EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Force est de reconnaître aujourd'hui qu'après vingt années d'application, l'article 55 de la loi SRU apparaît en fait totalement inadapté à son objectif initial, parfaitement louable, de loger les Français dans des conditions décentes quel que soit leur niveau de ressources. Cette disposition législative a notamment confondu l'objectif de construction et l'objectif de diversité sociale, qui ne repose pas sur les bons outils. Imposer un seuil de logements sociaux par commune n'est pas la seule manière de garantir la mixité sociale, loin de là.

Si la politique du logement constitue une part importante du dispositif de lutte contre les injustices et de la promotion de la mixité sociale, elle ne peut intervenir qu'en parallèle d'un aménagement du territoire réfléchi à travers notamment les documents de planification urbaine.

De surcroît, faire porter sur le contribuable d'aujourd'hui à travers une sanction financière appliquée à la commune coupable d'un retard accumulé durant plusieurs décennies est quelque peu inconvenant, voire irresponsable. Dans le contexte financier d'austérité auquel les collectivités sont déjà confrontées depuis de nombreuses années (Baisse continue des dotations de l'État, augmentation des charges sans compensation...), les prélèvements liés à l'application de l'article 55 la loi SRU contractent de plus en plus les budgets communaux. Certaines communes exsangues, n'arrivant plus à faire face aux obligations de cette loi, n'ont d'autres alternatives que d'augmenter les impôts locaux, ou de baisser le niveau d'autofinancement des investissements ou encore de réduire leur offre de services publics de proximité pour honorer ce prélèvement.

La problématique du logement en France doit-elle se résumer à une équation mathématique, appliquée de manière brutale sans tenir compte du contexte de chaque commune carencée ou déficitaire ?

Cette proposition de loi vise donc à refondre le dispositif de l'article 55 de la loi SRU afin d'opter pour un système plus pragmatique, plus local et plus juste pour les communes.

L'article premier de ce nouveau dispositif propose donc la signature d'un contrat de mixité sociale entre le représentant de l'État dans le département, le maire de la commune et, s'il y a lieu, le président de l'établissement public de coopération intercommunale.

Ce contrat fixe un objectif de production de logements sociaux locatifs sur une durée en cohérence avec celle du Programme local de l'habitat et en fonction de la demande, des capacités de la commune, des contraintes urbanistiques et du foncier disponible. Ce contrat peut également inclure le parcours résidentiel en intégrant des objectifs d'accession sociale à la propriété et à travers notamment le bail réel solidaire.

L'évaluation du respect des objectifs de ce contrat sera effectuée par une commission locale présidée par le représentant de l'État dans le département et composée du maire de la commune concernée , du président de l'EPCI s'il y a lieu, des représentants des bailleurs sociaux et des associations d'insertion ou de logement des personnes défavorisées oeuvrant sur le territoire communal.

Cette évaluation suivra une logique de flux et non de stock . La carence ou le déficit de la commune seront évalués au regard de l'objectif visé dans le cadre du contrat et en fonction du nombre de logements produits à travers les permis d'aménager ou de construire délivrés par la commune sur l'année N-1 en tenant compte de certaines contraintes exogènes. Il s'agit là d'un critère de justice visant à ne pas faire peser sur la gouvernance communale actuelle l'historique de la commune en la matière.

De la même manière, si le représentant de l'État dans le département prononce la carence de la commune après délibération et avis de cette commission, le calcul des pénalités reposera sur le flux à savoir la multiplication de 25% du potentiel fiscal par habitant par la différence entre le nombre de logements à produire sur la période du contrat de mixité sociale et le nombre de logements sociaux produits sur la même période.

Le montant des pénalités sera reversé à l'EPCI signataire du contrat tripartite pour que cette somme soit réservée comme fonds de soutien pour les communes de l'EPCI qui produisent des logements sociaux. Si l'EPCI auquel appartient la commune carencée ne dispose d'aucune compétence en matière de politique locale de l'habitat, le montant des pénalités est alors reversé au fonds national des aides à la pierre (mentionné à l'article L. 435-1 du code de la construction et de l'habitation).

L'article 2 est un article de coordination.

L'article 3 donne au maire de la commune sur laquelle se situent des logements réservés et au Préfet de département la maîtrise de l'ensemble des contingents réservataires afin que le maire de la commune puisse maîtriser la politique de peuplement et privilégier la demande locale.

Dans un contexte de crise marqué par l'augmentation du risque des expulsions locatives, il est urgent et nécessaire d'engager une réforme du dispositif de l'article 55 de la loi SRU qui a démontré son insuffisance à la fois en termes de mixité sociale et en termes de construction de logements sociaux.

Tels sont, Mesdames et Messieurs, les motifs de la proposition de loi qui vous est soumise.

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