LE NIGERIA :
UN PARTENARIAT BIEN COMPRIS

Table des matières





LE NIGERIA :
UN PARTENARIAT BIEN COMPRIS

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COMPTE RENDU DE LA VISITE AU NIGERIA
D'UNE DÉLÉGATION DU GROUPE SÉNATORIAL D'AMITIÉ
FRANCE-AFRIQUE DE L'OUEST



DU 4 AU 10 OCTOBRE 1999

SOMMAIRE

LE NIGERIA : UN PARTENARIAT BIEN COMPRIS

COMPOSITION DE LA DÉLÉGATION SÉNATORIALE

M. Jacques LEGENDRE ( Groupe du Rassemblement pour la République ), Sénateur du Nord,

Président du Groupe Sénatorial d'Amitié France-Afrique de l'Ouest.

M. Bernard BARRAUX ( Groupe de l'Union Centriste ), Sénateur de l'Allier.

M. Hubert DURAND-CHASTEL ( Réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe ), Sénateur représentant les Français établis hors de France.

M. Yann GAILLARD ( apparenté au Groupe du Rassemblement Pour la République ), Sénateur de l'Aube.

M. Bernard PIRAS ( Groupe Socialiste ), Sénateur de la Drôme.

M. François TRUCY ( Groupe des Républicains et Indépendants ), Sénateur du Var.

La délégation était accompagnée par Mme Nathalie DELAPALME, administrateur des services du Sénat, secrétaire exécutif du Groupe Sénatorial d'Amitié France-Afrique de l'Ouest.

PROGRAMME DE LA DÉLÉGATION

Lundi 4 octobre

- 10 h 20 : départ Paris-Roissy

- 17 h 30 (locales, - 1 h) : accueil par M. Philippe Peltier, Ambassadeur de France au Nigeria

- 18 h 30 : réunion de travail avec l'ensemble des chefs de service de l'ambassade

- 20 h 30 : dîner à l'ambassade avec les chefs de service

Mardi 5 octobre

- 09 h 00 : visite de la section consulaire de la Chancellerie

- 10 h 00 : Chancellerie - réunion sur la sécurité dans la région du delta

- Déjeuner : Chambre de commerce franco-nigériane

- 15 h 30 : visite du Lycée français de Lagos

- 17 h 00 : visite du Musée national de Lagos

- 18 h 30 : réception de la communauté française

- 20 h 30 : dîner avec les conseillers du commerce extérieur

Mercredi 6 octobre

- 06 h 30 : départ en avion pour Kano (nord)

- 10 h 30 : arrivée à Kano et départ pour le chantier BEC d'Hadeja : 2 h 30 de route

- 13 h 00 : 14 h 00 : visite du projet

- 14 h 00 : 16 h 30 : retour sur Kano

- 17 h 00 : audience de l'émir de Kano

- 18 h 00 : Ecole française de Kano

- 18 h 30 : Alliance française de Kano

- 19 h 30 : réception de la communauté française au consulat de Kano

Jeudi 7 octobre

- 08 h 00 : départ en avion pour Abuja

- 10 h 00 : visite de l'Ecole française d'Abuja

- 11 h 00 : entretien officiel avec les Présidents de groupes et de commissions du Sénat

- 11 h 30 : réunion de travail au Sénat

- 13 h 00 : déjeuner avec les sénateurs

- 15 h 00 - 18 h 00 : - audience du secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères

- audience du ministre de la Coopération et de l'Intégration

- audience du ministre chargé de l'Education

- 18 h 30 : réception de la communauté française d'Abuja

- 20 h 00 : dîner à l'invitation du Président du Sénat

Vendredi 8 octobre

- 07 h 00 : départ en avion pour Lagos

- 10 h 00 : visite d'un atelier d'art contemporain

- 11 h 00 : visite du Centre culturel français

- 13 h 00 : déjeuner à l'ambassade avec les responsables de l'action culturelle et francophone

- 15 h 00 : réunion de bilan

- 18 h 00 : conférence de presse

- 18 h 30 : départ pour l'aéroport de Lagos

- 22 h 30 : départ pour Paris-Roissy

La délégation sénatoriale tient à exprimer sa plus vive gratitude à Son Excellence M. Philippe Peltier, Ambassadeur de France au Nigeria, ainsi qu'à l'ensemble de ses collaborateurs, tout particulièrement Vincent Süssfeld -à qui a notamment incombé l'organisation pratique de cette mission- pour leur concours précieux qui a permis le déroulement parfait et instructif des travaux de la délégation.

I.- LA RÉPUBLIQUE FÉDÉRALE DU NIGERIA : UN CONGLOMÉRAT ARTIFICIEL ET HÉTÉROGÈNE, MAIS INCONTESTABLEMENT PUISSANT

A l'aube de l'an 2000, la Fédération nigériane constitue une entité artificielle, résultat hétérogène des décisions du colonisateur britannique. Elle recouvre des territoires fortement contrastés et regroupe des ethnies culturellement antagonistes et historiquement rivales, dont les dissensions sont aujourd'hui avivées par des tensions sociales et religieuses renforcées.

Dix ans à peine après l'Indépendance de 1960, la découverte de ressources pétrolières considérables a profondément modifié la structure économique, sociale et politique d'un Etat récent et non encore consolidé, et fait du Nigeria un " partenaire incontournable " des économies développées.

En quarante années d'existence, l'Etat nigérian aura connu trente années de régimes militaires divers, une dizaine de coups d'Etat, une demi-douzaine de transitions interrompues vers la démocratie, neuf années de gouvernement civil, et trois républiques désormais défuntes. La quatrième vient de voir le jour, avec l'élection, en février 1999, d'Olusegun Obasanjo, général à la retraite.

Campé sur un carrefour géographique stratégique, regroupant le cinquième de la population du continent africain, 6 ème producteur mondial de pétrole, le Nigeria constitue néanmoins désormais, malgré une instabilité consubstantielle, une des toutes premières puissances du sous-continent africain.

A.- LE NIGERIA : UN CONGLOMÉRAT INVENTÉ PAR LE COLONISATEUR BRITANNIQUE

I.- Une mosaïque ethnique

L'analyse de l'évolution historique de ce qui constitue aujourd'hui, à l'aube de l'an 2000, la République Fédérale du Nigeria, témoigne d'une complexité considérable, en fait d'une remarquable hétérogénéité. Rien ne prédestinait à faire vivre ensemble les différents groupes ethniques et socioculturels qui composent aujourd'hui cet Etat, si ce n'est, initialement, la volonté du colonisateur britannique .

Les premières traces de civilisation en Afrique subsaharienne ont été retrouvées à Nok au nord du confluent du Niger et de la Benoué, dans le Nigeria central. Certains spécialistes estiment que la culture Nok s'est développée depuis la seconde moitié du premier millénaire avant J-C jusqu'au second siècle de notre ère et qu'elle représente " la souche ancestrale dont provient, pour une grande part, la tradition sculpturale de l'ouest africain " 1( * ) .

La délimitation géographique tracée par le " Y " que forment le fleuve Niger et son confluent la Benoué en direction du Cameroun, permet, de façon grossière, de distinguer les trois principaux groupes ethniques d'un Etat qui en compte au total environ deux cents cinquante 2( * ) : les Haoussas-Fulanis au nord, qui représentent aujourd'hui environ 40 à 45 % de la population, les Yoroubas au sud-ouest -environ 20 à 25 % de la population- et les Ibos au sud-est -de 10 à 15 % de la population. Le tiers restant de la population est constitué de minorités multiples, les principales étant les Kanouris, les Noupés et les Tivs au nord, les Efiks, les Ijaws, les Itsekiris et les Ibidios dans le sud-est.

En réalité, la plupart des spécialistes s'accordent aujourd'hui à considérer que ces " petites ethnies " forment de facto un quatrième " bloc ", très hétérogène, mais aussi très influent, car notamment très représenté au sein de l'armée et des Etats pétroliers du sud, et particulièrement habile à nouer des alliances complexes et variables.

a.- Au nord : la société haoussa-fulani à dominante islamique

Enracinement de l'islam dès le XV ème siècle

L'histoire des Etats haoussas, qui occupaient le nord-est de l'actuel Nigeria, est connue depuis le XI ème siècle.

L'introduction de l'islam dans les régions du nord remonte au IX ème siècle. Considérablement renforcé par le développement du commerce avec les pays arabes à partir du XV ème siècle, l'islam a fortement consolidé les structures déjà en place dans les cités-Etats haoussas tournées vers le commerce transsaharien. Le califat de Sokoto, en particulier, constitue depuis cette époque une entité politique affirmée et homogène, sur laquelle les colonisateurs britanniques choisiront de s'appuyer en la confortant encore davantage.

La prédominance commerciale de la grande ville caravanière de Kano atteint son apogée à la fin du XV ème siècle. Dès le début du XVI ème siècle, la ville de Katsina, qui rivalise pour la domination du commerce en pays haoussa, est également un centre réputé d'études islamiques. Les deux cités constituent alors d'importants marchés d'esclaves à destination du monde arabe.

La " guerre sainte " (djihad) d'Usman dan Fodio au début du XIX ème siècle

Premiers peuples islamisés d'Afrique Noire, les Peuls (Fulanis au Nigeria) mènent, à partir de 1804, sous la conduite de Usman dan Fodio, un djihad victorieux contre l'islam impie des rois haoussas décadents. Ils structurent alors définitivement sous hégémonie peule les royaumes haoussas transformés en émirats, sous la règle des deux califats de Sokoto (à l'ouest) et de Gwandu (à l'est). En 1830, tout le nord du Nigeria -à l'exception de l'Empire du Bornou 3( * ) - est régi par un système uniforme de gouvernement. Son unité ne se fonde pas sur la contrainte mais sur une obédience politique et religieuse unanime au Shehu , le Commandeur des croyants, installé à Sokoto. Au terminus des routes caravanières du Sahara et de Tombouctou, Kano confirme, pour sa part, son statut de capitale économique.

Une homogénéité relativement forte construite par la religion musulmane

Avec des nuances, il semble que Peuls et Haoussas se soient désormais presque harmonieusement mélangés, autour de la religion musulmane peule, et de la langue, des institutions et des coutumes haoussas.

Seules les zones les plus septentrionales et l'ancien sultanat du Bornou, adversaires traditionnels des " djihadistes " et premières victimes des négriers musulmans, refusèrent toujours toute islamisation. Le nord reste ainsi parsemé de poches christianisées peuplées d'ethnies minoritaires.

On peut aujourd'hui distinguer deux grandes sous-régions : le Far-North , adossé à la frontière du Niger, qui regroupe les anciens émirats des sultanats de Sokoto et Borno, et reste dominé par l'ensemble ethnico-religieux des Peuls-Haoussas islamisés, avec quelques îlots christianisés, et le Middle Belt , beaucoup moins homogène, peuplé par une mosaïque de minorités historiquement païennes, récemment islamisées ou christianisées, qui n'ont en commun que le refus de l'hégémonie haoussa.

b.- Au sud-ouest : présence historique des Yoroubas

L'homogénéité culturelle la plus forte à l'origine

La civilisation yorouba est notamment caractérisée par une forte urbanisation, tout à fait exceptionnelle en Afrique Noire précoloniale 4( * ) et un régime peu centralisé dans lequel les provinces sont quasiment autonomes. Apparus au XI ème siècle, les royaumes yoroubas fondent leur unité sur une langue, une culture et une origine communes. La ville sacrée d' Ifé , considérée comme le berceau de la civilisation yorouba, est le siège de l' ori , chef religieux suprême.

L'Empire d'Oyo est la formation politique la plus puissante et la plus organisée qu'ait connue le Golfe de Guinée jusqu'à la colonisation. Doté d'une cavalerie puissante et bien organisée, il assied son pouvoir économique sur le développement de la traite négrière (via le port de Ajase, actuel Porto-Novo) à partir du XVI ème siècle. Il décline au XIX ème siècle, sous l'effet conjugué des rivalités inter-yorouba, de l'affaiblissement de son pouvoir militaire et de l'avancée de la djihad fulani venue du nord.

Plus à l'est, le royaume de Bénin 5( * ) , de souche purement africaine, fondé vers le XIII ème siècle, se développe en dehors de toute influence islamique. Il connaît son apogée au XV ème siècle 6( * ) , et assoit sa prospérité sur les échanges commerciaux (esclaves, puis produits palmistes), d'abord avec les Portugais, puis avec les Européens.

Une ouverture précoce à l'influence européenne et au christianisme

Ces deux royaumes, surtout celui de Bénin, sont les premiers à nouer des liens -de nature égalitaire- avec les Portugais et avec la Papauté. Dès 1597, le roi de Warri reçoit une éducation portugaise en Angola et adopte la religion chrétienne. En 1600, il envoie son fils étudier au Portugal à Coimbra, avec une bourse du roi Philippe VII du Portugal. Son successeur confirme l'ouverture du royaume aux Portugais et demande au Pape l'envoi de missionnaires (1652). Le commerce des esclaves, puis, après son abolition en 1807, celui des produits palmistes, contribuent à renforcer les échanges avec les européens.

De fait, le paysage politique de cette région reste aujourd'hui encore marqué par les activités évangélisatrices et éducatives des missions chrétiennes. Celles-ci toutefois n'ont guère modifié les traits fondamentaux de la civilisation yorouba : panthéon religieux toujours vivace comportant plus de 400 dieux, ancêtres des lignages et esprits des forces de la nature, rôle essentiel des sociétés secrètes religieuses (ogboni) 7( * ) , forte organisation familiale qui perdure, existence fort ancienne de guildes professionnelles protégeant les intérêts de chaque métier spécialisé, importance du commerce.

Conflits interethniques et diaspora

Pourtant la plus homogène au départ, l'ethnie yorouba reste toutefois marquée par de constantes rivalités régionales qui remontent aux conflits ancestraux entre le royaume d'Oyo et les royaumes côtiers esclavagistes d'Ibeju et Abeokuta.

Ayant depuis le XV ème siècle constitué la quasi-majorité des esclaves exportés en Amérique du sud, aux Caraïbes et à Cuba, les Yoroubas bénéficient aujourd'hui d'une importante diaspora, particulièrement solidaire au niveau international. Bénéficiant souvent d'un niveau de formation élevé, ils sont aujourd'hui très présents à tous les niveaux de la vie nigériane -politique, économique, administratif, culturel 8( * ) .

c.- A l'est : prédominance disputée des Ibos, démocratie directe et sociétés " anétatiques "

La tentation sécessionniste du Biafra

Aujourd'hui concentrés au sud-est du Nigeria, les Ibos représentent une population -estimation approximative et très difficile à vérifier- d'environ 16 millions d'individus. Ils " fournirent " entre le XV ème et le XVIII ème siècle, l'essentiel du marché côtier des esclaves de Bonny, privilégié par les européens.

Le système de gouvernement des Ibos est, dès l'origine, marqué par la " démocratie directe " 9( * ) : si le chef est chargé du maintien de la tradition, les décisions sont prises par l'assemblée du village.

En 1966, la permanence des revendications à l'autonomie des minorités ibo du sud-est culmine dans une succession de coups d'Etat militaires et de répressions féroces qui touchent notamment les Ibos. Deux millions de réfugiés ibos quittent alors le nord pour regagner le sud-est. La région fait sécession le 30 mai 1967 et proclame l'indépendance de la République du Biafra , initiant ainsi une guerre de 29 mois qui fera près de deux millions de morts, victimes civiles pour la plupart de famine et de malnutrition.

Des ethnies minoritaires violemment activistes

Il importe toutefois de souligner que l'aventure sécessionniste ibo de 1967 est restée constamment contestée par une multitude de petites ethnies, laissant des traces profondes encore sensibles aujourd'hui. Celles-ci contribuent à raviver les fractures de la période esclavagiste, qui a enraciné de profondes rancoeurs entre les peuples razziés de l'intérieur (les Ibos) et les peuples razzieurs côtiers (les Ijaws).

Parmi ces ethnies minoritaires, on trouve notamment les Ogonis , petite minorité d'environ 500.000 personnes vivant dans le delta du Niger sur des territoires hautement pétrolifères et aujourd'hui ravagés par la pollution. Ils sont à l'origine d'un puissant mouvement revendicatif, le MOSOP ( Mouvement for Survival of Ogoni People ) aujourd'hui relayé par de nombreuses ONG occidentales. Ce sont les principaux artisans de la recrudescence des actes de violence et de vandalisme à l'encontre des compagnies pétrolières. Transformés en " martyrs " par l'exécution de leur leader, Ken Saro-Wiwa, le 11 octobre 1995, ils multiplient aujourd'hui des affrontements marqués par une durée et une cruauté croissantes, et vraisemblablement " alimentés " par les armes et les " vétérans " issus des conflits voisins (Liberia, Sierra Leone).

Beaucoup plus importante en nombre -6 millions environ- l'ethnie des Ijaws , présents dans la quasi-totalité des Etats pétroliers, est également politiquement très structurée au sein du Congrès National des Ijaws .

d.- Une donnée importante : un siècle et demi de traite des esclaves

En fait, la " cohérence " des trois principaux groupes ethniques -Haoussas-Fulanis, Yoroubas, Ibos- doit être relativisée. Quasi-inexistante avant l'ère coloniale, elle a surtout résulté de la politique du colonisateur britannique et du recours à l' " indirect rule ".

Malgré certains temps forts de " mobilisation tribale ", largement utilisés par les élites au pouvoir, les pesanteurs des conflits interethniques du passé et des antagonismes entre anciens royaumes, émirats et empires demeurent toujours très vifs.

Il convient notamment de ne pas sous-estimer le poids de " l'héritage " laissé par le passé esclavagiste de certaines ethnies. Il constitue en effet un facteur essentiel d'explication des antagonismes -plus ou moins latents- contemporains.

Jusqu'à la seconde moitié du XIX ème siècle, la traite des esclaves, dont le Golfe de Guinée fut durant toute la période un pourvoyeur essentiel, constitue une donnée historique fondamentale. Il est aujourd'hui reconnu que, à cet égard, les négriers européens et musulmans ont été largement " assistés " par des appareils négriers africains parfaitement organisés 10( * ) .

Il est clair que, dans ce cadre, l'apparition de rapports dominant-dominé a été constante et les sources de conflits interethniques nombreuses.

L'interdiction de la traite par la Grande-Bretagne en 1807, par la France en 1831, puis par le Congrès de Berlin en 1885 est loin de mettre un terme à des trafics qui continueront de se dérouler de façon autonome, sous " gestion locale ".

Yves Lacoste n'hésite pas à faire des systèmes " africains " de traite l'un des principaux facteurs, rémanents, des conflits interethniques contemporains 11( * ) .

" La faiblesse des appareils d'Etat dans la plupart des pays d'Afrique tropicale, la persistance en leur sein d'une très grande diversité ethnique, le fait qu'ils ne soient pas encore des Etats-nations sont dans une grande mesure, à mon avis, les conséquences de l'oppression que les appareils négriers les plus puissants ont exercée jusqu'à une période relativement récente sur les interethnies. Ce n'est pas parce que les frontières de ces Etats ont été tracées plus ou moins arbitrairement par les colonisateurs que l'on devrait les considérer comme fâcheuses, c'est parce qu'elles rassemblent aujourd'hui des groupes ethniques entre lesquels existent de très lourds contentieux . Ce sont ces contentieux qui expliquent qu'autour de fortes ethnies les phénomènes d'attraction et d'acculturation ne soient guère exercées sur les groupes plus petits qui restent chacun cramponnés à leur identité culturelle.

" ... Dans bon nombre d'Etats africains, ce sont les anciennes ethnies négrières qui exercent encore aujourd'hui le pouvoir. D'abord en raison de leur poids démographique (elles ne furent pas soumises aux ponctions esclavagistes), en raison aussi de leur localisation littorale (et donc commerçante). Y. Lacoste cite ici le cas des Yoroubas (1987).

