l'heure pour débattre d'enjeux majeurs : la guerre en Ukraine, la crise énergétique, les progrès de la Roumanie vers son entrée dans l'espace Schengen, sans oublier naturellement la coopération bilatérale entre la Roumanie et la France, qui s'inscrit dans le cadre de l'amitié ancienne qui lie nos deux pays depuis l'émergence de la Roumanie comme État au XIXe siècle.

Je me félicite que les commissions des affaires européennes de nos deux chambres entretiennent ainsi un dialogue régulier qui contribue à nourrir cette amitié.

Je souhaite à nos collègues roumains un séjour fructueux en France. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que les membres du Gouvernement, se lèvent et applaudissent.)

Fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (Procédure accélérée)

M. le président.  - L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant mesures d'urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi.

Discussion générale

M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Voici notre premier texte relatif au plein emploi, ce ne sera sans doute pas le dernier.

La France n'a plus connu le plein emploi depuis 45 ans. Une partie du chemin est déjà accomplie, avec la création d'1,7 million d'emplois en cinq ans, dont la moitié - 830 000 - depuis mars 2020, ce que nul n'aurait imaginé au début de la période covid.

La décentralisation de la négociation collective, le compte personnel de formation (CPF), le plan d'investissement dans les compétences (PIE) et le développement de l'apprentissage ont favorisé ces créations, sans se faire au détriment des salariés et des entreprises. Loin des fausses oppositions, l'emploi et les compétences deviennent une composante de la compétitivité.

Le projet de loi est resserré sur les mesures les plus urgentes et les plus importantes. Notre taux de chômage reste deux fois plus élevé que celui de nos voisins, alors même que 60 % des entreprises ont des difficultés à recruter et que 30 % des entreprises industrielles réduisent leur activité faute de main-d'oeuvre.

Il faut donc poursuivre nos efforts pour libérer le travail. Ma première idée est que le plein emploi passe par la création d'une envie, d'un goût du travail. Il faut donner le goût de l'artisanat, de l'industrie, du bâtiment dès l'école. C'est un axe de notre action avec ma collègue Carole Grandjean. Ces secteurs sont porteurs, en phase avec le progrès technologique, mais leur image s'est dégradée.

Ma deuxième idée est l'emploi pour tous : attaquons tous les freins périphériques à l'emploi pour les plus fragiles, dont la garde d'enfants et la mobilité. C'est le chantier de France Travail et du PIE qui doit passer à une nouvelle échelle. Nous devons aussi accompagner de façon plus intensive les bénéficiaires des minima sociaux. L'État n'est pas quitte de son devoir de solidarité par le seul versement de la prestation : il a aussi le devoir de donner une véritable chance de retrouver un travail. La formation professionnelle doit se transformer pour faire face aux enjeux de transition numérique, écologique et démographique. Enfin, ce projet de loi donne une première impulsion en matière de validation des acquis de l'expérience (VAE), Mme Grandjean y reviendra.

Troisièmement, le plein emploi passe par de meilleures conditions de travail : nous avons d'importantes marges de progrès. Les entreprises devront mieux faire évoluer les métiers et accompagner leurs salariés. Nous les accompagnerons pour cela.

Le texte apporte des réponses, dont la première concerne l'assurance chômage, bâtie au fil du temps par les partenaires sociaux au service de la mobilité et de la protection des actifs. Elle reste au coeur de notre modèle de sécurité sociale et professionnelle. Il faut garantir son caractère protecteur et universel - nous l'avons d'ailleurs élargie à certaines démissions et aux travailleurs indépendants -, mais elle doit être mise au service d'un retour rapide et durable à l'emploi.

Une première réforme a eu lieu en 2019, pour répondre à l'explosion en vingt ans des contrats courts, tout en répondant au déficit structurel de l'assurance chômage - 2,9 milliards d'euros par an en moyenne entre 2009 et 2019. Un nouveau mode de calcul des allocations garantit qu'il est plus rémunérateur de travailler. Et depuis le 1er septembre 2022, 6 000 entreprises ont subi un malus et 12 000 un bonus.

La commission a réécrit l'article 2. Mais permettez-moi de rappeler que les contrats courts coûtent plus de 2 milliards d'euros par an à l'assurance chômage. Il était juste d'en faire payer une partie aux entreprises qui en sont responsables. Les sept secteurs concernés doivent modifier leur approche : le CDI intérimaire ou le groupement d'employeurs sont des alternatives.

Le décret du 28 juillet 2019 définit les règles de l'assurance chômage, faute d'accord des partenaires sociaux. Son échéance au 1er novembre justifie l'urgence de ce texte : nous entendons prolonger les règles en vigueur jusqu'au 31 décembre 2023. Les partenaires sociaux devront se saisir de ces questions.

Les règles doivent aussi être plus réactives face à la conjoncture. Il y a quinze ans, quand le chômage dépassait les 10 %, 55 % des demandeurs d'emploi étaient indemnisables, contre 61 % en 2019 alors que le taux de chômage n'était plus que de 8 %. C'est le contraire qu'il faudrait faire. Notre régime d'assurance chômage est construit pour faire face à un chômage de masse et non pas pour un retour rapide à l'emploi, comme en témoigne sa générosité. (M. François Patriat approuve.) Nous discutons de la contracyclicité avec les partenaires sociaux.

Nous n'ouvrons cependant pas de consultation sur le montant des indemnisations, déjà modifié par la réforme de 2019.

M. Michel Savin.  - Cela ne sert à rien !

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Le système doit devenir plus incitatif, sans toutefois devenir aussi strict que dans d'autres pays. Je rappelle que la durée d'indemnisation est de douze mois en Allemagne.

Le taux de conversion - rapport entre la période de calcul des droits et la durée d'indemnisation - est de 1 en France, contre 0,5 en Allemagne, en Italie et en Irlande et même 0,4 aux Pays-Bas, en Espagne et au Portugal. Nous travaillons donc à la modulation des règles d'indemnisation en fonction de l'état du marché du travail : nos discussions avec les partenaires sociaux aboutiront dans six à huit semaines.

Enfin, la négociation interprofessionnelle s'ouvrira sur la gouvernance de l'assurance chômage, avec la recherche d'un accord national interprofessionnel majoritaire. C'est pourquoi nous limitons l'application du projet de loi à quatorze mois, soit au 31 décembre 2023.

D'autres dispositions concernent la définition du collège électoral des élections professionnelles, la ratification d'ordonnances ainsi que la formation professionnelle.

Je remercie les membres de la commission des affaires sociales, au premier rang desquels les rapporteurs, qui ont enrichi le texte.

M. Michel Savin.  - Très bien.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Je suis plus réservé sur le déplafonnement de la durée maximale des contrats intérimaires ou sur vos restrictions au système de bonus-malus.

M. Michel Savin.  - Dommage !

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Nous aurons l'occasion d'y revenir lors de la discussion des articles. (Applaudissements sur les travées du RDPI et sur plusieurs travées du groupe UC ; M. André Guiol applaudit également.)

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l'enseignement et de la formation professionnels .  - La validation des acquis de l'expérience s'inscrit dans notre mission de développement des compétences pour le plein emploi. Beaucoup de nos concitoyens connaissent ce concept qui reste cependant peu utilisé dans les parcours professionnels.

La VAE doit redevenir un outil au service de tous les actifs et s'adapter aux expériences de chacun, y compris associatives, syndicales et familiales.

L'article 4 fonde ainsi une VAE de nouvelle génération. Trop longue, trop administrative, inadaptée, un parcours du combattant : nous avons tous entendu ces critiques. Seuls 30 000 parcours ont été réalisés l'an dernier, deux fois moins qu'il y a dix ans. Et pour cause : la durée moyenne d'un parcours est de dix-huit mois, avec moult statuts, financeurs, certificateurs, référentiels... La VAE est pourtant un appui efficace dans un parcours d'emploi.

Cela justifie notre approche universaliste : nous visons 100 000 parcours avant la fin du quinquennat.

En premier lieu, pour ceux qui interrompent leur carrière afin de prendre soin d'un proche, nous voulons reconnaître sur le marché du travail les compétences d'aidance ainsi acquises.

Votre commission des affaires sociales fixe le principe d'un accès universel à la VAE : l'approche est séduisante, mais on risque de mal identifier certains publics. Certaines associations d'aidants s'inquiètent aussi d'une approche trop adéquationniste : je les rassure, tous les proches aidants pourront obtenir des certifications relevant d'autres secteurs.

Les rapporteurs ont confirmé l'importance de la simplification : le principe de VAE est fixé dans la loi, sa mise en oeuvre fera l'objet de textes réglementaires.

La VAE doit maximiser les chances de succès des candidats aux certifications. Ainsi, nous proposons le doublement du congé VAE pour les salariés.

M. François Bonhomme.  - Quelle audace !

Mme Carole Grandjean, ministre déléguée.  - La durée des parcours est aussi un facteur réussite : il n'est pas acceptable d'attendre huit mois pour un jury. C'est pourquoi nous simplifions l'organisation et la composition des jurys.

Ce texte fera entrer la VAE dans la modernité. Nous voulons créer un service public national de la VAE, pour optimiser les parcours et les chances de réussite. C'est pourquoi nous allons créer un espace de coordination qui combine les expertises des acteurs, pour redorer le blason de la VAE. Cela suppose une gouvernance agile et adaptable, dans le cadre d'un groupement d'intérêt public.

Je salue l'engagement des régions qui auront leur rôle à jouer.

Le texte assoit ce service public avec un espace numérique dédié comme point d'entrée unique pour les usagers.

La VAE inversée rend concomitantes l'acquisition de l'emploi et de la formation, d'une part, et la validation des compétences d'autre part. Cela fera de ces périodes un tremplin vers la certification et l'emploi durable, notamment dans les métiers en tension.

Nous avons l'occasion de donner un nouveau souffle à la VAE : c'est un progrès social et un bond culturel pour notre pays. Je compte sur vous pour faire du droit à la reconnaissance des compétences un droit réel et tangible. (Applaudissements sur les travées du RDPI et du RDSE)

Salut à une délégation sénatoriale ivoirienne

M. le président.  - J'ai le plaisir de saluer la présence, dans la tribune d'honneur, d'une délégation du Sénat de Côte d'Ivoire conduite par son président, Son Excellence M. Jeannot Ahoussou - Kouadio, qui s'est entretenu avec le Président du Sénat hier soir.

La délégation est accompagnée par notre collègue André Reichardt, président du groupe d'amitié France-Afrique de l'Ouest. Je tiens à souligner la grande qualité de nos relations interparlementaires.

La Côte d'Ivoire a fait le choix du bicamérisme dans sa Constitution de 2016, ce dont nous nous félicitons. En février 2020, le Président Larcher avait participé, avec plusieurs de nos collègues, au premier forum du Sénat ivoirien avec les collectivités territoriales, à Yamoussoukro. Nos deux Sénats sont engagés dans une coopération étroite, portant notamment sur l'évaluation des politiques publiques et la qualité des travaux législatifs.

Au-delà, je veux saluer l'action du Président Ouattara pour faire de la Côte d'Ivoire un pôle de stabilité, dans un environnement régional troublé, et ses efforts pour renouer le dialogue politique. Cette voie n'est pas nécessairement la plus facile. Mais elle est la plus prometteuse.

Nos deux pays sont par ailleurs engagés dans un partenariat étroit qui porte ses fruits dans tous les domaines, singulièrement en matière de sécurité et de défense, pour mieux combattre le terrorisme : nous mesurons l'ampleur des mesures prises par les autorités ivoiriennes pour protéger les Ivoiriens de ce fléau.

Permettez-moi de souhaiter à Son Excellence M. Jeannot Ahoussou-Kouadio et à sa délégation la plus cordiale bienvenue au Sénat français. (Mmes et MM. les sénateurs et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)

Fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (Procédure accélérée - Suite)

Discussion générale (Suite)

Mme Frédérique Puissat, rapporteur de la commission des affaires sociales .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) L'ambition de ce texte est plus limitée que son intitulé ne le suggère : il proroge simplement le régime actuel de l'assurance chômage.

Il soulève cependant des questions cruciales sur ce régime, signant l'échec de la gouvernance issue de la loi de 2018. Les règles du décret de carence du 26 février 2019 ne seront plus applicables à compter du 1er novembre, or rien n'a été prévu pour la suite. L'article premier autorise donc le Gouvernement à prendre par décret les mesures nécessaires jusqu'au 31 décembre 2023 et à prolonger le bonus-malus jusqu'au 31 août 2024.

Ces mesures dérogatoires ne devraient être applicables que pour une durée proportionnée aux nécessités de l'urgence. C'est pourquoi la commission, attachée à la gestion paritaire de l'assurance chômage, a avancé la date limite d'application au 31 août 2023.

Cette période devra être mise à profit pour engager des concertations afin de faire évoluer la gouvernance de l'assurance chômage et de tirer les leçons de l'échec de la réforme de 2018.

La commission a prévu d'abroger les dispositions du code du travail relatives à la procédure de négociation des accords relatifs au régime d'assurance chômage sur la base de la lettre de cadrage.

Elle a également défini une procédure transitoire faisant intervenir le Gouvernement par le biais d'un document d'orientation en vue de la négociation d'un accord. Elle a aussi renforcé le cadre de l'indemnisation : le droit à l'allocation ne doit pas être ouvert à un candidat ayant refusé trois propositions de CDI à l'issue d'un CDD. De plus, les droits doivent être modulés en fonction d'indicateurs conjoncturels.

À l'article 2, la commission est allée beaucoup plus loin sur le bonus-malus qui ne cible pas suffisamment les contrats courts : les CDD ne représentent que 2 % des fins de contrats prises en compte. D'où un recentrage sur les CDD inférieurs à un mois - à l'exclusion des CDD de remplacement d'un salarié absent. De plus, nous avons limité la modulation du taux à plus ou moins 0,5 point.

La commission a approuvé l'article premier bis A : le salarié en abandon de poste est présumé avoir démissionné.

Elle a également adopté l'article 2 bis sur l'expérimentation des CDD « multi-remplacements » et inséré un article 2 ter qui supprime la durée maximale de 36 mois pour les CDI intérimaires.

Enfin, la commission a adopté un amendement de Philippe Bas prévoyant une procédure plus équitable pour les collectivités territoriales devant indemniser un ancien agent au chômage.

En résumé, nous avons souhaité rendre l'initiative aux partenaires sociaux, dans un dispositif plus juste et plus adapté pour les entreprises. Moyennant cela, nous vous proposerons d'adopter ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP, ainsi que sur quelques travées du groupe UC)

M. Olivier Henno, rapporteur de la commission des affaires sociales .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Je remercie la présidente et la rapporteure. Ce texte développe la VAE, troisième voie d'obtention d'une certification aux côtés de la formation initiale et de la formation continue. Elle renforce l'employabilité, favorise la progression de carrière et répond aux besoins du marché du travail.

Trop complexe, peu connue, insuffisamment valorisée, la VAE est peu sollicitée - mal aimée, comme aurait dit Claude François.

« J'ai besoin qu'on m'aime, dit la VAE, mais personne ne me comprend ». Essayons de la comprendre, en prenant par exemple en compte, à l'article 4, le parcours des proches aidants et en renforçant l'accompagnement des candidats.

Les apports du texte sont les bienvenus. Il instaure un service public de la VAE pour accompagner tous les demandeurs. C'est un groupement d'intérêt public (GIP) qui le mettra en oeuvre au niveau national, promouvant la VAE et concourant à l'harmonisation des pratiques.

La commission a supprimé la longue liste des catégories de personnes et types d'activités éligibles - énumération signifie risque d'oubli - et a posé le principe que la VAE est ouverte à toute activité en lien avec la certification visée.

Nous avons souhaité que le GIP soit présidé par un président de conseil régional. Les acteurs de l'accompagnement devront être soutenus, y compris financièrement.

Nous avons approuvé l'article 3 qui tire les conséquences d'une décision du Conseil constitutionnel.

L'article 5 ratifie vingt-et-une ordonnances. Voilà qui est rare, au vu du faible taux de ratification au cours du précédent quinquennat. Mais sur ces vingt-et-une ordonnances, quatorze ne sont déjà plus en vigueur et une a été annulée par le Conseil d'État... La commission a donc réduit la liste des ratifications aux six ordonnances restant en vigueur.

Je vous invite à adopter le projet de loi issu de nos travaux. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains, ainsi que sur le banc des commissions)

Question préalable

M. le Président.  - Motion n°73, présentée par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, portant mesures d'urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (n° 62, 2022-2023).

Mme Cathy Apourceau-Poly .  - Alors que le Gouvernement a dégainé le 49.3 à l'Assemblée nationale sur le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale, ce texte l'habilite à fixer seul les conditions d'indemnisation des personnes privées d'emploi. C'est un refus du paritarisme, un passage en force qui marque une nouvelle étape de l'étatisation de l'assurance chômage, pour mieux servir les intérêts du patronat. La prochaine étape sera la disparition de l'Unédic et de Pôle emploi dans France Travail.

Alors que nous entamons l'examen de ce texte, le Gouvernement a déjà lancé les concertations pour moduler l'indemnité de chômage : quel mépris du Parlement ! C'est d'autant plus inacceptable que la modulation consiste à allonger la période d'ouverture des droits - privant 200 000 personnes d'indemnisation. Voilà 2 milliards d'euros économisés sur le dos des jeunes ! L'ensemble des organisations syndicales de salariés ont signifié leur opposition - même l'Union des entreprises de proximité a émis des doutes sur la corrélation entre contracyclicité et capacité à recruter.

Les difficultés proviennent en réalité du manque d'anticipation et d'investissement dans la formation professionnelle. Nous manquons de techniciens, d'artisans parce que les salaires sont trop faibles et les conditions de travail difficiles, mais aussi parce que, depuis des années, les gouvernements successifs ont cassé l'enseignement professionnel.

