A l’invitation de Mme Françoise Laborde, Présidente du groupe interparlementaire d’amitié France-Irlande, un petit déjeuner de travail a réuni, le 19 février 2014, au Sénat, les membres du groupe interparlementaire autour de Son Exc. Rory Montgomery, Ambassadeur de la République d’Irlande à Paris.

En préambule, Mme Françoise Laborde l’a remercié d’avoir répondu favorablement à cette invitation et a rappelé les faits marquants des relations franco-irlandaises durant l’année écoulée, soulignant notamment le succès de la République d’Irlande dans la conduite des affaires européennes durant sa présidence au premier semestre 2013, avec l’ouverture des négociations sur l’Union bancaire qui demeure un chantier essentiel.

Elle a également souhaité que cette réunion amicale soit l’occasion d’un large échange de vues sur la situation politique, économique sociale et culturelle de l’Irlande.

En réponse à ce mot d’accueil, M. Rory Montgomery a mis en avant plusieurs points.

Concernant la situation économique irlandaise, il a précisé que son pays abordait une phase de reprise, le retour de l’Irlande sur les marchés financiers obligataires internationaux étant un gage de succès. Avec une croissance attendue en 2014, de 2%, un taux de placement obligataire international de moins de 4%, la nette diminution de la dette publique et une régression du taux de chômage de trois points en deux ans, l’Irlande a repris sur le chemin de la réussite.

Il a concédé que la persistance d’un taux élevé de chômage (12% de la population active en 2013) touchant principalement les jeunes malgré une création nette de 58 000 emplois durant l’année écoulée, et un endettement très important des ménages irlandais demeuraient  un handicap pour son pays. Il a également indiqué que la restructuration des dettes privées par les banques nationales devrait permettre une amélioration de la situation des ménages irlandais. Il a ajouté que la forte natalité irlandaise durant ces dernières décennies constituait un élément structurant des difficultés du marché du travail.

Revenant sur la Conférence donnée le 7 février dernier, devant l’OCDE, à Paris par MM. Edna Kenny, Premier ministre (Taoiseach) et son Vice-premier ministre, Eamon Gilmore (Tánaiste), M. Rory Montgomery, a précisé que son pays attend beaucoup de l’avis des experts de cette institution en matière de réformes du marché du travail  et d’organisation des structures scolaires. Il a aussi rappelé que l’année 2013 avait été une année record pour l’agence irlandaise de promotion en faveur des investissements d’entreprises étrangères dans son pays, que la France constituait le 3ème marché pour les entreprises irlandaises (hors multinationales) et que l’Irlande demeurait une destination prisée des touristes français.

M. Rory Montgomery, a ensuite évoqué différents projets relatifs aux  relations franco-irlandaises. Il a indiqué que l’Irlande serait l’invité d’honneur du « Festival Interceltique de Lorient » en 2014, soulignant au passage les relations amicales nouées entre le Président de la République irlandaise (ancien maire de Cork) et de le ministre de la Défense français (ancien maire de Lorient). Il a également évoqué les commémorations du centenaire de la première guerre mondiale dont l’évocation demeure difficile dans son pays (200 000 Irlandais furent enrôlés dans des régiments britanniques ou du Commonwealth et près de 40 000 périrent entre 1914 et 1918), dans le contexte politique du « Home Rule » et des tentations indépendantistes depuis les débuts du XXème siècle.

A la suite de cette intervention, un large échange de vues s’est déroulé.

A la question de M. Eric Bocquet, concernant l’état des relations politique entre la République d’Irlande et la province britannique d’Irlande du Nord, M. Rory Montgomery a assuré que depuis près de sept ans et la mise en œuvre définitive des accords du « Vendredi saint », l’Exécutif en Irlande du  Nord fonctionnait. Selon lui, la phase de normalisation est bien engagée malgré quelques attentats des milieux extrémistes. La partition de l’Irlande n’est plus conflictuelle. L’union ne pourra provenir que d’un référendum nord-irlandais. Actuellement, on assiste à un rééquilibrage confessionnel au sein de la population de l’Ulster en faveur des catholiques. Cependant, pour une partie de la population catholique de ce comté, les préoccupations économiques prennent le pas sur la volonté de réunification.

M. Rory Montgomery a indiqué que la première visite d’État du Président de la République irlandaise au Royaume-Uni, prévue en avril prochain, constituait un évènement historique majeur, comparable à celle effectué par la reine Élisabeth II à Dublin, il y a deux ans. Les Irlandais du Sud comme du Nord, conçoivent maintenant des projets économiques communs transfrontaliers.

Revenant sur la situation économique, M. Jean-Pierre Vial a souhaité savoir si l’Irlande demeurait toujours en pointe dans le domaine du numérique , longtemps considéré comme le moteur de développement du « Tigre celtique ».

M. Rory Montgomery a confirmé que son pays demeurait une terre d’accueil pour les sociétés nord-américaines mais également européennes de ce secteur.

Sur la fiscalité des entreprises, il a  affirmé, reprenant les propos du Premier ministre irlandais, que son pays est une « terre d’accueil » et non un « paradis fiscal » pour les entreprises. Il a précisé que si le taux nominal d’imposition des entreprises est unique en Irlande (12,5%), ce taux est un taux réel alors que, dans un certain nombre de pays d’Europe (dont la France) le taux effectif d’imposition des entreprises est beaucoup plus bas que le taux nominal du fait de règles fiscales complexes. Quant à la question de la fiscalité appliqué au le secteur numérique, il a plaidé pour une réflexion européenne voire mondiale sur ce sujet, espérant que la prochaine publication des recommandations de l’OCDE en ce domaine permette une avancée conséquente.

M. Rory Montgomery a également souligné les efforts de son gouvernement dans la lutte contre les fraudes à la TVA, ainsi que les difficultés de son pays face aux procédés d’optimisation fiscale des multinationales nord-américaines. Il a jugé le système fiscal américain « archaïque » en matière d’imposition des bénéfices réalisés par les entreprises hors du territoire national. A ce propos, M. Eric Bocquet a signalé la persistance de « paradis fiscaux » à l’intérieur même des États-Unis d’Amérique, comme l’État du Delaware.

A la demande des membres du groupe interparlementaire, M. Rory Montgomery a annoncé qu’il communiquera le dernier rapport de son gouvernement sur sa stratégie fiscale internationale.

M. Philippe Madrelle a ensuite évoqué les liens historiques unissant l’Irlande à certaines régions françaises comme le Bordelais.

Répondant à Mme Françoise Laborde qui s’est inquiétée de la situation intérieure de l’Irlande à l’issue de la tempête qui a touché non seulement  ce pays mais également le Royaume-Uni et la Bretagne, M. Rory Montgomery a indiqué que la partie sud de l’île avait été profondément éproouvée (des milliers de foyers ont été privés d’électricité principalement dans la région de Cork).

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