" Certes, en comparaison des dix siècles de la traite arabe et des trois ou quatre siècles de la traite européenne, la période de traite intra-africaine massive dura relativement peu et personne n'en parle guère aujourd'hui. Mais c'est sans doute celle dont les conséquences géopolitiques actuelles sont les plus graves, car c'est la plus récente . Les luttes qu'elle a provoquées sont encore dans toutes les mémoires...

" Ces tensions, même celles qui ne sont pas formulées ouvertement, empêchent le développement d'une idée nationale, dans la plupart des Etats d'Afrique, ce qui détermine, à mon sens, pour une grande part non seulement leurs faiblesses, mais aussi leur incurie et leurs exactions. "

Montée des tensions ethniques depuis l'élection présidentielle

mai : Warri (delta du Niger) : affrontements entre Ijaws et Itsekiris : 200 morts.

10 juillet : affrontements entre Yoroubas et Haoussas à Sagamu (delta du Niger) : 70 morts.

27 juillet : émeutes à Kano entre Yoroubas et Haoussas : 30 morts

30 juillet : affrontements entre Ijaws et Ilajes dans l'Etat d'Ordo : 50 morts.

septembre : affrontements entre Ijaws et Ilajes dans l'Etat d'Ordo (sud-ouest) : 3 morts.

25 octobre : affrontements entre Yoroubas et Ijaws à Lagos : environ 20 morts.

30 octobre : émeutes à Lagos entre Yoroubas de l'OPC 12( * ) et Ijaws : 12 morts.

2 novembre : nouveaux affrontements à Lagos entre les mêmes : 7 morts.

15 novembre : affrontements à Warri entre Ijaws et Itsekiris : 18 morts.

25-26 novembre : affrontements entre Yoroubas et Haoussas à Lagos : 100 morts. Fuite de centaines de Haoussas vers le nord. Les émeutes ont vraisemblablement été déclenchées par des partisans de l'OPC Cette flambée de violence, la plus forte depuis l'arrivée au pouvoir du Gouvernement civil, a fait monter la tension d'un cran.

- " Le Gouvernement n'a rien fait. Nous avons besoin de la police. C'était mieux sous le régime militaire " (déclaration AFP d'un chef haoussa).

- Le Président Obasanjo aurait ordonné de " tirer à vue " sur les manifestants.

26 novembre : des agents de la sécurité nigériane indiquent avoir découvert à Kano un projet de représailles contre les Yoroubas, fomenté par les Haoussas.

1er décembre : s'exprimant sur l'ordre du " tir à vue " donné par le Président Obasanjo, le Président d'une des deux factions de l'OPC déclare : " il s'agit d'un ordre dangereux, donné par un Président mal informé et qui comporte un danger de génocide ".

15 décembre : mise à sac de la clinique du Docteur Frederick Fashun, leader de l'aile modérée de l'OPC : 1 mort.

1er janvier : affrontements à Lagos entre des membres de l'OPC et Haoussas : 5 morts.

5 janvier : affrontements à Lagos entre des membres de l'OPC et des Haoussas : 40 morts à Lagos.

- affrontements à Ibadan entre Yoroubas et Haoussas : 10 morts.

II.- La colonisation britannique et la création du Nigeria

a.- Le prétexte initial : l'interdiction de la traite des esclaves

Au cours de la seconde moitié du XIX ème siècle, le Soudan central et la Côte des esclaves sont l'enjeu des stratégies impériales européennes opposant notamment la Grande-Bretagne, la France et l'Allemagne. La Grande-Bretagne l'emporte, se fait le champion de l'interdiction de la traite des esclaves sur la côte du Golfe de Guinée à partir de 1840 et multiplie les relations diplomatiques et commerciales d'abord avec les royaumes du littoral, puis en progressant -difficilement- vers le nord par une série d'expéditions 13( * ) .

Dans le delta du Niger et à l'est de celui-ci, les britanniques s'efforcent de maîtriser les hégémonies côtières (notamment Warry, Bonny et Calabar) en s'appuyant sur la marine britannique dont la présence constante est censée éliminer le trafic d'esclaves.

En pays yorouba, à l'ouest, jouant sur les conflits dynastiques locaux, ils s'installent à Badagry, puis à Lagos, transformée en Colonie de la Couronne en 1886. La présence d'anciens esclaves occidentalisés et des missions protestantes constitue alors un appui notable.

Au nord, la pénétration britannique est l'oeuvre d'une compagnie commerciale à charte royale 14( * ) , la Royal Niger Company , qui, ayant évincé les Français de l'axe Niger-Bénoué, conclut une série de quasi-protectorats avec les chefferies et émirats septentrionaux, puis avec le califat de Sokoto. En 1899-1900, le Gouvernement britannique rachète les droits de la Royal Niger Company , se substitue à elle et constitue un Protectorat du nord confié à Sir Henry Lugard. La conquête de Sokoto par les britanniques le 19 mars 1903 assoit définitivement leur position.

b.- L'application de l' indirect rule et la prédominance donnée au nord

Au début du XX ème siècle, les possessions britanniques se composent du Protectorat du nord , du Protectorat-Colonie du sud et de la Colonie de Lagos . En 1906, la Colonie de Lagos et le Protectorat du sud sont fusionnés. Les deux protectorats sont " amalgamés " en une unité commune, appelée Nigeria, en 1914 , regroupant la Northern Region et la Southern Region , dotées chacune d'une administration et d'une réglementation propres.

Sir Henry Lugard, nommé Gouverneur général du Nigeria, inaugure au Nigeria la politique d' indirect rule dont il est le théoricien. Les Britanniques s'emploient alors à conforter les structures islamisées 15( * ) , monarchistes et médiévales d'un nord qui leur paraît plus structuré, par opposition à un sud déjà nettement ouvert aux influences occidentale, chrétienne et panafricaniste.

En réalité, si l' indirect rule correspondait bien à la société stratifiée du nord, où le conquérant fulani percevait déjà l'impôt depuis longtemps, le système ne put jamais vraiment fonctionner avec les sociétés ibos de l'est, peu intègrées, et sans organes représentatifs, ni même à l'ouest chez les Yoroubas. Faute de chefs traditionnels suffisamment influents, l'administration britannique dut désigner des warrant chiefs , méthode qui se révèla généralement peu probante, notamment en pays ibo.

L' " indirect rule "

Système d'administration coloniale (utilisé également en Inde avec les Maharadjahs) consistant à utiliser le relais des chefs coutumiers à l'échelon local en les établissant à la tête d'une " native authority " (autorité indigène), -à la fois aire de juridiction et autorité de pouvoir- pour percevoir l'impôt et faire régner l'ordre en échange de faibles avantages.

Tous les ordres donnés par les Hauts Commissaires britanniques transitent par l'intermédiaire de l'autorité indigène.

Outre des économies de fonctionnement, le système permet sans doute un enracinement plus solide des nouvelles règles d'administration.

" Trouver un homme d'influence pour être chef, placer sous son autorité autant de villages et de districts que cela est possible, lui déléguer certains pouvoirs, l'intéresser au budget de la Native Authority et lui inculquer le sens des responsabilités " (Sir Henry Lugard) 16( * ) .

III.- Mise en place difficile d'une démocratie fédéraliste : multiplication constante des composantes de la Fédération, succession des coups d'Etat militaires

a.- Nationalisme, régionalisme, " tribalisme "

Au total, l'influence de la colonisation britannique reste moins marquée, plus " furtive " que ne le furent les colonisations d'administration directe française, allemande ou portugaise dans les pays voisins. De fait, dès les années 20, un fort courant " nationaliste " émerge avec Herbert Macaulay, qui fonde le Nigerian National Democratic Party , initialement cantonné à la capitale.

Dès la fin de la Deuxième Guerre mondiale, le principe de la colonisation est nettement remis en cause. La radicalisation des mouvements sociaux et la multiplication des associations ethniques ou politiques conduisent à la formation de trois grands partis dont les bases électorales coïncident à peu près avec les trois régions qui seront consacrées en 1954 lors de la transformation du Nigeria en Etat fédéral : à l'est, le National Council for Nigeria and Cameroons (NCNC) de Nnamdi Azikiwe (futur Président de la Première République), institué en 1944, essentiellement composé d'Ibos, à l'ouest, l' Action Group de Obafemi Awolowo, fondé en 1945 par des étudiants yorouba de Londres, au nord, le Northern People's Congress (NPC) de Ahmadu Bello, créé en 1949 en pays haoussa.

Le partage qui se dessine alors entre les " Big three " -trois régions, quasi assimilables à trois ethnies et à trois partis- doit toutefois être très nuancé. Chaque " bloc " régional reste en effet marqué par d'importantes et multiples fractures internes, même si le nord, à dominante musulmane, bénéficie d'une identité régionale plus claire et mieux affirmée, notamment sous la férule intelligente de Ahmadu Bello, sardauna de Sokoto de 1954 à 1966.

De fait, dans la construction de cet Etat fédéral moderne, le rôle joué par les unions tribales -particulièrement actives dans le sud 17( * ) - a vraisemblablement été supérieur à celui des partis nationalistes, qui avaient finalement peu d'assise dans le pays profond.

b.- Bégaiement des régimes : en quarante ans, 4 républiques, 10 coups d'Etats, 30 ans de régime militaire

A l'Indépendance, en 1960, le régime adopté pour la Première République est celui d'une démocratie parlementaire de type occidental. Les forces centrifuges du régionalisme, la multiplication des tensions politiques, les difficultés d'une économie qui ignore encore la " manne pétrolière " culminent avec la guerre civile du Biafra qui durera de 1966 à 1970, et mettent définitivement fin au premier régime civil du Nigeria.

Lui succède, de 1970 à 1979, un régime militaire fort, centralisé, qui contrôle les principales ressources du pays, en particulier le pétrole, qui fait une apparition soudaine et massive en 1970.

La Deuxième République mise en place en 1979, sur le modèle présidentiel américain, fonctionne sur une séparation plus nette des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, avec une nette prépondérance du Président, Chef des armées, élu pour 4 ans et doté de vastes pouvoirs. Le caractère fédéral est accentué, confirmant la marque centralisatrice léguée par la guerre civile et la présence de l'armée au pouvoir. Une attention particulière est accordée au principe d'égalité de traitement entre tous les Etats -le sacro-saint " caractère fédéral " 18( * ) . La Deuxième République s'effondre toutefois quatre ans plus tard, en 1983, anéantie par une corruption massive, la multiplication des fraudes électorales et la contestation croissante des modalités de " partage du gâteau " pétrolier. La période est par ailleurs marquée par une montée des crispations religieuses. Enfin, la chute du cours du baril enclenche dès 1980 une profonde récession économique.

De 1983 à 1999, se succèdent ensuite de manière quasi ininterrompue des régimes militaires, jusqu'à l'élection, en février 1999, de l'ancien général Olusegun Obasanjo, qui avait déjà assuré, en 1976-1978, la transition vers un régime civil.

Evolution institutionnelle du Nigeria

1946 : première constitution du Gouverneur général Richards . Promulguée sans aucune consultation des nigérians, elle ne fut jamais appliquée.

1951 : première constitution Mac Pherson, issue de la conférence institutionnelle d'Ibadan. Elle est déclarée caduque d'emblée.

1952 : constitution Lyttleton. Le Nigeria devient un Etat fédéral (3 régions, 1 capitale) doté d'un système parlementaire. La représentation du nord égale celle du sud tout entier. La redistribution des ressources est assurée en fonction des besoins régionaux.

1954 : deuxième constitution Mac Pherson. Renforcement de la partition du Nigeria en trois gouvernements, régionalisation de la fonction publique et de la magistrature.

Octobre 1959 : premières élections générales. Aucune des trois principales forces politiques n'obtient la majorité des suffrages.

1 er octobre 1960 : indépendance du Nigeria .

1960-1966 : Première République (Président : Nnamdi Azikiwe).

mai 1962 : proclamation de l'état d'urgence. Arrestation de O. Awolowo (chef du NCNC)

février 1964 : première " guerre civile ". Forte rébellion tiv dans le nord. Création d'une quatrième région (Midwest).

novembre 1965 : élections partielles dans l'est et l'ouest dans un climat de violence politique inégalé.

1966-1978 : succession de régimes militaires .

14 janvier 1966 : premier coup d'Etat militaire (assassinat de 27 personnalités, dont le Premier ministre et le ministre des Finances de la Fédération et les deux Premiers ministres du nord et de l'ouest), suivi immédiatement d'un contrecoup d'Etat conduit par le général Aguiyi-Ironsi, chef d'état major ibo des forces armées. Les régions sont supprimées, les partis politiques et les unions tribales abolis. Annonce de l'abolition du Gouvernement fédéral.

29 juillet 1966 : assassinat du général Aguiyi-Ironsi. Mutineries générales. Arrivée au pouvoir du colonel Gowon. Début des massacres d'Ibos dans le nord.

12 septembre 1966 : ouverture d'une conférence constitutionnelle à Lagos.

30 septembre 1966 : série de pogroms organisés dans le nord, visant essentiellement les Ibos. Afflux massif de réfugiés ibos vers le sud-est.

30 mai 1967 : sécession de la région de l'est. Proclamation de l'Indépendance de la République du Biafra.

juillet 1967-janvier 1970 : guerre du Biafra.

14 janvier 1970 : reddition du Biafra. Politique de réconciliation nationale. " Découverte " du pétrole. Annonce d'un retour à la démocratie pour 1976.

1973 : recensement contesté. Montée de l'agitation autour de la création de nouveaux Etats. Perte de contrôle du Gouvernement fédéral sur les gouverneurs locaux.

1 er octobre 1974 : ajournement sine die du transfert des pouvoirs aux structures décentralisées. Montée des revendications sociales pour le partage du " gâteau " pétrolier.

29 juillet 1975 : coup d'Etat militaire, conduit par le général Murtala Mohammed. Démission des gouverneurs militaires. Annulation du recensement. Mise en place d'une " campagne de lutte contre la corruption ". Licenciement de 10.000 fonctionnaires.

13 janvier 1976 : assassinat du général Murtala Mohammed. La succession est assurée par le général Olusegun Obasanjo.

avril 1976 : création de 7 nouveaux Etats.

21 septembre 1978 : promulgation d'une nouvelle Constitution qui prévoit un régime de type présidentiel avec une nette séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. Confirmation du principe fédéral 19( * ) avec 19 Etats. Toutefois, 92 constituants musulmans boycottent les travaux à cause du refus des autres parlementaires d'envisager l'établissement d'une juridiction fédérale d'appel spécifique aux affaires de droit musulman ( charia ). Cette question demeurera non tranchée.

juillet-août 1979 : consultations électorales relativement paisibles. Majorité pour le National Party of Nigeria (NPN) de Shehu Shagari, élu Président de la République.

1 er octobre 1979 : mise en place de la II ème République . Remise " paisible " du pouvoir au nouveau régime civil par la junte militaire, conformément aux engagements pris par le général Murtala Mohammed en 1975.

1979-1983 : Deuxième République .

1983-1993 : régimes militaires :

1983 : coup d'Etat militaire, conduit par le général Mohammed Buhari. Démission du Président, dissolution des assemblées, abrogation de la Constitution. Nouvelle campagne d' " assainissement " mal ressentie dans une conjoncture économique fortement récessive avec la chute du cours du baril.

27 août 1985 : prise du pouvoir par le général Ibrahim Babangida. Il s'engage à organiser une transition vers un régime civil et conclut avec le FMI un programme d'ajustement structurel (PAS).

1987 : adhésion du Nigeria à l'Organisation de la Conférence Islamique. Création de deux Etats supplémentaires.

mars 1989 : mise en place d'une assemblée constituante aux pouvoirs limités. En particulier, la question de la charia est à nouveau écartée.

mai 1989 : série d'émeutes étudiantes à Lagos, Ibadan et Benin City, liées à la dégradation de leurs conditions de vie. Plusieurs dizaines de morts.

octobre 1989 : dissolution des formations politiques retenues par la Commission électorale nationale. Répression violente.

22 avril 1990 : échec sanglant d'un coup d'Etat militaire.

décembre 1990-août 1992 : succession d'élections, marquées par des fraudes et des assassinats politiques.

août 1991 : création de neuf Etats supplémentaires.

octobre 1992 : annulation des primaires présidentielles. Le scrutin est reporté au 12 juin 1993.

12 juin 1993 : élection présidentielle. Victoire de Moshood Abiola. Nouvelle annulation des résultats. Deux mois d'affrontements sanglants.

août-novembre 1993 : Troisième République

27 août 1993 : démission du général Babangida. Transmission du pouvoir à un gouvernement civil intérimaire placé sous l'autorité d'un civil : Ernest Shonekan.

Novembre 1993-février 1999 : régimes militaires

17 novembre 1993 : démission " obligée " de E. Shonekan. Passation des pouvoirs au général Sani Abacha. Interdiction des deux principaux partis. Dissolution des assemblées. Abrogation de la Constitution. Arrestation de Moshood Abiola et de Olusegun Obasanjo.

10 novembre 1995 : exécution par pendaison de Ken Saro-Wiwa, Président du MOSOP et de huit militants ogonis. Le Nigeria est exclu du Commonwealth. Le régime se durcit considérablement et le Nigeria est marginalisé sur la scène internationale.

juin 1998 : décès du général Abacha. Intérim assuré par le général Abubakar.

juillet 1998 : décès de Moshood Abiola.

Février 1999 -.......... : Quatrième République

27 février 1999 : élections présidentielles. Election de Olusegun Obasanjo avec 70 % des voix. Mise en place de la IV ème République .

5 mai 1999 : promulgation de la nouvelle Constitution.

15 novembre 1999 : réintégration au sein du Commonwealth.

c.- La " scissiparité " de la Fédération nigériane 20( * )

Le fédéralisme nigérian apparaît généralement, au mieux, comme le seul moyen de concilier les exigences d'un régime de type présidentiel avec les revendications régionalistes de " pays " traditionnels très puissants, au pire, comme la seule alternative au chaos.

Le Nigeria est ainsi passé de deux à quatre régions ( Northern, Western, Eastern, Midwest ), puis de 12 à 49 Etats et comprend en outre plus de 600 collectivités locales 21( * ) , soumises à un processus de fragmentation incessant.

De fait, dénuées de la légitimité historique des chefs traditionnels, et du pouvoir de coercition du Gouvernement fédéral, faiblement dotées de ressources pour le moins incertaines et d'institutions peu représentatives, les " collectivités locales " nigérianes constituent des échelons artificiels et peu respectés 1 .

" Faute de légitimité historique, de compétences exécutives et de moyens financiers, les conseils des collectivités locales demeurent une greffe étrangère au terroir et les problèmes continuent d'être traités par d'autres canaux d'expression (lignages, réseaux d'influence, clientèles des chefs traditionnels), qui, parfois, empiètent sur le système de gouvernement moderne " 22( * ) .

Cette caractéristique a été ressentie par la délégation sénatoriale française, lors des différents entretiens qu'elle a pu avoir avec les sénateurs nigérians, qui sont apparus essentiellement préoccupés par l'annulation de la dette nigériane et la récupération de l'argent détourné par les anciens dirigeants.

La Fédération nigériane

1914 : constitution du Nigeria par fusion des Protectorats britanniques du nord et du sud.

maintien de 2 régions : Northern Region et Southern Region , cette dernière elle-même subdivisée en Western Region et Eastern Region .

1954 : constitution d'un Etat fédéral formé de 3 régions ( Northern, Western, Eastern ) et une capitale fédérale (Lagos).

1963 : création d'une quatrième région ( Midwest ).

1967 : 12 Etats : 6 Etats pour la Northern Region ; 3 Etats pour la Western Region ; 3 Etats pour l' Eastern Region .

30 mai 1967 : sécession de l' Eastern Region , sous le nom de " République du Biafra ".

1975 : passage à 19 Etats dans la nouvelle Constitution.

1987 : création de 2 Etats supplémentaires = 21 Etats .

1991 : création de 9 Etats supplémentaires et 256 collectivités locales nouvelles, soit un total de 30 Etats .