Penser que réduire les droits incite à la reprise du travail relève d'une vision archaïque. Le 14 juillet dernier, le Président de la République a présenté l'assurance chômage comme un obstacle au bon fonctionnement du marché du travail.

L'émancipation des individus par le travail n'est pas possible dans la société capitaliste. La dégradation des conditions de travail, la faiblesse des salaires, les comportements toxiques des DRH conduisent à une perte de sens - celle que ne supportent plus les infirmières à l'hôpital, par exemple. Il faut une participation aux décisions, une réduction du temps de travail à 32 heures et une augmentation massive des salaires.

Et cessons d'opposer les travailleurs et les privés d'emploi, qui sont les variables d'ajustement du marché du travail, sans possibilité de choisir librement un emploi. Quatre chômeurs sur dix sont indemnisés et la moitié d'entre eux vivent sous le seuil de pauvreté. Avec la réforme de 2019, un million d'allocataires ont perdu 155 euros par mois et 450 000 personnes ont été exclues de toute allocation.

Les radiations administratives ont progressé de 40 % en un an.

Avec ce texte, le Gouvernement reprend la main sur l'Unédic, géré par les partenaires sociaux depuis 1958. Plutôt que de s'engager à reprendre les 15 milliards d'euros de dette de l'Unédic créée par l'activité partielle pendant la crise sanitaire, il veut, par décret, transformer l'assurance chômage en simple filet de secours minimal. C'est un déni de solidarité, la transformation d'une assurance collective en épargne individualisée.

Ce processus de dénaturation de l'assurance chômage est à l'oeuvre depuis la substitution, en 2018, de la CSG aux cotisations salariales et l'encadrement des négociations par le Gouvernement. Bientôt, le chômage ne sera plus qu'un risque individuel.

Renouons avec la logique de solidarité salariale. Entre 1992 et 2001, la dégressivité des allocations chômage n'a pas fait progresser l'emploi. De même, la réforme du régime des intermittents n'a pas fait augmenter le nombre de CDI. Les chômeurs n'ont pas le choix de leur emploi ; la réduction des allocations ne fera que les contraindre à accepter des contrats encore plus précaires.

Je dénonce en particulier la suppression de l'indemnisation chômage pour les salariés qui abandonnent leur poste. C'est un recul considérable, le phénomène n'étant ni chiffré ni évalué. Nos juridictions prud'homales sont incapables de répondre dans un délai d'un mois à une demande des salariés. L'abandon de poste est avant tout une porte de sortie en cas de conflit avec l'employeur. Vous allez entraîner une explosion des arrêts maladie.

Nous portons un projet alternatif de sécurisation de l'emploi et de la formation. Le groupe CRCE rejette ce projet de loi qui s'attaque aux droits des salariés et à la gouvernance paritaire de l'assurance chômage. Nous vous invitons à voter cette motion. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et du GEST ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. Olivier Henno, rapporteur.  - Je suis défavorable par principe aux questions préalables, qui s'apparentent à un refus du débat. C'est une forme de négation de ce que nous sommes. (Mmes Éliane Assassi et Marie-Noëlle Lienemann applaudissent.)

Ce texte est nécessaire pour des raisons juridiques, afin de prolonger les règles de l'assurance chômage, mais aussi politiques : les questions de la VAE, des contrats courts, de la gouvernance doivent être débattues.

Même si le match s'annonce délicat, il faut le jouer. Avis défavorable. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains)

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Avis défavorable, sans surprise.

J'entends l'opposition à ce texte, mais pas tous vos arguments. France Travail ne fera pas disparaître Pôle emploi. Vous présentez comme acté que la modulation aboutira à porter de six à huit mois la durée de cotisation donnant droit à indemnisation : ce n'est pas exact. Cette réforme n'a pas non plus pour objectif de faire baisser le montant des indemnités : depuis 2019, nous maintenons le taux de remplacement dans la moyenne européenne, à 57 %. Enfin, vous évoquez une augmentation de 50 % des radiations administratives en 2022 ; en réalité, l'augmentation est de 14 % sur la période janvier-août 2022 par rapport à la même période de 2019. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Laurence Rossignol.  - Le plus souvent, le groupe SER s'abstient sur les questions préalables.

Mme Éliane Assassi.  - Vous votez contre, parfois !

Mme Laurence Rossignol.  - Plus rarement. En l'espèce, j'ai trouvé notre collègue très convaincante. De quoi allons-nous débattre ? Des chômeurs, qui le seraient parce qu'ils le veulent bien ? De réduire leur indemnisation pour les remettre dans l'emploi ? Nos chances d'améliorer ce texte sont à peu près nulles, tant les convergences entre le Gouvernement et la majorité sénatoriale sont fortes.

C'est la mise en oeuvre, en somme, de la formule présidentielle selon laquelle il suffirait de traverser la rue pour trouver un travail. Le groupe SER votera cette motion. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et du GEST ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. Daniel Chasseing.  - Je ne vois rien de péjoratif pour les salariés dans ce texte. Les règles en vigueur doivent être prorogées au-delà du 1er novembre. Les offres d'emploi sont nombreuses de nos jours : trois propositions de CDI après un CDD, c'est raisonnable. Le bonus-malus est amélioré.

Pour moi, un abandon de poste, très pénalisant pour l'entreprise, ne doit pas être indemnisé comme un licenciement ou une rupture conventionnelle. Le salarié a des droits, mais aussi des devoirs.

Enfin, la VAE doit être valorisée, notamment pour les emplois à domicile et en Ehpad. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP)

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Au motif de prolonger un délai de carence, ce projet de loi est un affront au débat parlementaire et au paritarisme.

M. Philippe Mouiller.  - Carrément !

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Cette réforme antisociale n'a pas été évaluée. On nous demande de la prolonger pour permettre au Gouvernement de légiférer par décret lorsque les négociations auront échoué. Car comment accepter ce décalque du régime canadien qui a multiplié les radiations ? (Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit.)

On fantasme sur la figure d'un chômeur qui profiterait de l'indemnisation, en omettant la nécessaire réflexion sur le fonctionnement du marché du travail.

Le GEST votera la question préalable. (Applaudissements sur les travées du GEST et sur quelques travées des groupes SER et CRCE ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. Philippe Mouiller.  - Nous rencontrons régulièrement des entreprises, surtout des PME, qui n'arrivent pas à recruter, se développer, s'implanter. Le nombre d'emplois non pourvus est en augmentation. Cette réforme va dans le bon sens, mais elle ne suffit pas ; il faudra travailler sur l'accompagnement.

Nous portons sur ce texte un regard plutôt bienveillant, d'autant que la commission a veillé à conforter le paritarisme - à cet égard, nous ne partageons pas l'approche du Gouvernement.

Pour ces raisons, nous voterons contre la motion tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

À la demande du groupe CRCE, la motion n°73 est mise aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°11 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l'adoption   92
Contre 252

Le Sénat n'a pas adopté.

Discussion générale (Suite)

Mme Laurence Cohen .  - Nous dénonçons la philosophie de ce projet de loi : les chômeuses et les chômeurs ne voudraient pas traverser la rue pour trouver un emploi. Un tiers d'entre eux ne font pas valoir leurs droits, mais vous les considérez comme des fainéants et des profiteurs... Pourtant, le chômage est source de souffrance, de mal-être et de perte de confiance en soi.

L'assurance chômage est un droit. Ce n'est pas en modulant les indemnités que vous trouverez des couvreurs, des électriciens ou des aides à domicile. Il faut investir dans la formation, augmenter les salaires et améliorer les conditions de travail.

Moduler les indemnités selon la conjoncture et le territoire entraînerait fractures géographiques et disparités de droits. Ce serait une remise en cause du principe d'égalité.

Le Gouvernement peut remercier la droite de cet hémicycle, jamais avare d'un recul social : comme l'explique un récent article du journal Les Échos, la majorité sénatoriale a sauvé la réforme en votant la modulation des indemnités sur une base contracyclique.

Ce recul s'ajoute au vote de l'Assemblée nationale sur la présomption de démission en cas d'abandon de poste. En l'absence de statistiques en la matière, cette disposition est totalement inadaptée.

La droite sénatoriale souhaite en outre priver d'indemnité la personne qui refuserait trois CDI : il faudrait donc accepter n'importe quel emploi, quels que soient les conditions de travail, le trajet et le salaire ? Elle encourage aussi le recours à l'intérim, qui pèse lourd dans le financement du système et aggrave la précarité. Quant au malus, elle l'a quasiment annulé.

Nous défendons un autre projet, reposant sur de nouveaux financements : lutte effective contre la précarité, service public unifié de l'emploi et de la formation professionnelle, sécurité sociale professionnelle pour les privés d'emploi.

Ce projet est aux antipodes du texte soutenu par le Gouvernement et la majorité sénatoriale, que nous rejetterons. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur des travées du groupe SER ; Mme Raymonde Poncet Monge applaudit également.)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Je félicite les rapporteurs pour leur excellent travail.

Nous connaissons tous près de chez nous un patron qui embauche, mais ne trouve pas de personnel. Nous entendons tous les cancans contre le beau-frère de la copine du voisin, qui profite du chômage ou du RSA et gagne plus que ceux qui travaillent. Ces faits existent, sans doute. Mais pensez-vous que la vendeuse de chez Camaïeu qui perd son travail pourra, demain, être serveuse chez Raoul, le restoroute ? C'est une question de profil bien sûr, de salaire peut-être, mais aussi de conditions de travail, de transport et de garde d'enfants.

Comme vous, monsieur le ministre, je pense que le plein emploi est atteignable. Le travail est un droit constitutionnel : l'État doit donner à chacun les moyens d'y accéder. Mais quel chantier...

Ce texte répond à l'urgence normative du régime d'assurance chômage plus qu'à l'urgence du plein emploi. Le vrai chantier à engager, c'est la gouvernance de l'assurance chômage. Car, sans réforme profonde, le paritarisme aura vécu - celui qui vous le dit y est particulièrement attaché, comme l'ensemble de son groupe.

J'ai confiance dans la capacité des partenaires sociaux à s'illustrer ailleurs que sur les dépôts pétroliers et dans la rue. Il faut trouver des solutions pour équilibrer les comptes, sans quoi l'État prendra la main, et il sera difficile de s'en étonner.

Pour atteindre le plein emploi, nous devons changer de paradigme. À l'égard de France Travail, nos attentes, simples, sont celles des chômeurs eux-mêmes : un guichet unique et un parcours personnalisé comportant, si nécessaire, une formation. Il faut cesser de fonctionner en vase clos. Les exemples de réussite à cet égard sont nombreux : la maison de l'emploi, de l'entreprise et de la formation de Vitré me paraît le plus abouti.

L'UC votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur quelques travées du groupe Les Républicains ; Mme Colette Mélot applaudit également.)

Mme Maryse Carrère .  - (Applaudissements sur les travées du RDSE) Françoise Giroud disait : « Le chômage est comme une marée noire qui recouvre l'herbe verte, là où elle a poussé ».

Atteindre le plein emploi est l'objectif de tous les gouvernements. Malgré tous les efforts, le chômage se maintient à 7,4 %.

Nous connaissons les effets délétères du chômage. Vécu comme un échec, il peut être un vrai traumatisme.

Ce projet de loi est une première étape. Je salue le travail des maisons de l'emploi, dispositif d'insertion professionnelle parmi les plus efficaces. Nous espérons qu'elles seront financées dans le projet de loi de finances pour 2023.

Une mesure de ce texte cristallise les tensions : la prolongation des règles d'assurance chômage fixées en 2019. Les sénateurs du RDSE sont partagés sur cette question. Nous regrettons de devoir légiférer dans l'urgence, mais, si nous ne faisons rien, des millions de chômeurs ne pourront être indemnisés.

Certains craignent la signature d'un chèque en blanc au Gouvernement, ce que le Conseil d'État confirme : aucune limite n'est fixée aux mesures qui pourront être prises par décret. Le RDSE défendra des amendements visant à redonner toute sa place au dialogue social.

Nous regrettons la mesure, introduite en commission, consistant à supprimer l'indemnité en cas de refus répété d'un CDI. Cette mesure n'a pas sa place dans un texte d'urgence et remettrait en cause un droit de manière dangereuse.

Nous regrettons, enfin, de ne pouvoir traiter du dispositif Territoire zéro chômeur, nos amendements à cet égard ayant été jugés irrecevables au titre de l'article 45.

Le groupe RDSE se félicite en revanche de la réforme de la VAE. Trop complexe, ce dispositif ne s'est pas imposé dans le paysage de la formation professionnelle, alors qu'il constitue un formidable outil.

Nous réservons notre vote en fonction du sort de nos amendements. (Applaudissements sur les travées du RDSE)

Mme Pascale Gruny .  - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Une fois n'est pas coutume, ce projet de loi répond à une véritable urgence : prolonger les règles qui arriveront à échéance le 1er novembre -  demain  - , afin d'éviter un arrêt soudain du versement des prestations.

Mais ce texte va au-delà : le Gouvernement pourra définir les nouvelles règles de l'assurance chômage par décret, sans limites même indirectes. Ce blanc-seing demandé aux parlementaires reflète l'ascendant pris par l'État sur la gestion de l'assurance chômage. Le paritarisme continue ainsi de reculer.

La loi du 5 septembre 2018 a modifié les règles de négociation de l'assurance chômage, en permettant au Gouvernement de fixer une lettre de cadrage étroitement définie. L'échec, prévisible, des négociations menées l'année suivante a abouti à un décret. Cette fois, le Gouvernement ne se soucie pas d'engager une négociation et précise d'emblée qu'il définira les règles par décret.

Nous savons que le décret consistera à moduler les conditions d'indemnisation en fonction du marché du travail, conformément à l'engagement du Président de la République. De modulation, il n'est pourtant point question dans le texte. Le Gouvernement pourra la prévoir ultérieurement ou non, et il décidera seul.

Je salue le travail de nos rapporteurs. À l'article premier, ils ont introduit la question de la gouvernance de l'assurance chômage afin de rétablir le rôle actif des partenaires sociaux. Il faut revenir aux fondamentaux, c'est-à-dire à l'esprit de la loi Larcher. Le Gouvernement devra engager une véritable concertation, par le biais d'un document d'orientation et non d'une lettre de cadrage.

Ensuite, la commission a avancé le délai accordé au 31 août 2023. Une situation exceptionnelle ne saurait durer plus longtemps que nécessaire.

Puisque la modulation est souhaitée par le Gouvernement, nous l'avons inscrite en toutes lettres dans le texte. Nous considérons comme légitime l'objectif de s'attaquer aux difficultés de recrutement : d'après le ministère du travail, 60 % des entreprises y sont confrontées, et un tiers réduisent même leur activité de ce fait.

Les conditions d'indemnisation jouent un rôle important dans la reprise d'emploi. Même après le durcissement de 2019, rappelons que les conditions d'indemnisation en France demeurent parmi les plus favorables de l'OCDE.

Faute d'étude d'impact, nous doutons cependant de la faisabilité de cette modulation. Quels seront les indicateurs retenus, la fréquence des réévaluations ? Pouvons-nous appliquer les mêmes règles dans ma région des Hauts-de-France, durement touchée, et ailleurs ? D'un territoire à l'autre, le taux de chômage peut varier du simple au double. Il serait préférable de faire l'analyse par bassin d'emploi, voire, dans certaines villes, par quartier.

La question s'est posée à l'Assemblée nationale de restreindre les droits à indemnisation à la suite de refus répétés de CDI après plusieurs CDD. La commission a opté pour la suppression des droits après trois refus. À titre personnel, je soutiendrai l'amendement de MM. Duplomb et Retailleau qui supprime l'indemnisation dès le premier CDI refusé. Dans un même esprit de justice, la commission a complété les dispositions sur l'abandon de poste pour sécuriser son assimilation à une démission.

Sur les contrats courts, la commission a supprimé le plafond de 36 mois. Notre sentiment sur le bonus-malus n'a pas changé : il s'agit d'un frein à l'emploi, qui ignore les impératifs de flexibilité auxquels sont soumis certains employeurs.

Enfin, en matière de VAE, nous avons dépassé l'approche par statut pour donner un nouvel élan à ce dispositif insuffisamment utilisé.

Le chômage a certes baissé, mais il reste supérieur à la moyenne européenne. Ce projet de loi permettra de résoudre un certain nombre de difficultés et de réaffirmer notre attachement au paritarisme. Sous réserve du maintien des dispositions qui l'enrichissent, le groupe Les Républicains le votera. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Colette Mélot .  - (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; M. Arnaud de Belenet applaudit également.) Le Président de la République a mis au coeur de son projet l'ambition forte d'atteindre le plein emploi en 2027.

Cet objectif peut nous rassembler. Le plein emploi, c'est permettre à chaque jeune de trouver sa place dans la société, valoriser le travail, la création et les compétences, récompenser l'effort. C'est aussi financer la protection sociale.

Comme souvent en politique, c'est moins l'objectif qui fait débat que les moyens de l'atteindre.

Il y a cinq ans, on se demandait comment lutter contre le chômage de masse. Désormais, nous entrevoyons l'espoir de le vaincre pour de bon. Il faudra pour cela des mesures courageuses, comme celles qui ont été prises ces cinq dernières années.

Ce projet de loi réforme l'assurance chômage pour garantir son équilibre et son équité. Les réformes du précédent quinquennat ont été engagées en conjoncture favorable, mais elles ont permis de tenir bon par gros temps.

Le taux de chômage reste de l'ordre de 7 %, à mi-chemin entre les 10 % de 2017 et les 4 % visés en 2027. Le marché du travail est tendu, ce qui profite au pouvoir de négociation des travailleurs. Dans ce contexte, l'assurance chômage se porte plutôt bien : elle pourrait dégager un excédent de 13 milliards d'euros sur 2022-2024. Cette amélioration doit nous encourager à faire bouger les lignes.

