EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Chaque année, la pratique de la chasse à courre donne lieu à des conflits d'usage et à des tensions avec les riverains chez lesquels les grands animaux viennent se réfugier. L'occupation des routes et des chemins forestiers par les équipages provoque également des différends sérieux avec les promeneur.euse.s et les automobilistes.

La population et l'opinion acceptent de plus en plus mal cette pratique. Depuis le dépôt initial de cette proposition de loi, les conflits se sont multipliés. À Compiègne, dès le premier jour de l'ouverture de la chasse à courre, un cerf s'est réfugié dans un chantier de la ville, mobilisant les forces de gendarmerie. En Indre-et-Loire, une meute de chiens hors de contrôle s'est introduite dans un élevage et a dévoré un lama.

L'interdiction de la chasse à courre a déjà fait l'objet d'une proposition de loi déposé en 2005 par quinze député.e.s de l'UMP à l'Assemblée nationale, avant que des député.e.s du groupe écologiste ne se saisissent du sujet en 2013. Elle fait partie des demandes du référendum pour les animaux, porté par 141 parlementaires.

Si la chasse à courre est désormais interdite dans des pays voisins, elle continue cependant de se pratiquer en France dans 67 départements.

Après l'Allemagne il y a environ 50 ans, la Belgique en 1995, l'Écosse en 2002, l'Angleterre et le Pays de Galles ont interdit en 2005 la chasse à courre sur leur territoire. En France, cette pratique d'un autre temps (abolie à la Révolution et rétablie par Napoléon) est toujours autorisée du 15 septembre au 31 mars chaque année.

La chasse à courre permet à quelques 450 équipages (10 000 pratiquants, 17 000 chiens et 7 000 chevaux) d'aller chasser le cerf, le chevreuil, le sanglier ou, plus modestement, le renard, le lièvre ou le lapin. À titre comparatif, 1,2 millions de permis de chasse sont validés chaque année.

La chasse à courre ne participe pas à la régulation des espèces : le nombre des bêtes tuées par chasse à courre est infime par rapport au nombre d'animaux abattus dans une saison de chasse. Ce n'est pas tant la quantité des animaux tués qui heurte que la manière dont ils sont chassés.

Outre sa grande brutalité envers les animaux poursuivis, la chasse à courre n'est pas une activité sans conséquence sur le reste de la faune, qu'elle perturbe. Elle porte atteinte aux populations de cervidés, car la recherche du beau trophée conduit à chasser les meilleurs reproducteurs potentiels.

En France, la chasse à courre ne répond donc pas à des nécessités écologiques car elle ne remplace pas l'action des prédateurs qui eux chassent pour se nourrir et attaquent de préférence des animaux malades et déficients. Elle est de surcroît particulièrement néfaste au moment du brame et perturbe gravement l'équilibre de la forêt : sonneries de trompes, allées et venues des équipages, des chiens, des véhicules.

Elle ne répond pas davantage à des traditions populaires ancestrales. Désapprouvée même par de nombreux autres chasseurs, elle n'est qu'un jeu barbare pratiqué par quelques initié.e.s. En matière de souffrance animale, elle génère des douleurs pour l'animal poursuivi. Les examens biochimiques effectués sur des échantillons de muscle et de sang de cerfs victimes sont caractéristiques d'un grand stress et de souffrances spécifiques.

Pourtant, leur nombre est en constante augmentation. Non pas que ce « sport » se soit démocratisé ! Cette pratique étant à présent interdite dans de nombreux pays voisins, c'est en France que les équipages européens viennent pratiquer la chasse à courre.

Il est plus que temps que notre pays se dote d'une législation qui mette fin à la chasse à courre, assortie d'un plan de réhabilitation concertée des chiens, visant à éviter les abandons ou l'euthanasie. C'est l'objet de cette proposition de loi.

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