1993 : création de 29 Etats nouveaux, soit un total de 49 Etats , plus le territoire de la nouvelle capitale Abuja.

IV.- Entrée dans le troisième millénaire : le spectre de la violence

a.- Un tripode supplémentaire : l'appartenance religieuse

Les tensions régionales et interethniques sont clairement renforcées par les appartenances religieuses. Bien que en principe " laïque ", la Fédération du Nigeria est en butte à de nombreuses luttes religieuses pour la désignation des principales autorités politiques, institutionnelles et militaires. Ainsi, les chrétiens s'émeuvent de la mention de la charia dans les différentes institutions, du financement des mosquées et du pèlerinage à La Mecque par le Gouvernement fédéral, de l'adhésion du Nigeria à l'Organisation de la Conférence Islamique. Les musulmans, pour leur part, dénoncent la prédominance d' " infidèles " dans les forces armées, l'utilisation officielle de l'anglais et du calendrier chrétien, l'appartenance du Nigeria au Commonwealth, présidé par la Reine d'Angleterre, chef de l'Eglise anglicane.

La carte religieuse du Nigeria ne recouvre que grossièrement celle des trois grands blocs ethniques et régionaux. Les musulmans, largement majoritaires dans le nord du pays et chez les Haoussas, progressent désormais chez les Yoroubas du sud-ouest 23( * ) . Le Nigeria est, de fait, le plus important pays musulman de l'Afrique de l'Ouest. Près de 50 millions de Nigérians pratiquent un islam majoritairement sunnite.

Les chrétiens, majoritaires au sein des ethnies du sud, principalement chez les Ibos, sont également présents chez les ethnies minoritaires de la Middle Belt et du sud-est.

Les adeptes des " cultes ancestraux ", encore très actifs chez les ethnies du sud, principalement les Yoroubas, font désormais de nouveaux fidèles 24( * ) .

b.- Montée des tensions, multiplication des affrontements

Loin d'être homogènes, les trois " blocs " connaissent depuis une trentaine d'années une multiplication des lignes de fractures internes, qui se traduit par la montée des tensions et d'affrontements, dont la violence se renforce.

Ainsi, au nord, la communauté musulmane, majoritairement sunnite, est divisée par l'existence de plusieurs obédiences dont les luttes d'influence sont parfois sanglantes : d'abord entre la confrérie fondamentaliste Izala et les confréries soufies Tijane 25( * ) et Gadiri 26( * ) , puis plus récemment avec l'apparition du chiisme (création en 1980 de l' Islamic Movement of Nigeria ). Le chef actuel du mouvement chiite, Ibrahim El Zakzoky, s'appuie efficacement sur le ressentiment des populations musulmanes à l'encontre des autorités politiques et religieuses corrompues, pour réclamer, depuis 1981, la création d'un Etat islamique nigérian, et déstabiliser l'autorité ancestrale des chefs traditionnels. La " greffe " de l'intégrisme prend notamment efficacement chez les jeunes, victimes d'un exode rural massif, et paupérisés dans les banlieues des grandes villes du nord (Kano, Kaduna, Katsina). Ce type de " fondamentalisme " contestataire paraît s'inscrire dans la continuité de la djihad d'Usman dan Fodio, de l'intégrisme peul ou même du mahdisme soudanais du XIX ème siècle 27( * ) .

Parallèlement, les populations chrétiennes et animistes, numériquement minoritaires, s'opposent de façon croissante à ce " prosélytisme panislamique ", largement soupçonné de bénéficier d'importants capitaux moyen-orientaux (Lybie 28( * ) , Iran 29( * ) , Arabie Saoudite, Pakistan, Egypte, Koweit). Ils se reconnaissent plus volontiers dans la vague de " nouvelle évangélisation " notamment encouragée par des sectes d'origine protestante. Cela se traduit par des flambées de violence régulières, qui perpétuent un climat de tensions ethniques et religieuses particulièrement exacerbées dans le nord du pays.

Ainsi, en 1980, l'insurrection de la secte Maitatsine, violemment réprimée par l'armée, a fait plus de 4.000 morts dans la région de Kano. Elle a été suivie de violents pogroms anti-chrétiens en octobre 1982, février 1984, avril 1985 notamment, puis en janvier 1993. D'autres sectes d'inspiration sans doute chiites sont actives plus au nord, et sont à l'origine de violents affrontements en décembre 1994 puis en septembre 1996.

Il est clair que le grand djihad lancé au début du XIX ème siècle par Usman Dan Fodio reste présent dans toutes les mémoires. Plus récemment, la controverse violente née en 1976 autour des modalités d'intégration de la charia dans la Constitution -avec notamment la mise en place d'une Cour fédérale d'appel de la charia -, n'a toujours pas été résolue.

L'annonce toute récente de l'application stricte de la charia dans l'Etat de Zamfara (3 millions d'habitants) à compter du 27 janvier 2000 (port du voile, suppression de la mixité dans les écoles et les transports publics, suppression des prêts à intérêts, application du Code pénal islamique) suscite une forte vague d'inquiétude, particulièrement ressentie par la délégation sénatoriale lors de son passage à Abuja et à Kano 30( * ) .

Le renforcement des antagonismes religieux, et leur " politisation " devient désormais, pour de nombreux observateurs, un facteur de tension qui risque de prendre la prééminence sur les clivages ethniques et régionaux .

Telle est notamment l'analyse contenue dans le dernier rapport RAMSES 2000 31( * ) .

" Dépolitisée, sans moyens militaires d'importance, la simple révolte de misère ne dispose que d'une idéologie de substitution : le religieux. Le terrorisme religieux dévoyé en violence millénariste est sans doute l'un des problèmes les plus complexes qu'auront à gérer demain les sociétés développées. La limite du terrorisme politique est connue : c'est celle de la raison stratégique, qui impose de mettre en relation l'objectif et le risque. La force du terrorisme religieux est autre : elle ne se réfère pas au même type de logique ".

Dans la région yorouba du sud-ouest, l'introduction du christianisme dès les tout débuts de la colonisation n'a pas donné naissance à une véritable communauté religieuse. Au sein même de la religion chrétienne, catholiques 32( * ) et protestants (autour du Christian Council of Nigeria ) continuent de se faire concurrence. Ceci contribue à conforter la progression de l'islam, notamment dans les Etats de Lagos, Oyo et Ogun. Enfin, la montée des " églises chrétiennes indépendantes " (notamment l' Aladura ) et la prolifération des sectes empêchent définitivement la formation d'un bloc confessionnel monolithique : anglicans, presbytériens, catholiques, baptistes, adventistes du Septième jour coexistent désormais avec des sectes plus récentes prêchant le Renouveau, comme l'Eternel Ordre Sacré des Chérubins , Séraphins ou l'Eglise Céleste du Christ 33( * ) .

c.- Une nouvelle force politique ? : le mouvement pentecôtiste

Il convient de souligner l'essor considérable, depuis une vingtaine d'années, des églises chrétiennes indépendantes, déjà avec la montée de l' Aladura , né en pays yorouba dans les années 30, qui se distingue par l'inclusion dans son rituel d'éléments provenant des religions " traditionnelles ", mais aussi, plus récemment, avec l'explosion du christianisme pentecôtiste , dont les églises sont regroupées depuis 1975 au sein de l'influente Pentecostal Fellowship of Nigeria .

Les " églises " les plus récentes s'adressent aux populations jeunes, relativement éduquées, à mobilité sociale ascendante, et privilégient les contacts et les expériences internationales. Le mouvement pentecôtiste propose de nouveaux réseaux, à la fois spirituels et matériels, qui dépassent les clivages locaux, ethniques, religieux traditionnels ou même sociaux. Il offre par ailleurs un canal privilégié d'expression des revendications et des aspirations individuelles et collectives, maîtrise parfaitement l'utilisation des médias, et n'hésite pas à évoquer la nécessité de " gagner le Nigeria " et de lancer une " armée d'invasion " contre les incroyants 34( * ) .

De fait, il constitue désormais une force politique non négligeable, susceptible d'introduire de nouvelles lignes de fractures, dans un paysage déjà très chahuté.

Religion et politique

" Notre Père, qui êtes aux cieux, vous avez accordé à notre pays, le Nigeria, des richesses naturelles et humaines. Nous sommes profondément désolés de la mauvaise utilisation de ces cadeaux, à travers l'injustice, les pots-de-vin et la corruption, à cause de laquelle nombre de nos compatriotes sont affamés, malades, ignorants et sans défense " (Oraison écrite par les évêques du Nigeria. Lecture obligatoire dans les églises catholiques le dimanche).

B.- UNE PUISSANCE INCONTOURNABLE

I.- Le cinquième de la population du continent, campé sur un carrefour stratégique.

a.- Un carrefour stratégique

La Fédération du Nigeria occupe une position géographique stratégique. Elle se situe en effet au carrefour de trois axes fondamentaux : l'axe saharien reliant la Méditerranée à l'Afrique subsaharienne, l'axe sahélien traversant le continent d'est en ouest, l'axe guinéen longeant l'Atlantique, de la Mauritanie au Golfe de Guinée.

Le Nigeria représente un condensé de tous les paysages d'Afrique de l'Ouest : plateaux herbeux et savanes arborées de type sahélien au nord, papyrus et roseaux le long du bassin asséché du lac Tchad, à l'extrême nord-est, plateaux climatiques et forêts dégradées au Centre, avec cultures de cacao et de palmiers à huile ; marécages et mangroves du delta du Niger au sud, forêts tropicales et collines vallonnées du pays yorouba à l'ouest 35( * ) .

De fait, le quadrilatère ainsi couvert, soit 923.773 km 2, constitue un des rares Etats africains auquel les données géographiques confèrent une possible autonomie et de substantielles potentialités de développement. L'accès à la mer s'étend sur 800 km le long du Golfe de Guinée. Le réseau hydraulique tracé par le Niger et ses affluents est à la fois considérable et relativement exempt de déséquilibres catastrophiques 36( * ) .

Le Nigeria se situe enfin au " confluent " de quatre pays francophones : le Niger au nord (1.497 km de frontières), le Bénin à l'ouest (773 km de frontières), le Cameroun au sud-est (1.690 km de frontières) et le Tchad à l'est (87 km de frontières).

b.- La plus importante concentration démographique du continent

Une démographie toujours croissante, à l'inverse du reste du monde .

Avec 118 millions d'habitants, le Nigeria est aujourd'hui, de loin, le plus peuplé du continent. Ses premiers" concurrents " africains sont, loin derrière l'Egypte et l'Ethiopie (60 millions), le Congo (46 millions), la Tanzanie (31 millions), le Kenya (29 millions) 37( * ) .

La population nigériane représente le quart du total de la population du sous-continent africain et près de la moitié de la population de l'Afrique de l'Ouest. A eux tous, les voisins francophones du Nigeria atteignent à peine le tiers de la population nigériane : près de 14 millions d'habitants au Cameroun, moins de 10 millions au Niger, 7 millions au Tchad, près de 6 millions au Bénin, un peu plus de 4 millions au Togo.

Or, à l'entrée dans le troisième millénaire, le Nigeria est désormais le seul pays au monde, avec le Pakistan, à ne pas avoir été affecté, comme la quasi-totalité des pays les plus peuplés au cours des trois dernières décennies, par un " basculement profond ", à l'origine d'un sensible ralentissement de la croissance démographique 38( * ) .

De fait, avec un taux de croissance annuel démographique de 2,9 %, un taux de fécondité supérieur à 6 enfants par femme, la population nigériane pourrait, selon les dernières perspectives démographiques des Nations-Unies ( Rapport mondial sur le développement humain - 1999 ), atteindre 154 millions d'individus en 2015 .

Une urbanisation ancienne et importante

Cette population est caractérisée -de façon historique- par une forte urbanisation. 40 % de la population totale du Nigeria vit aujourd'hui 39( * ) -et souvent depuis plusieurs générations- en ville.

Il s'agit là en effet d'une donnée historique. Elle remonte aux cités-Etats haoussas (Kano, Katsina, Sokoto, Zana) du nord du pays, situées au confluent des grandes routes caravanières du continent africain, mais aussi aux villes yoroubas traditionnelles à forte densité, assises sur une forte imbrication avec le milieu rural, avec lequel elles ont toujours entretenu des liens étroits, et enfin aux villes côtières de l'époque coloniale, notamment stimulées par le " commerce " des esclaves (Lagos, Badagry, Bonny, Calabar, Port Harcourt). Datent également de l'époque coloniale la ville de Kaduna, capitale coloniale du Protectorat britannique du nord, et celle de Jos, sur les hauts plateaux, centre de l'industrie de l'étain.

La prospérité pétrolière des années soixante-dix a considérablement renforcé ce mouvement, et le Nigeria a connu à cette époque le taux de croissance de la population urbaine le plus rapide du monde. Dès 1990, les 21 capitales fédérales du Nigeria comptaient toutes plus de 100.000 habitants, et 15 d'entre elles dépassaient 200.000 habitants.

Il en résulte aujourd'hui un contraste marqué entre Lagos, qui présente désormais tous les handicaps des villes du Tiers monde, à l'instar des autres " villes " pétrolières comme Port Harcourt 40( * ) , ravagées par la pollution et le banditisme, Abuja, nouvelle capitale surgie d'un plateau désertique au coeur du pays, clone africain de Brasilia 41( * ) , traversée d'échangeurs routiers et de carrefours à la fois suréquipés et déserts, semée de bâtiments administratifs imposants au milieu de terrains toujours en friche, et enfin les cités historiques comme Kano, horizontales et conçues en cercles successifs autour de l'ancienne médina fortifiée, apparemment paisibles, où circulent en bonne harmonie cavaliers peuls, chameaux venus du nord et bicyclettes chinoises.

La ville de Lagos constitue une illustration extrême de l'explosion des villes tentaculaires du sud, marquées par la déstructuration, le déracinement des habitants, l'absence totale de maîtrise foncière et d'équipements de base (ni égouts, ni éclairage public, ni feux de signalisation, ni trottoirs), la pollution massive de l'air et de l'eau liée à l'inexistence de systèmes d'évacuation des eaux usées et des déchets solides, l'impossibilité de circuler, la montée de la délinquance, de la criminalité et de la violence pure. Loin de découvrir pour la première fois une ville du " Tiers monde ", la délégation sénatoriale a pourtant été très particulièrement marquée par la conjonction inexorable et massive de tous les handicaps possibles avec, en outre, une absence totale d'insouciance et de gaieté, un sentiment de dureté, d'âpreté, d'agressivité latente, un rapport de forces permanent, un marchandage continu, qu'on ne trouve pas à ce degré dans les autres villes de même nature 42( * ) .

Avec un nombre d'habitants estimé -avec de considérables marges d'erreur potentielle - à 12 millions aujourd'hui 43( * ) , ce qui en fait la sixième plus grande ville du monde, Lagos pourrait, selon les estimations des Nations-Unies, doubler sa population en 15 ans pour atteindre 24,4 millions en 2015, devenant ainsi la troisième ville du monde après Tokyo (28,7 millions) et Bombay (27,4 millions).

Aperçus de Lagos

Les " go-slows " : embouteillages soudains et massifs, qui peuvent se traduire par plusieurs heures d'immobilité, la seule mobilité étant celle des animaux qui circulent en permanence entre les voitures, et des handicapés montés sur des planches de surf, " risque " constant pour les conducteurs incapables de les repérer. Pratiquement aucun " deux roues ", contrairement à la plupart des villes du Tiers monde.

Les " pikins " : les enfants " rois du bitume ", qui vendent un peu de tout, généralement à l'unité (y compris la chaussure et l'allumette) avec beaucoup d'insistance et un certain talent.

Les " area boys " : vivant au bord des routes en permanence, ils se faufilent sous les voitures pendant les go-slows pour arracher une durite ou débrancher un fil électrique...

Les " bolekajas " (" descends et viens te battre ") : surnom des conducteurs. Les permis de conduire s'achètent. Pas d'auto-écoles, pas d'assurances, pas d'entretien des voitures, souvent " reconstituées ", pas de feux, de trottoirs ou de passages cloutés, pas d'ambulances, moins encore de " SAMU "... C'est la règle du chacun pour soi.

La NEPA : EDF locale, surnommée Never Expect Power Again...

Le " Juju market " : marché local de la sorcellerie, officiellement connu pour ses trafics d'organes humains.

Les " gutters " : " construit " sur des marécages, tout Lagos est aujourd'hui un égout à ciel ouvert (3 % à peine des ordures sont évacuées, généralement à dos d'homme). En saison des pluies, les " trottoirs ", purement abstraits, sont remplacés par des torrents qui charrient un peu de tout -on y fait le tri. Le seul bâtiment administratif un peu " florissant " remarqué par la délégation est celui de la " Flood and Erosion Control Division " du ministère de l'Equipement et du Logement.

Les " ghettos blindés " : ambassades, légations, sociétés étrangères et grands hôtels vivent retranchés dans des ghettos avec veilleurs de nuit armés, voitures blindées, talkies-walkies, grillages de protection, barbelés et barreaux, chambres blindées pour s'enfermer la nuit au sein même de son domicile.

Une population jeune et relativement " qualifiée "

La population nigériane est massivement jeune : 45 % de la population a moins de 14 ans, avec une espérance de vie de 54 ans en moyenne. En outre -même si ces données sont peu fiables-, il semble qu'elle soit " relativement " moins décimée par le sida que d'autres Etats du sous-continent 44( * ) .

Elle est également, là encore de façon ancienne, une des plus éduquées du sous-continent. 67 % de la population est alphabétisée.

Trois " systèmes " d'éducation différents coexistent encore au Nigeria. Le système " indigène ", encore très présent en région rurale, fondé sur une éducation " communautaire " et des systèmes d'  " apprentissage professionnel " relativement élaborés et surtout " suivis " ; les écoles coraniques, complétées par les centres d'études islamiques, particulièrement nombreux, anciens et réputés dans le nord du pays ; enfin l'enseignement " à l'occidentale " dispensé dès les débuts de la colonisation par les missions chrétiennes -méthodistes, anglicanes, catholiques.

Au moment de l'unification en 1914, le Nigeria comptait 36.800 enfants scolarisés dans le primaire (1.100 dans le nord et 35.700 dans le sud), et onze établissements d'enseignement secondaire dans le sud. A la veille de l'Indépendance, à la fin des années cinquante, 2,4 millions d'enfants fréquentaient des établissements d'enseignement primaire, et 36.000 des établissements d'enseignement secondaire, toujours dans le sud essentiellement. En 1985, 13 millions d'élèves fréquentaient 35.000 établissements publics d'enseignement primaire, et 125.000 étudiants étaient inscrits dans 35 collèges et universités. Aujourd'hui, chaque Etat fédéral possède au moins un campus. Selon les chiffres officiels, en 1996, le Nigeria comptait 46.000 écoles primaires et secondaires et 573.000 enseignants pour 18,2 millions d'étudiants.

Cet effort manifeste doit toutefois être nuancé. Lors du passage de la délégation, la totalité de l'enseignement -primaire, secondaire et supérieur- était en grève illimitée. Les enseignants nigérians sont ironiquement surnommés " ceux qui seront récompensés au Ciel ", tant ils sont aujourd'hui délaissés par le Gouvernement, qui n'arrive même pas à payer un salaire fixé à 240 francs par mois... De graves troubles se produisent régulièrement sur les campus universitaires, dans lesquels la montée des sectes et la criminalisation des associations d'étudiants adeptes de cultes secrets ( Scorpions noirs, Filles de Jézabel, Vickings, Chiens de mer... ) deviennent préoccupantes.

Il reste que les élites nigérianes sont incontestablement les premières d'Afrique Noire, d'abord certes par leur nombre, mais aussi de par la grande vivacité de la vie intellectuelle.

Apparue dès la fin du XIX ème siècle (1859), sans doute aujourd'hui la plus puissante du sous-continent africain, la presse nigériane est considérée par l'Institut International de Presse de Zurich comme " la plus libre d'Afrique Noire ".