Il faut valoriser le travail et protéger les demandeurs d'emploi : sur ce sujet, nous trouverons des terrains d'entente.

La notification à Pôle emploi de tout refus de CDI au terme d'un CDD a été intégrée dans le sens de nos propositions en commission. Par ailleurs, on ne peut octroyer d'allocation à un salarié qui abandonne son poste : c'est une question d'éthique.

S'agissant de la VAE, nous soutenons la création d'un nouveau service public, pourvu qu'elle se fasse à moyens constants.

Le dialogue social, c'est le compromis : rien de nouveau sous le soleil... Le groupe INDEP est favorable à ce texte, tout en restant attaché au paritarisme et aux réformes. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ; M. Arnaud de Belenet applaudit également.)

Mme Raymonde Poncet Monge .  - (Applaudissements sur les travées du GEST ; Mme Monique Lubin applaudit également.) Ce texte est le premier acte d'un vaste plan antisocial, placé sous l'égide du « travailler plus pour gagner plus » ressuscité.

Mme Borne l'a annoncé : il faudra travailler plus et plus longtemps, atteindre le plein emploi avec un chômage à 5 % pour se conformer aux exigences de la rigueur budgétaire et du programme de stabilité. Une fois de plus, la doxa néolibérale guide le Gouvernement dans sa politique de stigmatisation des chômeurs.

En 2003 déjà, François Fillon jugeait inacceptables les 300 000 emplois non pourvus, faux paradoxe fréquemment cité sans analyse sérieuse.

En réalité, seules 5 à 6 % des offres d'emploi ne sont pas pourvues. Dans la plupart des cas, au reste, des candidatures se sont manifestées, rejetées par l'employeur. Et les trois quarts des recruteurs admettent que les conditions de travail associées à ces offres peuvent être décourageantes...

Selon la Dares, les difficultés d'embauche sont liées aux conditions de travail et aux salaires insuffisants : les résultats sont similaires dans tous les pays de l'OCDE. Les chômeurs non indemnisés refusent tout autant les offres que les autres.

Votre premier objectif, c'est de réduire les droits pour faire des économies ! Il faudrait, bien au contraire, se pencher sur le problème structurel de la qualité des emplois.

Après avoir affaibli la capacité de négociation des salariés avec les ordonnances Macron, vous visez un plein emploi répressif. Les études sur le système d'indemnisation mis en place au Canada montrent que la baisse des indemnités pousse les chômeurs à accepter des emplois de moindre qualité sous peine de radiation.

Vous prétendez défendre la valeur travail, mais l'avenir est au partage du travail. Marx le disait déjà (M. Laurent Burgoa s'exclame) : la condition essentielle de l'épanouissement, c'est la réduction de la journée de travail. Les récentes vagues de démissions révèlent le besoin de passer des bullshit jobs décrits par David Graeber à des emplois épanouissants, tournés vers l'utilité environnementale et sociale.

Votre modèle productiviste explose toutes les limites de la biosphère, alors qu'il faut de toute urgence ralentir. Reprenons la marche vers la réduction du temps de travail pour respecter les limites planétaires.

Le GEST votera contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du GEST et du groupe CRCE, ainsi que sur de nombreuses travées du groupe SER)

M. Martin Lévrier .  - (Applaudissements sur les travées du RDPI) Le plein emploi n'est pas une utopie : notre taux de chômage a baissé de 2,2 points depuis l'arrivée du président Macron à l'Élysée. (On ironise sur de nombreuses travées à droite et à gauche.) Preuve que la politique menée porte ses fruits.

Plus de la moitié des embauches se font en CDI, contre 30 % en 2019, et 62 % des entreprises les plus exposées aux contrats courts bénéficieront cette année d'un bonus.

Cela étant, la France compte encore 7,3 % de chômeurs : c'est trop. C'est pourquoi le plein emploi pour 2027 est au coeur de notre feuille de route. Ce projet de loi marque une première étape en prolongeant les règles de 2019, entrées en vigueur il y a moins d'un an à cause du covid et dont les effets ne peuvent donc pas encore être évalués.

La concertation avec les partenaires sociaux pour la modulation des règles est un engagement du Président de la République : il faut des règles incitatives à la reprise d'activité quand les conditions sont favorables et, inversement, plus protectrices quand l'économie va mal.

Partenaires sociaux et État partagent le souhait de modifier la gouvernance. L'État a repris la main avec le décret de carence, qui expirera le 1er novembre. Ce texte s'impose donc à nous pour des raisons calendaires.

Il s'agit aussi de poser les premiers jalons d'une réforme de la VAE, pour la rendre plus attractive et plus accessible. Nous voulons en faire un instrument simple au service de tous les actifs. Quoiqu'efficace pour développer l'employabilité, notamment des personnes les plus éloignées de l'emploi, elle reste sous-utilisée : 30 000 parcours l'année dernière, contre deux fois plus il y a dix ans.

Le texte ouvre la VAE aux proches aidants, qui pourront obtenir des certifications pour des métiers en forte tension comme les auxiliaires de vie et les aide-soignants. La majorité sénatoriale ouvre des pistes en proposant d'élargir la cible, mais c'est sans soute prématuré.

Notre groupe soutient ce texte, mais s'interroge sur certaines propositions des rapporteurs, s'agissant notamment du déplafonnement de l'intérim et de la modification des paramètres du bonus-malus. Nous proposerons aussi de revenir sur la suspension de l'allocation de chômage après trois CDI refusés. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Mme Monique Lubin .  - (Applaudissements sur les travées du groupe SER ; Mme Esther Benbassa applaudit également.) Nous nous émouvons souvent de l'insuffisance des études d'impact sur les textes gouvernementaux et de l'accumulation de réformes ignorant le travail parlementaire autant que le nécessaire temps d'évaluation.

Ce projet de loi ne fait pas exception. Il reflète les idées hâtives que, malheureusement, le Gouvernement et la droite sénatoriale ont en partage : les demandeurs d'emploi devraient être plus violemment incités à reprendre le travail, car l'assurance chômage, trop favorable, les inciterait à s'enfoncer dans la paresse et la fraude.

Une récente étude de Mathieu Grégoire et Claire Vivès, publiée par l'Institut de recherches économiques et sociales (Ires), bat ces idées en brèche. En matière d'indemnisation, ce sont bien les salariés en emploi discontinu qui subissent des pertes : ils ont perdu 50 % entre 1979 et 2019.

La réforme du premier quinquennat a fait évoluer l'assurance chômage vers une logique de compte d'épargne, fondée sur le salaire journalier plutôt que sur le salaire mensuel. Résultat : les plus exposés au chômage, qui étaient auparavant les mieux indemnisés, sont aujourd'hui les moins bien protégés.

Le taux de remplacement, souvent mis en avant, renvoie non aux chômeurs indemnisés, mais aux chômeurs indemnisables, ce qui est tout différent. Alors que nous avons 5,7 millions de personnes dans les catégories A, B et C, seules 49,5 % sont couvertes : c'est le taux le plus bas de notre histoire. On nous fait miroiter, de manière insincère, un système plus généreux qu'il ne l'est.

C'est pourquoi nous nous opposons à l'article premier, qui donnera au Gouvernement toute latitude pour modifier les règles sans consulter le Parlement ni les partenaires sociaux. Bruno Palier rappelle le rôle historique des coalitions d'intérêts : à la Libération, la demande des syndicats a rencontré la volonté de Pierre Laroque de constituer des corps intermédiaires. Une logique assurantielle a été promue, selon le principe : si vous payez, vous gérez. Les dépenses sociales ne devaient pas être soumises à la contrainte budgétaire en étant financées par l'impôt. Votre texte détricote ce principe, avec une désocialisation à marche forcée et le passage de la négociation à la concertation, qui ne laisse plus aux partenaires sociaux qu'un strapontin, voire un siège éjectable.

La restriction de l'accès à l'assurance chômage traduit l'accord profond entre le Gouvernement et la supposée opposition de droite.

Rien ne documente une pratique abusive de l'abandon de poste : ceux qui y recourent doivent pouvoir le faire pour préserver leur santé physique ou psychique.

Quant à l'amendement de la commission des affaires sociales visant à priver un demandeur d'emploi de ses indemnités, sur une base nébuleuse, faut-il seulement le commenter ? On retirerait ses indemnités à un demandeur d'emploi refusant trois propositions de CDI en douze mois. Quelles études montrent l'aspect critique de ce problème ?

On nous propose d'inscrire la contracyclicité dans le code du travail. En réalité, vous tentez d'instaurer une réquisition banalisée des travailleurs.

L'accès des proches aidants à la professionnalisation nous inspire aussi des réserves, dont Mme Meunier reparlera.

Il ne peut y avoir de valeur travail sans travail de valeur. Robert Castel rappelle que le salarié n'a gagné sa prééminence qu'avec l'émergence d'un État social. Le Gouvernement maltraite les salariés et fait taire leurs représentants à coup de 49.3.

Il faut refaire société : le Gouvernement prend ce besoin à rebours. Nous voterons contre un projet de loi qui tourne le dos à notre démocratie sociale ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et du GEST ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

Mme Annick Jacquemet .  - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Le droit du travail est un domaine des plus complexes. Nous devons faire évoluer le droit pour rester au plus près du fait social, tout en préservant les acquis passés.

Je salue le travail de nos rapporteurs, qui ont cherché à préserver les équilibres du texte. La prolongation des règles d'indemnisation laissera aux partenaires sociaux le temps de trouver un accord. Le texte prolonge aussi le bonus-malus, précisé par la commission : ce dispositif dissuade la généralisation des contrats précaires et récompense les entreprises vertueuses. La transmission des listes des anciens employés améliorera la transparence.

Le groupe UC se félicitait de l'article élargissant la VAE au secteur médico-social ; la commission l'a encore amélioré en créant un groupement d'intérêt public qui favorisera l'information.

La navette a enrichi le texte. Ainsi, si certains abandons de poste sont justifiés, un fort dévoiement du principe est observé. Il n'est pas souhaitable qu'un salarié licencié après abandon soit dans une situation plus favorable qu'un démissionnaire. Cependant, sans la soupape de sécurité votée en commission, le texte aurait pu aboutir à des situations dramatiques.

Le groupe UC votera le projet de loi, même si son titre est plus ambitieux que son contenu. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur le banc des commissions)

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Je remercie les orateurs, en particulier ceux qui ont souligné les progrès apportés par ce texte.

Plus largement, nous devrons traiter aussi de la formation initiale, de l'apprentissage, de l'accompagnement des publics les plus éloignés de l'emploi, de l'emploi des seniors ou encore des conditions de travail ; nous aurons d'autres occasions d'en débattre.

Quatre thèmes vont structurer nos échanges. D'abord le paritarisme, avec un amendement du Gouvernement rétablissant la rédaction votée par l'Assemblée nationale. La commission a modifié, à l'article premier, la durée d'application du texte et prévu l'organisation d'un dialogue social autour de la gouvernance, mais je pense que nous pouvons parvenir à un consensus. Nous n'avons pas pu ouvrir les négociations interprofessionnelles au moment de l'élection présidentielle, ce qui nous contraint aujourd'hui à proroger les règles existantes.

Je me suis engagé à ouvrir une négociation sur le paritarisme. Des quatre scénarios envisagés, un seul ne recueille pas notre assentiment : l'étatisation de l'assurance chômage.

Deuxième sujet de débat, l'abandon de poste. Madame Cohen, vous soulignez à juste titre que ce phénomène ne peut pas être mesuré en tant que tel - mais il se reflète dans l'évolution des licenciements pour faute grave. Ceux-ci ne connaissent pas d'évolution majeure concernant les CDI, mais ils doublent pour les CDD. On peut penser que cela correspond à une vague d'abandons de poste, notamment dans les cafés et restaurants. Quand l'abandon de poste n'est pas justifié par une mise en danger, c'est une rupture unilatérale d'un engagement contractuel qui peut s'apparenter à une démission et doit être traité comme tel.

Troisième sujet, le bonus-malus. Nous proposons l'horizon du 31 décembre 2024, pour respecter les cycles triennaux d'observation introduits par la loi de 2019.

Enfin, j'ai les plus grandes réserves sur l'amendement voté par la commission mettant fin à l'indemnisation après trois refus de CDI - et fortiori sur celui qui propose d'y mettre fin dès le premier refus. Lorsqu'un salarié engagé à durée déterminée est allé au bout de son engagement contractuel, il n'y a aucune raison de le sanctionner. Le code du travail prévoit déjà, en outre, qu'en cas de proposition d'un CDI dans les mêmes termes que le CDD, l'employeur peut ne pas verser la prime de précarité.

Nous reviendrons aussi sur la VAE au moment de l'examen de l'article 4, avec ma collègue Carole Grandjean, qui a dû s'absenter pour assister aux questions d'actualité au Gouvernement à l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées du RDPI)

Discussion des articles

ARTICLE PREMIER

M. Philippe Mouiller .  - L'expérimentation des territoires zéro chômeur de longue durée fonctionne bien. La loi du 14 décembre 2020 a permis à de nombreuses collectivités territoriales d'y adhérer. Seul un décret en Conseil d'État peut habiliter de nouveaux territoires. Pourquoi ne pas modifier la loi pour aller au-delà des cinquante nouveaux territoires prévus initialement ? Un amendement dans ce sens a été jugé irrecevable. Qu'en pensez-vous, monsieur le ministre ?

M. Yan Chantrel .  - Il y a un problème de méthode, qui en dit long sur la pratique politique du Gouvernement. Vous détricotez l'assurance chômage en disant vous inspirer du Canada, mais vous n'avez consulté personne dans ce pays, ni le Gouvernement ni les syndicats - pour ces derniers, je ne vous jetterai pas la pierre, vous ne le faites pas en France non plus...

Je suis justement de retour d'un déplacement au Canada, où j'ai pu échanger avec les personnes directement concernées. Elles font état d'une précarisation accrue et m'ont remis un livre sur le mouvement Action chômage de Montréal. (L'orateur brandit le livre en question.) Je vous le remettrai. Il montre les conséquences des politiques néolibérales.

Vous devriez plutôt vous inspirer de la semaine des quatre jours, mise en place dans certaines provinces... Mais de cela, curieusement, vous ne parlez pas. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et du GEST ; Mme Esther Benbassa applaudit également.)

Mme Esther Benbassa .  - Vous dites que vous vous souciez des actuels bénéficiaires, mais l'urgence, quand elle résulte de votre incapacité de concertation, n'impose nullement qu'on vous laisse les mains libres. Les organisations syndicales et patronales n'ont visiblement pas leur mot à dire ; vous devriez pourtant les écouter davantage : selon elles, les tensions sur le marché du travail s'expliquent d'abord par de trop faibles rémunérations, des conditions de travail dégradées et un manque de qualifications. Encore une fois, vous répondez hors sujet ! Selon Pôle emploi, 92 % des demandeurs cherchent activement un travail et un quart ne font pas valoir leurs droits à l'indemnisation. Nous voulons des possibilités pratiques, non des constatations théoriques. (Quelques applaudissements sur les travées du GEST et des groupes SER et CRCE)

Mme Monique Lubin .  - Pourquoi avoir attendu le dernier moment pour relancer la négociation ? Les concertations avec les partenaires sociaux se font dans un cadre très rigide. Vous nous demandez en réalité un blanc-seing. Nous ne pouvons donner au Gouvernement la possibilité d'ériger des règles d'assurance chômage dont nous n'aurions pas pu travailler le cadre.

Pour justifier la réforme à marche forcée, on prétend que le financement de l'Unédic est en danger. Or ses comptes seront excédentaires jusqu'en 2024, alors même qu'elle doit en grande partie financer Pôle emploi...

Je fais partie de ceux qui avaient présenté un amendement sur les territoires zéro chômeur. Pourquoi a-t-il été déclaré irrecevable ? Qu'envisagez-vous à ce sujet ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE ; Mme Raymonde Poncet-Monge applaudit également.)

M. Olivier Dussopt, ministre .  - Si nous avions parfaitement respecté le calendrier des négociations, il aurait fallu les ouvrir au moment de l'élection présidentielle. Vous nous auriez alors reproché notre manque de légitimité... (Protestations sur les travées du groupe SER)

Voilà ce qui motive le calendrier que nous retenons. Vous l'avez souligné, madame Lubin, les résultats de l'Unédic sont bons - grâce à notre réforme de 2019 ! Je ne m'attendais pas à un tel satisfecit de votre part ! (Sourires)

Mme Benbassa est partie, mais nous recherchons des solutions concrètes. La rapporteure propose de mieux sécuriser le dispositif relatif à l'abandon de poste, pour protéger les salariés exposés à des risques de maltraitance ou de harcèlement : nous y sommes favorables.

Je n'ai pas à me prononcer sur la recevabilité des amendements, que ce soit à l'Assemblée nationale ou au Sénat. Le projet de loi pour 2023 porte de 33 à 44 millions d'euros le budget de l'expérimentation des territoires zéro chômeur. Tous les territoires participant à l'expérimentation n'ont pas encore été labellisés : nous en sommes à une quarantaine sur les cinquante à identifier. La loi de décembre 2020 prévoit une évaluation de l'expérimentation : France Stratégie s'y attellera en 2023.

M. le président.  - Amendement n°12 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

Mme Monique Lubin.  - La réforme de l'assurance chômage s'est faite contre les partenaires sociaux. L'étude d'impact de l'Unédic n'est pas de nature à apaiser les relations entre les partenaires sociaux et le Gouvernement : l'allocation journalière aurait baissé de 17 % en moyenne, pour 1,15 million d'allocataires.

La réforme de l'indemnisation a touché les territoires les plus défavorisés : plus de 30 000 personnes à la Réunion, 33 000 en Seine-Saint-Denis, plus de 50 000 dans le Nord, dont à chaque fois une bonne part de jeunes de moins de 25 ans. Elle est budgétairement inutile, puisque l'Unédic est excédentaire.

