N° 173

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2006-2007

Annexe au procès-verbal de la séance du 23 janvier 2007

PROPOSITION DE LOI

tendant à préciser certaines modalités de contrôle des financements politiques et des campagnes électorales,

PRÉSENTÉE

Par M. Jean Louis MASSON,

Sénateur.

(Renvoyée à la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement).

Élections et référendums.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Depuis 1988, plusieurs dispositions législatives et réglementaires ont clarifié le contrôle du financement de la vie publique tant pour les campagnes électorales que pour les ressources des partis politiques. Cependant, des ajustements restent nécessaires comme l'a encore souligné le 9 ème rapport d'activité (2005-2006) de la Commission Nationale des Comptes de Campagne et des Financements Politiques (CNCCFP). En outre dans des cas ponctuels, il peut y avoir un véritable vide juridique auquel il convient également de remédier.

I - Les mandataires financiers des partis politiques

Le 9 ème rapport d'activité de la CNCCFP souligne que les partis politiques peuvent avoir comme mandataire financier chargé de la collecte des dons et cotisations, soit un mandataire personne physique, soit une association de financement. Si dans un but de simplicité, le recours à un mandataire personne physique est compréhensible pour les campagnes électorales, ce n'est pas le cas pour les partis politiques qui ont eux, une existence continue dans la durée.

Lorsque le parti politique a une association de financement comme mandataire financier, celle-ci doit être agréée au préalable par la CNCCFP, laquelle vérifie que toutes les prescriptions légales et les obligations réglementaires sont respectées. De plus, lorsqu'en raison d'une irrégularité la CNCCFP retire l'agrément à l'association de financement, cela entraîne automatiquement la suppression du versement des aides publiques de l'Etat au parti en cause et de tous les dégrèvements fiscaux au profit des donateurs.

Au contraire, lorsqu'un parti politique désigne un mandataire financier, personne physique, il lui suffit de faire une déclaration à la Préfecture. Il n'y a alors aucune nécessité d'agrément préalable et donc aucun contrôle. De même en cas d'irrégularité, les mesures coercitives a posteriori sont quasiment inexistantes. La CNCCFP note ainsi dans son 9 ème rapport : « En l'absence d'agrément du mandataire financier, personne physique, il ne peut a fortiori y avoir de retrait d'agrément à son égard. Par conséquent, en matière de sanction à prendre à l'égard du mandataire financier, personne physique, la commission se trouve face à un vide juridique lorsqu'elle constate des manquements aux articles 11-1 à 11-4 de la loi du 11 mars 1988 modifiée » .

II - Le contrôle par les commissaires aux comptes

Le contrôle des financements politiques s'applique de la même façon tant aux grands partis dont l'importance est tentaculaire (UMP, PS...) qu'aux petits partis politiques n'ayant qu'une action locale parfois même épisodique. De ce fait, les modalités du contrôle sont parfois disproportionnées pour les petits partis (en 2004, 35 % des partis enregistrés par la CNCCFP avaient moins de 10 000 euros de recettes).

Ainsi, chaque parti doit faire viser annuellement ses comptes par deux commissaires aux comptes. Une telle disposition est tout à fait légitime dans le cas de grands partis nationaux car le contrôle porte alors sur de nombreuses et complexes opérations de consolidation correspondant au périmètre étendu des organismes satellites et des organisations territoriales spécialisées. Au contraire pour les petits partis politiques, l'exigence de deux commissaires aux comptes distincts n'apporte strictement rien.

Cependant, pour ces petits partis, les frais de commissaire aux comptes finissent par absorber une fraction non négligeable de leur modeste budget. C'est d'ailleurs ce qui les amène parfois à ne pas déposer leurs comptes ou à les déposer sans certification par deux commissaires aux comptes. Répondant en conséquence à une demande formulée à de nombreuses reprises par le passé, le 9 ème rapport de la CNCCFP suggère que le visa d'un seul commissaire aux comptes soit suffisant dans le cas des petits partis politiques.

III - La période de référence des dépenses pour les élections sénatoriales

Jusqu'en 2000, le financement des campagnes pour les élections sénatoriales n'était l'objet d'aucune réglementation. C'est la loi n° 2000-641 du 10 juillet 2000 qui leur a étendu une partie de l'article L. 52-8 du code électoral. Introduit à cette occasion, l'article L. 308-1 de ce code comporte toutefois un vide juridique important.

