EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L'antisémitisme recouvre, de nos jours, une réalité à la fois nouvelle et résurgente.

Nouvelle dans sa forme.

Notre société est de plus en plus confrontée à des actes antisémites qui s'en prennent aux individus pour les tuer : de l'attaque de jeunes enfants de l'école Ozar Hatorah de Toulouse par Mohammed Merah à la prise en otage et à l'assassinat de quatre concitoyens de confession juive à l'Hyper Casher de la porte de Vincennes par Amedy Coulibaly, leur rythme s'intensifie.

Résurgente dans son ampleur.

En 2019, pas moins de 687 faits antisémites ont été comptabilisés par les services de police. Ce chiffre représente une hausse de 27% par rapport à 2018, qui fait elle-même suite au bond de 74% enregistré en 2018 par rapport à 2017.

D'après une étude de l'IFOP conduite en 2020, sept Français de confession juive sur dix disent par ailleurs avoir déjà été victimes d'un acte antisémite.

Dans son livre Comment on a laissé l'islamisme pénétrer l'école , Jean-Pierre Obin souligne également qu'en quinze ans, plus des deux tiers des 100 000 élèves juifs de notre pays ont été déscolarisés de l'enseignement public au profit d'établissements privés.

Ces chiffres et ces faits alarmants doivent collectivement nous interpeller et nous faire réagir face à ce qui n'est pas une opinion mais un délit pénal.

Pour contrer cette mutation et ce regain de l'antisémitisme, la réponse apportée par les pouvoirs publics dans leur ensemble doit évoluer. Ce travail commence, en premier lieu, par la nécessité de caractériser le plus précisément possible ce qu'est l'antisémitisme contemporain.

En effet, « mal nommer un objet, c'est ajouter au malheur de ce monde » écrivait Camus en 1944, s'inspirant lui-même de Socrate dans le Phédon : « une expression vicieuse ne détonne pas uniquement par rapport à cela même qu'elle exprime, mais cause encore du mal dans les âmes ».

La définition, non contraignante, de l'antisémitisme fixée par l'Alliance internationale pour la mémoire de l'Holocauste (IHRA), adoptée le 26 mars 2016 par ses 31 Etats membres, dont la France, apporte à ce titre le cadre le plus adéquat en précisant que « l'antisémitisme est une certaine perception des Juifs qui peut se manifester par une haine à leur égard. Les manifestations rhétoriques et physiques de l'antisémitisme visent des individus juifs ou non et/ou leurs biens, des institutions communautaires et des lieux de culte ».

Elle permet notamment de mieux prendre en compte la dimension antisémite de certaines attaques à l'encontre d'Israël tout en n'empiétant pas sur la liberté d'expression, l'IHRA précisant sans ambigüité que « une critique d'Israël similaire à celle portée contre n'importe quel autre pays ne peut être vue comme antisémite ».

Se référer à cette définition, c'est répondre à une exigence philosophique dont l'objet est de nourrir une réflexion collective face à l'augmentation des actes d'antisémitisme que connaît notre pays. C'est aussi se doter d'un instrument supplémentaire en matière de prévention, d'éducation, de formation et de répression pour mieux lutter contre l'antisémitisme.

Tel est le sens de la présente proposition de résolution.

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