M. le président.  - Amendement identique n°46, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Laurence Cohen.  - La réforme de 2019 a fait perdre 155 euros par mois en moyenne à plus d'un million de personnes et exclu 450 000 personnes du bénéfice de l'allocation chômage. L'article premier confère les pleins pouvoirs à l'État jusqu'au 31 décembre 2023. C'est une véritable reprise en main par l'État d'une compétence réservée aux organisations syndicales et patronales depuis 1958. Le Gouvernement se donne même la possibilité de modifier les critères d'indemnisation, et de moduler l'indemnité en fonction de la conjoncture.

Toutes les organisations, y compris l'association patronale des entreprises de proximité, rejettent cette OPA de l'État. Chers collègues de la droite de l'hémicycle, vous qui souhaitez être attentifs aux besoins des entrepreneurs, écoutez-les !

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - L'article premier a deux objectifs : donner une base légale à l'indemnisation à compter du 1er novembre et autoriser temporairement par décret le Gouvernement à fixer les règles en dérogeant à la gouvernance prévue par le code du travail.

La commission a accepté cette prorogation des règles fixées en 2019, mais a aussi redonné la main aux partenaires sociaux. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Monsieur le ministre, vous avez été interpellé plusieurs fois sur l'expérimentation territoire zéro chômeur, mais vous n'avez pas réellement répondu.

Cet article valide la réforme de 2019. Vous faites systématiquement pression sur les salariés et les chômeurs, mais dès qu'il s'agit des employeurs, vous êtes mou du genou !

Vous prétendez que cette réforme fait reculer les CDD de courte durée. Or les CDD d'un mois ont augmenté de 5 % en un an, et les CDD d'un jour explosent à nouveau dans l'hôtellerie-restauration.

Cessez de parler des droits et des devoirs, lorsque les devoirs des chefs d'entreprise sont à ce point ignorés. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe SER et du GEST)

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Le nombre de CDI a lui aussi augmenté depuis 2019, mais de 50 %... C'est l'écart entre la croissance des embauches en CDD et en CDI qui compte. On peut s'en féliciter.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Mais des CDD d'un jour !

Les amendements identiques nos12 rectifié et 46 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°94, présenté par le Gouvernement.

Rédiger ainsi cet article :

Par dérogation aux articles L. 5422-20 à L. 5422-24 et L. 5524-3 du code du travail, un décret en Conseil d'État, pris après concertation avec les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel, détermine, à compter du 1er novembre 2022, les mesures d'application des dispositions législatives relatives à l'assurance chômage mentionnées au premier alinéa de l'article L. 5422-20 du même code. Ces mesures sont applicables jusqu'à une date fixée par décret, et au plus tard jusqu'au 31 décembre 2023, et peuvent faire l'objet de dispositions d'adaptation en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Toutefois, les mesures d'application des deuxième à avant-dernier alinéas de l'article L. 5422-12 dudit code peuvent recevoir application jusqu'au 31 août 2024. Le décret en Conseil d'État mentionné au premier alinéa du présent article précise notamment les périodes de mise en oeuvre de la modulation du taux de contribution des employeurs concernés ainsi que les périodes au cours desquelles est constaté le nombre de fins de contrat de travail et de contrat de mise à disposition pris en compte pour le calcul du taux modulé.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Cet amendement revient au délai d'application de la loi jusqu'au 31 décembre 2023, le temps de mettre en place France Travail et de permettre à la négociation sur la gouvernance de l'assurance chômage d'aboutir. C'est pourquoi nous ne souhaitons pas faire évoluer la date butoir du décret et proposons de revenir à la rédaction de l'Assemblée nationale.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Depuis soixante ans, l'assurance chômage est gérée par les partenaires sociaux, ce qui permet de dépasser les antagonismes et de donner du poids à la démocratie sociale.

On s'interroge souvent sur les différences entre le Gouvernement et la majorité sénatoriale. Vous vous dites favorable à la gestion paritaire. Or vous souhaitez appliquer la loi de 2018, qui corsète la négociation à travers la lettre de cadrage - un échec immédiat, à tel point que vous avez renoncé à l'utiliser - et supprime la part sociale de la cotisation salariale, ce qui réduit le poids des partenaires sociaux au sein de l'Unédic.

Notre dispositif transitoire est très simple et leur redonne la main. Voilà la différence : vous dites, nous faisons. Avis défavorable.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Lors de ma présentation de notre motion, j'ai cité les pistes du Gouvernement sur les critères d'indemnisation du chômage. Vous avez exclu les reports d'indemnisation - encore heureux -, mais vous avez proposé de moduler les conditions d'accès. Le Monde cite ainsi le document de concertation qui envisage bien une modification du seuil d'éligibilité. Le Gouvernement pourrait passer de 6 mois travaillés sur les 18 derniers mois à 8 sur les 24 derniers mois, ce qui générerait 2 milliards d'économies. Nous voterons contre cet amendement.

L'amendement n°94 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°85, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

I.  -  Alinéa 1

Supprimer cet alinéa.

II.  -  Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Après le mot : « celui-ci », la fin du dernier alinéa de l'article L. 5422-20 est ainsi rédigée : « de nouvelles négociations entre les organisations représentatives d'employeurs et de salariés sont organisées. Lorsque la validité des mesures d'application ainsi déterminées expire sans qu'un nouvel accord n'ait été conclu dans les conditions prévues au premier alinéa, les mesures d'application du dernier accord relatif à l'assurance chômage conclu dans ces conditions s'appliquent jusqu'à ce qu'un nouvel accord soit conclu entre les organisations représentatives d'employeurs et de salariés. Les partenaires sociaux proposent au Gouvernement des mesures pour que le changement n'entraîne ni de baisse de l'indemnisation ni de diminution de la durée des droits ouverts pour les assurés. » ;

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Entre 2019 et 2021, la réforme de l'assurance chômage a été menée de force, contre l'avis des organisations syndicales. Le Gouvernement a imposé les règles du jeu et les conclusions de la négociation. Tout cela est permis par le décret de carence de 2018. Ni le Parlement ni les organisations syndicales n'ont plus voix au chapitre. Nous refusons ce 49.3 permanent.

Cet amendement supprime donc la possibilité de légiférer par décret en cas d'absence d'accord entre le Gouvernement et les partenaires sociaux. On reviendrait automatiquement à la dernière convention conclue, le temps que la négociation aboutisse. Le risque de vide juridique est ainsi écarté.

Emmanuel Macron réclamait récemment de nouvelles méthodes plus respectueuses de la démocratie... C'est le moment de passer aux actes ! (Mmes Marie-Noëlle Lienemann et Émilienne Poumirol applaudissent.)

M. le président.  - Amendement n°18 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

I.  -  Alinéa 1

Supprimer cet alinéa.

II.  -  Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Le dernier alinéa de l'article L. 5422-20 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Lorsque la validité des mesures d'application ainsi déterminées expire sans qu'un nouvel accord n'ait été conclu dans les conditions prévues au premier alinéa, les mesures d'application du dernier accord relatif à l'assurance chômage conclu dans ces conditions s'appliquent jusqu'à ce qu'un nouvel accord soit conclu entre les organisations représentatives d'employeurs et de salariés. Les partenaires sociaux proposent au Gouvernement des mesures pour que le changement n'entraîne ni de baisse de l'indemnisation, ni de diminution de la durée des droits ouverts pour les assurés. » ;

M. Yan Chantrel.  - Avec cet amendement, c'est la dernière convention conclue par les partenaires sociaux qui s'appliquerait lorsque le régime de carence aujourd'hui utilisé par le Gouvernement expirera. Cela évite le risque de vide juridique.

En l'espèce, cela permettrait de revenir sur les 6,5 milliards d'euros économisés sur le dos des chômeurs.

M. le président.  - Amendement n°76 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Fialaire et Gold, Mmes Guillotin et Pantel et MM. Requier et Roux.

I.  -  Alinéa 1

Supprimer cet alinéa.

II.  -  Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Le dernier alinéa de l'article L. 5422-20 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque la validité des mesures d'application ainsi déterminées expire sans qu'un nouvel accord n'ait été conclu dans les conditions prévues au premier alinéa, les mesures d'application du dernier accord relatif à l'assurance chômage conclu dans ces conditions s'appliquent jusqu'à ce qu'un nouvel accord soit conclu entre les organisations représentatives d'employeurs et de salariés. » ;

Mme Maryse Carrère.  - Défendu.

M. le président.  - Amendement n°84, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Alinéa 1

Supprimer cet alinéa.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - L'article premier met le pied dans la porte pour ouvrir la voie à une dérive sociale au long cours.

Le Conseil d'État rappelle que le projet de loi ne comporte aucune limitation quant à la portée ou à l'objet du futur décret. Vous nous invitez à signer un chèque en blanc, malgré une étude d'impact de l'Unédic qui note que plus d'un million de personnes ont vu leurs indemnités baisser et que les saisonniers et les travailleurs qui enchaînent les contrats courts ont été pénalisés.

Vous préparez la refonte antisociale de l'assurance chômage sur le modèle canadien, avec les effets déplorables que l'on sait. 

La prise en tenaille entre une réforme inefficace et le chèque en blanc d'une deuxième réforme n'est pas acceptable. En conséquence, nous proposons la suppression de cet alinéa.

M. le président.  - Amendement n°86, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

I.  -  Alinéa 1

Rédiger ainsi cet alinéa :

I.  -  Par dérogation aux articles L. 5422-20 à L. 5422-24 et L. 5524-3 du code du travail, les mesures d'application des dispositions législatives relatives à l'assurance chômage mentionnées au premier alinéa de l'article L. 5422-20 du même code ne peuvent être déterminées par décret en Conseil d'État qu'après la négociation des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel ainsi que des associations représentatives de demandeurs d'emploi et de salariés enchaînant des contrats courts.

II.  -  Alinéas 11 à 13

Supprimer ces alinéas.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - La réforme de 2019 s'est faite contre les partenaires sociaux. Alors que l'évaluation de ses conséquences n'est prévue que pour 2024, on note une augmentation des chômeurs des catégories B, C, D et E. L'effet serait contre-productif, avec un accroissement de la tension sur le marché de l'emploi et le basculement de nombreuses personnes dans la pauvreté.

Même sous l'angle de la réduction des emplois vacants, la réforme semble un échec, puisqu'ils sont passés de 264 000 à 362 000 selon la Dares. La territorialisation, sur le modèle canadien, est également inacceptable.

Avec cet amendement, nous rétablissons l'obligation d'une négociation avec les partenaires sociaux, incluant les représentants des chômeurs et précaires qu'une démocratie vivante devrait intégrer comme parties prenantes.

M. le président.  - Amendement n°77 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Fialaire et Gold, Mmes Guillotin et Pantel et MM. Requier et Roux.

Alinéa 1

1° Première phrase

Après le mot :

État

rédiger ainsi la fin de la phrase : 

proroge, à compter du 1er novembre 2022, les mesures d'application, actuellement en vigueur, des dispositions législatives relatives à l'assurance chômage mentionnées au premier alinéa de l'article L. 5422-20 du même code.

2° Seconde phrase

Après la date :

31 août 2023

supprimer la fin de la phrase.

M. Éric Gold.  - En attendant la conclusion d'un accord des partenaires sociaux sur l'assurance chômage, cet amendement de repli proroge les mesures en vigueur.

M. le président.  - Amendement n°19 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 1, première phrase

1° Remplacer les mots :

, pris après concertation avec les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel, détermine

par les mots :

peut proroger

2° Après le mot :

application

insérer les mots :

en vigueur

M. Yan Chantrel.  - Cet amendement de repli rétablit la compétence des partenaires sociaux pour la période de carence, que le Gouvernement a lui-même laissé filer, en ne respectant pas les délais.

Les rapporteurs n'ont pas réduit la période pendant laquelle le Gouvernement pourra définir les règles relatives à l'assurance chômage. Nous refusons ce chèque en blanc qui piétine le paritarisme et le Parlement. La réforme du précédent quinquennat a été la première depuis 1971 réalisée contre l'avis des partenaires sociaux. Nous entendons leur redonner la main, y compris pendant la période transitoire.

M. le président.  - Amendement n°20 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 1, première phrase

Après le mot :

après 

insérer les mots : 

transmission au Parlement et aux partenaires sociaux du rapport prévu à l'article L. 5422-25 du même code et après

Mme Monique Lubin.  - La loi du 5 septembre 2018 prévoyait la remise d'un rapport sur la situation financière - il n'en a rien été. Les nouvelles règles doivent être établies sur le fondement d'analyses chiffrées. Appauvrir les chômeurs ne fait qu'accroître les difficultés.

Ce projet de loi réactive les vieux stéréotypes sur le chômeur qui ne veut pas travailler. Ce faisant, il ouvre la voie à des mesures encore plus régressives de la part de la majorité sénatoriale.

M. le président.  - Amendement n°47, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 1, première phrase, alinéa 11 et alinéa 12, première phrase

Remplacer le mot :

concertation

par le mot :

négociation

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - La droite sénatoriale se pose en défenseure du paritarisme, mais prévoit une simple concertation des partenaires sociaux, qui n'est qu'une mascarade : on échange des propositions et à la fin, le Gouvernement décide. Ce dernier invoque l'urgence, mais c'est lui qui n'a envoyé la lettre de cadrage que le 29 juin !

Ce n'est pas le mode de fonctionnement plus horizontal souhaité par le Président de la République. Le Gouvernement se comporte comme un banquier qui viendrait à notre domicile nous fixer les règles d'utilisation des radiateurs.

M. le président.  - Amendement n°21 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 1, première phrase

Remplacer le mot : 

concertation

par le mot :

négociation

Mme Émilienne Poumirol.  - Cet amendement vise à remettre la négociation, et non une concertation dénuée de sens, au centre de notre démocratie sociale. Le paritarisme et le dialogue social supposent un cadre d'échanges reconnu. Telle est la philosophie qui a présidé à la mise en place de l'assurance chômage. Les rapporteurs ont fait un premier pas en ce sens en supprimant la lettre de cadrage.

Nous exigeons une négociation, y compris pendant la période de carence à venir.

M. le président.  - Amendement identique n°90, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Le Gouvernement entend faire de la concertation le principe qui guide la décision publique. Or c'est la négociation qui garantit le paritarisme et la protection de chacun.

En s'autorisant à prendre par décret de nouvelles règles sans concertation, le Gouvernement peut outrepasser tant les oppositions à sa lettre de cadrage que demain à son document de support de la concertation...

Rousseau rappelle dans le Contrat social que « Le peuple, soumis aux lois, en doit être l'auteur ».

La prise en compte par des procédures démocratiques des intérêts des travailleurs est primordiale pour la mise en oeuvre de mesures protectrices. La négociation avec les partenaires sociaux doit avoir lieu.

M. le président.  - Amendement n°22 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 1, première phrase

Après le mot :

interprofessionnel 

insérer les mots :

et la transmission au Parlement par le Gouvernement d'un rapport réalisé conjointement par le Conseil d'analyse économique, le Conseil d'orientation pour l'emploi et le Commissariat général à la stratégie et à la prospective, évaluant les impacts et l'efficacité de la réforme de l'assurance chômage menée entre 2018 et 2021

Mme Monique Lubin.  - Cet amendement de repli vise à insister sur la nécessité d'une évaluation objective et exhaustive de la réforme.

M. le président.  - Amendement n°93, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Alinéa 1, après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Les mesures d'application déterminées par ce décret ne peuvent avoir pour effet d'entraîner une différence de traitement des travailleurs remplissant les critères prévus à l'article L. 5422-1 du même code sur la base de leur lieu de résidence ou de travail.

Dans son support de concertation, le ministère de travail envisage une régionalisation sur l'exemple du régime canadien établi en 1977.

Aggravé par une augmentation de la durée d'affiliation et une baisse de la durée d'allocation, celui-ci n'a eu pour effet que de faire chuter le nombre de personnes éligibles à l'assurance chômage, de 87 % en 1989 à 42 % en 1997. L'iniquité de la régionalisation est vertement critiquée au Canada.

En France, le nombre d'emplois doit être rapporté au nombre de demandeurs d'emploi. Rien ne devrait justifier une inégalité de traitement entre les régions - cela ne devrait pas même être à l'étude !

Cet amendement exclut la possibilité d'inclure la régionalisation par décision unilatérale.

M. le président.  - Amendement n°50, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 1, seconde phrase

Remplacer la date :

31 août

par la date :

1er février

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Cet amendement de repli ramène la fin de validité du décret du 31 août au 1er février. La prise de contrôle par l'État n'est pas une petite décision. Le modèle social issu de l'après-guerre est détricoté petit à petit dans ses fondements. La démocratie sociale était la réponse française à la nécessité d'associer davantage les travailleurs aux décisions qui les concernent. Cela change, si l'État reprend la main. Philosophiquement, l'indemnisation est un droit lié à la mutualisation des cotisations, pas une aide sociale.

Mme Émilienne Poumirol.  - Exactement !

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Cela ne relève pas de l'assistance, offerte au titre de la solidarité nationale.

À force de petites réformes, on finit par trouver illégitime ce qui est un droit et on fait reculer l'idée même que se font les salariés de leur reconnaissance par la société française. (Mmes Émilienne Poumirol et Angèle Préville applaudissent.)

M. le président.  - Amendement n°7 rectifié, présenté par M. Capus, Mme Mélot, MM. Chasseing, Grand, Guerriau et Lagourgue, Mme Paoli-Gagin et MM. Verzelen et Wattebled.

Alinéa 1, seconde phrase

Remplacer le mot :

août

par le mot :

décembre

Mme Colette Mélot.  - Nous proposons un compromis : l'allongement du délai prévu par le Gouvernement vise à mieux prendre en compte les effets de ces règles. Il est judicieux de conserver un délai suffisamment long pour collecter les données et prendre des décisions éclairées le moment venu.