Elle comporte aujourd'hui 18 grands titres quotidiens (dont 12 à Lagos), 14 hebdomadaires et plus de 200 magazines. Elle est complétée par 29 chaînes nationales, 17 chaînes régionales, 11 retransmises par satellite et 11 par câble, enfin une quarantaine de stations de radio 45( * ) .

D'une manière générale, la vie intellectuelle, littéraire ou artistique nigériane reste une des plus créatives du sous-continent.

Le Prix Nobel de littérature décerné en 1986 à Wole Soyinka 46( * ) a certainement contribué à la reconnaissance de l'excellence de la littérature nigériane. Mais, dès 1952, déjà, Amos Tutuola avait publié The Palm-wine Drinker and his Dead Palm-wine Tapster in the Dead's Town , immédiatement traduit en français par Raymond Queneau ( L'Ivrogne dans la Brousse ). Nombreux sont encore les auteurs nigérians de renommée mondiale 47( * ) . Pour l'essentiel, cette littérature souligne sans complaisance le poids du passé, le conflit permanent entre tradition et modernité, la violence et la corruption des moeurs " modernes ".

On retrouve la même vitalité en matière de peinture ou de musique 48( * ) .

II.- Des ressources naturelles conséquentes, aujourd'hui masquées par la dictature du pétrole

a.- Des ressources naturelles considérables, insuffisamment exploitées

Devenu en moins de trente ans le 6 ème producteur mondial de pétrole, le Nigeria s'est entièrement voué à cette richesse inattendue, abandonnant l'essentiel de l'exploitation des ressources qui avaient pourtant fait sa renommée dès les débuts de la colonisation 49( * ) .

En 1970, le Nigeria était en effet le premier producteur mondial d'arachides et d'huile de palme, et le second pour le cacao.

Trente ans plus tard, 97 % de ses recettes d'exportation reposent désormais sur les produits pétroliers, contre 60 % en 1970, la part des produits non pétroliers étant passée, au cours de la même période, de 40 % à 3 %.





Evolution de la structure des exportations

(en pourcentage )

1970

1990

Produits agricoles

28,3

2,1

dont cacao

15,6

1,0

dont noix de cajou

5,1

0

Produits agricoles transformés

3,1

0

Produits minéraux

0,2

0,1

Produits manufacturés

4,0

0,2

dont métallurgie

4,0

0

Autres

4,7

0,5

Total produits non pétroliers

40,3

3,0

Produits pétroliers

59,7

97,0

Source : FMI : Nigeria, Experience with Structural Adjustment, Occasional Paper n° 148, mars 1997.

Production agricole 1997

(milliers de tonnes)

Manioc

32.510

Ignames

27.710

Sorgho

7.052

Mil

5.610

Riz

3.200

Haricots

1.867

Arachide

1.723

Bananes plantain

1.689

Source : Central Bank of Nigeria

Evolution des exportations de produits non pétroliers

(millions US$)

1980

1990

Produits agricoles

622,5

283,8

dont Palmiers à huile

25,8

11,8

dont Cacao

568,7

130,3

dont Caoutchouc

25,8

95,7

dont Coton

2,2

12,0

Produits agricoles transformés

51,9

16,7

Produits minéraux

--

3,3

Produits manufacturés

26,0

31,8

- métallurgiques

26,0

0,6

- textiles

--

12,8

- chimiques

--

18,3

Autres

259,2

69,9

TOTAL

959,2

405,5

Source : FMI : Occasional Paper n° 148

Le monopole pétrolier contemporain masque en réalité l'existence de ressources naturelles pourtant importantes et diversifiées, du moins à l'origine, y compris dans le secteur agricole, longtemps exportateur -auprès des pays européens au temps de la colonisation, mais aussi plus récemment auprès des pays limitrophes moins favorisés. Leur exploitation est toutefois aujourd'hui, de façon risquée, tombée dans une désuétude telle que d'aucuns évoquent désormais la " malédiction pétrolière " ou une nouvelle manifestation de la " dutch disease " 50( * ) .

Ressources minières

Le Nigeria possède d'importants gisements de charbon, de chaux, d'étain, d'or, de plomb, de zinc, de fer, de colombite, d'uranium -certains, comme l'uranium- n'ayant encore fait l'objet ni d'une reconnaissance suffisante, moins encore d'une exploitation sérieuse. Enfin, lorsqu'elles existaient, la plupart des exploitations ont été laissées à l'abandon. Ainsi, de 1990 à 1994, la production de charbon est passée de plus de 77.000 tonnes à moins de 13.000 tonnes, du fait de l'obsolescence des équipements et de la croissance des coûts de production.

Actuellement, le nouveau Gouvernement Obasanjo multiplie, comme déjà le précédent, les déclarations et les initiatives pour relancer le secteur minier, dans une optique de diversification de l'économie.

La cassitérite (210 tonnes en 1998), la colombite (30 tonnes), le charbon (220.000 tonnes et la pierre à chaux (3,28 millions de tonnes) sont les quatre minéraux actuellement exploités. Mais des études, plus ou moins sérieuses, s'intéressent désormais, à la demande pressante du nouveau Gouvernement, aux potentialités en matière d'or, de bitume, d'étain et de tantale 51( * ) .

Ressources agricoles

D'autre part, le Nigeria dispose de réelles potentialités agricoles.

La superficie cultivée représente le tiers environ de la surface totale du pays, soit la dixième au monde. Le nord est caractérisé par une agriculture céréalière et le sud par une agriculture de tubercules, la Middle Belt réunissant les deux. Le nord cultive donc le sorgho, le mil, le maïs, en association avec les arachides et le coton, ainsi qu'un peu de blé et de riz le long des rivières et des canaux d'irrigation 52( * ) . Le sud produit du manioc, des ignames, des bananes plantain, ainsi que les cultures qui ont fait la célébrité du Nigeria aux débuts de la colonisation : les palmiers à huile, puis le cacao et le caoutchouc. Les ressources de la pêche et de l'élevage sont également conséquentes. Le Nigeria reste encore le premier producteur africain d'huile de palme, mais ne couvre plus que les deux-tiers de la demande intérieure. Il a laissé passer le " boom " du coton dont ont bénéficié les pays du Sahel pendant les années 70. Il dispose encore d'un potentiel intéressant en matière de gomme arabique, étant le second producteur mondial après le Soudan. Enfin, le principal produit générateur de devises est devenu le cacao.

Il faut donc déplorer qu'une utilisation peu rationnelle des sols, une déforestation incontrôlée et surtout la découverte de l'eldorado pétrolier aient conduit ce secteur à une quasi déshérence. Autrefois l'un des champions africains de l'exportation agricole, le Nigeria n'assure même plus son autosuffisance alimentaire, et doit désormais importer pour nourrir sa population -certes en croissance accélérée. Les produits vivriers représentent aujourd'hui 12 % du total des importations. Pourtant, les spécialistes considèrent généralement que -à condition d'investir dans un minimum d'infrastructures adéquates- le Nigeria pourrait facilement satisfaire un marché intérieur de près de 120 millions de consommateurs, tout en développant une réelle capacité d'exportation vers les pays voisins déficitaires.

Capacités de transformation

Enfin, le Nigeria dispose, aujourd'hui encore, de la plus importante capacité industrielle de transformation de l'Afrique subsaharienne, composée à la fois de petits industriels locaux et de nombreuses multinationales. Là encore, toutefois, le recul de la production est constant, notamment dans les sous-secteurs des biens manufacturés et des produits miniers. Aujourd'hui, le taux moyen d'utilisation des capacités de production est inférieur à 30 %. Ainsi, la production automobile nigériane, qui assemblait plus de 170.000 véhicules par an en 1980 (notamment dans les usines Peugeot de Kaduna, aujourd'hui en veilleuse), a diminué de plus de 70 %. On note toutefois une sensible reprise de cette production depuis 1998, qui bénéficie notamment à Peugeot 53( * ) . En revanche, les industries textiles, autrefois florissantes, poursuivent leur dégringolade.

b.- Le sortilège pétrolier

" Oil, sweet oil " 54( * )

Le Nigeria possède un potentiel pétrolier et gazier exceptionnel -tant en quantité qu'en qualité.

Les premiers indices signalant la probable présence d'hydrocarbures remontent au début du siècle. Dès 1937, Shell et BP ont obtenu un permis de recherche couvrant l'intégralité du territoire. Les premiers forages ont été effectués par la Shell en 1951. La licence de concession unique est supprimée en 1961 et de nombreuses compagnies étrangères s'implantent alors avec succès.

La production passe de 5.000 barils par jour en 1958 à 2,3 millions de barils par jour en 1979, période où elle atteint son maximum, fournissant, à l'époque, plus de 25 milliards de dollars de revenus annuels . La moyenne s'établit aujourd'hui à plus de 2 millions de barils par jour, soit 100 millions de tonnes par an 55( * ) , faisant du Nigeria le premier producteur africain, devant la Libye et l'Algérie, le quatrième exportateur OPEP, et le sixième exportateur mondial.

Le pétrole nigérian bénéficie en outre d'un double atout : une excellente qualité et un faible coût de production (2 à 3 $/baril), ce qui lui confère, en conjoncture basse, une résistance économique presque comparable à celle du pétrole du Moyen-Orient.

Les réserves (prouvées) de pétrole sont actuellement estimées à 22 milliards de barils (dont 40 % en offshore), soit l'équivalent de 21 années de production au rythme actuel . La production offshore , aujourd'hui estimée à 1,12 million de barils par jour devrait progressivement prendre le pas sur la production onshore (1 million de barils par jour), notamment pour des raisons de sécurité 56( * ) .

Parallèlement, les réserves connues de gaz naturel sont évaluées à plus de 8.000 milliards de m 3 , ce qui place le Nigeria parmi les dix premiers pays possédant les plus grandes réserves du monde, et représente un potentiel de 150 ans de production au rythme d'exploitation actuel.

Les réserves de gaz sont, jusqu'à présent, demeurées inexploitées. Longtemps déconsidéré dans un pays dénué de base industrielle pour l'utiliser, le gaz naturel a jusqu'ici fait l'objet, s'agissant du gaz associé, d'un brûlage à la torche important, équivalent à 70 % de la production.

La production du pétrole nigérian est confiée depuis 1971 à la Nigerian National Petroleum (NNPC) , associée en joint-venture aux sept conpagnies majors étrangères.

Les majors avancent à 100 % les dépenses d'exploitation -compte non tenu des dépenses d' " environnement "-, et la NNPC rembourse à hauteur de 60 % (cash calls), en dollars et devises locales, avec un retard plus ou moins long. Le montant accumulé des arriérés s'élève désormais à plusieurs milliards de dollars.

De fait, la privatisation actuellement envisagée, même partielle, des participations que l'Etat détient, via la NNPC, dans les principales entreprises de production, pourrait redonner un coup de fouet à l'exploration-production.



Répartition de la production de pétrole

Part détenue par la NNPC en joint-venture

Shell

44,55 %

55 %

Mobil

19,3 %

60 %

Clevron

18,1 %

60 %

Agip

7 %

60 %

Elf

6,5 %

60 %

Texaco

2,5 %

60 %

La " malédiction " de l'or noir ?

Ce potentiel considérable contient toutefois, en lui-même, des risques majeurs.

D'abord parce que les recettes ainsi procurées dépendent, de façon étroite, de l'évolution du cours mondial du baril exprimé en dollars. Cette dépendance extérieure devient particulièrement forte dès lors que les recettes pétrolières représentent l'essentiel (96 % aujourd'hui) des recettes totales d'exportation.

De fait, après avoir atteint un sommet en 1981 à 58 dollars, le cours du baril a suivi une évolution plus erratique. Descendu à 14,3 dollars en 1986, il a touché en 1998 son niveau le plus bas depuis 1973. Du coup, les revenus pétroliers annuels du Nigeria ont diminué de moitié, passant de 12 à 7 milliards de dollars.

Les cours connaissent depuis une constante remontée qui les a conduits à 25 dollars le 15 novembre dernier, en liaison avec les déclarations de l'OPEP de prolonger ses réductions de production et la menace irakienne de " fermer les robinets ". Cette reprise des cours à la hausse risque toutefois d'être partiellement contrebalancée par une baisse des volumes exportés de l'ordre de 12 %, en raison d'une part du manque croissant de productivité du secteur lié à la recrudescence des troubles dans le delta 57( * ) , et d'autre part à la décision de réduction des quotas de l'OPEP (23 mars 1999) qui a fixé, pour le Nigeria, un maximum de production de 1,885 million de barils/jour à compter du 1 er mai 1999.

Si le pétrole nigérian possède une qualité de haut niveau, ses conditions d'exploitation sont particulièrement nocives en termes d'environnement. La petite taille des gisements se traduit par une exploration intensive du territoire concerné, au prix d'une forte dégradation des sols 58( * ) . Enfin, l'importance du brûlage à la torche du gaz jusqu'à présent inutilisé induit une pollution de l'air qui atteint des niveaux inégalés.

Or, les inquiétudes grandissantes concernant l'environnement menacent à terme, au niveau mondial, le secteur pétrolier. La convention de Kyoto sur le réchauffement planétaire de 1997 prévoit un sommet de suivi fin 2000, dont les conclusions pourraient bien être porteuses de nouvelles contraintes coûteuses pour le secteur pétrolier.

En revanche, une telle évolution favoriserait l'essor du gaz naturel, déjà amplifié par la libéralisation progressive des marchés du gaz et de l'électricité au niveau mondial.

Or, dans ce secteur, les potentialités nigérianes sont considérables, supérieures sans doute encore à celles du pétrole.

Il est donc regrettable que l'usine de liquéfaction de GNL (gaz naturel liquéfié) de Bonny , construite par le consortium NNPC-Shell-AGIP-ELF, d'un coût voisin de 4 milliards de dollars, en vue d'assurer d'ici deux ans une production de 6,3 millions de tonnes, ait été momentanément mise hors d'état de produire avant même son inauguration, par les communautés locales.

De fait, la montée des troubles dans la région du Niger devient particulièrement préoccupante. En réalité, le " partage du gâteau " pétrolier n'a jamais été résolu de manière satisfaisante par le Gouvernement.

Les Etats " producteurs " devaient -statutairement- recevoir 5 % des revenus fédéraux du pétrole en 1969. Descendu à 2 % en 1982, ce pourcentage a été remonté à 7,5 %, voire 13 % selon la décision -jamais promulguée- de l'Assemblée constituante de 1994, mais à nouveau intégrée dans la nouvelle Constitution de 1999. Reste à l'appliquer.

Depuis le début des années 90, la protestation -devant la dégradation croissante des territoires et l'absence de revenus supplémentaires- a pris une ampleur sans précédent, se traduisant par de véritables actes de terrorisme organisé -sabotages, kidnappings, demandes de rançon. Parallèlement, les forces de sécurité privées, financées par les compagnies pétrolières, ont souvent mené en réalité une guerre toute personnelle par ethnies interposées en alimentant les litiges locaux 59( * ) .

Incidents dans le delta au cours des trois derniers mois

20 septembre : occupation de l'usine de GPL de Bonny.

12 octobre : attaque par 500 jeunes de la communauté itsekiri d'un dépôt de la NNPC :

4 morts.

15 octobre : fermeture du terminal Shell de Forcados.

28 octobre : enlèvement de 6 employés nigérians de la Shell.

1 er novembre : fermeture du terminal Shell de Bonny (6 ème fermeture en 3 mois).

5 novembre : massacre de 12 policiers par les Ijaws dans l'Etat de Bayelsa.

12 novembre : massacre de 10 militaires par les Ijaws à Warri et dans l'Etat de Bayelsa

15 novembre : explosion d'un oléoduc Shell : 4 morts.

22 novembre : opération militaire dans l'Etat de Bayelsa. On évoque des dizaines de victimes civiles et l'évacuation de centaines de civils. Destruction probablement totale de la ville de Odi.

30 décembre : nouvelle fermeture, pour un mois, du terminal Shell de Forcados.

La persistance et la sophistication désormais accrue de ces perturbations rend chaque jour plus aléatoires les conditions d'exploitation des gisements pétroliers et gaziers et conduisent les sociétés étrangères à multiplier les fermetures de sites et les arrêts d'enlèvements pour " force majeure ".

" La situation des compagnies pétrolières et de leurs sous-traitants, pris en otage sur le terrain par la guérilla business, devient de plus en plus précaire. Non seulement rien n'est jamais durablement résolu, les accords négociés au cas par cas avec les communautés étant très vite remis en cause, mais le " savoir faire " revendicatif musclé mis au point dans le delta est en train de faire tâche d'huile sur les Etats voisins du nord et de l'ouest, partout où les ethnies locales sont au contact des entreprises étrangères " 60( * ) .

Cette situation pose un défi majeur à la société civile qui vient de se mettre en place. De fait, après près de six mois d'apparente " inertie ", le Président Obasanjo a décidé -le 22 novembre dernier- d'envoyer l'armée dans le delta. Les conditions de " remise en ordre " dans ce secteur, désormais entièrement bouclé par l'armée, n'ont pas été connues.

III.- L'affirmation institutionnelle d'une prééminence régionale 61( * )

Fort de sa position géographique centrale, de son poids démographique et de ses richesses énergétiques, le Nigeria a, depuis l'Indépendance de 1960, constamment confirmé son ambition de jouer un rôle moteur au sein du sous-continent africain. Ainsi, dès la fin de la deuxième guerre mondiale, il s'est fait le champion de la dénonciation de la colonisation et de l'apartheid. En 1961, il a suspendu ses relations diplomatiques avec la France pour protester contre les essais nucléaires au Sahara.

a.- De la CEDEAO à l'ECOMOG : une évolution sécuritaire

Instituée le 28 mai 1975 à Lagos, le CEDEAO ( ECOWAS/Economic Community of West Africa States ) regroupe 16 pays anglophones, francophones et lusophones de la région : Bénin, Burkina-Faso, Cap-Vert, Côte-d'Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée-Bissau, Liberia, Mali, Mauritanie 62( * ) , Niger, Nigeria, Sénégal, Sierra Leone, Togo. Deux grands voisins du Nigeria, le Tchad et le Cameroun, n'en font pas partie.

La CEDEAO s'était fixée initialement pour principaux objectifs l'établissement d'une union douanière et d'un marché commun destinés à favoriser la libre circulation des personnes et des marchandises en Afrique de l'Ouest.

Toutefois, les intérêts commerciaux concurrents des pays membres, l'absence de partenaires majeurs -le Cameroun notamment-, l'existence concurrente d'autres organismes sous-régionaux à vocation similaire (UEMOA), l'inexistence d'une monnaie commune à l'instar du franc CFA, le non-paiement des cotisations, l'importance de l'économie informelle dans la sous-région, ont considérablement handicapé la réalisation de ces objectifs

De fait, à partir de 1990, la CEDEAO s'est largement éloignée de ses objectifs initiaux en s'orientant, sous l'impulsion marquée du Nigeria, vers une mission de " maintien de la paix " initialement au Liberia 63( * ) .

Lors de la 16 ème conférence de la CEDEAO en 1993 à Cotonou, il fut décidé que " la résolution des conflits constituerait désormais une des missions essentielles de la CEDEAO ". Ainsi fut mise sur pied l'ECOMOG ( Ecowas Cease Fire Moritoring Group ).

- La première intervention a eu lieu en 1990 au Liberia, et mobilisé 4.000 hommes 64( * ) sous commandement nigérian. Les forces ECOMOG ont quitté le pays 8 ans plus tard en 1998. Le mandat était large : cessez-le-feu, désarmement des factions, organisation d'une conférence nationale, tenue d'élections 65( * ) .

- La deuxième intervention, presque exclusivement nigériane 66( * ) , s'est déployée en Sierra Leone après le coup d'Etat de mai 1997 à Freetown. Le Nigeria a engagé 10.000 soldats dans cette opération pour un coût global estimé à 8 milliards de francs. Ayant entamé une procédure de retrait graduel des soldats nigérians de l'ECOMOG, le Président Obasanjo s'est engagé à porter à 1.562 hommes sa participation à la force de paix des Nations-Unies en Sierra Leone (MINUSIL).

