SECTIONNEMENT ELECTORAL

(1ère lecture, 1ère délibération, séance du samedi 16 février 1884)

A l’occasion de la présentation de son article additionnel tendant à ce que dans les communes que la loi nouvelle ne permet pas de sectionner, le sectionnement ancien tombe lors des prochaines élection municipales, M. Baragnon se lance dans une brillante démonstration destinée à dénoncer les abus auxquels a donné lieu le sectionnement électoral des communes.

M. Baragnon. (...) Il y a plus de trois ou quatre cents communes dans les divers départements à portée desquels j’habite, qui sont sectionnées. Et les malheureuses populations sont venues souvent me supplier de présenter au Sénat leurs doléances.

Je les ai calmées en leur montrant à l’horizon votre loi municipale en préparation. Elles la voient prête à les délivrer. Elles ont traversé le désert ; elles sont aux portes de la Terre promise ; elles voient la source qui doit les désaltérer. (Rires sur divers bancs). M. Barne les renvoie pour quatre ans dans le désert. Vous repasserez dans quatre ans ! J’espère que le Sénat n’aura pas ce courage. (Vive approbation à droite).

Je disais que les sectionnements abusifs avaient progressé en nombre ; il faut voir aussi comme on les a perfectionnés !

(...) Et voici ce qu’on a fait. (L’orateur montre au Sénat un nouveau plan de sectionnement de la commune de Barbantane. - Longue hilarité sur les bancs.) Vous connaissez ce plan que la plupart d’entre vous ont dans les mains. Veuillez suivre ma démonstration.

On a donné d’abord à la section rouge la plus grande partie du chef-lieu de la commune, parce qu’il y a là un certain nombre d’habitants qu’il faut prendre tout d’abord afin que la section soit assez nombreuse pour nommer la majorité du conseil.

Puis, comme il faut aller chercher l’appoint dans la campagne, qu’il n’y a pas d’agglomération distincte et séparée, mais beaucoup d’habitations distinctes et que cependant on veut le moins possible de territoire rural, comment faire pour arriver sans péril aux électeurs, aux maisons qu’on veut atteindre ? Vous le voyez ! on prend pour l’assiette de la section la plus grande route, les chemins, les chaussées de la commune. Personne ne peut s’inscrire sur ce sol qui est à la commune, c’est la commune qui possède le territoire de sa section. (Rires approbatifs sur une grand nombre de bancs.)

Plusieurs sénateurs à droite : C’est vrai ! c’est vrai !