Le groupe d’amitié France-Vanuatu-Iles du Pacifique, réuni sous la présidence de  Mme Martine Berthet (Les Républicains-Savoie), vice-présidente, a auditionné Mme Virginie Bleitrach, directrice régionale de l’Agence française de développement (AFD) pour le Pacifique, qui était accompagnée par Mme Elodie Vitalis, chef de projet et représentante de l’AFD à Fidji à compter de février 2024, et M. Gilles Mauduit, responsable pays Pacifique au sein du département Trois Océans de l’AFD. MM. Jean-Jacques Lozach (SER-Creuse), vice-président, Teva Rohfritsch (RDPI-Polynésie française), président-délégué pour la Papouasie-Nouvelle-Guinée, et Pierre-Jean Rochette (LIRT-Loire), président-délégué pour Fidji, ont également participé à l’entretien.

Mme Martine Berthet a remercié Mme Virginie Bleitrach d’avoir accepté, à l’occasion de son passage à Paris, de venir présenter devant le groupe d’amitié les activités de l’AFD dans le Pacifique. Elle l’a invitée à évoquer les principaux projets de l’agence dans la région avant d’évoquer les perspectives d’avenir, le Président de la République ayant fait part, lors de sa tournée dans le Pacifique l’été dernier, de son intention de renforcer les moyens alloués à l’agence.

Mme Virginie Bleitrach a rappelé que l’AFD est une banque publique de développement qui mobilise différents instruments (dons, prêts, conseils techniques, garanties…) pour mener à bien ses projets. Basée à Nouméa, la direction régionale pour le Pacifique intervient à la fois dans les collectivités françaises – Nouvelle-Calédonie, Polynésie française, Wallis-et-Futuna – et dans les pays étrangers. Au total, le portefeuille de l’AFD dans le Pacifique s’élevait, fin 2022, à 3 milliards d’euros.

Présentée à Nouméa en 2018, la Stratégie pour l’Indopacifique entend valoriser la présence de l’AFD dans les collectivités françaises du Pacifique pour contribuer à leur intégration régionale. Le mandat de l’AFD est centré sur les questions environnementales : changement climatique, préservation de la biodiversité, protection des océans et réduction des vulnérabilités. Depuis que les États du Pacifique ont rouvert leurs frontières, qui avaient été fermées pendant la pandémie, la direction régionale cherche à évaluer, en lien avec les ambassades, ce que pourraient être son apport et ses domaines d’intervention, étant précisé que le Pacifique est un espace convoité par de nombreux bailleurs bien que la capacité d’absorption des États soit faible.

Alors que l’AFD disposait d’un budget de 8 millions d’euros en 2022 pour tous les États étrangers du Pacifique, le Président de la République a annoncé, l’été dernier, sa volonté d’allouer 200 millions d’euros à la région (hors collectivités françaises) sur la période 2024-2027, répartis à parts égales entre dons et prêts. Ces crédits supplémentaires permettront notamment de financer des projets dans les trois États où la France dispose d’une ambassade et où l’AFD va recruter des agents afin de renforcer sa présence locale : Vanuatu, Fidji et Papouasie-Nouvelle-Guinée.

Parmi les projets majeurs de l’AFD dans le Pacifique, Mme Virginie Bleitrach a d’abord mentionné l’Initiative Kiwa, qui a été lancée lors du One Planet Summit de 2017. Axée sur la lutte contre le changement climatique et la préservation de la biodiversité, l’Initiative Kiwa fonctionne par appels à projets, locaux ou régionaux. Abondée à hauteur de 40 millions d’euros par des crédits provenant des ministères des affaires étrangères et de l’outre-mer, et cofinancée par l’Union européenne, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et le Canada, elle dispose d’un budget total de 75 millions d’euros et a déjà sélectionné une trentaine de projets dans seize États.

Plusieurs initiatives concernent la Papouasie-Nouvelle-Guinée. Lors du sommet de Libreville en 2023 a été lancé le Country Package, qui vise à préserver les ressources forestières du pays après avoir identifié les aires à protéger. Un chantier-phare en 2024 vise à rénover et « verdir » les infrastructures portuaires. Avec l’appui d’Enercal, producteur calédonien d’électricité, un autre projet porte sur le développement des énergies renouvelables. Par ailleurs, l’agence de coopération technique Expertise France a ouvert un bureau dans le pays.