- La troisième intervention, exclusivement francophone (600 hommes), sous commandement togolais, a été envoyée en Guinée Bissau en février 1999. Elle est devenue sans objet avec le renversement du Président Vieira le 7 mai 1999 67( * ) .

Avec l'instrument ECOMOG, le CEDEAO apparaît donc désormais comme l'organisation africaine sous-régionale qui dispose de la plus large expérience dans le domaine du maintien de la paix. Fort opportunément, le sommet de 1998 de la CEDEAO à Abuja a " institutionnalisé " davantage ce mécanisme régional de gestion des conflits avec la création d'un Conseil de médiation et de sécurité de 9 membres, la mise en place d'un Conseil des Sages, et l'institution de structures intégrées de commandement.

Il est clair que, au sein de la CEDEAO comme de l'ECOMOG, le Nigeria joue un rôle prééminent, et entend bien qu'il continue à en être ainsi 68( * ) .

Dans le cadre de la " nouvelle politique africaine " de la France, il apparaît donc particulièrement opportun, et ce notamment à l'égard du Nigeria, de marquer le soutien de la France à ces deux organismes, en témoignant à la CEDEAO un intérêt au moins aussi marqué que celui accordé à la SADC (organisme équivalent pour les pays d'Afrique australe) en plaidant pour une aide accrue à cet organisme par le biais du FED, en favorisant le rapprochement entre les zones CFA et naïra, et en encourageant encore l'institutionnalisation de l'ECOMOG.

b.- La nouvelle Commission du Golfe de Guinée : alternative à l'ECOMOG ou volonté de répartir désormais la manne offshore en dehors de l'influence occidentale ?

Le 19 novembre 1999, a été mis en place à Libreville, sous l'égide du Président Bongo, un nouvel organisme " chargé de prévenir, gérer et régler les conflits existants et potentiels dans les eaux de cette mer commune " 69( * ) . Le Cameroun, absent de la CEDEAO et de l'ECOMOG, y fait une entrée remarquée. L'identité des nouveaux membres met l'accent sur l'existence d'une volonté partagée par l'ensemble des pays riverains 70( * ) -au sens large- du Golfe de Guinée, riche en ressources halieutiques et pétrolières, de définir désormais " entre soi " la répartition des droits potentiels sur les considérables ressources -notamment pétrolières- en eau profonde de cette zone. Le texte du communiqué final insiste en effet particulièrement sur l'exploration et l'exploitation des ressources naturelles " situées aux limites territoriales et notamment aux zones territoriales exclusives -ZEE- des Etats membres ".

Cette initiative constitue en quelque sorte une généralisation de principe des accords bilatéraux déjà intervenus sur ce domaine, comme celui passé en avril 1999 entre le Nigeria et la Guinée Equatoriale, à propos d'opérations de forage menées, depuis le Nigeria, par deux plates-formes d'Elf. Elle pourrait également constituer une solution bilatérale au conflit qui oppose depuis 1994 le Nigeria au Cameroun à propos de la presqu'île de Bakassi 71( * ) .

c.- Institutionnalisation du tandem Nigeria-Afrique du Sud : une donnée durable ?

Les 4 et 5 octobre 1999, s'est tenue à Abuja la première commission mixte Nigeria-Afrique du Sud. L'Afrique du Sud était représentée par son Vice-président Jacob Zuma.

L'objectif déclaré est d' " instaurer une coopération active et suivie à la fois au niveau des pouvoirs publics et à celui des secteurs privés, pour promouvoir le développement économique " 72( * ) . Parmi les domaines de coopération cités par le communiqué, figurent le pétrole, les minerais, l'énergie, les communications et l'acier. Par ailleurs, les deux pays ont renouvelé leur appel à une démocratisation du système des Nations-Unies qui permette la représentation concrète de l'Afrique au Conseil de Sécurité de l'ONU.

Cette première réunion s'inscrit à l'évidence dans une ambition commune et déclarée des deux plus puissants Etats du sous-continent de jouer désormais un rôle actif dans l'évolution de celui-ci : " Les deux pays vont travailler ensemble pour déterminer la façon dont l'Afrique doit vivre ", a déclaré à cette occasion le Président Obasanjo 73( * ) .

Il convient de noter également, dans le même " ordre d'idées ", la volonté déclarée du Gouvernement nigérian 74( * ) d'établir des relations de " partenariat " de même nature avec l'Egypte, utile contrepoids dans ce cadre à l'Afrique du Sud, mais surtout à la Libye.

II.- LA NÉCESSAIRE PRISE EN COMPTE DU NIGERIA SUR LA SCÈNE INTERNATIONALE

La fin de la guerre froide et de la traditionnelle dichotomie " est-ouest ", la disparition progressive des générations qui ont connu la colonisation -colonisés comme colonisateurs-, le brouillage croissant de la ligne de partage tacite entre Afrique francophone et Afrique anglophone -chez les Français comme chez les anglo-saxons, la prédominance des intérêts économiques et financiers transnationaux sur les considérations strictement politiques- ou l'assujettissement des uns aux autres... -chez les occidentaux comme chez les Africains-, l'enjeu majeur d'un marché potentiel considérable pour des pays confrontés au vieillissement de leur population, mais aussi la multiplication et le durcissement des conflits régionaux sur le sous-continent africain, la nécessité impérative de maîtriser un déséquilibre démographique croissant, la menace liée à la proximité d'un risque épidémique majeur, ainsi que le rôle désormais avéré joué par le sous-continent africain dans les principaux trafics internationaux, ont considérablement modifié les données de la politique africaine.

De fait, la " civilisation " toute récente du régime nigérian a d'ores et déjà donné lieu à une considérable " surenchère ", tant de la part des bailleurs internationaux que des partenaires européens et anglo-saxons traditionnels 75( * ) .

Après avoir été mis au ban de la scène internationale, du temps de l'ère Babangida, puis surtout de l'ère Abacha, fortement entachée par l'exécution de Ken Saro-Wiwa et la multiplication des atteintes aux droits de l'homme, le Nigeria retrouve aujourd'hui, avec l'arrivée au pouvoir d'Olusegun Obasanjo, bien connu des milieux internationaux 76( * ) , une affection parfois démonstrative. Présente au Nigeria du 4 au 10 octobre 1999, la délégation sénatoriale a pu prendre la mesure de la succession quasi ininterrompue de visites, à des niveaux généralement élevés, toujours opérationnels, d'émissaires des principales puissances occidentales.

Dans ce cadre, la France ne peut demeurer indifférente à son 5 ème fournisseur de ressources énergétiques 77( * ) , situé au coeur même de l'Afrique francophone, et dont le rôle en matière de stabilisation de la région est si évidemment crucial, au moment précis où se tourne définitivement la page de la " France gendarme de l'Afrique ".

A.- LE NIGERIA EST DE RETOUR

I.- La reprise de l'aide multilatérale

a.- La Banque Mondiale à nouveau sur place

En même temps que la délégation sénatoriale, a séjourné au Nigeria, -suivant le même circuit Lagos-Kano-Abuja- une délégation conduite par le Président Wolfensohn, accompagné de son épouse et d'une vingtaine de collaborateurs de haut niveau.

Les déclarations faites à cette occasion par le Président Wolfensohn sont apparues particulièrement positives. " Je crois que le Président Obasanjo a notamment pour objectif prioritaire la réforme du secteur public et le traitement de la corruption. Je pense qu'il a à la fois la volonté et la capacité de le faire et il obtiendra certainement notre aide " 78( * ) .

" La Banque Mondiale attend du Nigeria qu'il mette en oeuvre dans les six mois à venir un certain nombre de réformes qui justifieront sa demande de rééchelonnement ou d'annulation de dette... Le Président Obasanjo est la bonne personne, au bon moment, dans ce pays. La Banque aidera votre Gouvernement. Je suis prêt à accorder au Président Obasanjo tout le soutien nécessaire " 79( * ) .

La Banque Mondiale renforce d'ores et déjà à nouveau ses équipes sur place pour réactiver les programmes en vigueur et en initier de nouveaux, centrés principalement sur l'eau, l'énergie et l'éducation (enseignement primaire). Au total, entre l'assistance technique aux privatisations 80( * ) , les opérations en cours, et les programmes nouveaux de première urgence (eau potable et enseignement primaire), le Nigeria devrait bénéficier l'année prochaine de 115 millions de dollars de la BIRD. La SFI -bras séculier de la Banque Mondiale en matière d'assistance au secteur privé- devrait également intervenir dans le domaine des assurances.

b.- La main tendue du FMI

En réponse au " mémorandum " adressé dès son arrivée au pouvoir par le précédent Gouvernement, qui reconnaissait clairement les causes du " malaise " nigérian : mauvaise gestion des ressources, réglementation excessive de l'économie, distorsion des prix et des taux de change notamment, et aux premières décisions visant à abolir le double taux de change et à relever le prix de vente du super à la pompe (janvier 1999) 81( * ) , le FMI avait accepté en février 1999 la mise en place d'un " staff-monitored program " (programme de dialogue et de surveillance), et installé sur place un représentant permanent basé à Abuja.

Sans garantir nécessairement un accès particulier aux crédits FMI, le SMP avait surtout pour intérêt de permettre un rapprochement avec les autres bailleurs de fonds (notamment les membres du Club de Paris) et de préparer, à terme, un accord plus formel, sur la base d'un véritable programme d'ajustement triennal, accompagné cette fois d'un accès privilégié aux ressources FMI.

Face à la non-réalisation des objectifs annoncés, le " staff monitored program " a été remplacé par un " accord commun d'objectifs " comprenant notamment trois éléments principaux :

- le vote d'un collectif budgétaire sur 7 mois, assorti d'un déficit limité à 1,8 % du PIB. Cet objectif a été respecté.

- la mise en place d'un marché des changes libre, le taux de change étant déterminé au jour le jour par le seul gré du marché. L'IFEM ( Interbank Foreign Exchange Market ) a été effectivement mis en place le 25 octobre.

- le remboursement partiel (1,8 milliard de dollars) de la dette à l'égard des créanciers bilatéraux et multilatéraux d'ici la fin de l'année.

La réalisation de ces trois objectifs -notamment du dernier- pourrait déclencher la négociation d'un accord de " stand-by " soumis à l'approbation du FMI (au 1 er trimestre 2000 ?), et permettant un accès ultérieur à une FASR (facilité d'ajustement structurel renforcée).

c.- La reprise de l'aide européenne

Avec 365 millions d'écus programmés pour le programme indicatif national ( PIN ) du 7 ème FED (1991-1995), le Nigeria était l'un des principaux bénéficiaires du 7 ème FED parmi les pays ACP. L'arrêt progressif de tous les programmes à partir de 1994, lié à la détérioration du climat politique, a conduit à ne décaisser que 16 % de ce montant. Aucune allocation au titre du 8 ème FED n'a été accordée.

La transition démocratique engagée par le général Abubakar a rapidement conduit à une levée progressive de ces sanctions.

L'Union Européenne a annulé dès le 1 er novembre 1998 toutes les sanctions civiles frappant le Nigeria et autorisé le retour des attachés de défense européens à Lagos et nigérians en Europe, tout en maintenant l'embargo sur les ventes d'armes. Le 17 mai 1999, elle a levé l'ensemble des sanctions à compter du 1 er juin 1999. La Commission s'est déclarée prête à mettre en place des programmes sur les fonds encore disponibles sur le 7 ème FED. Les négociations d'un PIN au titre du 8 ème FED sont en cours.

Au total, le Nigeria pourrait bénéficier de 440 millions d'euros (330 millions au titre des reliquats des 6 ème et 7 ème FED et 100 millions au titre du 8 ème FED). La Commission met actuellement en place une série d'actions pilotes à forte visibilité, essentiellement destinée à la région du delta. Elle étudie également la mise en place d'une aide pour le fonctionnement du Parlement d'Abuja et des Parlements des 36 Etats de la Fédération, ainsi que divers travaux d'adduction d'eau potable en zones rurales.

On rappellera que le partenaire nigérian semble particulièrement demandeur d'une aide du FED " régionalisée " dans le cadre de la CEDEAO, notamment dans le secteur des télécommunications, du réseau routier interEtats et de la réalisation d'un gazoduc côtier.

d.- La réintégration au sein du Commonwealth

Suspendu en novembre 1995 suite à l'exécution de Ken Saro Wiwa et de huit militants ogonis, le Nigeria a été réintégré en mai 1999.

La clôture du dernier sommet du Commonwealth tenu à Durban le 15 novembre dernier a été l'occasion d'un hommage appuyé au Nigeria, dont la présence " redonne vigueur " à cette organisation de 54 pays 82( * ) .

II.- L'intérêt américain

Ayant levé les restrictions en matière de visas et procédé très rapidement à la " recertification " du pays, les Etats-Unis ont apporté, avant les Européens, un soutien financier de 5 millions de dollars aux dernières élections législatives et présidentielles.

a.- Tournée de Madeleine Albright (20-22 octobre 1999)

Cette visite était la première d'un secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères depuis 12 ans.

Madame Madeleine Albright a salué à plusieurs reprises et de façon particulièrement appuyée la " remarquable transition démocratique " 83( * ) du Nigeria. Elle a indiqué que le Gouvernement américain demanderait au Congrès " un triplement ou un quadruplement de l'aide américaine " au Nigeria dès l'année prochaine. Elle a estimé : " lorsque l'histoire de la dernière décade du siècle sera écrite, la transformation du Nigeria a toutes les chances d'être retenue, à côté de la Révolution tchécoslovaque et de la longue marche de l'Afrique du Sud vers la liberté, comme un exemple lumineux de la force, de la dignité humaine et de l'intensité du désir de liberté ". Evoquant l'engagement du Nigeria dans le cadre de l'ECOMOG, elle a indiqué : " vous avez porté vos ressources limitées bien au-delà de ce que la communauté internationale était en droit d'attendre et vous avez réussi bien plus que quiconque n'osait espérer " 84( * ) .

b.- Visite d'Etat du Président Obasanjo aux Etats-Unis (27-30 octobre 1999)

Le Président Obasanjo avait déjà été convié aux Etats-Unis par le Président Clinton, dès le 30 mars dernier, pour une visite amicale.

La visite d'Etat du 27 octobre a été l'occasion pour le Président américain de souligner l'intérêt concret des Etats-Unis pour le Nigeria. " Il est de l'intérêt des Etats-Unis que le Nigeria réussisse et il est donc de notre intérêt de l'aider. Le Nigeria est un point-pivot autour duquel tourne l'avenir de toute l'Afrique et d'une grande partie du monde et je suis heureux que ce pays soit aujourd'hui dans les mains d'un tel dirigeant " 85( * ) .

Le Président Clinton a confirmé la demande faite au Congrès de tripler ou quadrupler l'aide au Nigeria, et son appui à une demande de rééchelonnement de la dette nigériane, dès lors que, pays producteur pétrolier, le Nigeria ne peut espérer bénéficier d'une annulation pure et simple. La question de l'argent transféré illégalement et le trafic de narcotiques, qui figurent parmi les priorités respectives des deux Etats, ont également été évoqués.

Le Président Obasanjo s'est par ailleurs entretenu (28 octobre 1999) avec le secrétaire d'Etat à la Défense William Cohen, et a obtenu un accord de principe à une aide américaine pour réorganiser l'armée nigériane 86( * ) . On rappellera que, dès mai 1999, William Cohen, en visite à Abuja, avait annoncé un doublement de l'aide américaine à l'ECOMOG.

III.- Le retour des Britanniques 87( * )

Sous leur présidence de l'Union européenne de janvier à juin 1998, les britanniques ont été prompts -au nom de l'UE- à répondre aux ouvertures du général Abubakar : déclarations saluant les premières mesures du nouveau Gouvernement, visite à Abuja du secrétaire d'Etat pour l'Afrique Tony Lloyd (26 juin 1998). Ils se sont toutefois montré un peu " tièdes " dans leur appréciation du bon déroulement des dernières élections, ce qui n'a guère été apprécié des nouvelles autorités nigérianes, mais a rehaussé le cours des actions françaises....

La volonté britannique de renouer le dialogue à haut niveau est toutefois évidente : visite de Robin Cook à Abuja le 8 mars 1999, présence du Prince de Galles aux cérémonies d'investiture du 8 mai 1999.

Les Britanniques ont également répondu avec empressement à la demande nigériane formulée le 28 octobre 1999 d'aide à l'équipement et à la formation des forces de police, et donné un accord de principe immédiat. Parallèlement, plusieurs missions officielles d'experts militaires se sont déjà succédé sur place, et un exercice militaire conjoint devrait avoir lieu en 2000. Par ailleurs, la Grande-Bretagne étudie la mise en place de différents programmes dans les secteurs de l'éducation et de la santé, de la lutte contre la pauvreté et de l'éducation à la bonne gouvernance.

S'ils ont perdu du terrain sur le plan économique, les Britanniques demeurent très présents sur le plan militaire, et bénéficient surtout d'une implantation historique à travers un réseau, à la fois dense et réparti sur la totalité du territoire, d'associations privées, d'ONG et de représentants de différentes églises. On estime à près de 10.000 le nombre de coopérants actuellement présents sur le terrain.

Le secrétaire d'Etat britannique aux Affaires étrangères, Peter Hain, se rend au Nigeria du 9 au 12 janvier 2000, pour rencontrer le Président Obasanjo et se rendre dans la région du delta, où il devrait annoncer une initiative britannique en faveur de l'environnement. Avant son déplacement, il avait notamment d'ores et déjà indiqué : " Je voudrais encourager le Président Obasanjo à poursuivre l'action menée autour de son audacieux programme de réforme. Le Nigeria s'est réinventé après une longue période de dictature brutale, et nous le soutiendrons dans cette voie " 88( * ) .

Dès son arrivée, il a annoncé la tenue d'un forum annuel au niveau ministériel entre les deux pays, qui aborderait notamment les questions relatives à la politique étrangère, à la prévention des conflits, à la défense, au commerce, à l'industrie et à la santé. La hiérarchie des questions ainsi citées par le ministre britannique mérite sans doute d'être soulignée.

" Pour le Nigeria, c'est une époque de réalisation ou de rupture. La Grande-Bretagne est prête à fournir au Nigeria une assistance technique et concrète pour l'aider à atteindre ses objectifs .

" Je voudrais encourager le Président Obasanjo à poursuivre l'action menée autour de son audacieux programme de réformes. Le Nigeria s'est réinventé après une longue période de dictature brutale, et nous le soutiendrons dans cette voie " 89( * ) .

IV.- L'arrivée des asiatiques

Le Nigeria attire aujourd'hui de façon croissante l'intérêt des asiatiques, en particulier de la Chine, passée devant la France en 1999 au rang de quatrième exportateur vers le Nigeria.

a.- Intérêts commerciaux du Japon

Une délégation japonaise très polyvalente de 30 personnes s'est rendue au Nigeria du 9 au 11 octobre dernier. Elle comprenait notamment des représentants du Gouvernement, de la Banque Japonaise pour la Coopération Internationale, ainsi que des industriels et experts spécialisés dans le commerce, l'industrie, la transformation des métaux, les produits manufacturés et le bâtiment.

b.- Montée en puissance de la Chine

La dégradation des relations du Nigeria avec le monde occidental sous le régime Abakar a laissé le terrain libre à un renforcement marqué des relations avec la Chine. En mai 1997, le Premier ministre Li-Peng est venu personnellement signer une série d'accords de coopération économique. Ces relations se sont poursuivies depuis de façon constante.

Le Président Obasanjo s'est rendu en Chine dès le 11 avril 1999, à l'invitation du Président Jiang Zemin, en prélude à son investiture du 29 mai. Le ministre chinois des Affaires étrangères, Tang Jiaxuan, s'est rendu au Nigeria du 10 au 13 janvier 2000. A son tour, il a annoncé la mise en place d'une commission mixte économique et commerciale, complétée par un dialogue au niveau ministériel sur les questions politiques.