M. le président.  - Amendement n°23 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Les mesures d'application prises par décret en Conseil d'État en application du premier alinéa ne peuvent conduire à réduire les recettes générées par la majoration du taux de contribution de chaque employeur prévue au 1° de l'article L. 5422-12 dudit code ou à augmenter la perte de recettes générées par la minoration du taux de contribution de chaque employeur prévue au 1° du même article.

Mme Monique Lubin.  - Cet amendement de repli introduit une clause de sécurité selon laquelle le chèque en blanc accordé au Gouvernement ne saurait avoir pour effet une réduction du bonus-malus concernant le recours aux contrats précaires.

M. le président.  - Amendement n°108, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Après l'alinéa 1

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Les dispositions prévues au premier alinéa du présent article ne concernent pas les salariés et contrats de travail mentionnés au a du 1° de l'article L. 1242-2 dudit code. Les concernant, le décret en Conseil d'État est pris après négociation avec les organisations professionnelles et syndicales les représentant.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Depuis la dernière réforme de l'assurance chômage, on constate des effets négatifs sur les saisonniers. Si l'allongement de 4 à 6 mois de la durée minimale d'affiliation a déjà réduit leurs droits, le support de concertation poursuit cette fuite en avant.

Le calcul à la baisse du salaire journalier de référence diminue également l'attractivité du secteur, comme en témoigne la pénurie observée cet été. Alors que les dures conditions de travail ne sont guère prises en compte dans la rémunération, cette réforme est une double peine. Avec cet amendement, les négociations devront tenir compte de la spécificité de ces travailleurs.

M. le président.  - Amendement n°67, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Le dernier alinéa de l'article L. 5422-20 est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Lorsque la validité des mesures d'application ainsi déterminées expire sans qu'un nouvel accord n'ait été conclu dans les conditions prévues au premier alinéa, les mesures d'application du dernier accord relatif à l'assurance chômage conclu dans ces conditions s'appliquent jusqu'à ce qu'un nouvel accord soit conclu entre les organisations représentatives d'employeurs et de salariés. Les partenaires sociaux proposent au Gouvernement des mesures pour que le changement n'entraîne ni de baisse de l'indemnisation, ni de diminution de la durée des droits ouverts pour les assurés. » ;

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Le fonctionnement actuel de l'assurance chômage permet au Gouvernement de se passer des organisations syndicales et patronales : si les négociations achoppent, le Gouvernement peut appliquer les réformes que le patronat lui souffle à l'oreille. C'est l'aboutissement de la loi sur la liberté de choisir son avenir professionnel, à laquelle nous nous sommes opposés en 2018.

Ce projet de loi transfère directement la gestion de l'assurance chômage à l'Unédic. Notre amendement propose de revenir automatiquement à la dernière convention lorsque le régime de carence expire : cela empêchera le Gouvernement de jouer la montre.

M. le président.  - Amendement n°49, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

I.  -  Après l'alinéa 3

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

...° L'article L. 5422-1 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« ....  -  Le régime d'assurance chômage est fondé sur le principe de solidarité face au risque de privation d'emploi. Il assure la continuité du salaire d'activité et garantit un niveau de vie satisfaisant aux travailleurs privés d'emploi. » ;

II.  -  Alinéas 11 à 13

Supprimer ces alinéas.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Selon Jean-Pascal Higelé, maître de conférences en sociologie de l'université de Lorraine, la réforme de l'assurance chômage est un déni de solidarité. Notre amendement inscrit dans la loi le caractère assurantiel de l'assurance chômage et sa vocation à sécuriser le revenu des travailleuses et travailleurs.

Des taux différents selon les entreprises ou les secteurs risqueraient de délégitimer toute solidarité : les titulaires d'emplois stables refuseraient de payer pour les plus précaires et le chômage deviendrait un risque individuel. Il faut renouer avec la logique de solidarité salariale interprofessionnelle.

M. le président.  - Amendement n°87, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Alinéas 11 à 13

Supprimer ces alinéas.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - L'article premier modifié par la commission présente une avancée pour le paritarisme au milieu d'un vaste projet antisocial : la suppression de la lettre de cadrage instaurée en 2018, qui permettait au Gouvernement de faire échouer les négociations et d'agir par voie réglementaire.

Pourtant, l'article instaure à la place un document d'orientation dont les objectifs sont flous. Il arrive au demeurant bien tard puisque le Gouvernement a déjà envoyé sa lettre de cadrage, à laquelle il ressemble fort... Nous proposons donc de supprimer ces alinéas.

M. le président.  - Amendement n°48, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 12, après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Le document d'orientation ne peut avoir pour effet d'entraîner une différence de traitement des travailleuses et des travailleurs remplissant les critères prévus à l'article L. 5422-1 du même code sur la base de leur lieu de résidence ou de travail.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Nous refusons la modulation des conditions d'indemnisation selon les territoires. Où va-t-on s'arrêter ? Au sein des régions, les situations pourraient également être jugées hétérogènes : il y a plus de chômeurs en Seine-Saint-Denis qu'au centre de Paris !

Au moment où nous avons besoin au contraire d'une République solide, où les citoyens se sentent traités à égalité, cette mesure est inacceptable, injuste et inefficace. Nous ferions mieux de réfléchir à des politiques d'aménagement du territoire adaptées.

M. le président.  - Amendement n°8 rectifié, présenté par M. Capus, Mme Mélot, MM. Chasseing, Grand, Guerriau et Lagourgue, Mme Paoli-Gagin et MM. Verzelen et Wattebled.

Alinéa 13

Compléter cet alinéa par les mots :

et garantir l'équilibre financier du régime

M. Jean-Louis Lagourgue.  - Le retour à une gestion paritaire du régime a le mérite de mettre les partenaires sociaux en situation de responsabilité. Concrètement, cela se matérialise par le retour à un document d'orientation remplaçant la lettre de cadrage.

Mais cela ne répond pas à l'impératif de maintenir l'équilibre du régime, dont dépend l'avenir du paritarisme de gestion. Cet amendement précise que les éléments de diagnostic, les objectifs poursuivis et les principales options possibles présentées dans le document d'orientation doivent également viser à garantir l'équilibre financier du régime.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Les amendements nos85, 18 rectifié, 76 rectifié et 67 tendent à ce qu'un accord continue d'être applicable jusqu'à ce qu'un nouvel accord soit conclu. L'amendement n°85 supprime en plus le décret de carence. Ces amendements rendraient la procédure inopérante. Nous risquons un blocage de la gouvernance et l'impossibilité de fixer les règles par décret de carence en cas d'échec des négociations. Cela pénaliserait l'indemnisation des demandeurs d'emploi. Avis défavorable.

L'amendement n°84 supprime le premier alinéa, or un décret est nécessaire pour sécuriser les droits dès le mois de novembre : avis défavorable.

Les amendements nos77 rectifié et 19 rectifié prévoient que le décret ne puisse prolonger que les règles en vigueur. Pour autant, de nouvelles règles comme la contracyclicité sont nécessaires : avis défavorable.

L'amendement n°20 rectifié impose que le décret soit pris après transmission du rapport aux partenaires sociaux : c'est déjà prévu dans le code du travail ; retrait ou avis défavorable.

Avis défavorable aux amendements identiques nos21 rectifié et 90, ainsi qu'aux amendements nos86, 47 et 108, qui prévoient le terme de négociation plutôt que concertation, car la négociation conduit à un accord.

L'amendement n°22 rectifié prévoit la transmission d'un rapport avant la prise du décret. Ce n'est pas nécessaire, car les effets de la réforme ne sont pas encore pleinement connus. Le document de concertation est plus adapté : avis défavorable.

L'amendement n°93 exclut la possibilité pour le décret de prendre des mesures différenciées selon le lieu de travail ou de résidence. La contracyclicité des règles d'indemnisation est souhaitable : avis défavorable.

La commission a déjà avancé du 31 décembre au 31 août la date de fin de validité du décret : le 1er février serait trop prématuré. Avis défavorable à l'amendement n°50.

A contrario, l'amendement n°7 rectifié rétablit le 31 décembre : nous ne souhaitons pas nous écarter de la gestion paritaire pour une durée excessive. Avis défavorable.

L'amendement n°23 rectifié exclut la possibilité pour le décret de fixer des règles sur le bonus-malus : il est actuellement neutre financièrement et la commission entend le recentrer sur les contrats courts. Il ne semble donc pas nécessaire : avis défavorable.

L'amendement n°49, qui inscrit notamment des dispositions déclaratoires, semble inopérant, car trop général. Avis défavorable.

Avis défavorable à l'amendement n°87 contraire à la position de la commission.

La précision apportée par l'amendement n°48 n'est pas souhaitable : le document d'orientation ne doit pas contraindre la négociation.

Enfin l'amendement n°8 rectifié précise utilement le contenu du document d'orientation sur l'équilibre financier. Avis favorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Nos avis sont les mêmes à une exception près : avis défavorable à l'amendement n°8 rectifié, qui va plus loin que la commission.

Concernant le choix de la contracyclicité entre concertation et négociation, l'avis du Conseil d'État du 5 septembre encourage le Gouvernement, en application du préambule de la Constitution de 1946, à organiser une concertation des partenaires sociaux tout en nous dispensant de la négociation. Le but est d'aboutir avant la fin 2022 pour que la contracyclicité intervienne dès début 2023.

La réforme de l'assurance chômage a été définie en 2019, mais appliquée de fait à partir du second semestre 2021 en raison du covid : c'est pourquoi il y a peu d'études et nous demandons sa prorogation de quatorze mois. La Dares a déjà mis en place des procédures d'évaluation pour 2023.

Je conviens, madame Lienemann, que le préambule de 1946 prévoit la consultation des salariés sur les conditions de travail, mais ce n'est pas le cas pour l'assurance chômage, puisque son cadre n'a été fixé qu'en 1958.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - L'esprit est le même !

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Je le dis par esprit de précision et non de contradiction. Madame Lubin, monsieur Chantrel, ce n'est pas la première fois que les règles de l'assurance chômage sont fixées par décret : ce fut déjà le cas en novembre 2000.

Madame Poncet Monge, dans le secteur de l'hôtellerie-restauration, plus fort pourvoyeur d'emplois saisonniers, à l'été 2022 il y avait 5 % d'emplois saisonniers de plus qu'en 2019 : nous sommes loin de la grande désertion.

L'amendement n°85 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos18 rectifié, 76 rectifié, 84 et 86.

M. Daniel Chasseing.  - L'amendement n°77 rectifié reprend l'article premier qui indique que le Gouvernement organise une concertation des partenaires sociaux. Je ne vois pas en quoi cet amendement remet en cause le travail de la commission : je le voterai.

L'amendement n°77 rectifié n'est pas adopté, non plus que les amendements nos19 rectifié, 20 rectifié et 47, non plus que les amendements identiques nos21 rectifié et 90, non plus que les amendements nos22 rectifié, 93, 50, 7 rectifié, 23 rectifié, 108, 67, 49, 87 et 48.

L'amendement n°8 rectifié est adopté.

M. le président.  - Amendement n°51, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Après l'alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...° Au premier alinéa de l'article L. 5422-20, les mots : « des articles de la présente section, » sont supprimés ;

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - La réforme de 2019 a entraîné une baisse de 17 % de l'allocation chômage pour 1,15 million d'allocataires et jusqu'à 40 % pour 400 000 d'entre eux en modifiant le calcul du salaire journalier de référence.

Les allocations chômage prennent désormais en compte les jours non travaillés : elles ne sont donc plus liées au salaire. Selon le ministre du travail, entre 25 % et 42 % des privés d'emploi ne font pas valoir leurs droits, ce qui est accentué par le durcissement des règles d'indemnisation.

Jusqu'alors, un jour travaillé ouvrait droit à un jour d'indemnisation. Le projet du Gouvernement remet cela en cause. C'est pourquoi, par cet amendement, nous proposons l'abrogation de la réforme de 2019.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Nous avons fait le choix de proroger le délai de carence. Mais sans évoquer le fond, il y a aussi un problème d'imputation : votre amendement ne répond pas à son objet. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°51 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°52 rectifié, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéa 7

Rédiger ainsi cet alinéa :

5° L'article L. 5422-25 du code du travail est abrogé ;

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Cet amendement revient sur une disposition de la loi Avenir professionnel de 2018, qui imposait des mesures d'économies sur l'assurance chômage en cas d'écarts significatifs entre la trajectoire financière du régime d'assurance chômage et la trajectoire financière prévue par l'accord. Nous sommes en situation de déresponsabilisation des partenaires sociaux, avec la puissance publique comme gendarme.

Or, face aux sujets difficiles supposant un compromis, les partenaires peuvent se dispenser d'assumer le nécessaire compromis, car l'État tranchera.

M. le président.  - Amendement identique n°88, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Le Première ministre avait demandé aux partenaires de négocier des mesures d'économies en raison du déficit de l'Unédic, mais celui-ci a été creusé par le désengagement progressif de l'État et une participation plus importante au financement de Pôle emploi - qui représente 11 % de ses recettes. La contribution de l'Unédic dépasse désormais celle de l'État...

La santé financière de l'Unédic n'est pas un critère pertinent de négociation des accords, et on ne peut se passer de l'analyse des causes du déficit. Nous proposons de supprimer ces dispositions de rationnement budgétaire, prétexte à de nouveaux décrets pris contre l'avis des partenaires sociaux.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Tout en partageant certains de vos propos - il y aurait du ménage à faire sur ce qui relève du budget de l'Unédic  et sur le paritarisme -, une gestion paritaire ne supprime pas le droit de regard de l'État. Il faut conserver une règle d'or, l'État est le garant de l'équilibre financier. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

Les amendements identiques nos52 rectifié et 88 ne sont pas adoptés.

L'article premier, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE PREMIER

M. le président.  - Amendement n°13 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 5332-1 du code du travail, il est inséré un article L. 5332-1-... ainsi rédigé :

« Art. L. 5332-1-.... - Tout employeur de droit privé a obligation de transmettre ses offres d'emploi à l'institution publique mentionnée à l'article L. 5312-1. »

Mme Monique Lubin.  - Pôle emploi n'est destinataire que de 15 % des offres d'emploi : nous voulons rétablir l'obligation de diffusion de l'intégralité des offres par ce canal. C'est d'autant plus nécessaire depuis la réforme de 2019 qui rend possible la radiation en cas de refus d'offre considérée comme « raisonnable ». Ainsi on radie sur un motif de refus d'offre alors qu'une faible part des offres sont diffusées sur le site...

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Oui, l'obligation existait auparavant. Cependant, depuis sont apparues les plateformes de recherche d'emploi, comme leboncoin. Pôle emploi ne nous a pas attendus pour récupérer les offres sur celles-ci ; en Isère, pas moins de 100 plateformes sont ainsi agrégées par Pôle emploi, ce qui offre un panel déjà satisfaisant. L'amendement est péremptoire et inopérant : avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°13 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°24 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 5422-1 du code du travail est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« ....  -  Le régime d'assurance chômage est fondé sur le principe de solidarité face au risque de privation d'emploi. Il assure la continuité du salaire d'activité et garantit un niveau de vie satisfaisant aux travailleurs privés d'emploi. »

M. Yan Chantrel.  - L'amendement inscrit dans la loi les objectifs de l'assurance chômage, pour contrer la dérive insidieuse orchestrée par le Gouvernement qui en modifie la nature par décret. Nous inscrivons donc son caractère assurantiel dans la loi.

M. le président.  - Amendement n°25 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 5422-1 du code du travail est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« ....  -  Le régime d'assurance chômage est fondé sur le principe de solidarité face au risque de privation d'emploi. Il verse un revenu de remplacement du salaire et garantit un niveau de vie satisfaisant aux travailleurs privés d'emploi. »

Mme Émilienne Poumirol.  - Défendu.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Ces amendements très proches me semblent assez vagues et généraux, sans portée réelle. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°24 rectifié n'est pas adopté, non plus que l'amendement n°25 rectifié.

M. le président.  - Amendement n°2 rectifié, présenté par M. Paccaud, Mme Drexler, MM. Belin et Charon, Mme Imbert, MM. Tabarot et Saury, Mme Dumont, MM. Chasseing, Favreau, Meurant et Burgoa, Mme Estrosi Sassone, MM. Frassa, Regnard, Cadec, Panunzi et Bazin, Mme Garriaud-Maylam, M. Guerriau, Mme Eustache-Brinio, MM. Savary, Sautarel et Chatillon, Mme Perrot, MM. Hingray, Pointereau, Houpert, Chaize et Reichardt, Mme Borchio Fontimp et M. Laménie.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 2 du chapitre VI du titre II du livre IV de la cinquième partie du code du travail est complétée par un article L. 5426-... ainsi rédigé :

« Art. L. 5426-....  -  Le revenu de remplacement est supprimé de moitié par Pôle emploi dans le cas où le demandeur d'emploi refuse, sans motif légitime, une offre raisonnable d'emploi mentionnée à l'article L. 5411-6-2.

« La radiation de la liste des demandeurs d'emploi telle que mentionnée au L. 5412-1 ne peut être consécutive à la suppression partielle du revenu de remplacement telle que mentionnée au premier alinéa.

« Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'exécution du présent article. »

M. Olivier Paccaud.  - La Déclaration universelle des droits de l'homme (DUDH) de 1948 proclame le droit au travail. Si le plein emploi est l'objectif du Gouvernement, de nombreuses personnes restent encore trop loin de l'emploi. Le projet personnalisé d'accès à l'emploi a été créé il y a quelques années, avec l'offre raisonnable d'emploi, fondée sur les critères de proximité géographique, de salaire et de nature de l'emploi.

Actuellement, la radiation peut être prononcée dès deux offres raisonnables d'emploi refusées. Se pose le cas d'une seule offre refusée sans motif valable : nous entendons inciter le demandeur d'emploi à revenir à l'emploi en réduisant de moitié son indemnité dans un tel cas, sans stigmatiser.

