N° 222

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001

Annexe au procès-verbal de la séance du 8 février 2001

PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

portant reconnaissance du principe de sécurité juridique dans la Constitution ,

PRÉSENTÉE

par M. Jean-Claude CARLE,

Sénateur.

(Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).

Constitution

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La confiance dans les lois et le respect de la parole de l'Etat sont essentiels au bon fonctionnement de la démocratie. De même que l'économie a besoin de règles stables pour se développer, de même chaque citoyen doit pouvoir connaître ses droits et obligations.

La sécurité juridique qui suppose le caractère prévisible, lisible et accessible des lois et réglementations, n'est pas garantie en droit français. En vertu de l'intangibilité des effets individuels des actes créateurs de droit, et de la non-rétroactivité des actes administratifs, les droits acquis sont intangibles pour le passé. En revanche, ni le législateur ni l'administration ne sont liés pour l'avenir par les normes qu'ils édictent.

Méconnaissant le principe selon lequel « Nul n'est censé ignorer la loi », le recours fréquent à des dispositions rétroactives et les nombreux revirements de jurisprudence ont fait naître un sentiment d'insécurité juridique chez nos concitoyens, particulièrement dans le domaine de la fiscalité.

Il convient donc de faire évoluer le droit pour favoriser des relations plus transparentes et plus confiantes entre le citoyen et l'Etat, à l'exemple des pays européens où s'applique le principe de sécurité publique.

Ce principe, consacré par la Cour de justice des communautés européennes (C.J.C.E.), exige que toute situation de fait soit normalement, et sauf indication contraire, appréciée à la lumière des règles de droit qui lui sont contemporaines. La réglementation doit être claire et précise pour que l'administré puisse connaître sans ambiguïté ses droits et obligations et prendre ses dispositions en conséquence.

La sécurité juridique a pour corollaire la non-rétroactivité des actes communautaires et la confiance légitime des citoyens dans la stabilité de la situation créée par un acte juridique.

La C.J.C.E., mais aussi le Conseil constitutionnel, ont posé l'obligation pour les Etats membres et leurs juridictions de respecter les principes généraux du droit communautaire. A ce titre, le principe de sécurité juridique est de plus en plus souvent invoqué par les requérants devant les juridictions françaises. Mais, à de rares exceptions, le juge hésite à se référer à ce principe pour dire le droit, bien qu'il s'impose à notre pays.

Reconnaître au principe de sécurité juridique une valeur constitutionnelle permettrait de clarifier cette situation et de garantir une meilleure protection pour le citoyen.

Tel est l'objet de la présente proposition de loi constitutionnelle que nous vous demandons de bien vouloir adopter.

PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

Article unique

Avant le premier alinéa de l'article 34 de la Constitution, sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« - La loi doit être certaine et son application prévisible par les citoyens.

«  La loi ne dispose que pour l'avenir. Elle ne peut avoir d'effet rétroactif que lorsque, à titre exceptionnel, le but à atteindre l'exige, et lorsque la confiance légitime des citoyens est dûment respectée. »

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