En 5 ans, la Chine est passée du 14 ème rang (1993) au 5 ème rang (1998) des fournisseurs du Nigeria, et ses exportations ont triplé, passant, au cours de la même période, de 120 millions de dollars à 390 millions de dollars. En 1998, elle se situe désormais au 5 ème rang des exportateurs, derrière les Etats-Unis (820 millions de dollars), le Royaume-Uni (777 millions de dollars), l'Allemagne (649 millions de dollars) et la France (567 millions de dollars).

Cette progression soutenue a surtout été tirée par un important projet de réhabilitation des chemins de fer nigérians, actuellement en voie d'achèvement 90( * ) . La Chine est également présente dans les secteurs du BTP (notamment dragage de la zone franche du port de Calabar), et de l'électricité. On trouve également une importante présence chinoise dans le textile et la petite industrie de transformation, la restauration et le petit commerce 91( * ) .



Les dix premiers fournisseurs du Nigeria

1993

1998

Etats-Unis

12,9 %

12,7 %

Royaume-Uni

13,8 %

12,0 %

Allemagne

10,0 %

10,1 %

France

8,1 %

8,4 %

Chine

1,8 %

6,1 %

Italie

5,3 %

5,3 %

Brésil

3,5 %

5,2 %

Pays-Bas

5,5 %

4,8 %

Thaïlande

1,1 %

3,6 %

Japon

7,2 %

3,6 %

Source : PPE Lagos à partir données FMI

B.- LE NIGERIA ET LA FRANCE

I.- Un intérêt bien compris

a.- Un partenaire essentiel de la nouvelle politique africaine

La redéfinition de la politique africaine de la France s'est notamment traduite par une extension du " champ " traditionnel, essentiellement issu des territoires anciennement colonisés, aux pays lusophones et anglophones. Plus largement d'ailleurs, la politique d'aide au développement française n'est plus désormais concentrée sur le seul sous-continent africain.

Dans ce cadre, il est clair que le Nigeria, poids lourd démographique et économique, situé à un carrefour stratégique du sous-continent, apparaît comme un partenaire désormais incontournable, dont le rôle va bien au-delà de ses seules " qualités " de cinquième fournisseur de pétrole.

En particulier, le désengagement officiel de la France, sur le plan militaire, d'une région qui apparaît désormais comme " un vaste champ d'observation des nombreuses formes de la violence politique contemporaines " 92( * ) , confère désormais au Nigeria un rôle de premier plan en matière de sécurité régionale 93( * ) .

Principaux extraits de la conférence de presse

du Président Jacques Chirac à Abuja, le 23 juillet 1999

" C'est la première fois qu'un Président français en exercice rend visite au Nigeria ".

" Il s'agit d'un geste fondateur d'une relation nouvelle, et qui est pour nous très importante ".

" La santé politique et économique du Nigeria conditionne pour une large part la santé publique et économique d'une partie très importante de l'Afrique ".

" L'élargissement du champ de coopération de la France concerne au premier chef le Nigeria ".

" Le Nigeria qui est aujourd'hui, sous l'autorité du Président Obasanjo, engagé dans un grand effort de modernisation de son administration, de gestion de ses affaires publiques, dans un grand effort de redressement économique et financier, ... a besoin d'être aidé sur cette voie pour qu'il puisse être, demain, une zone essentielle pour cette région du monde, de paix et de développement ".

Si vous me demandez mon avis personnel, je dirai que je souhaite que, dans le cadre de cette réforme du Conseil de Sécurité de l'ONU, le Nigeria soit présent comme membre permanent du Conseil de Sécurité ".

b.- Des intérêts économiques conséquents : le cinquième fournisseur énergétique, un stock d'investissements de 12 milliards de francs

Peu conséquente au début du siècle, à l'exception de l'implantation de la BNP, présente depuis 1949, et des deux comptoirs de la CFAO et de la SCOA installés dès le début du siècle, la présence économique de la France devient relativement importante au moment de l'Indépendance.

L'installation de Total dès 1956 puis de Elf en 1962, avant le début du boom pétrolier, suscite l'arrivée de Dumez dès 1958, de Air Liquide et Brossette en 1960, de la BIAO en 1961 et de Michelin en 1962.

Si les deux grands comptoirs de négoce -la CFAO et la SCOA- sont déjà implantés respectivement depuis 1902 et 1926, ils ne sont enregistrés officiellement qu'en 1969, avec la première grande vague d'implantations qui intervient avec la fin de la guerre du Biafra et le début du boom pétrolier.

Une seconde vague d'implantations intervient à la fin des années 1970, dans le cadre d'un programme nigérian intensif d'aménagement des infrastructures financé sur recettes pétrolières.

En 1983, avant le choc pétrolier, on recensait une centaine de groupes français, représentés par 180 filiales, et une communauté française de 11.500 personnes.



Historique de l'implantation des entreprises françaises

CFAO

1902

SCOA

1926

BNP

1949

Total

1956

Dumez

1958

Air Liquide

1960

Brossette

1960

BIAO

1961

Elf

1962

Michelin

1962

Peugeot

1972

Fougerolle

1973

SGE

1975

Bouygues

1975

SAE

1977

SPIE-Batignolles

1977

Degremont

1978

BEC Frères

1978

Compagnie Générale de Géophysique

1978

SOCEA

1979

Alsthom

1979

Trindel

1979

Dragages et Travaux Publics

1980

Par la suite, le choc pétrolier de 1986, la récession profonde qui intervient à partir de 1993, le durcissement du régime Abacha à compter de 1995, mais aussi le jeu des fusions et absorptions, a réduit fortement le nombre des entreprises françaises présentes sur place, aujourd'hui de l'ordre d'une centaine, mais de gros calibre.

Il est clair en effet que malgré une certaine altération de leurs marges et le net durcissement des conditions de sécurité, notamment dans le delta, pratiquement tous les grands groupes ont préféré rester sur place, considérant, malgré les difficultés, que " le solde insécurité juridique/marges réalisées reste très positif ", ainsi que l'a déclaré l'un de leurs représentants à la délégation sénatoriale lors d'une réunion tenue sur les problèmes de sécurité dans le delta 94( * ) .

Au total, nos relations économiques et commerciales sont clairement substantielles.

De fait, on peut évaluer à 12 milliards de francs le stock d'investissements français au Nigeria. Après le fort désengagement de 1993, le solde net des flux est en constante progression pour atteindre 600 millions de francs par an en 1998.

En termes d'échanges commerciaux, le montant des exportations (CAF-FAB, hors matériel militaire) s'est élevé en 1998 à 3,35 milliards de francs pour un montant d'importations de 4,37 milliards de francs. La France est aujourd'hui le cinquième fournisseur du Nigeria , sur un marché de 120 millions d'habitants.

Les implantations françaises actuelles restent diversifiées, puisque, outre le secteur énergétique, elles s'articulent autour de cinq pôles principaux :

Pétrole et gaz :

- Elf : 5 ème partenaire de la NNPC pour l'exploitation/production.

- Total : premier distributeur du pays de produits pétroliers - fortement avancé dans l'offshore et dans le secteur du gaz naturel.

- Sociétés de services et d'ingénierie pétrolière et gazière 95( * ) .

Nigeria,

6 ème fournisseur mondial de brut de la France (1997)

Tonnage total

%

Arabie Saoudite

18.894

20,4

Norvège

16.800

19,6

Royaume-uni

13.698

16,0

Russie

7.741

9,0

Iran

6.456

7,5

Nigeria

4.257

5,0

Algérie

4.111

4,8

Iraq

3.794

4,4

Syrie

3.097

3,6

Libye

2.456

2,9

Autres

4.572

5,2

Total

85.876

100,0

Source : PPE Lagos

1 er fournisseur africain

Nigeria

43,2 %

Algérie

20,4 %

Libye

15,4 %

Gabon

8,2 %

Angola

5,8 %

Cameroun

2,7 %

Tunisie

2,1 %

Guinée équatoriale

1,2 %

Congo-Brazzaville

0,8 %

Source : PPE Lagos

Automobile et associé :

- Peugeot, avec l'usine d'assemblage de Kaduna -qui montait 50.000 véhicules dans les années quatre-vingt, aujourd'hui sous-utilisée, mais qui reprend du " service " avec le lancement des " Boxers " 96( * ) .

- Michelin, qui développe aujourd'hui les plantations d'hévéas devenus plus " intéressantes " qu'en Asie du Sud-Est, à la fois en amont de la fabrication locale de pneumatiques et pour l'exportation de gomme.

BTP :

- Face à une forte concurrence allemande, libanaise, israélienne et italienne, la présence française reste importante : Bouygues, Fougerolle, Dumez, Lafarge, SPIE-Batignolles, SGE, Degrémont et BEC Frères.

Services :

- Secteur bancaire : Banque Belgolaise-Groupe Suez, Crédit Lyonnais, Paribas, Banque SBA.

- Transports : Bolloré, Air-France.

- Contrôle technique : Véritas.

- Eau : Lyse (Lyonnaise des Eaux).

Chimie-Pharmacie :

- Atochem, Rhône-Poulenc (May & Baker), Société Commerciale des Potasses et de l'Azote, Air Liquide.

Distribution :

- CFAO, SCOA, Brossette.

Par ailleurs, dans le contexte du processus de privatisation et de la normalisation espérée de l'environnement des affaires, un certain nombre de nouveaux créneaux sectoriels apparaissent désormais, particulièrement porteurs : électricité, électronique et télécommunications, pharmacie, assurances, notamment, mais aussi sécurité aéroportuaire et secteur de l'alimentation.

A cet égard, la venue d'une délégation élargie du MEDEF prévue au premier trimestre 2000, mais aussi l'envoi -non encore programmé- de missions de prospection de l'Agence Française de Développement 97( * ) , paraissent judicieux.

Il reste que tant que la normalisation des relations financières du Nigeria (et notamment l'apurement de la dette) 98( * ) ne sera pas " à tout le moins amorcée ", l'Etat français (concrètement la Direction du Trésor) refuse d'accorder la garantie COFACE ou la procédure FASED 99( * ) -à l'exception des projets d'équipement pétrolier, garantis par des recettes pétrolières offshore 100( * ) .



Situation des échanges France-Nigeria en 1998

Millions de francs

Pourcentage du total

Principales exportations françaises

- spécialités pharmaceutiques

412

12,3 %

- pièces et équipements spécifiques pour automobiles

373

11,1 %

- produits pétroliers raffinés

276

8,2 %

- voitures particulières

253

7,6 %

- produits de la robinetterie

138

4,1 %

- matériel aéronautique, thermique et frigorifique

116

3,5 %

- sucre

114

3,4 %

- tubes d'acier

99

3,0 %

- matériel informatique

96

2,9 %

Principales importations françaises

- pétrole brut

4080

93,4 %

- produits de la pêche en mer

75

1,7 %

- fruits tropicaux, café, cacao

66

1,5 %

II.- Une concrétisation encore symbolique : 17 millions de francs en 1999...

A la veille de la visite d'Etat du Président Obasanjo en France, prévue les 6 et 7 février prochains, la concrétisation, notamment institutionnelle, du renforcement des liens de la France avec le Nigeria demeure encore au niveau des déclarations de principe.

a.- La présence institutionnelle : réduite au minimum vital

Ainsi, le dynamisme et la pugnacité incontestables de son Excellence Monsieur Philippe Peltier, Ambassadeur de France au Nigeria depuis novembre 1996, ne peuvent sans doute à elles seules compenser le caractère très ramassé 101( * ) de l'équipe à sa disposition sur place 102( * ) . En particulier le service de coopération culturelle, technique et d'enseignement du français est apparu à la délégation sénatoriale quelque peu démuni de moyens -humains comme financiers.

Il pourrait donc être bienvenu de renforcer en priorité le service de coopération culturelle et technique, y compris au niveau des assistants techniques présents sur le terrain .

Mais il apparaît également souhaitable, conformément à une pratique courante dans les pays de l'ancien champ et qui a largement fait ses preuves, de placer des Français -conseillers ou assistants techniques- à la disposition de certains ministres et d'un certain nombre d'organismes clés de l'administration centrale : banque centrale, ministère des finances (notamment douanes et recettes fiscales), ministères de la justice et de l'intérieur, pétrole, commission nationale de planification, présidence, notamment.

L'ampleur des enjeux et du potentiel encore en cours d'évaluation pourrait également justifier que le poste d'expansion économique soit " complété " dans l'action qu'il mène avec une parfaite compétence et efficacité par -sinon l'installation rapide d'une " antenne ", voire d'une agence- de l'Agence Française de Développement -au moins l'envoi, dans les meilleurs délais, de missions de travail exploratoires de l'AFD, ainsi que la réactivation du dispositif PROPARCO 103( * ) .

b.- Les perspectives de la " francophonie " nigériane : une souhaitable intensification des moyens et diversification des instruments

Dans le contexte actuel d'évolution sensible de la politique africaine de la France, faite d'une diversification qui n'exclut pas la consolidation des acquis, le Nigeria constitue, à l'évidence, un partenaire de tout premier ordre.

De " tradition " anglophone, ce pays, le plus important du continent par sa dimension et sa démographie, enclavé au sein d'un environnement régional purement francophone, a officiellement fait état de sa volonté de " francophonisation ". La France se doit d'y répondre de la meilleure façon.

Or, près de trois ans après la " main tendue " par le général Abacha, les réalisations dans ce domaine paraissent bien insuffisantes, sinon médiocres, au regard des besoins et de l'enjeu ainsi
exprimés, dans un contexte de concurrence qui se renforce nettement.

Le général Abacha ayant décidé, en décembre 1996, de rendre le " français deuxième langue officielle ", l'essentiel des crédits de coopération affectés au Nigeria (15 millions de francs en 1998, 16,7 millions de francs en 1999), ont été concentrés sur la seule coopération linguistique, afin de " cibler " au mieux un objectif éminemment ambitieux. La priorité a donc été donnée, dans l'immédiat, à l'introduction du français comme langue obligatoire dans le secondaire. Il n'y a pas eu d'augmentation nette des moyens.

Certes, la France dispose d'ores et déjà sur le terrain d'un réseau non négligeable : huit alliances françaises, deux organismes de formation des professeurs déjà anciens et réputés, le Centre français de documentation de Jos et le Village français de Badagry, le Centre culturel de Lagos, le Centre de recherches sur l'Afrique d'Ibadan (IFRA), enfin un ensemble d'accords de coopération linguistique signés avec la moitié des Etats de la Fédération.

Toutefois dans le contexte actuel, il serait certainement utile de conforter encore et de revitaliser ce réseau, qui existe effectivement depuis longtemps, et de procéder à une modernisation des accords ainsi passés, dont certains ont une ancienneté supérieure à dix ans...

L'objectif désormais fixé est la formation d'environ 10.000 maîtres de l'enseignement secondaire 104( * ) en cinq ans et la mise à leur disposition d'un matériel pédagogique -notamment audiovisuel- efficace. Une première voie a été explorée pour utiliser les " formateurs " béninois voisins. Elle n'a pas, semble-t-il, réalisé tous les espoirs fondés sur elle, notamment pour des questions de rémunération 105( * ) . La délégation sénatoriale a eu le sentiment que cette " solution " était quelque peu en panne, sans toutefois avoir été réellement utilisée au maximum de ses potentialités.

L'ambassade du Nigeria envoie également des stagiaires nigérians dans les centres de formation à l'enseignement du français au Bénin (CEBELAE de Cotonou), au Togo (Village du Bénin de Lomé) et en Côte-d'Ivoire (CUEF d'Abidjan). Mais cette solution est limitée par les problèmes d'hébergement. Là encore, l'instrument utilisé reste ponctuel, malgré pourtant un réel intérêt régional qui mérite certainement d'être davantage exploré.

L'appréciation, nécessairement rapide, de la délégation sur ce sujet la conduit aux remarques suivantes :

L'effort fait sur l'enseignement doit d'abord, pour mieux " s'enraciner ", s'appuyer sur le développement de notre coopération culturelle, notamment audiovisuelle . Or celle-ci semble pâtir -en termes de moyens humains et financiers- de l'accent mis sur la seule coopération linguistique.

La délégation sénatoriale a été relativement frappée par ce " décalage " regrettable. Elle estime par ailleurs que d'autres instruments mériteraient sans doute d'être davantage mis à profit.

Ainsi, au-delà du seul financement de " projets ", l'appui français pourrait se manifester par le biais de missions d'expertise du ministère de l'Education nationale , lesquelles ont largement fait la preuve de leur efficacité immédiate auprès d'autres partenaires étrangers. De même, pourrait être utilement développé le recours aux co-tutelles universitaires 106( * ) . Enfin, il apparaît éminemment souhaitable de mettre en place, dans les meilleurs délais, un système performant de fichiers des boursiers , assorti d'un suivi permanent 107( * ) .

Par ailleurs, l'importance des intérêts économiques, le maintien sur place -" envers et contre tout " mais au prix d'une expatriation limitée au strict minimum- de représentants de grosses sociétés françaises, doit se traduire par une analyse approfondie en amont des débouchés et de la demande potentielle locale de nos entreprises . De même, une attention particulière doit être apportée à la formation professionnelle aux techniques françaises (fût-ce au prix parfois d'un enseignement initial en anglais...).

Enfin, une utilisation plus large du " multilatéral " francophone 108( * ) serait certainement bénéfique. Outre un intérêt politique évident, elle permettrait de disposer d'un levier financier conséquent, très supérieur aux seuls moyens strictement bilatéraux 109( * ) . Ainsi, pourraient être étudiées une intégration à l'AIMF ( Association internationale des maires francophones ), mais aussi une association progressive du Nigeria aux instances de l'APF ( Assemblée parlementaire de la francophonie ), d'abord à titre d'observateur, puis comme membre à part entière.

Il pourrait également être intéressant de mobiliser davantage les conséquentes ressources de l' Agence universitaire de la francophonie , et enfin de réfléchir au montage -sur place- de manifestations " francophones " en liaison avec les importantes communautés libanaise et maghrébine.

L'ensemble de ces questions a vraisemblablement été abordé au cours des Assises du français à Abuja , qui devaient en principe se tenir en novembre. Votre délégation n'a pas eu d'informations particulières à ce sujet 110( * ) .

c.- L'entrée du Nigeria dans la " Zone de solidarité prioritaire " ? : 2,5 millions de francs en 1999 pour la coopération scientifique et technique

Il convient certes de se féliciter de l'entrée officielle du Nigeria dans la " Zone de solidarité prioritaire " (ZSP) française, qui permet notamment l'accès aux ressources du Fonds de Solidarité Prioritaire (ex-FAC), ainsi qu'aux instruments traditionnels de la coopération française jusqu'il y a peu réservés aux anciens pays du " champ ". Toutefois, la traduction concrète de cette décision ne s'est pas encore manifestée. Par comparaison avec ses voisins francophones 111( * ) , et surtout calculée par habitant, l'aide apportée au Nigeria en 1999 conserve un niveau qui pourrait rapidement être qualifié de dérisoire .