En effet, pour les autres élections dont le financement des campagnes est soumis à réglementation, l'article L. 52-4 du code électoral précise que la période de référence est l'année précédant le premier jour du mois de l'élection. Faute d'indication pour les élections sénatoriales, l'imprécision des textes et l'absence de jurisprudence sont donc à l'origine d'une véritable insécurité juridique. Trois solutions sont envisageables :


• La première considère que la période de référence est illimitée et s'étend même à plusieurs années avant les élections. Elle correspond à un avis officieux du service juridique du Conseil constitutionnel et c'est aussi le sens d'une réponse du ministre de l'Intérieur (question écrite n° 13429 de M. Jean Louis MASSON, J.O. Sénat du 3 février 2005).


• La deuxième solution serait d'appliquer aux élections sénatoriales, la période d'un an fixée par l'article L. 52-4 du code électoral pour les autres élections. Elle semble exclue car si tel avait été le cas, la loi du 10 juillet 2000 l'aurait indiqué.


• Une troisième solution semble mieux adaptée à la spécificité des élections sénatoriales. Elle consiste à s'aligner sur la période de campagne officielle pour les élections sénatoriales qui est fixée par l'article L. 306 du code électoral.

La présente proposition de loi tend donc :

- à ce que le mandataire financier des partis politiques soit obligatoirement une association de financement ;

- à ce que les petits partis politiques ayant des recettes annuelles inférieures à 500 000 € puissent ne faire viser leur compte que par un seul commissaire aux comptes ;

- à ce que la période de contrôle des dépenses de campagne pour les élections sénatoriales soit fixée en coïncidence avec la période de campagne électorale correspondant à l'article L. 306 du code électoral.

PROPOSITION DE LOI

Article 1 er

La loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique est ainsi modifiée :

I. - L'article 11 est ainsi rédigé :

« Art. 11. - Les partis politiques recueillent des fonds par l'intermédiaire d'une association de financement désignée par eux ».

II. - L'article 11-2 est abrogé.

III. - L'article 11-3 est ainsi modifié :

1° Dans la deuxième phrase, les mots : « mettre fin aux fonctions du mandataire financier ou » sont supprimés ;

2° Dans la troisième phrase, les mots : « désigne un nouveau mandataire financier ou » sont supprimés ;

3° Dans la quatrième phrase, les mots : « ou chaque mandataire financier, sauf le cas de décès de ce dernier, » sont supprimés.

IV. - L'article 11-4 est ainsi modifié :

1° Dans le premier alinéa, les mots : « ou à un ou plusieurs mandataires financiers » sont supprimés ;

2° Dans le deuxième alinéa, les mots : « ou à leurs mandataires financiers » sont supprimés ;

3° Dans le troisième alinéa, les mots : « ou le mandataire financier » sont supprimés ;

4° Dans le quatrième alinéa, les mots : « ou à un mandataire financier » sont supprimés ;

5° Dans le cinquième alinéa, les mots : « ou aucun mandataire financier » sont supprimés ;

6° Dans le dernier alinéa, les mots : « ou du mandataire financier » et les mots : « ou le nom du mandataire et la date de déclaration à la préfecture » sont supprimés.

V. - Dans la première phrase de l'article L. 11-8, les mots : « ou qui a désigné un mandataire financier » et les mots : « ou de ce mandataire » sont supprimés.

Article 2

Le début du second alinéa de l'article 11-7 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 est ainsi rédigé :

« Les comptes de ces partis ou groupements sont arrêtés chaque année. Ils sont certifiés par deux commissaires aux comptes lorsque le total des dons et cotisations encaissés au cours de l'année est supérieur à 500 000 euros et par un commissaire aux comptes dans le cas contraire. Ils sont déposés dans le premier semestre de l'année suivant celle de l'exercice...(le reste sans changement) ».

Article 3

La fin de l'article L. 308-1 du code électoral est ainsi rédigée :

« ... s'appliquent aux candidats aux élections sénatoriales pendant la période de campagne prévue par l'article L. 306 ».

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