L'offre raisonnable, c'est le demandeur qui la définit : étonnant de refuser ce qu'on veut... De plus, comme l'a évoqué Philippe Mouiller, il y a des besoins importants de main-d'oeuvre : répondons aux attentes des chefs d'entreprise. (M. Vincent Segouin approuve.)

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Le problème de l'offre raisonnable d'emploi se pose : la loi de 2007, défendue par Catherine Procaccia, pose ce qui semble être du bon sens, mais en réalité cela ne fonctionne pas. Nous sommes passés de trois à deux refus, mais que nous disent les statistiques ? En 2016, les refus d'offres raisonnables d'emploi ne représentaient que 0,02 % des motifs de radiation... Dans la Somme, Laurent Somon a constaté qu'il n'y avait que sept refus d'offre sur 2 383 radiations. Les absences aux rendez-vous sont de loin un motif plus fréquent de radiation.

Nous avons maintenu une demande de rapport de l'Assemblée nationale, à l'article 6, sur les offres raisonnables d'emploi, pour examiner les raisons de ce mauvais fonctionnement. Retrait, sinon avis défavorable en l'attente de plus d'éléments.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - La rapporteure l'a dit, la radiation pour refus d'une deuxième offre est marginale : quelques dizaines par an, car la définition de l'offre raisonnable est difficile à établir. Je m'associe à la demande de retrait et renvoie également à l'article 6.

Mme Monique Lubin.  - Qu'est-ce qu'une offre raisonnable d'emploi ? Qui en fixe les critères ? Nous avons tous reçu des témoignages de chômeurs à propos d'offres inacceptables qui leur ont été soumises : un emploi à mi-temps à 100 km du domicile par exemple. Mais certains considèrent que lorsqu'on n'a pas d'emploi, on doit accepter toute offre. Je partage l'avis du ministre -  une fois n'est pas coutume... Attendons de voir le prochain rapport, mais il ne mettra sûrement pas fin à la subjectivité dans ce domaine.

M. André Reichardt.  - J'ai cosigné cet amendement. C'est une offre raisonnable de vote, frappée au coin du bon sens. Cela ne marche pas, nous disent la rapporteure et le ministre. Mais l'amendement le signale clairement : l'offre raisonnable a fait l'objet d'un accord sur une liste de critères dans le projet personnalisé d'accès à l'emploi du chômeur. Il est temps de prendre des mesures contre les revirements de personnes qui acceptent des critères pour les refuser ensuite. Si le chômeur a indiqué au préalable ce qu'il souhaite, qu'il l'accepte !

Mme Nadège Havet.  - Cela existe déjà. Le conseiller Pôle emploi peut suspendre les allocations pendant quinze jours pour défaut de recherche d'emploi.

M. Thierry Meignen.  - Il ne le fait pas !

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - Au lieu de nous focaliser sur les chômeurs et sur une infime minorité de tricheurs, penchons-nous sur les sujets prioritaires : le refus de la négociation de branche au profit de la négociation d'entreprise, par exemple. Si nous étions revenus aux branches, nous aurions certainement un meilleur rapport au travail. (Mme Raymonde Poncet Monge applaudit.)

M. Olivier Paccaud.  - Je m'associe à la demande de rapport. Peut-être faut-il clarifier les choses, peut-être les conseillers n'agissent-ils pas partout de la même façon. Mais il y a beaucoup de cas où la recherche d'emploi a véritablement été co-construite. Mettons les personnes face à leurs responsabilités : il y a des droits et des devoirs.

Madame Lienemann, vous parlez de chasse au chômeur feignant. Permettez-moi, avec quelque malice, de vous dire que je suis du côté de votre candidat, Fabien Roussel, qui se dit du côté de la France du travail et non de la France des allocations... (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains)

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Nous aussi nous approuvons les propos de Fabien Roussel. (Exclamations amusées à droite) Celui-ci ne met aucunement en cause le droit à l'indemnisation. Nous défendons le travail, mais également les victimes du chômage ainsi stigmatisées, qui ont cotisé et ont donc droit à ces allocations. (Marques d'ironie à droite)

L'amendement n°2 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°14 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 5426-8-1 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La répétition des sommes versées par erreur n'exclut pas que le demandeur d'emploi soit fondé à réclamer la réparation du préjudice qui a pu lui être causé par la faute de celui qui les lui a versées. »

Mme Monique Lubin.  - Le 30 mai 2000, la Cour de cassation a estimé que la caractérisation de la négligence fautive de l'organisme chargé de servir les allocations donnait droit au demandeur d'emploi obligé de rembourser les sommes indûment perçues de solliciter réparation. Le Défenseur des droits est toujours saisi de dossiers dans lesquels Pôle emploi a refusé de verser cette réparation. Cet amendement y pourvoit et propose de fixer cette jurisprudence dans la loi.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Il n'est pas utile d'inscrire cette jurisprudence dans le code du travail : le principe de la responsabilité civile est de toute façon inscrit dans la loi. Retrait, sinon avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°14 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°31 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre VI du titre II du livre IV de la cinquième partie du code du travail est complété par une section ... et quatre articles ainsi rédigés :

« Section ...

« Garanties procédurales suite à une décision concernant le demandeur d'emploi

« Art. L. 5426-10.  -  La personne inscrite ou qui demande son inscription sur la liste mentionnée à l'article L. 5411-1 du code du travail peut contester toute décision individuelle la concernant prise par une institution mentionnée à l'article L. 5311-2, notamment toute mesure à caractère de sanction et toute décision en rapport avec les allocations, aides ainsi que toute autre prestation versées par Pôle emploi pour son propre compte, pour le compte de l'organisme chargé de la gestion du régime d'assurance chômage mentionné à l'article L. 5427-1, pour le compte de l'État ou des employeurs mentionnés à l'article L. 5424-1, au choix concomitamment devant le juge compétent et par la procédure de médiation mentionnée à l'article R. 2123-10 du code de la justice administrative.

« Art. L. 5426-11.  -  Le juge judiciaire est compétent des recours formulés contre les décisions individuelles au sens de l'article L. 5426-10.

« Art. L. 5426-12.  -  Les recours formulés contre les décisions individuelles au sens de l'article L. 5426-10 sont suspensifs.

« Art. L. 5426-13.  -  Les décisions individuelles prises à l'encontre des dispositions des articles L. 5426-10 à L. 5426-12 sont nulles et non avenues. »

Mme Monique Lubin.  - Il arrive souvent que le demandeur se trouve dépourvu face à une décision prise à son encontre, d'autant que le recours n'est pas suspensif. Il faut donc introduire des droits procéduraux basiques, dont la possibilité d'aller devant le juge et le médiateur en même temps, le caractère suspensif du recours ou la nullité des décisions ne respectant pas ces garanties. Ces garanties seraient de nature à favoriser un meilleur traitement administratif des demandeurs d'emploi, à réduire leur anxiété administrative et à améliorer leur insertion professionnelle et sociale.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Nous connaissons tous des demandeurs d'emploi en difficulté. Néanmoins, il y a déjà des garanties procédurales, des médiations et des recours en justice possibles. N'alourdissons pas inutilement le processus. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°31 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°15 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 verse automatiquement à son bénéficiaire le différentiel des allocations, aides ainsi que de toute autre prestation indûment minorées versées pour son propre compte, pour le compte de l'État, du fonds de solidarité prévu à l'article L. 5423-24 ou des employeurs mentionnés à l'article L. 5424-1.

L'action en versement de l'allocation d'assurance indûment minorée se prescrit par trois ans.

Mme Monique Lubin.  - Cet amendement instaure un versement automatique des moins-perçus aux allocataires, selon un dispositif miroir de celui appliqué pour les trop-perçus.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Préciser que les allocations doivent être versées est une lapalissade... L'amendement oblige aussi Pôle emploi à anticiper ses propres erreurs : c'est peu opérant. Retrait ou avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis. Dans la pratique, le versement par Pôle emploi est bien automatique, y compris lorsqu'une pièce manquante est versée au dossier.

L'amendement n°15 rectifié est retiré.

M. le président.  - Amendement n°26 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  Il est constitué un Conseil non permanent d'orientation de l'assurance chômage. Ce Conseil est indépendant. Il a pour objectif de récolter des données sur l'assurance chômage, le public qu'elle indemnise, ses recettes, ses dépenses, ses perspectives financières, de produire des préconisations améliorant l'assurance chômage. Il fournit un rapport annuel appuyé sur des données publiques de manière à éclairer le débat public.

II.  -  Ce Conseil est composé majoritairement de représentants des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel. Il est également composé de dix députés et dix sénateurs désignés respectivement par le Président de l'Assemblée nationale et le Président du Sénat, issus de chaque groupe parlementaire, de manière à assurer une représentation équilibrée des groupes politiques. Les ministères en charge de la production des données mentionnées au I du présent article sont également représentés. Un décret pris après l'avis de l'union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce précise la composition du Conseil.

III.  -  Pour mener à bien les missions mentionnées au I du présent article, le Conseil peut mener toutes auditions qu'il juge utiles. Tous les renseignements et documents d'ordre financier et administratif qu'il demande, y compris tout rapport établi par les organismes et services chargés du contrôle de l'administration, réserve faite des sujets à caractère secret concernant la défense nationale et la sécurité extérieure de l'État et du respect du secret de l'instruction et du secret médical, doivent lui être fournis.

IV.  -  Le Conseil est dépourvu de la personnalité juridique.

V.  -  Les membres du Conseil ne perçoivent aucune forme de rémunération distincte.

VI.  -  Le Conseil ne dispose d'aucun moyen public de fonctionnement.

Mme Monique Lubin.  - Cet amendement crée un Conseil d'orientation de l'assurance chômage. Le débat public est biaisé par le manque de données, ce qui conduit à envisager des propositions -  comme la dégressivité de l'allocation  - que la recherche économique estime inefficaces pour inciter le demandeur d'emploi à trouver un emploi.

Ce conseil d'orientation, inspiré du conseil d'orientation des retraites, éclairerait le débat par un rapport annuel.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Le recueil et le traitement des données sont déjà assurés par la Dares et l'Unédic. De plus, les négociations ont vocation à se tenir dans un cadre paritaire, sachant que le Parlement en est informé. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Une telle instance peut être utile, notamment sur les perspectives financières de l'Unédic. Mais avis défavorable, parce que cela relève de la négociation entre les partenaires sociaux prévue pour le premier semestre 2023.

Mme Monique Lubin.  - Mon amendement est une idée intéressante, je le maintiens.

L'amendement n°26 rectifié n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°81 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac, Cabanel, Fialaire et Gold, Mmes Guillotin et Pantel et MM. Requier et Roux.

Après l' article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport présentant les mesures qui permettraient de lutter contre le non-recours aux droits en matière d' assurance chômage.

M. Éric Gold.  - La loi du 5 septembre 2018 prévoit un rapport sur les conséquences du non-recours à l'assurance chômage. Ce rapport, réalisé par la Dares, estime le non-recours de 25 à 42 %, soit entre 390 000 et 690 000 personnes, essentiellement des salariés en contrat court. Il faudrait que le Gouvernement propose des pistes d'amélioration.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - L'étude de la Dares, qui nous a été communiquée in extremis, est intéressante. Nous manquons de données sur l'assurance chômage.

Nous avons néanmoins déjà maintenu deux rapports dans ce texte. Avis défavorable à ce rapport supplémentaire ; mais, monsieur le ministre, donnez-nous davantage de chiffres.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Le rapport sur le non-recours transmis au Parlement avec retard, le 29 septembre, est une vraie base de travail. Derrière le non-recours, il y a parfois un choix, par exemple du demandeur qui vient d'achever un CDD et sait qu'il va en commencer un autre ; de plus, le taux de non-recours est à peu près le même que pour d'autres prestations. Retrait ?

L'amendement n°81 rectifié est retiré.

ARTICLE PREMIER BIS AA

M. le président.  - Amendement n°33 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

M. Yan Chantrel.  - La logique de culpabilisation des chômeurs est délétère, de même que le principe de contracyclicité qui fait varier l'indemnité en fonction de la conjoncture. C'est pourquoi nous souhaitons supprimer cet article.

M. le président.  - Amendement identique n°70, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Marie-Noëlle Lienemann.  - La contracyclicité est injuste. Vous nous avez vanté la précarité ; au nom de quoi imposerions-nous au salarié d'accepter un CDI plutôt qu'un CDD ?

Monsieur le ministre, vous avez évoqué une augmentation de CDI de 40 % entre 2021 et 2022, mais il y avait la pandémie en 2021... Par rapport à février 2020, ce qui est plus juste, l'augmentation n'est que de 12 %.

M. le président.  - Amendement identique n°79 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac, Cabanel, Fialaire, Gold et Guiol, Mme Pantel et M. Roux.

M. Éric Gold.  - Cet article ne prévoit pas de garde-fous pour vérifier si le refus du salarié est justifié ou non.

M. le président.  - Amendement identique n°103, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Quel florilège de propositions pour contraindre les chômeurs à retourner au travail ! Mais la vague récente de démissions met en évidence une aspiration à un emploi de qualité. Cet article s'inscrit dans le soupçon permanent ; le demandeur d'emploi, addict aux prestations, allergique au travail, refuserait les offres d'emploi et vivrait aux dépens des travailleurs... Ce récit, essentiellement idéologique, progresse à force d'être martelé. Cela n'en fait pas une vérité.

Selon l'OFCE, 8 % des allocataires de l'assurance chômage ne rechercheraient pas vraiment d'emploi. Or ils sont déjà rattrapés par les contrôles et les radiations. Selon l'Unédic, sept allocataires sur dix sont indemnisés pendant moins d'un an. Cet article n'est qu'un affichage politique et idéologique. (Marques d'agacement à droite) C'est nous qui devrions être agacés !

Cet article n'ajoute rien, sinon de rendre les chômeurs responsables de leur situation.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Nous avons déjà discuté de la contracyclicité du montant des allocations. Quant à la radiation pour refus répété d'offre de CDI, je vous renvoie à l'essence même du droit à l'allocation chômage : elle est réservée aux travailleurs aptes au travail qui recherchent un emploi, et dont la privation d'emploi est involontaire.

Un salarié qui refuse un CDI au terme d'un CDD peut déjà se voir privé de prime de précarité. Quand on refuse un CDI, est-on en privation d'emploi involontaire ? Non, c'est un choix de vie.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio et M. Laurent Burgoa.  - Exactement !

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Ce n'est pas à nous de stigmatiser la préférence des CDD sur les CDI ; mais on ne peut pas faire financer ces choix de vie par le système assurantiel. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) C'est ce qui motive notre avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Cet article a deux objets très distincts : inscrire le principe de contracyclicité, auquel le Gouvernement est favorable, et supprimer l'allocation d'aide au retour à l'emploi (ARE) en cas de refus à trois reprises d'un CDI à la fin d'un CDD, ce à quoi nous sommes défavorables. Avis défavorable à l'amendement, car nous souhaitons conserver le premier élément.

Mme Monique Lubin.  - J'aimerais savoir sur quelles statistiques vous vous appuyez...

M. Laurent Burgoa.  - La réalité !

Mme Monique Lubin.  - La réalité, vous la voyez depuis votre siège ? (M. Vincent Segouin se récrie.) J'ai parfois l'impression d'être dans une autre enceinte que le Sénat...

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Où ça ?

Mme Monique Lubin.  - Combien de demandeurs d'emploi refusent un CDI après trois CDD ? Nous ne pouvons inscrire dans le marbre des impressions ou des ouï-dire.

Prenez un demandeur d'emploi dont l'entreprise a fermé. Des gens qui ont cinquante ans, trente ans de carrière et qui, au bout de quelques mois, ne retrouvent pas un emploi correspondant à leur emploi précédent, prennent un emploi moins bien rémunéré, moins intéressant. Ils sont en droit de refuser le CDI qu'on va leur proposer, car ils aimeraient retrouver les conditions d'avant. Qui sommes-nous pour mettre en difficulté des gens dont nous ne connaissons pas la vie ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER)

M. André Reichardt.  - Madame la rapporteure, vous reprochiez tout à l'heure à M. Paccaud de formuler une proposition inopérante sur l'offre raisonnable d'emploi. Pouvez-vous certifier que votre proposition sera plus efficace ? Cela me paraît être une usine à gaz également.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Rappelons que cette personne s'est vu proposer trois fois un CDD, et que les contrats courts coûtent beaucoup plus cher à l'assurance chômage ! Je propose qu'on oblige les employeurs à proposer trois fois un CDI.

Les amendements identiques nos33 rectifié, 70, 79 rectifié et 103 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°62, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Rédiger ainsi cet article :

Le code du travail est ainsi modifié :

1° L'article L. 1242-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 1242-2.  -  Le contrat de travail ne peut être conclu pour une durée déterminée que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire et seulement dans les cas suivants :

« 1° Remplacement d'un salarié en cas d'absence ou de suspension de son contrat de travail et pour pourvoir directement le poste de travail du salarié absent ;

« 2° Accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise. Au titre de ce motif, le nombre de salariés occupés en contrat de travail à durée déterminée ne peut excéder 10 % de l'effectif moyen occupé au cours de l'année civile précédente dans les entreprises d'au moins onze salariés. Le nombre obtenu est arrondi à l'unité supérieure. En cas de dépassement de ce taux, les contrats de travail excédentaires et par ordre d'ancienneté dans l'entreprise sont réputés être conclus pour une durée indéterminée ;

« 3° Emplois à caractère saisonnier de courte durée définis par décret ou pour lesquels dans certains secteurs d'activité définis par décret, il est d'usage constant et établi de recourir à des emplois temporaires en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ;

« 4° Remplacement d'un chef d'entreprise temporairement absent ;

« 5° Réalisation d'un contrat d'apprentissage. » ;

2° Les articles L. 1242-3 et L. 1242-4 sont abrogés.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Cet amendement encadre au contraire les CDD afin qu'ils cessent d'être utilisés comme une variable d'ajustement par les entreprises. Il est ainsi prévu de limiter les CDD à 10 % de l'effectif global des entreprises d'au moins onze salariés.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Cet amendement, qui réécrit les dispositions du code du travail relatives aux contrats courts, nous paraît excessivement rigide. De surcroît, il priverait de base juridique certains contrats aidés. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°62 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°95, présenté par le Gouvernement.