L'effort français d'aide :

éléments de comparaison avec les voisins francophones du Nigeria

1.- Aide civile

Population 1

(millions)

APD bilatérale totale 2

Aide projet FAC 3

Assistants techniques 4

Nigeria

124,8

23 MF

--

2

Cameroun

13,9

167 MF

56 MF

186

Niger

9,8

552 MF

23,5 MF

93

Tchad

7,1

281 MF

27,0 MF

101

Bénin

5,6

155 MF

25,0 MF

53

Togo

4,3

190 MF

22,7 MF

33

1 1997

2 1997

3 1998 - hors projets " intérêt général " et " intérêts ", qui représentent un total de 502 MF

4 1999

2.- Aide militaire

Formation de stagiaires 1

Coopérants militaires sur place 2

Aide en matériel 3

(
millions de francs)

Nigeria

--

--

--

Cameroun

27

39

12,6

Niger 4

(2)

(39)

--

Tchad

17

35

12

Bénin

29

19

5

Togo

37

22

5

1 dans les écoles nationales à vocation régionale - chiffres 1999

2 au 31 décembre 1999

3 budget 2000

4 contexte de suspension de la coopération française

En l'état actuel des informations fournies à la délégation sénatoriale dans le cadre de la préparation de sa mission, tous les secteurs étaient considérés comme prioritaires :

" L'intégration du Nigeria à la Zone de Solidarité Prioritaire (ZSP) devrait permettre la relance de notre coopération scientifique et technique autour des priorités suivantes :

a.- Développement social et coopération éducative :

- santé,

- réforme hospitalière, formation de médecins, de chirurgiens et de personnel médical,

- lutte contre les maladies endémiques (malaria, SIDA, méningite et autres maladies tropicales),

- recherche en pharmacopée tropicale,

- SAMU (une mission des SAMU de Brest et de Paris a déjà eu lieu cette année),

- développement rural et communautaire,

- formation vétérinaire,

- promotion des formations supérieures, bourses d'excellence.

b.- Développement économique et environnement :

- eau et assainissement, gestion des bassins, irrigation,

- technologie agro-alimentaire,

- environnement et cadre de vie, transports,

- aviation civile, météorologie, en coordination avec l'ensemble des pays de la région,

c.- Coopération institutionnelle :

- secteur économique : appui à la gestion, sciences économiques,

- formation en administration publique et en sciences politiques (avec l'IIAP et l'ENA),

- coopération police, lutte contre les grands trafics et la criminalité,

- coopération décentralisée, gestion municipale ".


Concrètement, la concentration de l'enveloppe actuelle du poste (soit 16,7 MF) sur l'enseignement du français a réduit la totalité des moyens disponibles pour cette " relance " de la coopération scientifique et technique à 2,5 millions de francs , ce qui correspond à une baisse des crédits de 60 % entre 1995 et 1999 . En outre, il n'y a actuellement aucun assistant technique français présent sur le terrain .

Il reste donc à l'évidence à mettre en oeuvre concrètement ces orientations, incontestables sur le plan des principes, peut-être en les hiérarchisant dans un premier temps, pour définir rapidement des projets susceptibles d'être adoptés 112( * ) dès l'exercice 2000, dans le cadre du nouveau Fonds de Solidarité Prioritaire, qui devrait bénéficier, pour cet exercice, de 1.250 millions de francs en autorisations de programme et 922 millions de francs en crédits de paiement.

Deux secteurs à forte visibilité -et à retombées non négligeables pour les entreprises françaises- pourraient effectivement être privilégiés dans l'immédiat et bénéficier d'une concentration des moyens disponibles : la gestion de l'eau 113( * ) et la santé 114( * ) .

De même, en bonne complémentarité avec l'objectif de développement de l'enseignement du français, il apparaîtrait judicieux de pouvoir accélérer les projets de coopération -déjà largement mis au point par les services français 115( * ) dans le secteur audiovisuel . La dérégulation en cours depuis 1992 constitue en effet une occasion irremplaçable pour des opérateurs comme CFI et RFI de se renforcer sur un marché jusqu'ici dominé, pour des raisons historiques, par les anglophones 116( * ) .

d.- La coopération militaire et sécuritaire : répondre à un besoin nigérian

La délégation sénatoriale a eu le sentiment, d'une part, que " beaucoup était à faire " en matière de coopération militaire au sens strict, mais également dans le cadre de la sécurité civile, notamment par le biais d'une " civilisation " des forces armées , et, d'autre part, que, à cet égard, et malgré la réelle importance de la concurrence anglo-saxonne 117( * ) , la France pouvait prétendre occuper un terrain non négligeable.

Il semble particulièrement opportun de renforcer encore les mesures déjà envisagées en matière d' accueil de stagiaires de l'Ecole de guerre nigériane (dans les écoles d'application, au CIP, à l'IHEDN...) -avec visites intensives des matériels français -, de renforcement de l' enseignement du français dans les écoles militaires nigérianes , de participation concrète à la restructuration des forces armées nigérianes, et de revitalisation des anciens contrats d'armement 118( * ) , parallèlement à l'exploration de nouvelles possibilités 119( * ) .

Interrogé à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2000 sur les moyens nouveaux donnés à l'aide en matériel militaire 120( * ) , le Gouvernement a précisé qu'il s'agissait de " prendre en compte l'élargissement de la ZSP " et que ces moyens étaient censés profiter " en priorité au développement des écoles nationales à vocation régionale, à la mise à niveau des forces de sécurité intérieure, à la réorganisation des forces armées, à l'équipement des unités appelées à participer à des opérations de maintien de la paix et à la création de systèmes centralisés de répartition de matériel ". Ces indications pourront certainement trouver au Nigeria un terrain d'application idéal.

De même, une intégration effective et complète du Nigeria au dispositif franco-anglo-saxon RECAMP 121( * ) ( Renforcement des Capacités Africaines de Maintien de la Paix ) paraît éminemment souhaitable, compte tenu du poids politique, démographique et géographique de ce pays 122( * ) , et à l'heure où la France se désengage clairement de l'intervention militaire directe.

Le volet de la coopération " sécuritaire " mérite certainement d'être renforcé.

D'une part, l'installation d'une antenne locale du SCTIP à Lagos/Abuja paraît opportune, à la fois pour donner un signal positif à la communauté économique française présente sur place, mais aussi pour assurer l'efficacité des politiques menées dans les pays francophones voisins en matière de suppression des trafics en tout genre, pour lesquels le Nigeria apparaît comme une évidente plaque tournante 123( * ) .

D'autre part, l'avenir de la police nigériane constitue, à l'évidence, pour le nouveau Gouvernement démocratiquement élu, une urgence et un enjeu considérable. La sécurité dans la région du delta 124( * ) , d'abord, mais aussi dans la région du nord, où les conflits religieux semblent vouloir se multiplier, constituent désormais un véritable " test " pour le nouveau Gouvernement.

Sérieusement mis à mal par les régimes militaires précédents, la police nigériane a besoin d'une profonde remise en ordre à la fois matérielle et morale. Les demandes exprimées par le Gouvernement nigérian à la partie française -surtout depuis certaines déclarations malheureuses des américains- sont multiformes : formation, matériel, équipement, munitions, télécommunications, transports. Dans ce cadre, il est clair que la compétence et l'offre françaises devraient pouvoir, utilement, trouver à s'exprimer.

En conclusion, il paraît important que soit rapidement négocié un accord de coopération en bonne et due forme, et que ne demeure pas trop longtemps au niveau des seules déclarations de principe la mise en place des institutions décidée par les deux présidents français et nigérian le 23 juillet 1999 :

- trois commissions mixtes spécialisées : une commission de politique étrangère, une commission économique et financière, une commission de coopération regroupant les secteurs culturels, technique et scientifique ;

- un forum consultatif de dialogue permanent, présidé, côté français, par une haute personnalité et, côté nigérian, par M. Ernst Shonekan 125( * ) , reprenant notamment l'impulsion créée par l'exercice " vision 2010 " 126( * ) qu'avait mené celui-ci en 1997-1998. Il devrait réunir des personnalités d'horizons divers : politique, parlementaire, administration, secteur privé ;

- une grande commission mixte co-présidée par le Premier ministre français et le Vice-président nigérian, se réunissant une fois par an pour analyser les rapports des trois commissions mixtes spécialisées et du forum consultatif de dialogue permanent.

On rappellera en effet que les Britanniques, d'une part, les Chinois, de l'autre, viennent eux-mêmes d'annoncer la mise en place d'organismes de même nature, et que les anglo-saxons, déjà très présents sur le terrain, multiplient les actions concrètes dans les domaines stratégiques de la communication et de la coopération militaire, sécuritaire et institutionnelle .

Il serait regrettable que l'élan donné par la visite du Président français en juillet 1999, répondant ainsi à la " main tendue " par le général Abacha puis par le Président Obasanjo, fasse long feu...

La France doit rapidement se donner, au Nigeria, les moyens de sa politique.

ANNEXE 1

__________

COOPÉRATION INTERPARLEMENTAIRE

__________

La mission du Sénat français avait notamment pour objet la constitution d'un groupe d'amitié homologue au sein du Sénat nigérian.

Les différentes rencontres effectuées, closes par un dîner officiel donné par le Président du Sénat nigérian, se sont traduites par la constitution officielle de ce groupe d'amitié. Elles ont également été l'occasion, de la part de la délégation française, de préciser les différentes modalités de coopération interparlementaire proposées à la partie nigériane : invitation en France d'une délégation de sénateurs nigérians, envoi de missions de fonctionnaires du Sénat français au Nigeria, accueil pour des stages à " géométrie variable " de hauts fonctionnaires du Sénat nigérian.

Le Secrétariat général du Sénat nigérian, en liaison avec l'Ambassade de France au Nigeria, étudie actuellement ces propositions.

Monsieur Jacques Legendre a également transmis officiellement au Président du Sénat nigérian l'invitation du Président Christian Poncelet à assister, le 14 mars 2000, à la Rencontre des Sénats du Monde, organisée par le Sénat français.

Composition du Groupe d'Amitié Sénatorial nigérian

Président : M. Haruma Zego Aziz

Membres : M. Alex Kadiri, Président de la Commission de l'Education,

M. Danladi Bamaiyi, Président de la Commission des Affaires économiques,

M. Idris Abubakar, Président de la Commission de la Dette,

M. Mas'ud El Jibril, Président de la Commission de l'Agriculture,

M. Joseph-Kennedy Waku, Président de la Commission des Ressources hydrauliques,

M. Arthur Nzeribe, Président de la Commission de la Santé,

M. Chuba Okadigbo 127( * ) , Président de la Commission des Affaires étrangères

M. Otunba Durojaiye, Président de la Commission des Institutions,

M. Afolabi Olabimtan,

M. Udo Udoma 128( * ) ,

M. Patrick Enebeli Osakwe.

ANNEXE 2

__________

LA COMMUNAUTÉ FRANÇAISE AU NIGERIA

__________


Immatriculés et dispensés ;

1.400 (1.950 en 1994)

(dont 89 % de détachés, 35 % de femmes, 18 % de binationaux)

Non immatriculés

500

Majorité de célibataires, moyenne d'âge : 40 ans,

nombre d'enfants extrêmement réduit

Durée moyenne de résidence :

4 ans

Principales communautés étrangères :

- communauté libanaise :

30.000

- communauté indienne :

30.000

- communauté britannique :

10.000

- communauté américaine :

10.000

- communauté chinoise :

4.000

Activité professionnelle :

- 56 % d'actifs, essentiellement dans l'industrie pétrolière et le bâtiment

- 26 agents de l'Etat français et 37 CSN

- 28 enseignants

- 1 religieux

Ecoles françaises : Lagos, Port Harcourt 1 , Kano 129( * ) , Kaduna, Abuja

ONG présentes sur le terrain (connues) : Secours Catholique, Caritas-France, Partenaires, Cratene-EAG (Centre international de la construction en terre - Ecole d'architecture de Grenoble), Reporters sans Frontières

Établissements sous conventions AEFE au Nigeria

(gestion parentale privée)

1.- Lycée français Louis Pasteur de Lagos

(maternelle à terminale)

- 550 élèves : 24 % de Français, 5 % de Nigérians, 71 % d'étrangers tiers (45 langues parlées...)

- droits de scolarité annuels : de 9.560 frs à 18.360 frs, selon le niveau d'enseignement et la nationalité des élèves

- aide en personnels : 20 enseignants (8 coopérants, 8 résidents, 4 CSN)

- charge annuelle pour l'AEFE : 5,2 MF

2.- Ecole de Kano

- 117 élèves (maternelle à troisième) : 11 % de Français, 13 % de Nigérians, 76 % d'étrangers tiers

- droits de scolarité annuels : de 8.500 frs à 15.040 frs

- aide en personnels : 3 instituteurs (dont 1 directeur expatrié chargé de classe)

- charge annuelle pour l'AEFE : 840.000 frs

Il serait intéressant de pouvoir concrétiser le projet évoqué de transformation en école consulaire .

3.- Ecole Marcel Pagnol à Abuja

- 30 élèves inscrits pour la rentrée 1999 (perspectives de développement en principe importantes avec le déplacement progressif de la capitale à Abuja), 130 à la rentrée 2000 selon l'ambassade

- actuellement installée, de façon précaire, dans les locaux de la base-vie Bouygues appelée à être supprimée dans les plus brefs délais

Il apparaît donc urgent de prendre une décision concernant la construction d'un édifice définitif .

NB.- Deux établissements relevant d'entreprises françaises sont également homologués AEFE :

- l'Ecole française Peugeot de Kadura (30 élèves)

- l'Ecole Elf-Michelin de Port Harcourt (120 élèves

ANNEXE 3

__________

REPRÉSENTANTS D'ENTREPRISES FRANÇAISES

RENCONTRÉS PAR LA DÉLÉGATION SÉNATORIALE

__________

Air-France

Air Liquide

Alcatel

BEC Frères

Brossette

Bouygues

Bouygues Offshore

Bureau Véritas

CBCLN

CFAO

CFAO Motors

Clemessy

Compagnie Générale de Géophysique

Dumez

Elf Nigeria

ETPM (filiale d'Entrepose-Lyonnaise)

Fougerolle

Michelin

Peugeot

SAIBOS

SCOA

SGE

SOFREMAS

SPIE-Batignolles

Total

TPM




1 Bernard W. Fagg.

2 Sur la base de la classification des langues africaines établie par Joseph Harold Greenberg, 395 langues distinctes ont été répertoriées.

3 Issu des migrations liées au dessèchement du Sahara, l'Empire du Kanem Bornou fut un des plus vastes de l'Afrique occidentale avec ceux du Mali et du Songhaï. Né au IX ème siècle, il perdurera jusqu'au XVIII ème siècle, sous la dynastie des maï , une des plus longues du monde. Durement frappé par les expéditions militaires des Touaregs venus d'Agades, puis surtout par la succession des très sévères sécheresses et famines des années 1740, puis 1750 et enfin 1790, il fut facilement décimé par Usman dan Fodio. Aujourd'hui, l'Etat du Borno n'est plus qu'une région périphérique, peuplée en majorité de Kanouris, et relativement marginalisée au sein de la fédération nigériane.

4 En 1826, le capitaine Clapperton dénombrait en région yorouba 55 villes dont plusieurs de plus de 20.000 habitants.

5 A distinguer de l'actuel Etat du Bénin, ancienne république du Dahomey.

6 Période de production des célèbres sculptures en bronze.

7 La ville d'Ifé est le berceau du vaudou, " exporté " ensuite dans les Caraïbes par les esclaves.

8 Ainsi Wole Soyinka, Prix Nobel de littérature en 1986, ou l'actuel Président Obasanjo, notamment.

9 Cette caractéristique se renforce aujourd'hui et constitue sans doute un des facteurs d'explication des difficultés dans le delta du Niger. Les chefs, avec lesquels les grandes compagnies pétrolières avaient pris l'habitude de traiter directement, n'ont guère d'autorité face aux " assemblées populaires " remises en vigueur par les jeunes aujourd'hui majoritaires et relativement formés.

10 Cf. notamment : - Cl. Meillassou : Anthropologie de l'esclavage - PUF, 1986 ;

- Cath. Coquery : L'Afrique Noire, permanences et ruptures ,

- Y. Lacoste : " Afriques blanches, Afriques noires " - Hérodote , Juillet-septembre 1992.

11 Y. Lacoste : " Géopolitiques internes en Afrique " - Hérodote - Juillet-septembre 1987.

12 OPC : Odua People's Congress : groupe nationaliste yorouba créé en 1995, qui milite pour une république autonome yorouba dans le Sud-Ouest du pays.

13 Mungo Park, Clapperton, Barth, Baikie, les frères Lander.

14 La Royal Niger Company reçoit le monopole de la colonisation administrative et économique des territoires autour du Niger. Outre le pouvoir de négocier les traités, elle dispose de sa propre armée, la West African Frontier Force .

15 Henry Lugard tenait en haute estime l'aristocratie musulmane, comme le Général Liautey au Maroc, et n'avait que peu de considération pour les chefferies corrompues du Sud.

16 Cité par A.H.M. Greene : The Principles of native administration in Nigeria - 1965.

17 Union Ibidio, Union de l'Etat Ibo, Union Urhobo, Union d'Asaba, Union des Tivs pour le Progrès ...

18 Qui va jusqu'à imposer 19 joueurs dans les équipes de football...

19 Aucune prépondérance ne doit être accordée à des personnes " originaires d'un petit nombre d'Etats ou d'ethnies ou d'autres groupes minoritaires dans le gouvernement ou dans l'un de ses organes ".

20 Cf.- Daniel Bach : " Nigeria, le fédéralisme dans tous ses états " - Politique africaine , n° 32, décembre 1988.

- Daniel Bach : " Unité nationale et société plurale au Nigeria : les mécanismes boomerang du fédéralisme " - Afrique contemporaine , n° 152, 2 ème trimestre 1989.

21 En 1990, la participation aux élections locales n'a pas dépassé 15 %.

22 M.A. de Montclos - Le Nigeria (page 164), Karthala-IFRA, 1994.

23 Le deuxième de l'ensemble du continent africain après l'Egypte.

24 Les observateurs font état d'une forte recrudescence des sacrifices humains, y compris dans les zones les plus urbanisées (notamment à Lagos).

25 Dirigée par Aminu Kano.

26 Dirigée par Ahmadu Bello, Sardauna de Sokoto,, Vice-Président du Congrès islamique mondial en 1963.

27 " Zamfara est un Etat musulman. Les musulmans veulent la charia. Si quelqu'un tente de s'y opposer, ce sera le chaos " (déclaration AFP du gouverneur de Zamfara).

28 La Lybie a ouvert en 1998 un consulat à Kano.

29 Le Président Obasanjo doit se rendre prochainement en Iran.

30 Cf. sur la progression de l'islam fondamentaliste, D.C. O'Brien : " La filière musulmane : confréries soufies et politique en Afrique Noire " in Politique africaine - novembre 1981.

Cf. également C. Coulon : " Les itinéraires politiques de l'Islam au Nord Nigeria " in Religion et modernité politique en Afrique Noire - Karthala, 1993

31 IFRI : RAMSES 2000 . L'entrée dans le XXI ème siècle - Dunod, 1999.

32 L'Eglise catholique apparaît toutefois mieux structurée et plus influente. Avec 3.000 prêtres et 5.000 religieux et religieuses, elle gère près de 3.000 écoles et 750 institutions médicales et sociales. La Conférence épiscopale nigériane comporte 45 évêques. Le Pape Jean-Paul II s'est rendu au Nigeria en 1982 et 1998 (il s'est alors entretenu avec les chefs coutumiers musulmans).

33 Le Président Obasanjo a lui-même adhéré au pentecôtisme quelques mois avant les élections présidentielles, après s'être, dans un premier temps, converti à l'islam.

34 La réelle progression des religions traditionnelles participe aussi de ce mouvement de politisation : " Certains de ces cultes exigent des sacrifices humains ou le don de certaines parties de l'organisme humain. D'autres impliquent l'élimination physique d'une personne et son écartèlement. Dans les deux cas, on retrouve l'idée que le pouvoir " se mange " pour capturer une énergie invisible et se l'approprier afin de l'utiliser contre les ennemis dans la lutte pour le contrôle de l'Etat et de ses ressources " (extrait d'une interview donnée par J.M. Ela à Avvenire , 21-09-1995, cité par St. Picciaredda : " Afrique, géopolitique des religions ", in Afrique, la fin du Bas-Empire , Gallimard-Limes, 1997).

35 " Le Nigeria n'est pas une nation, c'est une simple expression géographique " (O. Awolowo).

36 Toutefois, la dernière saison des pluies, d'une ampleur et d'une durée exceptionnelle, a donné lieu à des crues inhabituellement fortes dans les Etats du Centre-Nord -les pires depuis 30 ans-, dont la délégation sénatoriale a pu mesurer le caractère catastrophique sur le trajet Lagos-Kano.