A Fidji et dans la région, l’AFD travaille notamment avec les banques publiques et les banques centrales au « verdissement » du système financier et à une meilleure prise en charge du risque climatique par les banques publiques.

L’AFD cherche par ailleurs à identifier une initiative Océan, en lien avec la préparation du prochain sommet des Nations-Unies sur les océans qui se tiendra en France en 2025, qui pourrait porter sur la préservation de la biodiversité dans les zones côtières et récifo-lagonaires.

D’une manière générale, l’AFD travaille avec ses partenaires de l’Union européenne, avec les organisations régionales du Pacifique et avec les grands bailleurs que sont l’Australie, la Nouvelle-Zélande et les États-Unis, en veillant à faire entendre la voix de la France tout en respectant les priorités des États du Pacifique.

M. Jean-Jacques Lozach a demandé si le taux d’intervention de l’AFD variait selon les projets, si l’AFD finançait des études et si elle promouvait des solutions assurancielles.      

Mme Virginie Bleitrach a répondu que la participation de l’AFD est effectivement variable selon les projets. Pour l’initiative Kiwa par exemple, sur 75 millions d’euros de budget, 40 millions proviennent de la France. Souvent, les projets donnent lieu à un co-financement avec des organisations régionales ou avec l’Union européenne, l’AFD étant attentive à ne pas disperser ses moyens.

L’AFD apporte des financements mais propose aussi un accompagnement technique. Elle est par exemple impliquée dans un projet avec Météo-France et l’Institut de recherche pour le développement (IRD) afin d’étudier les évolutions du climat dans une logique de transfert de savoir-faire.

Concernant les solutions assurancielles, l’AFD est associée à l’élaboration du mécanisme Global Shield qui devrait aider les pays les plus vulnérables au changement climatique en développant des solutions d’assurance contre les risques climatiques et les catastrophes naturelles. La France contribue à hauteur de 20 millions d’euros à ce projet.         

M. Teva Rohfritsch a souligné la complémentarité de l’action menée par l’AFD, dont l’expertise est précieuse, avec celle conduite par les collectivités du Pacifique. Il a souhaité savoir si l’AFD réfléchissait à un projet tendant à développer les circuits courts pour un meilleur approvisionnement depuis les îles Fidji. Alors qu’une nouvelle ambassade va ouvrir prochainement à Samoa, faut-il s’attendre à de nouveaux projets dans ce pays ?

Mme Virginie Bleitrach a expliqué que l’AFD a créé en son sein un département des Trois Océans compétent à la fois pour les projets menés dans les pays étrangers et pour ceux conduits dans les collectivités françaises du Pacifique. La question des circuits courts mérite d’être approfondie, l’AFD s’intéressant d’ores-et-déjà à la question de la pêche, dans le cadre de l’initiative Océan déjà évoquée, et explorant avec l’Union européenne un projet régional sur la sécurité alimentaire.

Samoa est un partenaire avec lequel l’AFD prévoit effectivement de développer des projets à l’avenir. La capitale Apia accueille le siège du Programme régional océanien de l’environnement (PROE) avec lequel l’AFD coopère déjà.

Mme Martine Berthet a demandé si l’AFD intervenait dans le secteur du tourisme, qui contribue beaucoup à l’activité économique de plusieurs pays du Pacifique, ainsi que dans le domaine du traitement des déchets, compte tenu de son impact environnemental.

Mme Virginie Bleitrach a indiqué que l’AFD apporte en Polynésie un financement à des compagnies aériennes et à des hôtels, toujours pour favoriser le développement durable. Proparco, la filiale de l’AFD dédiée au secteur privé, soutient également d’importantes opérations.

Concernant les déchets, l’AFD participe à un projet mené avec le PROE, lui-même coordonné avec des projets financés par l’Union européenne et le Japon, en mettant l’accent sur les huiles usagées et sur les conséquences des catastrophes naturelles.  

De gauche à droite : M. Pierre-Jean Rochette, Mmes Elodie Vitalis, Martine Berthet et Virginie Bleitrach, MM. Teva Rohfritsch et Gilles Mauduit.

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•    M. Guillaume GABISON
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