Alinéas  2, 3, 5 et 6

Supprimer ces alinéas.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - L'amendement supprime la procédure de notification à Pôle emploi de la proposition de CDI, introduite en commission.

Je rejoins les propos d'André Reichardt : le dispositif, qui supposerait un croisement des systèmes d'information, peinerait à être opérationnel, sauf à alourdir considérablement les procédures, y compris en matière de suivi pour Pôle emploi. Imaginez qu'un demandeur d'emploi refuse trois CDI dans trois départements différents...

Au-delà des difficultés pratiques, cette disposition pose un problème de principe. Je considère que lorsqu'un salarié va au bout de son engagement en CDD, il n'y a pas lieu de le sanctionner.

Il en va autrement de l'abandon de poste, qui est une rupture unilatérale du contrat de travail. Ne pas poursuivre à l'issue d'un CDD alors qu'on a rempli toutes ses obligations contractuelles n'est pas une faute à sanctionner.

Nous devons travailler sur l'ARE et sur les possibilités de sanction en cas de refus d'une offre raisonnable d'emploi - je vous renvoie à l'article 6 que nous avons déjà évoqué.

M. le président.  - Amendement identique n°111 rectifié, présenté par MM. Lévrier et Iacovelli, Mme Havet, MM. Bargeton et Buis, Mme Cazebonne, MM. Dagbert et Dennemont, Mme Duranton, MM. Haye, Lemoyne, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, M. Rambaud, Mme Schillinger, M. Théophile, Mme Dumont, M. Cadic, Mme Ract-Madoux et MM. Verzelen, Calvet et Guerriau.

M. Martin Lévrier.  - Mettons-nous du côté de l'employeur : notifier quoi et comment à Pôle emploi ? Faut-il notifier la raison du refus, communiquer toutes les pièces ou simplement informer ?

Ensuite, il y a beaucoup de bonnes raisons qui peuvent conduire un salarié en CDD à refuser un CDI. On complexifie inutilement le code du travail.

Enfin, vers qui se tourner en cas de contestation ?

Revenir au plein emploi suppose de fluidifier. On met en place une usine à gaz parce qu'on s'imagine que les personnes qui refusent un CDI n'ont qu'une idée en tête : profiter de vacances.

M. le président.  - Amendement n°9 rectifié, présenté par M. Capus, Mme Mélot, MM. Chasseing, Grand, Guerriau et Lagourgue, Mme Paoli-Gagin et MM. Verzelen et Wattebled.

Alinéa 3

Après le mot :

équivalente

insérer les mots :

pour une durée de travail équivalente

M. Daniel Chasseing.  - Le critère de rémunération équivalente doit s'entendre pour une durée de travail équivalente.

M. le président.  - Amendement n°45, présenté par Mme Jacquemet.

I.  -  Alinéa 3

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette procédure n'est pas applicable aux contrats saisonniers mentionnés au 3° de l'article L. 1242-2.

II.  -  Alinéa 6

Remplacer les mots :

à trois reprises, au cours des douze mois précédents, une proposition

par les mots :

, au cours d'une période déterminée par les accords relatifs à l'assurance chômage mentionnés à l'article L. 5422-20, un nombre, fixé par les mêmes accords, de propositions

Mme Annick Jacquemet.  - Le principe posé par la commission est opportun, je l'ai soutenu. Cependant, nous ne disposons pas des statistiques relatives à la durée moyenne des CDD ni du nombre moyen de CDD par salarié sur douze mois. Pourquoi trois refus ?

Cet amendement confie à la prochaine convention d'assurance chômage le soin de déterminer les critères.

M. le président.  - Amendement n°110 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano, Bilhac et Cabanel, Mme N. Delattre, MM. Fialaire et Gold, Mmes Guillotin et Pantel et MM. Requier et Roux.

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette procédure n'est pas applicable aux contrats saisonniers mentionnés au 3° de l'article L. 1242-2.

M. Éric Gold.  - Pour ne pas pénaliser les travailleurs saisonniers, cet amendement les exclut du dispositif.

M. le président.  - Amendement n°65, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Alinéas 4 à 8

Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés : 

...° Après le premier alinéa du I de l'article L. 2312-26, il est inséré un alinéa rédigé :

« Les modalités de recours aux contrats de travail à durée déterminée et aux salariés des entreprises de travail temporaire font l'objet d'une consultation annuelle du comité social et économique et d'un avis conforme. Les contrats ne peuvent être conclus que s'ils respectent les modalités de recours ayant reçu l'avis conforme du comité, qui peut saisir l'inspecteur du travail. »

Mme Laurence Cohen.  - L'avis conforme du comité social et économique doit être requis pour prévenir le développement de contrats atypiques et précaires au sein de l'entreprise.

M. le président.  - Amendement n°83, présenté par MM. Duplomb et Retailleau.

Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Si la privation d'emploi résulte du refus d'une proposition de contrat de travail à durée indéterminée dans les conditions prévues à l'article L. 1243-11-1, le bénéfice de l'allocation d'assurance ne peut pas être ouvert au demandeur d'emploi au titre du 1° du présent I. » ;

M. Laurent Duplomb.  - Je propose de passer de trois CDI refusés à un seul. Nombre de chefs d'entreprise nous alertent sur le nombre d'offres d'emploi non pourvues. Le CDI est la meilleure option de retour à l'emploi : revenons aux vraies valeurs du travail.

Le sens de l'histoire est d'accepter un CDI à l'issue d'un CDD.

M. André Reichardt.  - C'est simple !

Salut à une délégation sénatoriale philippine

M. le président.  - En votre nom, j'ai le plaisir de saluer la présence, dans la tribune d'honneur, d'une délégation du Sénat des Philippines, conduite par son président, M. Juan Miguel Fernandez Zubiri.

Cette délégation a été reçue par le groupe d'amitié France-Asie du Sud-Est, présidé par notre collègue Mathieu Darnaud. La délégation est en France jusqu'au 28 octobre, pour un déplacement axé sur les thématiques de la sécurité alimentaire, de l'énergie nucléaire et de la défense.

Elle a visité hier la centrale de Flamanville et les chantiers de Naval Group. Elle sera reçue ce soir par le Président Gérard Larcher et le vice-président Roger Karoutchi.

Nous espérons que les excellents rapports entre nos deux Sénats s'intensifieront et seront au coeur de l'épanouissement des relations entre nos pays. Les Philippines sont pour la France un partenaire privilégié dans l'Indopacifique, avec lequel nous avons vocation à développer de nouveaux projets de coopération.

Permettez-moi de souhaiter, en votre nom à tous, à nos homologues du Sénat philippin, la plus cordiale bienvenue, ainsi qu'un excellent et fructueux séjour. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le ministre, se lèvent et applaudissent.)

Fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Qui sommes-nous pour considérer que nous devons refuser l'allocation de retour à l'emploi au terme d'un CDD en cas de refus d'un CDI, demande Mme Lubin ? Nous sommes des gens qui savons lire : on peut bénéficier de l'aide au retour à l'emploi lorsqu'on est privé d'emploi de façon involontaire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

M. le ministre juge notre mesure difficile à mettre en pratique. Peut-être, mais si vous en tirez argument pour ne rien faire, vous ne servez pas à grand-chose ! Quand il y a une volonté, le volet opérationnel est un détail. (Mme Catherine Deroche, présidente de la commission, approuve.) Avis défavorable aux amendements nos95 et 111 rectifié.

La précision apportée par l'amendement n°9 rectifié est utile : avis favorable.

Sur l'amendement n°45, avis défavorable sur le principe, car nous avons choisi d'inscrire le nombre dans la loi. De plus, le travail saisonnier n'est pas à traiter de manière différenciée.

Avis défavorable également à l'amendement n°110 rectifié.

Le comité social et économique est consulté sur la politique sociale de l'entreprise, mais il n'est pas compétent en matière de politique de recrutement. Avis défavorable à l'amendement n°65.

Vous aurez déduit de mes propos que nous sommes favorables à l'amendement n°83 rectifié. (Marques de satisfaction sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Le code du travail prévoit déjà que lorsqu'un employeur propose un CDI aux mêmes conditions que le CDD, et que celui-ci est refusé, le salarié peut être privé du bénéfice de la prime de précarité. Il n'y a pas lieu de le sanctionner davantage. L'amendement n°83 rectifié divise par trois le nombre de refus : j'y suis triplement défavorable.

Avis défavorable aux amendements nos45 et 65. Sagesse sur les amendements nos9 rectifié et 110 rectifié, qui seraient utiles si le dispositif devait être maintenu dans la navette.

Mme Monique Lubin.  - Savoir lire ne suffit pas à expliquer ce qui peut justifier le refus d'un CDI !

Puisque nous sommes lancés dans une course à l'échalote, supprimons toutes les allocations chômage et l'Unédic. Tout le monde retrouvera un emploi dès demain ! (M. Yan Chantrel applaudit.)

Mme Catherine Procaccia.  - Tout en nuance...

Mme Nadège Havet.  - Imaginons un demandeur d'emploi qui doit commencer en septembre une formation à un métier en tension. En attendant cette date, il enchaîne les CDD « alimentaires ». Si on lui propose entre-temps trois CDI, il n'aura plus de droits, ou bien il devra renoncer à sa formation.

Par ailleurs, quid des demandeurs d'emploi ne déclarant comme offre raisonnable que des CDD ?

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Je voterai en faveur des amendements nos95 et 111. Quand on pousse le raisonnement, on en vient à refuser les indemnités dès le premier CDD si le salarié refuse le CDI derrière. Mais pourquoi l'employeur n'a-t-il pas proposé d'emblée un CDI ? (Exclamations à droite)

M. André Reichardt.  - C'est comme ça !

Mme Raymonde Poncet Monge.  - J'ai été employeur, je ne proposais que des CDI. Multiplier les CDD revient à contourner la période d'essai.

Que la prime de précarité ne soit pas payée s'il y a un CDI en fin de CDD, soit, mais cette précarité a bien été subie pendant la durée du CDD !

Nous voyons ici toute l'absurdité de cette proposition.

M. Philippe Mouiller.  - Dans ma région, on voit dans toutes les zones industrielles des panneaux indiquant qu'on cherche du personnel. (M. Laurent Duplomb renchérit.)

J'ai accompagné un jeune réfugié qui a rapidement obtenu, avec six autres compagnons, un CDD. Il a été le seul à accepter le CDI - et a eu le sentiment de s'être fait avoir, quand il a vu que les autres préféraient toucher le chômage avant de reprendre un CDD, facile à trouver dans ce territoire ! (M. Laurent Duplomb renchérit ; protestations à gauche.)

Le vrai sujet est la mobilisation de tous les acteurs pour que les entreprises et les salariés s'y retrouvent. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains)

M. Martin Lévrier.  - J'ai été témoin d'exemples similaires, mais l'inverse existe aussi. Des employeurs proposent des CDI à des salariés en CDD pour diminuer leur salaire, ou pour s'en débarrasser plus facilement, car il est très compliqué de mettre un terme à un CDD... Ne complexifions pas un système qui fonctionne plutôt bien.

Nous traitons de petits aléas dans une loi globale. Ce n'est pas une bonne idée.

Les amendements identiques nos95 et 111 rectifié ne sont pas adoptés.

L'amendement n°9 rectifié est adopté.

L'amendement n°45 n'est pas adopté, non plus que les amendements nos110 rectifié et 65.

M. André Reichardt.  - J'ai fait part de mon scepticisme tout à l'heure sur la proposition de la commission, que M. le ministre a qualifiée à raison d'usine à gaz. Nous allons rencontrer les mêmes difficultés que pour l'offre raisonnable d'emploi.

La seule option possible, pour donner de l'efficacité au dispositif, est l'amendement de M. Duplomb. Si l'on veut diminuer les tensions sur le marché de l'emploi, ayons le courage politique de refuser l'allocation dès le premier CDI décliné.

Mme Jocelyne Guidez.  - La disposition a des effets de bord. Quid d'un couple dont l'un est au chômage et l'autre va bientôt être muté ? Le chômeur devra refuser les offres en CDD, car il ne pourra accepter de CDI derrière. Or qui dit absence d'allocations chômage dit RSA, à la charge des départements. L'article 40 ne devrait-il pas s'appliquer ?

Enfin, comment refuser des droits à une personne qui a cotisé ? Notre groupe ne votera pas l'amendement : la position de la commission est équilibrée.

M. Laurent Duplomb.  - Je ne comprends pas le débat. Nous avons 7 % de chômeurs et les entreprises cherchent des salariés. Celui qui refuse un CDI après un CDD ne touchera pas le chômage, mais rien ne l'empêche de prendre un autre emploi dans une autre entreprise !

Mme Jacqueline Eustache-Brinio.  - Exact !

M. Laurent Duplomb.  - Quand comprendrons-nous que pour redistribuer, il faut créer de la valeur ? Comment faire s'il n'y a plus personne dans les entreprises ? Puiser dans la dette ? Nous sommes déjà à 3 000 milliards d'euros !

Si on n'incite personne à travailler, tout le monde jouera au sport national qui consiste à toucher le chômage après un CDD. (« Très bien ! » à droite ; murmures à gauche)

À l'issue d'une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement n°83 rectifié, mis aux voix par assis et debout, n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°10 rectifié, présenté par M. Capus, Mme Mélot, MM. Chasseing, Grand, Guerriau et Lagourgue, Mme Paoli-Gagin et MM. Verzelen et Wattebled.

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

...° Le premier alinéa de l'article L. 5422-25 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ces mesures peuvent notamment correspondre aux modulations prévues à l'article L. 5422-2-2. »

Mme Colette Mélot.  - La commission a prévu la possibilité de moduler les conditions d'activité pour l'ouverture des droits, mais ne précise pas comment ces modulations peuvent être opérées, ni par qui.

Nous précisons que le document transmis par le Gouvernement au Parlement et aux partenaires sociaux peut faire apparaître des mesures de modulation, qui s'envisagent sur un rythme annuel pour épouser les évolutions du marché du travail, tout en sécurisant les assurés.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Pour être efficace, la modulation en fonction d'indicateurs conjoncturels doit être automatique. Même si nous partageons le souci d'améliorer les finances de l'Unédic, le mécanisme contracyclique n'est pas adapté. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°10 rectifié est retiré.

À la demande du groupe CRCE, l'article premier bis AA, modifié, est mis aux voix par scrutin public.

M. le président. - Voici le résultat du scrutin n°12 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 320
Pour l'adoption 215
Contre 105

Le Sénat a adopté.

APRÈS L'ARTICLE PREMIER BIS AA

M. le président.  - Amendement n°11 rectifié quater, présenté par MM. Duplomb et Retailleau, Mme Micouleau, MM. J.M. Boyer et Bascher, Mmes Eustache-Brinio et Chauvin, M. Cigolotti, Mme Pluchet, MM. Bacci et Cambon, Mme Berthet, MM. Chatillon et Bonnus, Mme Belrhiti, MM. D. Laurent et Paccaud, Mmes Procaccia et Férat, MM. Panunzi, Wattebled, Savin et Anglars, Mme Canayer, M. H. Leroy, Mmes Dumas, Bonfanti-Dossat et Gruny, MM. Somon, Bouchet, Belin, Chasseing, Gremillet, Mouiller, Sol, Pointereau, Laménie, Klinger, E. Blanc et Tabarot, Mme Joseph, MM. Saury et Cadec, Mme Loisier et MM. J.P. Vogel, Brisson, Joyandet, Regnard, Reichardt, de Legge, Bonhomme, Frassa et Cuypers.

Après l'article 1er bis AA 

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code du travail est ainsi modifié :

1° Après l'article L. 1251-33, il est inséré un article L. 1251-33-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 1251-33-1.  -  Lorsque, à l'issue d'une mission, l'entreprise utilisatrice propose au salarié de conclure un contrat à durée indéterminée pour occuper le même emploi, ou un emploi similaire, sans changement du lieu de travail, elle notifie cette proposition par écrit au salarié et transmet cette notification à Pôle emploi. » ;

2° Le I de l'article L. 5422-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Si la privation d'emploi résulte du refus d'une proposition de contrat de travail à durée indéterminée dans les conditions prévues à l'article L. 1251-33-1, le bénéfice de l'allocation d'assurance ne peut pas être ouvert au demandeur d'emploi au titre du 1° du présent I. »

M. Laurent Duplomb.  - Même chose que l'amendement n°83 rectifié, mais pour les intérimaires. Sur le terrain, des entreprises m'indiquent que des intérimaires refusent des CDI pour bénéficier du chômage après avoir rechargé leurs droits. L'intérimaire n'est pas obligé de prendre le CDI : je propose de lui laisser le choix de prendre le CDI ou de rester intérimaire, mais en aucun cas de toucher le chômage. (M. André Reichardt applaudit.)

M. Vincent Segouin.  - Très bien !

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - La commission reste dans la même logique : peut-on considérer qu'un intérimaire qui refuse un CDI est privé de façon involontaire d'emploi ? Non. Avis favorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Avis défavorable pour les mêmes raisons que pour l'amendement n°83 rectifié. Si votre amendement était adopté, le traitement des intérimaires serait plus sévère que celui des salariés en CDD. (On se récrie à droite.)