Près de 100.000 personnes ont été affectées par l'inondation des villages et des terres cultivées, plusieurs dizaines de milliers étant désormais sans-abri. La vallée du Niger a été recouverte par les eaux sur plus de 200 km.

37 A un niveau " équivalent ", dans le monde, on trouve la Russie (147 millions d'habitants), le Bangladesh (124 millions d'habitants), le Japon (126 millions d'habitants), le Pakistan (128 millions d'habitants) (Source : Rapport Mondial sur le Développement 1999 , PNUD).

38 Cf. J.-Cl. Chesnais : " Vers une récession démographique planétaire ", in RAMSES 2000 .

39 Taux qui, en 1990, était considéré par les Nations-Unies comme une " simple probabilité " pour seulement l'an 2010...

40 Où la délégation sénatoriale n'a pu finalement se rendre, comme cela était initialement prévu, en raison de la dégradation de la situation dans le delta.

41 La réalisation a été confiée à l'architecte japonais Kenzo Tange, qui a notamment reconstruit Hiroshima et Skopje.

42 Le trajet, à la nuit tombée, de l'ambassade à l'aéroport s'est révélé particulièrement " illustratif ".

43 Contre 5.000 en 1800, 1 million en 1975, 1,4 million en 1993.

44 D'après le dernier Rapport sur le développement humain (1999) du PNUD , le pourcentage de population entre 15 et 49 ans porteur du virus en 1997 est évalué à 4 % au Nigeria, contre 26 % pour le Zimbabwe et le Botswana, 20 % pour la Zambie et la Namibie, 15 % pour le Mozambique et le Malawi, 13 % pour l'Afrique du Sud et le Rwanda, 12 % pour le Kenya, 10 % pour la Côte-d'Ivoire et la République Centrafricaine, 8 % pour le Congo, l'Ouganda, et le Burundi ...

45 Source : CIA, World Fact Book - 1999 (Internet).

46 Notamment : The Interpreters (1963), A Season of anomy (1973) Les Années d'enfance (1981), Ibadan, les années pagaille (1988)...

47 Notamment Chihua Achebe : Things fall apart (Le monde s'effondre, 1958), No longer at ease (Le malaise, 1960), Man of the People (Le démagogue, 1966), ou encore Ben Okri : Eloge d'un nouveau couvre-feu (1992), Etonner les Dieux (1997), La Route de la faim (1997) et Nkem Nwankmo : My Mercedes is bigger than yours , 1975.

48 Avec notamment Fela Kuti, célèbre père de l' " afrobeat " et son fils Femi.

49 La région des Oil Rivers tire son nom non pas du pétrole mais des palmiers à huile qui firent sa richesse au temps de la colonisation.

50 " Dutch disease " : le " mal néerlandais ", défini par une étude portant, dans les années 50, sur l'impact nocif du formidable développement de l'exploitation du gaz naturel sur l'économie néerlandaise, est aujourd'hui régulièrement évoqué à propos des économies pétrolières du Vénézuela, de l'Irak, de la Libye et du Nigeria.

51 Cf. Bulletin du Poste d'expansion économique de Lagos , 1 er octobre 1999.

52 Comme le projet d'irrigation extensive de la Société BEC Frères visité par la délégation, malheureusement en panne du fait de l'arrêt des paiements nigérians.

53 Le véhicule utilitaire Boxer , digne héritier des antiques pick-up " Pigeot ", fait une remarquable percée sur le marché africain, face à une concurrence japonaise devenue écrasante. La délégation française a pu en apprécier l'efficacité lors de ses déplacements à Abuja.

54 Wole Soyinka.

55 En 1997, le total des exportations s'élève, selon la Central Bank of Nigeria , à 771.000 tonnes.

56 Plusieurs découvertes prometteuses de l'ordre chacune de plusieurs centaines de millions de barils de brut récupérable ont été faites récemment par Texaco, Shell, Stratoil et Elf.

Ainsi, le 16 décembre 1999, Shell a annoncé la mise en chantier du projet d'exploitation en eaux profondes de Bonga , à 120 km de la côte et 1.000 m de profondeur. Le projet, qui représente un investissement de 2,7 milliards de dollars, devrait permettre de produire 200.000 barils/jour de pétrole et 150 millions de pieds cubes/jour de gaz naturel. La capacité totale est estimée à 600 millions de barils de pétrole. L'exploitation pourrait commencer en 2003. Shell est associé dans ce projet à Esso (20 %), Elf (12,5 %) et Agip (12,5 %).

Le 7 janvier 2000, Texaco a annoncé la découverte d'un des plus gros gisements en eau profonde d'Afrique de l'Ouest sur le puits offshore de Abgami . La capacité totale est estimée à plus d'un milliard de barils d'équivalent pétrole.

57 En 1998, les " troubles " dans le delta du Niger se sont traduits par une perte de 15 % de la production.

58 4.500 forages réalisés entre 1954 et 1992, contre 146 en Lybie et 68 en Algérie...

59 Cf. M.A. Pérouse de Montclos : " Pétrole et conflits communautaires au Nigeria : une perspective historique ", in Afrique contemporaine , juillet-août 1999.

60 Cf. analyses du PEE de Lagos. Bulletins du 1 er août 1999 et du 15 novembre 1999.

61 Cf. G. Nicolas : " Le Nigeria : nouvelle puissance régionale africaine ", in Afrique contemporaine , n° 157, 1 er trimestre 1991.

G. Nicolas : " Le Nigeria : pôle de restructuration géopolitique ou ligne de front entre chrétiens et musulmans ", in Hérodote , automne 1992.

62 La Mauritanie vient de se retirer de la CEDEAO.

63 En réalité, on peut faire l'analyse que le Nigeria, à l'occasion des interventions au Liberia puis en Sierra Leone, soit davantage partisan d' " opérations de rétablissement de la paix " -c'est-à-dire de véritables opérations de guerre au sens traditionnel, menées au profit de l'une des parties du conflit, par des forces coalisées venues de pays voisins- plutôt que d' " opérations de maintien de la paix ", au sens souhaité par les Nations-Unies, auquel le Nigeria accorde en réalité peu de crédit.

64 Jusqu'à 19.000 hommes à l'été 1994, essentiellement anglophones. Le coût d'entretien de cette force a été évalué à 8 milliards de dollars. Le coût humain, tenu secret, pourrait avoisiner les 3.000 morts depuis 1990. Les 60 derniers militaires nigérians encore présents au Liberia ont été rapatriés le 21 octobre 1999.

65 Le général Babangida s'est considérablement impliqué dans cette décision. La volonté de faire apparaître le Nigeria comme le " juge de paix " de l'Afrique subsaharienne et de renforcer son image de puissance régionale a, selon certains observateurs, également été " confortée " par le désir de préserver certains investissements faits par l'entourage proche du général Babangida, voire par la volonté des cartels de drogue nigérians de renforcer leur contrôle sur l'économie libérienne.

66 Cette intervention a été plus imposée que proposée à ses pairs par le général Abacha, alors chef de l'Etat nigérian.

67 Pour la première fois, la France a apporté un soutien logistique direct à la force d'interposition, en application des accords d'Abuja d'octobre 1998.

68 Lors de l'entretien accordé à la délégation sénatoriale le 7 octobre 1999, M. Dubem Onya, ministre délégué aux Affaires étrangères, a notamment indiqué que le Nigeria continuerait à " jouer un rôle à sa mesure " dans la résolution des crises africaines.

M. Jerry Gana, ministre de la Coopération et de l'Intégration en Afrique, a, pour sa part, souligné que la CEDEAO constituait le " pilier central de la politique de coopération et d'intégration africaine voulue par le Président Obasanjo ".

69 Communiqué final.

70 Gabon, Nigeria, Congo-Brazzaville, Angola, Cameroun, Guinée Equatoriale, Sao Tomé et Principe.

71 La presqu'île de Bakassi commande l'accès au port nigérian de Calabar et sa possession détermine la souveraineté sur les eaux territoriales et la zone économique de la région, riche en pétrole et en poissons. Les deux pays se sont livrés à plusieurs affrontements armés qui se sont traduits par des dizaines de morts et un nombre indéterminé de prisonniers de guerre de chaque côté. La France est intervenue dans le cadre de l'accord de défense qui la lie au Cameroun. L'affaire est actuellement étudiée par la Cour Internationale de la Haye.

72 Les deux pays représentent à eux deux 58 % du PNB africain.

73 The Guardian , 5 septembre 1999.

74 Cette question a notamment été évoquée lors de l'entretien de la délégation sénatoriale avec M. Dubem Onya.

75 Sans oublier la discrète mais constante montée en puissance de la Chine, et ce quelle que soit la nature du régime nigérian.

76 Ayant assuré l'intérim du général assassiné Murtala Mohammed et remis le pouvoir aux civils, O. Obasanjo fut emprisonné quelques années par le général Abacha. Sa dernière fonction avant l'élection fut celle de président de l'ONG Transparency International qui s'emploie à déterminer le degré de corruption des Etats.

77 30 % des réserves de pétrole brut du continent africain et 75 % des réserves de l'Afrique subsaharienne.

78 Abuja, 12 octobre.

79 Abuja, 10 octobre.

80 La Banque Mondiale devrait notamment s'engager dans la préparation de la privatisation de la compagnie nationale d'électricité (NEPA), de Nigeria Airways, et de la société nationale de téléphonie (NITEL) (via la SFI pour les deux dernières).

81 Les autres " engagements " comportent notamment la mise en oeuvre d'un important programme de privatisations, l'élargissement de l'assiette fiscale, l'amélioration du recouvrement des recettes fiscales et douanières, la diminution des dépenses publiques et la réduction des emplois publics.

82 Seul le Pakistan est aujourd'hui suspendu (extrait du communiqué de presse final).

83 Abuja, 20 octobre 1999.

84 Abuja, 20 octobre 1999.

85 Washington, 27 octobre 1999.

86 Déclaration officielle du Pentagone : " Nous travaillerons et nous travaillons déjà avec les Nigérians afin d'établir une liste de besoins et pour définir les façons dont nous pouvons y répondre ".

87 On notera également la visite du président Obasanjo en Allemagne, les 16 et 17 décembre 1999. Le Chancelier Schröder a indiqué que l'Allemagne étudierait un rééchelonnement de la dette si le FMI accordait un nouveau crédit en janvier 2000.

L'Allemagne est le second pays importateur de produits nigérians et le troisième exportateur à destination du Nigeria, derrière les Etats-Unis et le Royaume-Uni.

88 Londres, 5 janvier 2000.

89 Abuja, 10 janvier 2000.

90 Remise en état de 3.100 sur 3.500 km de voies du réseau existant, infrastructures et matériel et étude prospective de 800 km de voies nouvelles, pour un montant de 530 millions de dollars (essentiellement décaissés sous forme de pétrole brut).

91 Certaines implantations remontent à 1948. La communauté chinoise présente sur le territoire nigérian est aujourd'hui évaluée à 4.000 personnes.

92 Cf. : Mondes rebelles - Guerres civiles et violences politiques (Michalon, 1999).

93 Cf. G. de Bellescize : " Le maintien de la paix en Afrique : la France et le programme RECAMP ", in Afrique contemporaine , 3 ème trimestre 1999.

94 " Si nous restons là, malgré les difficultés, c'est qu'on s'y retrouve "...

95 CGC, Géoservice, Eiffel, BOS, ETPM, Ponticelli, Technip, Dietsman, SMF-International, ETPM, Entrepose (via Delattre-Bezons) -tous deux filiales du Groupe Lyonnaise..

96 Qui peut servir, à la fois, de transport collectif, d'ambulance, de voiture de pompier...

97 Sans attendre nécessairement le " règlement d'arriérés " de toute façon inexistants, puisque l'AFD n'a jamais contracté concrètement aucun engagement avec le Nigeria.

98 La dette du Nigeria à l'égard de la France est estimée à 16,5 milliards de francs (hors intérêts de retard) -dont 14,1 milliards de francs sur accords de consolidation- sur un total de l'ordre de 35 milliards de francs.

99 Désormais exclue avec l'entrée du Nigeria dans la ZSP.

100 Projets en cours pour Compagnie Générale de Géophysique, Schlumberger, Total, Technip, Bouygues-Offshore, SPIE-Batignolles TP, Fougerolle.

101 Pour des raisons certes étroitement liées aux conditions locales de vie et de sécurité.

102 Organigramme de l'ambassade :

- Chancellerie diplomatique : Ambassadeur, 3 conseillers, 1 secrétaire d'ambassade, 1 stagiaire ENA, 3 secrétaires, 1 chauffeur.

- Permanence Abuja : 1 attaché de presse, 1 attaché commercial, 2 secrétaires.

- Mission militaire : 1 attaché de défense, 1 secrétaire.

- Service culturel, scientifique et de coopération : 1 conseiller, 1 attaché culturel, 1 " coordinatrice ", 3 secrétaires.

103 Un dispositif " léger " avait été mis en place en 1994, permettant l'instruction de plusieurs projets -clinique, tourisme, Peugeot-Nigeria, Crédit Lyonnais, Mobil-Nigeria. Ils n'ont fait l'objet d'aucune décision, la direction du Trésor s'étant opposée à toute implication de PROPARCO, compte tenu de l'évolution de la situation politique et économique. Cette décision n'a pas été revue depuis, semble-t-il.

M. Charles Josselin avait pourtant annoncé des interventions de l'AFD dans les secteurs de l'eau et de la santé, à l'occasion de la visite du président de la République, le 27 juillet 1999.

104 Ils sont actuellement 3.000.

105 Les Nigérians considèrent en outre que les Béninois " ont un mauvais accent "...

En tout état de cause, la question du " pécule de retour " n'a semble-t-il pas encore fait l'objet d'une solution satisfaisante. Initialement prévu sur FAC, son financement serait finalement imputé sur le budget des services de coopération du Bénin... qui, à juste titre, rechignent...

106 Y compris avec les universités technologiques de Compiègne et Valenciennes.

107 Le fichier britannique des anciens d'Oxford et Cambridge assure en permanence le suivi de près de 5.000 Nigérians de haut calibre...

108 L'ACCT, à l'initiative forte des Canadiens, a d'ores et déjà formulé des propositions pour appuyer le développement du français au Nigeria.

109 Alors que la contribution française aux instances francophones est particulièrement conséquente...

110 Enfin, il convient de souligner l'importance du symbole que constituerait la construction rapide de l'Ecole française et d'un centre culturel à Abuja.

111 La comparaison avec le Cameroun, dont la population est près de dix fois moins importante, est particulièrement éloquente...

112 Le nombre réduit des effectifs de coopération actuellement affectés au Nigeria et leur compétence encore neuve en matière de procédures FAC ne peut constituer un argument suffisant pour justifier un retard prolongé dans l'adoption des projets FAC...

113 L'eau constitue le secteur dans lequel la demande de l'expertise française a été la plus forte avec notamment la Lyonnaise (via ses filiales Lysa (assistance technique) et Degrémont (traitement).

BEC Frères a également mis sur pied un important projet d'irrigation (660 MF au total), financé initialement sur protocole Trésor, au Nord de Kano, que la délégation a pu visiter rapidement. La deuxième tranche est regrettablement interrompue, en raison, semble-t-il, de la cessation des paiements nigérians.

Un projet FAC pourrait être présenté courant 2000, comportant deux volets : l'appui à la constitution de bases de données générales sur l'eau (hydraulique, hydrogéologie) à l'Institut national des recherches en eaux (NWRI) d'une part, et l'élargissement de la formation des fermiers aux techniques de cultures sur périmètres irrigués (dans la suite du projet mis en oeuvre par BEC à Hadedja Valley) à la région Nord de Kano. Ce projet nécessiterait notamment la mise en place de deux assistants techniques.

114 Un projet FAC -présentable fin 2000- pourrait viser l'introduction d'un service de médecine d'urgence à Lagos. Il paraît également souhaitable de s'atteler rapidement à un programme de lutte contre la malaria et le SIDA (dans le cadre cette fois d'un programme d'intérêt général ou d'un programme inter-Etats).

115 La réflexion porte actuellement sur la préparation d'un projet FAC qui comporterait quatre composantes, destinée à familiariser les médias nigérians avec la production et les méthodes de travail françaises :

- formation des nigérians : cadres des radios et télévisions publiques et privées, journalistes et techniciens,

- soutien à l'instance de régulation nigériane (National Broadcasting Commission),

- appui à la structuration de l'industrie audiovisuelle, en particulier à la production audiovisuelle,

- formation des cadres et responsables de la presse écrite (on notera que la Commission Européenne vient d'initier un programme en ce sens, au titre du 8 ème FED).

116 Sans exclure cette fois la diffusion en langue " natale ". RFI est aujourd'hui la seule grande radio internationale africaine qui ne diffuse pas de programme en " haoussa ", alors que 60 millions de personnes parlent cette langue en Afrique, dont la totalité des Nigérians du Nord et beaucoup du Sud. Les programmes en haoussa de la BBC et de la Deutsche Welle bénéficient d'une large audience.

117 Grande-Bretagne : demande officielle le 28 octobre 1999 immédiatement suivie d'un accord de principe pour l'équipement et la formation des forces de police. Exercice militaire conjoint courant 2000.

Etats-Unis : entretien du Président Obasanjo à Washington le 28 octobre 1999 avec le secrétaire d'Etat à la Défence (W. Cohen) sur la formation des forces armées. Réponse positive du Pentagone.

118 Panhard (remotorisation des 155 AML), Puma (entretien des Super Puma), Sagaie (ERC 90), entretien des Alphajets et des C 160.

119 Equipement radar des aéroports, bâtiments à capacité de plageage, vedettes de type " Combattante ".

120 Chapitre 42-29, article 40 nouveau du budget de la Coopération.

121 Le concept RECAMP, mis au point par la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis, comporte, d'une part, un volet diplomatique, mais envisage également la constitution d'unités militaires en attente d'emplois dans différents pays en vue de missions de maintien ou de rétablissement de la paix.

122 Effectifs militaires 1997 - ( PNUD - Rapport 1999 ) :

-Nigeria : 77.000

- Tchad : 25.000

- Cameroun : 13.000

- Bénin : 5.000

- Niger : 5.000

Total Afrique subsaharienne : 93.400

123 Largement implantée au Nigeria, la grande criminalité recouvre l'ensemble des trafics possibles : stupéfiants sur grande échelle, blanchiment d'argent, abus de confiance et escroqueries financières et informatiques sophistiquées, mais également proxénétisme, trafic de main-d'oeuvre, trafic d'organes.

Le FBI a installé une antenne au Nigeria depuis 1997. Cf. l'appréciation portée dans CIA World Factbook 1999 : " Nigeria - " drogue " :

- facilite les trafics d'héroïne en provenance d'Asie du Sud-Est et du Sud-Ouest vers l'Europe occidentale et l'Amérique du Nord,

- de manière croissante, pays de transit pour la cocaïne en provenance d'Amérique du Sud à destination des marchés d'Europe, Asie orientale et Amérique du Nord ".


124 " On savait que l'arrivée des civils aggraverait la situation " a-t-il été dit -à plusieurs reprises et sous différentes formes- à la délégation sénatoriale, à propos de la dégradation de la sécurité dans le delta.

125 Important homme d'affaires yorouba, chef du gouvernement civil intérimaire mis en place après la démission du général Babangida d'août à novembre 1993. A dû ensuite remettre le pouvoir au général Abacha.

126 " Vision 2010 " a tracé, en 1998, les grandes lignes d'un Nigeria modernisé cinquante ans après l'indépendance. L'exercice a concerné l'ensemble des secteurs et rassemblé, autour de l'élite du pays, une dizaine d'hommes d'affaires français.

127 Aujourd'hui nouveau Président du Sénat, à la suite de la démission de M. Ewan Enwerem.

128 Economiste réputé, très introduit dans les milieux pétroliers.

129 Ecoles d'entreprises.





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