À l’invitation de son président M. Jean-Pierre Plancade (RDSE – Haute-Garonne), le groupe interparlementaire d’amitié France-Israël a reçu au cours d’un petit déjeuner, organisé le 14 novembre, Maître Charles Meyer, avocat, auteur en 2011 de "Réfugiés palestiniens, otages de la diplomatie", ouvrage préfacé par M. Boutros Boutros-Ghali et qui a effectué une analyse de la jurisprudence de la Cour suprême d’Israël. Ont également participé à ces échanges M. Christian Poncelet (UMP – Vosges), Président d’honneur du groupe d’amitié, ainsi que MM. Jean-François Humbert (UMP – Doubs), Jean-Claude Requier (RDSE – Lot) et François Trucy (UMP – Var).

Placée au sommet du système judiciaire israélien, la Cour suprême intervient à la fois en tant que cour d’appel des décisions prises par les tribunaux de district et en tant que haute cour de justice, pour assurer le contrôle des décisions prises par le gouvernement et la protection des droits fondamentaux. A ce titre, tout justiciable, y compris les Palestiniens vivant en Cisjordanie et à Gaza, peut saisir la haute instance, ou Bagatz.

Israël ne dispose pas à proprement parler de constitution écrite mais de plusieurs lois fondamentales qui régissent l’organisation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire. Les traités internationaux ratifiés par le pays, notamment la IVe convention de Genève du 12 août 1949, ne sont pas intégrés en droit interne mais la Cour suprême applique leur contenu dans ses arrêts. A titre d’exemple, au moment de combats intervenus dans la bande de Gaza, elle a admis l’application des principes fondamentaux concernant l’occupation dans cette portion du territoire.

La jurisprudence de la Cour suprême d’Israël peut être lue au regard de la tension qui existe entre deux principes, parfois contradictoires, mais auxquels est accordée une valeur équivalente : la protection des droits des personnes d’un côté, la sécurité de l’État de l’autre. Si Israël est en situation de guerre depuis sa création, le juge a pour mission d’y assurer le respect du droit et la régulation du pouvoir exécutif. Aaron Barak, président de la Cour suprême entre 1995 et 2006, a résumé de la façon suivante la situation particulière dans laquelle sont placés les juges : « nous, juges dans les démocraties modernes, avons la responsabilité de protéger les démocraties, à la fois contre le terrorisme et contre les moyens que l’État entend utiliser contre le terrorisme ».

Ainsi, sans juger illégale la construction du mur de sécurité, la haute juridiction a enjoint à plusieurs reprises le gouvernement israélien d’en modifier le tracé. Concernant la pratique des assassinats ciblés, elle a fait application d’un principe de proportionnalité. Leur conformité ou non avec les principes fixés par le droit international ne peut être définie a priori. La Cour se réserve le droit d’évaluer si les moyens mis en œuvre peuvent être considérés comme adaptés au regard de la poursuite d’un but qu’elle estime légitime.

Certaines de ses décisions concernent également les conditions d’exercice de la liberté d’expression en Israël. La Cour suprême s’est ainsi prononcée sur un documentaire relatif aux combats intervenus en avril 2002, dont la diffusion avait été interdite par la commission de censure israélienne. Tout en soulignant que « le film heurte les sensibilités d’un large secteur du public israélien », la haute juridiction a levé la censure, estimant que « quelle que soit l’ampleur de l’atteinte à la sensibilité, c’est le prix à payer pour le respect du droit à la libre expression dans une société démocratique ».

Juridiction originale car amenée à se prononcer sur les décisions d’un État démocratique en situation de guerre continue, la Cour suprême d’Israël a affirmé, à la fois l’étendue de son champ de compétence et sa volonté de parvenir à un équilibre dans l’application de deux principes fondamentaux que sont la protection des libertés individuelles et le maintien de la sécurité.

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