M. Daniel Chasseing.  - On parle d'une personne qui fait un choix de vie, l'intérim. Si elle cesse de travailler alors qu'on lui a proposé un CDI, refuser des indemnités me semble légitime.

Il n'est pas question ici de précarité ou de fragilité, mais d'un choix de vie. Il est respectable - mais ne justifie en rien de toucher le chômage.

M. Vincent Segouin.  - Bravo !

M. René-Paul Savary.  - Monsieur le ministre, vous visez le plein emploi : il faut bien inciter les gens à travailler. Je comprends le choix de ces personnes : en tant que médecin, je voyais des jeunes enchaînant les intérims et refusant les CDI. Cependant, notre société ne peut plus se le permettre. Je suis toujours préoccupé par la question des retraites et je me dis qu'un jour, il faudra payer la note.

L'amendement de M. Duplomb rend service en incitant à changer de modèle.

Mme Jocelyne Guidez.  - Au risque de vous étonner, je voterai cet amendement. Il y a un vrai problème avec l'intérim, notamment dans le médico-social : des personnes renoncent à des CDI pour l'intérim alors qu'on manque de personnel.

M. Laurent Duplomb.  - Monsieur le ministre, ne pas régler le problème de l'intérim ouvre la possibilité à toutes les infirmières des hôpitaux publics de démissionner et d'y revenir comme intérimaires, avec des droits supplémentaires, tout en bénéficiant de droits au chômage au bout de six mois. Quelle image ! Ce sera la gangrène de tous les systèmes. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

Mme Monique Lubin.  - Vous évoquez une situation très particulière. (On se récrie à droite.)

M. Laurent Duplomb.  - Il y en a des dizaines !

Mme Monique Lubin.  - Vous allez pénaliser tous les intérimaires pour quelques personnes qui ont fait ce choix, et qui d'ailleurs sollicitent peu Pôle emploi.

Vous mentionnez les soignants, mais il y a un autre problème, qui est celui de l'auto-entrepreneuriat. Beaucoup de personnes se placent sous ce statut et font gonfler les budgets des hôpitaux. Un coiffeur m'a indiqué qu'une salariée en CDD a refusé un CDI, préférant proposer ses services comme autoentrepreneur à des employeurs qui n'ont d'autre choix que de la recruter faute de main-d'oeuvre : on dévoie le système de l'auto-entrepreneuriat tout en présentant un miroir aux alouettes à ceux qui s'y engagent.

Prenons ce sujet à bras-le-corps plutôt que de pénaliser tous les demandeurs de l'emploi. Je ne sais pas quelle mouche vous a piqués, mais je vous trouve très durs. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE)

M. Olivier Dussopt, ministre.  - J'entends vos arguments sur l'intérim dans le milieu médical, mais c'est un cas très particulier.

Il y a aussi des salariés intérimaires qui travaillent dans des conditions très difficiles, qui ne sont rendues acceptables que par la prime de précarité et la durée limitée du contrat, et certaines entreprises ne trouvent pas à recruter sous un autre statut.

Ne nous appuyons pas sur le seul exemple du domaine médical pour adopter un amendement aussi sévère.

M. Vincent Segouin.  - Je ne comprends pas vos arguments, monsieur le ministre. L'exemple des infirmières est criant ! Nous n'empêchons personne d'enchaîner les intérims.

Vous dites viser le plein emploi, mais vous bottez en touche.

Je connais des entreprises agricoles qui ne peuvent embaucher en CDI les saisonniers qu'elles ont employés, car ces derniers préfèrent bénéficier du chômage sur les revenus perçus l'été, augmentés des heures supplémentaires ! L'ancien ministre du budget que vous êtes sait ce que cela coûte ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains)

L'amendement n°11 rectifié quater est adopté et devient un article additionnel.

(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)

ARTICLE PREMIER BIS AB

M. le président.  - Amendement n°97, présenté par le Gouvernement.

Supprimer cet article.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Si le problème de l'indemnisation des agents de la fonction publique territoriale démissionnaires est réel, la rédaction de l'article premier bis AB nous pose une difficulté : les centres de gestion, qui seraient consultés après la démission, n'ont pas de légitimité pour apprécier l'éligibilité de la personne à l'allocation chômage.

Vous poursuivez un objectif louable d'harmonisation des droits des salariés et des agents publics démissionnaires, mais de façon inopérante. Il faut mener ce chantier. Je remercie le sénateur Philippe Bas d'avoir soulevé ce sujet : je m'engage à y travailler avec le ministre de la fonction publique.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - La liste des chantiers à traiter est longue. Les collectivités territoriales emploient 90 % d'agents publics et s'assurent pour les 10 % de contractuels. Or de plus en plus de fonctionnaires démissionnent puis, après une expérience dans le privé, demandent l'allocation de retour à l'emploi : celui qui a le plus longtemps été employeur sera souvent la collectivité. Des années après la démission, c'est elle qui devra verser l'allocation. Les maires que nous rencontrons sont furieux.

C'est en général le directeur régional de Pôle emploi qui apprécie cette situation atypique, non la commission mixte où les collectivités territoriales ne sont pas représentées. Philippe Bas, avec cet article, propose simplement que cette appréciation soit réalisée par les pairs des maires, à travers le centre de gestion. Nous n'avons pas trouvé d'autre solution. Retrait ou avis défavorable. (« Très bien ! » sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Le sujet mérite d'être traité, mais le dispositif que vous proposez ne serait pas opérationnel. Heureusement, la question concerne peu de personnes.

Mme Catherine Di Folco.  - Je comprends le problème soulevé par Philippe Bas, mais je comprends également la position de M. le ministre : comment les centres de gestion vont-ils gérer des personnes qui ne relèvent plus de la fonction publique territoriale ?

Pour traiter cette question, votons l'amendement.

Peut-être faudrait-il que les commissions qui statuent comportent des représentants des collectivités ?

M. Olivier Dussopt, ministre.  - La proposition de Mme Di Folco se heurte au fait que ces instances sont paritaires et ne comprennent presque jamais de représentants des collectivités.

Je me devais de vous répondre, car votre réflexion rappelle d'anciens débats sur les centres de gestion...

L'amendement n°97 n'est pas adopté.

M. le président.  - Amendement n°109 rectifié, présenté par MM. Levi, Bonnecarrère, Decool, Reichardt, Kern, Cadec, Brisson, Canévet et Laugier, Mmes Ract-Madoux, Férat et Dumont, MM. Lafon, Hingray, C. Vial, Lefèvre et Chatillon, Mme Jacquemet, MM. J.M. Arnaud et Détraigne, Mme Billon et MM. Guerriau, Cigolotti, H. Leroy, Menonville et Bonhomme.

Alinéa 3

Remplacer (deux fois) le mot :

trois

par le mot :

deux

M. Pierre-Antoine Levi.  - Afin de nous aligner sur le régime classique du contentieux administratif, il serait plus opportun de faire passer les délais de saisine et de réponse de trois à deux mois.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Le délai de deux mois est le délai de principe de recours administratif : avis favorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Avis défavorable par cohérence.

L'amendement n°109 rectifié est adopté.

L'article premier bis AB, modifié, est adopté.

ARTICLE PREMIER BIS A

M. le président.  - Amendement n°16, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

Mme Monique Lubin.  - Nous sommes opposés au durcissement qui consiste à considérer comme démissionnaire tout salarié présumé fautif d'un abandon de poste.

Les données manquent pour légiférer. La charge de la preuve incomberait au salarié devant les prud'hommes, ce qui rend la procédure difficilement opérante. Cette mesure emporte en réalité plus de risque juridique pour l'employeur qu'elle ne le sécurise.

Certes, un abandon de poste pose des problèmes à l'entreprise. C'est pourquoi j'ai consulté des avocats en droit du travail : or aucune statistique ne confirme que les abandons de poste sont en augmentation, contrairement à ce que prétend notre rapporteure.

Quid d'un salarié face à un employeur qui refuserait de le payer ? Cela s'est vu. Attention à ne pas graver dans le marbre des dispositions qui pénaliseront un grand nombre salariés quand quelques-uns seulement tirent sur la corde.

M. le président.  - Amendement identique n°68, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Laurence Cohen.  - Les députés LR, LREM et RN ont voté cet article pour écarter de l'assurance chômage tous ceux qui n'ont pourtant d'autre choix que d'abandonner leur poste.

L'abandon de poste est souvent le dernier recours pour se protéger d'un employeur brutal, de conditions de travail dangereuses ou de harcèlement. Il est parfois même négocié entre l'employeur qui refuse de signer une rupture conventionnelle et le salarié qui ne veut pas démissionner.

L'amendement ne prend pas en compte la réalité de la justice prud'homale : même en référé, un salarié n'aura pas de réponse dans le délai d'un mois. En supprimant l'indemnisation chômage, vous conduirez les salariés à devoir rester en poste, en situation de conflit, ou à déposer des arrêts-maladie, qui déporteront le problème vers l'assurance maladie.

M. le président.  - Amendement identique n°104, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - Cette disposition trouve sa raison d'être dans le dispositif du bonus-malus, pour soustraire les abandons de poste du taux de séparation. Cet article, ajouté à la va-vite pour des raisons opportunistes, est contradictoire avec la jurisprudence selon laquelle une démission ne se présume pas et avec la convention 158 de l'OIT. Les raisons des abandons de poste sont multiples : conditions de travail dégradées, refus de rupture conventionnelle -  pourtant utiles aux employeurs pour masquer des licenciements... -, etc.

L'annonce de l'ouverture des droits au chômage aux démissionnaires a entrainé une vraie désillusion. Une solution non délétère serait d'élargir les motifs légitimes de démission ouvrant droit au chômage.

Résolvons le problème des secteurs sous tension et à très faible attractivité plutôt que de contraindre des salariés à les rejoindre ou à rester à leur poste.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Nous n'avons fait que sécuriser ce dispositif introduit par l'Assemblée nationale.

Il est vrai, madame Lubin, que nous disposons de très peu de chiffres sur ce phénomène.

Nous parlons d'un salarié qui abandonne son poste et ne le reprend pas après mise en demeure par son employeur. Resteront des motifs d'absence justifiée ou légitime : droit de retrait, droit de grève, raisons de santé notamment, qui ne sont pas des abandons de poste.

Aujourd'hui, l'abandon ne figure pas dans le code du travail. Cette situation est mieux traitée que la démission, alors que la démarche n'est guère élégante : on « plante » son employeur et ses collègues. Avis défavorable.

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission.  - Très bien.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Cette sécurisation du dispositif par la commission est bienvenue. Avis défavorable.

Les amendements identiques nos16 rectifié, 68 et 104 ne sont pas adoptés.

M. le président.  - Amendement n°27 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Alinéa 2, première phrase

1° Après le mot :

après

insérer les mots  :

que l'employeur a démontré son absence de faute au sens du présent code et après

2° Après le mot :

employeur

insérer les mots :

et après une procédure contradictoire entre l'employeur, le salarié et le conseil des prud'hommes, 

Mme Monique Lubin.  - Nous proposons que l'employeur ait à démontrer qu'il n'a pas commis de faute envers le salarié. Je le redis : l'article risque d'introduire plus de risques juridiques pour l'employeur.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Avis défavorable. La présomption de démission est une présomption simple. Lorsque l'absence résulte d'une faute de l'employeur, la jurisprudence n'assimile pas la situation à une démission.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Avis défavorable.

L'amendement n°27 rectifié n'est pas adopté.

L'amendement rédactionnel n°114, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. le président.  - Amendement n°4, présenté par MM. Pellevat, Calvet et Tabarot, Mme M. Mercier, M. Chasseing, Mme Lassarade, MM. Charon et Burgoa, Mme Demas, MM. Cambon, Guerriau et Sol, Mme Goy-Chavent, MM. Laménie, Longeot et Anglars et Mmes Joseph, Borchio Fontimp et Jacquemet.

Alinéa 2

Après le mot :

démissionné

insérer les mots :

et avoir rompu abusivement son contrat au sens des articles L. 1237-2 et L. 1243-3

Mme Florence Lassarade.  - Défendu !

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Cet amendement qui assimile l'abandon de poste à une rupture abusive du contrat de travail va trop loin dans l'autre sens : avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°4 n'est pas adopté.

L'article premier bis A, modifié, est adopté.

APRÈS L'ARTICLE PREMIER BIS A

M. le président.  - Amendement n°1 rectifié ter, présenté par Mme Noël, MM. Pellevat, D. Laurent et Chatillon, Mmes Jacques et Joseph, MM. Frassa et Bouchet, Mmes Dumont, Muller-Bronn, Drexler et Bonfanti-Dossat, MM. H. Leroy, Cuypers et Houpert et Mme Borchio Fontimp.

Après l'article 1er bis A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I.  -  En application des dispositions de l'article 1er bis A de la présente loi, les sommes provisionnées afin de répondre au passif social des entreprises font l'objet d'une déduction fiscale.

Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'exécution du présent article.

II.  -  La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

Mme Sylviane Noël.  - Défendu !

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - L'amendement est déjà satisfait par le code général des impôts : avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°1 rectifié ter n'est pas adopté.

ARTICLE 2

M. le président.  - Amendement n°17 rectifié, présenté par Mme Lubin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Supprimer cet article.

Mme Monique Lubin.  - Notre amendement vise à supprimer l'article 2 qui permet la communication aux employeurs des données personnelles à l'origine du malus. Des effets pervers ont été observés aux États-Unis lors de la mise en place d'un mécanisme similaire. Les employeurs pourraient demander aux salariés de ne pas s'inscrire à Pôle emploi et leur promettre une réembauche afin de minimiser le montant du malus.

De plus, nous souhaitons revenir sur les minorations introduites par les rapporteurs : le dispositif doit être renforcé, et non allégé.

M. le président.  - Amendement identique n°72, présenté par Mme Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Mme Cathy Apourceau-Poly.  - Le Gouvernement a fait du tapage publicitaire autour du bonus-malus. Les contrats courts ont pourtant été encouragés en 2017 à l'occasion de l'examen des lois travail. Nous ne comprenons pas l'existence d'un bonus pour ce qui n'est que le simple respect des règles : c'est comme si nous félicitions les entreprises de ne pas avoir recours au travail dissimulé.

Les entreprises bénéficient déjà d'exonérations massives de cotisations sur ces contrats courts : en quarante ans, la part des cotisations dans le financement de la sécurité sociale est passée de 90 à 38 %...

Le dispositif de bonus-malus est restrictif : sur le million d'entreprises que compte notre pays, seulement 18 000 ont été concernées, dont 6 000 par un malus. Mais c'est déjà trop pour la majorité sénatoriale qui veut limiter la majoration à plus ou moins 0,5 %. Au final, c'est peanuts.

Nous demandons la suppression de cet article.

M. le président.  - Amendement identique n°105, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco et MM. Parigi et Salmon.

Mme Raymonde Poncet Monge.  - La portée du dispositif de bonus-malus a été restreinte par la commission des affaires sociales : il perd tout effet dissuasif. Pourtant, il ne s'agit que des entreprises dont le taux de séparation est supérieur à la médiane de sept secteurs au taux particulièrement élevé...

L'article limite en outre le calcul du malus aux seuls CDD de moins d'un mois ; un CDD de six mois étant réputé durable...

Le dispositif est dévitalisé alors que la réforme durcit l'accès à l'assurance chômage pour les demandeurs d'emploi.

Notre amendement supprime donc l'article 2 afin de rendre au malus un semblant de pertinence.

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - L'article 2 vise à éclairer les entreprises concernées sur les données prises en compte. On aurait pu le prévoir dès 2018 ! Le peanuts, madame Apourceau-Poly, c'est parfois 150 000 euros : ce n'est pas rien, surtout quand vous payez à l'aveugle ! Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, ministre.  - Nous sommes favorables au maintien de l'article 2 dans sa rédaction initiale sans pour autant approuver les restrictions apportées par la commission.

M. le président.  - De peanuts au bonus-malus, je me demande ce qu'il advient du respect de la Constitution qui prévoit que la langue de la République est le français... (Sourires)

Mme Frédérique Puissat, rapporteur.  - Je vous demande pardon, monsieur le président.

M. Martin Lévrier.  - Sorry ! (Sourires)

Les amendements identiques nos17 rectifié, 72 et 105 ne sont pas adoptés.

La séance est suspendue à 19 h 55.

55

Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,

Rosalie Delpech

Chef de publication

Ordre du jour du mercredi 26 octobre 2022

Séance publique

À 15 h et 16 h 30

Présidence : M. Gérard Larcher, président, Mme Laurence Rossignol, vice-présidente

Secrétaires : M. Jean-Claude Tissot - Mme Marie Mercier

1. Questions d'actualité au Gouvernement

2. Quatre conventions internationales examinées selon la procédure d'examen simplifié :

=> Projet de loi autorisant la ratification de la Convention du Conseil de l'Europe sur la manipulation de compétitions sportives (texte de la commission, n°894, 2021-2022)

=> Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord pour la mise en place d'un mécanisme d'échange et de partage de l'information maritime dans l'océan Indien occidental et de l'accord régional sur la coordination des opérations en mer dans l'océan Indien occidental (texte de la commission, n°757, 2021-2022)

=> Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant l'approbation de l'accord de siège entre le Gouvernement de la République française et la Banque des règlements internationaux relatif au statut et aux activités de la Banque des règlements internationaux en France, et de l'accord de sécurité sociale entre le Gouvernement de la République française et la Banque des règlements internationaux (texte de la commission, n°898, 2021-2022)

=> Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification de la convention portant création de l'Organisation internationale pour les aides à la navigation maritime (texte de la commission, n°8, 2022-2023)

3. Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, autorisant la ratification du traité entre la République française et la République italienne pour une coopération bilatérale renforcée (texte de la commission, n°896, 2021-2022)

À 21 h 30

Présidence : M. Gérard Larcher, président

4. Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution, relative à la guerre en Ukraine et aux conséquences pour la France